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456. (1861) Cours familier de littérature. XI « Atlas Dufour, publié par Armand Le Chevalier. » pp. 489-512

En parcourant d’un œil attentif toutes ces belles cartes réunies par un lien historique, dans cet atlas si admirablement groupé pour mettre l’univers en relief sous vos mains comme dans une exposition plastique du monde à toutes ses grandes époques, où tout ce qui est essentiellement mobile dans la configuration des empires parut un moment définitif, on sait tout de l’homme et tout de la terre politique ; on marche à travers les lieux et les temps avec un interprète qui sait lui-même toutes les langues et tous les chemins. […] voilà ce qui grandit démesurément à la proportion des choses infinies cette petite fourmilière inaperçue sur ce petit globe à peine aperçu lui-même dans cette poussière de mondes lumineux que l’astronomie nous dévoile à travers la nuit !

457. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Leconte de Lisle, Charles-Marie (1818-1894) »

Jadis, on le lisait à travers La Harpe ; il semble que M. Leconte de Lisle l’ait vu surtout à travers le livre de Victor Hugo, qui s’est peint lui-même sous les traits prodigieux du vieux tragique grec.

458. (1912) L’art de lire « Chapitre II. Les livres d’idées »

Nous avons pensé, en nous souvenant, à travers les Méditations du Discours de la Méthode et en contrôlant le Discours de la Méthode par les Méditations ; et nous avons fait comme le tour du problème de la connaissance, nous apercevant que notre moyen essentiel de connaître est subordonné à quelque chose que nous ne pouvons pas connaître ; nous apercevant que notre connaissance se résout en foi, soit à elle-même, soit à quelque chose d’inconnaissable. […] Les sentences se transforment sous la lecture comme le rayon à travers le prisme.

459. (1864) De la critique littéraire pp. 1-13

Un écolier qui se promène à travers un poème prend tous les vers luisants pour des escarboucles, et les Chinois qui se piquent d’avoir le goût bon, font des magots bien singuliers. […] Pénétré de leur mérite, il n’exigera pas que tous leur ressemblent ; mais à travers les variétés de langues, de mœurs et de génie, il reconnaîtra plus sûrement la beauté éternelle dont leurs ouvrages exposent à notre étude le portrait le plus achevé.

460. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’empire russe depuis le congrès de vienne »

L’aristocratie de Saint-Pétersbourg, qui s’est faite européenne aussi pour des motifs moins élevés que ceux du czar Pierre, cette aristocratie qui n’est pas plus Russe que Catherine, qui était Allemande, qu’Alexandre et Nicolas eux-mêmes, lesquels, à travers la langue officielle de leurs ukases, apparaissent comme des princes fort distingués, mais entièrement européens de mœurs, de connaissances et de génie ; l’aristocratie de Saint-Pétersbourg n’est pas plus une société que des régiments de Cosaques ne sont un peuple. […] On peut donc affirmer, sans même toucher à l’amour-propre de ces messieurs, que la Russie, « le fruit pourri avant d’être mûr » de Diderot, — éclair de bon sens qui avait passé dans son génie à travers les fumées grisantes du moka de Catherine II, — n’a pas encore un grand artiste, un grand poète, un grand penseur, un homme, enfin, qui se soit une seule fois servi en maître d’une langue que de Maistre (qui s’y connaissait) comparait à celle d’Homère, et qui pourrait devenir un des plus merveilleux instruments dont l’imagination des hommes put jouer.

461. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’Empire Chinois »

Huc, dont on sent la charité indulgente à travers l’ironie, comme à travers celle de Tacite on sent l’amertume du mépris, nous peint cet abaissement de l’âme sous toutes les faces de l’abjection et dans son luxe d’infamies.

462. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Buloz »

Si la figure de Buloz revient à travers cet article, tant pis ! […] Tous les brillants écrivains de la première heure se brouillèrent successivement avec Buloz et s’en allèrent, les uns après les autres ; les uns à travers des éclats publics, les autres discrètement, en gens fiers blessés qui avaient la fierté pudique.

463. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Léon XIII et le Vatican »

Voilà les faits que Louis Teste, dans sa randonnée à travers l’Italie constitutionnelle, a ramassés, et qu’on peut prendre pour les présages de l’avenir ! […] Humainement, historiquement, pour ceux-là qui regardent toutes choses à travers l’Histoire, l’Église peut être perdue dans le temps ; mais si elle l’est, elle est vengée !

464. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Fustel de Coulanges » pp. 15-32

C’est la corruption de quelques-uns de leurs empereurs, — supportés, malgré la monstruosité de leurs vices, pour des raisons qui font plus d’honneur que de honte à l’esprit romain, puisque c’était par respect de leur tradition politique qu’ils acceptaient l’Empire à travers l’Empereur, quel qu’il fut ; — c’est cette corruption des empereurs, qui a fait croire à l’universelle corruption des Romains. […] Il va nous faire l’Histoire des institutions politiques de l’ancienne France, et il commence par les arracher à ce Germanisme à travers lequel on a voulu si obstinément les voir.

465. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Gaston Boissier » pp. 33-50

Boissier l’a reportée amoureusement sur cette société monstrueuse de débordements et d’infection, et, quand il s’agit d’elle, il croit à Pline et ne croit pas à Juvénal, et sans raison pourtant pour admettre l’un et repousser l’autre, puisqu’il pense (nous dit-il) que l’homme ne voit les choses qu’à travers ses passions et son humeur. […] Gaston Boissier a touché, à travers celui qui donnait le nom à son livre, un sujet pour lequel il n’avait pas les mains qu’il fallait, — des mains savantes d’une autre science que la sienne, compétentes, théologiennes.

466. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VIII. Du mysticisme et de Saint-Martin »

C’est un de ces livres discrets et transparents qui ne disent pas, tout ce qu’ils pourraient dire, mais qui le laissent entrevoir ; c’est un de ces sphinx au front de marbre diaphane à travers lequel perce le secret qu’on garde encore, mais qui doit un jour en sortir ! […] L’auteur, dont nous pressentons les opinions à certains accents qui passent à travers les surveillances de sa pensée, l’auteur nie à Saint-Martin et au mysticisme la vérité philosophique et religieuse, — ces deux vérités qui pour nous n’en font qu’une, mais que les rationalistes croient très habiles de séparer ; — et il a raison, s’il ne s’agit ici que de Saint-Martin, « le philosophe inconnu du xviiie  siècle », et du mysticisme hors l’orthodoxie, du mysticisme de l’hérésie ou de l’erreur.

467. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « IX. L’abbé Mitraud »

Il y a des affirmations parfois, mais bien plus souvent des tendances qui sont comme une aurore d’idées, un peu brumeuse encore, il est vrai, mais à travers laquelle les philosophes, qui ont la vue bonne, voient très clair. […] Il a vu, à la vérité, passer à travers l’histoire des masses d’hommes, sous la lance de leurs conducteurs.

468. (1892) Un Hollandais à Paris en 1891 pp. -305

Bruant chante ses vers en marchant par grandes enjambées à travers la salle. […] Parlez donc d’un développement littéraire, qui, à travers le moyen-âge, va rejoindre le monde antique ! […] De temps en temps, cette énergie latente se fait jour à travers le jeu de la conversation ; mais d’ordinaire elle reste dissimulée. […] Qui donc, pensez-vous, a gardé intactes à travers les siècles notre religion et notre nationalité ? […] Avez-vous jamais suivi l’histoire d’un mot à travers les âges ?

