Je répondrai donc que ces combats que livre Titus ne sont pas dignes de lui, ni dignes d’occuper la scene tragique durant cinq actes.
Je dirai plus : il y a ici des fragments dignes des plus beaux chapitres de l’Adorant (Sixtine)… Cela me confirme dans l’appréciation très digne que je me suis formée de M. de Gourmont, à savoir : que c’est un prosateur exquis qui a des douceurs de poète et des grandeurs de philosophe.
Ce digne Ouvrage mourut à sa troisieme apparition, malgré les efforts de plusieurs Philosophes subalternes, & même, dit-on, de quelques Philosophes du premier ordre. […] Laus de Boissy a fait huit ou dix Comedies, dont aucune n’a été jugée digne des honneurs de la représentation ; des Drames, des Proverbes, des Opuscules, des Opéra-comiques, des Contes moraux, & d’autres Ouvrages qui n’eussent jamais vu le jour, s’il ne les eût fait imprimer à ses frais, & qui n’ont servi qu’à le couvrir de ridicule aux yeux de tous ceux qui ont eu la patiente curiosité de les parcourir.
C’est un Recueil d’impudences dignes de Diogene le cynique, & de tours dignes de Panurge.
Ce recueil est digne d’être mis à la suite des Révolutions de l’Abbé de Vertot. […] digne de ce Prince, nous avons ce que M. de V. […] Le récit de ce qu’il fit contre les fanatiques des Cevennes est digne d’être lu. […] Le premier est digne d’être comparé à Tacite. […] Son style simple & uni, est digne de la majesté de l’histoire.
Goulu, pour avoir fait quelques mauvais vers & donné quelques traductions qu’on ne lit point, se croyoit un personnage digne d’entrer en lice avec le héros de la littérature. […] Ils l’appelloient gouffre d’érudition, Hercule gaulois, destructeur du tyran de l’éloquence, héros véritable & seul digne des lauriers arrachés à l’usurpateur. […] Rien de plus judicieux que sa lettre au chancelier Séguier, en réponse à celle où ce digne chef de la magistrature lui disoit : « Je viens de faire supprimer un libèle composé contre vous. » Les gens de lettres devroient toujours avoir dans l’esprit cet exemple de la modération de Balzac.
I Une chose singulière à constater, c’est le temps énorme qu’attendent souvent les plus grands hommes avant d’avoir des historiens dignes d’eux, — quand ils en ont toutefois, car le plus souvent ils en manquent. […] Des milliers de plumes, sous prétexte d’histoire, se voueront au service de sa renommée, mais il n’aura pas d’historien digne de son génie, qui le comprenne et qui le juge ; car, pour comprendre et juger le génie d’un homme, il en faut presque la moitié. […] nous excusons facilement bien des genres d’illusion dans un homme, et l’illusion de la jeunesse, et l’illusion de l’admiration pour l’être supérieur qui fascine jusqu’au point de faire croire qu’on est digne d’en écrire la vie, et l’illusion même du plus mince talent, dont les premières révélations portent dans l’âme un trouble qui ne manque pas de grâce quoique demain cela doive être de la vanité ; mais à laquelle de ces illusions innocentes devons-nous l’histoire d’Émile Bégin ?
viens voir ce qui est digne de ton admiration ! […] Une de ses pensées est belle comme l’âme entière de l’homme, lorsque, digne de son immortalité, elle médite profondément.
Plusieurs chapitres sont dignes des Lettres Persannes. […] Il se peut cependant à toute force que Richelieu ait fait son testament, comme Neuton fit son apocalypse ; mais cet ouvrage n’est pas digne de lui.
Je me sens plus de courage que vous : je penserai toujours de même sur le compte des Philosophes ; &, quoi qu'il m'arrive de votre part, je n'oublierai jamais, que depuis dix ans vous m'avez jugé digne de vos bontés, malgré la Ratomanie & le Tableau philosophique de l'Esprit de M. […] La célébrité pendant la vie est un but honnête, & le plus digne prix des bons Ouvrages. […] Ce Tableau offrira à la Postérité l’Abrégé d’une Vie non seulement très-intéressante, mais encore la plus digne d’être proposée pour modele à tous les Souverains. […] Monseigneur, C’est présenter à Votre Altesse Royale un hommage digne d’elle, que de lui offrir le Tableau historique des actions de deux Souverains, si dignes de l’admiration de l’Europe. […] Cette Brochure, sans doute oubliée, avoit pour titre, Problême Littéraire, & pour but de prouver que les Articles les moins foibles des Trois Siecles sont de la façon d'un Vicaire de Paroisse, mort fou il y a trois ans, & qui n'a pas laissé seulement un Prône digne d'être imprimé.
Le roi lui écrivait lettres sur lettres ; Voltaire, qui se trouvait chez elle et à qui elle avait fait composer une comédie pour les fêtes de la Cour, à l’occasion du mariage du Dauphin, se prêtait à ce jeu d’Henri IV et de Gabrielle, et rimait madrigaux sur madrigaux : Il sait aimer, il sait combattre ; Il envoie en ce beau séjour Un brevet digne d’Henri quatre, Signé Louis, Mars et l’Amour. […] Bernis, fidèle au goût du temps, loin de trouver dans cet amour royal rien de répréhensible, nous le peint à l’avance comme un modèle de chasteté et de pudeur, et digne en tout de l’âge d’or37. […] Il restera quelques autres choses encore, et la postérité, ou du moins les amateurs qui aujourd’hui la représentent, semblent accorder à l’influence de Mme de Pompadour, et ranger sous son nom plus d’objets dignes d’attention que Diderot lui-même n’en énumérait. […] La manufacture de Sèvres lui doit beaucoup ; elle la protégea activement ; elle y conduisait souvent le roi qui, cette fois, sentait l’importance d’un art auquel il devait de magnifiques services de table, dignes d’être offerts en cadeau aux souverains. […] » Elle envisagea la mort d’un œil ferme, et, comme le curé de la Madeleine était venu la visiter à Versailles et s’en retournait : « Attendez un moment, monsieur le curé, lui dit-elle, nous nous en irons ensemble. » Mme de Pompadour peut être considérée comme la dernière en date des maîtresses de roi, dignes de ce nom : après elle, il serait impossible de descendre et d’entrer décemment dans l’histoire de la Du Barry.
Cette parcimonie de la nature à créer les grands historiens s’explique d’elle-même, quand on y réfléchit, par le nombre, la diversité et la supériorité des dons naturels et des dons acquis nécessaires pour écrire une histoire digne de ce nom. […] « Tu as un frère, ton égal en noblesse, ton supérieur par l’âge, digne en tout de la haute fortune où je t’appelle, si tu n’en étais plus digne encore toi-même. […] « Si l’immense corps de l’État pouvait subsister et se pondérer seul et sans modérateur, j’étais digne peut-être de recommencer les temps et les institutions de la république ; mais nous en sommes à cette nécessité, que déjà mon âge avancé ne peut plus rien promettre au peuple romain qu’un bon successeur, et ta jeunesse rien autre qu’un bon maître à l’empire. […] Descendre ou naître des princes est un hasard qui ne nous rend digne d’aucune estime ; dans l’adoption, le choix est entier et le jugement libre, et, si l’on veut bien choisir, l’opinion publique vous éclaire.
Voltaire, tantôt à Paris, tantôt à Versailles, était alors dans sa veine passagère de faveur à la Cour, essayant de s’y pousser par la protection de la maîtresse favorite, et il devait avoir à rougir quelquefois devant Vauvenargues de ces distractions et de ces poursuites, si peu dignes de l’ami d’un sage. […] Il y rend au mot vertu son sens magnifique et social : Le mot de vertu emporte l’idée de quelque chose d’estimable à l’égard de toute la terre… La préférence de l’intérêt général au personnel est la seule définition qui soit digne de la vertu, et qui doive en fixer l’idée. […] Telle est l’inspiration générale de Vauvenargues, celle par laquelle il rompt avec les moralistes du siècle précédent comme avec ceux de son siècle, et qui lui arrachera cette belle parole digne d’un ancien : « Nous sommes susceptibles d’amitié, de justice, d’humanité, de compassion et de raison. […] » Il a résumé toute sa théorie à cet égard dans ce mot si souvent cité, et qui, déjà dit par d’autres13, restera attaché à son nom, comme au nom de celui qui était le plus digne de le trouver et de le dire : « Les grandes pensées viennent du cœur. » Comme critique littéraire, et dans les jugements qu’il porte au début sur les écrivains qui ont été le sujet favori de ses lectures, Vauvenargues n’est pas sans inexpérience : sur Corneille, dont l’emphase lui répugne jusqu’à lui masquer même les hautes beautés, sur Molière dont il ne sent pas la puissance comique, Voltaire le redresse avec raison, avec une adresse de conseil délicate et encore flatteuse : Vauvenargues reprend ses avantages quand il parle de La Fontaine, de Pascal ou de Fénelon. […] Gilbert remporta le prix entre plusieurs concurrents dignes d’estime.
Ce sage monarque de la littérature, ce véritable empereur de la latinité à son époque, choisissant pour consoler Marguerite le moment où elle était sous le coup du désastre de Pavie, lui écrivait : Il y a longtemps que j’ai admiré et aimé en vous tant de dons éminents de Dieu, une prudence digne même d’un philosophe, la chasteté, la modération, la piété, une force d’âme invincible, et un merveilleux mépris de toutes les choses périssables. […] Dès le matin, la compagnie se rassemblera dans la chambre de Mme Oisille pour assister à sa leçon morale, et de là ira entendre la messe ; puis on dînera à dix heures ; après quoi, s’étant retiré chacun en sa chambre pour ses affaires particulières, on se réunira sur le pré à midi : Et s’il vous plaît que tous les jours, depuis midi jusques à quatre heures, nous allions dedans ce beau pré, le long de la rivière du Gave, où les arbres sont si feuillés que le soleil ne saurait percer l’ombre ni échauffer la fraîcheur ; là, assis, à nos aises, dira chacun quelque histoire qu’il aura vue ou bien ouï dire à quelque homme digne de foi. […] Telle que je viens de la montrer dans l’ensemble, en fâchant de ne pas forcer les traits et en évitant toute exagération, elle a mérité ce nom de gentil esprit, qui lui a été si universellement accordé ; elle a été la digne sœur de François Ier, la digne patronne de la Renaissance, la digne aïeule de Henri IV par la clémence comme par l’enjouement, et, dans l’auréole qui l’entoure, on aime à lui adresser ce couplet que son souvenir appelle et qui se marie bien avec sa pensée : Esprits charmants et légers qui fûtes de tout temps la grâce et l’honneur de la terre de France ; qui avez commencé de naître et de vous jouer dès les âges de fer, au sortir des horreurs sauvages ; qui passiez à côté des cloîtres et qu’on y accueillait quelquefois ; qui étiez l’âme joyeuse de la veillée bourgeoise, et la fête délicate des châteaux ; qui fleurissiez souvent tout auprès du trône ; qui dissipiez l’ennui dans les pompes, donniez de la politesse à la victoire, et qui rappreniez vite à sourire au lendemain des revers ; qui avez pris bien des formes badines, railleuses, élégantes ou tendres, faciles toujours, et qui n’avez jamais manqué de renaître au moment où l’on vous disait disparus !
Ce naturel est gaulois, trop gaulois, dira-t-on, c’est-à-dire peu moral, médiocrement digne, exempt de grandes passions et enclin au plaisir. […] L’ardeur et la profondeur des sentiments, l’amour qui dessèche et qui, « sans la crainte de l’enfer, pousserait le malheureux rebuté à se donner la mort9, ) » les larmes sincères, l’invective, le vigoureux style oratoire digne de Machiavel, toute cette invention italienne nous choque et le choque par son trop de force. […] Tout cela ne compose pas un caractère bien digne. […] Il peut prêter à la moquerie, être la risée des sages, « effaroucher les jeunes filles » : ces apparences n’y font rien ; il a peut-être eu plus de bonheur, il est peut-être plus digne d’admiration que le personnage le plus correct et le plus éclatant.
Il eût été digne de l’Académie, digne de M. […] On y voit Furetière accusé d’avoir prostitué sa sœur pour se mettre en état d’acheter la charge de procureur fiscal de l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés ; il y est dit qu’il se déshonora dans ce poste par des prévarications et qu’il s’y fit le protecteur déclaré des filous et des filles publiques ; on y raconte comment il abusa de sa charge pour escroquer, par une manœuvre qui, selon le vocabulaire moderne, serait qualifiée de chantage, le bénéfice d’un jeune abbé ; enfin, retournant une plaisanterie de Furetière contre lui-même, l’auteur prétend que le Roman Bourgeois, — ce détestable ouvrage — a été dédié par lui au bourreau, comme au seul patron digne d’une telle œuvre. […] Dès lors cet homme, cet ancien ami, ce poète inimitable, dont le style naïf et marotique fait tant d’honneur aux fables des anciens et ajoute de grandes beautés aux originaux 6, n’est plus qu’un misérable écrivain licencieux, auteur de contes infâmes, un Crétin mitigé, tout plein d’ordures et d’impiétés, un fauteur de débauche digne du bourreau ; Furetière pousse l’animosité jusqu’à reproduire à la suite de son libelle la sentence de police portant suppression de ses contes, et l’accuse, comme je l’ai déjà dit, de spéculer sur sa propre turpitude, en vivant de la prostitution de sa femme.
Il est facile, à présent qu’ils ont péri, de venir dire qu’ils méritaient sans doute assez peu de survivre ; que les meilleurs, après tout, et les plus dignes, ont surnagé et nous en tiennent lieu ; que ces poëtes d’une seconde époque devaient en avoir bien des défauts qui les rendent médiocrement regrettables, le raffinement, l’obscurité, le néologisme. […] Le pire qui nous puisse arriver, c’est que nous serons tous plus ou moins immortels, et bien loin que quelques-uns d’un peu intéressants se perdent tout entiers, dignes et moins dignes nous vivrons tous avec part au soleil et presque ex æquo.
En France, le nombre est infiniment plus grand qu’on ne croit des ouvrages épuisés, très dignes pourtant d’avoir leur place au soleil des bibliothèques, et dont les Allemands, par exemple, s’ils les avaient dans leur littérature, n’auraient pas manqué de faire des éditions de toute espèce. […] C’était un homme probe et cultivé, de naissance médiocre, mais de mœurs élevées, placé par la fortune de son génie en dehors de toutes les prétentions et de toutes les passions de son temps, ayant le pied, — un pied digne du talon rouge, — et l’œil, — un œil capable de tout embrasser, — dans les deux sociétés qu’on nommait alors la cour et la ville, et que sa vocation était d’observer et de reproduire. […] Nous pensions et nous espérions que l’on sortirait de l’éloge confus et de la petite explication à ras de terre, pour pénétrer dans cette haute valeur intellectuelle, dans le mystère de ce talent, et pour nous le faire bien comprendre ; Adrien Destailleur semblait un commentateur digne de La Bruyère.
Mais comme la noblesse était devenue un don de la fortune, du milieu des nobles même s’éleva l’ordre des pères qui par leur âge étaient les plus dignes de gouverner ; et entre les pères eux-mêmes, les plus courageux, les plus robustes furent pris pour rois, afin de conduire les autres, et d’assurer leur résistance contre leurs clients mutinés119. […] Mais comme tout devait s’y ramener à l’urne du sort ou à la balance, la Providence empêcha que le hasard ou la fatalité n’y régnât en ordonnant que le cens y serait la règle des honneurs, et qu’ainsi les hommes industrieux, économes et prévoyants plutôt que les prodigues ou les indolents, que les hommes généreux et magnanimes plutôt que ceux dont l’âme est rétrécie par le besoin, qu’en un mot les riches doués de quelque vertu, ou de quelque image de vertu, plutôt que les pauvres remplis de vices dont ils ne savent point rougir, fussent regardés comme les plus dignes de gouverner, comme les meilleurs120. […] Si donc, comme le dit Aristote, de bonnes lois sont des volontés sans passion, en d’autres termes, des volontés dignes du sage, du héros de la morale qui commande aux passions, c’est dans les républiques populaires que naquit la philosophie ; la nature même de ces républiques conduisait la philosophie à former le sage, et dans ce but à chercher la vérité.
Et véritablement, ce seroit fermer les yeux aux considerations les plus indispensables de la Politique, que de ne pas regarder la Littérature comme un des objets les plus dignes de l’attention du Ministere. […] Ne seroit-il donc pas plus digne du zele des Protecteurs de la Littérature, & de ceux à qui la police en est confiée, d’encourager les bons Critiques, & de n’autoriser que ceux qui, comme l’Abbé Grosier, ont fait preuve d’attachement pour les vrais principes, de courage & de talent pour les défendre, plutôt que de prêter l’oreille aux clameurs de quelques petits Auteurs qui emploieroient plus utilement leur temps à se corriger, qu’à se plaindre ?
Les Savans du dernier Siecle, qui valoient bien ceux du nôtre, ont regardé son Poëme des Jardins comme une Production digne du temps d’Auguste. […] Il est d’autant plus répréhensible de ne l’avoir pas fait, qu’il a produit, de son propre fond, des Réflexions dignes du P.
Le souverain de la petite île n’est plus ici que le grand propriétaire le mieux entendu et le plus digne de présider son conseil général. […] Il va donc la trouver un jour, cette matrone digne et haute, à la ride austère, et lui dit : « Je ne puis mourir dans cette île, et terminer ma carrière dans un repos qui serait peu digne de moi.
» Alors, voilà Sentinelli qui se relève avec ce grand cri, digne au moins du dernier mot que dira la reine : Au nom de notre reine indignement trompée, Comte Monaldeschi, rendez-moi votre épée. […] Gardez-vous d’exagérer votre activité… Il faut que l’art soit la règle de l’imagination pour qu’elle se transforme en poésie… » Critique admirable et digne absolument de l’esprit sans règle et sans frein dont les premiers tumultes se faisaient entendre à tout le genre humain. […] Quel beau commencement d’une vie littéraire qui reste l’une des plus dignes d’envie de ce siècle, malgré les fréquentes misères dont elle a été troublée par l’imprévoyance, la prodigalité et le désordre !
Donoso Cortès et Raczynski étaient, de facultés, peut-être dignes d’avoir une politique à eux qu’ils auraient appliquée et réalisée s’ils avaient été chefs d’État, au lieu d’être d’oisifs diplomates, passifs comme des maîtres de cérémonies ! […] Seulement, étiolés par cette diplomatie dans laquelle on avait déporté leur énergie, ils assistent, l’âme assombrie et l’esprit désarmé, aux événements qui passent devant eux et dont ils mesurent la portée avec la tristesse de l’impuissance ; et comme si ce n’était pas assez de les voir diminués par la diplomatie, cette rogneuse d’hommes, il faut qu’un autre diplomate comme eux, — et s’il ne l’est pas, il est digne de l’être, — le comte Adhémar d’Antioche, intervienne à chaque instant dans leur Correspondance et la coupe où bon lui semble, pour obéir, affaiblissement sur affaiblissement ! […] Aussi est-ce sous la lumière attirante de ce nom de Donoso Cortès qu’on a placé avec intelligence le nom moins lumineux de Raczynski, pour qu’il pût bénéficier de cette lumière et qu’on vit mieux qu’il était digne de la partager.
Il y eut là, tout au sortir de l’enseignement de Malherbe, dans notre poésie française lyrique, une veine trop peu abondante, trop tôt distraite et interrompue, mais très pure, très française, neuve, élevée et douce : il en est resté quatre ou cinq odes au plus, mais dignes d’Horace, qu’on y retrouve imité sans servilité et avec génie, et bien faites surtout pour enchanter et inspirer, comme cela a dû être, la jeunesse de La Fontaine. […] En tout, Malherbe, même dans sa maigreur et son peu d’étoffe, est toujours digne et a des moments d’une élégance parfaite et ravissante. […] Le docte et ingénieux Orelli combat cette critique : « Supprimez cette fin, dit-il, nous n’aurons plus qu’une amplification de rhétorique en l’honneur de la vie champêtre, célébrée sans motif et sans but, une description plus digne réellement de Vanière et de Gessner que d’Horace. » C’est pourtant ce que Racan a fait et ce qu’eût fait aussi Fénelon ; il a supprimé toute ironie, et comme, en le faisant, il était dans sa nature, il a retrouvé par ce côté non pas la supériorité, mais une originalité en face d’Horace. […] Il passe ses instants de loisir à polir durant des années des épigrammes de toutes sortes qu’il emprunte à Martial, à Catulle ou à de moins dignes, à correspondre avec les académiciens en renom, avec son voisin Balzac, « l’incomparable ermite de la Charente », avec les illustres de Paris, Chapelain, Gomberville et autres : il leur prodigue les louanges pour qu’ils les lui rendent ; il cherche à se rattacher à ceux qui vivent, et à ce qu’on dise de lui le moins possible feu Maynard. […] Il a couronné toutes les images d’Horace par la plus vaste image funèbre, et c’est ainsi encore que, dans cet art des imitations combinées et fondues au sein d’une inspiration vive, il s’est montré un digne élève de Malherbe.
