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40. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre I : Des sens, des appétits et des instincts. »

Leur action sourde, obscure, mais continue, exerce une incontestable influence sur notre vie psychologique. […] Nous lui devons les sentiments agréables provenant du bon état des organes digestifs, l’influence maligne exercée par leur mauvais état, les sensations de nausée et de dégoût, la mélancolie causée par les maladies d’estomac et d’intestins. Ajoutons-y les sensations de chaud et de froid, leur influence sur l’activité des fonctions organiques, — enfin les sensations d’état électrique, soit qu’elles résultent de l’emploi des machines, soit qu’elles aient une cause naturelle, comme l’état de malaise qui précède un orage. […] Que l’on remarque encore la liaison intime qui existe entre le goût, l’odorat et l’estomac, et l’on conclura de tous ces faits que cette harmonie naturelle entre nos divers mouvements exerce une grande influence sur notre vie mentale. […] Aucun psychologiste n’avait encore montré le rôle de ces mouvements instinctifs, et leur influence sur la volonté ; c’est dans Müller qu’il faut la chercher167.

41. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Ch.-L. Livet »

Homme de son temps (c’est l’éloge du temps), et voyant partout, comme les historiens de ce temps, des influences, il a pénétré celle qu’exerça la marquise de Rambouillet : « Sous cette influence — dit-il — les hommes commencèrent à rechercher la société des femmes, qu’ils n’avaient jamais recherchée jusque-là. » On le sait, ils vivaient dans les bois ! […] Peut-être parce qu’il est plus loin, son bleu paraît plus doux… Fille adoptive de Michel Montaigne, qui avait fourré ses jeunes mains dans le manchon du vieux sceptique, elle les en avait retirées pénétrées de son influence, et cette influence lui était restée. […] Je défie bien de lire de suite sans être écœuré cette Guirlande de Julie que Livet a transcrite à la fin de son ouvrage, pour nous démontrer, sans nul doute, l’influence heureuse de ces affreuses fadeurs sur la langue et la littérature.

42. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Armand Pommier » pp. 267-279

On ne peut pas dire précisément qu’il ait créé le roman physiologique, mais il lui donna le grand caractère que son génie donnait à tout, et par son exemple il imprima plus profondément la marque de cette influence du temps, à laquelle nul ne peut se soustraire sans s’appauvrir, à tous les romans qui suivirent les siens. Prenez-les tous, en effet, depuis les meilleurs jusqu’aux pires, et cherchez si la physiologie, si l’influence ou l’explication, ou le mystère, ou l’effet, ou le mot physiologiques, n’y sont pas visibles ou latents, sommeillants ou éveillés, à fleur ou à fond de sujet. […] La Critique, qui doit tout comprendre et tout embrasser, excepté le faux, la Critique, qui doit même se réjouir de ce que la science ait investi l’art d’une force nouvelle, devait non-seulement applaudir à l’influence physiologique dans le roman, et dans le roman de la moralité la plus spirituelle, mais elle devait même encourager, sous toute réserve, le genre spécial du roman, qui allait fatalement tendre à se constituer, et qu’on peut appeler le roman purement physiologique. […] En effet, même là où j’approuve et où j’apprécie l’influence de la physiologie sur le roman, dont elle sera, dans le monde moderne, une des gloires, je dirai que, même là, il ne faut procéder qu’avec des précautions infinies, car savez-vous de quoi il retourne ? […] Évidemment, au dix-neuvième siècle, avec l’influence physiologique qui pleut sur nos têtes, avec l’empoignement de l’Imagination publique par ces questions de magnétisme contre lesquelles les plus forts d’entre nous vont à chaque instant se cogner, évidemment les romanciers et les poëtes (dramatiques ou non dramatiques) devaient avoir une autre manière de toucher à cette corde mystérieuse du système nerveux humain, dont le génie de Shakespeare a tiré une vibration si déchirante, rien que pour l’avoir effleurée !

43. (1809) Tableau de la littérature française au dix-huitième siècle

Telle est l’idée qu’ils pourraient se former de l’influence des hommes de lettres. […] Pascal, qui alors commença à briller, se ressent aussi de ces influences. […] L’influence de Louis XIV ne fit rien naître de semblable autour de lui. […] Mais si Virgile avait fui l’influence de la cour d’Auguste, Voltaire fut, au contraire, loin d’éviter l’influence de la cour du Régent. […] Il semble qu’il en ait été de même pour l’influence des opinions nouvelles.

44. (1914) L’évolution des genres dans l’histoire de la littérature. Leçons professées à l’École normale supérieure

Sous quelles influences ? […] Là est son œuvre, et là sa gloire : là aussi le principe de son influence. […] Je me suis proposé d’examiner quelle est l’influence de la religion, des mœurs et des lois sur la littérature, et quelle est l’influence de la littérature sur la religion, les mœurs et les lois. […] C’est pour cela que l’influence de la littérature nationale sur les littératures étrangères n’y tenait pas moins de place. […] J’estime seulement, pour ma part, que l’on a trop donné, beaucoup trop, à l’influence du sang ou de la race, et je tâcherai de vous le montrer.

45. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre I. La critique » pp. 45-80

… Toutefois, nous serions mal venus à ne pas constater le désarroi apparent de la critique et son influence inefficace sur l’élite. […] Charles Maurras. — En général, depuis dix ans, l’effort de la critique tend à ruiner l’influence romantique dans le livre et au théâtre, soit au profit d’un art social, soit au profit d’une renaissance classique, ou si vous le voulez d’une renaissance latine. […] Mais c’est un critique qui sait ce dont il parle, qui connaît sa langue et l’histoire de sa langue, qui a du bon sens, et une conscience très haute de sa beauté, de son influence civilisatrice, et qui se lamente à regarder l’anarchie actuelle, la décadence prochaine. […] Polti, — avec une éducation très complète de l’intelligence scénique, — le sens de la continuité, de l’influence et des ressorts d’une idée dramatique, idée que le ciel, la race, la terre ont créée. […] Lapauze (Le Gaulois), érudit et curieux, suffisent à démontrer que la critique des quotidiens conserve encore une influence et des mérites.

46. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre IV Le Bovarysme des collectivités : sa forme imitative »

La Renaissance peut être considérée comme l’une des époques où l’énergie d’une société s’est transformée de la façon la plus violente sous l’influence d’un modèle offert par une civilisation antérieure. […] Sous l’influence de l’idéal hellénique et latin le génie du moyen âge fut contraint de biaiser, de se concevoir différent de soi-même. […] Si l’architecture civile conserve encore quelque pureté à l’époque de Louis XIII, là aussi, pourtant, l’imitation du modèle étranger nous opprime et cette influence va grandir. […] Ainsi, en tous les ordres de l’activité mentale, l’influence de la culture antique a. contraint l’esprit français, au xvie  siècle, à se concevoir quelque peu différent de lui-même, et on ne saurait nier que cette fascination ne se soit fait sentir parfois avec trop de force et au détriment de la civilisation déjà formée qui la subissait.

47. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre V. Le mouvement régionaliste. Les jeunes en province » pp. 221-231

Rapidement, ils acquirent une influence énorme, un tirage inconnu de la plupart des organes parisiens. […] Ces périodiques, ces groupements ont eu une influence heureuse sur la jeunesse de ce temps. […] Certes, il ne faudrait pas croire à une entente parfaite, à un succès définitif64, à une unanime ambition, non ; mais leurs conférences, les récitations de poèmes organisées par elles dans les théâtres municipaux des grandes cités provinciales, par leurs enquêtes, par les livres qu’elles ont éditées, par la facilité qu’elles donnent à des jeunes gens de se faire connaître, ces revues ont acquis une influence. […] Les jeunes revues provinciales ont eu une influence littéraire autant que morale.

48. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — I »

I L’influence de M.  […]   Je m’arrête encore dans ce raccourci que j’essaye de tracer de l’influence de Taine sur la pensée française. Je la sens si vivement, cette influence, je lui garde, à cet illustre mort, une si vive reconnaissance !

49. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre II. La Nationalisation de la Littérature (1610-1722) » pp. 107-277

Mais, d’une manière générale, sous l’influence des précieuses, la littérature, les mœurs même s’épurent, ou si l’on veut, se polissent. […] L’influence italienne se mêle à l’espagnole. […] Sous l’influence de toutes ces causes, la langue, elle aussi, change de caractère. […] 4º Influence de la Préciosité. […] De l’influence que Bossuet a exercée sur ses contemporains, — et de l’injustice du reproche qu’on lui fait [Cf. 

50. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre III. Les explications anthropologique, idéologique, sociologique »

Une explication par les influences « mésologiques » sera donc, toutes choses égales d’ailleurs, plus déterminante qu’une explication par les influences « ataviques ». […] Et c’est pourquoi tout ce qu’on enlève à l’influence du « génie des races » pour l’attribuer à l’influence de circonstances précises est autant de gagné pour la science. […] Seulement, par cela même qu’elle se présente comme une science abstraite de l’histoire, ce sera moins une science de causes suffisantes et de lois immuables qu’une science de tendances et d’influences. Mais au moins, dira-t-on, pour que vous puissiez induire les tendances et les influences qui ont contribué à l’expansion des idées égalitaires, vous faudra-t-il avoir quelques cas à comparer : or, en délimitant votre champ d’observation, ne l’avez-vous pas réduit à un cas unique ?

51. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Du docteur Pusey et de son influence en Angleterre »

Du docteur Pusey et de son influence en Angleterre [Revue du Monde catholique, 15 février et 15 mars 1848.] […] C’est depuis 1820 surtout que les prétentions du parti anglo-catholique, inspirées par d’impérissables souvenirs et appuyées sur la science, ont contracté un degré de netteté et d’influence légitime qu’il a été impossible, même aux plus fanatiques anglicans, de méconnaître. […] Malgré le nombre des anglo-catholiques au sein de l’Église anglicane, la Grande-Bretagne, cette image glorieuse de la concentration politique, n’en a pas moins ressenti les influences funestes du protestantisme continental. […] Il eut comme peur de son influence, peur de cette éclatante renommée qui se fixait par son nom sur le front de chaque homme qui pensait comme lui. […] Voyez, en effet, comme sa position vis-à-vis du monde tout entier en serait simplifiée et ses influences agrandies !

52. (1864) Physiologie des écrivains et des artistes ou Essai de critique naturelle

Par là les influences des climats et des races se croisent et se modifient. […] En effet, outre les influences générales du climat, du sol, de la race, il est évident que les influences particulières du sang et de la parenté sont considérables, infinies. […] Cela pourra avoir. tout au plus, quelque influence sur sa force matérielle, sur sa forme, sur sa taille. […] Le souci m’enveloppe… » Le vêtement a donc son influence, comme le temps et comme l’air. […] Au-delà de l’influence du sang et des circonstances de la naissance, il y a, chez l’artiste comme chez l’écrivain, l’influence de la race et de la nationalité.

53. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIe entretien. Biographie de Voltaire »

À un autre titre encore, ils se rappellent sans se ressembler : c’est par la vaste et longue influence qu’ils exercèrent sur leur pays et sur le monde. […] L’influence alternative de Voltaire sur l’esprit humain a suivi depuis 1778 la destinée de ce cercueil. Cette influence croissante pendant les dix ans qui précédèrent la Révolution française, de 1778 à 1789, fut dépassée en 1793 par celle de J. […] L’influence de Voltaire reprit son ascendant sous le Directoire jusqu’au consulat de Bonaparte, qui restaura une religion d’État comme base de sa monarchie future et comme piédestal sacré de son trône. […] Cette influence de Voltaire resta vivante, mais inerte, sous le gouvernement de la maison d’Orléans, dont on redoutait moins l’alliance avec le clergé.

54. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Deuxième leçon »

Dans la chimie, on considère toutes les combinaisons possibles des molécules, et dans toutes les circonstances imaginables ; dans la minéralogie, on considère seulement celles de ces combinaisons qui se trouvent réalisées dans la constitution effective du globe terrestre, et sous l’influence des seules circonstances qui lui sont propres. […] En effet, non seulement les diverses parties de chaque science, qu’on est conduit à séparer dans l’ordre dogmatique, se sont, en réalité, développées simultanément et sous l’influence les unes des autres, ce qui tendrait à faire préférer l’ordre historique ; mais en considérant, dans son ensemble, le développement effectif de l’esprit humain, on voit de plus que les différentes sciences ont été, dans le fait, perfectionnées en même temps et mutuellement ; on voit même que les progrès des sciences et ceux des arts ont dépendu les uns des autres, par d’innombrables influences réciproques, et enfin que tous ont été étroitement liés au développement général de la société humaine. […] Chacun sait, en effet, que toute action chimique est soumise d’abord à l’influence de la pesanteur, de la chaleur, de l’électricité, etc., et présente, en outre, quelque chose de propre qui modifie l’action des agents précédents. […] Les phénomènes considérés par la dernière sont, au contraire, les plus particuliers, les plus compliqués, les plus concrets, et les plus directement intéressants pour l’homme ; ils dépendent, plus ou moins, de tous les précédents, sans exercer sur eux aucune influence. […] Car, quoique la méthode soit essentiellement identique dans toutes, chaque science développe spécialement tel ou tel de ses procédés caractéristiques, dont l’influence, trop peu prononcée dans les autres sciences, demeurerait inaperçue.

55. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Discours préliminaire » pp. 25-70

Discours préliminaire Je me suis proposé d’examiner quelle est l’influence de la religion, des mœurs et des lois sur la littérature, et quelle est l’influence de la littérature sur la religion, les mœurs et les lois. […] C’est dans ce genre seul que la gloire littéraire a été acquise, et qu’on peut reconnaître sa véritable influence. […] L’homme, créé par la nature pour les relations domestiques, ne porte son ambition au-delà que par l’irrésistible attrait de l’estime générale ; et c’est sur cette estime, formée par l’opinion, que le talent d’écrire a la plus grande influence. […] Les sciences et les arts sont une partie très importante des travaux intellectuels ; mais leurs découvertes, mais leurs succès n’exercent point une influence immédiate sur cette opinion publique qui décide de la destinée des nations. […] L’influence trop grande de l’esprit militaire, est aussi un imminent danger pour les états libres ; et l’on ne peut prévenir un tel péril que par les progrès des lumières et de l’esprit philosophique.

56. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre III. La complication des sociétés »

Quelle influence la complication des sociétés ainsi définie peut-elle exercer sur l’idée qu’elles se font de la valeur des hommes ? […] Toutefois, sans parler encore de tout ce qui peut limiter ces exigences propres, est-il vrai que ces influences soient, partout et toujours, aussi « isolantes » qu’on le prétend ? […] La forme sociale dont nous venons d’établir la réalité peut, d’abord, exercer sur le mouvement des idées une influence indirecte, par l’intermédiaire d’autres formes sociales qu’elle provoque et dont l’influence nous est déjà connue. […] Mais il faut remarquer ce qu’ajoutent, à ces influences déjà analysées, les caractères propres à la forme sociale que nous venons de définir. […] Guizot l’observe justement, lorsqu’il oppose, à l’influence bienfaisante du catholicisme, l’influence funeste du mahométisme : « C’est dans l’unité des pouvoirs temporel et spirituel, dans la confusion de l’autorité morale et de la force matérielle que la tyrannie, qui paraît inhérente à la civilisation mahométane, a pris naissance175. » Ce serait au contraire le privilège de notre civilisation que la multiplicité des principes176.

57. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Introduction. Du bas-bleuisme contemporain »

Il y a un monde d’autres choses ; mais comptez en premier l’influence du principe qui commande au siècle, et qui, comme tout principe, doit se vider, un jour ou l’autre, intégralement de tout ce qu’il contient. […] En Amérique où l’homme est tout muscle et tout calcul, l’influence exagérée ou prépondérante de la femme ne peut avoir la même portée que chez un peuple d’imagination et de nerfs. […] En effet le genre d’influence que la femme exerçait en France et en Europe, aux temps chevaleresques de leur double histoire, n’est plus, et toute trace en est effacée ; mais elle a été remplacée par une autre, moins généreuse et plus grossière, — et cette autre espèce d’influence tend à devenir un empire, — le Bas-Empire d’un temps où les Monarchies ne tombent plus en quenouille, mais les Mœurs, — si on peut dire de quelque chose « tomber en quenouille » alors que les femmes n’en veulent plus ! […] Enfin, jusqu’en religion, la sphère impénétrable, l’influence de la femme a, par je ne sais quels invisibles pores, pénétré… Des esprits hardis ont irrévérencieusement écrit que présentement la Vierge primait Jésus-Christ.

58. (1842) Discours sur l’esprit positif

Jusque chez ceux qui conservaient la foi dogmatique, cette funeste influence se faisait indirectement sentir, parce que l’autorité sacerdotale, après avoir perdu son indépendance politique, voyait aussi décroître de plus en plus l’ascendant social indispensable à son efficacité morale. […] L’antique régime mental ne pouvait le stimuler qu’à l’aide de pénibles artifices indirects, dont le succès réel devait être fort imparfait, vu la tendance essentiellement personnelle d’une telle philosophie, quand la sagesse sacerdotale n’en contenait pas l’influence spontanée. […] Si cette inévitable opposition devait se borner aux esprits essentiellement théologiques ou métaphysiques, elle offrirait peu de gravité réelle, parce qu’il resterait un puissant appui chez ceux, dont le nombre et l’influence croissent journellement, qui sont surtout livrés aux études positives. […] Les divers observateurs qui peuvent s’affranchir, même momentanément, du tourbillon journalier s’accordent maintenant à déplorer, et certes avec beaucoup de raison, l’anarchique influence qu’exercent, de nos jours, les sophistes et les rhéteurs. […] Cette prépondérance nécessaire de la science astronomique dans la première propagation systématique de l’initiation positive est pleinement conforme à l’influence historique d’une telle étude, principal moteur jusqu’ici des grandes révolutions intellectuelles.

59. (1856) Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine. Tome II

Cette sécrétion de la salive sous-maxillaire se trouve également liée à d’autres influences nerveuses. […] Quand on fait sécréter cette glande sous l’influence d’une substance sapide, on observe que le suc gastrique se sécrète également. […] L’animal éprouva la sensation gustative, et fit sous cette influence des mouvements de mâchoire et des mouvements de déglutition. […] Le lendemain ou deux jours après l’opération, probablement sous l’influence d’un peu de péritonite locale, la sécrétion se montra altérée. […] Deux jours après, le chien parut malade et sembla être sous l’influence d’une péritonite violente.

60. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre cinquième. De l’influence de certaines institutions sur le perfectionnement de l’esprit français et sur la langue. »

De l’influence de certaines institutions sur le perfectionnement de l’esprit français et sur la langue. […] Il ne serait pas plus vrai de lui en donner la louange, que de lui contester toute influence sur les auteurs. […] Aucune influence n’y fut plus efficace que celle des écrivains de Port-Royal. […] Si la reconnaissance de Boileau est si vive, c’est qu’il y entre un souvenir du secours qu’il avait tiré de la discipline et de l’influence d’Arnauld. Cette influence, qui s’est exercée sur des hommes de la trempe de Boileau (et combien plus sur tout le public éclairé d’alors !)

61. (1853) Histoire de la littérature française sous la Restauration. Tome I

L’influence qu’exercent de pareils livres devient grande à la longue ; car les opinions ne montent pas, elles descendent. […] Fontanes. — Ses écrits. — Son influence littéraire et universitaire […] Influences morales et politiques ; leur action sur la littérature. […] Influences des littératures étrangères : Allemagne, Angleterre ; madame de Staël, lord Byron. […] Ceci suffit pour faire entrevoir les résultats fâcheux de son influence littéraire.

62. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 15 décembre 1886. »

Chose étrange et qui prouve combien alors devait être grande chez nous l’influence parisienne, ce ne fut que deux ans après leur fondation, en 1867, que M.  […] IV : conclusion ; aperçu général du système wagnérien ; influence de Richard Wagner sur la musique contemporaine. […] L’influence de l’opinion publique sur le théâtre est toujours mauvaise. […] » Le théâtre, au contraire, exerce une influence directe et immédiate, et est le seul art qui soit accessible au peuple en entier […] Thode démontre que Saint François d’Assise a exercé une influence absolument déterminante sur l’avènement de la Renaissance.

63. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

L’influence dont je parle, ce fut celle de la prédication et des liturgies chrétiennes. […] Ainsi, première influence, influence pieuse et canonique de l’imagination orientale, passant par le christianisme, et allant réchauffer les esprits du Septentrion. […] Nous montrerons sa hardiesse, et son influence sur le moyen âge. […] Une influence glorieuse fut dès lors réservée à ce dialecte. […] Nul doute que c’est à Charlemagne qu’il faut reporter cette première influence.

64. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Dumas, Alexandre (1802-1870) »

Ce type lui est d’abord apparu sous les traits de Saint-Mégrin, dans son drame de Henri III ; puis quand il a cédé à l’influence transitoire de la passion révolutionnaire, sous les traits de Robespierre dans l’histoire, d’Antony dans le drame ; dès que la passion de 1830 est refroidie, on voit reparaître dans ses ouvrages toute une famille de personnages dont Saint-Mégrin est l’aîné, intelligences avisées et pleines de ressources, caractères sans peur et sans scrupules, poignets vigoureux, beaux joueurs qui se font place dans le monde à la pointe de l’épée et de l’esprit : Saint-Mégrin, dans Henri III ; d’Artagnan, dans les Mousquetaires ; Bussy, dans la Dame de Monsoreau… Sans doute, M.  […] Le père de d’Artagnan a une philosophie de l’histoire éminemment agréable et facile, où tout s’explique par l’amour, par la vaillance ou la subtilité des aventuriers généreux aimés des femmes et par l’influence des grandes dames scélérates ou des courtisanes sympathiques. […] Parigot démêle la part des influences anglaises et allemandes sur la formation de Dumas. […] C’est même à travers l’influence de Schiller qu’il a subi le plus celle de Shakespeare.

65. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. J. J. AMPÈRE. » pp. 358-386

L’influence de tels travaux, il faut tout d’abord le reconnaître, est bien antérieure d’ordinaire à la publication qui s’en faite sous forme de livres ; et, pour ce qui est de M. Ampère en particulier, voilà sept années au moins que cette influence existe, qu’elle féconde les directions des jeunes esprits laborieux, qu’elle stimule, qu’elle éclaire les travaux collatéraux des autres critiques, qu’elle réagit même sur les talents des maîtres plus mûrs, pour les avertir à quelques égards d’un certain progrès nouveau. […] Ampère, il ne m’appartient pas de raconter en détail la diversité et la multiplicité des influences, ou, pour mieux dire, des aimantations successives que reçut ce noble esprit avant d’arriver à sa formation entière et à sa constitution actuelle. […] Je ne multiplierai pas les échantillons de détail ; mais l’influence espagnole elle-même, qui se fait sentir à cette époque Louis XIII, comme elle se prolongeait dans la littérature galloromaine, est une ressemblance de plus ; il y eut beaucoup d’auteurs gascons des deux parts. […] Ampère, qui reprend les choses dès l’origine et les embrasse dans tout leur cours selon chacune des branches de leur développement, a cet avantage de n’omettre aucune des influences et aucun des précédents que les autres critiques n’ont saisis jusqu’ici que par un heureux hasard de coup-d’œil ou de réminiscence, et comme à la volée.

66. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XI. La littérature et la vie mondaine » pp. 273-292

Il s’ensuit qu’en étudiant les effets littéraires de la vie mondaine, c’est une série d’influences à la fois aristocratiques et féminines qu’il s’agit de préciser. […] En même temps que l’influence mondaine amaigrissait la langue en l’affinant, elle gâtait le style en l’ennoblissant hors de propos. […] L’influence du monde s’est fait sentir à bien d’autres choses dans la littérature française. […] Les méfaits de l’influence mondaine sont plus graves encore, si l’on regarde les genres littéraires qui ont des visées plus sérieuses et plus hautes. […] Tout cela est connu, mais prouve avec quel soin il faut étudier, sous les deux faces qu’ils présentent, les résultats de l’influence mondaine.

67. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre II : De la méthode expérimentale en physiologie »

L’être vivant, en effet, nous apparaît comme animé d’une force intérieure qui préside à des manifestations vitales de plus en plus indépendantes des influences cosmiques, à mesure que l’être s’élève davantage dans l’échelle de l’organisation. […] Cette indépendance, qui affranchie en apparence le corps vivant des influences physico-chimiques, le rend par là très-difficilement accessible à l’expérimentation. […] Sans doute les corps organisés manifestent des propriétés que ne connaissent pas les corps bruts : par exemple, ils sont irritables, ils réagissent sous l’influence de certains excitants ; mais jamais on ne verra se produire chez eux un mouvement absolument spontané. […] Les propriétés vitales elles-mêmes n’entrent en action que sous l’influence des agents physico-chimiques, externes ou internes, et ainsi la loi de l’inertie se trouve partout vérifiée. […] Pendant toute sa durée, l’être vivant reste sous l’influence de cette même force vitale créatrice, et la mort arrive lorsqu’elle ne peut plus se réaliser.

68. (1886) De la littérature comparée

Cependant, le développement des études historiques, en favorisant la connaissance des milieux et la comparaison entre les époques, attira bientôt l’attention sur le phénomène, longtemps négligé des variations du goût : on remarqua qu’un siècle ne ratifie pas toujours les jugements du siècle précédent ; que telle tragédie portée aux nues à son apparition peut cependant tomber dans un oubli définitif ; que des gloires illustres entre toutes s’éclipsent pendant des périodes entières et ne reparaissent ensuite dans leur éclat que sous l’influence de circonstances qu’il est possible de déterminer ; que les poètes préférés d’une nation demeurent souvent incompris par la nation voisine. […] Des écrivains, comme Villemain d’abord, puis comme Sainte-Beuve, ne se contentèrent plus de proclamer leur jugement sur les œuvres et sur les hommes, mais cherchèrent à les expliquer et s’appliquèrent à déterminer, non plus leur valeur absolue, mais leur « sens historique ». — À mesure qu’il avance dans sa carrière d’écrivain, Sainte-Beuve tend à rapprocher davantage la critique de l’histoire : ses études, dont le recueil constitue un document si précieux pour l’histoire des lettres modernes, s’écartent de plus en plus du point de vue essentiellement esthétique de ses devanciers et de ses contemporains ; ses appréciations s’entourent de notes sur les ascendants de l’auteur, qu’il examine, sur sa famille, sa ville, sa province, sa race ; puis sur son enfance, sur l’éducation qu’il a reçue, sur les influences qu’il a subies ; puis il recherche quelles ont pu être ses opinions sur les matières les plus importantes : quelles étaient ses croyances religieuses ? […] Pendant les deux siècles classiques, vous chercheriez en vain des exemples d’une pareille indépendance parmi les écrivains français ou italiens, qui viennent docilement se ranger sous la fécule d’Aristote et accomplissent ce tour de force, merveilleux et inutile, de couler les sentiments de leur époque dans des moules surannés. — Il faut donc que certaines nations, pour des raisons que nous rechercherons peut-être un jour, aient conservé plus profondément que d’autres leur empreinte primitive, et c’est à cette persistance que nous devons en partie notre émancipation actuelle de l’influence antique. On peut affirmer ce fait avec d’autant plus de certitude, que le triomphe du mouvement auquel on a donné le nom de « romantisme » se trouve correspondre à peu près avec le grand élan national de l’Allemagne au commencement du siècle et avec la période historique où, à la suite de Waterloo, l’influence anglaise a été le plus solidement établie. […] Posnett ne s’en tient pas là : après avoir constaté que les faits d’influence permanente, tels que le climat, le sol, etc., constituent les influences statiques dont dépend le développement de la littérature, il croit en trouver le principe dynamique dans la loi de l’évolution de la vie commune à la vie personnelle.

69. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE STAEL » pp. 81-164

L’Empire a eu également ses distinctions dans ce sexe, alors pourtant de peu d’influence. […] Elle subit bientôt, et, dans son livre de l’Influence des Passions, elle exprime toute la tristesse du stoïcisme vertueux en ces temps d’oppression où l’on ne peut que mourir. […] L’auteur, en effet, qui n’a traité au long que de l’influence des passions sur le bonheur des individus, avait dessein d’approfondir en une seconde partie l’influence des mêmes mobiles sur le bonheur des sociétés, et les questions principales que présageait cette immense recherche sont essayées et soulevées dans une introduction éloquente. […] Schlegel avait bien quelque influence sur elle, mais très-souvent elle différait d’opinion avec lui, et elle lui reprochait sa partialité. […] Elle y proposait, à la Révolution française et à la Restauration elle-même, une interprétation politique destinée à un long retentissement et à une durable influence.

70. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXIV » pp. 251-258

. — Influence de la société polie sur les mœurs générales et sur le langage. — Mots qu’elle élimine de la langue. […] Une circonstance déjà remarquée favorisa cette influence : à la tête du parti des mœurs était madame de Montausier, appelée à la cour de Louis XIV comme la représentante de la société des honnêtes femmes, avec laquelle le jeune monarque avait voulu se mettre en bonne intelligence, dont il voulait être l’allié, en attendant qu’il se sentit la force d’en devenir l’ami. Et qui pourrait affirmer que l’espèce de trahison du roi envers cette même madame de Montausier, lorsqu’il trompa la reine et elle sur ses relations avec madame de Montespan, l’incurable maladie qui accabla madame de Montausier lorsqu’elle fut détrompée, et enfin sa mort, qui arriva pendant que l’Amphitryon de Molière amusait la cour et le public par le spectacle d’un mari malheureux ; qui oserait assurer, malgré les apparences, que ces faits n’eurent aucune influence sur l’esprit du roi ?

71. (1874) Premiers lundis. Tome II « Jouffroy. Cours de philosophie moderne — II »

Il est une molécule vivante, incessamment excitée et modifiée par l’organisme social dont elle fait partie intégrante ; arrêter la molécule, la monade, au point où on la trouve, la détacher du tout, la soumettre au microscope ou au creuset expérimental, la retourner, la décomposer, la dissoudre, et conclure de là à la nature et à la destinée du tout, c’est absurde ; conclure seulement à la nature et à la destinée de la molécule, c’est encore se méprendre étrangement ; c’est supprimer d’abord, dût-on y revenir plus tard et trop tard, c’est supprimer le mode l’influence que l’individu reçoit du tout, à peu près comme Condillac faisait pour les détails organiques de sa statue, qu’il recomposait ensuite pièce à pièce sans jamais parvenir à l’animer ; c’est, comme lui, par cette suppression arbitraire, rompre l’équilibre dans les facultés du moi et se donner à observer une nature humaine qui n’est plus la véritable et complète nature ; c’est décerner d’emblée à la partie rationnelle de nous-mêmes une supériorité sur les facultés sentimentale et active, une souveraineté de contrôle qu’une vue plus générale de l’humanité dans ses phases successives ne justifierait pas ; c’est immobiliser la monade humaine, lui couper la source intarissable de vie et de perfectibilité ; c’est raisonner comme si elle n’avait jamais été modifiée, transformée et perfectionnée par l’action du tout, ou du moins comme si elle ne pouvait plus l’être ; c’est supposer gratuitement, et le lendemain du jour où l’humanité a acquis la conscience réfléchie de sa perfectibilité, que l’individu de 1830, le chrétien indifférent et sans foi, ne croyant qu’à sa raison personnelle, porte en lui, indépendamment de ce qui pourrait lui venir du dehors, indépendamment de toute conception sociale et de toute interprétation nouvelle de la nature, un avenir facile et paisible qui va découler, pour chacun, des opinions et des habitudes mi-partie chrétiennes, mi-partie philosophiques, mélangées à toutes doses. […] Une psychologie est toujours subordonnée à la dernière révélation qui a transformé l’homme ; nos psychologistes d’aujourd’hui demeurent, sans le savoir, sous l’influence de Jésus et des deux natures qu’il nous a révélées. […] Du moment que Dieu n’est plus conçu comme un être à part et hors du monde, du moment qu’il est inséparable de la nature et de l’humanité, et qu’il se manifeste uniquement en elles et par elles, du moment enfin que le mal cesse d’être un principe positif ennemi du bien, dès lors l’homme n’a plus peur de Satan, de même qu’il n’a plus besoin de médiateur pour entrer en rapport avec Dieu ; la communication est directe, immédiate ; il sent l’influence divine dans chacune de ses relations avec les hommes et avec les choses ; il ne s’imagine aucunement devoir recourir à des envoyés mystérieux, à des anges ; et les anges, les envoyés mystérieux, les démons ne lui viennent pas. […] En effet, tout progrès nouveau est une révélation de Dieu à l’homme, une ascension de l’homme à Dieu ; le savant qui invente y est soumis comme l’artiste le plus sentimental ; il y a, dans toute conception nouvelle du génie, une sorte d’influence électrique, irrésistible, indéfinissable, un acte de foi de nous à Dieu, une volonté de Dieu en nous. […] Eux aussi ont parlé de l’activité de l’homme, mais ce n’a jamais été que de l’activité de la substance esprit, et à cette égard ils se sont montres, comme toujours, sous l’influence de la conception chrétienne, qui confond la volonté avec l’acte.

72. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série «  Les femmes de France : poètes et prosateurs  »

Brunetière a récemment étudié62 la plus importante de ces questions : celle de l’influence des femmes sur notre littérature. Cette influence, il nous l’a montrée bienfaisante — et restrictive : comment les femmes, par les salons, ont imposé et appris aux écrivains la décence et l’agrément, comment aussi elles ont émoussé l’originalité de quelques-uns et les ont, par trop de souci de l’agrément, détourné de certains problèmes et d’une vue complète de la vie. […] Comme leur sexe les rend très malléables aux influences extérieures, elles représentent avec moins de mélange peut-être que les hommes, l’esprit des temps où elles ont vécu ; et, en outre, comme la vocation littéraire chez les femmes suppose, plus que chez nous, par son caractère d’exception, un don spontané et original ou une vie un peu en dehors de la règle commune, presque toutes nous offrent, en effet, dans leur caractère ou dans leur existence, des traits imprévus et piquants. […] L’influence des femmes sur la marche et le développement de la littérature française s’est beaucoup moins exercée par les ouvrages qu’elles ont composés que par la conversation, par les salons, par les relations de société qu’elles ont eues avec les écrivains. […] Car si elles ont joué ce rôle, si elles ont eu cette influence, c’est qu’elles ont su se faire infiniment charmantes et séduisantes.

73. (1912) L’art de lire « Chapitre IX. La lecture des critiques »

Ajoutez qu’une certaine paresse aidant, ou, si vous voulez, la loi du moindre effort, je me contenterai bientôt de savoir ce que pensent des auteurs les critiques les plus autorisés, sans jamais lire les auteurs eux-mêmes ; d’abord, parce que — si l’on sait choisir ses critiques — c’est plus court ; ensuite, parce que même les critiques prolixes ont débrouillé la matière et me donnent, par les citations qu’ils font de leur auteur, le meilleur, évidemment, de cet auteur-là, ce qui peut me suffire ; ensuite et surtout parce que, devant, quand je lirai l’auteur après le critique, subir l’influence de celui-ci et lire dans la disposition d’esprit où il m’aura mis ; si je dois, l’auteur lu après le critique, avoir la même impression que le critique seul étant lu, j’épargne du temps en lisant le critique seul. […] Il doit indiquer l’esprit général d’un temps d’après tout ce qu’il sait d’histoire proprement dite ; l’esprit littéraire et artistique d’un temps, ce qui est déjà un peu différent, d’après tout ce qu’il sait d’histoire littéraire et de l’histoire même de l’art ; mesurer, ce qui du reste est impossible, mais c’est pour cela que c’est intéressant, les influences qui ont pu agir sur un auteur ; s’inquiéter de la formation de son esprit d’après les lectures qu’on peut savoir qu’il a faites, d’après sa correspondance, d’après les rapports que ses contemporains ont faits de lui ; s’enquérir des circonstances générales, nationales, locales, domestiques, personnelles dans lesquelles il a écrit tel de ses ouvrages et puis tel autre ; chercher, ce qui est encore une manière de le définir, l’influence que lui-même a exercée et c’est-à-dire à qui il a plu, les répulsions qu’il a excitées et c’est-à-dire à qui il a déplu. […] Mais remarquez : si à toutes leurs qualités ils avaient ajouté la faiblesse de lire les livres dont ils devaient parler, leurs décisions eussent été moins tranchantes et leurs considérations moins originales ; ils eussent été des critiques de moyen ordre ; mais leur influence sur moi eût été la même et même se serait prolongée plus longtemps ; j’aurais relu, après leurs conversations, avec un esprit nouveau. […] Les médecins appellent un confrère en consultation, non parce qu’ils se défient d’eux-mêmes, non parce qu’ils croient que leur confrère est plus habile qu’eux ; ils ne le croient jamais ; mais par crainte de persévérer dans un diagnostic faux, à cause de l’influence que garde sur nous une première impression ou une première idée.

74. (1915) La philosophie française « I »

Il est juste de reconnaître que les Anglais y ont contribué pour une part plus large encore, et que la doctrine de Locke n’avait pas été sans influence sur l’idéologie française. […] Mais la plus puissante des influences qui se soient exercées sur l’esprit humain depuis Descartes, — de quelque manière d’ailleurs qu’on la juge, — est incontestablement celle de Jean-Jacques Rousseau 18. […] Cette même foi à la science — aux sciences qui étudient l’homme — se retrouve chez Taine 24, un penseur qui eut autant d’influence que Renan en France, et qui en eut peut-être plus encore que Renan à l’étranger. […] Peu remarquée au moment où elle parut, la doctrine de Maine de Biran a exercé une influence croissante : on peut se demander si la voie que ce philosophe a ouverte n’est pas celle où la métaphysique devra marcher définitivement. […] On ne peut prononcer le nom de Ravaisson sans y associer celui de Lachelier, un penseur dont l’influence fut tout aussi considérable.

75. (1936) Réflexions sur la littérature « 1. Une thèse sur le symbolisme » pp. 7-17

Ceux de demain, que publiait Bernard Lazare ; la publication (vers 1896) par l’Écho de Paris, dont le tirage et l’influence étaient alors considérables, des poèmes de M.  […] Tout cela, bon ou mauvais, eut sur le goût public une influence précise. […] Il n’avait ni la culture ni peut-être l’oreille d’un musicien : lui-même, dans bucolique, nous dit qu’il vint tard à la musique, et par curiosité de lui confronter une poésie née hors de son influence. […] Les recherches de musique verbale et le vers libre se sont développés tout à fait en dehors de l’exemple et même de l’influence de Mallarmé. […] La syntaxe de Mallarmé est un jeu tout personnel au poète, qui ne comportait aucune influence, aucune action.

76. (1930) Le roman français pp. 1-197

Influence relativement ancienne ! […] Et pourtant, ce qui est bien caractéristique de l’influence des Goncourt, il a voulu en avoir un. […] Et, dans son style d’alors, on sent encore l’influence des Goncourt. […] D’autre part, à l’influence de Zola se superpose parfois celle des Russes. […] C’est très curieux… Il doit encore y avoir ici quelque influence baudelairienne.

77. (1902) Symbolistes et décadents pp. 7-402

L’influence de Flaubert fécondait leurs rêves épiques. […] Influence dans la position du sujet, mais ensuite quelle indépendance ! […] Quelle sera l’influence de Rimbaud, nous ne pouvons encore le délimiter. […] Des deux côtés, l’influence toute puissante de Racine a vécu. […] C’est le grand temps de l’influence d’Hugo.

78. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre III. La Déformation de l’Idéal classique (1720-1801) » pp. 278-387

Quelle a été, dans ce mouvement, la part de l’influence anglaise ? […] Il convient seulement d’ajouter que l’influence des encyclopédistes a été tout à la fois aidée et contrariée dans son cours par une autre influence, dont il est extrêmement délicat de démêler la nature : c’est l’influence de Rousseau que je veux dire ; et je doute qu’il s’en fût vu depuis Pascal de plus considérable ou de plus révolutionnaire. […] I et III]. — Influence de Rousseau dans l’ordre philosophique, sur Kant [Cf.  […] Nolen, « Les Maîtres de Kant », dans la Revue philosophique] ; — et sur Fichte. — Son influence sur Jacobi et sur Schleiermacher. — Influence littéraire de Rousseau [Cf.  […] 2º La Concurrence des Espèces. — Influence dominante et souveraine de Voltaire sur le théâtre tragique de son temps ; — raisons de cette influence ; — et ses suites [Cf. le Discours de réception de Ducis].

79. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Maintenon » pp. 27-40

Si la science a quelquefois recherché les formes de l’arbre dans son germe, il semble qu’on puisse s’expliquer, par cette organisation de Saint-Cyr, la destinée et l’influence de toutes ces femmes qui allaient devenir la tige en fleurs de la société de leur pays et de l’Europe. […] Il était dans la destinée de madame de Maintenon d’avoir contre elle les deux plus fortes influences qui pussent agir sur la tête d’un pays comme la France : la Philosophie du xviiie  siècle, et, au xviie , la magie du Talent le plus atroce à ses ennemis qui ait peut-être jamais existé ! […] … Que, si une favorite d’une autre époque, la Léonora Galigaï, la magicienne de Florence, accusée de philtres et de charmes pour expliquer son inexplicable puissance sur Marie de Médicis, répondait que toute sa sorcellerie était l’influence d’une âme forte sur une âme faible, on aurait pu se demander plus tard quelle devait donc être celle d’une femme sur un homme dans toute la maturité de son âme et de son génie, sur un homme qui était le roi du bon sens, de la convenance, de la fierté et de l’ennui, sur un Louis XIV de quarante-cinq ans ? […] Si, pour les hommes véritablement ambitieux, le père Joseph du Tremblay est plus beau dans sa bure de capucin que le cardinal de Richelieu dans ses flots de pourpre, si la puissance sans titre, l’influence sans nom, mais effectives, sont plus que le costume, l’éclat et l’attitude du commandement, de quel sentiment ne devons-nous pas être pénétrés pour cette admirable vieille femme que Louis XIV appelait Sa Solidité et consultait en plein conseil de ministres, et qui, majestueuse et discrète, « toujours vêtue d’étamine noire ou feuille-morte », resta toute sa vie une humble chrétienne, avec des manières de femme du monde à tout relever !

80. (1905) Propos littéraires. Troisième série

Comme il est intéressant d’étudier des artistes qu’aucune influence supérieure n’excite, mais aussi qu’aucune influence supérieure ne gêne, ne refroidit, n’intimide ! […] Quant à l’influence de Malherbe comme poète, Malherbe n’a pas eu d’influence du tout. […] Oui ; mais c’est une influence toute littéraire, c’est-à-dire latérale, et c’est une de ces influences qui s’épuisent en s’exerçant. […] Cette influence est-elle salutaire ? […] Mais ici c’est de l’influence de Balzac que j’ai voulu parler.

81. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Les quatre moments religieux au XIXe siècle, (suite et fin.) »

La Congrégation, qui a eu le triste honneur de donner son nom à cette sorte de maladie honteuse et de lèpre qui menaça de couvrir la France de 1821 à 1828, était, à l’origine, une simple association de piété et de bonnes œuvres : dès les premiers temps de la seconde Restauration, l’intrigue s’en empara pour la faire agir dans le sens d’une certaine politique, et, en y prêtant grande attention, on commence à trouver trace de son influence, à saisir le mouvement de ses sapes, encore très-sourdes, dans la Chambre de 1815. […] Il s’en trouva une qui se chargea, à l’aide de ce que Bossuet appelle des moyens agréables, c’est-à-dire par son charme et ses artifices, « d’attaquer auprès de Louis XVIII les influences dangereuses, compromettantes pour le salut du trône, pour sa personne et pour le pays ; de détruire ces influences, et en même temps de les remplacer ; de faire accepter au roi les hommes qui auraient gagné la confiance de Monsieur ; enfin, de réconcilier les deux frères. » La personne choisie pour l’exécution de ce pieux dessein, et qui s’y prêta de toute son âme, y employait de longues séances chaque mercredi. […] Il n’y avait aucun moyen de distinguer entre telle ou telle influence : c’était comme un petit souffle bénin et empesté qui s’étendait et gagnait de proche en proche. […] Cette partie des Mémoires d’un témoin fort peu considérable sans doute, mais dont les amis curent grande influence, n’est pas sans quelque intérêt pour l’histoire du temps. — En vérité, on rougit pour son pays de penser quelle a pu être à un moment, et à l’aide d’une active amie (Mme du Cayla), l’influence politique d’un sot panaché et d’un niais comme ce vicomte Sosthènes ; on hésiterait à, parler ainsi d’un galant homme, si lui-même il n’avait pris à tâche de se dresser son monument et comme sa pyramide ridiculement solennelle, dans ses futiles et interminables Mémoires.

82. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. L’Histoire »

Michelet prophète de la démocratie, ennemi des rois et des prêtres : influence de ses passions sur son histoire. […] Cette influence politique devança même l’influence romantique. […] Dans une seconde partie, plus originale et plus profonde encore, Tocqueville nous découvre l’influence de la démocratie sur le mouvement intellectuel, sur l’état moral et sentimental, sur les mœurs, et la réaction des idées, des sentiments et des mœurs sur le régime politique. […] Il explique l’influence de la littérature et de l’irréligion sur la Révolution, et la prédominance du sentiment de l’égalité sur la passion de la liberté. […] Ce fait montre bien l’influence des idées politiques sur les travaux historiques.

83. (1889) La critique scientifique. Revue philosophique pp. 83-89

Passe donc pour renverser, en certains cas, l’ordre de l’enquête ; mais je n’en voudrais pas faire une règle absolue, et je ne croirais pas pouvoir suppléer si facilement « les notions de l’hérédité et de l’influence des milieux », quoique les lois en soient encore « incertaines et présomptives ». […] L’hérédité, la sélection naturelle qui s’opère entre les artistes et les facultés de l’artiste, les lieux ou l’habitat, ces trois facteurs, juge-t-il, ne nous donnent pas grand-chose, même entre les mains de Taine ; leurs influences sont indécises, et les théories de ce puissant critique ne semblent ni justes dans leur rigueur, ni surtout vérifiables. […] Il ne conteste pas, sans doute, ces influences de l’hérédité, de l’éducation, etc., dont il récuse seulement l’emploi utile. […] Relisant le livre, évoquant le tableau, faisant résonner à son esprit le développement sonore de la symphonie, l’analyste, considérant ces ensembles comme tels, les restaurant entiers, les reprenant et les subissant, devra en exprimer la perception vivante qui résulte du heurt de ces centres de force contre l’organisme humain charnel, touché, passionné et saisi4. » Et enfin (p. 217), « saisissant ainsi des intelligences telles quelles, les analysant avec une précision et une netteté considérables et les replaçant ensuite par une minutieuse synthèse dans leurs familles, leurs patries, leurs milieux, l’esthopsychologie, un ensemble d’études particulières de cette science, sont appelés à vérifier les plus importantes théories de ce temps sur la dépendance mutuelle des hommes, sur l’hérédité individuelle, sur l’influence de l’entourage physique et social ».

84. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Le Marquis Eudes de M*** »

« Cependant, nous le répétons, son attention paraissait tout à fait captivée par les paroles du vieux prêtre, et chacun pouvait suivre sur son visage la marche et les progrès de la pieuse influence. […] Catholique pour son propre compte, ayant accepté par conséquent le dogme et la tradition catholiques sur la question des influences surnaturelles et l’existence des bons et des mauvais esprits, il a voulu faire pour d’autres que pour lui même la preuve d’un fait auquel il croit, lui, mais que les autres auxquels il s’adresse repoussent et nient. […] L’auteur y examine d’abord l’influence des lieux fatidiques ou du domaine privilégié des esprits, les hauts lieux, les lieux déserts, certaines sources, les béthyles ou les pierres mystérieuses élevées en commémoration des faits merveilleux, les animaux subissant, dans certains lieux fatidiques, la même influence que ceux qui les guident ; et sur toutes ces questions, prises à revers des solutions de la science moderne, le terrible savant ne cesse de marcher au flambeau allumé de la critique historique.

85. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Gogol. » pp. 367-380

pour le coup, voici la Russie sans mélange, virginale, la Russie pure, le diamant brut, mais d’autant plus précieux qu’il n’a jamais été rayé par une influence étrangère ! […] Gogol a beau vouloir n’être que Russe, il a beau regimber contre l’influence française et l’influence allemande, il les porte tous les deux sur sa pensée : il a appris le latin dans Richter et dans Voltaire. […] C’est un écrivain d’imitation plus ou moins souple, plus ou moins délié, plus ou moins habile, imprégné plus ou moins des influences européennes, mais manquant, pour toutes ces raisons, du caractère de tout ce qui est supérieur en littérature : — la sincérité !

86. (1884) L’art de la mise en scène. Essai d’esthétique théâtrale

L’effet représentatif est dans ce cas sans influence sur le jugement que nous portons de la valeur d’une œuvre dramatique. […] Tout ce qui a sur le caractère de Fritz une influence si heureuse compose précisément tous les éléments de la mise en scène. […] C’est là qu’est la moralité de l’art et la raison de son influence sur la destinée humaine et sur la marche de la civilisation. […] Deux âmes mises et maintenues en présence, en dehors de toute influence objective, ne peuvent échanger que des idées purement psychologiques. […] La seconde loi se rapporte, comme nous l’avons dit, à l’influence contingente des milieux.

87. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre premier. La Formation de l’Idéal classique (1498-1610) » pp. 40-106

Et quand on ne saurait dire de quelle manière, en quel point précis l’influence a opéré, les effets n’en seraient pas moins certains, mais plus intérieurs et plus profonds seulement. […] Pour y parvenir, on essaie en même temps de se dégager de la pression ou de l’obsession des influences étrangères. […] Dernières années de la vie d’Amyot. — Sa traduction des Œuvres morales et mêlées de Plutarque. — Amyot aux états de Blois. — Son rôle pendant la Ligue. — Sa rentrée à Auxerre et sa mort. — Idée générale du service rendu par les traductions. — Dans quelle mesure les circonstances de la vie d’Amyot ont profilé à son œuvre. — Une page de Rivarol sur l’utilité des traductions [préface de sa traduction de Dante]. — Longue influence du Plutarque d’Amyot, et raisons de cette influence. […] 4º Influence et portée du livre des Essais. — Que « tout homme porte en soi la forme de l’humaine condition » ; — et comparaison à cet égard des Essais de Montaigne et des Confessions de Rousseau ; — les rapports sont à l’extérieur, mais la différence au fond. — Montaigne a fondé la littérature française sur l’observation psychologique et morale. — Son influence à l’étranger : — sur Bacon [Cf. ses Essais de politique et de morale, 1597] ; — et sur Shakespeare [Cf.  […] 4º De l’influence de l’Astrée. — S’il faut lui faire une part dans la formation de la société précieuse ?

88. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre troisième. L’idée-force du moi et son influence »

Chapitre troisième L’idée-force du moi et son influence I. […] Influence de l’idée-force du moi. — 1. […] II Influence de l’idée-force du moi I. […] L’être n’abstrait pas ce rapport, mais il n’est pas dans la même attitude mentale sous l’influence d’impressions unies et concordantes que sous l’influence d’impressions désunies et discordantes.

89. (1906) L’anticléricalisme pp. 2-381

Je tiens l’influence de Descartes, à partir de 1680 environ, pour antireligieuse. […] Elle pouvait, elle devait avoir de l’influence sur les âmes et de l’empire sur les consciences. […] Ce n’est donc pas pour arracher la jeunesse à l’influence cléricale ? […] Ils pourraient être des facteurs de cette influence politique que, de l’aveu même de M.  […] le principe pour les politiciens, c’est de partager le pouvoir et l’influence.

90. (1894) Écrivains d’aujourd’hui

Influence littéraire. Influence morale. […] C’est d’abord une influence littéraire. […] Pourtant cette influence est très réelle. […] Son influence y est toute-puissante.

91. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre II. Les couples de caractères généraux et les propositions générales » pp. 297-385

. — La différence de lieu et d’instant est sans influence ou nulle, par hypothèse. — Limites de l’axiome ainsi entendu et démontré. — Principe du parallélogramme des vitesses et des forces. — Énoncé exact de l’axiome. — La coexistence d’un second mouvement dans le même mobile est sans influence ou nulle, par hypothèse. — Passage de l’idée de vitesse à l’idée de force. […] Pour résoudre la difficulté et pour opérer la découverte, il faut éliminer, c’est-à-dire exclure, parmi les dix, ceux qui, n’ayant point d’influence sur lui, n’entraînent point sa présence. […] Mais l’expérience est aisée : nous n’avons qu’à mettre un thermomètre en contact avec la substance couverte de rosée, et à en suspendre un autre un peu au-dessus, hors de la portée de son influence. […] Dans le cas des métaux polis et du verre poli, le contraste montre évidemment que la substance a une grande influence sur le phénomène. […] L’espèce de surface a donc beaucoup d’influence.

92. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « IX »

La France me semble bien située, quoi qu’on en dise, pour pouvoir profiter dans une large mesure de l’influence de Wagner. […] — Mais quant aux concerts, et à leur influence néfaste, il est vrai, hélas ! […] Si on la faisait, l’art français pourrait encore, j’en suis convaincu, profiter dans une large mesure de l’influence de Wagner ; peut-être même en profiterait-elle plus qu’aucun autre pays. L’histoire nous montre que l’influence d’un grand homme est souvent plus bienfaisante dans un pays voisin, et même ennemi, que dans sa propre patrie. […] Jullien soit vraie, qui dans les biographies allemandes « devine a chaque page et l’influence directe et le contrôle permanent du maître ou de ses représentants99 » Mais M. 

93. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre V : Lois de la variabilité »

Il faut cependant leur accorder quelque influence : ainsi E. […] Que l’habituation ait quelque influence, il faut bien le croire, soit d’après toutes les analogies, soit d’après les conseils incessamment répétés dans les traités d’agronomie, et jusque dans l’ancienne Encyclopédie chinoise, de ne transporter les animaux d’un district dans un autre qu’avec la plus grande réserve. Comme il n’est pas vraisemblable que l’homme ait réussi à former tant de races et de sous-races ayant chacune une constitution spécialement adaptée à son propre district, il faut bien qu’une part de ce résultat soit due à l’influence de l’habituation. […] L’auteur ne paraît pas ici accorder toute sa valeur réelle à l’action locale des conditions de vie ou du milieu ambiant dont Geoffroy Saint-Hilaire et Lamarck ont les premiers reconnu la puissante influence. […] Lorsque ces diverses causes ou influences favorisent l’hérédité, il y a réversion exacte aux caractères de l’ancêtre commun ; lorsqu’elles la contrarient, la tendance de réversion devient une tendance à produire des variations analogues.

94. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame Geoffrin. » pp. 309-329

Après tout ce que j’ai dit des femmes du xviiie  siècle, il y aurait une trop grande lacune si je ne parlais de Mme Geoffrin, l’une des plus célèbres et dont l’influence a été le plus grande. […] C’est surtout en l’étudiant de près qu’on se convainc qu’une grande influence sociale a toujours sa raison, et que, sous ces fortunes célèbres qui se résument de loin en un simple nom qu’on répète, il y a eu bien du travail, de l’étude et du talent ; dans le cas présent de Mme Geoffrin, il faut ajouter, bien du bon sens. […] Mme Geoffrin, bien observée, me paraît avoir été, par la nature de son esprit, par la méthode de son procédé, et par son genre d’influence, le Fontenelle des femmes, un Fontenelle plus actif en bienfaisance (nous reviendrons tout à l’heure sur ce trait-là), mais un vrai Fontenelle par la prudence, par la manière de concevoir et de composer son bonheur, par cette manière de dire, à plaisir familière, épigrammatique et ironique sans amertume. […] Elle n’était pas pressée de tout dérouler d’un coup : « Peut-être à ma mort, disait-elle, le rouleau ne sera-t-il pas déployé tout entier. » Cette sage lenteur est un trait distinctif de son esprit et de son influence. […] À la suite d’un jubilé qu’elle suivit trop exactement dans l’été de 1776, elle tomba en paralysie, et sa fille, profitant de cet état, ferma la porte aux philosophes, dont elle craignait l’influence sur sa mère.

95. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre III. L’antinomie dans la vie affective » pp. 71-87

L’une sociologique qui insiste sur la part prépondérante du facteur social dans la formation et l’évolution de nos sentiments ; et par suite sur la possibilité d’une uniformisation, d’une rationalisation et d’une socialisation progressive des sensibilités ; l’autre, individualiste, qui reconnaît dans la sensibilité de chaque individu un fond irréductible aux influences sociales et qui conclut de là à l’impossibilité de réduire les différences sentimentales non moins que les différences intellectuelles. […] Mais à côté de ces influences sociales, il faut faire une place au principe d’individuation par excellence : à la physiologie de l’individu, qui fait que chacun ressent à sa façon les sentiments de son pays, de son milieu, de son époque et les teinte de sa propre nuance sentimentale. […] Les intellectualistes oublient que les idées n’ont d’influence que si elles tombent sur un sol favorable ; si elles ont une résonance dans l’organisme, que si elles ne sont pas seulement apprises et comprises, mais senties. […] La sensibilité présente, de par sa constitution même, plusieurs caractères réfractaires ou antinomiques aux influences sociales.

96. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXV. Mme Clarisse Bader »

III Certainement les quatre livres sur la femme indienne, biblique, grecque et romaine de Mlle Clarisse Bader expriment la volonté d’être une histoire, et une histoire particulièrement intéressante, puisque c’est l’histoire d’une influence et de la plus puissante des influences sur les hommes ; mais cette histoire reste toujours à faire, et celle-ci n’est guère qu’un placage historique, plus ou moins industrieusement exécuté. […] Elle l’est jusque dans son sujet, qui est la supériorité de la femme, prouvée par le degré de moralité et de civilisation dû à l’influence qu’elle exerce dans une société. […] Elle se met derrière Aristote, — non pas comme Sganarelle dans son chapitre des Chapeaux, mais dans sa Politique, quand elle dit que c’est chez les peuples guerriers que la femme a le plus d’influence, parce que plus on est fort, moins on est jaloux de son autorité.

97. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIII. M. Nicolardot. Ménage et Finances de Voltaire » pp. 297-310

Ainsi, encrassement d’influences, fond de pot de toutes les idées, le xviiie  siècle est en nous à des profondeurs effrayantes, et ce n’est pas tout, nous tenons à lui par la préférence, par le choix de l’âme abaissée, par l’admiration et par l’amour. […] Ce long et terrible morceau d’histoire que les esprits assez élevés pour se trouver naturellement au-dessus de l’intérêt de curiosité individuelle qui s’attache à Voltaire regarderont comme le morceau capital du livre que nous annonçons, prépare merveilleusement la biographie de cet homme qui domina son temps aussi bien par le genre de ses vices que par le genre de son génie, et qui n’aurait pas exercé une si colossale influence sur ce temps-là et sur le nôtre, s’il n’avait pas surpassé le premier en lui ressemblant et marqué le second à son image. […] Si les influences négatives, anarchiques, impies, laissées par Voltaire, dont on a pu dire, en pensant à ses successeurs, Il faisait de l’esprit pour ceux qui n’en ont pas ! […] Louis Nicolardot, saisissant Voltaire bien plus dans tous les jours de la vie que dans les choses de la pensée et dans ses contemplations d’écrivain, nous oblige à le regarder dans ce qui convenait le mieux à sa nature positive et enflammée, les relations, les influences et les intérêts.

98. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Nicolas Gogol »

pour le coup, voici la Russie sans mélange, virginale, la Russie pure, le diamant brut, mais d’autant plus précieux qu’il n’a jamais été rayé par une influence étrangère !  […] Gogol a beau vouloir n’être que Russe, il a beau regimber contre l’influence française et l’influence allemande, il les porte toutes les deux sur sa pensée : il a appris le latin dans Richter et dans Voltaire. […] C’est un écrivain d’imitation plus ou moins souple, plus ou moins délié, plus ou moins habile, imprégné plus ou moins des influences européennes, mais manquant, pour toutes ces raisons, du caractère de tout ce qui est supérieur en littérature : — la sincérité.

99. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVII. Saint-Bonnet »

— Comme les autres écrivains qui ont discuté l’influence de la littérature ancienne sur l’intelligence des générations modernes, M.  […] Pour cela, la philosophie pesa sur l’esprit de l’homme de deux manières, par les sciences qui ne s’adressent qu’à l’esprit et qui finissent par lui donner le vertige de sa force, et par l’effet du paganisme sur l’âme, influence — il faut le reconnaître — que le dix-huitième siècle n’avait pas créée ; qui existait depuis la Renaissance, mais qui, grossie chaque jour, avait fait avalanche sur la pente escarpée de ce siècle, où toutes les erreurs entassées avaient fini par se précipiter. Tel est le chemin que l’auteur de l’Affaiblissement de la Raison, parcourt, après l’avoir creusé, pour arriver à cette question de l’influence du paganisme sur de jeunes âmes, qui ne semble être qu’une question de rhétorique aux esprits superficiels, mais qui est, pour les esprits profonds, une question de philosophie, de gouvernement, d’avenir du monde. […] Naturalisme d’abord, scepticisme ensuite, toutes les influences qui sortent, pour l’enfant, des premières impressions littéraires, des premières ivresses de son imagination ravie, M. 

100. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXX. Saint Anselme de Cantorbéry »

Et si cela est d’une manière absolue, si les circonstances ont sur le sort des livres, une influence plus grande que le talent qu’ils attestent, on peut assurer qu’à l’heure présente, M. de Rémusat est placé dans la situation la plus favorable au rayonnement de tout ce qu’il publie, que ce qu’il publie soit, d’ailleurs, vrai ou faux, médiocre ou supérieur. […] Cousin, — l’influence de ces systèmes allemands, Barbares de la pensée civilisée et savante, contre lesquels il n’y a plus maintenant que le catholicisme pour refuge, comme il n’y avait non plus que le catholicisme, du temps des Barbares matériels ! […] Grâce à cette théocratie, que M. de Rémusat condamne dans son livre par la raison très philosophique que l’opinion de l’Europe moderne, qui a la tête déformée par les philosophes, lui est, en ce moment, hostile, l’influence du monde chrétien avait pris le monde musulman et pénétré l’Asie et l’Afrique. […] Mais s’il l’a eue jamais, il l’a bien perdue dans les études microscopiques d’une philosophie qui analyse l’homme dans les moindres nuances de son ondoyante personnalité ; et il est permis, on en conviendra, de s’étonner qu’un homme, qui fut ministre autrefois, s’imagine probablement, sinon de reprendre le gouvernement qu’il a perdu, au moins l’influence dans les esprits, qui est du gouvernement aussi, en traitant de la résurrection des systèmes philosophiques au onzième siècle.

101. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Xavier Aubryet et Albéric Second » pp. 255-270

Mais, ce qui n’est pas la même chose, ils sont victimes du même milieu ; et moi qui ne suis pas Taine, qui ne crois pas à l’influence irrésistible, fatale et nécessaire, des milieux sur l’esprit humain, j’aime assez les deux écrivains que voici pour désirer qu’ils sortent du leur. […] Par ses facultés comme par ses préoccupations, il devait donc mieux échapper à l’influence tyrannique de Paris qu’Albéric Second, bien plus homme d’esprit qu’homme de lettres, en sa facilité charmante, chroniqueur émérite et chevronné, un des plus excellents dans cette spécialité, que j’ai la rigueur de trouver mauvaise. Et cependant Aubryet l’a tout autant subie, cette asservissante influence de Paris, dans son livre, qu’Albéric Second dans le sien… Grand étonnement pour moi, je l’avoue, qu’un homme qui a, comme Xavier Aubryet, toutes les bravoures de l’esprit, que ce crâne pimpant du paradoxe à qui j’ai vu, dans l’ordre intellectuel, casser tant d’assiettes, ne se soit pas soustrait, avec le bond de la contradiction, à cette domination de Paris qu’en politique il sait éloquemment maudire ! […] Il s’en est allé avec les vieilles lunes… Et c’est comme cela que s’en iront peu à peu tant de romans et de compositions de notre pays où Paris, le tic de Paris, le parlage de Paris, les mœurs banales et coulées de Paris, tiennent évidemment trop de place, — des œuvres de talent pourtant, mais qui n’en ont pas assez pour lutter contre l’influence qui les diminue, et pour les élargir et les faire durer.

102. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre II. De la philosophie. »

Ce n’est plus vis-à-vis du sort, mais de sa conscience qu’on se place, et, renonçant à toute influence sur le destin et sur les hommes, on se complait d’autant plus dans l’action du pouvoir qu’on s’est réservé, dans l’empire de soi-même, et l’on fait chaque jour avec bonheur quelque changement ou quelque découverte, dans la seule propriété sur laquelle on se croit des droits et de l’influence. […] La paix qui l’environne semble insulter au tumulte de son âme ; l’uniformité des jours ne lui présente aucun changement même dans la peine ; la violence d’un tel malheur au sein de la retraite, est une nouvelle preuve de la funeste influence des passions ; elles éloignent de tout ce qui est simple et facile, et quoiqu’elles prennent leur source dans la nature de l’homme, elles s’opposent sans cesse à sa véritable destination.

103. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mallarmé, Stéphane (1842-1898) »

Lucien Muhlfeld Aujourd’hui, quelle est au juste l’influence particulière de ce poète ? […] Stéphane Mallarmé est le poète qui a eu l’influence la plus directe sur les poètes d’aujourd’hui. […] Le Romantisme, né d’influences étrangères comme la Pléiade autrefois, avait enrichi la Poésie d’une multitude de couleurs et de formes, d’une harmonie plus sonore et d’une émotion nouvelle.

104. (1898) Inutilité de la calomnie (La Plume) pp. 625-627

Retté publia les Treize Idylles diaboliques, je compris que cet écrivain ne s’était point débarrassé des cruelles influences d’une basse littérature. […] L’unique prévision de son influence m’apparut comme une catastrophe. […] Ghéon est de ceux qui ont le plus subi cette subtile influence.

105. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « III »

L’influence de la race, du milieu, du climat sur le style est évidement incontestable ; mais il y a une autre influence, beaucoup plus considérable, dont on a tort de ne pas tenir compte : c’est l’influence de la lecture.

106. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre III. De l’organisation des états de conscience. La liberté »

Dire que l’âme se détermine sous l’influence de l’un quelconque de ces sentiments, c’est donc reconnaître qu’elle se détermine elle-même. […] En vain on alléguera que nous cédons alors à l’influence toute-puissante de notre caractère. […] Même si ce sentiment s’est traduit finalement par quelque démarches de nature déterminée, comparable à la position d’une planète dans l’espace, la connaissance de cet acte ne me servira guère à apprécier l’influence du sentiment sur l’ensemble d’une histoire, et c’est cette influence qu’il s’agit de connaître. […] Mais, lorsqu’il s’agit de déterminer un fait de conscience à venir, pour peu qu’il soit profond, on doit envisager les antécédents non plus à l’état statique sous forme de choses, mais à l’état dynamique et comme des progrès, puisque leur influence seule est en cause : or leur durée est cette influence même. […] Ayant nié toute influence mécanique des substances les une, sur les autres, il devait néanmoins expliquer comment leurs états se correspondent.

107. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre I. De la sélection des images, pour la représentation. Le rôle du corps »

les lignes de force émises dans tous les sens par tous les centres dirigent sur chaque centre les influences du monde matériel tout entier. […] Vous nous aviez montré les images extérieures atteignant les organes des sens, modifiant les nerfs, propageant leur influence dans le cerveau. […] Percevoir toutes les influences de tous les points de tous les corps serait descendre à l’état d’objet matériel. […] Nous venons de voir qu’il résiste à l’influence de ces causes. […] Autour de cette image se dispose la représentation, c’est-à-dire son influence éventuelle sur les autres.

108. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre premier. Que la poétique du Christianisme se divise en trois branches : Poésie, Beaux-arts, Littérature ; que les six livres de cette seconde partie traitent spécialement de la Poésie. »

En traitant du génie de cette religion, comment pourrions-nous oublier son influence sur les lettres et sur les arts ? influence qui a, pour ainsi dire, changé l’esprit humain et créé dans l’Europe moderne des peuples tout différents des peuples antiques.

109. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVI. La littérature et l’éducation publique. Les académies, les cénacles. » pp. 407-442

Il ne s’agit plus des salons et autres réunions mondaines dont nous avons déjà signalé l’influence : nous voulons parler des établissements d’instruction, des Académies, des Cénacles. […] Les congrégations religieuses regardent l’éducation comme un moyen ; leur but est naturellement la propagande de la foi et quelquefois la conquête d’une influence politique. […] Mais, tandis que les Grecs et les Romains perdent momentanément de leur influence littéraire, ils conquièrent en revanche une énorme influence politique et sociale. […] Si son influence sur la langue demeure considérable, quoique amoindrie, que dire de son influence sur la littérature ? […] C’est à ce travail incessant que les cénacles consacrent leur énergie et c’est pour cela qu’ils ont tous leur moment de succès et d’éclat, de vogue tout au moins, et leur influence heureuse sur la marche de la littérature.

110. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre premier. Le Moyen Âge (842-1498) » pp. 1-39

En même temps, dans la classe aristocratique, plus instruite, quoiqu’elle ne le soit guère, l’individu, sous la double influence des Romans de la Table-Ronde et de l’exemple des troubadours provençaux, commence à prendre conscience de lui-même ; et le lyrisme naît. […] On ne se demande pas sans quelque inquiétude ce qu’il fût advenu de l’esprit français s’il eût persévéré dans cette direction, ou plutôt, — car il y devait persévérer, et nous le verrons bien, — si cette influence de l’esprit gaulois n’avait été, presque dès le début, contrebalancée par d’autres influences, au premier rang desquelles il faut placer celle de la scolastique. […] Peut-être encore devons-nous à l’influence de la scolastique cette habitude, non pas d’approfondir les questions, mais de les retourner sous toutes leurs faces, et ainsi d’en apercevoir des aspects inattendus, et des solutions ingénieuses, trop ingénieuses peut-être, assez voisines pourtant quelquefois de la vérité, qui est complexe, et qu’on mutile dès qu’on veut l’exprimer trop simplement. […] William Edwards, Recherches sur les langues celtiques ; et Zeuss, Grammatica celtica]. — Que, si l’influence de l’élément celtique se retrouve dans le français, il semble que ce soit moins dans le vocabulaire que dans la syntaxe ; — et moins peut-être encore dans la syntaxe que dans la prononciation. — Considérations à ce sujet ; et de l’influence de la conformation des organes, ou de la nature des eaux, des airs et des lieux sur la prononciation. — Que, pour mal définie que soit l’influence celtique, on ne saurait pourtant la révoquer en doute ; — et qu’on ne saurait s’expliquer sans elle la différenciation du français, et de l’italien ou de l’espagnol. […] Comment leur origine explique leur succès par leur nouveauté. — Longue influence des Romans de la Table-Ronde ; — leur diffusion à l’étranger ; — la compilation de Rusticien de Pise, 1270 ; — traductions, continuations, imitations italiennes, allemandes, néerlandaises, anglaises, espagnoles et portugaises. — Le Parsifal de Wolfram d’Eschenbach, et Tristan et Iseult de Gottfried de Strasbourg. — Pénétration réciproque du Cycle d’Arthur et du Cycle de la Croisade. — On met en prose les plus anciens Romans de la Table-Ronde ; — on en compose directement en prose, tels que Merlin, le Grand Saint Graal, etc. ; — ils deviennent sous cette nouvelle forme les sources d’inspiration des Amadis ; — et rattachent ainsi, par eux, le « roman » moderne et la littérature classique à la littérature et au roman du Moyen Âge.

111. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre IV. L’heure présente (1874) — Chapitre unique. La littérature qui se fait »

Puis sont venues les influences évangéliques du dehors, dont je dirai un mot tout à l’heure. […] Nous venons de traverser une période, qui peut-être n’est pas achevée, où les littératures étrangères ont versé de toutes parts dans la nôtre leurs œuvres et leurs influences. […] Son influence a été surtout sensible dans le relèvement du xviie  siècle, aux dépens du xviiie  siècle qu’il a un peu maltraité en regardant les individus plutôt que l’ensemble. […] Margueritte971, enfin, un révolté du naturalisme, a su garder la scrupuleuse étude des réalités, en y joignant l’intuition de la vie intérieure et une large pitié philosophique : il a donné deux ou trois œuvres qui ont chance d’être actuellement ce que notre art français soumis aux influences d’Eliot et de Tolstoï a produit de meilleur972 . […] L’influence de son christianisme démocratique et philanthropique a été très grande chez nous, je veux dire dans notre littérature : au comte Tolstoï doit surtout se rapporter l’esprit nouveau, plus largement philosophique et plus profondément humain, que je signale plus bas dans nos romans et même sur notre théâtre. — Anna Karenine, 2 vol. in-18, 1871, tr. 1885 ; la Guerre et la Paix, 3 vol. in-8, 1872, trad. 1880 et 1885 ; Ma religion, 1885 ; les Cosaques, souvenirs de Sébastopol, 1887, 4 vol. ; la Puissance des ténèbres, drame, in-18, 1887 ; la Sonate à Kreutzer, 1 vol. in-18, 1890 ; Souvenirs, Hachette, in-12, 1887, etc. — A consulter : M. de Vogué, le Roman russe.

112. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre II. Clément Marot »

On y démêle très aisément comment le style moderne de l’esprit français se dégage du moyen âge sous l’influence de l’Italie et de l’antiquité. […] Si nous regardons seulement, la valeur intrinsèque et non l’influence, il n’y a à tenir compte que de l’œuvre profane de Marot : c’est à elle surtout qu’il faut nous attacher. […] Nul n’a plus subi l’influence de son milieu. […] Ce gentil poète a eu autant de gloire et d’influence que s’il eût été un grand poète. […] Ainsi s’explique que l’influence de Marot ait dépassé, si j’ose dire, sa valeur.

113. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre V. Le roman »

L’école naturaliste, que Flaubert se défendait d’avoir fondée, s’est constituée à la fin du second empire, sous l’influence de Madame Bovary et des théories littéraires de Taine, sous l’influence plus lointaine et d’autant plus prestigieuse des grands travaux des physiologistes et des médecins. […] Enfin, par leur style tourmenté, raffiné, souvent extravagant ou alambiqué, souvent aussi d’une intense et originale précision, MM. de Goncourt ont exercé une grande influence sur leurs contemporains. […] Alphonse Daudet911, un fin Méridional, nature souple, nerveuse, séduisante, a subi l’influence de MM.  […] Anatole France918 a fait passer, semble-t-il, dans le roman l’influence de Renan, avec plus de dilettantisme qu’il n’y en eut réellement chez celui-ci. […] Bourget fait l’éducation de son « disciple », notant toutes les circonstances et influences qui déterminent le caractère, de la première enfance à l’âge d’homme.

114. (1902) L’œuvre de M. Paul Bourget et la manière de M. Anatole France

Ce n’est pas que des influences sérieuses ne l’aient dominé, et que la trace n’en apparaisse avec évidence. Mais il y a en lui quelque chose qui, dès la première heure, lui fut propre ; et il s’agit de quelque chose de remarquable, ne serait-ce que son extraordinaire aptitude à subir des influences de l’ordre le plus élevé. […] L’influence d’un esprit qui lui est apparu, non certes sans raison, comme un des plus vastes de ce siècle, et dont c’est la théorie desséchante que cette exclusive royauté de la sensation, — nous parlons de M. Taine — cette influence sur M.  […] Et puisque c’est d’aspirer en quelque sorte à cette direction qu’il fait montre, lorsqu’il s’applique à exercer une influence, à faire vibrer une corde, ne serait-ce que la moins essentielle du cœur, il nous doit donc un certain compte des raisons qu’il a de vouloir y réussir, comme il se devait de se demander quelle graine il allait semer qui méritât d’être féconde.

115. (1888) La critique scientifique « La critique et l’histoire »

Augustin Thierryef l’un des premiers, parti de l’idée confuse que les événements comprennent dans leurs causes d’autres facteurs que leur auteur principal, et exagérant l’effet de ces facteurs secondaires, a attribué une importance excessive à l’influence des masses dans les faits historiques. […] Et, le déterminisme des économistes anglais et des statisticiens paraissant à tort plus facilement applicable aux peuples qu’aux individus, on arriva aux conceptions de Buckleeg, chez qui la guerre, par exemple, se fait sans généraux, sans stratégie, sans discipline, sans influence d’armement ou de tactique, par le hasard et le vague instinct des bandes. […] Enfin, saisissant ainsi des intelligences telles quelles, les analysant avec une précision et une netteté considérables et les replaçant ensuite par une minutieuse synthèse dans leurs familles, leurs patries, leurs milieux, l’esthopsychologie, un ensemble d’études particulières de cette science, sont appelés à vérifier les plus importantes théories de ce temps sur la dépendance mutuelle des hommes, sur l’hérédité individuelle, sur l’influence de l’entourage physique et social. […] Enfin, dans une troisième partie, l’analyste écartant la théorie insuffisante de l’influence de la race et du milieu qui n’est exacte que pour les périodes littéraires et sociales primitives, considérant l’œuvre même comme le signe de ceux à qui elle plaît, et tenant en mémoire qu’elle est d’autre part le signe de son auteur, conclut de celui-ci à ses admirateurs. […] Tarde compare ainsi « l’état social » à « l’état hypnotique », ou à « l’état somnambulique », ce qui signifie que les relations sociales sont d’abord pour lui fondamentalement dissymétriques : un « fascinateur » doté d’un certain prestige et d’une certain autorité symbolique (chef de famille, chef militaire, instituteur, prêtre, etc.), influence un « fasciné », selon une dynamique qui façonne les différentes conduites imitatives.

116. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Première partie. Écoles et manifestes » pp. 13-41

Écoles et manifestes Les influences NATURISME, HUMANISME, RENAISSANCE CLASSIQUE. […] L’origine de ce mouvement remonte à Renan dont l’influence a si lourdement pesé sur cette génération pénétrée de son esprit. […] Sainte-Beuve d’ailleurs l’eût approuvée puisqu’il déclare : « L’important, aujourd’hui, est de maintenir l’idée et le culte (du classicisme). » La tâche a été rendue facile par les influences subies. […] Ce qui fut mauvais et contraire à notre génie propre dans les influences reçues de l’étranger, une influence étrangère le neutralisa. […] Par là, son influence fut conforme aux aspirations françaises.

117. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « X. M. Nettement » pp. 239-265

Seulement, après la part des influences dont il ne suit qu’à moitié les vastes ramifications, fait-il celle des hommes avec cette juste rigueur que nous aurions aimé à rencontrer dans son livre ? […] L’appréciation des influences de Béranger, sous la Restauration, l’étude faite de ses opinions, de son talent et de sa vie, honoreraient toute plume vivante et même celles qui sont regardées par l’opinion comme bien supérieures à la plume de M.  […] Si le premier de ces ouvrages ne révélait, comme on l’a vu, aucune qualité forte et personnelle, telle qu’elle était, cependant, il avait été écrit sous l’influence de ces principes religieux qui importent plus, que l’originalité littéraire, et qui, si rare qu’elle soit dans notre temps, sont plus rares qu’elle. […] C’est dans la recherche des influences raccourcies de cette révolution qu’il borne l’effort de son regard. Il croit tout expliquer par elles, et, en définitive, il n’explique rien, car la Révolution de Juillet, qui n’a eu sur les choses littéraires qu’une influence de seconde ou de troisième portée, est elle-même congénère de la révolution littéraire qui l’a suivie.

118. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre I. La quantité des unités sociales : nombre, densité, mobilité »

Cherchons donc, pour mesurer leur influence sur le développement de l’égalitarisme, les caractères les plus généraux et les plus simples des sociétés. […] De fait, si l’influence du nombre des individus associés sur les différentes formes de l’activité sociale n’a pas souvent été systématiquement étudiée52, elle a été plus d’une fois, sur plus d’un point, remarquée incidemment. […] L’individu, dont l’influence personnelle n’est plus qu’un élément imperceptible de la volonté sociale qui imprime au gouvernement sa direction, se replie en quelque sorte sur lui-même et met au-dessus de tout sa liberté propre. […] À vrai dire, les voies et moyens de cette influence, il est souvent malaisé de les saisir ; mais que tout le monde ait de ses effets une conscience plus ou moins vague, les proverbes courants, les remarques banales, les conseils de la sagesse populaire suffiraient à le prouver. […] Par des considérations analogues s’explique l’influence que l’extension des États a pu exercer sur l’isonomie.

119. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre II. La qualité des unités sociales. Homogénéité et hétérogénéité »

Telle est la première question qu’il faut se poser si l’on veut classer les sociétés et déterminer les influences les plus générales auxquelles elles cèdent. […] Leur influence se trahit jusque dans les sociétés où le principe égalitaire est formellement méconnu, comme inversement dans celles où il est formellement reconnu, se trahit l’influence des dissemblances. […] Nous concluons de l’assimilation superficielle à l’assimilation profonde, de la parenté des corps à la parenté des âmes. — L’influence des ressemblances intérieures est d’ailleurs assez puissante pour contrebalancer au besoin celle des différences extérieures ; ceux qui communient dans une même foi se sentent portés à oublier que la race ou l’habit les séparaient. […] Or n’a-t-on pas démontré que plus le nombre des individus qui composent une société grandit, plus les milieux aux influences desquels ils se trouvent soumis diffèrent, et plus par suite l’hétérogénéité de la société devient probable101 ? […] Ils sont en effet plus importants pour notre objet, s’il est vrai que les caractères les plus manifestes doivent aussi exercer la plus sensible influence sur l’attitude et la conduite des individus vis-à-vis les uns des autres.

120. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Première partie. Plan général de l’histoire d’une littérature — Chapitre II. Pourquoi il faut préférer la méthode inductive » pp. 13-14

Nous savons, par exemple, que toutes les influences déterminant l’activité humaine viennent nécessairement ou de l’homme même ou de ce qui l’entoure. […] Il en est ainsi pour la part d’influence qu’il convient d’attribuer à l’hérédité où à cet ensemble fort complexe qu’on désigne sous le nom de climat.

121. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Première leçon »

Nous pouvons néanmoins, ce me semble, par des moyens convenables, éviter les plus pernicieux effets de la spécialité exagérée, sans nuire à l’influence vivifiante de la séparation des recherches. […] Tout ce qu’on en peut dire de réel, quand on l’envisage abstraitement, se réduit à des généralités tellement vagues, qu’elles ne sauraient avoir aucune influence sur le régime intellectuel. […] Mais ce que je ne dois pas négliger de faire particulièrement remarquer, c’est l’influence exercée à ce sujet sur l’esprit de Berzélius, comme il en fait lui-même le précieux aveu, par cette observation physiologique, que les animaux qui se nourrissent de matières non azotées renferment dans la composition de leurs tissus tout autant d’azote que les animaux carnivores. […] Aussi Laplace n’a-t-il présenté cette idée que comme un simple jeu philosophique, incapable d’exercer réellement aucune influence utile sur les progrès de la science chimique. […] J’ai tenté, dans ce discours, de déterminer, aussi exactement qu’il a été en mon pouvoir, le but, l’esprit et l’influence de la philosophie positive.

122. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Fustel de Coulanges » pp. 15-32

II Ce point de vue supérieur, d’une unité grandiose, que l’auteur des Institutions politiques de l’ancienne France fait planer sur son histoire, et qui en contredit toutes les origines, c’est l’influence de l’Empire Romain sur le monde barbare, — c’est-à-dire tout le contraire de ce qu’on a pensé depuis des siècles. […] Homme d’analyse, avant tout, et d’investigation patiente et prudente, il cherche dans tous les faits attestés par les historiens contemporains de son histoire, la trace de cette merveilleuse influence de Rome, qui s’étendit sur les Barbares et qui les pénétra, pour se les assimiler. […] Et si, alors, l’Empire Romain était un grand nom plus qu’une grande choie, s’il n’était plus guères qu’un dais avec une momie byzantine par dessous, il existait encore énergiquement par l’influence ; il existait et planait encore comme une divinité politique sur toutes les royautés barbares. Plus tard, l’auteur, sans doute, dégagera de ce qu’il appelle les Institutions de l’ancienne France, l’immense part de cette influence qui les a pénétrées comme l’eau pénètre l’éponge. « La collection de Justinien — dit-il en passant — a eu force de loi jusqu’au milieu du Moyen Âge… » Mais, en ce moment, ce qu’il veut, c’est de marquer notre lignage et de le purifier de cette tache originelle de la conquête, que l’Histoire lui a fait trop longtemps porter.

123. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre II. Le rôle de la morale » pp. 28-80

L’autorité c’est l’influence exercée sur les autres. […] Dès le plus jeune âge son influence s’exerce. […] En tant que je subis votre influence, en tant que je suis vôtre, je me conformerai à vos lois. […] La pression qu’il exerce sur nous est tout à fait analogue à toutes les influences contraignantes qui nous viennent du dehors. […] Cela permet à l’individu de la considérer comme sienne et d’y voir l’influence directe d’un dieu.

124. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 novembre 1885. »

. — Après avoir achevé cette œuvre, Wagner tomba sous l’influence de la philosophie pessimiste de Schopenhauer, et cette influence se combine curieusement avec la phase la plus païenne de sa vie et de sa pensée. […] Cette image sert aussi à montrer ce qui, dans ce système philosophique, reste inexpliquable et infigurable ; — des causes intérieures ne soulèveraient pas de vagues sur un tel globe-océan, celles-ci ne pourraient être le résultat que d’influences extérieures. […] Les poètes allemands de la période classique, avec leurs efforts pour idéaliser le théâtre, ont exercé une heureuse influence sur l’esprit de leur époque ; mais la confusion d’idées née du mélange de rêves antiques et d’études Shakespeariennes, a été nuisible au théâtre. […] Cette esquisse fut rédigée de 1849 à 1851, sous la double influence, manifeste : en politique, des idées communistes ; en esthétique, du Communisme des Arts, fondus dans l’œuvre idéale d’Art complet. […] Et il les montre dirigés, — par l’influence, surtout, de l’art Wagnérien, — à une forme artistique meilleure, qu’il dénomme un mysticisme, que je crois, plutôt, un Réalisme Dernier, créant par l’emploi défini de tous les signes, toute la Vie.

125. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre troisième. La volonté libre »

De là un double effet : ces objets de notre conscience réfléchie nous paraissent exercer sur nous une influence analogue aux influences extérieures et, en tout ce qui résulte de leur influence, nous nous voyons déterminés. […] Le déterminisme est-il complet s’il n’étudie pas l’influence de cette idée, qui, en fait, existe dans la conscience humaine ? […] Lorsque nous agissons, au contraire, sous l’influence d’idées, et surtout d’idées générales, la part de la passion est réduite au minimum. […] Je ne suis point libre si mes idées ne sont que des reflets passifs et ne peuvent avoir aucune influence, ni en moi, ni hors de moi. […] Cette parfaite détermination de l’avenir dans ma pensée prouve que mon avenir, ici, dépend véritablement de moi, être conscient et raisonnable, non de telle ou telle influence extérieure, non de telle passion, qui se réduirait elle-même à une action extérieure et à une perturbation nerveuse.

126. (1870) La science et la conscience « Chapitre III : L’histoire »

Tant que celle-ci s’est bornée à des études abstraites sur l’âme humaine, sur ses facultés considérées à part de l’organisme, tant qu’elle a traité de la volonté, de la liberté, des passions, des penchants, des idées, en isolant ces divers phénomènes psychiques soit des conditions organiques, soit des influences extérieures sous lesquelles ils se sont produits, la véritable science de l’homme est restée à faire. […] Les poëtes qui se succèdent à travers les âges forment entre eux une chaîne mystérieuse parfaitement isolée des influences terrestres, et dont le premier anneau touche au ciel. […] Elle est devenue une étude analogue à l’histoire naturelle, une véritable physiologie sociale, où l’influence des causes économiques et physiques se combine avec l’action des causes morales et personnelles pour produire ce résultat concret et complexe qu’on appelle l’histoire d’une nation ou d’une époque. […] La nature y joue aussi son rôle par l’influence extérieure des climats et des situations géographiques, et aussi par le travail interne des causes ethnographiques et économiques, double action qui concourt, avec les causes politiques et morales, à former les instincts, les tempéraments, les mœurs, les aptitudes des races et des nations. […] Les rapports qu’elle constate, les influences qu’elle signale, les conditions et les causes qu’elle détermine, sont des faits dont il n’est pas plus permis de douter que de la réalité des événements politiques ou des œuvres esthétiques elles-mêmes.

127. (1911) La valeur de la science « Troisième partie : La valeur objective de la science — Chapitre XI. La Science et la Réalité. »

Mais on ne sera sûr de n’avoir oublié aucune de ces conditions, que quand on aura décrit l’état de l’univers tout entier à l’instant t ; toutes les parties de cet univers peuvent en effet exercer une influence plus ou moins grande sur le phénomène qui doit se produire à l’instant t + dt. […] Cette masse serait animée d’une vitesse colossale et après avoir circulé de tout temps à de telles distances que son influence soit restée jusqu’ici insensible pour nous, elle viendrait tout à coup passer près de nous. […] Leurs molécules suivent des trajectoires rigides, dont elles ne s’écartent que sous l’influence de forces qui varient avec la distance suivant une loi parfaitement déterminée. […] Par exemple, j’ai constaté que l’hydrogène s’unissait à l’oxygène sous l’influence de l’étincelle, et je suis certain que ces deux gaz s’uniront de nouveau, bien que la longitude de Jupiter ait changé considérablement dans l’intervalle. Nous admettons par exemple que l’état des corps éloignés ne peut avoir d’influence sensible sur les phénomènes terrestres, et cela en effet semble s’imposer, mais il est des cas où le choix de ces circonstances pratiquement indifférentes comporte plus d’arbitraire ou, si l’on veut, exige plus de flair.

128. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre cinquième. Le réalisme. — Le trivialisme et les moyens d’y échapper. »

Cette influence a été trop méconnue. […] Chateaubriand est le premier qui ait entrevu cette influence de la Bible, mais il l’a trop confondue avec celle du « génie chrétien ». […] L’influence de la Rible se fait sentir successivement chez l’auteur des Martyrs et chez Lamennais ; elle pénètre jusqu’à l’auteur de Salammbô, et à celui même de la Faute de l’abbé Mouret. […] Enfin l’influence des psaumes est plus sensible encore chez nos lyriques, depuis Alfred de Vigny et Lamartine jusqu’à Victor Hugo. […] Le sentiment de la nature et l’art de la décrire devaient se modifier sous l’influence de la Rible et du christianisme.

129. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXVIII » pp. 266-276

. — influence de la fortune sur les mœurs littéraires. — balzac, messer milione. […] — Il est impossible pourtant de ne pas remarquer l’influence que doivent exercer de tels coups de fortune sur les œuvres littéraires qui en dépendent. […] Voltaire, qui s’était enrichi par d’autres voies, savait très-bien l’influence de la richesse sur les mœurs de la littérature (je prends mœurs dans le sens que lui donnent les rhéteurs), et quand on venait lui faire de grandes phrases à la Jean-Jacques, il vous répondait par le Mondain.

130. (1874) Premiers lundis. Tome I « Ferdinand Denis »

Ferdinand Denis Scènes de la nature sous les tropiques de leur influence sur la poésie, suivies de Camoëns et de José Indio 18 décembre 1824. […] Mais c’est surtout aux détails de mœurs, à l’influence des lieux sur les habitudes et la littérature des peuples, que nous attachons du prix. […] L’auteur a donc voulu, ce me semble, démontrer en sa personne l’influence complète des scènes de la nature sur le génie.

131. (1890) L’avenir de la science « XI »

Se borner à considérer leur influence sur la production littéraire contemporaine, c’est se placer à un point de vue plus étroit encore. […] Welcker estime surtout l’étude de l’antiquité par l’influence heureuse qu’elle peut exercer sur la littérature et l’éducation esthétique des nations modernes. […] Ce qu’il demande, c’est une influence intime et secrète, analogue à celle de l’électricité, qui, sans rien communiquer d’elle-même, développe sur les autres corps un état semblable ; ce qu’il blâme, c’est la tentative de ceux qui veulent trouver chez les modernes la matière suffisante d’une éducation esthétique et morale.

132. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre II. Recherche des vérités générales » pp. 113-119

Ainsi l’examen de leur œuvre et de leur vie nous apprend que Marivaux, Montesquieu, Voltaire, Diderot, Rousseau, Ducis ont tous aimé, admiré, reproduit certains écrivains anglais : nous voici autorisés à déclarer que l’Angleterre a exercé sur la France une forte influence intellectuelle au cours du xviiie  siècle, et avec un peu d’attention, il est aisé de marquer dans quels domaines, entre quelles dates, en quel sens elle a agi. […] L’influence de l’Angleterre d’abord, et celle de Rousseau ensuite sont donc à l’origine du grand courant d’imitation qui s’est propagé par toute la France. […] Rousseau (Charavay frères, Paris, 1883) et dans mon étude intitulée : L’influence de la Suisse française sur la France (Recueil inaugural de l’Université de Lausanne.

133. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Napoléon »

Histoire de Napoléon, de sa famille et de son époque, au point de vue de l’influence des idées napoléoniennes sur le monde. — Edmond de Beauverger. […] Son souvenir, la pile de Volta de ce siècle, a frappé au cerveau toutes les organisations magnétiques des poètes et des artistes, et leur a fait rendre, sous le coup de son influence, les plus belles et les plus puissantes choses qui aient jamais vibré et qui aient jusqu’ici été écrites sur sa personne. […] Puisqu’il voulait se mesurer avec un sujet qui doit casser les reins à de plus robustes que lui, pourquoi Émile Bégin n’intitulait-il pas simplement son livre : Histoire de Napoléon et de sa famille, ce qui était déjà bien assez pour intéresser, et pourquoi ajoutait-il si pompeusement : au point de vue de l’influence des idées napoléoniennes sur le monde 16 ?

134. (1936) Histoire de la littérature française de 1789 à nos jours pp. -564

Une influence à retardement n’entre pas dans le plan des Époques. […] La véritable influence sur les littéraires sera cependant une influence posthume, quand le romantisme vivra et écrira sous vingt formes une Imitation de Napoléon. […] Le groupe d’Auteuil, lui, considérait avec méfiance le déisme et les influences étrangères. […] France par trois œuvres qui font du bruit et qui auront de l’influence. […] La mode et l’influence d’Ossian sont en liaison étroite avec la Romantique.

135. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Charles Nisard »

En histoire littéraire comme en histoire politique, les influences sont tout. Quelle fut l’influence profonde et que nous sentions sur nous, modernes, des travaux et de la personnalité intellectuelle de Juste Lipse, Scaliger et Casaubon ?

136. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre II. Attardés et égarés »

L’esprit mondain, son caractère et son influence sur la littérature. — 4. […] Influence des littératures espagnole et italienne. […] Cette transformation se fit sous une influence nouvelle, celle des gens du monde. […] Cette influence fut, chez nous, plus tardive et moins universelle que celle de l’Italie. […] Je parle des genres sérieux de poésie : car, pour le burlesque, l’influence de l’Espagne fut considérable.

137. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre deuxième »

Influence littéraire du cartésianisme. — § VIII. […] Je juge moins Descartes comme auteur d’une philosophie plus ou moins contestée, que comme écrivain ayant exercé sur la littérature de son siècle une influence décisive. […] Influence littéraire du cartésianisme sur les plus grands écrivains du dix-septième siècle. […] L’influence de Descartes fut celle d’un homme de génie qui avait appris à chacun sa véritable nature, et, avec l’art de reconnaître et de posséder son esprit, l’art d’en faire le meilleur emploi. […] L’ordre des temps excepte de cette influence Corneille, qui, comme Descartes, n’eut pas d’ancêtres ni de tradition.

138. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE KRÜDNER » pp. 382-410

Son influence chrétienne sur la reine de Prusse, son dévouement sans bornes à cette héroïque et touchante infortune, et les bienfaits de consolation, d’espoir céleste, dont elle l’environna, sont suffisamment attestés. […] 1815, en justifiant une partie de ses prédictions, exalta sa foi et réalisa son influence politique. […] L’espèce de triomphe de Mme de Krüdner au camp de Vertus marqua le plus haut point et, pour ainsi dire, le sommet lumineux de son influence. […] En 1814, l’empereur Alexandre avait été sous l’influence de son digne précepteur le général La Harpe, influence purement libérale, à la façon des hommes de 89 et de l’an III ; en 1815, lorsqu’il passa sous celle de Mme de Krüdner, il parut bien moins libéral à nos libéraux francais, à M. de La Fayette par exemple, qui relève en ses Mémoires la métamorphose. Mais combien cette seconde influence, mystiquement chrétienne et charitable, lui conservait d’amour de la liberté encore, au prix de ce qui s’opéra en lui lorsqu’elle se fut refroidie à son tour !

139. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Introduction »

La génération qui nous suivra examinera peut-être aussi la cause et l’influence de ces deux années ; mais nous, les contemporains, les compatriotes des victimes immolées dans ces jours de sang, avons-nous pu conserver alors le don de généraliser les idées, de méditer des abstractions, de nous séparer un moment de nos impressions pour les analyser ? […] Si dans le traité sur le bonheur individuel, je ne parle que des caractères passionnés, il est encore plus naturel d’analyser les gouvernements sous le rapport de la part qu’ils laissent à l’influence des passions. […] Dans la seconde partie, je compte examiner les gouvernements anciens et modernes sous le rapport de l’influence qu’ils ont laissée, aux passions naturelles aux hommes réunis en corps politique, et trouver la cause de la naissance, de la durée, et de la destruction des gouvernements, dans la part plus ou moins grande qu’ils ont faite au besoin d’action qui existe dans toute société. […] Après avoir bien établi l’importance première de la nature des constitutions, il faudrait prouver leur influence par l’examen des faits caractéristiques de l’histoire des mœurs, de l’administration, de la littérature, de l’art militaire de tous les peuples. […] On ne s’avise d’appliquer aucune de ces idées générales à sa situation particulière ; tout ce qui vous arrivera, tout ce qui vous entoure doit être une exception ; ce qu’on a d’esprit n’a point d’influence sur la conduite : là où il y a un cœur, il est seul écouté ; ce qu’on n’a pas senti soi-même est connu de la pensée, sans jamais diriger les actions.

140. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre I. Les mondains : La Rochefoucauld, Retz, Madame de Sévigné »

Mais tout s’organise, l’esprit classique mûrit, prend conscience de lui-même, les influences fâcheuses sont repoussées, les éléments disparates sont éliminés : les forces qui tendent au vrai, au simple, à la raison enfin, prévalent ; et les résultats apparaissent autour de 1660. […] Le recueil parut en 1665 : peu après, l’amitié de Mme de la Fayette devint prépondérante et ce fut sous cette influence nouvelle que se fit la révision des Maximes d’une édition à l’autre jusqu’à la cinquième (1678). […] Mais il marque un renversement d’influences, et le moment où la tragédie qui, jusque vers le milieu du siècle, fut sous l’action du roman, la repousse définitivement et lui renvoie au contraire la sienne. […] François VI de la Rochefoucauld (1613-1689) se jeta dans les intrigues contre Richelieu, puis dans les deux Frondes, sous l’influence de Mme de Chevreuse, puis de Mme de Longueville. […] Biographie : Paul de Gondi (1613-1679), neveu de l’archevêque de Paris, et son coadjuteur en 1643, s’allia dans la Fronde au Parlement et au duc d’Orléans, sur qui il prit une forte influence.

141. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — I. » pp. 401-420

Deux époques distinctes sont à marquer dans ses treize années d’influence en Espagne. […] Durant les trois premières années, Mme des Ursins travaille à s’établir complètement dans l’esprit des deux personnes royales ; elle écarte les influences rivales, les déjoue par tous les moyens, excite mille clameurs, et, faute d’assez de ménagement et de prudence, mérite de recevoir son rappel par ordre de Louis XIV (1704). […] Là, sur ce terrain, en personne, elle reconquiert son influence, en même temps qu’elle y comprend mieux la ligne de politique qu’elle doit désormais tenir. […] Louville, l’un des principaux agents de l’influence française auprès de Philippe V avant l’arrivée de Mme des Ursins, s’est montré injuste et injurieux contre elle, et en a parlé comme un rival évincé, avec toutes sortes d’outrages, dans les Mémoires qu’on a publiés sous son nom et d’après ses papiers : les Mémoires de Noailles, rédigés par l’abbé Millot, sont plus équitables. […] Usa-t-elle toujours de cette influence intime et sans contrôle dans un sens purement dévoué et désintéressé ?

142. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Macaulay »

L’utilitarisme anglais, la politique anglaise, l’action anglaise, s’emparèrent de lui et nuisirent à un épanouissement de facultés qui eût été splendide, s’il avait été libre et dégagé de toute influence extérieure. […] Aussi, quand les premiers articles de Macaulay parurent, vers 1823, dans cette Revue d’Édimbourg qui fit jaillir les Revues du sol, par toute l’Europe, comme Pompée se vantait de faire jaillir de terre, d’un seul coup de pied, des soldats, on s’étonna, on fut charmé de ces articles substantiels et légers qui n’étaient plus de la critique par pieds, pouces et lignes, appliquée à plat sur un livre comme la mesure d’un tailleur sur le corps d’un homme, mais qui semblaient toute une atmosphère dilatée autour de ce livre et chargée de toutes les influences dans lesquelles on le retrouvait ! […] VII Ainsi, Macaulay n’est pas seulement un homme de talent qui se lève tout à coup dans le xixe  siècle, et qui, plus heureux que les hommes de talent ne le sont d’ordinaire, y prend sa place sans attendre, c’est de plus une influence certaine dans l’histoire de la Critique et de ses progrès. […] Intérieur et extérieur, également embrassés, de l’ouvrage qu’il veut faire connaître, influences subies ou repoussées, époques reproduites à grands traits, individualités pénétrées, manière toute-puissante et presque magique de grouper les faits dans laquelle il est passé maître, vues ingénieuses et profondes, preuves historiques resplendissant d’exemples à l’appui de ses opinions, et, quand il n’est pas dans la vérité absolue, mirages historiques si bien faits que les plus savants peuvent y être pris, voilà les forces vives du genre de critique qui est la gloire de Macaulay ! […] Le seul malheur de la vie de Macaulay fut sa mort prématurée ; mais ce malheur-là, qu’il ne vit pas venir, ne put avoir aucune influence sur son talent, qu’il fallait que la vie meurtrît pour lui donner ses teintes les plus touchantes !

143. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre VI. Les localisations cérébrales »

Pour ce qui est du matérialisme, Gall lui-même s’expliquait en ces termes : « Quand je dis que l’exercice de nos facultés morales et intellectuelles dépend des conditions matérielles, je n’entends pas que nos facultés soient un produit de l’organisation ; ce serait confondre les conditions avec les causes efficientes. » Cette distinction est précisément celle que font les spiritualistes quand on leur objecte l’influence du physique sur le moral, et elle est très à sa place ici. […] La vieille théorie des tempéraments et de leur influence sur les caractères peut avoir été plus ou moins exagérée ; mais l’expérience de tous les jours est là pour nous montrer que la gaieté, la tristesse, l’audace, la timidité, et beaucoup d’autres affections ont une liaison étroite avec l’organisation. Enfin les changements qui ont lieu dans nos sentiments et nos affections sous l’influence des maladies, prouvent bien aussi qu’il y a là quelque chose d’organique. […] L’influence de l’hérédité sur les penchants est incontestable, et la religion elle-même reconnaît cette hérédité et innéité des mauvais instincts, puisque c’est principalement sur cette donnée qu’elle fonde la doctrine du péché originel.

144. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Oberman, édition nouvelle, 1833 »

Élève de Jean-Jacques pour l’impulsion première et le style, comme madame de Staël et M. de Chateaubriand, mais, comme eux, élève original et transformé, quoique demeuré plus fidèle, l’auteur des Rêveries, alors qu’il composait Oberman, ignorait que des collatéraux si brillants, et si marqués par la gloire, lui fussent déjà suscités ; il n’avait lu ni l’Influence des Passions sur le Bonheur, ni René ; il suivait sa ligne intérieure ; il s’absorbait dans ses pensées d’amertume, de désappointement aride, de destinée manquée et brisée, de petitesse et de stupeur en présence de la nature infinie.  […] Ce ne fut pas pourtant, qu’on le sache bien, une œuvre sans influence. […] Mais voici l’épisode le plus frappant sans doute de l’influence bizarre et secrète d’Oberman.

145. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre I. Influence de la Révolution sur la littérature »

Chapitre I Influence de la Révolution sur la littérature 1. […] Même lorsque les salons se rouvrirent et que la vie de société reprit son cours, jamais l’ancienne tyrannie du goût des gens du monde ne fut rétablie : même sous la Restauration, et à plus forte raison depuis, les plus célèbres salons n’eurent jamais qu’une influence très limitée. […] Et ainsi ce journal aura sa part d’influence dans la formation du courant romantique, qui apportera un goût si contraire à ceux de ses rédacteurs ordinaires.

146. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Lessing »

Mais malgré l’influence d’un tel homme, qui avait honte pour l’Allemagne de son absence de nationalité dramatique, malgré la tentative qu’on faisait de la création d’un théâtre, l’asservissement des Allemands aux idées françaises était si grand et presque si fatal, que les pièces qu’ils jouèrent à Hambourg furent presque toutes des pièces françaises, et quelles pièces ! […] Il abattit souvent mainte tête qu’il eut la cruauté de relever pour bien montrer qu’elle était vide… » Ironique et spirituel, il tournait dans ses feuilletons contre la France, les théâtres et les influences françaises, les deux qualités françaises qui le rendent si cher à Heine, lequel les avait aussi ! […] C’était Shakespeare qu’il fallait dresser, et non pas Aristote, contre les influences et les idées françaises !

147. (1889) La littérature de Tout à l’heure pp. -383

Comment connaîtrait-on l’influence mutuelle des affections corporelles et des affections psychiques ? […] Il a même été touché par l’influence scientifique. […] De lui et de Baudelaire il faut aimer les influences comme fraternelles et qu’il sied de ne séparer point. […] — les influences sociales […] Influences morales : je les réduis toutes à la tentation du « Succès ».

148. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Préface »

Préface Les essais qui forment ce livre sont consacrés à six écrivains de nationalités diverses, introduits, accueillis et devenus célèbres en France pendant ces cinquante dernières années et qui marquent ainsi un des traits particuliers de l’histoire de notre littérature : l’influence qu’y ont exercée des auteurs étrangers de race, de langue, de tournure d’esprit à tout ce que l’on considère comme le propre du génie gallo-latin. […] Tandis que ce penseur s’est appliqué à rechercher les causes formatrices des grands hommes dans l’hérédité, l’influence de la race, du milieu, de l’habitat, nous laissons comme insoluble actuellement ce problème d’origine et c’est de l’ascendant des conducteurs spirituels de peuples que nous nous préoccupons, de la carrière de leurs idées et de leurs paroles, du fait et du sort de leur prestige.

149. (1921) Esquisses critiques. Première série

Et cela a de quoi surprendre chez un écrivain dont la jeunesse ressentit avec beaucoup de docilité la grande influence de Mallarmé. […] Cette influence à la fois intellectuelle et formelle contribua puissamment à la formation de M. de Régnier. […] Toutefois l’influence sur M.  […] Il semble qu’il soit de son essence de ne point propager d’influence. […] Montfort auquel manquent cependant ceux-là même des traits qui ont sur ses ouvrages l’influence la plus sensible.

150. (1891) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Quatrième série

Sous l’influence du siècle qui finit, tout imprégné des souvenirs classiques, on le croit tout d’abord. […] Je soumets cette façon d’envisager l’influence de l’Espagne dans la littérature française — ou européenne même, — à M.  […] Ainsi, de tous les côtés, on le voit, nous retrouvons le jansénisme et son influence. […] À mesure que le siècle approche de sa fin, l’influence de Pascal décroît, cette de Descartes augmente et se répand. […] Taine enfin, rien ne serait plus facile que de retrouver l’influence de l’Esprit des lois.

151. (1890) Nouvelles questions de critique

Pellissier n’a-t-il pas également exagéré quelque peu l’influence de Diderot ? […] Pellissier que la grande influence ait été celle de Rousseau. […] Mais une influence que l’on s’étonnera que M.  […] C’est aussi bien le secret de son influence. […] De toutes ces influences, auxquelles on pourrait joindre encore, comme ayant agi dans le même sens, l’influence du roman anglais, de Dickens et Thackeray surtout, dont M. 

