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2385. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Malherbe »

Comme, après avoir jeté les yeux sur tous les défauts de la France, il a reconnu qu’il ne s’y pouvait remédier que par le rétablissement du commerce, il s’est résolu, sous l’autorité du roi, d’y travailler à bon escient et, par l’entretenement d’un suffisant nombre de vaisseaux, rendre les armes de Sa Majesté redoutables aux lieux où le nom de ses prédécesseurs a bien à peine été connu.

2386. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quatorzième. »

S’il est vrai que ce caractère lui a donné dans notre nation une gloire plus aimable que celle de ses contemporains, à cause de toutes ses complaisances pour notre sens propre, on verra tout à l’heure qu’il l’a jeté dans des erreurs pour lesquelles l’esprit de liberté même doit le désavouer.

2387. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre cinquième. Le réalisme. — Le trivialisme et les moyens d’y échapper. »

Il y a en toute émotion profonde quelque chose de crépusculaire, un voile jeté sur une partie de la réalité : la vue nette et objective du monde est ainsi incompatible avec la vue passionnée, toujours partielle, infidèle et, pour certains tempéraments, tout à fait idéaliste : la passion produit psychologiquement le même phénomène que l’abstraction ; elle enlève d’un côté l’intensité d’émotion et de couleur qu’elle reporte de l’autre.

2388. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre II. De la reconnaissance des images. La mémoire et le cerveau »

Supposons en effet que les mouvements renoncent à leur fin pratique, et que l’activité motrice, au lieu de continuer la perception par des réactions utiles, rebrousse chemin pour en dessiner les traits saillants : alors les images analogues à la perception présente, images dont ces mouvements auront déjà jeté la forme, viendront régulièrement et non plus accidentellement se couler dans ce moule, quittes, il est vrai, à abandonner beaucoup de leurs détails pour s’en faciliter l’entrée.

2389. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [1] Rapport pp. -218

Presque tous, épris d’un joli idéal et pour qui les Dames étaient les Muses, furent aimables malgré l’excès de la recherche, et tendres en dépit de la fadeur ; plusieurs jetèrent des cris acerbes, souvent haineux, généreux parfois ; Bertrand de Born claironna fortement des sirventes guerriers ; mais, à considérer leur œuvre dans son ensemble, soit qu’ils aient obéi à des influences temporelles et climatériques, soit qu’ils n’aient pu triompher de leur langue féminisée de syllabes fluides et puérilisée de diminutifs, ils ne nous ont guère laissé que d’assez douceâtres poèmes, d’où l’allégorie dans les sujets, l’afféterie dans le sentiment, le maniérisme dans la forme, en un mot la continuité bientôt insupportable de la galanterie et une banale virtuosité technique excluent l’émotion vraie, le rêve hautain, tout idéal grandiose ; et, chez eux, l’amour même, l’amour qui est leur seule raison d’être et de chanter ; est soumis à des règles que le chevalier Brito rapporta de la forêt féerique, règles aussi étroites que celles des cansòs et des sirventes. […] Jette-toi à ces plaisants épigrammes, à l’imitation d’un Martial, distille avec un style coulant et non scabreux ces pitoyables élégies, à l’exemple d’un Ovide, d’un Tibulle et d’un Properce, y entremêlant quelquefois de ces fables anciennes, non petit ornement de poésie. […] Dramaturge, il a jeté sur la scène, par la bouche de Frédéric Lemaître, un formidable éclat de rire, et il y a Tragaldabas comme il y a Panurge ; il hasarda Les Funérailles de l’honneur, drame énorme et plein de défi à tout le métier d’alors, drame si précis cependant, et si logique, et si net, — car Auguste Vacquerie fut, pourrait-on dire, le classique du Romantisme, — et pour la défense duquel mes amis et moi (car nous sommes très vieux) ressuscitâmes les soirs d’Hernani ; il consentit aux modernités de la comédie dramatique, et non sans avoir rénové, par Souvent homme varie, avec quelque raideur dans la grâce et un peu trop de calcul dans le rêve, l’exquise imagination shakespearienne, il tenait à pleins poings, dans Jean Baudry et dans le Fils, des misères sociales, violemment secouées ; puis ce fut Formosa, amour, passion, triomphe. […] Oui, c’est une chose qui n’a pas encore été dite, mais qu’il faut dire cependant, bien qu’on s’en puisse attrister : trois jeunes hommes, poètes magnifiquement doués, et qui devaient bientôt jeter un si grand lustre sur la seconde moitié du siècle, ne furent pas éloignés d’abord de désavouer en celui où elle s’incarnait la révolution poétique dont ils étaient les fils ou les petits-fils.