Elle n’avait rien négligé pour le bien élever et le mettre dans le monde sur un pied digne de son nom. […] Je conçois, lui écrivait Jean-Jacques Rousseau (13 octobre 1738), les inquiétudes que vous donne le dangereux métier de M. votre fils, et tout ce que votre tendresse vous porte à faire pour lui donner un état digne de son nom ; mais j’espère que vous ne vous serez point ruinée pour le faire tuer : au contraire, vous le verrez vivre, prospérer, honorer vos soins, et vous payer au centuple de tous les soucis qu’il vous a coûtés. […] Vingt ans après l’avoir perdu, elle écrivait à M. de Meilhan, qui avait eu sur les amis je ne sais quelle pensée digne de La Rochefoucauld (et elle avait pu elle-même dans une occasion récente vérifier la quasi-justesse de cette pensée) : « Je me souvins alors de ce que vous avez écrit sur l’amitié, et je dis : Il a raison ; ensuite je tourne mes regards sur trente-deux ans d’amitié avec mon si cher oncle, et je dis : Il a tort. […] L’amour n’a jamais seulement effleuré son âme ; l’amitié suffit à sa sensibilité… La vie de cœur de Mme de Créqui, aux années actives, se résume en ces deux mots : Elle a aimé son digne oncle, et elle a souffert par son fils. […] Dans le Tacite traduit par d’Alembert, elle goûtait surtout les sentences. « S’il y a quelques maximes dignes de moi, envoyez-les, écrivait-elle à M. de Meilhan ; j’aime le genre, quoique très avili par la quantité d’ignares qui s’en mêlent. » Les ouvrages de ce dernier lui plaisent par le fond des sujets autant que par le tour.
. — Il y avait encore la marquise de Boufflers, la digne mère du léger et spirituel chevalier, l’amie du bon roi Stanislas et qui faisait les beaux jours de la petite Cour de Luné-ville à l’époque où Mme du Châtelet et Voltaire y étaient invités. […] Cet avant-dernier du nom se montrait bien en tout le digne héritier de sa race. […] Mais il y a mieux : un voyageur instruit et digne d’estime, Dutens, qui était allé à Véretz chez le duc et la duchesse d’Aiguillon, et qui, lorsqu’il était à Paris, était de la société du prince de Conti et du Temple, a raconté le fait pour en avoir été informé par des personnes de la maison : « Le jeune prince, dit-il, avait alors de treize à quatorze ans et montrait beaucoup d’inclination pour la chasse ; il avait enfin obtenu qu’il aurait un fusil, avec lequel il se préparait au coup d’essai qu’il devait faire le lendemain. […] Un autre témoin fort digne d’être écouté à son sujet, Dutens, un esprit sérieux et solide, le premier éditeur complet de Leibnitz, Anglais d’adoption et de jugement, qui avait visité les principales Cours d’Europe et qui avait en soi bien des termes de comparaison, a parlé de ce prince dans le même sens que le président Hénault : « M. le prince de Conti était l’un des plus aimables et des plus grands hommes de son siècle : il avait la taille parfaitement belle (il dérogeait par là notablement à la race des Conti, qui avait la bosse héréditaire), l’air noble et majestueux, les traits beaux et réguliers, la physionomie agréable et spirituelle, le regard fier ou doux, suivant l’occasion ; il parlait bien, avec une éloquence mâle et vive, s’exprimait sur tous les sujets avec beaucoup de chaleur et de force ; l’élévation de son âme, la fermeté de son caractère, son courage et sa capacité sont assez connus en Europe pour que je me dispense d’en parler ici. […] La dignité même de votre caractère, aux yeux du monde, reprend son lustre, puisque les hommes voient le juste prix que vous mettez à votre liberté, et que, quelles que soient les passions de jeunesse qui vous aient séduite, vous ne voulez plus maintenant faire le sacrifice de votre temps, là où vous n’êtes pas jugée digne de tout honneur25.
Le plus court et le plus sûr est de le renvoyer, car les Nouvelles ecclésiastiques 30 triompheront sur un homme de ce caractère… » J’ai cité cette lettre parce qu’elle me paraît caractériser à merveille, dans le ton paterne du bon octogénaire, le genre de libertinage, comme il disait, dont la muse de Gresset s’était rendue coupable ; c’est un petit libertinage léger et sans trop de fond, une gaieté de jeunesse très-émoustillée, et qui ne tire pas tellement à conséquence qu’elle ne fasse encore sourire le digne cardinal au moment où il la condamne : on sent que, s’il ne faut plus garder Gresset chez les jésuites, il n’est pas perdu sans ressources pour cela, et qu’il pourra revenir à résipiscence, comme y revint ce Vert-Vert lui-même qu’il a si gentiment chanté. […] Dans ce courant verbeux, redondant à l’oreille et plus gonflé que léger, on saisit au passage quelques vers dignes d’être retenus, mais aucun de ces traits dont le ton chaud gagne en vieillissant. […] M. de Cayrol, qui n’entend pas contradiction sur son héros, traite fort mal M. de Feletz, pour avoir osé mettre en doute l’agrément de Gresset en prose ; il me semble qu’au moment où il plaidait pour les agréments d’un autre, le digne biographe l’aurait pu faire en un style plus persuasif et mieux assorti ; pour moi, en ces matières d’urbanité, je suis accoutumé à reconnaître M. de Feletz comme un excellent juge. […] Confiné et, pour tout dire, confit dans les solennités provinciales, dans la coterie littéraire du lieu et dans les admirations bourgeoises, il put encore avoir de bons, d’aimables instants en petit comité, entre le digne évêque M. de la Motte, qui le dirigeait, et MM. de Chauvelin, gens d’esprit, dont l’un était intendant de Picardie ; mais il ne retrouva plus désormais, il ne posséda plus son talent ; il eût été incapable, à sa manière, d’un grand et vivant réveil, comme en eut Racine. […] — On lit dans une lettre de Maupertuis à Frédéric, vers la même date (29 octobre 1747) : « Votre Majesté me permet-elle de lui envoyer quelques vers de Gresset qui me paraissent dignes d’elle ?
Il reçut, à la fin de septembre 1761, une lettre non signée, dans laquelle on lui disait : « Vous saurez que Julie n’est point morte et qu’elle vit pour vous aimer ; cette Julie n’est pas moi ; vous le voyez bien à mon style : je ne suis tout au plus que sa cousine, ou plutôt son amie, autant que l’était Claire. » C’était l’amie de Mme de La Tour, qui faisait ici le rôle de Claire, et qui dénonçait à Jean-Jacques l’admiratrice nouvelle, digne elle-même d’être admirée. […] Mariée à un homme peu digne, et de qui elle finit par se séparer sur le conseil et du consentement de sa famille, elle n’abusa point de son malheur pour se croire le droit de se consoler. […] Je ne l’aime pas quand elle est en adoration devant son idole, quand elle lui parle solennellement de l’univers, quand à propos d’un imprimé de lui, qu’il lui fait parvenir par la petite poste, elle s’écrie : « J’ai soupiré de ne pouvoir pas prendre l’univers à témoin d’une distinction si flatteuse. » Elle me paraît peu aimable quand elle lui dit encore : « Vous avez le plus beau génie du siècle ; moi j’ai le meilleur cœur du monde… Vous êtes digne qu’on vous élève des statues ; moi je suis digne de vous en élever. » Tout cela est déclamatoire, comme une page même de Jean-Jacques. […] Quiconque ne se passionne pas pour moi, n’est pas digne de moi.
Bazin a paru digne de garder son rang après M. […] Mais les trois autres publications constituent une œuvre véritable, digne de trouver place dans toute bonne bibliothèque moderne, et elles assurent un rang distingué à M. […] Michaud, homme fin, aimable, de plus en plus spirituel en vieillissant, et dont on cite une foule de mots charmants, était le Voltaire de ce petit groupe qui comptait de jeunes noms, dignes déjà de s’associer avec le sien. […] Il explique plus qu’il ne peint, mais une pénétration ingénieuse éclaire tous ses récits : et dans l’art si difficile de l’histoire, l’étendue et la précision des recherches, l’intelligence exacte des grandes choses, et le talent d’écrire soutenu dans un long ouvrage, sont des qualités rares, dignes d’un succès durable. […] Voulant expliquer, par exemple, pourquoi le connétable de Luynes, pour le moins aussi digne d’être haï et méprisé que le maréchal d’Ancre, n’a pas encouru la même impopularité dans sa mémoire, il dira énergiquement : « C’est qu’il mourut au sein de sa grandeur, qui se continuait dans une famille riche et puissante ; et il faut toujours au vulgaire l’autorité d’un revers pour lui faire mépriser tout à fait les enfants de la fortune : il ne comprend guère que les dénouements. » Mais le plus souvent sa malice se recouvre, et plus d’un lecteur qui parcourrait le livre avec bonhomie pourrait la laisser échapper.
Mais la réponse que l’on peut faire à Saint-Simon, c’est Louis XIV qui va la lui faire, et dans des termes dignes de tous deux : À peine remarquons-nous, dit ce roi sensé, l’ordre admirable du monde, et le cours si réglé et si utile du soleil, jusqu’à ce que quelque dérèglement des saisons ou quelque désordre apparent dans la machine nous y fasse faire un peu plus de réflexion. […] « Tout homme qui est mal informé, remarque-t-il, ne peut s’empêcher de mal raisonner. » Et par une conclusion digne d’un moraliste, il ajoute finement : « Je crois que quiconque serait bien averti et bien persuadé de tout ce qui est, ne ferait jamais que ce qu’il doit. » Il trouve un plaisir vrai dans l’application et l’information même ; il jouit de débrouiller ce qui était obscur : J’ai déjà commencé, écrit-il le soir de l’arrestation de Fouquet, à goûter le plaisir qu’il y a de travailler soi-même aux finances, ayant, dans le peu d’application que j’y ai donné cette après-dînée, remarqué des choses importantes dans lesquelles je ne voyais goutte ; et l’on ne doit pas douter que je ne continue. […] De même, dans mainte réflexion morale qu’il entremêle à la politique, Louis XIV se montre un digne contemporain de Nicole et de Bourdaloue. […] La pensée religieuse qui s’y joint dans son esprit ajoute plutôt qu’elle n’ôte à ce que cette maxime royale a de politiquement remarquable ; et c’est en ces parties qu’on reconnaît chez lui le véritable homme de talent dans cet art difficile de régner : La sagesse, dit-il, veut qu’en certaines rencontres on donne beaucoup au hasard ; la raison elle-même conseille alors de suivre je ne sais quels mouvements ou instincts aveugles, au-dessus de la raison, et qui semblent venir du ciel, connus à tous les hommes, et plus dignes de considération en ceux qu’il a lui-même placés aux premiers rangs. […] Tout y est simple et digne de celui qui a dit : On remarque presque toujours quelque différence entre les lettres que nous nous donnons la peine d’écrire nous-mêmes et celles que nos secrétaires les plus habiles écrivent pour nous, découvrant en ces dernières je ne sais quoi de moins naturel, et l’inquiétude d’une plume qui craint éternellement d’en faire trop ou trop peu.
Cette modestie chez Frédéric est sincère ; on sent qu’il rougit, en effet, d’être si loué, si admiré par son ami ; il se rabat toujours, en lui parlant, à n’être qu’un individu marqué au coin de la plus commune humanité, digne de lui pourtant par le cœur, et capable d’apprécier un ami « qui fait revivre les temps sacrés d’Oreste et de Pylade, du bon Pirithoüs, du tendre Nisus… » À la manière et à l’accent dont tout cela est dit, on ne peut supposer que ce soient des lieux communs. […] Le Frédéric de Remusberg, même dans ses accès de métaphysique, ne se laissera donc pas emporter plus loin que ne lui permet le bon sens ; mais ce qui fait le cachet de cette correspondance de jeunesse, c’est l’absence de toute ironie, et, même dans le doute, un sérieux digne de ces sujets graves. […] La beauté des sentiments qu’on y voit exprimés réfléchit en partie sur Frédéric, qui savait si bien les comprendre, et qui fut digne, à cet âge, de les inspirer : Varsovie, 3 novembre 1740. […] Le roi vieilli, et lui-même bien près de sa tombe, lui répond par cette lettre qui, dans sa sobriété, devra paraître bonne et digne encore, mais qui éveille une impression de contraste dans l’esprit du lecteur pour qui les quarante-cinq années d’intervalle n’existent pas, et qui les franchit en un coup d’œil d’une page à l’autre : À mon conseiller de guerre et maître des postes de Suhm, à Dessau. […] Sur ce, je prie Dieu qu’il vous rétablisse encore une fois, et vous ait en sa sainte et digne garde.
On avait plusieurs fois puisé à ce dépôt et on en avait donné des extraits, un avant-goût ; aujourd’hui on va tout avoir, tout ce qui est essentiel du moins et digne d’être mis au jour ; on n’a négligé que les lettres qui ne se recommandaient à aucun titre. […] Ce sentiment-là, quel poète était plus digne de l’inspirer que Virgile ? […] Ce n’est pas les charmes de votre esprit que je ne suis pas digne d’apprécier, qui me l’ont fait désirer, ce sont les qualités de votre âme qui m’ont attachée à vous d’une façon invariable. […] Le parti que vous prenez est sans contredit le seul dont ils n’aient pas à se plaindre et le plus digne de vous ; mais ne gâtez pas un acte de vertu si grand et si pénible par un dépit déguisé et par un sentiment injuste envers un homme aussi digne de votre estime par sa conduite, que vous-même êtes, par la vôtre, digne de l’estime de tous les honnêtes gens. […] — Mais quand donc aurons-nous de Rousseau une édition tout à fait complète et digne de lui ?
Mais comme il est impossible à un fils de famille de prendre des engagements de cette force, c’est une proposition à se faire berner et très digne de risée. […] Je sais combien il y a de gentilshommes en Provence, qui, par leur naissance et par leur mérite, sont beaucoup plus dignes que moi d’obtenir cet honneur ; mais vous, mon cher Saint-Vincens, Monclar, le marquis de Vence, m’auriez peut-être aidé de votre recommandation, et cela m’aurait tenu lieu de toutes les qualités qui me manquent. […] Le Vauvenargues ferme et digne, tel qu’il se présentait à ses autres amis, même au milieu de ses plus affreuses gênes et de ses souffrances de tout genre, le Vauvenargues héros et stoïcien comme l’appelle Voltaire, celui que nous avaient légué la tradition et l’amitié enthousiaste, ne paraît point ici. […] Il fallait pour nous le produire, dès vingt-deux ans, sous ces aspects non moins vrais et plus généralement respectables, sa correspondance avec le marquis de Mirabeau, fort belle des deux parts, et tout à fait digne de leurs noms.
Le ministre Colbert le chargea de faire la liste des sçavans les plus dignes des bienfaits du roi. […] Il ajoutoit qu’il avoit une vengeance toute prête, & digne d’un homme de sa réputation. […] La guerre alors fut très-vive entre ce poëte religieux & les dignes rivaux des Théophile, des Des-Barrau, des Bardouville. […] & peu digne de lui, ce que Pascal avoit mis si vivement & si plaisamment en prose dans les Provinciales.
— La Presse annonce aussi un Mémorial de Sainte-Hélène refait par le général Montholon : on ajoute que c’est Alexandre Dumas qui prêtera sa plume, pour plus d’authenticité, aux souvenirs du digne général ; et « la Presse, dit le Globe, s’extasiait l’autre jour sur le style de ce dernier. […] De loin, à nous humbles esprits, il nous semble que, malgré tout, la partie n’est point perdue pour la cause des Lettres honnêtes et sévères, et que ce drapeau si bruyamment déployé par des spéculateurs intrépides peut au contraire servir de signal à tous les esprits modérés et sains, à tous les talents restés sérieux et dignes, pour s’unir, se serrer en groupe, et pour résister à un coup de main qui tend à changer ainsi de fond en comble le régime et les conditions vraies de la littérature.
Je ferois grande injure à mes Vers & à moi, Si, en parlant de l’or, je ne parlois de toi, Qui as le nom doré, mon Dorat ; car cette Hymne, De qui les vers sont d’or, d’un autre homme n’est digne Que toi, dont le nom, la Muse & le parler Semblent l’or que ton fleuve, Orence, fait couler. […] Ses Tragédies même, malgré leurs disgraces, offrent plusieurs traits dignes d’un Eleve de Melpomene.
Quoique la présomption soit familiere aux peintres presque autant qu’aux poëtes, Carle Maratte, lui-même ne s’est pas crû digne de mêler son pinceau avec celui de Raphaël. […] Carle Maratte aïant été choisi comme le premier peintre de Rome pour mettre la main au plafond dont je parle, et sur lequel Raphaël a représenté l’histoire de Psyché, ce galant homme n’y voulut rien retoucher qu’au pastel, afin, dit-il, que s’il se trouve un jour quelqu’un plus digne que moi d’associer son pinceau avec celui de Raphaël, il puisse effacer mon ouvrage pour y substituer le sien.
Si l’emploi de tant de temps, de génie, d’artifices, avait eu un plus juste et plus digne objet, dans quel calme heureux et consolant tu verrais aujourd’hui s’écouler ta vie ! […] « Ainsi, lorsque le printemps, succédant aux glaces de l’hiver, rend à la terre sa brillante parure, on voit le serpent, quittant son ancienne dépouille, étaler avec joie sa robe éclatante aux yeux de l’astre du jour ; « Ainsi Landino, ce digne émule de la gloire des anciens, t’a rendu ta grâce et les doux accords de ta lyre ; tel on te vit sous les frais ombrages de Tibur faire résonner les cordes de ton luth harmonieux. […] Ses connaissances profondes dans toutes les parties de la philosophie étaient encore étendues et fortifiées par l’avantage de posséder plusieurs langues, et par l’instruction qu’il avait sur toutes les sciences dignes d’estime ; en sorte que l’on peut dire qu’il n’y a point d’éloges qui ne soient au-dessous de son mérite. » Il mourut jeune. […] Elle est extrêmement dévouée à vos intérêts et parle de vous avec la plus grande estime : elle m’a avoué même qu’elle avait le projet d’aller vous voir à Florence ; ainsi préparez-vous à la recevoir d’une manière digne de son mérite. » Mais Cassandra s’était mariée, comme la Laure de Pétrarque, et avait déjà plusieurs enfants. […] Que de fois n’ai-je pas erré sur les traces de ce palais avec un digne successeur de Laurent, le dernier grand-duc de Toscane, aujourd’hui mort en exil, en Bohême !
D’ailleurs Balzac est recommandé par un jugement de Descartes, d’autant plus digne de considération que l’éloge n’y paraît être qu’un sentiment juste du mérite de cet auteur, légèrement exagéré par une disposition bienveillante1. […] Malherbe et Balzac sont dignes d’admiration, pour avoir formé la foule, et l’avoir comme préparée, celui-ci, aux sublimes beautés de Corneille ; celui-là, à des écrits en prose plus substantiels et plus décisifs que les siens, par exemple ceux de Descartes. […] Peut-être le cardinal l’en trouva-t-il trop digne au temps de son succès, et trop peu digne le jour où ce succès diminua, et où la santé de Balzac cessa de compter parmi les événements qui occupaient le public. […] On luisait un tort à Balzac de l’un de ses principaux mérites : car si cet auteur est digne de louange, c’est surtout pour la façon dont il imite les anciens. […] Il aima mieux le plaisir que les affaires, et la vogue d’un bel esprit que la considération d’un moraliste ; et il passa de mode comme ces galands de ruban d’Angleterre, qu’il offrait à Mlle de Rambouillet, avec ces billets d’envoi si musqués et si peu dignes d’un homme.
il ne faudrait pas, par exemple, être trop professeur et maître de conférences à l’École normale, il ne faudrait pas être trop digne d’un prix à l’Académie française, et surtout l’avoir remporté. […] Jamais personne, en son temps, ne fut plus digne de porter la cigale d’or dans ses cheveux — Mais parce qu’il est cela, — incontestablement, — est-ce une raison pour que la Critique n’ose pas mesurer son niveau et porter sur lui le regard qu’elle y porterait si cette œuvre paraissait aujourd’hui et fût toute neuve dans la gloire ? […] Pour lui comme pour nous, Thucydide est un Grec très digne du temps de Périclès, mais, pour nous, c’est justement parce qu’il est un Grec de ce temps-là qu’il n’est pas le plus grand des historiens, — même de la Grèce, car dans la Grèce il faut distinguer les époques et les races.
