/ 2772
688. (1922) Gustave Flaubert

Je continuerai à vivre comme un ours, me moquant de la patrie, de la critique et de tout le monde. […] « Je tourne beaucoup à la critique ; le roman que j’écris m’aiguise cette faculté, car c’est une œuvre surtout de critique ou plutôt d’anatomie. » Critique et anatomie intérieures. […] Critique et artiste, il est ici placé à un carrefour, ou, si l’on veut, à un belvédère de l’esthétique éternelle. […] La victime de l’amour et la victime de l’usure paraissent au critique se raccorder mal, exactement comme l’hypocrisie de Tartuffe et son imprudence amoureuse se raccordent mal pour La Bruyère, qui, le transposant sur le plan critique, en fait un Onuphre. […] L’œil du critique et l’œil du reconstructeur sont l’un et l’autre nécessaires à sa vision binoculaire.

689. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 150-153

Il y a déjà acquis une juste gloire ; mais les temps critiques ne sont pas encore arrivés. […] Au reste, M. l’Abbé de Longchamps a enrichi la Littérature Françoise d’une Traduction aussi fidelle qu’élégante, des Poésies de Properce & de Tibulle, dont les critiques séveres de quelques Journalistes n’ont pu affoiblir le mérite dans l’opinion publique.

690. (1856) Articles du Figaro (1855-1856) pp. 2-6

Nous laisserons la critique paresseuse ou indifférente noyer périodiquement les productions nouvelles dans un fleuve de banalités louangeuses et jouer son rôle de serinette. […] — Il y a bon temps que nous l’avons dit : nous ne sommes pas un critique de profession, mais tout simplement un critique de bonne foi, analysant publiquement ses impressions et formulant à voix haute ses jugements. — Nous ne remorquons pas le plus léger bagage d’érudition, et l’on aurait de la peine à trouver la citation la plus innocente dans les plis de notre poche. […] Si petit qu’on soit, et quelque modeste que puisse être la tâche dont on s’acquitte, on doit toujours, — poète ou critique, — avoir les yeux sur ces illustres modèles. […] Louis Enault se présente à la critique avec une version nouvelle de Werther. […] La nouvelle génération commence à se lasser d’entendre ce Ganéça de la critique ressasser constamment les mêmes formules dans sa pagode oubliée.

691. (1880) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Première série pp. 1-336

Ils n’abdiquèrent donc pas, eux non plus, tout esprit de critique et de juste sévérité. […] Sa critique était ordinairement sûre, et même pénétrante ; son érudition était de bon aloi. […] C’est sa manière, quand il en peut user, de répondre aux critiques et de punir l’insolence. […] C’est dans cet esprit de critique studieuse que M.  […] Je ne parle pas des critiques ; les critiques ont été créés pour monter la garde à la porte du temple, et l’incorruptibilité du factionnaire est la première de leurs vertus.

692. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Introduction. » pp. -

Il est l’œuvre propre de la critique contemporaine. Personne ne l’a fait aussi juste et aussi grand que Sainte-Beuve ; à cet égard, nous sommes tous ses élèves ; sa méthode renouvelle aujourd’hui dans les livres et jusque dans les journaux toute la critique littéraire, philosophique et religieuse. […] C’est cette concordance secrète des forces créatrices qui a produit la politesse achevée et la noble littérature régulière sous Louis XIV et Bossuet, la métaphysique grandiose et la large sympathie critique sous Hegel et Gœthe. […] C’est dans ses écrits, chez Sainte-Beuve, chez les critiques allemands que le lecteur verra tout le parti qu’on peut tirer d’un document littéraire ; quand ce document est riche et qu’on sait l’interpréter, on y trouve la psychologie d’une âme, souvent celle d’un siècle, et parfois celle d’une race. […] J’ai essayé plusieurs fois d’exprimer cette loi, notamment dans la préface des Essais de critique et d’histoire.

693. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. »

le critique des Samedis 33 et celui des Lundis. […] Je dirai toute ma pensée : avec les talents nouveaux, le critique des poëtes est à tout moment entre deux écueils : il peut se tromper par confiance ou par dédain. […] La critique elle-même, qui est un peu aux ordres du public, ne saurait appeler sur eux la curiosité ni forcer une attention qui se porte ailleurs. […] les poëtes n’ont pas comme les peintres leur exposition annuelle où chaque curieux défile, où chaque critique est convié d’office et où, tant bien que mal, ils sont regardés et jugés.

694. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Appendice. »

Son infatigable activité d’esprit ne se confinait pas à une sphère ; il entrait dans toutes : histoire, critique, érudition, politique, et la philosophie enfin, qui fut longtemps sa place forte et son quartier général avec drapeau. […] « Il m’est arrivé autrefois de sourire de cet excès de passion rétrospective et de le railler ; mais qu’on sache bien que lorsque la critique s’applique à des talents aussi éminents, à des œuvres aussi distinguées, cette critique présuppose toujours une grande louange et une haute estime. […] Enfin, cher Monsieur, vous lui avez rendu un juste hommage, et c’est ainsi qu’il n’y a plus qu’une presse et un genre de critique, la bonne en regard de la mauvaise, la vraie vis-à-vis de celle qui ne l’est pas.

695. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « Conclusion »

Aux écrivains que nous avons cités, il aurait fallu ajouter leurs disciples et même leurs critiques ; mais surtout ces savants — physiciens ou naturalistes — qui ont traité avec une grande compétence plusieurs points de psychologie. […] Au reste, les critiques anglais, et Bain à leur tête, viennent de reconnaître en lui « un psychologiste d’un ordre peu commun » ; et nous nous associons pleinement à leur jugement : « que ses traités sont des plus suggestifs que l’École de l’expérience ait publiés en Angleterre, dans ces dernières années. » Signalons encore M.  […] Nous ne dirons rien non plus des critiques que notre Ecole a soulevées dans son propre pays288, car ceci est un livre d’exposition, non de critique.

696. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre IV. Littérature dramatique » pp. 202-220

« … Parallèlement à ces réalisations, un grand nombre d’études, les unes théoriques, les autres critiques, ont été publiées ; des conférences ont été faites : ainsi s’est peu à peu étendue et essayée la Volonté novatrice qui, bientôt, régnera. […] Théâtre moral, parfaitement possible devant un vrai public, d’un intérêt plus soutenu qu’on ne peut l’avouer, Saül et le Roi Candaule seront jouées régulièrement quelque jour et lors, on s’étonnera de l’inintelligence de notre critique actuelle. […] Ici, encore, bien qu’elle ait survécu dans les journaux, la critique dramatique doit accepter une part de responsabilité dans la décadence de notre théâtre. À force de complaisances — d’autant que certains critiques sont aussi des auteurs — elle a diminué elle-même son autorité et nous avons pu juger, lors d’un incident récent, le cas que les directeurs faisaient d’elle.

697. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Introduction. Du bas-bleuisme contemporain »

Du bas-bleuisme contemporain I Ce n’est ni une inconséquence ni même une diversion, comme on pourrait le croire, que d’introduire dans un livre de critique intitulé : Les Œuvres et les Hommes au xixe  siècle , la série des femmes qui écrivent, car les femmes qui écrivent ne sont plus des femmes. […] Comptez combien il y a, en ce moment, de critiques en France qui n’aient déclaré sérieusement que Mme Sand est un génie ! […] Mais quand elles ont le plus de talent, les facultés mâles leur manquent aussi radicalement que l’organisme d’Hercule à la Vénus de Milo, et pour le critique, c’est aussi clair que l’histoire naturelle. […] En effet, dans l’ordre des écrivains, vous chercheriez en vain une femme qui vaille, dans l’ordre des danseuses, Mlle Taglioni IV Et voilà justement ce que l’Histoire et la Critique que nous allons faire ici devront constater.

698. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. de Lacretelle » pp. 341-357

Mais il vient d’être réédité en 1878, à peu près au moment où le sculpteur Falguière finissait sa statue, et l’éditeur, qui fait son métier, envoie le livre à la Critique, pour qu’elle le mette en lumière au moment même où cette statue se dresse sur la place publique de Mâcon, et attire les regards de tous ceux qui lisent les journaux et ne voient, de près ou de loin, que par cette lorgnette. […] Je ne dis pas ses œuvres, même ses œuvres, à lui seul… La Critique discerne et choisit dans ce bloc d’ouvrages, éjaculés de cette tête étonnamment féconde ! […] La Critique, le sens critique manquait absolument à Lamartine.

699. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VI. M. Roselly de Lorgues. Histoire de Christophe Colomb » pp. 140-156

S’il ne peut pas se dire qu’il est un historien à la taille de son héros, il peut au moins se rendre cette justice, et la Critique la lui rendra, qu’il a essayé de lui faire une histoire à sa taille, et que dorénavant cette histoire est mesurée. […] Si on ne se taisait pas sur les faits, inexplicables à la Critique philosophique, il fallait en convenir ! […] La Critique qui n’attaquera pas les uns attaquera-t-elle les autres ? […] Il l’a grandie, il l’a élevée dans ses événements et dans son héros, mais il n’a pas empêché l’historien d’entrer dans ce que la critique de la philosophie appelle le positif et la réalité des choses humaines.

700. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Goethe »

Le génie de Goethe est incontestable quoiqu’on ne l’ait pas mesuré, mais la Critique de l’avenir cherchera bien plus à expliquer le succès inouï de Werther qu’elle n’y souscrira. […] Il mettait tout sous de certaines formes, combinées et convenues, et c’est par là que la Critique, quand elle l’osera, pourra prendre et secouer son génie. […] Sous une forme moins brillante, sous une forme modeste, sous une forme quelconque, ce serait encore un livre d’un succès certain et avec lequel la Critique devrait compter. […] Ce n’est pas ce que j’ai appelé souvent, avec un dédain mérité, une de ces paraphrases que nous donnent perpétuellement sur de grands esprits et leurs chefs-d’œuvre, à la gloire desquels ils n’ajoutent pas un iota, ces critiques secs et sans idées qu’on pourrait appeler les Scholiastes de la médiocrité.

701. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VIII. Du mysticisme et de Saint-Martin »

La Critique ne saurait l’oublier. […] Mais la Critique, qui a ses convictions, qui n’examine, ne raisonne et ne conclut que du milieu d’elles, a le droit de demander au philosophe pourquoi, dans un livre où toutes les questions liées à son sujet sont touchées de manière à les faire vibrer dans les esprits, il a négligé d’appuyer plus longtemps et plus fort sa juste et pénétrante analyse sur le côté fécond et sanctifié du mysticisme. […] Une vraie critique philosophique, si elle avait voulu mériter l’honneur de son épithète, devait-elle, après avoir accumulé les négations, s’enfoncer et disparaître dans le néant qu’elle avait fait, et, sous peine de trop ressembler à tout ce qu’elle avait pulvérisé, n’était-elle pas tenue d’ajouter et d’affirmer quelque chose de plus ? […] Le chef influent de cette secte était le fameux Nicolaï, le libraire prussien, assez oublié à présent, qui tenait l’opinion, la critique et la littérature sous la triple fourche de la Gazette littéraire d’Iéna, du Journal de Berlin et du Muséum Allemand.

702. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Léon Gozlan » pp. 213-230

Avant de nous occuper de l’œuvre entière de Léon Gozlan, de ce conteur raffiné auquel nulle critique, à ma connaissance, n’a assigné encore sa vraie place dans la littérature de ce siècle, avant cet examen exclusivement littéraire, pourquoi ne risquerions-nous pas quelques mots sur le genre d’homme qui doublait l’auteur en lui, et qui était pour le moins l’égal de l’auteur ? […] Dire comment il n’est que le troisième, expliquer sa place hiérarchique dans l’ordre de composition qu’il avait choisi pour les ambitions et les bonheurs de sa pensée, nous donnera l’occasion de poser quelques-unes de ces idées générales préliminaires sur lesquelles la Critique doit s’élever pour mieux juger les hommes qui seraient plus haut qu’elle de plain-pied. […] Eh bien, dans l’ordre de la pensée pure appliquée, la Critique, comme l’Histoire, doit étager les grandes aptitudes intellectuelles avec la même rigueur et suivant la même loi ! Il est évident, en effet, que, pour la Critique comme pour l’Histoire, les plus grands esprits sont ceux qui se rapprochent le plus de Dieu, idéal de toute intelligence, par conséquent qui conçoivent le mieux les choses religieuses, et qui ont par éclairs — puisque l’homme n’est qu’un fragment dans un monde fragmenté — l’intuition du Surnaturel et de ses nécessités, si mystérieusement impérieuses.

703. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre II. De la métaphysique poétique » pp. 108-124

Nous l’avons montré, c’est par un effet de la faiblesse du raisonnement de l’homme, que la poésie s’est trouvée si sublime à sa naissance, et qu’avec tous les secours de la philosophie, de la poétique et de la critique, qui sont venues plus tard, on n’a jamais pu, je ne dirai point surpasser, mais égaler son premier essor45. […] Le quatrième aspect est une critique philosophique qui naît de l’histoire des idées mentionnée ci-dessus. Cette critique cherche ce que l’on doit croire sur les fondateurs, ou auteurs des nations, lesquels doivent précéder de plus de mille ans les auteurs de livres, qui est l’objet de la critique philologique.

704. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre cinquième. De l’influence de certaines institutions sur le perfectionnement de l’esprit français et sur la langue. »

On ne put jamais reprocher à l’homme les sévérités du critique. […] Dans ses critiques, il ne désigne aucun auteur, sinon parmi les morts, et seulement ceux qu’il loue. […] C’est ce que ne doit pas oublier le critique qui parle de ces choses-là. […] La meilleure critique qu’on en ait faite est l’usage qui s’est établi de n’en publier que les extraits les plus marquants. […] Boileau, Réflexions critiques sur Longin.

705. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Théâtre » pp. 83-168

Michelet, des romans dont toute la critique s’est émue. […] Un critique, que toutes les questions de théâtre trouvent à son poste de feuilletoniste, armé de conscience et de bon sens, M.  […] Maintenant, venons aux critiques de détails. […] À propos de la phrase « J’en ferais mon cœur », un critique théâtral disait hier que c’était un propos de soubrette d’il y a cent ans. […] Le critique, très aimablement, nous promet de nous lire le soir, et de faire son rapport le lendemain.

706. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXIII » pp. 244-246

— Le critique de la Revue de Paris, H. […] Letronne sur le cœur de saint Louis ; cette réponse, très-modérée et qui contient quelques considérations générales fort judicieuses à propos de la méthode critique exclusive de M.

707. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Payen, Louis (1875-1927) »

Est-ce là une critique ? […] Toujours est-il que cette critique, que je formule à peine, s’évanouit devant la série de poèmes intitulés « Dialogues dans l’ombre ».

708. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » pp. 507-511

L’Abbé Desfontaines fut un des premiers à en faire connoître les défauts, & sa critique se trouva bientôt d’accord avec le jugement du Public, qui revint, à cette occasion, de ses premiers applaudissemens. […] On a encore de cet Auteur plusieurs Ouvrages de Géométrie, de Philosophie, de Morale, de Politique, d’Histoire, de Critique, de Grammaire, de Poésie Grecque & Latine, dont la plupart sont estimés.

709. (1767) Salon de 1767 « Sculpture — Allegrain » p. 322

Il est sûr que la critique la plus sévère est restée muette devant elle. […] La critique était arrivée aux pieds, sans avoir rien remarqué qui la consolât.

710. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre troisième »

Des critiques dont le Roman de la Rose fut l’objet, du xive au xvie  siècle. — § IV. […] Ses critiques furent réfutées par des conseillers et des secrétaires du roi. […] Mais cet excellent critique n’a-t-il pas manqué de pénétration en attribuant le succès de l’ouvrage aux censures qu’il a essuyées ? […] Le savoir de Jean de Meung n’est pas dépourvu de critique : notre poëte juge et commente ce qu’il cite. […] Ainsi le jeu-parti du Croisé et duDécroisé : l’un fait l’éloge, et l’autre la critique des croisades ; le premier finit par décider le second à se croiser.

/ 2772