469. (1927) Approximations. Deuxième série

Mais il existe un degré qui suppose la finesse de vision, auquel on n’atteint qu’à travers elle, qui est nettement au-delà cependant et qui ressortit à une faculté spéciale : la dégustation. […] Si l’effet qu’il produit à cet égard est par-delà toute espèce de technique, ai-je besoin d’ajouter que ce n’est qu’à travers son métier, et jamais aux dépens de celui-ci, qu’il l’obtient. […] Elle nous conduit enfin — à travers combien de relais — au point où nous en sommes. […] À cause d’eux nul sentiment familial n’est tout à fait simple, je veux dire ne fuse avec la fraîcheur, la vivacité d’une sympathie spontanée : s’il les rejoint, c’est à travers un détour, après avoir tourné l’obstacle et inauguré une relation toute nouvelle. […] À travers tout le recueil d’Études — ce livre dont il est si beau, si conforme à lui-même qu’il l’ait plus tard sévèrement jugé, — chef-d’œuvre où la ferveur ne fait qu’un avec la perspicacité, — serpente ce murmure de « diaphane litanie ».

470. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « a propos de casanova de seingalt  » pp. 510-511

Quant aux personnages spirituels, aventureux, pleins de ressources et de souplesse, que ces derniers penchants tout extérieurs emportent sans contre-poids à travers la vie, rien n’est plus rare que de les voir unir la moralité et la véracité rigoureuse à une curiosité si courante et si dissipée.

471. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Houssaye, Arsène (1815-1896) »

Jules Claretie C’est un romantique d’une espèce particulière, un poète de la fantaisie et du caprice ; admirateur de Hugo et de Sterne à la fois voyageant à son gré à travers la vie, un indépendant qui court après les papillons et les libellules et qui trouvait, comme le peintre Chaplin, que le reste est dans la nature aussi bien que le bitume et l’ocre jaune.

472. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Payen, Louis (1875-1927) »

Les rayons d’Hélios offusquent ses regards, son âme s’intimide des nudités diurnes et ne s’épanouit, semble-t-il, qu’à travers les fraîcheurs de la nuit ou de crépusculaires décors.

473. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 311-314

Mais comment voudroient-ils, à travers les dangers, Poursuivre ma vengeance en des bords étrangers, Eux, que leur intérêt & l’amour de la vie Ont à peine arrachés du sein de leur patrie ?

474. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Alfred de Vigny. »

Éloa, dans ses courses rêveuses à travers les mondes et les déserts étoilés, prenant l’essor avec ses jeunes ailes, est comparée au colibri qui sort tout nouvellement du nid et qui voltige à travers les forêts vierges. […] Rien de ce qui est histoire n’y est exact, rien n’y est vu naturellement ni simplement rendu : l’auteur ne voit la réalité qu’à travers un prisme de cristal qui en change le ton, la couleur, les lignes ; il transforme ce qu’il regarde ; mais, malgré tout, la pensée comme l’expression ont, à chaque page, une élévation et un lustre qui attestent un écrivain de prix. […] Leur voyage est sans grâces, Puisqu’il est aussi prompt, sur ses lignes de fer, Que la flèche lancée à travers les espaces Qui va de l’arc au but en faisant siffler l’air. […] Il a de l’amitié pour moi, et je lui en conserve de mon côté, à travers mon ressentiment caché.

475. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe » pp. 81-160

Sa taille est élevée ; sa stature est mince et souple ; ses membres, un peu longs comme dans toutes les natures nobles, sont rattachés au buste par des jointures presque sans saillie ; ses épaules, gracieusement abaissées, se confondent avec les bras et laissent s’élancer entre elles un cou svelte qui porte légèrement sa tête sans paraître en sentir le poids ; cette tête, veloutée de cheveux très fins, est d’un élégant ovale ; le front, siège de la pensée, la laisse transpercer à travers une peau féminine ; la voûte du front descend par une ligne presque perpendiculaire sur les yeux ; un léger sillon, signe de la puissance et de l’habitude de la réflexion, s’y creuse à peine entre les deux sourcils très relevés et très arqués, semblables à des sourcils de jeune fille grecque ; les yeux sont bleus, le regard doux, quoique un peu tendu par l’observation instinctive dans l’homme qui doit beaucoup peindre ; le nez droit, un peu renflé aux narines comme celui de l’Apollon antique : il jette une ombre sur la lèvre supérieure ; la bouche entière, parfaitement modelée, a l’expression d’un homme qui sourit intérieurement à des images toujours agréables ; le menton, cet organe de la force morale, a beaucoup de fermeté, sans roideur ; une fossette le divise en deux lobes pour en tempérer la sévérité. […] Autrefois un baiser du divin amour descendait sur moi dans ce recueillement solennel du dimanche ; le bruit des cloches remplissait mon âme de pressentiments, et ma prière était une voluptueuse extase ; une ardeur sereine, ineffable, me poussait à travers les bois et les champs, et là, seul, je fondais en larmes, et je sentais comme éclore en moi tout un monde. […] » Il rentre ensuite auprès de Faust et l’emmène, en brillant équipage, à travers le monde, qui ne le reconnaît plus. […] Mais il y avait aussi bien des heures pénibles : le berceau était placé la nuit auprès de mon lit ; son moindre mouvement me réveillait ; il fallait lui donner à boire, la coucher à côté de moi, et, si elle ne se taisait pas vite, se lever du lit et marcher pieds nus à travers la chambre en la berçant ; ce qui n’empêchait pas, sitôt le jour venu, d’être au lavoir, au marché, et ainsi de suite, comme je serai demain. […] Ce n’est pas en vain que tu as tourné vers moi ton visage à travers le feu !

476. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1864 » pp. 173-235

Jeudi 28 Un long moment, nous regardons, à travers la clôture de planches, la démolition de la maison de Gavarni, son pauvre atelier éventré… Gavarni s’est campé dans la petite maison à côté, en un pauvre intérieur, dans l’arrière-boutique d’un épicier de banlieue, où un teinturier occupe le devant. […] * * * 16 juin S’il revenait, l’abbé Galiani ne manquerait pas de dire devant notre temps : « Je cherche un homme qui ne fasse pas carrière et profession d’aimer ses semblables, qui ne fonde pas d’hôpitaux, qui ne s’intéresse pas aux classes pauvres, qui ne s’occupe pas de donner des cachets de bain au peuple, qui ne soit pas membre d’une société protectrice de n’importe quoi, des chevaux ou du bagne, un homme qui ne se sacrifie pas aux déshérités, un homme qui ne se dévoue pas au journalisme, à la députation, à la tirade parlée ou écrite en faveur des malheureux, des pauvres, des soufrants, des êtres marqués de misère ou d’infamie, un homme qui ne soit pas bon, un égoïste enfin : — oui, pour l’amour de Dieu, j’en demande un…, je voudrais en voir un, brutal, cynique, sincère. » * * * 18 juin Cette nuit à deux heures du matin, nous sommes dans le LONG ROCHER, traversant des clairières, où la lune danse comme si elle allait à la cour de la reine Mab, marchant comme à travers un raccourci du Chaos, éclairé par une lumière électrique d’Opéra. […] Elle a le front petit, étroit, bombé, les sourcils forts, un peu plantés au hasard et se reliant à travers le haut du nez, le nez fin de ligne, mais canaille, mais ayant, au bout, le retroussement faubourien, la bouche petite, avec des fossettes aux coins, quand elle rit, les dents qui sont blanches, séparées comme si elles étaient limées, les pommettes pareilles à des pommettes fardées avec de la brique, d’un rouge qui annonce un mauvais estomac, se nourrissant de cochonneries, la peau épaisse et tiquetée sur un fond de hâle, une peau restée une peau de campagne, en dépit de toute la parfumerie parisienne. […] Une allée de haute futaie paraissant emplie d’une lumière électrique, vue à travers un globe dépoli, une lumière vaporeuse et diffuse, effaçant le vert des feuilles, et les baignant dans un fluide pâle et miroitant, semblable à l’eau d’un fleuve qui roule du gaz noyé. — Sur les grands arbres obscurs, çà et là, des bouquets de feuilles ayant, comme les frottis de rousse verdure, faits par le pinceau de Watteau, et dans les petits taillis, tout noirs, un rayon sautillant en maigres zigzagures, coulant sur le revers d’un fossé, s’enfouissant comme une luciole dans une touffe d’herbe. — Près de l’étang, des silhouettes d’arbres, qu’on semble entrevoir à travers la buée d’un carreau. — Comme bruit, rien que la course trotte-menue d’un lapin attardé dans la broussaille, et à toute minute, le bruit de la chute d’une feuille, détachée par l’automne, et qui touche la terre, avec quelque chose du frôlement du pas d’une ombre Un silence, mais un silence pourtant vivant par l’insensible friselis des feuilles au haut des arbres, par la sorte de respiration à l’haleine humide, des fourrés endormis. — Des allées sous bois, aux grands espaliers ténébreux, avec d’étroites zébrures de jour sur le chemin, et fermées par une arcade d’ombre, ayant tout au fond, une petite porte de lumière. — Au loin les prairies apparaissant avec le vert incolore, qu’y met la nuit, et tachées des grandes ombres couchées et sommeillantes des chênes de la lisière du bois. — La lune dans le ciel : un diamant dans un lait d’opale. — Une nature couleur de rêve… Le paysage élyséen d’un promenoir d’âmes… Puis, par instants, le ciel se voilant, et le bois devenant d’ébène sous un ciel d’étain… Assis sur un banc, nous avons passé une heure de pénétrante volupté, à jouir de cette nuitée du bois.

477. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1887 » pp. 165-228

… Et bien, il y a là dedans, un mendiant en train de se chauffer auprès du feu, passant à travers son manteau, qui fait comme les étoiles dans le ciel, la nuit… Oh mais là, vous savez, c’est un grand, lyrique !  […] Et il parle des gens de finance, à éclipse dans les prisons, nous en citant un, sans le nommer, qu’il faisait mettre à Mazas, et qu’il retrouvait, quelque temps après, à un dîner du ministère, à la droite du ministre, et de là lui envoyant un petit signe bienveillant de protection ; nous citant un autre, qui, dans ses passages à travers deux ou trois prisons, avait fait décorer de décorations étrangères, tous les directeurs et gros employés. […] Nous voilà nous promenant à travers la cuisine intime de la représentation, assistant à la suppression d’une tirade, au raccourcissement d’une jupe, à la fabrication de glaces, si joliment imitées avec de la ouate mi-partie blanche, mi-partie rose. […] C’est un constructeur d’individus, un metteur en scène des foules, des multitudes : tout cela avec un peu de confusion, un peu de brouillard à travers les pages du bouquin ; mais ça ne fait rien, Le Bilatéral est un maître livre. […] Entre un poulet effaré qui jette des pipi plaintifs, à travers ses reproches.

478. (1884) Articles. Revue des deux mondes

N’est-ce pas aussi l’idée du progrès qui circule à travers le drame magnifique de Prométhée ? […] Naudin, chacune des espèces, primitivement peu nombreuses, d’êtres vivans est la manifestation d’une force plastique qui se développe et se transmet à travers les générations successives des individus, jusqu’à ce qu’elle ait atteint le terme fatal de son évolution. […] Bien plus, génie, vertu, sont des manifestations, et les plus élevées, de cette énergie dont il n’a été départi à chaque peuple qu’une somme limitée, en sorte que la vie collective se dépense tout autant, plus peut-être par les héros, les martyrs, les grands hommes, que par ces générations obscures d’individus sans mérite et sans gloire dont les flots déroulent à travers quelques siècles et sur un point du globe les destinées fatalement bornées d’une nation. […] De là sans doute la doctrine de la métempsychose, qui fait circuler les âmes humaines à travers toutes les formes animales ; de là, jusque chez Aristote, cette opinion étrange que les abeilles participent, comme nous, à l’intellect actif, parce qu’elles sont capables de concevoir la régularité abstraite de certaines figures géométriques ; de là ce symbolisme qui, au moyen âge, figurait les vices et les vertus des hommes, le bien ou le mal, par les habitudes vraies ou supposées des animaux. […] Il en suit l’histoire et les procédés à travers tous les échelons de la nature vivante et en a fait l’objet d’un traité spécial qui passe à bon droit pour son chef-d’œuvre en zoologie.

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