2390. (1899) Préfaces. — Les poètes contemporains. — Discours sur Victor Hugo pp. 215-309

Le regard qu’il jette sur la nature est large et profond ; son œil saisit le détail infini et l’ensemble des formes, des couleurs, des jeux d’ombre et de lumière.

2391. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VI : Difficultés de la théorie »

Quelques-unes sont graves ; mais je pense que la discussion a jeté quelque lumière sur plusieurs faits, qui, d’après la théorie de création, demeurent entièrement inexplicables.

2392. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Vernet » pp. 130-167

Tout à fait vers la droite, sur une saillie de ce rocher, j’observai deux figures que l’art n’aurait pas mieux placées pour l’effet ; c’étaient deux pêcheurs ; l’un, assis et les jambes pendantes vers le bas du rocher, tenait sa ligne qu’il avait jetée dans des eaux qui baignaient cet endroit ; l’autre, les épaules chargées de son filet, et courbé vers le premier, s’entretenait avec lui.

2393. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre II. La parole intérieure comparée à la parole interieure »

. […] Comme la passion n’est qu’une idée douloureuse sans cesse traversée par d’autres, les mots associés aux idées doivent surgir aussi à l’improviste et jeter la maladie morale dans des accès inattendus » (Nous soulignons).

2394. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre II. La perception extérieure et l’éducation des sens » pp. 123-196

De même qu’un enfant ne démêle et ne retient qu’après beaucoup de tâtonnements l’espèce précise et le degré juste d’effort par lequel son bras jettera une pierre à dix pas et non à neuf ou à onze, de même la dame opérée ne put distinguer et fixer dans sa mémoire qu’après beaucoup d’essais incessamment corrigés la sorte particulière, le degré d’intensité, la durée précise de la sensation musculaire que son cou devait éprouver pour que l’inclinaison à droite ou à gauche, l’élévation ou l’abaissement de sa tête et, partant, de son œil, fussent de trois degrés et non pas de deux, quatre ou cinq.

2395. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre IV. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire. » pp. 87-211

La variété & l’abondance des matieres y jettent un grand agrément.

2396. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre IV : Sélection naturelle »

Nous verrons alors que cette théorie jette quelque lumière sur les affinités des êtres disparus, qui, bien qu’appartenant généralement aux mêmes ordres, familles ou genres que ceux qui vivent actuellement, sont cependant souvent en quelque degré intermédiaires entre des groupes existants.

2397. (1914) Une année de critique

S’agit-il d’une personne humaine, ou d’un petit chien écervelé qui se jette dans les jambes de ses maîtres ? […] Il prend dans sa main deux petits cailloux qu’il jette brusquement sous nos yeux ; et plus l’analogie entre les deux petits cailloux est lointaine, tout en demeurant évidente une fois distinguée, plus leur rapprochement est inattendu, plus Jules Renard se montre satisfait.