Elles n’avaient jamais eu qu’une visée, et n’avaient poursuivi, sous des formes diverses modifiées par le temps et par les circonstances, que l’éternel but de tous les pouvoirs dignes de ce nom. […] Obligé, par le sujet même de son livre, de parler d’hommes qui n’eurent jamais nulle part, à l’exception de quatre ou cinq d’entre eux peut-être, ce haut pavé historique qui agit tant et tout d’abord sur l’imagination du lecteur, il n’a pas, selon nous, assez contenu son récit entre ces quelques hommes vraiment dignes du regard de l’histoire, et il est tombé dans les infiniment petits d’une longue suite de biographies. […] Aussi, nous le disons en finissant, et c’est par là que nous voulons terminer, quoique nous appréciions très bien ce qu’il y eut de cruel et de vraiment digne de regret dans nos pertes, à cette époque de notre histoire, une si fastidieuse exactitude finit par manquer entièrement l’effet qu’un récit moins traîné dans le terre-à-terre des détails devait produire, même sur les esprits les moins enclins à s’attrister.
Ce qui rend Rodrigue si digne d’attention, est-ce le péril qu’il court en combattant le comte, les Maures ou don Sanche ? […] On croirait d’abord que le courage serait d’autant plus digne d’admiration, qu’il se résout à un plus grand mal pour un plus petit avantage ; mais il n’en est pas ainsi. […] L’intérêt de sa gloire, et l’intérêt de sa tendresse sont dignes de se balancer mutuellement. […] Il n’y a presque pas une de ces variations qui ne forme un tableau, et qui ne soit digne du pinceau d’un Caravage. […] Les malheurs épouvantables tomberont sur un homme, que j’en serai peu touché, si vous ne me l’avez pas montré d’abord digne de ma compassion, et de ma pitié.
M. d’Argenson désirait depuis longtemps savoir avec précision vers quoi on le voulait diriger, afin de s’y préparer et de se rendre digne de l’emploi par l’étude approfondie et le travail : il était de cette nature d’esprits probes qui n’aiment à traiter et à raisonner des choses qu’après s’en être instruits à fond. […] Il y a de lui une page bien naturelle, où il pense tout haut, et qui est toute l’histoire du Pot au lait : Le 28 avril 1737. — J’ai été nommé par le roi ambassadeur en Portugal ; tout mon dessein, en acceptant pareil emploi, a été de me rendre digne et de me mettre à portée des places du ministère, où mon ancienneté au conseil pouvait naturellement m’élever dès que je ne démériterais pas, à plus forte raison si je montrais du mérite et du courage. […] du seul archevêque de Bordeaux, mon oncle, lequel était un petit esprit, taquin et triste, grand économe, homme à vues bourgeoises, aimant sa maison avec orgueil, mais sans générosité, plein de lui et vide des autres, dur et sec, haïssable, et échappant seulement à la haine publique par son économie ; mais mon père et mes aïeux ont toujours passé dans leur temps pour gens francs, nobles, courageux et dignes de l’ancienne Rome, surtout de nulle intrigue à la Cour ; aimant la vie de province, ce qui est la vraie vie de la province ; riches ou pauvres, et cependant s’y faisant d’abord distinguer par les lumières de leur esprit et la bonté de leur cœur. […] Un jour (mai 1741), il parla tout haut de lui avec humeur et conclut en ces mots : « Enfin, pour tout dire, c’est le digne ami de Voltaire, et Voltaire son digne ami. » En février 1741, M. d’Argenson succéda à son cadet dans la place de chancelier du duc d’Orléans, et cette succession peu expliquée parut singulière dans le monde.
Il ne faut pas demander au récit du général Pelleport, son ami et son collègue comme colonel pendant la retraite de Russie, et qui, comme lui, eut l’honneur d’être à l’extrême arrière-garde de l’arrière-garde, il ne faut pas lui demander, dirai-je tout d’abord, les mêmes qualités de correction, d’élégance, et d’un pathétique par moments presque virgilien ; mais la vérité, la candeur, un ton de sûreté et de probité dans les moindres circonstances, le scrupule, la crainte de trop dire jointe à une bravoure si entière et si intrépide, un bon sens pratique et des jugements à peine exprimés qui comptent d’autant plus qu’ils ne portent jamais que sur ce que le narrateur a su par lui-même, tout cela compense bien pour le lecteur ce qui est inachevé littérairement, et nous dessine dans l’esprit une figure de plus d’un bien digne et bien estimable guerrier. […] Pelleport avait pour principe que, quand on se sent digne, il faut obtenir sans solliciter. […] Général de brigade en 1813, Pelleport fait les campagnes de Saxe et de France dans le corps de Marmont ; ses jugements, quoique toujours prudents et sobres, font sentir à quoi tint surtout l’issue fatale dans cette lutte héroïque, dès l’abord si disproportionnée. « L’armée fut toujours digne d’elle-même, mais elle était trop jeune. » — Et puis, à propos des graves résolutions militaires qui signalèrent le milieu de cette campagne, après la bataille de Dresde : « On pensait généralement que Napoléon se déciderait enfin à abandonner la ligne de l’Elbe et à se rapprocher du Rhin : les vieux de l’armée ne furent pas écoutés. » Il est blessé à Leipsick ; il est blessé à la défense du pont de Meaux ; il l’est surtout grièvement sur les hauteurs de Paris, à la butte Saint-Chaumont. Ici laissons-le parler comme nous avons fait si volontiers jusqu’à présent ; il n’est point d’analyse qui puisse équivaloir aux propres paroles, à la fois si contenues et si dignes de réflexion, d’un si brave et si loyal témoin : Le général Compans se retirait sur la butte de Chaumont après avoir vaillamment défendu le pré Saint-Gervais, et la cavalerie et l’artillerie des deux corps d’armée se surpassaient par la vivacité de leurs charges et de leur feu. […] Ce dernier combat peint bien la campagne de France tout entière, et en est le digne couronnement.
Elle apprivoisait cette chèvre sauvage, elle changeait en fleur cette nature d’ortie hérissée, et ce doux sortilège s’accomplissait, au son de la flûte bucolique, dans un paysage digne d’encadrer les magies amoureuses de la Symétha de Théocrite. […] Cependant, on nous assure que Frantz Wagner est un musicien de génie ; il a composé, entre autres merveilles, une symphonie digne de Beethoven. […] Mais, lorsqu’un digne objet a pu nous enflammer, Qui le cède est un lâche et ne sait pas aimer. […] — à Frantz Wagner, le grand artiste qu’il a découvert et auquel il veut faire des loisirs dignes de son génie ! […] Voilà ce faquin qui se prend à rougir de sa fiancée maintenant, et qui se demande si elle est digne d’entrer dans sa baronnie d’occasion.
Le Recueil de ses Pieces, fût-il réduit à l’Avare, à l’Ecole des Maris, au Tartuffe, au Misanthrope, aux Femmes savantes, il n’en seroit pas moins digne de toute la réputation dont il jouit. […] S’il leur paroît plus facile de travailler au hasard & sans regle, de se conformer au goût d’une multitude abusée par des chimeres dont on la repaît ; ils ne peuvent s’attendre qu’à voir leur lauriers éphémeres se flétrir, se dessécher, & à devenir eux-mêmes le jouet d’un digne Successeur de Moliere, dont le plus utile essai seroit de venger Thalie des fades hommages qu’ils lui rendent.
Tous les hommes que nous trouvons dignes de notre estime nous interessent à leurs agitations comme à leurs malheurs, mais nous sommes sensibles principalement aux inquietudes comme aux afflictions de ceux qui nous ressemblent par leurs passions. […] Par exemple, Achile, impatient de partir pour aller faire le siege de Troïe, attire bien l’attention de tout le monde, mais il interesse bien davantage à sa destinée un jeune homme avide de la gloire militaire, qu’un homme dont l’ambition est de se rendre le maître de soi-même pour devenir digne de commander aux autres.
Ensuite le roi des rois, se regardant comme outragé, croit rétablir son honneur en déployant une justice digne de la sagesse qu’il a montrée. […] Ainsi Achille reçoit dans sa tente l’infortuné Priam, qui est venu seul pendant la nuit à travers le camp des Grecs, pour racheter le cadavre d’Hector ; il l’admet à sa table, et pour un mot que lui arrache le regret d’avoir perdu un si digne fils, Achille oublie les saintes lois de l’hospitalité, les droits d’une confiance généreuse, le respect dû à l’âge et au malheur ; et dans le transport d’une fureur aveugle, il menace le vieillard de lui arracher la vie.
Avant ces trois hommes de lettres incomparables il n’y a presque rien de digne d’attention dans la littérature latine, excepté Lucrèce ; après eux il n’y a plus rien ; aussi la décadence commence. […] On voit battre dans chaque vers le cœur d’un fils digne d’avoir un tel père. […] Cicéron fut jugé digne de la mort ; il la reçut en héros et en philosophe, certain de la vengeance du ciel et de la terre. […] Après avoir épuisé à Rome ce goût immoral et immodéré des courtisanes, nous verrons bientôt dans ses odes qu’il avait cherché à s’attacher par un lien plus durable une jeune et belle esclave affranchie, digne d’un attachement sérieux. […] « Un simple particulier dans l’aisance, dit Suétone, trouverait à peine digne de lui le mobilier, les lits, les tables d’Auguste.
Il n’est rien de tel pour fortifier son jugement et accroître son expérience que d’écouter les esprits supérieurs et de recueillir leurs témoignages quand ils ne s’expriment pas en vue de la foule et pour amuser la galerie, mais quand ils parlent avec netteté et simplicité pour se laisser voir tels qu’ils sont à ceux qui sont dignes de les bien voir. […] « En voici deux exemples frappants : « Pierre III. — Catherine II. » A part ce début et comme ce frontispice digne d’Aristote, de Polybe ou de Machiavel, il n’y a rien de dogmatique ni de raisonné dans le récit, qui porte tout entier sur des faits, des circonstances positives, et dans lesquelles les réflexions même n’interviennent que sobrement. […] Elle ajoute que si elle avait rencontré un époux tant soit peu digne de tendresse, elle était femme à s’y attacher ; mais que faire avec un mari qui l’était si peu, qui cumulait les grossièretés et les ridicules, qui la prenait pour confidente de ses chétives infidélités ; n’ayant rien de plus pressé que d’entretenir sa femme de ses velléités amoureuses pour d’autres quelle, et cela dès la seconde semaine après les noces ? […] Ce qu’il faut dire, c’est qu’aussitôt élevée à ce rang de grande-duchesse, elle en parut hautement digne et sut se concilier tous les cœurs par sa conduite et son attention aux apparences, par sa tournure, par sa grâce, son air de douceur et de bonté qui recouvrait un grand art de séduction, par sa gaieté qui ne permettait pas de soupçonner tant de prudence.
En attendant, la guerre est un de ces grands faits historiques qu’il faut reconnaître et savoir étudier dans le passé : du moment qu’elle cesse d’être une pure dévastation et un brigandage, c’est un art, une science, et digne, à ce titre, de toute l’attention des esprits éclairés. […] Pendant ces travaux où il faisait preuve d’habileté pratique et de connaissance des détails, il avait l’œil aux grands événements qui se déroulaient et qu’il considérait de haut et d’ensemble comme d’un belvédère, ou mieux encore comme du centre d’une fournaise ; car la Suisse, en ces années d’occupation et de déchirement, devenue un champ de bataille dans toute sa partie orientale, offrait « l’aspect d’une mer enflammée. » Jomini y suivit de près les fluctuations de la lutte, les habiles manœuvres de Masséna pendant les sept mois d’activité de cette campagne couronnée par la victoire de Zurich, les efforts combinés de ses dignes compagnons d’armes, les Dessolle, les Soult, les Loison, les Lecourbe : ce dernier surtout « qui avait porté l’art de la guerre de montagne à un degré de perfection qu’on n’avait point atteint avant lui. » Mais, s’il estimait à leur valeur les opérations militaires, il ne jugeait pas moins les fautes politiques, et ce qu’il y avait de souverainement malhabile et coupable au Directoire à avoir voulu forcer la nature des choses, à avoir prétendu imposer par décret une unité factice à treize républiques fédérées, à s’être aliéné une nation amie, à avoir fait d’un pays neutre, et voué par sa configuration à la neutralité, une place d’armes, une base d’opérations agressives, une grande route ouverte aux invasions. […] Dans les combats vigoureux qui décidèrent le résultat, et où Ney mettant au défi la jactance de Murat se couvrit de gloire, Jomini par sa bravoure personnelle montra qu’il était digne d’un tel chef, et non pas seulement un militaire de chambre et de cabinet. […] Frédéric le Grand, par ses actions glorieuses, par une série d’exemples et d’opérations d’un ensemble et d’un ordre supérieurs à ce qui avait précédé, vint renouveler la matière des raisonnements et ouvrit le champ de la théorie : il suscita de nouveaux historiens et des critiques dignes de lui.
Elle aimait les femmes poètes, celles qui sont dignes de ce nom ; elle les louait volontiers, elle les préférait à elle, et cela non pas seulement tout haut, mais aussi tout bas, sincèrement. Quand la belle et brillante Delphine, Mme Émile de Girardin, fut enlevée avant l’heure, Mme Desbordes-Valmore, qui l’avait vue commencer et qui s’attendait si peu à la voir finir, eut un hymne de deuil digne de son noble objet, et dans lequel cependant elle prête un peu, je le crois, de sa mélancolie à l’éblouissante muse disparue ; mais le mouvement est heureux, le ton général est juste et d’une belle largeur : La mort vient de frapper les plus beaux yeux du monde : Nous ne les verrons plus qu’en saluant les cieux. […] C’est à l’un de ces prisonniers, à un ardent apôtre d’une réformation future, qu’un jour, en des vers qu’elle lui adressait, elle montrait, pour le consoler, l’image du Christ, et rencontrait ce vers sublime, digne d’être à jamais retenu : Lui dont les bras cloués ont brisé tant de fers !
Telle qu’elle se peint dans le récit de l’historien, la seconde moitié de la Convention ne dépare pas la première, elle en est digne, et quoique le jugement dans notre esprit ne soit pas pleinement un éloge, c’est encore moins une injure. […] Au reste, leurs morts sanglantes, qui viennent les dernières après tant de morts illustres, sont dignes de figurer avec elles sur les mêmes tables de proscription, et de clore ces listes funèbres aussi déplorables que glorieuses. […] Mais ils appartenaient à un parti extrême, et un tel parti n’a jamais deux règnes dans une même Révolution : une fois tombé, il ne se relève pas ; il est maudit ; et ceux qui meurent à son service, fussent-ils dignes de regrets, ne peuvent espérer pour eux pitié et réparation qu’après un long temps et auprès de la postérité.
Il y a du talent dans ce livre passionné, entêté, ulcéré, aveugle de parti pris et gardé… Mais le fond de cela n’est vraiment pas digne de la forme. […] Un badinage de cette force, introduit, sans rire, dans l’histoire, mériterait d’être relevé comme une impudence digne de John Falstaff, si Pelletan, maladroit au pamphlet, n’en ayant ni le génie, ni la mesure qui le rend dangereux, ne s’enfilait lui-même sur cette plaisanterie effrontée ! […] Triste gloire, du reste, que de pocher une biographie avec la vie la plus digne, la plus fière et la plus translucide de pureté, pour la servir à un public républicain et libre-penseur !
On voit que l’opinion qui a fait de l’ignorance, en Europe, un titre de noblesse, et a défendu aux hommes qui ont ou croient avoir un nom, de l’avilir par l’art de penser et d’écrire ; opinion introduite par les sauvages du nord qui ne savaient que détruire, consacrée par des seigneurs de châtellenies barbares, qui ne savaient qu’opprimer, combattre et chasser ; opinion bien digne en effet de ces deux époques, et qui, au bout de quatorze siècles, n’est pas encore éteinte, et subsiste même aujourd’hui beaucoup plus qu’on ne croit, n’était pas encore née sur la terre. […] S’il ne trouve pas un homme, dans son siècle, digne de lui commander, il va demander un maître aux siècles passés : il lui dit, règne sur moi : et aussitôt se prosterne et se courbe aux pieds de sa statue. […] Ce morceau, où la philosophie se joint à l’éloquence, est le tableau des qualités que doit avoir un prince, pour être digne de commander aux hommes.
L’évêque de Nîmes, M. de Becdelièvre, digne successeur de Fléchier par ses vertus conciliantes, venait de mourir, regretté des protestants non moins que des catholiques. […] Ce fut un beau jour pour lui que celui où la liberté des cultes fut proclamée ; ce jour-là, il parla longuement et gravement ; ses paroles furent dignes et contenues ; elles devaient retentir bien haut dans sa bouche, et y recevoir une signification bien profonde pour qui savait que le malheur avait passé par là.
Le roi avait légitimé les enfants qu’il avait de madame de La Vallière ; madame Scarron était donc fondée à prévoir le même sort pour ceux de madame de Montespan ; et elle s’était mis dans l’esprit que les fils de Louis XIV, confiés à ses soins, ne devaient pas être les tourments de la France comme l’avaient été les bâtards de Henri IV, et qu’elle devait rendre ses élèves dignes de leur haute destinée, par leur moralité et leur esprit. […] Madame de Sévigné écrivait à sa fille, le 6 décembre 1671 : « Madame de Richelieu est assez bien placée ; si madame de Scarron y a contribué, elle est digne d’envie.
Avant lui, la barbarie régnoit sur le Théatre ; car les Pieces de Hardi, de Jodelle, de Boisrobert & de Mairet n’étoient dignes que des treteaux. […] Il est certain qu’il n’eut jamais d’autre guide que son propre génie, qui, créé pour le sublime, entraîné par cette vigueur, cette énergie & cette fécondité qui lui étoient si naturelles, le portoit de lui-même vers les plus grands objets, & la Tragédie seule pouvoit développer ses richesses, en lui présentant des sujets dignes de son activité.
……………………………………………… Contemple donc Héli, le chef du tabernacle, Que Dieu fit de son peuple et le juge et l’oracle : Son zèle à sa patrie eût pu servir d’appui, S’il n’eût produit deux fils trop peu dignes de lui. […] C’est un sophisme digne de la dureté de notre siècle, d’avoir avancé que les bons ouvrages se font dans le malheur : il n’est pas vrai qu’on puisse bien écrire quand on souffre.
En effet, l’examen que lui fît subir un maire de cette époque devait avoir son côté plaisant, et sous plus d’un aspect cette scène était digne des pinceaux de Thalie. […] Il était digne du commentateur de Corneille de négliger les broutilles de l’art et de puiser ses observations dans une source plus noble. […] Il était digne de Corneille d’épurer la scène, et d’élever une affection honnête et légitime au-dessus d’une passion aveugle et funeste. […] Le commentateur de Corneille ne parle de saint Polyeucte que comme d’un fou : il ne voit que Sévère et Pauline qui soient dignes de son attention. […] Dans la Mort de Pompée, par exemple, l’amour de César et de Cléopâtre est-il digne de la tragédie ?
Il lui fallait un traducteur digne de lui. […] Philippe était digne par son génie et par son caractère d’être le père d’Alexandre. […] Il était digne d’avoir écrit cette lettre, comme Aristote était digne de l’avoir reçue. […] Quoique cette cérémonie ne passât pas à leurs yeux pour une marque d’idolâtrie, elle n’était pas moins étrangère aux mœurs des Macédoniens, et devait nécessairement leur paraître un acte humiliant et digne de vils esclaves. […] S’il était Macédonien, j’aurais fait entrer avec toi un maître digne de t’avoir pour disciple ; mais, étant Olynthien, il n’a pas aujourd’hui un pareil droit. » Ptolémée assurait que Callisthène avait été appliqué à la torture, ensuite mis en croix.
