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1562. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre quatrième. Éloquence. — Chapitre II. Des Orateurs. — Les Pères de l’Église. »

Comment un moine, renfermé dans son cloître, a-t-il trouvé cette mesure d’expression, a-t-il acquis cette fine connaissance de l’homme, au milieu d’un siècle où les passions étaient grossières, et le goût plus grossier encore ?

1563. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 1, du génie en general » pp. 1-13

Ainsi la discipline militaire, quoiqu’elle puisse contenir le fougueux dans son rang, et retenir le timide dans son poste, ne sçauroit empêcher que l’interieur de l’un et de l’autre ne soit boulversé, pour me servir d’une expression de Montagne, et que l’ame de l’un n’avance, quand l’ame de l’autre recule.

1564. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « III »

L’art ne consiste pas à contenter tous les goûts, en flattant les uns par ce qui choque les autres, mais à faire que les goûts les plus différents soient d’accord de la justesse d’une pensée, de la beauté d’une expression, de la vérité d’une peinture. »‌ C’est fort bien dit ; mais Nisard oublie que La Bruyère n’était pas dupe et qu’en cette occasion surtout il ne parlait point par principe.

1565. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XV »

J’ai dit que la banalité de ce style réside surtout dans les clichés et les expressions toutes faites.

1566. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Alaux. La Religion progressive » pp. 391-400

C’est un esprit analytique d’une grande précision, dont l’expression dit toujours ce qu’elle veut dire, fait vraiment pour mieux que le livre qu’il nous a donné-là.

1567. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Léon Bloy »

Otez, en effet, par la pensée, la personnalité de Christophe Colomb de la synthèse du monde, que, seule, l’Église embrasse, et que seule elle explique, et il ne sera plus qu’un homme à la mesure de la grandeur humaine ; mais avec l’Église et faisant corps avec elle, il devient immédiatement le grand homme providentiel, le bras charnel et visible de Dieu, prévu dès l’origine du monde par les prophètes des premiers temps… Les raisons de cette situation miraculeuse dans l’économie de la création, irréfragables pour tout chrétien qui ne veut pas tomber dans l’abîme de l’inconséquence, ne peuvent pas, je le sais, être acceptées par les esprits qui chassent en ce moment systématiquement Dieu de partout ; mais l’expression de la vérité, qu’ils prennent pour une erreur, est si grande ici, qu’ils seront tenus de l’admirer.

1568. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — III »

Et laissons là le Vinci qui nous reporte trop loin ; laissons aussi ces expressions de dilettantisme, de renanisme qui sont dégoûtantes de demi-culture et sentent la chronique où on les a gâchées.

1569. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre III. Des éloges chez tous les premiers peuples. »

On sent assez quel doit être le caractère des ouvrages d’un pareil peuple ; mais ce qui étonne, c’est que déjà on y trouve l’art d’opposer les idées douces aux idées terribles, et de placer presque partout l’image de l’amour à côté de celle de la guerre ; peut-être ce qui nous paraît un art, n’était que l’expression naturelle des mœurs de ces peuples.

1570. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME GUIZOT (NEE PAULINE DE MEULAN) » pp. 214-248

Dans deux feuilletons de novembre 1808, sur l’Usage des Expressions communes en Poésie, le critique, partant d’un vers de Baudouin, où M. Lemercier avait mis chevaux au lieu de coursiers, essaye de déterminer les conditions selon lesquelles on peut introduire en vers les expressions communes. […] Son sentiment filial avait été très-ardent, très-pieux ; son amour maternel fut au delà de tout, comme d’une personne mariée tard, s’attachant d’une force sans pareille à un fils qu’elle n’avait pas espéré, et sur lequel, selon l’heureuse expression d’un père, elle a laissé toute son empreinte99.

1571. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXIXe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe (2e partie) » pp. 161-232

La comparaison était caractéristique ; car, après Phidias, aussi divin dans l’expression de la force que dans l’expression de la grâce, il n’y avait eu que Goethe pour créer de la même main, du même ciseau et du même bloc, Faust et Marguerite ! […] C’est la poésie édifiante, c’est la sainteté de l’amour portées par un grand poète à sa plus simple et à sa plus épique expression.

1572. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIe entretien. Vie du Tasse (2e partie) » pp. 65-128

Quelques expressions attestent déjà, dans ces lettres, que le Tasse portait son mal en lui-même, et ne l’attribuait pas encore à la famille d’Este, qui le comblait d’égards, d’amitié, et peut-être d’amour. […] On reconnaît avec douleur, dans cette incohérence d’idées absurdes et d’expressions tronquées, tous les symptômes d’un égarement d’esprit trop réel. […] Quant à ce qui regarde ses soupçons et les expressions dont il s’est servi par le passé, je ne l’en accuse pas ; seulement, une fois qu’il sera ici, s’il ne consent pas à se laisser traiter et soigner, nous donnerons des ordres pour qu’il soit expulsé définitivement de nos États, avec défense d’y jamais rentrer.