152. (1908) Après le naturalisme

Le minimum d’influence sociale, c’est la plaie dont l’art mourut. […] D’influence productrice, il n’en a point. […] Il ne laisse aucune influence de son passage. […] et pouvons nous avancer que de telles influences existent. […] Nous en avons montré l’influence.

153. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Laïs de Corinthe et Ninon de Lenclos » pp. 123-135

C’est une manière comme une autre d’écrire l’histoire des mœurs et des influences, que de tracer la biographie des courtisanes qui ont trouvé une espèce de gloire dans leur infamie. […] Un homme plus savant sur la Grèce que Debay, malgré son séjour dans le Péloponèse, et dont le talent a pour caractère distinctif une sagacité redoutable, Prosper Mérimée, a regretté quelque part, avec le sentiment d’une curiosité indigente et trompée, cette absence de mémoires, qui nous enlève d’un seul coup la moitié du monde grec sans espoir de la retrouver, et précisément la moitié dans laquelle se produisaient, en se variant, l’influence et l’action des courtisanes. […] Ce précieux papyrus, qui était signé par Aristophane de Bysance, affirme bien une fois de plus une influence que personne ne conteste, mais il ne l’explique pas, et, nous disons plus, il ne pouvait pas l’expliquer.

154. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIV. M. Auguste Martin »

Martin a donc agi avec une vigueur de procédé qui l’honore en retraçant d’abord, et avant toutes les autres nations, la Chine et l’influence qu’y exerce la morale, pour montrer que la morale est quelque chose en soi, car elle y est tout, et après l’avoir montré, M.  […] Toute cette morale dont ils se chamarrent n’est donc pour eux que de l’ornementation pure, pièces d’estomac, broderies de robe, inscriptions de lambris, peintures d’éventail, dessus de porte, arabesques, mais elle n’a aucune influence réelle sur leur caractère et leurs actes, et elle ne peut pas en avoir, car voici précisément où un homme, qui n’aurait pas été M.  […] Une raison encore qu’il nous donne du peu d’influence de la morale chez les Chinois, ses civilisés et ses régnicoles, c’est ce qu’il appelle l’esclavage de la femme.

155. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Auguste de Chatillon. À la Grand’Pinte ! »

Auguste de Châtillon, et ici je touche au point vif de son Recueil… Il y a une influence et une influence terrible dont il n’est pas le seul parmi les poètes à porter le poids et que je voudrais lui voir repousser. […] Quand le monde est à l’Idéal, aux profondes convictions, aux grandes choses, l’influence du monde sur le poète ne détruit pas le don de Dieu, cette originalité délicate qui est à la pensée ce que la pureté est au cœur.

156. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Duranty » pp. 228-238

Seulement, si ces ivres admirations de la jeunesse font souvent tache, pour toute la vie, sur l’originalité qui s’en essuie plus tard sans en effacer l’influence ; si ces admirations imitatrices sont toujours en raison inverse de la force qu’on a, l’objet, d’ailleurs, en serait-il Gœthe, Lord Byron ou Balzac, je demande ce qu’elles prouvent et ce qu’elles annoncent, quand leur objet n’est qu’un écrivain d’un ordre infime, malgré des prétentions exorbitantes. […] Je ne reconnais pas, il est vrai, sur ce talent, nouveau pour moi, les influences qui devraient y être, les traces de l’amour, toujours plus ou moins ineffaçables. […] affecta et contamina, dans sa meilleure époque, de je ne sais quoi d’inférieur et de bourgeois, les conceptions d’hommes qui avaient pourtant du génie, à présent qu’en tarissant il s’est mêlé aux autres grossièretés d’une vie qui se matérialise chaque jour davantage et que, sous cette théorie et sous ce nom de réalisme, il aspire à gouverner une littérature décadente, ne doit-il pas abaisser plus que jamais des talents moins faits pour résister à ses influences et nuire à leurs inspirations ?

157. (1856) Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres pp. 5-62

Mais déjà, j’ose le dire, l’objet de Swift était rempli ; il avait exercé sur mon imagination enfantine l’influence qu’il voulait produire sur celle des hommes ; le miel dont il avait entouré sa coupe me l’avait fait vider tout entière. […] L’apparition de cet ouvrage et son prodigieux succès eurent sur la vie de Swift une influence décisive et irréparable. […] Swift voulait un évêché, et les ministres épuisèrent vainement leur influence pour faire un évêque de l’auteur du Conte du Tonneau. […] Les Whigs triomphèrent et les ministres se crurent perdus jusqu’au 29 décembre, où la reine rendue à leur influence, créa 12 nouveaux pairs partisans de la paix. […] En 1726, il alla jouir de son triomphe à Londres et eut avec Walpole une entrevue qui fit croire à un marché entre l’homme d’État et l’écrivain qui venait de prouver ce que valait son influence.

158. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre quatrième. Éléments sensitifs et appétitifs des opérations intellectuelles — Chapitre deuxième. Les opérations intellectuelles. — Leur rapport à l’appétition et à la motion. »

L’inspiration spontanée est due à l’automatisme des associations d’idées, qui fonctionne dans le cerveau d’une manière souvent inconsciente pour nous, sous l’influence d’un désir dominant et plus ou moins précis. […] Ce n’est pas à dire que nos sentiments et nos volitions n’aient point une influence indirecte sur nos croyances. […] La question revient donc à savoir si le temps, à lui seul, exerce une influence. Or, reniant qui s’est brûlé une première fois n’a aucune raison pour supposer une telle influence, et d’ailleurs il ne conçoit pas même le temps. […] Dès lors, la différence de temps, s’il arrive à la concevoir, n’a pas eu d’influence : il y a une raison positive pour admettre qu’elle n’en aura pas dans l’avenir et il n’y a aucune raison pour admettre le contraire.

159. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Maine de Biran. Sa vie et ses pensées, publiées par M. Ernest Naville. » pp. 304-323

La raison serait-elle toujours impuissante contre l’influence du tempérament ? […] Tel nous apparaît Maine de Biran dans ce volume, au point de départ ; quinze et vingt ans après, et par le seul mouvement continu de sa pensée, il en était venu à déplacer totalement son point de vue, à le porter, en quelque sorte, de la circonférence au centre, à tout rendre (et même au-delà) à la force intime et à la volonté : L’art de vivre, écrivait-il en 1816, consisterait à affaiblir sans cesse l’empire ou l’influence des impressions spontanées par lesquelles nous sommes immédiatement heureux ou malheureux, à n’en rien attendre, et à placer nos jouissances dans l’exercice des facultés qui dépendent de nous, ou dans les résultats de cet exercice. […] Parce qu’il a été vers la fin un adversaire du gouvernement impérial, on aurait tort de le prendre pour un grand partisan du régime constitutionnel ou parlementaire ; selon lui, le seul bon gouvernement est celui sous lequel l’homme trouve le plus de moyens de perfectionner sa nature intellectuelle et morale et de remplir le mieux sa destination sur la terre : or, sûrement, ajoute-t-il, ce n’est pas celui où chacun est occupé sans cesse à défendre ce qu’il croit être ses droits ; où les hommes sont tous portés à s’observer comme des rivaux plutôt qu’à s’aimer et s’entr’aider en frères ; où chaque individu est dominé par l’orgueil ou la vanité de paraître, et cherche son bonheur dans l’opinion, dans la part d’influence qu’il exerce sur ses pareils. […] Son idéal en ce genre, autant qu’on l’entrevoit à travers ses regrets, serait une sorte de gouvernement paternel et de famille, avec des influences locales et territoriales et beaucoup de décentralisation. […] Par son premier ouvrage public, couronné par l’Institut (Influence de l’habitude sur la faculté de penser, 1802), Maine de Biran s’était rallié à l’école, alors régnante, des idéologues de la fin du xviiie  siècle ; mais il ne s’y rattacha jamais que transitoirement, et bientôt, ne consultant que son sens intime, il passa outre.

160. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « M. Fiévée. Correspondance et relations avec Bonaparte. (3 vol. in-8º. — 1837.) » pp. 217-237

Fiévée insiste pour que, malgré l’influence de ces hommes et les ménagements qu’on leur doit, le gouvernement en vienne le plus tôt possible à condamner hautement les faux principes. […] Il est loin de déconseiller la méthode de ralliement et d’absorption appliquée aux anciens Conventionnels et aux révolutionnaires, mais c’est à condition de les réduire à l’inaction et à la nullité d’influence : Qu’on puisse dire du Premier consul que, s’il engraisse les vieux philosophes et les vieux révolutionnaires, c’est pour les mettre hors de cause, à peu près comme les athlètes dans la Grèce étaient forcés de renoncer aux combats quand ils avaient trop d’embonpoint. […]  » Qualifiant l’influence alors régnante, la double influence inverse, mais également dangereuse, de Rousseau et de Voltaire, il dit : Les Français vivant sur deux opinions également dangereuses, l’une formée par un éloquent écrivain qui a grandi toutes les petites choses, l’autre formée par un écrivain railleur qui s’est plu à dégrader tout ce qui était grand, il faut s’écarter avec soin de l’une et de l’autre route, pour refaire l’opinion publique et en revenir, comme au vieux temps, à la simplicité et au sérieux. […] Par penchant et par habitude, il était encore plus homme de presse qu’il ne l’avait été de consultation et de cabinet : « Comme écrivain, disait-il, entre m’adresser au public ou à un souverain, fût-il dix fois plus élevé que la colonne de la place Vendôme, je n’hésiterai jamais à préférer le public ; c’est lui qui est notre véritable maître. » En laissant dans l’ombre les côtés faibles et ce qui n’est pas du domaine du souvenir, et à le considérer dans son ensemble et sa forme d’esprit, je le trouve ainsi défini par moi-même dans une note écrite il n’y a pas moins de quinze ans : Fiévée, publiciste, moraliste, observateur, écrivain froid, aiguisé et mordant, très distingué ; une Pauline de Meulan en homme (moins la valeur morale) ; sans fraîcheur d’imagination, mais avec une sorte de grâce quelquefois à force d’esprit fin ; — de ces hommes secondaires qui ont de l’influence, conseillers nés mêlés à bien des choses, à trop de choses, meilleurs que leur réputation, échappant au mal trop grand et à la corruption extrême par l’amour de l’indépendance, une certaine modération relative de désirs, et de la paresse ; — travaillant aux journaux plutôt par goût que par besoin, aimant à avoir action sur l’opinion, même sans qu’on le sache ; — Machiavels modérés, dignes de ce nom pourtant par leur vue froide, ferme et fine ; assez libéraux dans leurs résultats plutôt que généreux dans leurs principes ; — sentant à merveille la société moderne, l’éducation moderne par la société, non par les livres ; n’ayant rien des anciens, ni les études classiques, ni le goût de la forme, de la beauté dans le style, ni la morale grandiose, ni le souci de la gloire, rien de cela, mais l’entente des choses, la vue nette, précise, positive, l’observation sensée, utile et piquante, le tour d’idées spirituel et applicable ; non l’amour du vrai, mais une certaine justesse et un plaisir à voir les choses comme elles sont et à en faire part ; un coup d’œil prompt et sûr à saisir en toute conjoncture la mesure du possible ; une facilité désintéressée à entrer dans l’esprit d’une situation et à en indiquer les inconvénients et les ressources ; gens précieux, avec qui tout gouvernement devrait aimer causer ou correspondre pour entendre leur avis après ou avant chaque crise.

161. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre III. Le roman » pp. 135-201

Il apparaît, au contraire, que cette influence — subie non sans orgueil naguère — dota le poète des Sonatines d’Automne d’une excellente méthode de raisonnement. […] Rosny de l’influence qui leur est due. […] Il est le malaise, la faiblesse ethnique contre quoi notre influence peut réagir. […] Comment cette influence ne s’étendrait-elle pas aux races coloniales qui sont, les unes, très profondément françaises, les autres prêtes à le devenir ? […] Pas d’audaces blâmables… Un très bon livre, d’un style harmonieux et souple encore que dominé par quelques influences.

162. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (2e partie). Littérature de l’Allemagne. » pp. 289-364

« Nous donnons dans ce monument l’image fidèle de son génie qui a exercé une si puissante influence sur notre époque que mille de ses contemporains ont longtemps vécu et se sont développés sous ses rayons, sans jamais le savoir ; car c’était un soleil d’intelligence qui éclairait toutes les branches de la vie et qui faisait éprouver son action bienfaisante à tous ceux qui ont senti et pensé par elle, même dans les limites les plus étroites de leur être. […] Je désirais saisir le monde des phénomènes et des forces physiques dans leur connexité et leur influence mutuelles. […] La permanence de certains types, en dépit des influences les plus contraires des causes extérieures, surtout du climat, semblait favoriser cette manière de voir, quelque courtes que soient les périodes de temps dont la connaissance historique nous est parvenue. […] Il fallut les conquêtes d’Alexandre, qui éveillèrent tant d’idées de géographie physique, pour engager le débat relatif à cette problématique influence des climats sur les races d’hommes. […] « Le langage est une partie intégrante de l’histoire naturelle de l’esprit ; et bien que l’esprit, dans son heureuse indépendance, se fasse à lui-même des lois qu’il suit sous les influences les plus diverses, bien que la liberté qui lui est propre s’efforce constamment de le soustraire à ces influences, pourtant il ne saurait s’affranchir tout à fait des liens qui le retiennent à la terre.

163. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre II. Le mouvement romantique »

Influences artistiques. […] Origines et influences déterminantes. […] Ces influences, dont j’ai marqué précédemment le progrès jusqu’aux approches de la Révolution, se sont depuis trente ans précisées, étendues ; des œuvres considérables ont pénétré chez nous, apportant une force nouvelle aux instincts romantiques. […] Échappant aux influences du monde et du collège, nos poètes se trouvèrent affranchis de cette crainte du ridicule, qui paralyse toutes les originalités dans la vie mondaine, et dotés sur les petits secrets de l’art d’écrire de certaines ignorances favorables à la spontanéité de l’expression.

164. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Madame Récamier. » pp. 121-137

Au mois de mai dernier a disparu une figure unique entre les femmes qui ont régné par leur beauté et par leur grâce ; un salon s’est fermé, qui avait réuni longtemps, sous une influence charmante, les personnages les plus illustres et les plus divers, où les plus obscurs même, un jour ou l’autre, avaient eu chance de passer. […] L’un de ces chapitres serait celui de ses relations et de son intimité avec Mme de Staël, deux brillantes influences si distinctes, bien souvent croisées, presque jamais rivales, et qui se complétaient si bien. […] C’est par de telles influences que la société devient société autant que possible, et qu’elle acquiert tout son liant et toute sa grâce. […] Elle justifiait bien par sa douce influence auprès de lui le mot de Bernardin de Saint-Pierre : « Il y a dans la femme une gaieté légère qui dissipe la tristesse de l’homme. » Et ici à quelle tristesse elle avait affaire !

165. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre III. Contre-épreuve fournie par l’examen de la littérature italienne » pp. 155-182

Nous avons ainsi une personnalité très complexe, dont il faudrait démêler les éléments divers et parfois contradictoires : le fonds individuel, la tradition populaire de la nouvelle, le lyrisme venu de Pétrarque, l’influence de Dante et des poèmes allégoriques, l’influence classique, et, d’une façon générale, le désarroi de l’époque. […] Paolo Ferrari et Pietro Cossa en furent les précurseurs ; Giuseppe Giacosa passe peu à peu du théâtre romantique au théâtre à thèse ; l’influence d’Ibsen, de Sudermann, de Hauptmann est sensible chez Rovetta, Bracco, Butti. […] Mais d’autre part l’Italie participe à la crise sociale, intellectuelle et morale que notre civilisation traverse en ce moment et dont l’expression littéraire est surtout dramatique ; elle est soumise ainsi à des influences qui sont en conflit avec le développement national.

166. (1894) Les maîtres de l’histoire : Renan, Taine, Michelet pp. -312

Les influences nuisibles n’ont d’ordinaire qu’un temps ; les influences bienfaisantes sont éternelles. […] Aucun écrivain n’a exercé en France dans la seconde moitié de ce siècle une influence égale à la sienne ; partout, dans la philosophie, dans l’histoire, dans la critique, dans le roman, dans la poésie même, on retrouve la trace de cette influence. […] Au point de vue intellectuel, on retrouve en lui l’influence des divers milieux qu’il a fréquentés. […] Néanmoins l’œuvre de Michelet n’eut en France que peu d’influence. […] Il se donnait tout entier à ses élèves, et à leur tour ses élèves ont eu sur lui une influence bienfaisante.

167. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre VIII. Bossuet historien. »

Mais c’est dans le Discours sur l’Histoire universelle que l’on peut admirer l’influence du génie du christianisme sur le génie de l’histoire. […] Remarquons que Tacite a parlé des pyramides177, et que sa philosophie ne lui a rien fourni de comparable à la réflexion que la religion a inspirée à Bossuet ; influence bien frappante du génie du christianisme sur la pensée d’un grand homme.

168. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « L’abbé Cadoret »

Abreuvés de christianisme dès le berceau comme du lait de nos mères, nous retrouvons en nous l’influence chrétienne, même quand nous ne la méritons plus, et cette bienfaisante influence garde les instincts de nos cœurs contre les frénésies de l’orgueil et les froides audaces de la raison.

169. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — V »

Voici pourtant un point où je me permets de me soustraire très décidément à son influence si notable.‌ […] Avec le maître de Weimar, il aurait dit, signé et contresigné cet aphorisme : « Quiconque veut exercer une influence ne doit jamais blâmer ni s’inquiéter de ce qui va de travers, mais faire constamment, uniquement le bien.

170. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre V : Règles relatives à l’explication des faits sociaux »

Car ils ne peuvent avoir d’influence sur l’évolution sociale qu’à condition d’évoluer eux-mêmes, et les changements par lesquels ils passent ne peuvent être expliqués que par des causes qui n’ont rien de final. […] Or le premier ne peut avoir d’influence sur la société qu’à travers le second, qui se trouve être ainsi le moteur essentiel de l’évolution sociale. […] Il y a, il est vrai, un certain nombre de faits qu’il est d’usage d’attribuer à l’influence de la race. […] Toutefois, l’action de ces milieux particuliers ne saurait avoir l’importance du milieu général ; car ils sont soumis eux-mêmes à l’influence de ce dernier. […] Il en résulte qu’il peut se servir de l’énergie sociale qu’il détient, dans un sens déterminé par sa nature individuelle, et, par là, il peut avoir une influence sur la constitution de la société.

171. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIII. »

Par deux points, ce souvenir touche à notre sujet : par l’influence de la tradition littéraire, et par l’effort de la rénovation poétique. […] Dans Callimaque, soit qu’il s’agisse d’un libre chant médité par le poëte, ou d’un hymne destiné à quelque fête de l’ancien culte, aux Thesmophories, à l’inauguration des Bains de Pallas ou aux processions de Délos transplantées sur les bords du Nil, le langage est plus abstrait et plus austère, la croyance plus pure et mêlée d’une influence nouvelle. […] Mais, à part ces conséquences lointaines de la politique adoptée par les Ptolémées dans la fondation de leur éphémère empire, il faut reconnaître dans la science et l’esprit d’Alexandrie une autre influence religieuse que celle du polythéisme égyptien ou grec. […] Là comme ici, le génie propre de l’homme a surmonté l’influence du temps ; ou peut-être, dans l’une et l’autre époque, il s’en est également aidé par cet esprit de résistance et de contraste, qui est aussi une inspiration pour le talent. […] L’origine de la pastorale dans la poésie grecque semble se reporter, soit à l’influence de l’Asie Mineure, au temps du poëte Bion, soit à celle de l’Égypte, au temps de Ptolémée et de Théocrite.

172. (1890) L’avenir de la science « Sommaire »

Influence des races. […] Influence des résultats de la haute science sur la littérature productive. […] Mauvaise influence de ce qu’on appelle la société.

173. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre premier. L’idée force du monde extérieur »

Influence de ces idées. […] Influence de cette idée. […] Une fois construite, la représentation des autres êtres, devient une idée-force, ou plutôt une collection d’idées-forces toujours présentes à notre conscience, avec lesquelles nous comptons toujours, et qui manifestent leur influence dans tous nos actes, dans tous nos mouvements.

174. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre VIII. Suite du chapitre précédent. De la parole traditionnelle. De la parole écrite. De la lettre. Magistrature de la pensée dans ces trois âges de l’esprit humain » pp. 179-193

Alors il lui restait une sorte d’influence analogue, et comme un souvenir de ce qu’elle fut avant de s’être à demi matérialisée par l’écriture. […] Je crois donc que l’on s’est beaucoup trompé lorsque l’on a raisonné sur l’influence de l’imprimerie. On croit, en général, que cette influence a été plus grande, qu’elle ne l’a été en effet ; ou peut-être a-t-elle été seulement différente.

175. (1939) Réflexions sur la critique (2e éd.) pp. 7-263

L’influence de la comédie de Molière a été dans le même sens que l’influence de la comédie d’Aristophane. […] Elle a prouvé d’ailleurs son sérieux par son influence. […] Mais la poésie des Félibres ne subit à peu près aucune influence livresque romantique. […] La poésie de Mistral, qui n’a subi à peu près aucune influence française, n’a non plus exercé aucune influence sur la poésie française. […] Cette critique d’influences et de générations a été presque fondée par M. 

176. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Benjamin Constant. Son cours de politique constitutionnelle, ou collection de ses divers écrits et brochures avec une introduction et des notes, par M. Laboulaye »

Le charme ou l’influence de Mme de Staël le tenait dès lors tout entier, et décida de la ligne qu’il suivit. Il a tracé de ce salon célèbre et de sa confusion première un piquant tableau : « Le salon de Mme de Staël se trouvait alors peuplé, disait-il, de quatre à cinq tribus différentes : des membres du gouvernement présent, dont elle cherchait à conquérir la confiance ; de quelques échappés du gouvernement passé, dont l’aspect déplaisait à leurs successeurs ; de tous les nobles rentrés, qu’elle était à la fois flattée et fâchée de recevoir ; des écrivains qui, depuis le 9 thermidor, avaient repris de l’influence, et du Corps diplomatique, qui était aux pieds du Comité de Salut public en conspirant contre lui. » « Au milieu des conversations, des actes, des intrigues de ces différentes peuplades, ma naïveté républicaine se trouvait fort embarrassée. […] Mais ce qui me frappe chez lui, à le bien voir et à le regarder sous le masque, ce qui est caractéristique et à noter, c’est l’influence qu’eurent les femmes sur sa conduite politique. […] Cette influence cessant, une autre qui y succéda passagèrement, celle de Mme Récamier, décida de sa conduite au 19 mars 1815 ; et c’est pour plaire à cette beauté, amie des Bourbons, pour ne pas être éclipsé en zèle royaliste et antibonapartiste auprès d’elle, pour ne pas voir un rival, le guerroyant comte de Forbin, avec son sabre, obtenir un plus gracieux sourire que lui avec sa plume, qu’il se hâta d’écrire ce fameux article du Journal des Débats, et de le faire dans des termes tels qu’il était le seul peut-être de son parti qui ne put se rallier le lendemain à Napoléon, même par les meilleurs et les plus nobles motifs de résipiscence, sans s’exposer à une contradiction flagrante et à un échec moral irréparable. […] Tous deux laissent prendre dans leur vie publique une trop grande part, et trop visible, à l’influence des femmes ; mais Chateaubriand, tout en y cédant, les dévore, et Benjamin Constant, des deux, est le plus entraîné et le plus mené.

177. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Essai de critique naturelle, par M. Émile Deschanel. »

Villemain excita en lui jusqu’à l’exaltation tout ce qu’il avait d’inclination littéraire ; il eut au plus haut degré le sentiment de sa vocation en ce genre ; il eut comme une vision de tout l’avenir qui lui était réservé s’il eût cultivé exclusivement les Lettres ; il lut page à page toute cette histoire de travaux, d’émotions, de succès, d’influence, qui aurait pu être la sienne aussi, et que son dévouement à des devoirs religieux avait tout entière annulée ; il vit à la fois tout ce qu’il avait sacrifié, et fut tenté (car c’est bien ainsi qu’il voyait la chose) d’un amer et indicible regret. […] Il y a soixante ans qu’en France on a commencé d’entrer dans cette voie par le livre de Mme de Staël sur la Littérature ; on a fait un pas de plus sous la Restauration, depuis 1824 surtout et la création du Globe, qui n’a pas été sans influence sur les belles leçons de M.  […] Havet, un des maîtres accomplis, un des esprits les plus nets et les plus fermes de ce temps, a eu et a gardé sur lui une grande influence. […] Deschanel prétend simplement que dans toute œuvre d’écrivain, dans toute production un peu considérable, il y a lieu d’étudier et de noter les influences du sang, de la parenté, de la famille, de la race, du sol, du climat. […] Ce qui est nouveau, c’est lorsqu’on le peut, et autant qu’on le peut, de démêler attentivement ces diverses influences, d’en relever la trace ou d’en suivre les reflets à travers les œuvres, et d’y joindre toutes les indications puisées dans la vie, dans la destinée, dans le caractère, l’humeur, la complexion et le tempérament de l’écrivain.

178. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre premier »

De la Renaissance et de la Réforme, et de leur première influence sur l’esprit français. — § II. […] De la Renaissance et de la Réforme, et de leur première influence sur l’esprit français. […] Sous cette influence féconde des deux antiquités, les idées générales entrent à flots dans l’esprit français, et en étendent tout à coup les limites. […] Les premières idées qui furent modifiées par cette influence se rapportent à la vie ordinaire, à l’esprit de société, plutôt qu’à la haute spéculation. […] Mais ne fut-il demeuré de Marguerite de Valois que le souvenir de cette influence, elle aurait droit à une place dans l’histoire de la littérature française.

179. (1900) Poètes d’aujourd’hui et poésie de demain (Mercure de France) pp. 321-350

C’est ainsi que Leconte de Lisle est pour quelque chose dans la Légende des Siècles et que les trouvailles funambulesques de Théodore de Banville ne furent pas sans influence sur les Chansons des Rues et des Bois. […] L’influence de Paul Verlaine fut, des deux, la première sentie. […] Si l’influence de Paul Verlaine fut formelle et persuasive, celle de Stéphane Mallarmé fut rationnelle et foncière. […] Si l’influence directe de Mallarmé fut limitée, son influence indirecte fut très étendue.

180. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XII. La littérature et la religion » pp. 294-312

Si l’on voulait suivre durant ces quatre siècles les influences diverses de la religion sur la littérature, c’est un livre entier qu’il faudrait écrire. […] Plus visible est encore l’influence littéraire des idées religieuses, quand on passe des catholiques aux réformés. […] Mais je m’arrête : j’en ai dit assez pour indiquer de quelles teintes diverses la même secte, suivant qu’elle est triomphante ou traquée, militante ou apaisée, peut colorer les œuvres littéraires composées sous son influence. […] Il faut suivre en chaque époque l’histoire de l’Église, noter si son influence allait croissant ou décroissant, dans quelles limites elle était contenue, et si elle a rencontré un de ces points d’arrêt qui se trouvent d’ordinaire pour toute puissance au lendemain d’un triomphe et d’un excès de prétentions. […] J’ai développé ces idées dans une étude intitulée : L’Influence de la Suisse romande sur la France (Recueil de l’Université de Lausanne, 1890).

181. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame de Lambert et madame Necker. » pp. 217-239

Quelle put être l’influence du monde de son beau-père sur la jeune personne, on le suppose aisément, mais on est réduit à le deviner. […] Pour moi, cette vie désordonnée et affichée de la mère de Mme de Lambert me dénote un autre genre d’influence qui s’est vue souvent en pareil cas, et qui peut s’appeler l’influence par les contraires. […] Il est certain qu’elle a bien fait la moitié de nos académiciens actuels. » Cette influence des salons sur l’Académie française, et l’importance que reprend cette compagnie, sont un des caractères propres qui signalent l’avènement du xviiie  siècle. […] Fontenelle en fut de très bonne heure ; son influence croissante, combinée à celle de La Motte et des autres amis de Mme de Lambert, contribua à donner à l’Académie française quelque chose de ce caractère philosophique qui allait y devenir très sensible durant le xviiie  siècle, et y relever ce que le rôle grammatical ou purement littéraire aurait eu désormais d’insuffisant.

182. (1889) L’art au point de vue sociologique « Introduction »

Platon avait déjà comparé l’influence du poète inspiré sur ceux qui l’admirent et partagent son inspiration à l’aimant qui, se communiquant d’anneau en anneau, forme toute une chaîne soulevée par la même influence. […] C’est la première étude approfondie qu’on ait faite de l’art au point de vue sociologique, — nous ne disons pas seulement social, car ce n’est pas simplement l’influence réciproque de l’art et du milieu social que Guyau a étudiée : il a proposé une conception proprement sociologique de l’essence même de l’art, et il a montré l’application de cette idée sous ses principales formes. Guyau attachait d’autant plus d’importance au caractère social et à l’influence sociale de fart qu’il considérait les religions comme destinées à s’affaiblir et à disparaître de plus en plus, d’abord dans les classes supérieures de la société, puis, par une contagion lente, dans les classes inférieures. […] L’auteur, sous l’influence de cette doctrine, montre un souci constant de chercher leur sens aux choses, — ce qui revient à leur donner à toutes un intérêt.

183. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome II

Son caractère d’une part est trop nuancé, d’autre part il subit trop aisément les influences extérieures. […] Nous n’étions pas encore, qu’il se préparait à nous imposer sa redoutable influence. […] Chez quels êtres les influences quotidiennes opèrent-elles le plus aisément une déviation du caractère primitif ? […] Il y a eu à cela d’autres raisons encore que l’influence de Balzac. […] Sous cette influence particulière, les sentiments avortent en nostalgies et en effusions indéterminées.

184. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Conclusion. »

Depuis la gloire, qui a besoin du suffrage de l’univers, jusqu’à l’amour, qui rend nécessaire le dévouement d’un seul objet, c’est en raison de l’influence des hommes sur nous que le malheur doit se calculer ; et le seul système vrai pour éviter la douleur, c’est de ne diriger sa vie que d’après ce qu’on peut faire pour les autres, mais non d’après ce qu’on attend d’eux. […] Considérant, comme je l’ai dit ailleurs, le crime et ses effets comme un fléau de la nature qui dépravait tellement l’homme, que ce n’était plus par la philosophie, mais par la force réprimante des lois qu’il devait être arrêté ; je n’ai examiné dans les passions que leur influence sur celui même qu’elles dominent. […] Une belle cause finale dans l’ordre moral, c’est la prodigieuse influence de la pitié sur les cœurs ; il semble que l’organisation physique elle-même soit destinée à en recevoir l’impression ; une voix qui se brise, un visage altéré, agissent sur l’âme directement comme les sensations ; la pensée ne se met point entre deux, c’est un choc, c’est une blessure, cela n’est point intellectuel, et ce qu’il y a de plus sublime encore dans cette disposition de l’homme, c’est qu’elle est consacrée particulièrement à la faiblesse ; et lorsque tout concourt aux avantages de la force, ce sentiment lui seul rétablit la balance, en faisant naître la générosité ; ce sentiment ne s’émeut que pour un objet sans défense, qu’à l’aspect de l’abandon, qu’au cri de la douleur ; lui seul défend les vaincus après la victoire, lui seul arrête les effets de ce vil penchant des hommes à livrer leur attachement, leurs facultés, leur raison même à la décision du succès ; mais cette sympathie pour le malheur est une affection si puissante, réunit tellement ce qu’il y a de plus fort dans les impressions physiques et morales, qu’y résister suppose un degré de dépravation dont on ne peut éprouver trop d’horreur. […] Cette commotion produit plus en un jour que tous les écrits et les combinaisons politiques ; l’homme lutte contre sa nature, en voulant donner à l’esprit seul la grande influence sur la destinée humaine.

185. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Maynard »

Cette omniprésence du saint à toutes ses œuvres, le soin infatigable qu’il y donnait, les lettres, instrumenta regni, par lesquelles il les gouvernait des distances les plus éloignées, toutes ces fortes qualités, incessamment appliquées, de direction, d’influence et d’irrésistible commandement, frappent plus encore que sa charité, et tout cela est d’une telle proportion en saint Vincent de Paul, qu’il est impossible de bien comprendre son action souveraine sur tout ce monde immense dont il ne cessa d’être, jusqu’à la mort, le père de famille et la providence, sans l’aide personnelle, directe et surnaturelle de Dieu ! […] Je l’ai déjà dit, l’influence de saint Vincent de Paul a créé le talent actuel de l’abbé Maynard. […] Mais ce n’était pas assez : l’influence de saint Vincent de Paul a transpercé jusqu’aux détails du livre que l’abbé Maynard a consacré à sa mémoire.

186. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Victor Cousin »

Destiné à l’enseignement de la philosophie, vivant dès sa jeunesse dans l’accointance des philosophes et dans la préoccupation de leurs études et de leurs influences, il crut, parce qu’il entendait et sentait vivement leurs écrits, que lui aussi aurait le pouvoir d’éjaculer, comme eux, quelque système avec lequel la pensée humaine aurait à se colleter plus tard ; mais, pendant toute sa vie, il put apprendre à ses dépens que la faculté de jouer plus ou moins habilement avec des idées qui ne vous appartiennent pas n’est pas du tout la vraie fécondité philosophique, qui n’a, elle, que deux manières de produire : — par sa propre force, si l’on appartient à la grande race androgyne des génies originaux, — ou en s’accouplant à des systèmes qui ont assez de vie pour en donner à la pensée qui n’en a pas, si l’on n’appartient pas à cette robuste race des génies originaux et solitaires. […] Son influence même, à Cousin, son ubiquité au collège de France par ses élèves, à l’Institut, à l’Académie, qu’il emplit de sa grande voix, de son grand geste, de sa grande et non sérieuse personnalité, n’est pas une influence philosophique.

187. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Introduction »

Les conditions matérielles ou morales de toutes sortes, la configuration du sol qui porte les hommes, la nature des instruments qui sont à leur disposition, les caractères anatomiques de leur race, leurs besoins, leurs croyances, leurs sentiments, les qualités différentes des choses ou des personnes peuvent exercer une influence, directe ou indirecte, médiate ou immédiate, sur le succès social de l’idée de l’égalité : pour être sûr de n’oublier aucun de ses antécédents, il faudrait passer en revue toutes ces espèces de phénomènes, et peser l’efficacité propre à chacune d’elles. […] C’est pourquoi nous ne nous proposons pas d’épuiser les causes diverses de ce phénomène historique qui est le succès des idées égalitaires : parmi les séries de conditions qui peuvent concourir à sa production, nous en choisissons une, moins étudiée que les autres, mais non moins importante, pour mesurer l’influence qui lui revient ; et c’est la série des phénomènes proprement sociaux. — En un mot, des problèmes scientifiques de l’égalitarisme, déjà séparés en bloc des problèmes pratiques, nous ne retenons que le problème sociologique. […] Quelles influences multiples ont guidé notre choix parmi ces conceptions, il nous est difficile de le discerner nous-même.

188. (1895) De l’idée de loi naturelle dans la science et la philosophie contemporaines pp. 5-143

S’il est ouvert aux influences extérieures, celles-ci pourront contrarier la loi laquelle, dès lors, ne se réalisera que dans la mesure où les influences extérieures seront faibles et négligeables. […] Il se modifie sous l’influence des excitations. […] Il y a là une influence historique, plus qu’un phénomène nécessaire. […] Un antécédent est considéré comme une influence, non comme une cause proprement dite. […] De plus elle nous montre, avec l’hétérogénéité relative des lois, leur influence mutuelle.

189. (1902) Le problème du style. Questions d’art, de littérature et de grammaire

Il faut accepter l’influence des oeuvres au même degré que l’influence de la vie, dont elles sont l’expression ; il ne faut ni la fuir, ni la chercher volontairement. […] La récente littérature française a subi plusieurs influences ; ce fut d’abord l’ascendant des idées germaniques. […] L’influence allemande ne s’est guère exercée sur nous depuis dix ans que par la seule philosophie. D’autres pays ont eu une influence plus directement littéraire. […] Ils ont profité des influences subies avant eux-mêmes.

190. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre premier. Idée générale de la seconde Partie » pp. 406-413

Mon but est de chercher à connaître quelle serait l’influence qu’auraient sur les lumières et sur la littérature les institutions qu’exigent ces principes, et les mœurs que ces institutions amèneraient. […] Il me reste maintenant à examiner, d’après l’influence que les lois, les religions et les mœurs ont exercée de tout temps sur la littérature, quels changements les institutions nouvelles, en France, pourraient apporter dans le caractère des écrits.

191. (1880) Une maladie morale : le mal du siècle pp. 7-419

Tout au moins est-il certain que l’influence de cet écrit s’est fait longtemps et cruellement sentir. […] Je n’y veux voir que la preuve de l’influence du temps où il se produisait. […] L’Angleterre et, dans une certaine mesure, l’Allemagne ont eu à ce moment sur la Russie leur part d’influence. […] L’influence de Jean-Jacques Rousseau s’est affaiblie chez nous en s’éloignant. […] Il faut donc penser qu’il subissait une influence secrète qui dominait les conditions même de son existence.

192. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XI : Distribution géographique »

Suite de l’influence de la période glaciaire sur la distribution des plantes et des animaux de l’époque actuelle. […] Les modifications de climat doivent avoir eu une influence puissante sur les migrations d’espèces. […] Cette influence d’un climat glacial sur la distribution des habitants de l’Europe, telle que l’a analysée avec une remarquable clarté Édouard Forbes, doit avoir été considérable. […] Suite de l’influence de la Période Glaciaire sur la distribution des plantes et des animaux de l’époque actuelle. […] Faudrait-il donc supposer que la matière desdits nuages cosmiques n’est ni pesante, ni conductrice de la chaleur, ni dilatable sous son influence ?

193. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XII. Mort d’Edmond de Goncourt » pp. 157-163

Il ne subit pas plus l’influence de Champfleury que celle de Balzac ; et, si dans ses livres les détails extérieurs, spécialement visuels, abondent, ils servent toujours à suggérer des nuances psychologiques. […] À deux ou trois exceptions près, il n’eut pas davantage à se féliciter de l’amitié littéraire, de l’estime assidue des plus jeunes ; il n’a pas joui de son influence, et, somme toute, celle-ci fut petite.

194. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (3e partie) » pp. 5-96

— Le corps a du moins la plus grande influence, dit Goethe. […] Je vis alors avec joie quelle influence on reconnaissait à Goethe sur la nouvelle vie de la littérature française ; les jeunes poètes le vénèrent et l’aiment comme leur chef spirituel. Telle avait été l’influence de Shakespeare pendant la jeunesse de Goethe. […] Il semble appeler sur son pays l’influence des principes français, et se lancer hardiment dans la sphère des bouleversements téméraires, d’où doit sortir un ordre nouveau. […] Il y a des hommes qui ont des disciples et qui fondent des empires intellectuels plus ou moins durables dans la sphère de leur influence ; il y en a d’autres qui emportent tout avec eux et qui laissent la terre muette et vide après avoir écrit pour plusieurs siècles.

195. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre deuxième. Le développement de la volonté »

Quand un être vivant, sous l’influence de la douleur, fait des mouvements en tous sens et réagit énergiquement, il lui est inutile de concevoir la suppression future de la douleur ; il n’a besoin que de sentir la douleur actuelle, obstacle à son bien-être également senti ; la douleur entraîne le besoin de changement, donc de mouvement ; ce besoin est la volonté de changer, et le mouvement du corps en tous sens est la manifestation de cette volonté. […] Aujourd’hui encore, l’animal n’agit par instinct que sous l’influence d’un appétit éveillé par la perception et qui donne le branle aux réflexes mécaniques : c’est la fin, la soif, le besoin sexuel, maternel, etc. […] Au lieu d’agir sous l’influence de sensations et de perceptions, nous pouvons agir sous l’influence de jugements et de raisonnements, aboutissant à des idées. […] De plus, la conscience de la volition présente, en la fixant dans la mémoire, lui assure une influence sur les volitions à venir. […] Ce qui ressemble de loin aux poids, ce sont les influences extérieures et adventives, sensations, paroles, conseils, ordres, suggestions de toutes sortes, qui encore n’agissent qu’en se combinant avec nos dispositions propres ; mais il y a des motifs internes, les plus décisifs en définitive, les seuls vrais motifs d’une détermination volontaire en tant que telle.

196. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre III. De l’émulation » pp. 443-462

Si un parti veut faire triompher l’injustice, il est impossible qu’il encourage les lumières ; un homme peut déshonorer son talent, en le consacrant à défendre ce qui est injuste ; mais si l’on propage l’influence des lumières dans une nation, elles tendent nécessairement à perfectionner la moralité générale. […] Si le pouvoir militaire dominait seul dans un état, et dédaignait les lettres et la philosophie, il ferait rétrograder les lumières, à quelque degré d’influence qu’elles fussent parvenues ; il s’associerait quelques vils talents, chargés de commenter la force, quelques hommes qui se diraient penseurs pour s’arroger le droit de prostituer la pensée : mais la raison se changerait en sophisme, et les esprits deviendraient d’autant plus subtils, que les caractères seraient plus avilis ? […] Après avoir examiné les divers principes de l’émulation parmi les hommes, je crois utile de considérer quelle influence les femmes peuvent avoir sur les lumières.

197. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre I. Vue générale du seizième siècle »

Certains tempéraments avaient trouvé en eux-mêmes des sources profondes de réflexion ou de poésie : diverses influences avaient excité çà et là des commencements de philosophie et d’art. […] On pourrait dire en deux mots que, au contact de l’Italie, et sous l’influence de l’antiquité, le bon sens français a dégagé d’abord l’idée de vérité rationnelle, puis celle de beauté esthétique, et que, demandant à sa littérature une vérité belle et une beauté vraie, il en a circonscrit le domaine aux sujets dans lesquels la coïncidence ou bien l’identité de ces deux idées se trouve le plus naturellement réalisée. […] Ce que je dis de la littérature ne serait pas vrai de la peinture et de la sculpture, qui étaient loin d’être réduites à la même stérilité à la fin du xve s., et dans lesquelles l’élégance italienne du xv[e s. donna parfois de funestes leçons à nos artistes, surtout en peinture, où les modèles anciens manquaient pour balancer et corriger cette influence.

198. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les civilisations »

Ce n’est point un livre d’histoire écrite pied à pied, renfermée dans sa chronologie, avec son développement logique d’événements, la seule histoire qu’il y ait, en somme ; mais une contemplation flottante d’influences possibles et de résultats généraux, un discours sur l’histoire, la chose de soi la plus fallacieuse qu’il y ait. […] Quoique immensément au-dessous de Montesquieu, dont il descend, l’auteur des Études sur les civilisations a repoussé le joug de l’idée de Montesquieu qui a fait le plus de chemin, parmi tant de ses idées restées en route, et que la politique et l’histoire ont également dépassées… Il ne donne pas badaudement dans cette influence des climats qui a régné dans beaucoup de systèmes, et dont le dernier partisan est Taine, qui meurt intellectuellement de cette idée-là. […] Et non seulement, après l’avoir soulevé, il n’est pas capable de l’appliquer aux faits qu’il raconte, mais il est bientôt inconséquent à ce principe, qu’il a posé : de l’influence du sang et de la race.

199. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Guizot » pp. 201-215

Or, si le travail intérieur qui éclaire les œuvres par les facultés, et les facultés par les influences, n’est pas plus possible ou n’est pas plus complet que la biographie de celui qui a fait ces œuvres et qui avait ces facultés, la Critique est estropiée comme l’Histoire, et c’est ce qui est arrivé à Guizot. […] Avec son habitude et son talent exercé d’historien, Guizot a très bien signalé les infortunes sociales qui ont été des causes ou des effets sur le génie de Shakespeare, mais les influences individuelles, les influences de cette grande individualité sur elle-même lui ont échappé forcément puisqu’il a ignoré l’action de cette vie mystérieuse.

200. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XI. MM. Mignet et Pichot. Charles Quint, son abdication, son séjour et sa mort au monastère de Yuste. — Charles V, chronique de sa vie intérieure dans le cloître de Yuste » pp. 267-281

Si le politique Charles-Quint, mi-parti d’Autrichien, de Flamand, de Bourguignon, et dont le génie, mêlé au génie de plusieurs races, était écartelé comme son blason impérial, si ce Charles-Quint ne fut pas un moine et ne songea jamais à l’être, malgré la piété très profonde de toute sa vie, l’Espagne était, elle, qu’on nous passe le mot, une nation moine (una monja), et tellement moine d’éducation, d’habitude et de préjugés, que c’est à l’influence de cette nation cloîtrée dans des mœurs religieuses comme il n’en avait peut-être existé nulle part, que Charles-Quint dut ces impulsions monastiques dont la philosophie a été la dupe, et qui étaient parfaitement contraires à la nature positive et tout humaine de son génie. […] Et cela est si vrai, cette influence subie tour à tour et contrariée par Charles-Quint, que la profonde Espagne lui en garda rancune, et que malgré Yuste, malgré une mort catholiquement magnifique, elle ne lui pardonna jamais. […] Le Rationalisme contemporain, qui n’entend pas grand-chose aux questions spirituelles et auquel, par là, bien des grandeurs se trouvent naturellement fermées, se tire, comme il peut, de la difficulté en refaisant, une millième fois, le mauvais vieux livre de l’Influence du physique sur le moral, de Cabanis.

201. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « E. Caro »

Caro, au contraire, aura de l’influence sur tous les esprits, et ils sont nombreux ! […] Caro commence par y signaler les influences qui ont pénétré dans la philosophie actuelle pour la dominer. […] Trop péremptoirement opposé à la pensée hégélienne pour ne pas poursuivre et traquer partout cette pensée qui, si elle est quelque chose, n’est que la théorie du néant dans sa laborieuse et ténébreuse vacuité, Caro, pourtant, ne la voit pas seule rayonner dans les systèmes contemporains : « Kant, — dit-il avec une rancune légitime, — a inspiré la première défiance contre la métaphysique, c’est-à-dire contre les croyances qui dépassent les choses d’expérience. » Il n’oublie donc pas Kant, il n’oublie personne, pas même les poètes, pas même Goethe, pas même Heine, le Turlupin de génie, dans cette histoire des influences qui jouent pour l’heure sur la raison et l’imagination du monde.

202. (1884) Articles. Revue des deux mondes

Telle est la doctrine de l’Évangile éternel ; par l’influence de Lessing, qui l’adopta, elle a trouvé du crédit jusqu’à nos jours. […] Dans la jeunesse, les influences auxquelles obéit l’activité sont plus intimes ; l’énergie plus concentrée de ces influences produit un enthousiasme plus durable : de là la religion. […] Que dire par exemple de cette influence attribuée au mouvement de la terre autour du soleil et aux courans magnétiques, et qui, selon une loi formulée par Hegel, reprise par Michelet et de Lasaulx, ferait voyager la liberté, et avec elle la civilisation, d’Orient en Occident ? […] On ne peut nier que les conditions du milieu ne sollicitent et ne modifient de mille manières les besoins, et par eux n’exercent une influence considérable sur l’état économique, politique, social, d’une nation. […] Pourtant ce n’est là qu’un côté de la vérité, et toujours il faut mettre en regard cette vérité corrélative que l’influence des causes externes sur l’homme n’est jamais absolue, qu’elle peut être avantageuse ou nuisible selon le degré de savoir et surtout d’énergie morale de ceux qui la subissent.

203. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — II. (Fin.) » pp. 198-216

On a essayé plus d’une fois de refuser et de ravir à Louis XIV son genre d’influence utile et d’ascendant propice sur ce qu’on a appelé son siècle : depuis quelque temps, on semblait cependant revenu de cette contestation injuste et exclusive, lorsqu’un grand écrivain de nos jours, M.  […] Il est allé, dans la question présente, jusqu’à soutenir que ce Louis XIV qui le gêne n’a été tout à fait lui-même et n’a, en quelque sorte, commencé à dominer et à régner qu’après l’influence épuisée de M. de Lionne et de Colbert, deux élèves de Richelieu et de Mazarin ; voilà le grand règne reculé de dix ou quinze ans, et la minorité du monarque singulièrement prolongée par un coup d’autorité auquel on ne s’attendait pas43. […] Qui ne sent pas cette délicatesse n’est pas fait non plus pour sentir le genre d’influence que put avoir ce jeune prince sur l’imagination vaste et l’esprit si sensé de Bossuet. […] Cousin a dit : L’influence de Louis XIV se fait sentir assez tard.

204. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « La Réforme sociale en France déduite de l’observation comparée des peuples européens. par M. Le Play, conseiller d’État. (Suite et fin.) »

Si vous ne  l’avez pas lu,  lisez-le vite…  Il faut  absolument le  lire : c’est une des choses les plus remarquables qu’on ait publiées depuis longtemps ; des faits extrêmement curieux et presque  tout à  fait ignorés,  des réflexions  profondes et piquantes, un esprit original, voilà ce qui s’y trouve… Il serait à désirer que ce livre fût très répandu ; je n’en connais point de plus propre à dissiper une foule de préjugés très dangereux. » Et plus loin (car cela lui tient au cœur) : « Vous ne m’avez pas dit si vous avez lu l’admirable livre de Rubichon sur l’Influence du Clergé dans les Sociétés modernes. » (Juillet 1829.) […] Ce qui devient comique, c’est que Paris lui semblait, au point de vue du Gouvernement, un tel embarras et un tel fléau, qu’il ne trouvait rien de mieux à conseiller à un monarque qui veut agir librement et en dehors d’une sphère d’influences délétères, que d’abandonner Paris, « l’égout de l’Europe », à sa destinée de cloaque et de Babel, et de transférer le siège de l’empire à Bourges. […] Que d’autres en félicitent l’ordre actuel et y voient un puissant motif d’encouragement et un stimulant plus prompt pour l’ambition de tout homme nouveau et de tout prolétaire qui aspire à s’élever et à devenir créateur à son tour : lui, il ne peut voir dans cette incessante mobilité qu’une cause d’affaiblissement pour les mœurs, pour la fécondité des mariages, pour les bonnes traditions domestiques, pour la meilleure culture des terres, pour l’exercice des influences bienfaisantes. […] L’auteur a particulièrement insisté, en maint endroit, sur l’esprit de liberté, d’égalité et d’harmonie, qui animait les bourgeois de cette Commune sous la vive influence du christianisme dont ils étaient imbus et pénétrés.

205. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Lamennais, Affaires de Rome »

Il y a dans sa conduite d’alors et dans sa tendance d’aujourd’hui cette véritable, cette seule ressemblance, à savoir qu’il ne s’est jamais borné et même qu’il n’a guère jamais aimé à envisager le christianisme, comme tant de grands saints l’ont fait, par le côté purement intérieur et individuel, par le point de vue du salut de l’âme et des âmes prises une à une, mais qui l’a embrassé toujours de préférence (et en exceptant, si l’on veut, son Commentaire sur l’Imitation et sa traduction de Louis de Blois) par le côté social, par son influence sur la masse et sur l’organisation de la société ; et c’est ainsi qu’il se portait avant tout pour la défense des grands papes et des institutions catholiques. « Jésus-Christ, disait-il en 1826, ne changea ni la religion, ni les droits, ni les devoirs ; mais, en développant la loi primitive, en l’accomplissant, il éleva la société religieuse à l’état public, il la constitua extérieurement par l’institution d’une merveilleuse police, etc. » Toutefois les moyens que M. de La Mennais proposait et exaltait jusqu’à la veille de juillet 1830 étaient, il faut le dire, séparés du temps actuel et de sa manière de penser présente par un abîme. […] Ce qu’il faut reconnaître, c’est l’influence comme atmosphérique du siècle, qui, en deux ou trois années, a rongé et pénétré cette trempe si forte, et l’a oxydée si profondément. […] Tout ce récit, au reste, du catholique détrompé, est fait avec modération, et, comme il le dit plusieurs fois, avec candeur. « Chacun, ajoute-t-il, en tirera les conséquences qu’il croira devoir en tirer ; je n’ai ni la prétention ni le désir d’exercer aucune influence sur l’opinion d’autrui. » Mais quoi ? […] vous, apôtre par excellence, vous, l’homme de la certitude, prêtre fervent qui ne cessiez de nous exhorter, vous n’avez nul désir d’exercer influence sur autrui !

206. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre II. Du goût, de l’urbanité des mœurs, et de leur influence littéraire et politique » pp. 414-442

Du goût, de l’urbanité des mœurs, et de leur influence littéraire et politique L’on s’est persuadé pendant quelque temps, en France, qu’il fallait faire aussi une révolution dans les lettres, et donner aux règles du goût, en tout genre, la plus grande latitude. […] Cette contention d’esprit sur des intérêts frivoles en tout, excepté par l’influence qu’ils exerçaient sur le bonheur, ce besoin de réussir, cette crainte de déplaire, altéraient, exagéraient souvent les vrais principes du goût naturel : il y avait le goût de tel jour, celui de telle classe, enfin celui qui devait naître de l’esprit général créé par de semblables rapports. […] C’est ainsi que le bon goût exerce une véritable influence politique. […] Ce tribunal exercerait aussi son influence sur la littérature ; les écrivains sauraient ou retrouver un goût, un esprit national, et pourraient travailler à le peindre et à l’agrandir.

207. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre III : Les Émotions »

Chaque espèce d’émotions est caractérisée avec soin, considérée dans ses effets, ses modifications, son influence, ses transformations. […] « Le principe le plus général que nous puissions établir par rapport à la concomitance de l’esprit et du corps, est la loi de diffusion qui s’énonce ainsi : « Quand une impression est accompagnée de sentiment ou d’une conscience quelconque, les courants excités se répandent librement dans le cerveau et conduisent à une agitation générale des organes moteurs, et affectent les viscères. » L’action réflexe, au contraire, qui n’est point sentie, est restreinte dans son influence à un circuit nerveux fort étroit. […] De là l’influence des émotions sur le cœur et les organes digestifs. […] Il n’est pas vrai que tous nos actes se réduisent à l’amour de nous-mêmes, « car la sympathie est un fait de la nature humaine dont l’influence se fait sentir loin, et qui constamment modifie et contrarie les impulsions purement égoïstes. » Et de même, l’utilité n’explique pas tous nos actes, puisqu’il n’est point rare de voir un homme refuser d’embrasser une profession lucrative, qui lui paraîtrait déshonorer les traditions d’orgueil de sa famille et choisir plutôt une vie de privations et de misère.

208. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre III. Littérature didactique et morale »

Influence de la culture cléricale sur la littérature en langue vulgaire. — 2. […] Influence de la culture cléricale. […] Ils appliquèrent aussi à l’amour courtois, que son caractère idéal et factice y prédisposait d’avance, leur manie d’abstraction et leur tendance didactique, et sous leur influence les arts prirent la place des chansons et des romans : au commencement du xiiie  siècle parut le sec et pédantesque traité d’André le Chapelain, De arte honeste amandi véritable encyclopédie systématique de l’amour. […] Deux hommes ont certainement eu grande influence sur lui, Ovide et Chrétien de Troyes : de cette double influence s’est dégagée son originalité.

209. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre III. »

Quoi qu’il en soit, sur cette influence de l’Inde, la découverte est à faire. Sur une autre influence du monde oriental, elle semblait, au contraire, déjà faite. […] Les livres de Philon, de Josèphe, les fragments de Nicolas de Damas, et, sous la même influence, d’autres écrits tout chrétiens, offrent partout cette idée, que Clément d’Alexandrie étendit jusqu’à ne faire du polythéisme et de la poésie des Hellènes qu’une contrefaçon et un plagiat de la Bible. […] Peut-on l’affirmer absolument, lorsqu’à l’origine et dans les premiers souvenirs des cités grecques on rencontre le nom des Phéniciens et l’influence présumée de leurs arts ? […] Mais, malgré ce rapport dans les faits, la distance est trop grande entre les deux influences, comme entre les deux sociétés.

210. (1896) Les Jeunes, études et portraits

De cette première influence d’autres influences le débarrassèrent, mieux en accord avec la tournure de son esprit. […] Ces influences ont été surtout des influences étrangères. […] Déjà, sous l’influence des écrivains russes, il s’était beaucoup amendé. […] Mais on en trouvait en effet chez lui l’influence toute proche. […] Il y faut ajouter l’influence de quelques livres souvent relus.

211. (1855) Louis David, son école et son temps. Souvenirs pp. -447

En faisant les Horaces et le Brutus j’étais encore sous l’influence romaine. […] Comment et sous quelles influences David a-t-il cherché à en faire l’application par l’exercice de son talent ? […] David n’a point eu d’influence politique, à proprement parler, pendant les années où il a été membre de la Convention. […] Le nombre des émigrés rentrés était déjà considérable, et la plupart de ces amnistiés avaient assez d’influence personnelle pour agir sur l’opinion publique. […] Ces études comparatives exercèrent une grande influence sur la réforme qu’il s’efforça d’apporter dans la composition de son nouvel ouvrage, le Léonidas.

212. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIV : Récapitulation et conclusion »

J’ai essayé de montrer, par exemple, combien a été grande l’influence de la période glaciaire sur la distribution des espèces identiques ou représentatives dans le monde entier. […] À l’égard des variétés, comme à l’égard des espèces, l’usage ou le défaut d’exercice des organes semble avoir eu quelque influence. […] Chez les variétés, comme chez les espèces, la corrélation de croissance semble avoir eu une influence des plus importantes, de sorte qu’un organe étant modifié, les autres se modifient nécessairement. […] Au moins, est-il vrai que toutes les choses vivantes ont beaucoup d’attributs communs : leur composition chimique, leur structure cellulaire, leurs lois de croissance et leur faculté d’être affectées par des influences nuisibles. […] Il est certain que tous les germes primitifs qui se trouvèrent soumis à un ensemble identique ou analogue de conditions de vie, durent varier parallèlement sous l’influence, partout la même, de la loi organique.

213. (1896) Essai sur le naturisme pp. 13-150

On connaît, au reste, son influence sur de juvéniles intelligences. […] Les moindres lettrés en subissent l’influence. […] Et s’il a une inclination pour Baudelaire, il la tient surtout à son éducation, à l’influence des milieux. […] Par ses ouvrages, il aura surtout délivré la jeunesse contemporaine de la redoutable influence de Baudelaire. […] Et, considérant dans son œuvre quelle influence elle pourrait avoir sur la peinture, un jeune penseur de Flandre, M. 

214. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre VII. Le théâtre français contemporain des Gelosi » pp. 119-127

L’un, français, éprouvait la plus grande difficulté à se débrouiller ; quand il ne se traînait pas terre à terre, il subissait les influences les plus diverses et semblait osciller dans le vide. […] Ces deux arts, qui se rencontraient dans une période si opposée de leur existence, n’exercèrent pas l’un sur l’autre une influence aussi soudaine qu’on le pourrait croire.

215. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome I

Edmond Scherer, de déplorer son influence. […] C’est la seconde influence et qui décida de l’entier développement du germe primitif. […] Il est curieux de voir comment cette influence de rhétorique se trouve être devenue, ainsi que je l’indiquais tout à l’heure, une influence de vie morale. […] La race y a contribué, puis le milieu, puis la série des influences historiques. […] Taine attribue à l’hérédité une influence prédominante sur les actions humaines.

216. (1911) Psychologie de l’invention (2e éd.) pp. 1-184

L’étude du développement de l’invention nous montrera tout à l’heure comment cette influence des détails produit parfois des transformations et des déviations de l’œuvre. […] Toutefois il ne faut pas aller trop loin dans cette voie et arriver à nier toute évolution régulière et toute influence de l’ensemble du système sur ses formes successives. […] Il arrive que l’idée directrice, sous l’influence d’une circonstance extérieure ou d’un revirement intérieur, subit un changement qui peut aller jusqu’à l’opposition. […] Cela est dû pour une part à l’influence de la routine, pour une autre grande part à l’invention elle-même. […] Si l’amour a fait de bons poètes comme Musset, et de mauvais comme une foule d’inconnus, il ne reste pas sans influence sur l’imagination créatrice des médiocres.

217. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre I. Polémistes et orateurs, 1815-1851 »

Pour la politique même et le gouvernement, ni les plus hauts esprits, ni les volontés les plus efficaces n’ont été toujours servis par le talent oratoire, et les partis eux-mêmes seront loin d’être représentés ici selon leur force ou leur influence. […] Il subit plus profondément l’influence de Rousseau et, semble-t-il, celle de Hegel. […] Le libéralisme, en triomphant, se dépouilla de sa générosité, et se fit le défenseur des intérêts, de l’influence, des préjugés d’une classe, avec laquelle il identifia le pays. […] Après la révolution de 1848, il fonda un journal, le Peuple constituant, et fut élu député : il n’eut pas d’influence. […] Louis-Philippe lui donna, en 1830, 100 000 francs pour payer ses dettes. — Ses grands ouvrages sur la religion ont été sans influence : Constant y considère surtout le sentiment religieux comme fait psychologique et social ; l’époque n’était guère favorable à une telle étude.Éditions : Adolphe, 1816, in-12.

218. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Instruction générale sur l’exécution du plan d’études des lycées, adressée à MM. les recteurs, par M. Fortoul, ministre de l’Instruction publique » pp. 271-288

Cette réforme, étant une des choses les plus considérables qu’on ait tentées depuis longtemps dans l’éducation de la jeunesse, et devant avoir l’influence la plus directe et la plus profonde sur l’avenir de la société, mérite d’être exposée dans son esprit, et je tâcherai de le faire en dégageant cet examen de tout ce qui pourrait le masquer ou l’embarrasser, et sans y rien mêler qui puisse paraître injuste envers personne. […] Les grands hommes ont toujours une grande influence sur les générations qui les suivent, quoique cette influence soit souvent niée et combattue. C’est ainsi que l’influence de Charlemagne s’est fait sentir pendant plusieurs siècles, et que même aujourd’hui l’éducation de la jeunesse obéit encore à l’impulsion donnée par ce grand homme.

219. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE DURAS » pp. 62-80

Ce salon n’a guère eu d’influence, sans doute, qu’une influence passagère, immédiate, et celle-là, il l’a eue incontestable par M. de Chateaubriand, qui en était comme le représentant politique ; mais il a peu agi et laissé peu de traces pour ce qui a suivi, bien moins, par exemple, que les salons doctrinaires dont nous parlions, et qui étaient un centre de prédication et une école. […] Ce serait bien incomplétement connaître Mme de Duras que de la juger seulement un esprit fin, une âme délicate et sensible, comme on le pourrait croire d’après son influence modératrice dans le monde et d’après une lecture courante des deux charmantes productions qu’elle a publiées. […] Elle prenait même, on peut le soupçonner, une part assez active à la politique d’alors par ses amitiés et ses influences.

220. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Saint-Bonnet » pp. 1-28

Ce livre, dangereux pour l’originalité la mieux fermée aux influences, tente, par sa beauté, nos facultés imitatrices les plus involontaires, et l’auteur de l’Infaillibilité n’a peut-être échappé si bien à ces influences qu’en raison de sa surprenante profondeur. […] Ce ne sont pas des moralistes ordinaires, quel que soit l’extraordinaire de leur talent, ce n’est ni Montaigne, par exemple, ni La Rochefoucauld, ni Vauvenargues, ni Chamfort, ni madame de Staël (la madame de Staël du sombre livre de l’Influence des passions sur le bonheur individuel), ni même le religieux et platonicien Joubert, qui auraient pu écrire ce traité de « la Douleur », tracé d’une main si attendrie, mais si ferme, pour nous la faire comprendre et pour nous la faire accepter… On sent, en le lisant, qu’on n’a plus affaire ici à un moraliste au détail, inspiré par le spectacle isolé de la misère humaine, étudiée peut-être sur son âme, mais à une tête d’ensemble qui a une nette et transcendante conception de la vie et de la destinée, et qui fait rentrer la douleur dans la notion la plus profonde des choses et dans le pian providentiel de la Création. […] À une époque où les dernières Philosophies sont des outrages insensés à l’intelligence humaine, si cette intelligence humaine n’était pas profondément et abjectement dégradée, — et dégradée au point d’admettre ces Philosophies ou au moins de les discuter, — Saint-Bonnet a grande chance, avec son livre de la Douleur autant qu’avec ses autres livres, de rester sans aucune influence sur le monde et de continuer autant que jamais, dans l’indifférence universelle, cette belle Harmonie de Lamartine : Le Génie dans l’obscurité.

221. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre IV. L’antinomie dans l’activité volontaire » pp. 89-108

C’est ce qui explique que Jésus, bien que pauvre, put s’élever à une culture supérieure et acquérir une influence exceptionnelle. […] En résumé l’individualisme aristocratique ou héroïque aboutit à une constatation découragée du peu d’influence de la personnalité supérieure et des concessions qu’elle doit faire au milieu social, à la sociabilité inférieure et grégaire. […] Le Dantec dans son livre : L’Individualité et l’erreur individualiste, qu’une intégration jamais achevée de petites personnalités secondaires p, p′, p″… qui s’ajoutent les unes aux autres et forment une série de médaillons dissemblables et discontinus, malgré l’apparence de continuité du moi, que l’individualité ne soit, suivant la conception de Stirner lui-même, qu’une série d’instantanés ; peu importe pour la question qui nous occupe : celle de l’indépendance de l’individualité relativement aux influences sociales et du conflit possible entre l’originalité individuelle et les conformismes sociaux.

222. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre I : Qu’est-ce qu’un fait social ? »

Aussi, une fois que l’assemblée s’est séparée, que ces influences sociales ont cessé d’agir sur nous et que nous nous retrouvons seul avec nous-même, les sentiments par lesquels nous avons passé nous font l’effet de quelque chose d’étranger où nous ne nous reconnaissons plus. […] D’abord, nous devons déclarer que nos recherches ne nous ont nulle part fait constater cette influence prépondérante que M.  […] De plus, on peut se demander si le mot d’imitation est bien celui qui convient pour désigner une propagation due à une influence coercitive.

223. (1912) L’art de lire « Chapitre II. Les livres d’idées »

Nous rencontrons dans Montesquieu cette grande idée générale : influence des climats sur les tempéraments, et sur les moeurs, et sur les idées, et sur les institutions des peuples. […] Cette idée qu’il faut combattre le climat par les moeurs ; et les mœurs, telles qu’elles sont restées encore sous l’influence du climat, par les lois. […] Par exemple, Jean-Jacques Rousseau, dans tous ses ouvrages, maudit l’influence de la société sur l’individu et souhaite passionnément que l’individu sache s’y soustraire ; et dans un seul il sacrifie l’individu à la société et souhaite impérieusement qu’elle l’absorbe.

224. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VIII. Du mysticisme et de Saint-Martin »

Ceux-là, on les trouve sans les chercher dans ce qu’ils ont fait et dans les influences qu’ils ont laissées après leur passage, tandis que déjà, et à la distance d’une moitié de siècle, il nous faut chercher Saint-Martin, pour l’apercevoir. […] On ne le nommait pas partout par son vrai nom ; mais partout, du moins, il se sentait, et les esprits les plus matériels, les plus attachés aux angles des choses positives, portaient ses invisibles influences, comme on porte une température. […] Pénétré, dès sa jeunesse, des influences fatalement mystiques d’une société qui, comme le dit excellemment M. 

225. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre II. De la métaphysique poétique » pp. 108-124

  C’est ainsi que les premiers poètes théologiens inventèrent la première fable divine, la plus sublime de toutes celles qu’on imagina ; c’est ce Jupiter roi et père des hommes et des dieux, dont la main lance la foudre ; image si populaire, si capable d’émouvoir les esprits, et d’exercer sur eux une influence morale, que les inventeurs eux-mêmes crurent à sa réalité, la redoutèrent et l’honorèrent avec des rites affreux. […] De quelque état de barbarie et de férocité que partent les hommes pour se civiliser par l’influence des religions, les sociétés commencent, se développent et finissent d’après des lois que nous examinerons dans ce second livre, et que nous retrouverons au livre IV où nous suivons la marche des sociétés, et au livre V où nous observons le retour des choses humaines. […] Le ciel était pour les Perses le temple de Jupiter, et leurs rois, imbus de cette opinion, détruisaient les temples construits par les Grecs. — Les Égyptiens confondaient aussi Jupiter et le ciel, sous le rapport de l’influence qu’il avait sur les choses sublunaires et des moyens qu’il donnait de connaître l’avenir ; de nos jours encore ils conservent une divination vulgaire. — Même opinion chez les Grecs qui tiraient du ciel des θεωρήματα et des μαθήματα, en les contemplant des yeux du corps, et en les observant, c’est-à-dire, en leur obéissant comme aux lois de Jupiter.

226. (1895) Le mal d’écrire et le roman contemporain

Taine a tant exagéré l’importance des milieux et des influences sociales. […] Si ces conclusions désolées sont devenues de notre temps un état d’esprit général, c’est à l’influence croissante de la littérature d’observation qu’il faut l’attribuer, influence qui s’exerce sur un public toujours plus nombreux. […] L’influence de M.  […] Sa réputation s’est maintenue après sa mort ; son influence a toujours grandi. […] Peu d’écrivains ont exercé plus d’influence et ont été plus passionnément lus.

227. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIIe entretien. Madame de Staël. Suite. »

Depuis son enfance jusqu’à la terreur, depuis le 9 thermidor jusqu’au consulat, madame de Staël avait aspiré, par l’éloquence et par l’influence sur les hommes marquants, à l’action politique. […] L’éloigner de Paris, c’était la destituer à jamais de toute influence sur le gouvernement ; l’absence la détrônait, voilà pourquoi elle la redoutait à l’égal de la mort. […] Toute cette époque de la vie de madame de Staël fut pleine d’oscillations féminines qu’on ne peut justifier ; on y sent la mauvaise influence d’un homme qui faisait fléchir son caractère sous ses propres versatilités. […] Elle avait été elle-même un des membres les plus efficaces de cette coalition ; elle avait recruté, comme Annibal, des ennemis à Napoléon dans tout l’univers ; elle n’était rentrée que par la brèche de Paris dans Paris ; elle y retrouvait la patrie, la fortune, la liberté, l’exercice de son génie, l’écho tout français de sa gloire, une grande influence sur les esprits, sur les souverains coalisés, sur les Bourbons eux-mêmes. […] Necker dont jeune il avait partagé les opinions libérales, l’ennemie de Napoléon, la femme éloquente, la femme poëte, la femme politique qui, par son exemple et par son influence, ramenait aux Bourbons les républicains convertis à la monarchie tempérée.

228. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VIII. La littérature et la vie politique » pp. 191-229

Si l’on étudie les causes qui ont amené au siècle dernier la Révolution française, on rencontre parmi les plus puissantes l’influence des écrivains. […] Si l’on étudie, au contraire, les causes qui ont amené en notre siècle la transformation de la littérature française, on rencontre parmi les plus puissantes l’influence de la Révolution. […] Nous en reparlerons, quand nous rencontrerons sur notre chemin le monde et les salons, par l’intermédiaire desquels s’exerce la puissante influence de la classe privilégiée. […] Une œuvre semblable s’est accomplie sous l’influence des mêmes causes en Angleterre et en Allemagne. […] L’influence de Paris mériterait à elle seule une étude particulière, et elle explique plusieurs des différences qui existent, au point de vue littéraire, entre le moyen âge et les temps modernes.

229. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 mai 1885. »

Jusque ce terme, en effet, il obéit à l’action des influences extérieures sur lui ; et cette action, pour le musicien, arrive, éminemment, des œuvres musicales créées par les maîtres son époque. […] Ainsi la noble Rome, vénérable, avait disparu, aux yeux du spectateur intelligent, recouverte par le style architectural jésuitique des deux derniers siècles ; ainsi s’était amollie et édulcorée la très glorieuse peinture italienne ; ainsi s’était dressée, sous la même influence, la Poésie Française classique, œuvre de mort intellectuelle, et dont les lois examinées présentent une précise analogie avec les lois de l’Opéra et de la Sonate. […] Nous avons vu qu’il nous fallait renoncer à toute rencontre d’une conception théorique propre à Beethoven, et qui eût pu contribuer à nous rendre plus claire cette imagination de son effort artistique ; en revanche, nous pouvons, et nous devons exclusivement, considérer la force virile de son caractère, indiquer, ainsi, l’influence de cette force sur le développement du génie intime du Maître. […] L’ouïe, c’était le seul organe qui lui apportait, encore, pour l’émouvoir, les influences du dehors ; ses yeux étaient morts à ce monde, depuis longtemps. […] Contre-sens : Wagner explique, dans le pamphlet cité, l’influence, mauvaise, de la mode Louis XIV, en Allemagne, et la caractérise, par l’usage des perruques, pris à Versailles ; et il ajoute que le grand Bach réagit contre l’esprit étranger, le repoussa, rejeta son influence, et s’écarta, — sortit de la perruque.

230. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre I : Variations des espèces à l’état domestique »

Plusieurs raisons me le font croire : la principale, c’est l’effet remarquable de la réclusion et de la culture sur les fonctions du système reproducteur, système qui paraît beaucoup plus sensible que toute autre partie de l’organisation à l’influence des changements dans les conditions de la vie. […] Car si l’influence des conditions de vie était immédiate et directe, l’un des petits ou descendants ayant varié, tous auraient varié de la même manière. […] Quand tous ou presque tous les sujets exposés à certaines conditions déterminées sont affectés de la même manière, il semble d’abord que le changement soit directement dû à l’influence de ces mêmes conditions ; mais on peut objecter qu’en bien des cas des circonstances extérieures tout à fait opposées ont produit des changements identiques. […] — Les habitudes ont aussi une influence marquée sur des plantes transportées d’un climat sous un autre à l’époque de la floraison. […] De sorte qu’en face de tels faits, on ne voit rien d’impossible à l’existence des particularités caractéristiques du Pigeon-Paon, du Grosse-Gorge ou du Culbutant, chez des espèces sauvages ; et l’on peut admettre que toutes ces variations sont un effet de l’hérédité aussi bien que des influences actuelles s’exerçant sur les parents ou les embryons.

231. (1903) Hommes et idées du XIXe siècle

Mais c’est qu’il ne doutait pas qu’en tout cas elle ne disposât d’une grande influence. […] L’influence de ce maître est celle qui, depuis trente ans, s’est répandue de la façon la plus générale, exercée avec le plus de puissance et de continuité. […] Sous l’influence de Balzac et de Stendhal, Taine avait admiré sans réserve la violence de l’instinct débridé. […] L’influence de Taine sur le roman n’a pas été moins grande. […] Néanmoins, remarquons que, si le meneur influence la foule, il est d’autre part influencé par elle.

232. (1923) Au service de la déesse

Et, par exemple, voici, comme il l’entend, l’influence de Balzac. […] Il est beaucoup plus aventureux d’évaluer l’influence d’une poésie. […] Mais l’influence de Stendhal ? […] Voilà l’influence de Baudelaire : immense et terrible ! […] Est-ce à dire que les philosophes n’aient aucune influence ou n’aient d’influence que dans leur petit monde et entre eux ?

233. (1909) Nos femmes de lettres pp. -238

C’est que les leçons de l’expérience et les épreuves de la vie l’avaient marquée d’une de ces empreintes auprès de quoi pâlissent toutes les influences littéraires, si chères soient-elles à un cœur ! […] D’où la série des influences, visibles comme à travers une glace, pour les yeux les moins prévenus. […] Attitude des personnages, style de l’auteur, et ce qu’il y a de tendu en lui, c’est bien influence romantique. […] Elle subordonne son émotion à la vision d’un maître et les influences se révèlent, disons mieux : elle se révèle à travers ces influences. […] Des traits essentiels, que nous ne saurions retrouver dans l’empreinte des influences extérieures, s’expliqueront suffisamment par la plus immédiate hérédité !

234. (1905) Études et portraits. Portraits d’écrivains‌ et notes d’esthétique‌. Tome I.

Elles n’infirment en rien les arguments irréfutables qui établissent l’influence capitale de la doctrine cartésienne sur le développement du génie de Pascal.‌ […] Les aimables exceptions qu’il est loisible à chacun de citer au gré de son expérience propre, sont dues à des influences personnelles et passagères. […] Chaque homme, en effet, a subi, pour arriver à une formation définitive de son caractère, des centaines d’influences que nous ne connaissons pas. […] Je soutiens donc que la portion vraiment nécessaire et inévitable de leur œuvre était précisément la portion qu’ils n’ont pas due à l’influence de leur milieu. […] Il est probable que, placé dans un autre milieu et soumis à d’autres influences, M. 

235. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DES MÉMOIRES DE MIRABEAU ET DE L’ÉTUDE DE M. VICTOR HUGO a ce sujet. » pp. 273-306

Les demi-dieux, les héros violents et abusifs tiennent de près aux âges païens, à demi esclaves et barbares ; quand ils triomphent dans nos sociétés modernes, quelles que soient d’ailleurs leur opportunité et leur nécessité passagère, ils introduisent un élément grossier, arriéré, qui pèse après eux et qui a son influence funeste. […] Deux autres grands hommes parallèles à Napoléon, et dont l’influence sur nous a été frappante, quoique moindre, ont aidé certes dans le même sens. […] Quant à sa vie publique, beaucoup de révélations successives avaient été faites, et avec un résultat assez inverse du précédent, c’est-à-dire que si, en y regardant bien, on l’avait trouvé meilleur au fond que ses divorces, ses rapts et ses adultères, on le trouvait au rebours, dans la vie politique, plus léger et plus vain, moins scrupuleux en opinion, plus à la merci d’une belle inspiration du moment ou d’un mauvais discours qu’un de ses faiseurs lui avait apporté le matin, et finalement, pour tout dire, plus vénal que son génie, son influence et le développement majestueux de son âge mûr ne le donnaient à penser. […] Mably a été immolé sans pitié aux pieds de Rousseau ; l’auteur l’a chargé, comme un bouc émissaire, de tout ce qu’il y avait eu de mauvaises idées spartiates et crétoises à la Convention, en réservant à Jean-Jacques toute l’influence salutaire et rien que la salutaire : « Mably a été plus qu’inutile ; il a été dangereux. » D’Holbach surtout se trouve outrageusement anéanti, pour que Diderot apparaisse plus pur, plus serein et plus dominant. Je sais que c’est une défense peu avantageuse à prendre que celle du Système de la Nature et de cette faction holbachienne ; mais je ne veux soutenir d’Holbach ici que comme un homme d’esprit, éclairé quoique amateur, sachant beaucoup de faits de la science physique d’alors, n’ayant pas si mal lu Hobbes et Spinosa, maltraité de Voltaire qui le trouvait un fort lourd écrivain et un fort ennuyeux métaphysicien, mais estimé de d’Alembert, de Diderot, et dont l’influence fut grande sur Condorcet et M. de Tracy.

236. (1911) Enquête sur la question du latin (Les Marges)

bien, luttez contre ce ministre et ce gouvernement, par vos armes, c’est-à-dire par la plume, par la parole, par le prestige, par l’influence et par le bulletin de vote. […] Enfin, il eût peut-être été utile, à notre époque où l’influence de la morale religieuse disparaît, de laisser à l’enfant cette éducation qui façonna les plus honnêtes gens de notre histoire. […] Steeg lui-même, nourri de bonnes lettres anciennes, comme le fondateur de son église, Jean Calvin, l’auteur de l’Institutio christianæ religionis… Non, en conscience, en toute liberté d’esprit, je ne crois à l’influence du latin sur la politique. […] De pareilles balourdises, bien plus que le latin, peuvent avoir une influence sur les esprits indépendants et contribuer à détacher ceux-là d’un régime qui gagnerait certainement à être moins maladroitement servi. […] Et le meilleur moyen de prouver qu’il n’y a aucune influence politique dans le mouvement que vous tentez et qui, pour être incomplet (vous savez qu’à mes yeux l’enseignement du grec est aussi indispensable que celui du latin), n’en est pas moins intéressant, c’est de le poursuivre en dehors des parlements et des ministres qui, par leur mentalité même, ne peuvent ni le comprendre, ni l’accueillir.

237. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « II. M. Capefigue » pp. 9-45

Elle apprend la corruption, en vantant les formes que cette corruption a revêtues pendant quelques jours ; et comme tout le monde n’a pas le cerveau historique pour résister aux mauvaises influences des historiens de la fantaisie, elle pénètre des siennes les esprits faibles, extérieurs, ignorants, sensibles, c’est-à-dire le plus grand nombre, car tout le monde comprend un trumeau ! […] à l’influence de la royauté personnelle et à cet optimisme béat, d’un éternel sourire, que nous connaissons, et que le grand Moqueur des cieux grave parfois à la lèvre des partis qui ne croient pas à leur défaite. […] On ne l’y voit pas toujours, mais, regardez-y, elle y est. » Et c’est la vérité ; mais Mme Du Barry et ses pareilles ne sont pas seulement de ces influences ou de ces instruments nécessaires dont les têtes politiques les plus pures sont parfois obligées de jouer : elles sont plus que cela, elles ! […] Eut-elle l’importance et l’influence qu’il prétend, et dans cette alcôve de maîtresse qu’il a voulu entrouvrir et qu’il eût été mieux de tenir fermée, pouvait-on réellement trouver cette femme que M. de Maistre voit au fond de toute affaire, et dont il a dit : « On ne l’y voit pas toujours, mais regardez-y. […] Capefigue n’a imaginé rien de mieux que de rappeler Mme de Maintenon et son influence sur un roi vieux et ennuyé, et les calomnies dont elle aussi fut abreuvée, et l’obscurité de sa jeunesse, quand elle était Mme d’Aubigné ou Mme Scarron, et que de chercher dans tout cela des analogies !

238. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De l’état de la France sous Louis XV (1757-1758). » pp. 23-43

Les affaires de la guerre se trouvent encore, par les subalternes, sous l’influence des Ormes, c’est-à-dire du comte d’Argenson qui est en exil à sa terre des Ormes, et qui a quitté le ministère depuis les premiers mois de 1757. […] Au milieu de ces revers, qui affectent si profondément l’honneur militaire et l’avenir de la monarchie, l’apathie de Louis XV est complète ; « Il n’y a pas d’exemple qu’on joue si gros jeu avec la même indifférence qu’on jouerait une partie de quadrille. » Le seul honneur de Bernis chargé de la partie politique, mais naturellement exclu des questions militaires, et qui n’a qu’un peu plus de faveur que les autres sans avoir plus d’autorité et d’influence aux heures décisives, est de comprendre le mal et d’en souffrir : « Sensible et, si j’ose le dire, sensé comme je suis, je meurs sur la roue, et mon martyre est inutile à l’État. » Il demande un gouvernement à tout prix, du nerf, de la suite, de la prévoyance : « Dieu veuille nous envoyer une volonté quelconque, ou quelqu’un qui en ait pour nous ! […] Ce fut M. de Choiseul qui, sans être peut-être au-dessus de lui par la naissance, mais en y joignant de tout temps les façons et l’état d’un grand seigneur, sut gagner cette influence nécessaire, et la justifia en définitive par sa capacité. […] En ce moment, Bernis en était venu lui-même à un état tout à fait maladif, à une exaltation nerveuse réelle, infiniment honorable dans son principe, mais qui devait le rendre médiocrement propre au rôle qu’au fond il n’ambitionne même plus : « Ne parlez plus de moi pour la première influence, écrit-il d’un ton sincère à Choiseul ; vous me faites tort ; j’ai l’air de vous pousser et de n’être qu’un ambitieux, lorsque je ne suis que citoyen et homme de bon sens. » Dès août 1758, il s’ouvre nettement à Choiseul pour lui offrir sa succession : Réfléchissez mûrement sur une idée que j’ai depuis longtemps : je crois que vous seriez plus propre que moi aux Affaires étrangères en les considérant sous le point de vue de l’alliance.

239. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire de l’Académie française, par Pellisson et d’Olivet, avec introduction et notes, par Ch.-L. Livet. » pp. 195-217

L’important serait de bien marquer les différents temps, les différents âges, et les influences diverses qu’a subies ou exercées la compagnie, les courants d’esprit qui y ont régné et par lesquels elle s’est trouvée plus ou moins exactement en rapport et en communication avec l’air et l’opinion du dehors. […] Mais après, et jusque vers le milieu du xviiie  siècle, il lui fallut du temps et de l’effort pour se relever des choix faits sous l’influence stagnante de Fleury, et pour arriver à se mettre en accord et en parfaite alliance avec les puissances littéraires et philosophiques actives du dehors. […] Il indique quelque part un chapitre à faire, de l’influence des femmes sur les élections de l’Académie (Mme de Lambert, Mme de Tencin, Mme Geoffrin, Mlle de Lespinasse, etc.) ; il y en aurait un aussi à écrire sur l’influence dirigeante insensible des secrétaires perpétuels.

240. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de La Mennais »

L’aîné se fit marin ; celui des frères qui eut la plus grande influence sur La Mennais, l’abbé Jean, embrassa l’état ecclésiastique. […] Sous l’influence de l’abbé Jean, il reçut la tonsure le 16 mars 1809. […] Quand je considère cette disposition toujours croissante à une mélancolie aride et sombre, l’avenir m’effraye ; de quelque côté que je tourne les yeux, je ne vois qu’un horizon menaçant ; de noires et pesantes nuées s’en détachent de temps en temps et dévastent tout sur leur passage ; il n’y a plus pour moi d’autre saison que la saison des tempêtes… » Ici se trahit le contemporain et le compatriote de René ; et quand je parle de René et d’Oberman à propos de La Mennais, ce ne sont pas des influences qui se croisent ni des reflets qui lui arrivent de droite ou de gauche : c’est une sensibilité du même ordre qui se développe sur son propre fond, mais qui hésite encore, qui se cherche et n’a pas trouvé son accent ; c’est un autre puissant malade, enfant du siècle, qui, dans la crise qu’il traverse et avant de s’en dégager, accuse quelques-uns des mêmes symptômes et rencontre, pour les rendre, quelques expressions flottantes dans l’air et qui se font écho. […] Quand il échappa peu à peu à ces premières influences, La Mennais en chercha d’autres ; il en rencontra une fort douce et insinuante en l’abbé Gerbet, avec qui la part de correspondance contenue dans ces volumes est je ne sais pourquoi masquée sous la suscription à l’abbé X.

241. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Notice historique sur M. Raynouard, par M. Walckenaer. » pp. 1-22

Guillaume de Schlegel, Fauriel et Ampère, on peut dire toutefois que l’ensemble de son œuvre et de son influence n’a pas été encore exposé, discuté et jugé régulièrement et au complet. […] Il traita de la tragédie considérée dans son influence sur l’esprit national : il se plut à montrer dans la tragédie des anciens, dans celle des Grecs, une institution politique. À Athènes, dès l’origine, il en fut ainsi ; à Rome, la tragédie, importée tard, et toute de cabinet, n’eut aucune influence sur l’esprit national. […] Tel qu’il était, il a rendu de grands services et a exercé une influence utile.

242. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VII. Mme de Gasparin »

Âme saine et vaillamment religieuse, elle cherche à exercer une influence meilleure que celle de l’art qui ne vise, lui, qu’à la beauté et à l’émotion, et cette influence, elle l’exerce, tout en produisant bien souvent l’émotion qu’elle ne cherche pas et en réalisant la beauté ! […] Comme un aigle qui se serait pris dans un rayon de miel, et qui se dégage de toute cette glu d’or, d’un coup d’aile, il s’est séparé de toutes les influences de la terre et il est monté d’une aile essuyée jusqu’au niveau de son sujet. […] Mme de Staël, dans son livre d’un sensualisme noir, intitulé de l’Influence des passions sur le bonheur, a aussi un chapitre sur la séparation par la mort, et Mme de Staël est aussi une grande âme et une enivrée de ses larmes ; mais comparez ce cruel chapitre aux pages adorables de Mme de Gasparin, et vous aurez mesuré la distance qui sépare la femme pieuse de la philosophe, même pour le bien qu’elles font à l’âme avec un livre, toutes les deux !

243. (1874) Premiers lundis. Tome II « E. Lerminier. Lettres philosophiques adressées à un Berlinois »

L’école dont nous parlons (si on peut appeler du nom école la réunion assez nombreuse et peu homogène qui se groupa autour de quelques principes communs), réussit plus vite qu’on ne l’aurait osé croire d’abord, à se fonder une influence grave, salutaire, incontestable. […] Les coups qu’il a portés, non pas au talent éminent de ces hommes, mais à l’influence prolongée, à l’importance absolue de leurs doctrines, n’ont pas été perdus pour beaucoup d’esprits et ont hâté le désabusement de plusieurs, en même temps que la vieille admiration des autres s’en est émue.

244. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre III. Buffon »

Il ne fait intervenir dans la science aucune influence étrangère. Aucune influence religieuse d’abord : Dieu n’est nulle part dans son œuvre ; il n’en a pas besoin.

245. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre III. Les immoralités de la morale » pp. 81-134

Mais elles n’ont pas toujours assez d’influence pour faire tout le mal dont elles sont capables. […] Comme ils ne s’accordent guère, il naît autant de morales, si l’individu est plastique, qu’il y a d’influences divergentes exercées sur lui. […] En de pareils cas l’instinct social s’est réellement retourné contre lui-même et sa propre influence tend à le détruire. […] Sous l’influence de conditions passagères, on voit éclore une morale générale par ses prétentions et spéciale par sa forme, une morale de l’amour, une morale de la pitié, une morale du devoir, etc. […] Une conception plus saine prendrait sa place, qui existe déjà d’ailleurs et quoique méconnue, influence les âmes et fait agir les volontés.

246. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — II. (Suite.) » pp. 147-161

Les Seize et la faction des zélés, déjoués d’abord et matés par le duc de Mayenne, avaient repris pendant ses absences et ses campagnes toute leur audace et beaucoup de leur influence ; depuis surtout que le jeune duc de Guise, neveu de Mayenne, s’était échappé de prison et qu’ils croyaient avoir un autre chef lorrain à lui opposer, ils redoublaient d’insolence et affectaient, comme auparavant, la tyrannie dans la cité. […] Un autre moment décisif, une détermination dans laquelle le président eut positivement la plus directe influence, ce fut le choix qu’on fit de Paris plutôt que de toute autre ville, pour la tenue des États généraux de 1593. […] Villeroi, en ses sages Mémoires, paraît en douter ; il n’attribue ce sentiment qu’à un petit nombre, et se montre disposé à croire que Paris, en cette circonstance, soutint et supporta ce siège désespéré comme on l’a vu depuis supporter bien des choses extrêmes, par timidité, sous l’influence et la domination d’un petit nombre, comme on l’a vu, par exemple, en 1793, supporter la Terreur.

247. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre II. De l’ambition. »

Si ces considérations générales suffisent pour éclairer sur la juste influence de l’ambition sur le bonheur, les auteurs, les témoins, les contemporains de la révolution de France, doivent trouver au fond de leur cœur de nouveaux motifs d’éloignement pour toutes les passions politiques ? […] Une révolution suspend toute autre puissance que celle de la force ; l’ordre social établit l’ascendant de l’estime, de la vertu : les révolutions mettent tous les hommes aux prises avec leurs moyens physiques ; la sorte d’influence morale qu’elles admettent, c’est le fanatisme de certaines idées qui n’étant susceptible d’aucune modification, ni d’aucune borne, sont des armes de guerre, et non des calculs de l’esprit. […] L’homme donc qui veut acquérir une grande influence dans ces temps de crise doit rassurer la multitude par son inflexible cruauté.

248. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre II. Le cerveau chez les animaux »

C’est dans ce chant que le grand poète expose les rapports de l’âme et du corps, la dépendance où l’une est de l’autre, l’influence de l’âge, des maladies, de toutes les causes extérieures sur les progrès, les changements, les défaillances de la pensée. […] L’influence de l’âge, des tempéraments, des climats, de la maladie ou de la santé, les affections mentales, le sommeil et ses annexes, telles sont les vastes questions où se rencontrent le médecin et le philosophe, où l’on cherche à surprendre l’influence réciproque du physique sur le moral, du moral sur le physique ; mais comme toutes les actions physiologiques et nerveuses viennent se concentrer dans le cerveau, que le cerveau paraît être l’organe propre et immédiat de l’aine, c’est en définitive en lui que s’opère l’union des deux substances, et si l’on peut surprendre quelque chose de cette mystérieuse union, c’est lui qu’il faut étudier en premier lieu.

249. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Nièces de Mazarin » pp. 137-156

Quand un grand homme a cessé de vivre, quand il est sorti de la phase historique qu’il a marquée de la double empreinte de son esprit et de son caractère, il laisse souvent après lui, et dans l’histoire même, quelques gouttes de son sang : — une famille, que la curiosité aime à étudier pour y retrouver les influences de sa gloire et de son génie ; car ceux qui croient le plus à la personnalité du mérite posent, malgré eux, la question de race à propos de tout, comme si c’était une fatalité ! […] Mais son influence fut salutaire ; et sait-on bien tout ce qu’on lui doit ? […] Nous aussi, nous croyons à l’influence bienfaisante de Marie Mancini sur Louis XIV, cet heureux Sardanapale que les femmes auraient amolli, si, au début de sa vie, il n’avait pas trouvé cette Marie qui a inspiré à Amédée Renée un si beau passage, et, au déclin, cette madame de Maintenon, qui n’est pas la plus idéale, la plus héroïque, mais qui est indubitablement la plus respectable des femmes de l’Histoire !

250. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre III. Le lien des caractères généraux ou la raison explicative des choses » pp. 387-464

En ces occasions, si l’on demande le pourquoi, la réponse est une somme de parce que ; ici notamment, il y a trois raisons réunies, trois caractères explicatifs, trois données intermédiaires qui, chacune, prise à part, sont plus générales que l’antécédent total, et qui, incluses en lui, concourent par leurs influences assemblées à lui prescrire la courbe dont il s’agit. — De là une conséquence importante. […] Par l’influence combinée de l’état antérieur et des aptitudes et facultés héréditaires, il explique son état social, intellectuel et moral au moment donné ; par l’influence combinée de cet état nouveau et des mêmes aptitudes et tendances héréditaires, il explique son état social, intellectuel et moral au moment postérieur, et ainsi de suite, soit en remontant le cours des temps depuis l’époque contemporaine jusqu’aux plus anciennes origines historiques, soit en descendant le cours des temps depuis les plus anciennes origines historiques jusqu’à l’époque contemporaine. — On conçoit que dans cette prodigieuse évolution, qui s’étend depuis la formation du système solaire jusqu’à celle de l’homme moderne, les lacunes soient grandes et nombreuses ; elles le sont en effet, et souvent nous n’avons pour les combler que des conjectures. […] Ainsi, dès qu’un caractère est donné, nous sommes sûrs que ses précédents et accompagnements, en d’autres termes ses conditions, ou toutes, ou quelques-unes, ou une seule, influent sur lui et à son endroit sont efficaces. — Or, ainsi qu’on l’a vu, c’est sur la supposition de cette efficacité ou influence que se fondent tous les procédés éliminatifs, toutes les méthodes de concordance, de différence, de variation concomitante, qui composent l’induction. […] Au premier aspect, il semble qu’en certains cas le moment et l’emplacement aient de l’influence; par exemple, à la seconde minute, un corps pesant tombe plus vite qu’à la première; le même pendule oscille autrement au fond d’une mine et au sommet de la montagne adjacente. […] Le corps pesant tombe plus vite pendant la seconde minute, en vertu de la vitesse acquise, c’est-à-dire en vertu de l’influence exercée par sa chute antérieure sur sa chute ultérieure; cette chute antérieure est une condition supplémentaire qui lui manquait dans la première minute.

251. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre II. Vérification de la loi par l’examen de la littérature française » pp. 34-154

Il faut avoir suivi de près le travail créateur d’un artiste, connaître l’influence du Salon sur un sculpteur, sur un peintre, lire par exemple la correspondance de Flaubert, pour savoir ce que peuvent sur une œuvre d’art les critiques, les encouragements, l’esprit ambiant. […] Action, réaction, influences réciproques : toute la vie avec le désordre apparent de ses variations, dans l’ordre profond des lois générales ; et problèmes toujours nouveaux pour quiconque se débarrasse des idées toutes faites, des classifications en usage. […] Dans cet exposé sommaire, la tradition que j’appelle savante, ou académique, ou littéraire, s’est manifestée surtout comme une influence fâcheuse. […] Je n’en cite que quelques-uns, d’après un critère spécial : Nietzsche, Ibsen, deux étrangers dont l’influence (si diverse !) […] Par contre, cela est certain, il n’est pas lyrique ; il ne l’est que sous une influence étrangère ou par exception ; le plus souvent, il prend pour du lyrisme ce qui est éloquence, ou vision poétique, ou simplement esprit.

252. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre V. Jean-Jacques Rousseau »

Influence de Jean-Jacques Rousseau. […] Assurément on peut saisir hors de Jean-Jacques, dans la société et la littérature, des influences qui se sont imposées à lui, qui ont déterminé les formes de sa pensée. […] A quelle influence Rousseau a-t-il été soumis, qui l’ait tiré de ses turpitudes, qui lui ait donné la conscience, qui l’ait élevé enfin à la moralité ? […] Leur influence va de pair avec celle des habitudes extérieures, des manières, des façons de vivre ; elle est pire encore, parce qu’elle crée chez les uns une réelle supériorité d’intelligence. […] Influence de Rousseau Il nous reste à nous rendre compte de l’influence que Rousseau a exercée.

253. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VIII »

Ce dernier surtout a dû avoir une influence notable sur l’écriture dans les poèmes de Wagner. […] Ce qu’il importe de savoir, c’est uniquement l’influence qu’eut sur lut le Ring, en l’inspirant à écrire Tristan. […] On sait quelle énorme influence Wagner attribuait au public ; c’est-à-dire au public que l’artiste a en vue lorsqu’il écrit. […] Par contre, il me faut maintenant parler d’un événement qui eut pour l’exécution de Tristan autant d’influence qu’en eurent pour sa conception le Ring et le public non-allemand. […] Elle l’avait déjà comme enveloppé de son influence dès son berceau.

254. (1923) Nouvelles études et autres figures

L’influence allemande n’a pas été seulement littéraire et philosophique : elle a été politique. […] Étrange influence qui ne ressemble à aucune autre ! […] Et son exemple achève d’illuminer le sens de cette influence. […] Nos écrivains ont subi l’influence du désastre, non celle du peuple qui nous l’avait infligé. […] Et pourtant l’influence allemande n’avait jamais été aussi forte.

255. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre VIII. L’antinomie économique » pp. 159-192

Il y a dans l’invention industrielle, comme dans l’invention littéraire, artistique ou philosophique, un élément proprement personnel : la cérébralité de l’individu, qui est irréductible aux influences sociales. […] Il y a ici une sorte de collusion des influences pédagogiques et des influences économiques en vue de réduire l’individu au rôle d’organe docile du mécanisme social. […] Confinés dans leur bureau, relégués dans leur domaine spécial à l’écart de la vie réelle, privés des joies saines d’une activité extérieure, et portant des fruits visibles, ils s’étiolent, perdent toute sûreté d’instincts, et souvent dégénèrent : c’est dans leurs rangs que se recrute l’armée sans cesse plus nombreuse des décadents — mécontents ou résignés, pessimistes ou dilettantes — qui constituent un danger des plus sérieux pour l’avenir de notre vieille Europe87. » Ainsi la désintégration des individualités, la dissociation en elles de l’intelligence et de l’instinct, de la pensée et de l’action, de la théorie et de la pratique ne font que s’accentuer sous l’influence de notre mécanisme social.

256. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Correspondance entre Mirabeau et le comte de La Marck (1789-1791), recueillie, mise en ordre et publiée par M. Ad. de Bacourt, ancien ambassadeur. » pp. 97-120

Ce n’est pas une royauté républicaine à la façon de La Fayette qu’il veut ; on le voit, au contraire, vouloir retrancher de la Constitution les idées républicaines qui y pénètrent sous l’influence de La Fayette et qui vont en faire un code d’anarchie, de dissensions civiles et de conflits d’autorité. […] Il se montre désireux d’ailleurs, en toute occasion, de diminuer l’influence de Paris et sa prédominance sur les provinces. Il connaît ce grand centre et foyer de corruption, et, de bonne heure, il en désespère : « Au lieu de chercher à changer la température de Paris, ce qu’on n’obtiendra jamais, il faut au contraire s’en servir pour détacher les provinces de la capitale. » Il aspire constamment, dans ses divers projets, à affranchir de cette influence parisienne factice et inflammatoire et la royauté et les provinces. […] Sa politique est tout entière à susciter une telle fermentation chez les voisins, qu’on lui laisse la faculté d’étendre sur tout le royaume l’influence de la Courtille.

257. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre premier. La solidarité sociale, principe de l’émotion esthétique la plus complexe »

Ce qui devrait nous étonner, ce n’est pas la possibilité d’une action constante des êtres les uns sur les autres ; c’est l’hypothèse contraire, à savoir que la présence d’un organisme vivant, c’est-à-dire d’un complexus de mouvements et de courants, restât sans influence sur un autre complexus semblable. […] Enfin, mon frère qui assistait à ces expériences et qui avait sur elle une singulière influence, car elle le confondait avec moi, essaya quelque chose de plus curieux. […] Les émotions esthétiques peuvent avoir une influence non seulement sur la vie de relation, mais encore sur la vie organique, où elles augmentent l’activité circulatoire et par conséquent l’activité nutritive. […] Avec le retour de la sensibilité cutanée sous l’influence d’un traitement, l’équilibre moral et intellectuel se rétablit.

258. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Henri Heine »

Dans tout cet art où la fantaisie du visionnaire se mêle à la force évocatrice du réaliste, apparaît la dernière et la plus puissante des influences que Heine a subies, celle des chants populaires. […] III Nous sommes au terme de notre analyse ; que l’on prenne les influences successives, nationales et esthétiques auxquelles Heine s’est soumis, que l’on considère la diversité de ses inspirations, des genres qu’il a cultivés, des facultés qu’il a exercées, le trait marquant de son organisation mentale s’accuse en une sorte d’instabilité naturelle qui fit passer le poète par toute la succession des humeurs ; de la gaieté à l’ironie, de l’ironie au désespoir, et cela sans cesse, avec une singulière rapidité. […] Heine eut des goûts divers, s’éprit et subit de nombreuses influences artistiques ; c’est-à-dire que beaucoup de choses et de différentes lui ont plu, ou encore que ses sentiments étaient assez variables pour être successivement satisfaits et charmés par des expressions artistiques dissemblables entre elles et pouvant varier de la rêverie vague des romantiques allemands, au rude réalisme de la poésie populaire, à la précision et à l’esprit des prosateurs français. […] Et comme sous l’influence dissolvante de l’âge et de la maladie, l’âme dépouille d’abord ses acquisitions les plus tardives, suivant en sens inverse, dans sa ruine, les étapes par où elle a passé de la jeunesse à l’âge stérile, ce sont les premières assises cérébrales, les notions héréditaires ou enfantines, qui subsistent les dernières.

259. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre X. Première partie. Théorie de la parole » pp. 268-299

L’homme a besoin d’être aidé à produire ses pensées ; s’il n’a pas la confiance intime d’un appui dans l’opinion ou le sentiment de ses contemporains, il s’effraie de sa solitude ; s’il ne sent pas dans les autres l’influence qu’il se croyait appelé à exercer, le découragement vient le saisir, et il garde un silence qui le dévore : il n’est pas assez assuré dans sa propre conscience parce qu’il est éminemment un être social. […] Le génie est une révélation particulière de Dieu, pour exercer une influence plus immédiate sur les destinées humaines : malheur donc à celui qui abuse du génie ! […] Traduction imparfaite de la parole parlée, la parole écrite ne conserve quelque énergie, n’exerce quelque influence sur les hommes, ne traverse les générations successives, que comme souvenir de la parole parlée. […] C’est ainsi qu’elle a été si souvent étrangère aux mouvements de la civilisation ; qu’elle a suivi la marche progressive indépendamment des autres états ; que l’influence exercée par les croisades a été nulle pour elle, quoiqu’elle ait participé à ces expéditions lointaines.

260. (1907) Le romantisme français. Essai sur la révolution dans les sentiments et dans les idées au XIXe siècle

On ne vise pas ici l’influence exercée par tels ou tels livres sur une génération. […] Mais l’influence romantique est endémique dès le début du XIXe siècle. […] Mais elle met en jeu certaine influence générale et marque, non certes l’unique terrain d’invasion du désordre romantique, mais d’un des plus caractéristiques. […] A une formation morale contradictoire, à une éducation qui a pris l’âme entre deux influences violemment ennemies, et fait d’un même homme deux hommes irréconciliables. […] Le titre du premier ouvrage de Mme de Staël : De l’influence des Passions sur le Bonheur, exprime la préoccupation à laquelle son esprit ramène tout.

261. (1927) Des romantiques à nous

La religion est une de ces forces, de ces influences. […] Cette influence a été faible sur lui. […] On disait que l’influence du majestueux Baptiste pour obtenir des places de sergent de ville était sans égale. […] De fait, à mesure qu’il s’émancipe de l’influence formelle de Franck, ses thèmes trahissent de plus en plus le génie même de son dieu. […] Elle me grisait, m’enveloppait d’une influence magique.

262. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « TABLE » pp. 340-348

. — Influence de la fortune sur les mœurs littéraires. — Balzac, messer milione. […]  — Considérations sur l’esprit du temps. — Mollesse et apologie. — Optimisme     279 LXXI. — Transformation du journal La Presse et des mœurs littéraires. — Son prospectus. — Chateaubriand, Alexandre Dumas, Napoléon, principaux collaborateurs. — Influence sur les lettres     281 LXXII. — M.

263. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres mises en ordre par M. J. Sabbatier. (Tome II, 1844.) » pp. 144-153

Il semblait croire, plus qu’il ne devait être permis depuis les déceptions de 89, à la puissance de la vérité pure, à l’influence d’une idée juste une fois imprimée quelque part. […] Le Tableau du dix-huitième siècle n’est qu’une apologie écrite sous l’influence des doctrines que Victorin Fabre exprimait, discutait avec talent, mais ne rajeunissait pas.

264. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VII. De la littérature latine, depuis la mort d’Auguste jusqu’au règne des Antonins » pp. 176-187

Sous la tyrannie des empereurs, il n’était ni permis ni possible de remuer le peuple par l’éloquence ; les ouvrages philosophiques et littéraires n’avaient point d’influence sur les événements publics. […] Les écrits polémiques, ceux qui doivent agir sur l’opinion du moment et sur l’événement du jour, n’auraient jamais pu être d’aucune utilité, d’aucune influence avant l’usage de la presse ; ils n’auraient jamais été assez répandus pour produire un effet populaire : la tribune seule pouvait atteindre à ce but ; mais on ne composait jamais un ouvrage que sur des idées générales ou des faits antérieurs propres à l’enseignement des générations.

265. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XVIII. Pourquoi la nation française était-elle la nation de l’Europe qui avait le plus de grâce, de goût et de gaieté » pp. 366-378

Plusieurs des hommes qui ont pris un grand ascendant sur les destinées de la France, étaient dépourvus de toute apparence de grâce dans l’expression et de brillant dans l’esprit : peut-être même devaient-ils une partie de leur influence à ce qu’il y avait de sombre, de silencieux, de froidement féroce dans leurs manières comme dans leurs sentiments. […] L’influence des femmes est nécessairement très grande, lorsque tous les événements se passent dans les salons, et que tous les caractères se montrent par les paroles ; dans un tel état de choses, les femmes sont une puissance, et l’on cultive ce qui leur plaît.

266. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre IV. De la bienfaisance. »

Toutes les passions, certainement, n’éloignent pas de la bonté ; il en est une surtout qui dispose le cœur à la pitié pour l’infortune ; mais ce n’est pas au milieu des orages qu’elle excite, que l’âme peut développer et sentir l’influence des vertus bienfaisantes. […] Dans quelque situation obscure ou destituée que le hasard nous ait jeté, la bonté peut étendre l’existence, et donner à chaque individu un des attributs du pouvoir, l’influence sur le sort des autres.

267. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre V. Transition vers la littérature classique — Chapitre II. La langue française au xvie siècle »

L’Italie avait été un trop actif agent de notre Renaissance, pour ne pas avoir imprimé fortement sa marque jusque sur notre langage ; l’Espagne à la fin du siècle regagne du côté de l’influence intellectuelle ce qu’elle perd en influence politique ; elle nous insinue de ses manières et de ses façons de parler.

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