André Chénier s’y poussa plus avant qu’aucun, et, par la vigueur des idées comme par celle du pinceau, il était bien digne de produire un vrai poëme didactique dans le grand sens. […] Un vase corrompu aigrit la plus douce liqueur. » « L’étude du cœur de l’homme est notre plus digne étude : Assis au centre obscur de cette forêt sombre Qui fuit et se partage en des routes sans nombre, Chacune autour de nous s’ouvre : et de toute part Nous y pouvons au loin plonger un long regard. » Belle image que celle du philosophe ainsi dans l’ombre, au carrefour du labyrinthe, comprenant tout, immobile ! […] Arts dignes de nos yeux ! pompe et magnificence Dignes de notre liberté, Dignes des vils tyrans qui dévorent la France, Dignes de l’atroce démence Du stupide David qu’autrefois j’ai chanté !
Je crois, je suis certain même, que l’auteur de Chérie, si fier, si noble, si digne, si pointilleux, sur le point d’honneur littéraire, aurait jeté au feu son testament, s’il avait prévu la façon dont ses volontés seraient respectées. […] Le succès récent de Marc Elder montre que l’Académie Goncourt rend parfois des arrêts équilibrés, raisonnables, et dignes d’approbation. […] On peut souhaiter la suppression des prix littéraires, nuisibles également pour ceux qui les obtiennent et pour ceux qui n’en sont pas jugés dignes ; mais c’est là un vœu tout platonique. […] Cela fera de plus dignes hommes et de plus beaux livres que tous les prix Goncourt. […] Le plus malin l’emporte sur le plus digne, c’est la dure loi de la dure vie.
Nous avons jugé comme lui qu’elle n’était pas digne de paroître telle qu’il l’a laissée, à côté des compositions immortelles qui lui ont fait un si grand nom, et nous avons respecté ses intentions en ne la donnant que par extrait, etc. » Et en effet, tout à la fin du tome X de ses œuvres, on reléguait un très-maigre extrait de l’ouvrage. […] Nous connaissons à fond M. de Novion, le digne président, qui est si galant auprès de mesdames ses filles, et qui oublie parfois un peu trop sa gravité pour leur donner le plaisir de la comédie. […] Nau est le bras droit, cette digne mère qui est venue là pour tenir le ménage de monsieur son fils, occupe dans la relation toute la place qu’elle peut ambitionner ; elle préside à sa façon les Grands-Jours parmi les dames de la ville, les organise en assemblées de charité, les réglemente, les gronde, les fait taire, s’ingère dans les brouilleries des couvents, et prétend réformer jusqu’aux Ursulines.
Et qu’une critique même équitable et modérée de cette triste pièce, si elle eût paru le lendemain de la représentation, eût à bon droit été jugée chétive, misérable, et digne à peine d’un Fréron ou d’un Clément ! […] Tout en admirant chez Walter Scott un génie rare que nous avons assez exalté, nous ne prétendons pas le placer encore parmi ces deux ou trois privilégiés de chaque siècle, qui méritent d’être abordés jusqu’à leur dernier jour avec tant d’égards, de ménagements, de complaisance, et envers qui l’on a déjà les sentiments graves de la postérité confondus avec ce je ne sais quoi d’affectueux et de reconnaissant qu’inspire un grand homme aux contemporains dignes de l’entendre. […] En effet, « Nous tenons d’un témoin oculaire digne de confiance que, pendant l’attaque de la Bastille, une voix cria au milieu de la foule que le régiment de Royal-Allemand s’approchait.
Dieu construit ce monde comme le roi construit Versailles ; c’est son palais ; il faut que l’édifice, par son ampleur, sa régularité et sa magnificence, soit digne de son architecte ; à ce but suprême tout le reste est subordonné ; tant pis pour les pierres froissées ou taillées, pour les arbres émondés et transplantés, pour les eaux contraintes et emprisonnées. […] Il est comme l’autre enchaîné par sa qualité ; il ne peut agir que selon sa nature ; il faut que ce monde son ouvrage soit digne de lui, qu’il soit le plus parfait possible147, et régi par les plus belles des lois148. […] Il y trouve des figures sublimes, dignes d’Homère, quand il montre « les Parques blêmes dont la main se joue également des jours du vieillard et de ceux du jeune homme. » Il ne peint pas les dieux vaguement, avec des souvenirs de classe.
On apprécie surtout mieux ce constant et noble effort qui porte un si vigoureux talent à se fortifier, à s’étendre, à se perfectionner sans cesse, à posséder de plus en plus toute cette matière immense qu’il dispose avec ordre, développement et grandeur, et qui lui sert à bâtir un monument le plus digne du modèle pour la majesté. […] Il est un autre ordre de savants aussi positifs et plus philosophes (Cuvier le premier), qui semblent au contraire avoir vu chez Buffon tout ce qui est digne d’être loué, avoir fait la part des progrès réels que lui doit la science, du genre de création qu’il y a porté, des divisions capitales qu’il a entrevues. […] quelques lignes écrites par Goethe peu de mois avant que s’éteignît cette lumière de l’Allemagne, et, dans la patrie même de Buffon, quelques pages de mon père, tels étaient encore, il y a quelques années, les seuls hommages dignes de lui que la science eût rendus au naturaliste et au philosophe. […] Je considérais l’autre jour, au musée du Louvre, le buste de Buffon, par Augustin Pajou : il y est représenté déjà vieux ; le contour de l’œil, les tempes ridées et un peu amaigries le disent : mais c’est une belle tête, digne, haute, noblement portée.
Le bonheur d’un être (grand principe, selon Bossuet) ne doit jamais se distinguer de la perfection de cet être ; le vrai bonheur digne de ce nom est l’état où l’être est le plus selon sa nature, où il est le plus lui-même, dans sa plénitude et dans le contentement de ses intimes désirs. […] festin étrange selon le siècle, mais que Jésus a jugé digne de son goût ! […] Louis XIV, lorsqu’il entendit pour la première fois Bossuet, le goûta beaucoup et eut envers lui un procédé charmant, bien digne d’un jeune roi qui a encore sa mère : il fit écrire au père de Bossuet, à Metz, pour le féliciter d’avoir un tel fils. […] À la vérité, chrétiens, ils sont dignes d’être distingués des autres, et ils font un des plus beaux ornements du monde.
L’Histoire universelle de d’Aubigné, dont Henri IV est le centre et le pivot, avait été entreprise ou projetée par le conseil de ce roi, qui, ce semble, n’aurait pas été fâché d’avoir pour historiens, d’une part le calviniste d’Aubigné, et d’autre part l’ancien ligueur Jeannin : l’un, racontant plutôt les faits de guerre et de parti, l’autre, exposant les choses d’État et de conseil ; mais bientôt Henri IV, soit qu’un jésuite, le père Cotton, lui eut fait sentir les inconvénients ainsi que d’Aubigné le donne à entendre, soit qu’il se méfiât assez par lui-même de cette satirique langue de d’Aubigné, comme il l’appelait, Henri IV insista peu sur sa recommandation première et sur les encouragements qu’il avait promis ; d’Aubigné attendit à la mort de ce roi pour se remettre à l’œuvre, et il s’y remit, on le doit reconnaître, dans un esprit digne d’une aussi généreuse entreprise. […] Parlant d’un brave tué à l’une des premières affaires, en 1589 : « Le roi de Navarre, dit-il, perdit à ce siège le mestre de camp Cherbonnières, esprit et cœur ferré, homme digne des guerres civiles… » D’Aubigné dit cela comme on dirait en d’autres temps : « homme digne de servir contre les ennemis de la France ». […] Je vous somme, au nom de Dieu, de ne nous frauder plus, ou je serai témoin contre vous en son Jugement. » Religion égarée, fanatisme opiniâtre sans doute, et sourd aux raisons de prudence et d’humaine sagesse ; appel, sous le nom du Christ, à la vengeance du sang par le sang ; générosité pourtant et grandeur d’âme, comme il en est en tout sacrifice absolu de soi : c’est ce qui respire en cette scène nocturne, digne des plus grands peintres, et d’Aubigné, qui en a senti toute l’émotion, nous l’a conservée et, on peut dire, nous l’a faite de manière à n’être point surpassé.
Le nom d’écrivains proprement dits continue d’appartenir à ceux qui de propos délibéré choisissent un sujet, s’y appliquent avec art, savent exprimer même ce qu’ils n’ont pas vu, ce qu’ils conçoivent seulement ou ce qu’ils étudient, se mettent à la place des autres et en revêtent le rôle, font de leur plume et de leur talent ce qu’ils veulent : heureux s’ils n’en veulent faire que ce qui est le mieux et s’ils ne perdent pas de vue ce beau mot digne des temps de Pope ou d’Horace : « Le chef-d’œuvre de la nature est de bien écrire. » Les autres, les hommes d’action, qui traitent de leurs affaires, ne sont écrivains que d’occasion et par nécessité ; ils écrivent comme ils peuvent et comme cela leur vient ; ils ont leurs bonnes fortunes. […] Certes sa fidélité est un miracle. » (25 mai 1586.) — Un peu plus tard il lui offre un cadeau digne de l’antique idylle : « J’ai deux petits sangliers privés et deux faons de biche ; mandez-moi si les voulez. » La belle Corisandre, on le voit par les écrits satiriques du temps, aimait cet attirail et cet entourage de singes, de chiens, de bouffons, d’animaux privés de toute espèce, et, au grand scandale des huguenots puritains, elle allait même dans cet équipage à la messe. […] Si je ne m’en suis rendu digne, j’y ai fait tout ce que j’ai pu. […] Il ne rencontra rien de cela dans Marie de Médicis ; il croyait l’avoir trouvé ou à peu près dans Gabrielle, qui n’était digne d’un tel choix et d’une telle idée qu’à demi ; il l’aurait moins bien trouvé chez la noble Corisandre, dont la beauté un peu fière se fanait déjà, et dont l’esprit tournait à l’aigre et au bizarre.
Dans la seconde moitié du xviie siècle on se croyait dans un grand siècle, et on avait raison ; on se croyait dans un siècle régulateur et digne de servir à jamais de modèle aux autres époques, et en cela on s’attribuait un peu plus qu’on ne devait. […] Le portrait extérieur que l’on donne de l’homme, et qui va si aisément à faire grimacer ce gai visage, n’offre pourtant pas une juste idée de l’élégance et de l’esprit qu’il y avait souvent dans ces vers de Santeul, dignes d’une dernière anthologie latine. […] Pellisson qui, depuis qu’il s’était converti, avait beaucoup de zèle, et qui de plus avait titre et qualité spéciale d’économe de Cluny, engagea un jour Santeul à mieux employer son talent, et à faire des chants religieux, des hymnes qui lui seraient une occupation également lucrative et plus décente, plus digne d’un religieux : « Laissez là, lui disait-il, tous ces artifices menteurs des muses et d’Apollon ; c’est assez donner à Phébus et aux muses ; ces sortes de jeux ne siéent qu’à la jeunesse, et, pour n’être que des jeux, on y trouve aussi quelque gloire. […] Santeul, en s’occupant à chanter les saints, et à remplacer leurs anciennes louanges réputées grossières par des hymnes plus polies et plus dignes des concerts célestes, n’avait fait que changer la forme de son orgueil poétique et de sa vanité.
Elle veut quelque chose de difficile, sans quoi ce ne serait pas digne d’elle, et elle ne l’entreprendrait pas. […] Entraînée par une sorte de lyrisme intérieur, Mme Swetchine a des suites d’images mystiques dignes d’un saint Bernard, pour célébrer et glorifier cette extrémité pénible de l’existence, cet âge ordinairement déploré. […] Elle a des adresses et des habiletés de langage tout à fait dignes de ce grand docteur, qui n’a jamais cessé d’être un grand rhétoricien. […] Qu’aurait-ce donc été si j’avais parlé avec toute la liberté qu’un critique biographe peut prendre, si j’avais raconté plus d’une particularité qui me venait et qui m’était attestée par des témoins aussi dignes de foi, mais d’un autre bord que M. de Falloux ?
J’ai là sur mon bureau des livres qui sont fort dignes qu’on s’en occupe et qu’on les recommande aux lecteurs studieux : et, par exemple, un Essai sur l’histoire de la critique chez les Grecs, dans lequel M. […] Machiavel, en des années de disgrâce où il se voyait forcément mêlé à une vie vulgaire, ne les lisait qu’à une certaine heure du jour, et après avoir fait sa toilette comme pour se rendre digne de les approcher. […] Ce sentiment moral et humain de Pline est digne de remarque ; il ne se lasse point de l’exprimer en maint endroit, mais nulle part plus admirablement que quand il parle de Sylla : Le seul homme qui jusqu’à présent se soit attribué le surnom d’Heureux est L. […] Mais si l’anecdote n’est pas vraie, elle était digne de l’être ; et Pline, qui sentait ainsi, nous l’a conservée.
Quelques-uns des principes de Ruskin sont d’une incontestable fausseté ; par exemple, celui-ci : « Le meilleur tableau, écrit-il33, est celui qui renferme le plus d’idées et les idées les plus hautes » A quoi il ajoute comme commentaire, que « les plus hautes idées sont celles qui tiennent le moins à la forme qui les revêt, et que la dignité d’une peinture, comme l’honneur dont elle est digne, s’élèvent exactement dans la même mesure où les conceptions qu’elle traduit en images sont indépendantes de la langue des images. […] Pour l’artiste moderne, digne de ce nom, l’œuvre picturale est un tout qu’anime et que vivifie la circulation de l’atmosphère. […] C’est un art enfin qui trouve dans la réalité et dans la vie, mille fois plus de beauté que dans la fiction et dans le rêve avec leur morale, leurs artifices et leurs évangiles, mille fois plus d’éclat, de variété, d’unité, d’harmonie, de grandeur, de méthode, de liberté, de fantaisie, de noblesse, et pour lequel il n’y a pas de sujets nobles ou ignobles, dignes ou indignes, mais seulement des artistes dignes ou indignes de les créer.
n’est-il pas fier et digne ? […] L’auteur, pour peu qu’il s’apaise un jour et qu’il rencontre les conditions d’existence et de développement dont il est digne, me paraît des plus capables de cultiver avec succès la poésie domestique et de peindre avec une douce émotion les scènes de la vie intime : car si Mme Blanchecotte (ce qui est, je crois, son nom) a de la Sapho par quelques-uns de ses cris, elle aurait encore plus volontiers dans sa richesse d’affections quelque chose de mistriss Felicia Hemans, et tout annonce chez elle l’abondance des sentiments naturels qui ne demandent qu’à s’épancher avec suite et mélodie.
Chacun apportait sa portion de zèle et de lumières ; l’un était chargé de l’histoire des finances ; l’autre, de celle du commerce ; un troisième, d’une histoire des États-généraux et des Parlements ; mais le plus inépuisable lecteur était sans contredit le digne abbé de Saint-Pierre que notre auteur aime à nommer en toute occasion son bon ami ; il y épanchait ses rêves bienveillants, y enfantait ses projets pleins d’espérance, et puisait dans les regards et jusque dans les sourires de l’amitié ses croyances les plus fermes à un bienheureux avenir. […] Et d’abord je n’aurai garde d’oublier l’excellente notice sur les deux frères d’Argenson que la plume impartiale en même temps que pieuse du digne éditeur a consacrée à leur mémoire.
Si son génie le détermine à la poësie, et par consequent à l’amour des lettres, son heureux naturel méritera qu’un honnête homme le trouve digne de son attention. […] Ce talent ne frappera-t-il personne, qui le menera dans une ville voisine, où, sous le maître le plus grossier, il se rendra digne de l’attention d’un plus habile, qu’il ira bien-tôt chercher de province en province ?
Vous êtes ceux-là mêmes qui, dès demain, aurez pour office et ministère spécial de veiller à la tradition, à la transmission des belles-lettres classiques et humaines, de les interpréter continuellement à chaque génération nouvelle de la jeunesse ; je me vois chargé, pour ma part, — avec une bienveillance qui m’honore et dont je rends grâce à qui de droit, — sous les yeux d’un directeur ami70, — à côté de tant d’excellents maîtres dont on voudrait avoir été, ou dont on aimerait à devenir le disciple, — je me vois, dis-je, chargé de vous préparer à ces dignes et sérieuses fonctions. […] Cette tradition, elle ne consiste pas seulement dans l’ensemble des œuvres dignes de mémoire que nous rassemblons dans nos bibliothèques et que nous étudions : elle a passé en bonne partie dans nos lois, dans nos institutions, dans nos mœurs, dans notre éducation héréditaire et insensible, dans notre habitude et dans toutes nos origines ; elle consiste en un certain principe de raison et de culture qui a pénétré à la longue, pour le modifier, dans le caractère même de cette nation gauloise, et qui est entré dès longtemps jusque dans la trempe des esprits. […] N’oublions jamais que Rome était déjà arrivée, par son énergie et son habileté, au pouvoir politique le plus étendu et à la maturité d’un grand État, après la seconde guerre punique, sans posséder encore rien qui ressemblât à une littérature proprement dite digne de ce nom ; il lui fallut conquérir la Grèce pour être prise, en la personne de ses généraux et de ses chefs illustres, pour être touchée de ce beau feu qui devait doubler et perpétuer sa gloire. […] Dans un autre discours bien mémorable que lui prête Thucydide, et que sans doute il ne lui prête pas sans de bons motifs, Périclès traite déjà les Athéniens comme plus tard on traitera les Romains ; il s’efforce de les soutenir et de les fortifier contre la double épreuve de la guerre et de la terrible peste ; il prétend inspirer à ces citoyens d’une grande ville, et nourris dans des mœurs et des sentiments dignes d’elle, la force de tenir tête aux plus grands malheurs. […] Mais soyez tranquilles sur le résultat : toutes celles de ces admirations qui sont bien fondées, et si lui-même, lecteur, en son âme secrète, n’est pas devenu, dans l’intervalle, moins digne d’admirer le Beau, toutes ou presque toutes gagneront et s’accroîtront à cette revue sincère : les vraiment belles choses paraissent de plus en plus telles en avançant dans la vie et à proportion qu’on a plus comparé.
Sans bien se rendre compte, elle ne se sentait pas de force à être l’obligée d’un grand seigneur, fût-il le plus homme de bien ; l’humble et digne plébéienne n’aurait pas supporté qu’on pût dire d’elle ce que le monde malin disait d’un autre littérateur assez distingué et le plus long de taille que j’aie connu, qu’on avait surnommé en ce temps-là « le pauvre de M. de Montmorency ». […] Vinet, en parlant du Recueil des Pleurs de Mme Valmore, n’a pu s’empêcher de voir, lui chrétien positif, une sorte de sacrilège dans cette confusion d’adorations par laquelle elle mêlait Dieu et les anges à ses divers amours, et même au plus orageux de tous : c’est qu’aucun amour, digne de ce nom et sincère, n’était profane à ses yeux72. […] Crois-moi, chère amie, Charles X est digne de nous deux. […] Ce fils parfait, digne en tout d’une telle mère, et qui ne lui a donné que des consolations, est devenu l’un des plus utiles et des plus méritants employés du ministère de l’instruction publique. […] Il semble que ses vers sont tombés de sa plume sans nul effort, comme les mots d’une bouche éloquente… C’est par là que Mme Valmore me paraît digne d’occuper une des premières places parmi les femmes-poètes de ce siècle.