1573. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (3e partie) » pp. 81-152

Une âme honnête et droite pouvait animer les traits vulgaires de son visage ; il n’y fallait chercher aucune grâce, aucune finesse, nulle expression délicate et poétique. […] La comtesse d’Albany, d’une taille épaisse, d’un visage sans expression, avait l’air commun. […] Il est vrai qu’il ajoute ce correctif précieux, oublié ou dédaigné par Chateaubriand : “Mais ses yeux avaient une lumière, ses cheveux cendrés une teinte, sa bouche un accueil, toute sa physionomie une intelligence et une grâce d’expression qui faisaient souvenir, si elles ne faisaient plus admirer.

1574. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1876 » pp. 252-303

Il parle, les yeux demi-fermés, avec toutes sortes d’expressions chatte, passant sur sa physionomie qui fait la morte, sur cette chair qui a pris le beau et chaud culottage de la chair d’un syndic de Rembrandt, et quand sa parole s’anime, il y a sur son front un étrange tressautement de la ligne de ses cheveux blancs, qui monte et redescend. […] Je voulais lui donner mon cœur, une expression que j’avais entendue. […] Sur les minuit, il s’élève une chaleur douce et majestueuse — je donne ses expressions — c’est enivrant !

1575. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre II. La poésie lyrique » pp. 81-134

— Cette poésie humaine, caractéristique des tendances de la jeunesse, de l’écrivain qui le premier avait voulu concilier les rythmes nouveaux avec l’expression de la vie, M.  […] “Il doit tout savoir, et plus encore, s’écrie le bon Banville, car sans une science profonde, solide et universelle, c’est en vain qu’il chercherait le mot propre et la justesse de l’expression !”  […] Elles sont enguirlandées de mélisse et de réglisse, de cityses et de citrons, de résine et de menthe dont elle excelle à pénétrer, à saturer ses poèmes, comme des sachets avec un sens de l’olfactif qui aromatise le terme et donne à l’expression quelque chose d’odorant qui ne se rencontre avec cette intensité que dans le style de d’Annunzio. » Servie par une culture très classique et un sensualisme très païen, elle sait le prix de l’heure qui s’enfuit.

1576. (1828) Introduction à l’histoire de la philosophie

Les tracasseries philosophiques (passez-moi cette expression) contre ce qu’il y a de plus saint et de plus vénérable, disparaîtront devant le véritable esprit de notre époque. […] La philosophie est donc l’élément interne, l’élément abstrait, l’élément idéal, l’élément réfléchi, et par conséquent l’expression la plus élevée d’une époque. […] Ou n’admettez-vous que ces deux époques, négligez-vous le rapport du fini et de l’infini, et ne donnez-vous pas une époque particulière à l’expression de ce rapport ? […] Les grands résultats ne se contestent pas : la gloire, qui en est l’expression, ne se conteste pas davantage. […] Le peuple n’intervenait en rien dans ses propres affaires ; nulle représentation nationale, nulle libre expression de la pensée.

1577. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome II

Plusieurs excellents esprits ont jugé qu’il était possible de donner une expression rythmique aux vérités les plus exactes. […] Le style d’un écrivain, c’est l’expression et comme le raccourci de toute sa manière habituelle de penser et de sentir. […] C’est donc uniquement le Tourguéniev occidental, pour me servir de l’expression russe, sur lequel on trouvera ici quelques notes. […] C’est parce que l’homme intérieur se modifie que l’expression se modifie de son côté. […] En outre, l’auteur, qui est jeune encore et dont c’est le premier long ouvrage, traverse cette phase inévitable de la préciosité dans l’expression.

1578. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1891 » pp. 197-291

Jeudi 19 février Carrière, qui dînait chez Daudet, après dîner, est venu s’asseoir à côté de moi, et dans une longue, vague et diffuse conversation, ressemblant à sa peinture, et avec sa voix étoupée, m’a entretenu longtemps de son mépris pour le chatoyant en peinture, et de ses efforts et de son ambition pour attraper les fugitivités de l’expression d’une figure, de son travail enfin, acharné et sans cesse recommençant, pour tâcher de fixer un peu du moral d’un être sur une toile. […] » Le marquis de Varennes disait aussi que l’expression populaire : « Ne crie donc pas comme ça, tu vas nous faire prendre ! », était une expression venant de la Terreur. […] L’esquisse, ce serait chez Whistler, une ruée sur la toile : une ou deux heures de fièvre folle, dont sortirait toute construite dans son enveloppe, la chose… Puis alors des séances, des longues séances, où la plupart du temps, le pinceau approche de la toile, le peintre ne posait pas la touche au bout de son pinceau, et le jetait ce pinceau, et en prenait un autre — et quelquefois en trois heures posait une cinquantaine de touches sur la toile — « chaque touche, selon son expression, enlevant un voile à la couverte de l’esquisse ». […] Quant à sa conversation, sauf un peu de maniérisme dans l’expression, elle est pleine d’observations aiguës, de remarques délicates, d’aperçus originaux, de trouvailles de jolies phrases, et que souvent il termine, il achève par des sourires de l’œil, par des gestes nerveux du bout des doigts.