2398. (1730) Des Tropes ou des Diférens sens dans lesquels on peut prendre un même mot dans une même langue. Traité des tropes pp. 1-286

C’est dans ce dernier sens que M. de La Bruyère a dit, « jetez moi dans les troupes come un simple soldat, je suis Thersite ; etc. » Edipe célèbre dans les tems fabuleux pour avoir deviné l’énigme du sphinx, a doné lieu à ce mot de Térence, (…). […] On dit aussi par métaphore, parlant des vices ou des vertus, jeter de profondes racines, pour dire s’afermir.

2399. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 7172-17709

Au surplus, c’est le sens qui convient le mieux à la pensée d’Horace, puisqu’il prétend s’excuser de n’avoir pas fini certains vers qu’il avoit promis à Mécene, par l’oubli universel où le jette son amour pour Phryné.

2400. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Camille Jordan, et Madame de Staël »

Lorsque plus tard, dans la lutte des assemblées publiques, on lui jetait à la face le nom d’émigré il ne l’acceptait que moyennant explication et commentaire : « Et qui d’entre eux, s’écriait-il, craindrait de l’avouer ?

2401. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. DAUNOU (Cours d’Études historiques.) » pp. 273-362

Fouché avait d’abord, ainsi que Daunou, des sentiments politiques modérés ; la peur le jeta dans les extrémités atroces.

2402. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Mémoires du général La Fayette (1838.) »

C’est celle, à coup sûr, qui a le plus nui dans la vague impression publique, et en double sens contraire, à la mémoire de l’illustre citoyen, et qui a contribué à jeter sur l’ensemble de sa carrière une teinte générale où l’ancien attrait a pâli.

2403. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre V. Swift. » pp. 2-82

Pour achever, Swift leur enseignait un expédient pratique, proportionné à leur intelligence et à leur état. « Le simple soldat, quand il ira au marché ou à la taverne, offrira cette monnaie ; si on la refuse, il sacrera, fera le diable à quatre, menacera de battre le boucher ou la cabaretière, ou prendra les marchandises par force, et leur jettera la pièce fausse.

2404. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre premier. La Formation de l’Idéal classique (1498-1610) » pp. 40-106

Mêlée à celle de nos pères les barbares, elle sut raffiner, assouplir et pour ainsi dire spiritualiser ces idiomes grossiers qui sont devenus ce que nous voyons… Qu’on jette les yeux sur une mappemonde, qu’on trace la ligne où cette langue universelle se tut : là sont les bornes de la civilisation et de la fraternité européennes… Le signe européen, c’est la langue latine. » [Joseph de Maistre, Du Pape.]

2405. (1925) Proses datées

Je dirai même qu’il me sembla un peu sorcier, car lorsqu’il eut jeté l’ancre, en face de Péra, devant l’arsenal de Top-Hané, je m’aperçus que le navire le plus voisin de notre ancrage était justement le stationnaire français le Vautour. […] Ne dit-il pas, des impressions jetées par là nature dans son âme et par son âme dans ses vers : « Le fond fut toujours un profond instinct de la Divinité dans toutes choses, une évidence, une intuition plus ou moins éclatante de l’existence et de l’action de Dieu dans la création matérielle et dans l’humanité pensante. » Ajoutons qu’en parlant ainsi, Lamartine se définit très exactement.

2406. (1895) Nos maîtres : études et portraits littéraires pp. -360

» Elle jette impérieusement à Dieu, — à elle-même, — cette décisive question. […] Au plus profond de la métaphysique il se jeta, avec une indomptable ferveur : il apparut comme un philosophe aux poètes de l’école parnassienne, avec lesquels, d’abord, il fraya. […] C’est un semeur, qui jette sa semence au hasard, sans s’inquiéter du grain qui tombe sur la pierre. » Ces êtres innombrables tendent à vivre : mais les moyens de vivre étant limités, et la production des êtres illimitée, naît la lutte.

2407. (1908) Après le naturalisme

Ils ne s’appliqueraient pas à la réalité immédiate, s’adresseraient le plus souvent au lointain futur et ce serait la perturbation jetée dans l’évolution normale des choses.

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