Un des grands oracles d’alors, et que consulta avec le plus de fruit l’abbé de Rancé, fut l’évêque d’Aleth, Nicolas Pavillon ; comme ce digne prélat devint plus tard une des autorités et des colonnes extérieures de Port-Royal, on chercha à en tirer parti contre Rancé et à insinuer qu’il y avait du venin janséniste dans sa conversion. […] Déjà, dans un séjour qu’il y avait fait en 1662, il avait dû purger les lieux de la présence des anciens religieux, au nombre de six, qui n’en avaient plus que le nom et qui y vivaient en toutes sortes de désordres ; menacé par eux et au risque d’être poignardé ou jeté dans les étangs, il avait tenu bon, refusant même l’assistance que lui offrait M. de Saint-Louis, un colonel de cavalerie du voisinage, digne militaire dont Saint-Simon nous a transmis les traits. […] L’histoire de la Trappe, dans les années suivantes, serait celle des progrès insensibles, silencieux, et cachés ; le bruit qui en arrive au dehors en fait la moindre partie et souvent la moins digne d’être sue. […] Qu’il suffise de dire que le respect des dignes adversaires eux-mêmes pour l’abbé de Rancé n’en subit aucune atteinte ; que Nicole, approuvé en cela par Arnauld, s’écriait qu’il se ferait plutôt couper le bras droit que d’écrire contre M. de la Trappe, et que Bossuet, souvent pris pour arbitre en ces querelles révérentes, ne parlait des écrits de Rancé, de ceux-là mêmes en apparence excessifs, que comme d’ouvrages où « toute la sainteté, toute la vigueur et toute la sévérité de l’ancienne discipline monastique est ramassée. » Ce fut Bossuet qui le contraignit à publier le livre de la Sainteté et des Devoirs de la Vie monastique ; lisant ce livre en manuscrit au retour de l’Assemblée de 1682 : « J’avoue, écrivait-il à Rancé, qu’en sortant des relâchements honteux et des ordures des casuistes, il me falloit consoler par ces idées célestes de la vie des solitaires et des cénobites. » Le style de Rancé, quand il ne s’agit pas d’une simple discussion dans laquelle il a hâte de couper court et d’en finir, ce qui lui arrive souvent, mais quand ce style s’applique comme ici à des traités de doctrine et d’édification, a de l’étendue et de la beauté : « Je ne vois rien, a dit un contemporain, de plus égal, de plus naturel, ni de plus fleuri. […] Rendons aussi cette justice à notre âge : on est assez disposé à y accepter, tel qu’il s’offre, cet abbé sublime, ce moine digne de Syrie ou du premier Clairvaux, ardent, impétueux, impatient, d’action et de fait plus que de discussion et de doctrine, bien que de grand esprit à la fois ; vrai moine de race, comme dirait de Maistre, indompté de tout autre que de Dieu.
Entraîné par cette illusion, je me mis à considérer combien était cruelle la destinée de ceux qui l’avaient aimée ; ensuite j’examinai s’il y avait dans cette ville quelque autre dame qui méritât tant d’honneurs et de louanges, et je pensai à la félicité dont jouirait un mortel assez heureux pour rencontrer un objet si digne de ses vers. […] Heureusement que les amis de Laurent ne se piquèrent pas, sur ce point, d’autant de discrétion que lui : Politien, dans son poëme sur Julien, a célébré la maîtresse de Laurent sous le nom de Lucretia ; et Ugolino Verini, dans sa Fiammetta, a adressé à cette dame un poëme latin, en vers élégiaques, dans lequel il plaide avec beaucoup de chaleur en faveur de Laurent, et il prétend que, quelles que puissent être ses rares perfections, elle trouve en lui un amant digne de toute sa tendresse. […] On peut juger, d’après le récit qu’il a fait de l’origine de sa passion, que Lucretia était la maîtresse du poëte, et non de l’homme : il cherchait un objet propre à fixer ses idées, à leur donner la force et l’effet nécessaires à la perfection de ses productions poétiques, et il trouva dans Lucretia un sujet convenable à ses vues, et digne de ses louanges ; mais il s’arrêta à ce degré de réalité, et laissa à son imagination le soin d’embellir et d’orner l’idole à son gré. […] Politien, génie vraiment antique et digne d’Horace ne s’enivra pas de cette faveur ; il était né d’une bonne famille à Montepulciano, petite ville de la Toscane, comme Flaccus, en Calabre ; c’est de là qu’il prit son nom. « Je ne me sens pas plus enorgueilli des flatteries de mes amis, ou humilié des satires de mes ennemis, disait-il, que je ne le suis par l’ombre de mon corps ; car, quoique mon ombre soit plus grande le matin ou le soir qu’elle ne l’est au milieu du jour, je ne me persuaderai point que je sois plus grand moi-même dans l’un ou l’autre de ces moments que je ne le suis à midi. » XI Le pape étant mort en ce temps-là, Laurent de Médicis fit un voyage à Rome, pour recommander Julien, son jeune frère, à Sa Sainteté, dans le but de le faire élire au cardinalat. […] XIII Pendant que Florence jouissait ainsi de la paix philosophique sous un citoyen digne de rappeler Périclès, le reste de l’Italie était bouleversé par des crimes et des assassinats.
Et il s’attache à définir ce que c’est que l’esprit public dans un pays libre et véritablement digne de ce nom : N’est-ce pas une certaine raison générale, une certaine sagesse pratique et comme de routine, à peu près également départie entre tous les citoyens, et toujours d’accord et de niveau avec toutes les institutions publiques ; par laquelle chaque citoyen connaît bien ce qui lui appartient, et par conséquent ce qui appartient aux autres ; par laquelle chaque citoyen connaît bien ce qui est dû à la société entière et s’y prête de tout son pouvoir ; par laquelle chaque citoyen respecte sa propre personne dans autrui, et ses droits dans ceux d’autrui ? […] Lui, qui eût été un digne soldat de l’armée de Xénophon, il sent toute sa conscience héroïque se soulever à l’idée de cette violation de la discipline et de l’honneur érigée en exploit. Il faut l’entendre qualifier cette « scandaleuse bacchanale », cette « bambochade ignominieuse », que favorisaient la lâcheté des corps constitués et l’immortelle badauderie parisienne, et s’écrier, par un mouvement digne d’un ancien : On dit que, dans toutes les places publiques où passera cette pompe, les statues seront voilées. […] Quelle que soit la ligne politique qu’on suive (et je ne prétends point que celle d’André Chénier soit strictement la seule et la vraie), cette manière d’être et de sentir en temps de révolution, surtout quand elle est finalement confirmée et consacrée par la mort, sera toujours réputée moralement la plus héroïque et la plus belle, la plus digne de toutes d’être proposée aux respects des hommes. […] » Il sera toujours plus digne et plus beau de répondre à cette question, avec l’âme d’André Chénier : « Et moi, j’ai mérité de mourir !
« Il se demanda si la société humaine pouvait avoir le droit de faire également subir à ses membres, dans un cas son imprévoyance déraisonnable, et dans l’autre cas sa prévoyance impitoyable ; et de saisir à jamais un pauvre homme entre un défaut et un excès, défaut de travail, excès de châtiment ; « S’il n’était pas exorbitant que la société traitât ainsi précisément ses membres les plus mal dotés dans la répartition des biens que fait le hasard, et par conséquent les plus dignes de ménagements. […] Cela donne lieu à des scènes peu vraisemblables, tirées par les cheveux, mais dramatiques et dignes d’un grand maître de larmes, par le pathétique des situations et par la naïveté des amours qui en sont la suite. […] Un écrivain digne d’être le secrétaire de la conscience pouvait seul l’inventer et l’écrire. […] « Puis il s’adressa à l’auditoire : « — Vous tous, tous ceux qui sont ici, vous me trouvez digne de pitié, n’est-ce pas ? […] quand je pense à ce que j’ai été sur le point de faire, je me trouve digne d’envie.
Plus ce Don Juan était un être impossible, et plus il devenait digne de cette adoption du poète. Tartuffe ne pouvait pas avoir un plus digne auxiliaire. […] Le détail est digne du sujet ; quand, après cette belle étude d’un chef-d’œuvre très rare, on se retourne vers la comédie que M. […] La cellule est étroite, le lit est de pierre, et l’on voit circuler, dans cette tombe anticipée, les victimes infortunées d’un crime si digne d’excuse et de pardon ! […] Le cinquième acte est digne des quatre autres : rien ne marche et rien n’avance ; c’est toujours La Vallière qui pleure, toujours Lauzun qui rit, toujours Louis XIV qui s’ennuie.
Il s’appuye de celle de Henri IV, qui reçut la discipline sur les épaules, des cardinaux d’Ossat & du Perron ; formalité bien vaine, mais raison plus étrange encore pour vouloir qu’on admettre un usage quelquefois criminel & suggéré par la débauche ; un usage qui peut être remplacé par tant d’autres plus dignes d’un vrai pénitent ; un usage qui peut être remplacé par tant d’autre plus dignes d’un vrai pénitent ; un usage enfin que la religion ne prescrit pas, & qui rappelle ces prêtres de Baal, qui se déchiroient à coups de lancettes, ou ces insensés Brammins qui passent la plus grande partie de leur vie, nuds dans leurs cellules, occupés à s’enfoncer des clous dans les bras & dans les cuisses, en l’honneur de leur dieu Brama.
Adieu, mon très digne ami ; le sommeil m’accable. […] Mon très cher et très digne ami, vous n’aurez pas lieu de vous plaindre de ma négligence. […] Si je vous parlais de ma société, elle n’aurait rien de digne de vous. […] Mon très digne ami, j’ai fait toutes les diligences possibles pour vous assurer des indices de vos effets. […] En attendant, je prie Dieu qu’il vous comble de prospérités, vous, votre digne épouse et vos enfants.
Quand on se plaignait à lui de ce qu’il conduisait souvent la troupe par chemins divers et contrées, revenant souvent bien près d’où il était parti (ce qu’il faisait, ou recevant l’avertissement de quelque chose digne de voir, ou changeant d’avis selon les occasions), il répondait qu’il n’allait quant à lui en nul lieu que là où il se trouvait, et qu’il ne pouvait faillir ni tordre sa voie, n’ayant nul projet que de se promener par des lieux inconnus ; et, pourvu qu’on ne le vît pas retomber sur même voie et revoir deux fois même lieu, qu’il ne faisait nulle faute à son dessein. […] Mais c’est sur les antiquités de Rome particulièrement qu’il a des vues justes, tout à fait grandes et dignes de leur objet. […] Mais était vraisemblable que ces membres dévisagés qui en restaient, c’étaient les moins dignes, et que la furie des ennemis de cette gloire immortelle les avait portés premièrement à ruiner ce qu’il y avait de plus beau et de plus digne ; que les bâtiments de cette Rome bâtarde qu’on allait à cette heure attachant a ces masures, quoiqu’ils eussent de quoi ravir en admiration nos siècles présents, lui taisaient ressouvenir proprement des nids que les moineaux et les corneilles vont suspendant en France aux voûtes et parois des églises que les Huguenots viennent d’y démolir… ».
la plupart de ses jugements littéraires d’alors, courus et touchés à peine, sont restés charmants : — et sur Xavier de Maistre et son frère, si différents, mais semblables en un point, et en général sur les écrivains de Savoie, fins, sagaces et jamais lourds, et desquels on peut dire que « la finesse italienne a passé par là » ; — et sur Mme de Souza, le romancier aux aimables nuances, qui excelle à cent pages d’amour délicat, mais chez qui « cette délicatesse est compensée par l’absence de tout trait fort et profond : le premier volume de ses romans amuse beaucoup, le quatrième lasse toujours » ; — et sur Mme de Staël, contre laquelle il lance des paroles d’un pronostic, effrayant ; et sur Mme de Genlis, qui a trouvé moyen, avec infiniment d’esprit, de faire entrer l’ennui dans ses livres, car l’hypocrisie de salon les glace ; et sur M. de Jouy, à qui il accorde un peu trop en faveur de son Sylla et de ses vers tragiques dignes de la prose ; et sur Andrieux, dont on essaya un moment de faire l’arbitre du goût ; il écrivait de ce dernier en janvier 1823 : « M. […] d’idées et de phrases convenues : « Je regarde Dussault, disait-il, comme le Fiévée du classicisme, le meilleur avocat d’une vieille platitude. » Il appelait de tous ses vœux un digne adversaire et un vrai contradicteur : « Prions Dieu que quelque homme de talent prenne ici la défense du classicisme, et force ainsi les romantiques à faire usage de tout leur esprit, et à ne laisser aucune erreur dans leur théorie. » Il écrivait cela de Milan en 1819, et en vue du romantisme italien de Manzoni. […] Mais Ballanche, levant la tête et prenant un ton d’autorité : commença une diatribe fulminante en motivant, comme il l’entendait, les reproches qu’il faisait à Bossuet, et s’échauffant toujours davantage, il arriva enfin à sa péroraison en disant, comme s’il avait été hors de lui : « Qu’on ne me parle plus des vertus et des talents de Bossuet ; d’un homme qui a osé dire que Dieu n’a pas révélé le dogme de l’immortalité de l’âme aux Juifs, parce qu’ils n’étaient pas dignes de recevoir cette vérité ! Ces mots, ajouta-t-il en devenant presque furibond ; marchant à grands pas, ces mots le rendent digne du feu, et les cinquante mille bûches de l’Inquisition ne suffiraient pas pour le rôtir !
Trébutien de Caen, le savant et digne antiquaire, jaloux de tous les beaux débris et particulièrement dévot à ces saintes reliques de l’amitié. […] Voici donc le pendant de ce beau morceau du Centaure, mais en prose gauloise, digne des vieux aïeux rabelaisiens de la terre bourguignonne ; ce n’est plus un Centaure qui parle ici, mais un paysan (notez-le bien), un manant, fils et petit-fils de manants, d’anciens soldats redevenus bûcherons et un peu braconniers ; c’est l’ancien bouvier devenu trop citadin à son tour, et qui regrette les heures rustiques de sa jeunesse. […] Rien de plus monotone que sa vie ; elle a perdu sa mère depuis bien des années ; elle habite avec son père au château du Cayla ; elle a une autre sœur plus jeune qu’elle, Marie ou Mimi ; elle a un frère Éran ou Érembert, aimable et assez dissipé ; mais le frère chéri, le frère unique, celui de qui elle dirait volontiers ce que cette reine de Hongrie, la digne sœur de Charles-Quint, disait du grand Empereur, son frère : « Il est mon tout en ce monde après Dieu », c’est Maurice, le génie tendre et sans défense, qu’elle considère comme aventuré à travers tous les écueils de la vie et du monde. […] Que ce soit la couleur du temps, le loquet d’une porte, un vieux château qu’elle visite, ou l’une quelconque des fêtes et, cérémonies rurales, le baptême ou la fonte d’une cloche, la bénédiction des bestiaux, la messe de Noël où elle se rend en famille à minuit « par des chemins bordés de petits buissons blancs de givre, comme s’ils étaient fleuris », elle trouve sur tous ces thèmes fortuits ou naturels des pensées charmantes, légères et célestes, dignes d’une Cymodocée chrétienne.
La seconde ne lui semble pas digne de quiconque a reçu de la nature une ambition véritable : « Si vous avez ce véritable orgueil indépendant des circonstances, cet élan du mérite ; si vous avez un cœur doué de sensibilité, ne souhaitez jamais cet état intermédiaire qui place entre les grands qu’il faut être attentif à ménager et les pauvres que l’on est impuissant à secourir, entre le ton protecteur qui blesse et la prière qui afflige… » J’ai noté ce passage, parce qu’il est empreint de la marque de Jean-Jacques. […] Sa conduite, en ce dernier sens, fut des plus nobles, des plus dignes et, pour tout exprimer d’un mot, elle fut digne jusqu’au bout de l’illustre victime qu’il n’était pas allé chercher et dont il avait tout le premier essuyé le feu. […] Ces deux hommes d’ailleurs, également courageux et sans peur, marchant également tête haute et la poitrine en dehors, aimaient la liberté, mais différemment : l’un, qui n’a pas donné son dernier mot et dont on ne peut que deviner l’entière pensée tranchée avant l’heure, aimait la liberté, mais armée, glorieuse, imposante, et, pour tout dire, la liberté digne d’un consul : — il faut convenir aussi que cette forme a bien de l’éclat et de l’attrait ; — il aimait la liberté réglée par les mœurs, par les lois mêmes, la liberté organisée et peut-être restreinte ; l’autre aimait et voulait la liberté complète, cosmopolite, individuelle au suprême degré dans tous les genres, civile, religieuse, intellectuelle, industrielle, commerciale, à la manière d’un Hollandais, d’un Belge ou d’un citoyen de New-York : le plus Américain des deux n’était pas celui qui croyait l’être.
Il a eu raison, selon moi, en se récusant de la sorte, et il a donné un exemple tardif par où tous les autres historiens dignes de ce nom auraient dû commencer. […] Arriverait-on, même avec l’esprit de divination le plus sagace, à dégager rien de raisonnable et de véritablement digne de l’histoire à travers ces récits vingt fois transformés et défigurés ? […] J’entreprends simplement de le montrer tel qu’il est, non de l’effacer, et encore moins de le repeindre. » Cette belle page d’un bon et excellent esprit, qui trouve à son service une image et un emblème dignes de Bacon, suffit à montrer combien M. […] De dignes adversaires de Wolf, Ottfried Müller en tête, regagnèrent du terrain et tinrent vaillamment campagne.
remy de meilleures pages, de plus dignes des études si méritoires auxquelles il s’est livré ; l’autre jour, par exemple95, il défendait avec esprit et goût la mémoire de Charles Nodier, insultée par un pamphlétaire ; sa plume devenait excellente. […] Depuis La Fontaine, et en laissant de côté les chefs-d’œuvre dramatiques, la poésie lyrique digne de ce nom, la poésie d’odes, d’idylles, d’élégies, où en était-elle, je vous prie, en France ? […] remy n’hésite pas ; pour dernier mot, il conclut que « la place d’André Chénier ne sera jamais celle des écrivains classiques dignes d’être proposés comme modèles, sans restriction, aux étrangers et aux jeunes esprits dont le goût n’est pas entièrement formé. » Chénier aurait pris certainement son parti de cette sentence ; jamais poëte digne de ce nom ne s’est proposé un tel but ni de pareils honneurs scholaires.
A dix-huit ans, elle avait épousé le marquis de Sévigné, assez peu digne d’elle, et qui, après l’avoir beaucoup négligée, fut tué dans un duel en 1651. […] Mme de Sévigné loue continuellement sa fille sur ce chapitre des lettres : « Vous avez des pensées et des tirades incomparables. » Et elle raconte qu’elle en lit par-ci par-là certains endroits choisis aux gens qui en sont dignes : « quelquefois j’en donne aussi une petite part à Mme de Villars, mais elle s’attache aux tendresses, et les larmes lui en viennent aux yeux. » Si on a contesté à Mme de Sévigné la naïveté de ses lettres, on ne lui a pas moins contesté la sincérité de son amour pour sa fille ; et en cela on a encore oublié le temps où elle vivait, et combien dans cette vie de luxe et de désœuvrement les passions peuvent ressembler à des fantaisies, de même que les manies y deviennent souvent des passions. […] Elle en était digne, car sa bonté égalait sa beauté et sa grâce. […] On a un charmant portrait de Mme de Sévigné jeune par l’abbé Arnauld ; il faut qu’elle ait eu bien de l’éclat et de la couleur pour en communiquer un moment au style de ce digne abbé, qui ne paraît pas avoir eu, comme écrivain, tout le talent de la famille : « Ce fut en ce voyage, dit-il en ses Mémoires (à l’année 1657), que M. de Sévigné me fit faire connoissance avec l’illustre marquise de Sévigné, sa nièce… Il me semble que je la vois encore telle qu’elle me parut la première fois que j’eus l’honneur de la voir, arrivant dans le fond de son carrosse tout ouvert, au milieu de M. son fils et de mademoiselle sa fille : tous trois tels que les poëtes représentent Latone au milieu du jeune Apollon et de la jeune Diane, tant il éclatoit d’agrément dans la mère et dans les enfants !
Dans cet arrangement plus ou moins philosophique qu’on lui prête, les déviations, les folies, les ambitions personnelles, les mille accidents bizarres qui la composent et dont ceux qui ont observé leur propre temps savent qu’elle est faite, tout cela disparaît, se néglige, et n’est jugé que peu digne d’entrer en ligne de compte. […] Quant aux autres, aux hommes d’État véritables, aux ambitieux de haute volée, vous croyez qu’ils ne succombent jamais que pour des motifs dignes d’eux, dignes du sacrifice pénible qu’ils s’imposent en nous gouvernant. […] Il n’aimait, nous dit-il, que les historiens tout simples et naïfs, qui racontent les faits sans choix et sans triage, à la bonne foi ; ou, parmi les autres plus savants et plus relevés, il n’aimait que les excellents, ceux qui savent choisir et dire ce qui est digne d’être su.