1579. (1891) Enquête sur l’évolution littéraire

Le style dont je désire la restauration donnera une nouvelle vigueur à l’expression poétique. […] Une œuvre d’art doit être l’expression d’un instant, et le poète est celui pour qui le présent existe ; la psychologie, comme toute autre science, n’est que l’expression du successif. […] De mise très simple, une luxuriante barbe cendrée taillée carrément, l’expression un peu terne de sa physionomie est éclairée par le regard pénétrant et froid qui s’abrite derrière le binocle. […] Ô le Drame, expression capitale de la Poésie ! […] Il est pour l’expression directe de la passion, et jamais il ne cherche la petite bête !

1580. (1905) Propos littéraires. Troisième série

Les hommes de 1550 ont si bien compris cela, que quelques-uns, les extrêmes, les exagérés, ont voulu que même leur style, leur expression, ne pût pas être compris du premier coup. […] C’est ce que les hommes appellent mourir. » Voilà une expression populaire française, qui sera étonnée d’avoir eu son origine dans une chambrette d’étudiant à Vienne. […] Oui, mais, comme expression, il était diablement ridicule. […] J’imagine, — l’ombre de cet homme sérieux qui savait sourire me pardonnera l’expression, — que si Dieu est homme d’esprit, rien ne lui a été plus agréable que cette démarche. […] On ne peut aller trop loin, en France, dans l’expression du mépris à l’égard du peuple français.

1581. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

L’expression n’en était ni simple ni très claire. […] Leur vie est un perpétuel travail d’observation et d’expression. […] Elle abonde en images pittoresques et en expressions créées. […] Mais il a, ce qui vaut mieux, l’image soudaine et l’expression vivante. […] Thiers n’a pas, le plus souvent, de relief dans l’expression.

1582. (1905) Études et portraits. Sociologie et littérature. Tome 3.

Taine donnent l’expression la plus brillante, sinon la plus complète. […] L’expression de ces rapports n’est autre chose que la législation primitive.‌ […] L’expérience se rencontre sur ce point avec la métaphysique qui ramène tous les rapports possibles entre les êtres à ces trois expressions : cause, moyen, effet.‌ […] Parmi ces idées, communes à tous nos amis, mais que chacun, « dans notre laboratoire d’études sociales », pour prendre l’heureuse expression de M.  […] Il lui fallait lire un volume par semaine et le résumer afin d’en extraire une de ces Variétés où les moindres phrases trahissaient l’émule des maîtres par le génie de l’expression.

1583. (1914) Une année de critique

* *   * Le talent de Jules Renard consiste avant tout dans la nouveauté de l’expression. […] Quant à la phrase elle-même, on peut y chercher l’expression complète de la pensée d’Anatole France. […] D’autres lieux du monde ont des charmes ; celui-ci seulement, pour employer l’heureuse expression de M.  […] L’auteur dépouille tous les ornements et poursuit désespérément l’expression la plus concise. […] Le miracle de son œuvre, c’est que le sentiment, que l’on y devine souvent morbide, n’ait jamais corrompu l’expression.

1584. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre sixième »

Au lieu d’y voir l’expression la plus haute de la raison et du vrai, il n’y reconnaissait que l’art et la science, c’est-à-dire le métier et l’érudition, comme l’avait entendu l’école de Ronsard. […] Il nous fait de vives peintures du vrai, plus souvent du vrai de Pascal que du vrai de Montaigne, du vrai selon l’esprit chrétien, qui est moins l’expression de ce qui se fait que la règle de ce qu’il faut faire. […] S’il reste parfois au-dessous de l’idéal qu’il a tracé des bons ouvrages, « dont l’agrément, dit-il, et le sel consistent principalement à ne jamais présenter au lecteur que des pensées vraies, et des expressions justes », c’est que ses forces trahissent son goût. […] Ils voient un versificateur à la chasse d’une rime, au lieu d’un poète s’opiniâtrant à éclaircir toutes ses pensées, et qui sait en poursuivre l’expression jusqu’à ce qu’il l’atteigne, fût-ce au coin d’un bois, si le travail du cabinet la lui a refusée. Tel est l’effet de la vérité des pensées, et la justesse de l’expression, dans les ouvrages de Boileau, qu’à moins de notes qui vous en avertissent, on n’y peut pas distinguer ce qu’il imite des anciens de ce qui lui est propre.

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