Ce premier roi de Prusse, par toute sa vie de vaine pompe et d’apparat, disait, sans le savoir, à sa postérité : « J’ai acquis le titre, et j’en suis fier ; c’est à vous de vous en rendre dignes. » Le père de Frédéric, dont son fils, si maltraité par lui, a si admirablement parlé, et dans un sentiment non pas filial, mais vraiment royal et magnanime, ce père grossier, économe, avare, bourreau des siens et idolâtre de la discipline, cet homme de mérite pourtant, qui « avait une âme laborieuse dans un corps robuste », avait rendu à l’État prussien la solidité que l’enflure et la vanité du premier roi lui avaient fait perdre. […] car si l’espèce humaine est si sotte et si digne de mépris, et s’il n’y a rien ni personne en-dessus d’elle, pourquoi s’aller dévouer corps et âme à l’idée de gloire, qui n’est autre que le désir et l’attente de la plus haute estime parmi les hommes ? […] Henry, pasteur de l’Église française à Berlin, a écrit une dissertation où il traite de l’irréligion de Frédéric ; sans prétendre l’absoudre sur ce point, le digne écrivain croit qu’on a fort exagéré ce côté français de Frédéric, par lequel il regardait et flattait les philosophes du xviiie siècle ; il cherche à démontrer que Frédéric, avec une sorte de fanfaronnade, s’est plu à l’exagérer lui-même. […] Henry estime que cette moquerie irréligieuse de Frédéric se passait surtout à la surface de son âme ; qu’en s’y livrant, il s’abandonnait surtout à un mauvais ton de société, dans la pensée que cela n’arriverait jamais à la connaissance du public ; mais que le fond de sa royale nature était sérieux, méditatif, et digne d’un législateur qui embrasse et veut les choses fondamentales de toute société et de toute nation.
Un jour, Voltaire a le front de lui dire que lui, Frédéric, écrit mieux le français que Louis XIV, que Louis XIV ne savait pas l’orthographe, et autres misères de ce genre ; comme si Louis XIV n’avait pas été un des hommes de son royaume qui parlât le mieux, et comme si l’une des plus grandes louanges à donner à l’excellent écrivain Pellisson, ce n’était pas d’avoir été en plus d’un cas le digne secrétaire de Louis XIV. […] Cette passion (c’est bien le mot) fut d’ailleurs réciproque : Voltaire ne peut le dissimuler ; lui-même, la grande coquette, il fut pris par Frédéric, et dans le spirituel mais si misérable libelle, et si peu digne de confiance, qu’il écrivit après sa fuite de Berlin pour se venger du roi, il ne peut s’empêcher de dire, en parlant des soupers de Potsdam : « Les soupers étaient très agréables. […] Sur Jean-Jacques, par exemple : « Le roi parle, ce me semble, très bien sur les ouvrages de Rousseau ; il y trouve de la chaleur et de la force, mais peu de logique et de vérité ; il prétend qu’il ne lit que pour s’instruire, et que les ouvrages de Rousseau ne lui apprennent rien ou peu de chose. » Avec d’Alembert, dont il apprécia tout d’abord le caractère estimable, Frédéric se montre purement en philosophe ; on le voit tel qu’il aurait aimé à être dans la seconde moitié de sa vie, quand la goutte et l’humeur ne l’aigrissaient pas trop, et s’il avait eu autour de lui quelqu’un de digne avec qui s’entendre : « Sa conversation roule tantôt sur la littérature, tantôt sur la philosophie, assez souvent même sur la guerre et sur la politique, et quelquefois sur le mépris de la vie, de la gloire et des honneurs. » Voilà le cercle des sujets humains qu’il aimait à traiter habituellement, sincèrement, et en moralisant toujours ; mais la littérature et la philosophie étaient encore ce dont il aimait à causer par-dessus tout pour se détendre, quand il avait fait son métier de roi. […] Des hommes dignes et ayant le respect d’eux-mêmes, tels que d’Alembert, l’eussent forcé à son tour de les respecter.
Le premier qui ait osé se montrer, a pour titre, les Oreilles des Bandits de Corinthe, digne régal pour les oreilles de tous les Bandits du monde. […] Jaloux de donner à cet Ouvrage le degré de perfection & d’utilité dont il est susceptible, d’après nos propres réflexions, d’après celles de nos amis & de plusieurs personnes distinguées qui s’intéressent à la cause que nous défendons, nous n’avons épargné ni soins, ni recherches, pour le rendre digne des suffrages nationaux & étrangers. […] Il est tels Ecrivains inconnus ou dignes d’oubli, dont l’article a pu fournir matiere à des réflexions, à des remarques utiles, à des anecdotes instructives ; dont l’exemple a pu servir de leçon ou de préservatif : alors nous les avons admis en faveur de l’instruction.
Il y a de lui des estampes qui sont parfois dignes de Rembrandt et qui souvent égalent les morceaux les plus magnifiques de Michel-Ange. […] C’est en nous perfectionnant d’une manière stricte et implacable que nous deviendrons dignes de création. […] Rendons-nous dignes de la gloire que nous nous piquons d’acquérir.
De là vient qu’il court des journées entières après des inconnus qui ont quelque chose de singulier dans leur marche, dans leur costume, dans leur ton et dans leur regard ; qu’il réfléchit avec profondeur sur une circonstance contée légèrement et que personne ne trouve digne d’attention ; qu’il rapproche des choses complètement antipodiques et qu’il en tire des comparaisons extravagantes et inouïes. » « Lélio s’écria à haute voix : « Arrêtez, c’est là notre Théodore. […] Aussi, dès qu’il se borne à peindre l’art et les artistes dans ce moyen âge, où il y avait du moins harmonie et stabilité pour les âmes, quelque chose de calme, de doré et de solennel succède aux délirantes émotions qu’il tirait des désordres du présent ; depuis l’atelier de maître Martin le tonnelier, qui est un artiste, jusqu’à la cour du digne landgrave de Thuringe, où se réunissent autour de la jeune comtesse Mathilde, luth et harpe en main, les sept grands maîtres du chant, partout dans cet ordre établi, on sent que le talent n’est plus égaré au hasard, et que l’œuvre de chacun s’accomplit paisiblement ; s’il y a lutte encore par instants dans l’âme de l’artiste, le bon et pieux génie finit du moins par triompher, et celui qui a reçu un don en naissant ne demeure pas inévitablement en proie au tumulte de son cœur.
C’était encore un courtisan quand il disait, dans une dédicace, à la mère de cet enfant adultérin : Le temps qui détruit tout, respectant votre appui, Me laissera franchir les ans dans cet ouvrage, ………………………………………………… Sous vos auspices, ces vers Seront jugés, malgré l’envie, Dignes des yeux de l’univers. […] — L’assiéger — L’entreprise est fort belle, Et digne seulement d’Alexandre ou de vous : Mais Rome prise enfin, seigneur, où courons-nous ?
L’amour n’est pas une passion gaie : le veritable amour, le seul qui soit digne de monter sur la scene tragique, est presque toujours chagrin, sombre et de mauvaise humeur. […] L’histoire fait foi qu’il est arrivé à plusieurs de ces messieurs pour un si digne sujet, les avantures qui arriverent à notre Huddibras quand il couroit les champs pour rétablir un chacun dans ses libertez et proprietez, même les ours qu’on menoit par force danser aux foires.
Après tous ces noms, on en trouve d’autres qui sont encore célèbres dans des genres différents ; le président de Thou, immortel par son histoire, et le président Jeannin, qui fut négociateur et ministre ; et le cardinal d’Ossat, qui se créa lui-même ; et le père Mersenne, digne d’être l’ami de Descartes ; et Gassendi, presque digne d’être son rival ; et le fameux Arnaud, qui écrivit avec génie, et fut malheureux avec courage.
Il est son digne héritier pour l’esprit, pour la franchise et la gentillesse ; il le surpasse en netteté, en élégance, en politesse de badinage. […] Quel digne et magnifique témoignage il se rend ! […] Voilà, certes, une bonté de maître digne de l’affection du serviteur. […] Tel il est, tel il me paraît, sans déchet et sans surcroît, véritablement digne de sa renommée. […] Une pièce digne d’Horace, y pense-t-on bien ?
Dans cette série enchaînée de sonnets si inférieurs à leur modèle toscan, et qui n’en ont guère que les défauts, je ne sais si on trouverait à en détacher un seul digne en entier d’être cité : c’est docte et dur. […] On en est moins loin dans le sonnet qui suit, et où l’on retrouve le ton élevé, digne du sujet : Ni la fureur de la flamme enragée, Ni le tranchant du fer victorieux, Ni le dégât du soldat furieux, Qui tant de fois, Rome, t’a saccagée ; Ni coup sur coup ta fortune changée, Ni le ronger des siècles envieux, Ni le dépit des hommes et des dieux, Ni contre toi ta puissance rangée ; Ni l’ébranler des vents impétueux, Ni le débord de ce dieu tortueux, Qui tant de fois t’a couvert de son onde, Ont tellement ton orgueil abaissé, Que la grandeur du rien qu’ils t’ont laissé Ne fasse encore émerveiller le monde. […] On se demande si les deux amis qu’il associe à ses destinées en étaient dignes par le talent ; je ne connais rien de Panjas : quant à Olivier de Magny, on a, entre autres Recueils, ses Soupirs, en grande partie composés pendant le séjour de Rome et publiés en 1557 ; ils sont comme le pendant des Regrets de Du Bellay, dont le nom revient presque à chaque page. […] Et qui seroit si fol de se vouloir dorénavant travailler l’esprit pour faire quelque chose de bon et digne de la postérité, ayant perdu la faveur d’un si bon prince et la présence d’une telle princesse, qui, depuis la mort de ce grand roi François, père et instaurateur des bonnes lettres, étoit demourée l’unique support et refuge de la vertu et de ceux qui en font profession ? […] Quand on le considère de près comme nous venons de le faire, il justifie, somme toute, sa réputation, si même il ne la dépasse pas : il est digne de la conserver entière.
. ; mais celle de M. d’Andilli est plus commune & plus connue, quoiqu’elle soit peut-être moins digne de l’être. […] Des recherches plus savantes, un style plus précis auroient rendu cet ouvrage digne de la postérité ; mais on ne l’imprime plus depuis que l’Abbé Fleuri a donné son histoire écrite avec moins d’art, mais avec plus de simplicité & d’exactitude. […] Rien ne seroit plus curieux & plus intéressant qu’une histoire générale des Conciles ; mais nous n’avons rien malheureusement en ce genre qui soit digne d’être cité. […] Fontaine, disciple de Mr. de Saci & digne de son maître. […] On a publié en 1762. deux vol. pour servir de continuation à son histoire ; mais ils ne sont pas dignes de lui.
On voulut qu’ils fussent dignes des divinités à qui l’on adressait un hommage : on choisit donc un rythme plus lent et plus grave. […] Ce furent les lettres qui l’affermirent chez tous les peuples, nés pour la désirer, capables de la conquérir, jaloux de la garder, instruits à la défendre, et, par là, dignes de la conserver. […] Du reste il est plein d’excellents morceaux et étincelle de beaux traits, qui m’ont paru dignes d’être imités sur notre théâtre. […] Son commerce avec son illustre frère et avec sa digne épouse fut uniformément fraternel et conjugal. […] La noblesse de cette passion la rend donc, en effet, digne de la tragédie ; et, lorsque celle-ci se propose de la déployer, elle manifeste pleinement l’utilité morale de ses fables.
Henri Ritter ne suppose pas davantage qu’elle soit digne d’un regard. […] Aristote ne connaît que la Grèce, c’est vrai ; aujourd’hui nous connaissons l’esprit humain entier ; et il n’est pas une œuvre quelque peu digne d’attention qui échappe à nos regards, et que nous ne puissions étudier. […] Chercher à produire ces effets en mettant les choses sous les yeux directement, est beaucoup moins digne de l’art, et il n’y faut que les frais de la représentation. […] Cette vie nouvelle de l’âme est la seule vie réelle, la seule vraiment digne de l’homme. […] La vie de l’homme, telle qu’elle nous est faite ici-bas, lui apparut comme une énigme indéchiffrable, et digne de pitié plutôt que d’étude, si rien ne la suit.
Ses maximes, quoique détachées & sans liaison, n’en sont pas moins dignes d’être luës & retenuës. […] Ce Poëte, si digne d’être traduit, l’a été encore de nos jours par M. l’Abbé Batteux. […] Toutes les autres, & l’on y comprend celles de Du Ryer & de l’Abbé de Bellegarde, sont totalement oubliées ou dignes de l’être. […] Ce morceau est digne de St. […] J’en connois deux traductions, l’une en prose par l’Abbé de Marolles & l’autre en vers par le Président Bouhier ; celle-ci est digne de la plume de ce Magistrat.
Nous autres critiques, qui parlons des gens longtemps après leur mort, nous devrions bien nous mettre dans l’esprit qu’il n’y a qu’une manière de les retrouver avec quelque vraisemblance : c’est dans leurs livres d’abord et aussi dans le témoignage des contemporains dignes de foi. […] Enfin Collé fit là quelque chose de ce que nous avons vu faire au spirituel et charmant auteur du Palais-Royal, Labiche : il mit habit noir et cravate blanche pour se rendre digne du Théâtre-Français et se retrancha de sa gaîté, du meilleur de sa veine. […] Collé, après sa comédie de Henri IV, aurait pu être de l’Académie ; le duc de Nivernais et Duclos le tâtèrent là-dessus ; il aurait pu, s’il l’avait voulu, en 1763, passer sur le corps à l’abbé de Voisenon, « ce mauvais prêtre sémillant » ; mais Collé, comme Béranger, ne se croyait pas digne ou du moins capable de l’Académie : « Pour en être digne, disait-il, il faut avoir un fonds de littérature qui me manque.
Il fit ses premières armes sous le digne Mounier, et mérita d’être porté à ses côtés, et par les mêmes suffrages, aux États généraux. […] Les chefs l’accueillaient avec bienveillance ; et lui, avec cette illusion confiante à laquelle n’échappe aucune noble jeunesse, il voulut user d’abord de cette espèce d’influence qu’ils paraissaient lui accorder, pour tenter de les réunir : « Ainsi, dit-il, je fis de vains efforts pour rapprocher Mounier et l’abbé Sieyès, entreprise bien digne d’un jeune homme à l’égard de ces hommes impérieux, qui étaient arrivés pour faire prévaloir des systèmes opposés. » Lui-même il se forma vite et se décida sur la ligne à suivre. […] Ce qu’il dit du parti modéré, du parti constitutionnel d’alors, de cette majorité saine de la nation, de cette bourgeoisie dont il était l’honneur et qu’il connaissait si bien, est digne de remarque : Le parti modéré, qui, soit par le nombre, soit par la composition, pourrait être regardé comme la nation même, est presque nul pour l’influence ; il se jette, à la vérité, pour faire poids, du côté qui cherche à ralentir le mouvement, mais à peine ose-t-il expliquer publiquement son vœu. […] L’autre fin pour lui a été plus digne et plus belle.
On a publié en 1820, sous le titre de Nouvelles lettres de Mlle de Lespinasse, un volume qui ne saurait être d’elle, qui n’est digne ni de son esprit ni de son cœur, et qui est aussi plat que l’autre est distinguéa, ou, pour mieux dire, unique. […] Tout est destinée dans ce monde, et l’Espagne n’était pas digne d’avoir un M. de Mora. » Et encore (8 juillet) : « Il y a des vies qui tiennent à la destinée des empires. […] elles ne sont pas dignes d’être vos écolières, lui disait-il sans cesse ; votre âme a été chauffée par le soleil de Lima, et mes compatriotes semblent être nées sous les glaces de la Laponie. » Et c’était de Madrid qu’il écrivait cela. […] Les sentiments élevés, généreux, le patriotisme et la virilité des vues, se révèlent aussi en plus d’un endroit, et nous font apprécier la digne amie de Turgot et de Malesherbes.
Si, en imprimant, il n’a rien ajouté ni arrangé à sa Correspondance, il a vraiment du mérite d’avoir dit au Premier consul, en l’engageant à se conserver pour mener à bonne fin et accomplir toute sa destinée : « Que l’homme de nos jours ne ressemble pas aux hommes fameux de l’Antiquité, qui n’ont fait que donner au monde une grande secousse dont le monde s’est ensuite tiré comme il a pu. » Cette Correspondance, dans ces premières pages, résume ce qu’il y a eu d’honorable et de digne de souvenir dans la vie de M. […] Nous qui nous contentons de le lire sans y chercher autre chose que des esquisses pleines de netteté et de finesse, nous y relèverions quantité de pensées dignes de souvenir. […] Toutes les parties de cette Correspondance ne sont pas également intéressantes et dignes de mention. […] Par penchant et par habitude, il était encore plus homme de presse qu’il ne l’avait été de consultation et de cabinet : « Comme écrivain, disait-il, entre m’adresser au public ou à un souverain, fût-il dix fois plus élevé que la colonne de la place Vendôme, je n’hésiterai jamais à préférer le public ; c’est lui qui est notre véritable maître. » En laissant dans l’ombre les côtés faibles et ce qui n’est pas du domaine du souvenir, et à le considérer dans son ensemble et sa forme d’esprit, je le trouve ainsi défini par moi-même dans une note écrite il n’y a pas moins de quinze ans : Fiévée, publiciste, moraliste, observateur, écrivain froid, aiguisé et mordant, très distingué ; une Pauline de Meulan en homme (moins la valeur morale) ; sans fraîcheur d’imagination, mais avec une sorte de grâce quelquefois à force d’esprit fin ; — de ces hommes secondaires qui ont de l’influence, conseillers nés mêlés à bien des choses, à trop de choses, meilleurs que leur réputation, échappant au mal trop grand et à la corruption extrême par l’amour de l’indépendance, une certaine modération relative de désirs, et de la paresse ; — travaillant aux journaux plutôt par goût que par besoin, aimant à avoir action sur l’opinion, même sans qu’on le sache ; — Machiavels modérés, dignes de ce nom pourtant par leur vue froide, ferme et fine ; assez libéraux dans leurs résultats plutôt que généreux dans leurs principes ; — sentant à merveille la société moderne, l’éducation moderne par la société, non par les livres ; n’ayant rien des anciens, ni les études classiques, ni le goût de la forme, de la beauté dans le style, ni la morale grandiose, ni le souci de la gloire, rien de cela, mais l’entente des choses, la vue nette, précise, positive, l’observation sensée, utile et piquante, le tour d’idées spirituel et applicable ; non l’amour du vrai, mais une certaine justesse et un plaisir à voir les choses comme elles sont et à en faire part ; un coup d’œil prompt et sûr à saisir en toute conjoncture la mesure du possible ; une facilité désintéressée à entrer dans l’esprit d’une situation et à en indiquer les inconvénients et les ressources ; gens précieux, avec qui tout gouvernement devrait aimer causer ou correspondre pour entendre leur avis après ou avant chaque crise.
On a dit que c’était à Gourville que La Bruyère avait pensé dans la page célèbre qui commence par ces mots : « Ni les troubles, Zénobie, qui agitent votre empire… » Le peintre moraliste y montre les palais et les magnificences de bâtiments d’une grande reine, ne paraissant pas encore dignes de lui à un enrichi qui n’achète cette royale maison que pour l’embellir. […] Ici, nous entrevoyons en Gourville l’homme aimable et de bonne compagnie, le digne ami de Saint-Évremond, de Lamoignon, de M. de Pomponne, le Gourville-Atticus qui, même quand il ne pouvait plus être d’une utilité essentielle, faisait encore par son esprit et sa belle humeur les délices de ses amis. […] Il me semble ici que le rôle des deux côtés est beau : de la part du prince, on aime à voir une dernière fois ce regard étincelant dont l’air de colère n’est ici qu’une preuve suprême d’affection, et on aime aussi cette noble marque du désintéressement de Gourville, qui se montre digne de l’amitié d’un grand homme. […] Louis XIV le remit au pas ; l’excellent esprit de Gourville qui, de tout temps, serait allé de pair avec les plus fins, devint digne d’une époque où les honnêtes gens avaient le dessus ; il y tient son coin original et distingué.
Les vrais, les dignes chefs du mouvement littéraire n’ont pas encore poussé le cri d’alarme, et il est permis de croire que la terre ne va pas tout à l’heure manquer sous nos pieds. […] Cuvier est un homme de génie lui-même ; arrivé à ces hauteurs de la science où elle se confond presque avec la poésie, il était digne de comprendre et de célébrer le poète philosophe qui, dans l’incertitude de ses pensées, avait plus d’une fois plongé jusqu’au chaos, et demandé aux éléments leur origine, leur loi, leur harmonie : Aristote pouvait donner la main à Platon.
Voilà, je le sens bien, une phrase peu digne. […] L’homme par lui-même est peu digne d’enthousiasme : sa coopération probable à l’infâme Beacon ; anecdote ridicule du verre dans lequel George IV avait bu.
» Je ne voulais point amuser ; je voulais moins encore être applaudi : j’avais un plus digne objet, celui d’examiner sans partialité la vie et les ouvrages de Sénèque, de venger un grand homme, s’il était calomnié, ou, s’il me paraissait coupable, de gémir de ses faiblesses, et de profiter de ses sages et fortes leçons. […] Si les hommes avaient sous la tombe quelque notion de ce qui se passe sur la terre, de quels sentiments de reconnaissance pour vous, pour M. le baron d’Holbach, pour vos dignes collègues MM.
Lui, si digne de traduire Homère, lui qui en avait sucé la moelle dans l’Épire et dans la moindre île de l’Archipel, ne pouvait-il pas lutter avec ces pédants qui nous traduisent des textes morts au lieu de nous traduire des mœurs et des lieux dont ils ne peuvent découvrir le sens à travers la littéralité des vers ? […] XXVII Jamais je ne me consolerai que M. de Marcellus ou M. de Chateaubriand ne nous ait pas traduit Homère et la Bible ; c’était un travail digne d’eux, et ils étaient dignes de ce travail ! […] Un seul homme était digne de commander aux Arabes comme au monde. […] Quand on s’est lancé hardiment, avec une sainte pensée dans le cœur, au milieu d’un peuple en révolution, pour l’apaiser et le diriger vers des destinées plus hautes et plus surhumaines ; Quand on lui a dit : « Lève-toi et règne, mais montre-toi digne de régner par ta modération, par ta tolérance, par ton respect des libertés d’autrui ; tu n’auras d’autre maître que la raison, tu respecteras tout le monde, et toi-même » ; Quand ce peuple a été soulevé entre ciel et terre pendant quelques mois, et que toutes les nations étonnées se sont agenouillées pour le contempler dans sa liberté et dans sa sagesse ; ce peuple de France a été vraiment roi de lui-même, et digne de l’être.
Qu’on lise le parallele qu’en a fait, avec Terence, l’auteur du siecle de Louis XIV. le plus digne de les juger, la Bruyere. […] Ce prodige fit oublier tout ce qui l’avoit précédé, & fut le digne modele de tout qui ce devoit le suivre. […] L’églogue en changeant d’objet, peut changer aussi de genre ; on ne l’a considérée jusqu’ici que comme le tableau d’une condition digne d’envie, ne pourroit-elle pas être aussi la peinture d’un état digne de pitié ? […] Dans les exemples vertueux, les principes, les moyens, la fin, tout doit être noble & digne ; la vertu n’admet rien de bas. […] Nous les réléguons dans des mémoires particuliers, comme peu dignes de la majesté de l’histoire.
Il n’a manqué à ce digne Brunet, que d’avoir pu vivre, sans remonter sur son théâtre et de rester paisiblement sur son rocher. […] De ce gueux-là, Térence a fait un digne valet, hâbleur, mais dévoué, imprudent, mais capable d’un bon sentiment au fond de l’âme. […] La Fontaine n’a pas traduit ce passage d’une énergie, digne des satyres de Régnier, nous racontant les infamies de Macette. […] Le chœur des nuées invisibles est d’une très belle forme et tout à fait digne d’un poète lyrique. […] D’un valet digne (au moins) !
Si quelqu’un semblait né pour être prêtre au plus beau et au plus digne sens du mot, c’était bien Bossuet. […] Ne pensez pas qu’elles fussent semblables à celles que vous voyez voler dans les airs ; mais, sanctifiées par le saint Esprit, qui descendit autrefois du ciel en forme de colombe, elles ont été faites une hostie digne de Dieu. » M. de Meaux a pris d’Origène une infinité d’endroits aussi doux et aussi tendres, que l’on peut voir semés à toutes les pages du commentaire de ce prélat sur le Cantique des cantiques. […] C’est là son Hoc erat in votis, et en vieillissant il n’admettra pas de diversion à cette occupation finale, et à ses yeux la seule digne du sanctuaire.
Les héros de la guerre de Troie, Agamemnon, Hector, Achille, auraient eu beau combattre, s’illustrer et mourir, s’ils n’avaient pas eu d’Homère : et, comme l’a dit Horace, beaucoup d’autres non moins dignes de renom sont à jamais ensevelis dans l’ombre ; ils ne feront jamais verser de nobles larmes, parce qu’ils n’ont pas eu leur chantre sacré : Carent quia vate sacro. […] On l’a dit, après créer et enfanter des œuvres de génie, il reste encore quelque chose de digne et de beau, c’est de les sentir et de les faire admirer. […] Machiavel durant ses disgrâces n’abordait jamais cette lecture des Anciens qu’après s’être revêtu de ses plus beaux habits et s’être rendu comme plus digne de s’asseoir à la table de ces hôtes illustres de l’intelligence.
La marche d’une telle fortune m’a paru digne d’être étudiée. […] Le duc de Saint-Simon, dans sa juste animadversion pour l’injure que fit aux pairs, aux princes, à la nation entière, à son droit public, à ses mœurs, l’élévation du duc du Maine, fruit d’un double adultère, mais devenu digne d’une haute destinée par les soins de madame de Maintenon ; le duc de Saint-Simon, dis-je, comparant la naissance du duc du Maine avec les honneurs démesurés dont cet enfant fut comblé, se laissa aller au plus cruel et au plus injuste mépris pour madame de Maintenon, à qui le jeune prince devait le mérite précoce et distingué qui avait favorisé son élévation. […] Le roi lui dit ces paroles qui me paraissent dignes de remarque : « Madame, je vous ai fait attendre longtemps ; mais j’ai été jaloux de vos amis : j’ai voulu avoir seul ce mérite auprès de vous. » Le compliment, dit Auger, était délicat, mais il n’était pas sincère.
A les entendre nous ne serions presque que de vulgaires humains, non plus des Français dignes de ce nom, c’est-à-dire des fils de la race élue. […] Gaston Deschamps, si, dans quelques années, il y aura encore une France digne du passé, et non pas une république sud-américaine… » La conclusion de cette étude me paraît surtout saisissante : « Cette verte mercuriale ne peut que profiter au bien public. […] Il est indispensable de consacrer à ce soin plusieurs années de notre vie, si nous la voulons consciente et digne d’être vécue.
Quelques-uns sont dignes d’en être exhumés, comme des monuments de force et de fécondité dans la pensée humaine. […] On comprend quelle richesse, et quelle variété, et quel pathétique, et quel mystère un pareil texte d’épopée fournissait au poète, s’il y avait eu un poète, ou si j’avais été moi-même ce poète digne de concevoir et de rendre en chants une pareille inspiration. […] Il était digne de dormir avec les illustres Toscans sur sa couche de gloire dans le champ des morts (Campo Santo) de Pise, ou dans l’église de Santa Croce à Florence, ou bien à Ravenne, à l’ombre du sépulcre du Dante ! […] Brizeux, digne de lutter corps à corps, et plusieurs autres traducteurs sérieux ont tenté l’œuvre. […] Écoutons dans quelques belles pages cette voix d’Ozanam si digne de parler des choses de l’esprit.
Il mourut à Rome dépouillé, et dans le plus fort de la Révolution ; il eût été digne d’en traverser jusqu’au bout toutes les épreuves. […] Il indique alors quelques ridicules du jour qui sont un sujet tout fait pour la moquerie : « Il est plaisant, dit-il, que l’orgueil s’élève à mesure que le siècle baisse : aujourd’hui presque tous les écrivains veulent être législateurs, fondateurs d’empires, et tous les gentilshommes veulent descendre des souverains. » Il finit surtout par un conseil que Voltaire a trop peu suivi, et qui, au lieu de cette ricanerie universelle à laquelle il s’abandonnait, aurait dû être le but idéal suprême du grand écrivain en ces années de sa vieillesse : Riez de tout cela et faites-nous rire, lui dit Bernis en lui développant son plan ; mais il est digne du plus beau génie de la France de terminer sa carrière littéraire par un ouvrage qui fasse aimer la vertu, l’ordre, la subordination, sans laquelle toute société est en trouble. […] Ces divers ouvrages, que je suis bien loin de mettre tous sur la même ligne, et dont le dernier, par exemple, est digne d’une très médiocre estime, ont cela de commun qu’ils s’appuient à chaque instant sur des pièces émanées de Bernis, et que leur texte en mainte page en est presque tout formé. […] Heureux pourtant et favorisé jusqu’à la fin, puisqu’il lui fut donné, par ses derniers sacrifices, de pouvoir racheter et expier en quelque sorte les mollesses de ses débuts, de confesser une religion de pauvreté par un coin d’adversité salutaire, et de prouver qu’il y avait en lui, sous ces formes tour à tour aimables et dignes, un fonds sincère de générosité humaine et chrétienne !
Petitot, la citation parallèle ; ce n’est, comme on le pense bien, qu’un très faible échantillon ; c’est aux curieux à pousser plus loin et dans le même sens une comparaison plus ample, qui ne fera que confirmer le premier aperçu : Charles, dit Duclos, était doux, facile, généreux, sincère, bon père, bon maître, digne d’être aimé et capable d’amitié. […] Dans l’intervalle des phrases de Duclos que j’ai rapprochées, celui-ci a eu soin d’introduire un brillant éloge d’Agnès Sorel et un mot sur Jeanne d’Arc, qu’il appelle d’ailleurs une généreuse fille ; mais Agnès Sorel a tous les honneurs : Ce fut la maîtresse pour qui Charles eut la plus forte passion et qui fut la plus digne de son attachement : sa beauté singulière la fit nommer la belle Agnès… Rare exemple pour celles qui jouissent de la même faveur, elle aima Charles uniquement pour lui-même, et n’eut jamais d’autre objet dans sa conduite que la gloire de son amant et le bonheur de l’État. […] Les réflexions sur l’état misérable de la France, sur le pillage, l’indiscipline et les désordres de tout genre qui désolaient les provinces sous le règne de Charles VII, sont résumées chez Duclos aux mêmes endroits du récit, et presque dans les mêmes termes que l’a fait l’abbé Le Grand : seulement Duclos ramasse les traits avec plus de concision et d’un ton d’autorité que le digne annaliste ne se permet pas. […] Qui que nous soyons et dans quelque genre que la vocation ou la destinée nous ait poussés, tâchons d’être de ceux-là ; tâchons, un jour ou l’autre, d’arriver à la perfection de ce qu’il nous est donné de faire, à la réunion de toutes nos forces, à la plus haute puissance de nous-mêmes : et, comme cette heure et cet accident de grâce et de lumière n’est pas en notre pouvoir, tenons-nous prêts et montrons-nous-en dignes en y visant constamment.
Il aurait apprécié de visu, ce qui est toujours mieux, cette légèreté, cette vivacité, ce bon sens un peu étourdi qu’il sentait très bien de loin, mais qu’il n’est que d’avoir éprouvé et observé de près ; lui-même, si attentif et si habile à profiter de tout, il y aurait appris peut-être à s’émouvoir un peu et à évertuer sa nature noble et digne. […] Après une longue étude de ce poëte et bien des essais pour reproduire en poésie ce que j’avais gagné à le méditer, je me tournai vers quelques-uns des meilleurs écrivains des autres temps et des autres pays, et je lus non seulement Shakspeare, mais Sophocle et Homère dans les meilleures traductions… » Eckermann, en un mot, travaille à se rendre digne d’approcher Gœthe quelque jour. […] Il craignait toujours, plus tard, en se ressouvenant, de ne pas ressaisir au degré voulu la vivacité et l’éclat de ses impressions premières ; il attendait pour écrire que le parfait réveil se fît en lui, que les heures passées se peignissent dans sa mémoire toutes brillantes et lumineuses, que son âme eût retrouvé le calme, la sérénité et l’énergie où elle devait atteindre pour être digne de voir reparaître en soi les idées et les sentiments de Gœthe ; « car j’avais affaire, disait-il, à un héros que je ne devais pas abaisser. » Ainsi pénétré du noble sentiment de sa mission, il la remplit avec une piété que nous ne trouverons jamais trop minutieuse ; et les grands traits, d’ailleurs, il ne les a pas omis, et il nous permet, ce qui vaut mieux, de les déduire nous-mêmes peu à peu de la réalité simple : « Gœthe vivait encore devant moi, s’écrie-t-il en une de ses heures de parfait contentement et de clarté ; j’entendais de nouveau le timbre aimé de sa voix, à laquelle nulle autre ne peut être comparée. […] Gœthe sent très bien qu’en vieillissant on n’est plus parfaitement au fait de l’esprit nouveau de la jeunesse, de ce qui plaît ou déplaît aux générations survenantes, de ce qu’elles produisent de remarquable et de digne d’être noté ; on a besoin d’être tenu au courant, d’être rafraîchi de temps en temps et d’être averti.
Et de plus, en ce qui est de la poésie du xvie siècle en particulier, on voit assez par tout cela qu’on est sorti des lignes de l’histoire littéraire proprement dite, qui, à moins d’être une nécropole, doit se borner à donner la succession et le jeu des écoles et des groupes, les noms et la-physionomie des vrais chefs, à marquer les caractères et les degrés des principaux talents, le mérite des œuvres vraiment saillantes et dignes de mémoire : on est tombé dans le menu, dans la recherche à l’infini, dans la curiosité locale et arbitraire. […] Ce sonnet de La Boétie est digne d’être mis à côté des deux ou trois sonnets de Louise Labé, pour la dureté des sons et aussi pour la flamme. […] J’y lis tout à côté de belles et dignes Stances à Alfred de Musset, ce frère puîné de Louise Labé ; écrites au lendemain même de sa mort, elles sont toutes pénétrées de son immortel sanglot ; en voici quelques notes vibrantes : Parmi nous maint poëte à la bouche inspirée Avait déjà rouvert une source sacrée ; Oui, d’autres nous avaient de leurs chants abreuvés ; Mais le cri qui saisit le cœur et le remue, Mais ces accens profonds qui d’une lèvre émue Vont à l’âme de tous, toi seul les as trouvés. […] J’en ai retenu ce joli vers digne de La Fontaine : A quoi sert de mourir, si l’on ne se repose ?
« Lorsque périt le dernier des Gracques de la main des patriciens, atteint du coup mortel, il lança de la poussière vers le ciel en attestant les dieux vengeurs, et de cette poussière naquit Marius. » Mais cette admirable et menaçante parole, digne du serment du Jeu de Paume, n’est qu’un éclair, et je dirai qu’elle est plus voisine de Shakespeare que des Romains de David. […] Je ne puis croire que le Ciel ne réserve que des épreuves à des sentiments si purs et si dignes de sa faveur Cette sorte de confiance me fait soutenir la vie et envisager la mort avec calme. […] Mme Champagneux m’y avait autorisé, en se fiant à moi du soin d’expliquer et de présenter sous leur vrai jour, ou même de passer tout à fait sous silence certaines confidences des Mémoires, qu’elle m’avait d’ailleurs à peine indiquées, désirant ou ne trouvant pas mauvais que j’en eusse connaissance, mais évitant elle-même de s’y arrêter. » Il faut le savoir en effet, et c’est un sujet fort digne de réflexion : la fille de Mme Roland, cette Eudora si cultivée par sa mère et dont elle avait soigné l’éducation jusqu’à l’âge de onze ans avec un zèle éclairé et tendre, Eudora était devenue fort religieuse, — disons le mot, fort dévote avec les années. […] Je sais qu’il y a des personnes qui trouvent cela théâtral ; mais, en vérité, il me semble que l’échafaud est bien réellement un théâtre aussi ; elle ne l’avait pas choisi, il lui échut par le sort ; elle y parut comme il sied, et y joua son personnage d’une manière à la fois aisée, courageuse et supérieure, décente et digne.
Mais il n’avait pas su profiter de cette chance unique, il avait manqué à la belle mission qui lui était échue par le bénéfice du temps ; et après lui avoir représenté les contradictions flagrantes dans lesquelles le plaçait sa démarche, le ton et le caractère de ses anciens écrits qui juraient du tout au tout avec ce dernier acte, la palinodie qu’il semblait s’être réservée pour son chant du cygne, André Chénier lui traçait en regard le canevas de la véritable lettre qu’il aurait dû écrire, lettre sévère et digne, qui eût pu contenir un examen critique et judicieux de la Constitution, sans rien rétracter, sans rien démentir des principes. […] C’est au retour de ce voyage de Varennes qu’il reçut un de ces témoignages touchants qui se gravent dans le cœur comme la seule digne récompense du dévouement désintéressé. […] M. le baron Malouet, qui n’a épargné aucun soin, aucune recherche, pour rendre la publication des Mémoires digne du nom qu’il porte, a reçu depuis peu, et trop tard pour en profiter, la communication de lettres écrites par son aïeul à Mallet du Pan, depuis le mois de mai 1792 et pendant les années d’exil. […] L’histoire de sa vie, en ces années de l’Empire, est dévolue à son digne petit-fils, qui saura s’acquitter de cette pieuse tâche dans un esprit de vérité et avec mesure.
Il se débarrassa vite pourtant de ce qui n’était pas digne de lui dans ce premier enthousiasme de la jeunesse ; cette boue des Mercier et des Rétif ne lui passa jamais le talon : il réalisa de bonne heure cette haute pensée : « Dans le tempéré, et dans tout ce qui est inférieur, on dépend malgré soi des temps où l’on vit, et, malgré qu’on en ait, on parle comme tous ses contemporains. […] J’aime le papier blanc plus que jamais, et je ne veux plus me donner la peine d’exprimer avec soin que des choses dignes d’être écrites sur de la soie ou sur l’airain. […] Je renvoie au livre ; ceux qui en seront avides et dignes sauront bien se le procurer ; ils forceront d’ailleurs par leur clameur à ce qu’on le leur donne : il est impossible que de tels élixirs d’âme restent scellés. […] Espérons, à tant de titres, qu’elle aura cours désormais, qu’elle entrera en échange habituel chez les meilleurs, et enfin qu’il vérifiera à nos yeux sa propre parole : « Quelques mots dignes de mémoire peuvent suffire pour illustrer un grand esprit160. » 1er Décembre 1838.
Ces sveltes amazones rencontrées dans les bois, si capricieuses et si énigmatiques ; ces jeunes hommes si beaux, si tristes et si prompts aux actes héroïques ; ces vieilles châtelaines et ces vieux gentilshommes si dignes, si polis et si fiers ; tout ce monde supérieurement distingué de ducs, de comtes et de marquis, cette vie de château et cette haute vie parisienne, ces conversations soignées où tout le monde a de l’esprit ; et, sous la politesse raffinée des manières, sous l’appareil convenu des habitudes mondaines, ces drames de passion folle, ces amours qui brûlent et qui tuent, ces morts romantiques de jeunes femmes inconsolées…, amour, héroïsme, aristocratie, Amadis, Corysandre et quelquefois Didon en plein faubourg Saint-Germain, tout cela me remplissait de l’admiration la plus naïve et la plus fervente, et m’induisait en vagues rêveries, et me donnait un grand désir de pleurer. […] Pour la même raison l’amour lui paraîtra le plus intéressant des sentiments, et de beaucoup, et même le seul digne d’intérêts. […] Charlotte, qui est devenue veuve, pourrait alors épouser d’Eblis, mais elle veut sauver au moins la mémoire de sa petite amie, et, bien que Cécile l’ait priée de remettre au commandant un billet où elle confesse sa faute, elle lui laisse croire que sa jeune femme est morte digne de lui, morte de n’être pas assez aimée. […] Ouvrez les yeux : le monde est vaste, l’humanité infiniment variée, et il y a sur terre des hommes et des femmes autrement vivants et dignes d’attention que ceux qui vont à cheval au bois le matin ou celles qui ont leur loge à l’Opéra.
La mère de Goethe habitait Francfort ; Bettina se lia avec elle, et se mit à aimer, à étudier et à deviner le fils dans la personne de cette mère si remarquable, et si digne de celui qu’elle avait mis au monde. […] La digne Mme de Goethe, qui a en elle le sentiment du réel et le bon sens, a compris tout d’abord que cet amour de la jeune fille pour son fils ne tirait pas à conséquence, que cette flamme, ce feu de fusée, ne brûlerait personne. […] Nous sommes ici, remarquez-le bien, avec les plus grands des hommes, avec les très grands ; et l’honneur de Bettina, c’est d’avoir su être de Beethoven à Goethe un digne interprète. […] Il est enchanté et ravi de voir un si grand individu que Beethoven venir augmenter sa collection et sa connaissance : « J’ai eu bien du plaisir, dit-il, à voir se refléter en moi cette image d’un génie original. » Ce grand miroir de l’intelligence de Goethe tressaille involontairement, quand un nouvel objet digne de lui s’y réfléchit.
Il n’y avait point d’alliance qui ne parût digne d’elle. […] Il ne s’agissait plus que de trouver un sujet digne du choix. […] Dans la lettre au roi où elle demande d’épouser Lauzun, Mademoiselle a soin de faire sonner bien haut cette chaîne de précieuse servitude et de domesticité, qui, selon elle, honore plus que tout, et dont elle réclame sa part : « Je dis tout ceci à Votre Majesté pour lui marquer que plus on a de grandeurs, plus on est digne d’être vos domestiques. » Il y avait quelque chose à quoi Lauzun tenait plus encore qu’à être le mari de Mademoiselle, le duc de Montpensier et le plus grand seigneur du royaume, c’était d’être du dernier bien avec son maître. — Je note expressément la forme régnante de platitude de ce temps-là : n’allons pas nous flatter de n’avoir point la nôtre. […] Elle aime surtout la grandeur, elle aime la gloire ; elle s’y méprit souvent ; elle a toutefois des mouvements de fierté, d’honneur et de bonté, dignes de sa race.
On ne saurait assez déplorer cette publication de Manuel ; car de cette même masse de papiers, tombant en de dignes mains, au lieu de quatre volumes compromis et souillés, on aurait pu tirer, sans infidélité et moyennant de simples suppressions, deux ou trois volumes touchants, graves, éloquents, « un ouvrage à la fois attrayant et à peu près irréprochable, plein de piquants sujets d’études psychologiques et d’exemples de style, dont aucune impureté ne souillerait la grâce, dont aucun danger ne ferait condamner l’agrément ». […] Et ce courage est digne de vous. Je vous adresse des vérités respectueuses, mais hautes et fortes, et il est digne de vous de les entendre et d’en convenir. […] Dans une courte et fort digne lettre adressée au comte de Maurepas, ami de son père, et qui, à cette date, était de fait Premier ministre, Mirabeau réclame énergiquement sa délivrance et sa liberté.
Il tenait du duc d’Orléans, futur régent, du marquis de La Fare, de Chaulieu et des habitués du Temple, du grand prieur de Vendôme chez qui, plus tard, Voltaire jeune le rencontrera au passage : il lui suffisait, en tout état de cause, de rester digne de ce qu’il appelait la société des honnêtes gens, mais ce mot commençait à devenir bien vague ; et Saint-Simon, plus sévère et qui pressait de plus près les choses, disait de lui : « C’était un cadet de fort bonne maison, avec beaucoup de talents pour la guerre, et beaucoup d’esprit fort orné de lecture, bien disant, éloquent, avec du tour et de la grâce, fort gueux, fort dépensier, extrêmement débauché (je supprime encore quelques autres qualifications) et fort pillard. » Ce qui s’entrevoit très bien dans le peu qu’on sait du rôle du chevalier de Bonneval dans ces guerres d’Italie, c’est qu’il n’était pas seulement né soldat, mais général : il avait des inspirations sur le terrain, des plans de campagne sous la tente, de ces manières de voir qui tirent un homme du pair, et le prince Eugène dans les rangs opposés l’avait remarqué avec estime. […] Chamillart, piqué d’honneur à son tour, sentant la probité en bourgeois, mais digne ce jour-là, par l’expression, d’être le secrétaire d’État de Louis XIV, fit à cette lettre une réponse qui est la meilleure preuve que les temps de la noblesse féodale avaient cessé : Monsieur, j’ai reçu la lettre que vous avez pris la peine de m’écrire au sujet des comptes du Biélois : si la somme avait été véritablement employée, vous n’offririez pas d’en faire le remboursement à vos dépens ; et, comme vous n’êtes pas assez grand seigneur pour faire des présents au roi, il me paraît que vous ne voulez éviter de compter avec les gens de plume que parce qu’ils savent trop bien compter. […] Mme de Bonneval est digne de ses aïeux ; elle sent ce que c’est que la gloire des armes. […] Quant à de Prié, comme, il l’appelle, c’est un homme de peu qui s’est prévalu de l’autorité impériale dont il était momentanément revêtu, comme l’âne de la fable, qui se prévaut des reliques dont il est chargé : Pour ce qui est des choses personnelles qui se sont passées entre Prié et moi dans cette affaire, s’il reste encore digne de ma colère, quand elle sera terminée, je saurai bien le punir moi-même de ses insolences.
Ayant acheté, sur l’invitation du cardinal-ministre, la charge de premier aumônier de Monsieur, frère de Louis XIV, il se trouva introduit plus qu’il n’aurait voulu dans une autre petite cour plus périlleuse encore et plus semée d’écueils que celle du prince de Conti ; il s’y conduisit bien et avec honneur ; il donna à Monsieur des conseils virils et dignes de sa royale naissance, que ce prince puéril ne suivait que par accès et faiblement. […] En s’opposant de toutes ses forces à ce qu’on livrât la place de Bordeaux à Cromwell avec qui l’on avait ouvert des négociations, en s’opposant vers la fin à l’incroyable faiblesse du prince de Conti qu’on avait presque décidé à conduire sa belle-sœur, la princesse de Condé, en Espagne, Cosnac rendit un service et à son prince et au roi, et ici sa vue s’élève un peu ; on entrevoit quelque chose de cette moralité politique qui va mettre en première ligne la patrie ; c’est par ce côté que nous le trouverons digne plus tard de comprendre et de servir Louis XIV. […] Les conseils qu’il lui donna en cette occasion et depuis étaient de ceux qui auraient formé un prince estimable, un digne frère de Louis XIV, soumis mais respecté, et forçant la considération de son frère et celle du public par son mérite. […] Cosnac, par son intelligence et sa capacité, était donc tout à fait digne de servir directement ce sage et prudent maître, ce monarque de son siècle, et non plus ces cadets chétifs et avortés, qui se consumaient dans les corruptions et les vaines intrigues.
Mais Washington nous offre d’autres exemples non moins dignes d’être imités. […] Un tel caractère est digne des plus beaux jours de l’antiquité. […] Madame de Staël se fait cette objection, et sa réponse est digne du reste. […] Il se montra digne de les louer, par ses vertus comme par ses talents. […] L’homme le plus digne d’apprécier ce chef-d’œuvre de Thomas a dit que c’était un drame moral plein de majesté et d’intérêt, digne d’être représenté devant des sages et des rois .
Une fois, M. l’abbé Fulcran a trouvé son neveu en train de baiser ces saints ornements, auxquels les mains de Méniquette venaient de toucher ; et le digne prêtre, peu clairvoyant, a loué Ferdinand de sa piété. […] … M. l’abbé Fulcran, toujours aussi clairvoyant, morigène son neveu en ces termes : — Vous avez obéi, mon enfant, à un sentiment peu digne d’un chrétien.
Aujourd’hui, par un hasard heureux, les deux poètes dont nous avons à parler tranchent vivement sur le fond vulgaire des rimeurs contemporains, et sont vraiment dignes du regard et du jugement de la Critique. […] Ce poète d’une race finie et d’une cause perdue, ce Redgauntlet poétique des Stuarts de la France, qui fait vivre sa muse au poste où il eût été digne de mourir, mais où le combat n’est même plus, à côté de beaucoup de sonnets tels que le suivant, — qui ressemble à ces écussons de marbre noir que soutiennent parfois des anges tumulaires aux coins silencieux des mausolées : Ce fut un vaillant cœur, simple, correct, austère ; Un homme des vieux jours, taillé dans le plein bloc, Sincère comme l’or et droit comme un estoc, Dont rien ne détrempa le mâle caractère.
Même dans la colère il est toujours digne. […] On dépense autant de génie à ramper qu’à régner. « Aux qualités qu’on exige d’un domestique, combien peu de maîtres seraient dignes d’être valets ! […] Je ne sache rien qui peigne mieux l’air dégagé et noble, la politesse élégante et digne. […] Il doit « complaire à son maître », chasser les gens mal vêtus, les mendiants, tout ce qui n’est point digne d’être reçu dans la société choisie. […] Le digne seigneur, comme le héron, a soin de son estomac.
Je veux me donner aujourd’hui cette délectation de cœur et d’esprit, en me rappelant minutieusement les lieux et les jours où je connus pour la première fois ce poète ami, Victor de Laprade, auteur digne d’être nommé à côté de Boccace et de Pétrarque, digne d’avoir vécu à Florence dans le temps des néo-platoniciens d’Italie, avec lesquels il a tant de ressemblance. […] XIII L’autre de ces artistes était le sensible et infortuné Decaisne, peintre digne de Rubens par ses aspirations à renouveler l’école de ce grand maître, son compatriote et son modèle. […] Il voulut bien en réciter les premiers vers, dignes de Théocrite ou d’André Chénier : Le matin, rougissant dans sa fraîcheur première, Change les pleurs de l’aube en gouttes de lumière ; Et la forêt joyeuse, au bruit des flots chanteurs, Exhale, à son réveil, ses humides senteurs. […] XXIX Ces répugnances que nous éprouvons pour cette transformation de la lyre divine en fouet sanglant est peut-être un tort de notre goût personnel ; nous regrettons que des Virgiles et des Pindares daignent rivaliser avec des Juvénals et des Gilberts, qui ne sont pas dignes de toucher à leurs ailes, et qui rasent la terre au lieu de se perdre dans le firmament.
La critique, telle que nous la comprenons, est fille du bon sens et du bon goût ; elle s’attache à reconnaître, à découvrir le mérite réel des écrivains, et tout en cherchant à nous garantir d’une vénération aveugle et irréfléchie, elle se complaît à éveiller en nous le sentiment du beau, en nous faisant partager son enthousiasme pour ce qui lui paraît digne d’admiration. […] Nous chercherons, son flambeau à la main, à distinguer ce qui est digne de blâme ou d’admiration parmi les travaux de l’esprit humain. […] Comme eux, nous choisirons ce qui nous paraîtra le plus digne de fixer nos regards ; vous aurez ensuite, à l’aide de ces fragments épars du génie d’un poète, à le comprendre en son entier, à l’exemple de ces architectes auxquels il suffit de quelques pierres mutilées pour reconstruire, sur le papier, tout l’ensemble d’un monument. […] Un ouvrage, vraiment digne d’estime, ne se débite qu’à un petit nombre d’exemplaires ; et il faut de hautes réputations littéraires pour forcer l’entrée des bibliothèques. […] Si je ne puis parvenir à vous faire aimer un art si digne d’occuper vos loisirs, ce sera ma faute, et non celle de l’art lui-même.
C’est un engagement que je prends exprès à la face de l’academie, pour m’animer à rendre ma réponse plus digne de ce public judicieux, pour qui seul on devroit écrire. […] Qui nous assure que les hommes n’ont pas fait de bonne heure le raisonnement de Me D car il est bien digne des prémiers âges ? […] des héros. les héros de l’iliade ne sont pas plus dignes d’estime que les dieux. […] Ces raisons, me, ne me paroissent dignes ni de vous, ni de Mr Dacier. […] S’il suffisoit de cette sorte de simplicité pour rendre les hommes dignes d’estime, il faudroit aller apprendre à vivre chez les iroquois et chez les sauvages.
Illustre Glamis, digne Cawdor, élevé encore au-dessus de ces deux titres par le salut qui les a suivis, ta lettre m’a transportée au-delà de ce présent rempli d’ignorance, et je sens déjà l’avenir exister pour moi. […] digne thane, vous laissez votre noble courage se relâcher jusqu’à ces rêveries d’un cerveau malade ? […] Mon digne seigneur, vos nobles amis vous attendent. […] j’oubliais… Ne prenez pas garde à moi, mes dignes amis. […] Il y vécut de ses travaux passés et persévérants avec sa charmante épouse, sœur de Virginie ; lui-même, digne frère de Paul.
Puisse le ciel t’accorder un fils doué de toutes les vertus, un fils digne de régner un jour sur le monde entier ! […] Es-tu plus digne de ce nom gracieux de Preyamvada, toi dont les paroles sont remplies de tant de douceur ? […] « Ainsi que cette jolie malica est unie à ce bel amra, que ne puis-je de même être unie à un époux digne de moi ! […] Toi, chère Sacountala, va, sans perdre de temps, à l’ermitage, chercher des fruits dignes d’être offerts à notre hôte : cette eau, en attendant, peut servir à rafraîchir ses pieds fatigués. […] Ma chère, quel peut donc être cet étranger qui, tant par ses traits profondément empreints d’une majesté calme, que par ses discours où règne la politesse la plus aimable, se montre digne d’occuper le plus haut rang ?
Il s’adressait d’ailleurs à une population déjà exercée et aguerrie ; dès avant son arrivée et au premier cri de cette indépendance menacée, la population de Sienne, et les femmes les premières, avaient eu l’idée de s’organiser pour la défense et d’y aider de leurs mains : à ce souvenir et à la pensée de ce que lui-même a vu de bonne grâce généreuse et patriotique en ce brave et joli peuple, Montluc s’émeut ; son récit par moments épique redouble d’accent ; quelque chose de l’élégance et de l’imagination italienne l’ont gagné : Il ne sera jamais, dames siennoises, que je n’immortalise votre nom tant que le livre de Montluc vivra : car, à la vérité, vous êtes dignes d’immortelle louange, si jamais femmes le furent. […] Ce qui est certain, c’est qu’ayant affaire à un adversaire digne de le comprendre, sans aucune stipulation directe il se vit traité par lui sur le pied qu’il avait souhaité ; le dimanche matin, 22 avril (1555), il fut reçu au sortir de la ville par le marquis de Marignan et par toute cette armée, non comme un vaincu, mais comme un héros et le plus noble des compagnons : Les trois mestres de camp des Espagnols me vinrent saluer, et tous leurs capilaines. […] Le cadre est digne du personnage.
Bossuet eut pour ami particulier durant toute sa vie, pour auxiliaire affectionné et constant dans toutes les questions de doctrine, de foi, de morale et de discipline de l’Église, un homme bien digne en tout de cette relation étroite et de cette intimité : l’abbé Fleury fut ce premier lieutenant modeste, ce véritable second de Bossuet et comme son abbé de Langeron. […] On ne trouva pas son mérite digne de sa réputation : son premier discours, qui était contre les libertins, et qu’il avait, dit M. de Meaux, assez mal amené à l’évangile du jour, parut faible : on loua sa piété et sa modestie, sa voix douce, son geste réglé, jusqu’à lui accorder, contre l’avis de quelques-uns, la grâce de l’élocution : on trouva de la politesse dans son discours, des termes choisis et de l’onction : il fut très bien écouté, et le roi et la Cour en furent édifiés. […] Un neveu de Bossuet, l’abbé Bossuet, plus tard évêque de Troyes, et qui n’était pas digne en tout de son oncle, est des plus vifs à résister, à protester, et à vouloir organiser le parti des mécontents.
Colbert répondit au roi qu’il ne pouvait assez approuver le conseil que M. de Louvois avait donné à Sa Majesté ; que c’était un projet digne d’un aussi grand roi. […] Colbert dit au Roi qu’il ne fallait point le flatter sur cette dépense, qu’il fallait que la fête fût digne de celui qui la donnerait, et qu’elle coûterait au moins un million. […] Le cardinal rougit et se tut. — Une autre fois, pendant un voyage à Compiègne (juin-juillet 1739), une petite circonstance paraît digne de remarque au duc de Luynes ; c’est encore une légère velléité d’indépendance : M. le cardinal de Fleury était dans l’usage d’entrer dans les cabinets du roi par une porte de derrière dont il avait la clef.
Nous sommes à l’endroit vraiment honorable de la carrière du comte de Clermont, à ce qui le rend digne, aujourd’hui encore, qu’on s’occupe de lui. […] Un beau mouvement toutefois, et digne de Voltaire quand il est éloquent, y salue ces nobles blessés, le comte de Lautrec, le marquis de Ségur, mutilé d’un bras : Anges des cieux, Puissances immortelles Qui présidez à nos jours passagers, Sauvez Lautrec au milieu des dangers ; Mettez Ségur à l’ombre de vos ailes. […] Il y eut un mémoire écrit au nom du prince sur la question, et une réponse catégorique et fort digne, de Duclos : il importait au moins qu’après l’avance qu’on lui avait faite et qu’elle s’était empressée d’accueillir, la Compagnie ne reçut point un affront.
Envisagé à ce point de vue, l’Essai de sir Henry Bulwer, sans être complet, est tout à fait digne de l’homme d’État distingué qui l’a écrit, et il est piquant, pour nous Français, autant qu’instructif de voir des événements et des hommes avec lesquels nous sommes familiers, jugés dans un esprit élevé et indépendant par un étranger, qui d’ailleurs connaît si bien la France et qui, de tout temps, en a beaucoup aimé le séjour et la société, sinon les gouvernements et la politique. […] L’anecdote est digne d’être vraie, et la porte d’entrée était bien choisie. […] Marie-Joseph Chénier n’a pas craint d’appeler cet ouvrage a un monument de gloire littéraire où tous les charmes du style embellissent les idées philosophiques. » Il ne se pouvait de plus digne testament de cette féconde et illustre législature.
Une versification familière et charmante, tout à fait digne de Gresset, amène, en se jouant, de spirituels détails dans un ton de malice adoucie. […] Le Prince-Évêque de Liège aurait bien pu dire à Berquin et à Léonard : « Et vitula tu dignus et hic… Vous êtes dignes tous les deux de la tabatière. » Léonard, sur la fin de son séjour à Liège, dut connaître le jeune baron de Villenfagne qui aimait la littérature, qui se fit éditeur des œuvres choisies du baron de Walef (1779), et qui a depuis publié deux volumes de Mélanges (1788 et 1810) sur l’histoire et la littérature tant liégeoises que françaises. […] Le Prince-Évêque de Liège aurait bien pu dire à Berquin et à Léonard : « Et vitula tu dignus et hic… Vous êtes dignes tous les deux de la tabatière. » Léonard, sur la fin de son séjour à Liège, dut connaître le jeune baron de Villenfagne qui aimait la littérature, qui se fit éditeur des œuvres choisies du baron de Walef (1779), et qui a depuis publié deux volumes de Mélanges (1788 et 1810) sur l’histoire et la littérature tant liégeoises que françaises.
Après tout, comme les sciences valent par elles-mêmes et non par le bruit qu’elles font, cette sorte de discrédit ne serait qu’un très-petit mal, ce serait peut-être même un bien (au point de vue de la vraie science), si beaucoup de bons esprits ne se joignaient à la foule en cette circonstance, et si des objections dignes d’un examen sérieux n’étaient mêlées à des entraînements peu éclairés. […] Maintenant, en laissant même de côté le haut intérêt qui s’attache à l’homme, d’abord parce que nous sommes des hommes, et ensuite à cause de l’excellence et de la dignité de la nature humaine, en laissant de côté les questions morales et religieuses qui font de l’homme l’objet le plus élevé de la spéculation humaine, je le demande, quelle raison y aurait-il pour que les phénomènes par lesquels se manifeste l’humanité fussent moins dignes d’étude que ceux de la nature ? […] Il y a des lois d’action et de réaction, des lois d’oscillation et de progrès, qui sont dignes du plus haut intérêt, et ainsi l’histoire de la philosophie jette une grande lumière sur les lois mêmes de l’esprit humain.
Je crois que la vie de Gandar, bien présentée, nous montrerait, non pas seulement en préceptes, mais en action, toutes les préparations, toutes les études préliminaires, tous les exercices gradués et les préludes déjà définitifs et bien complets, au moyen desquels on peut devenir un digne, un savant, un autorisé et, je ne crains pas d’ajouter, un éloquent professeur. […] C’est en faisant cette étude préliminaire, opportune, féconde, que vous vous montrerez tout à fait digne de la liberté qui vous est donnée. » « Que faire ? […] Il commença cette vie de studieux loisir : « la liberté presque complète sous le plus beau ciel du monde, quelques livres que ce ciel explique », et, pour les yeux comme pour la pensée, l’accomplissement du vœu le plus cher à tout pèlerin classique digne de ce nom. […] Cherchons donc, cherchons toujours : c’est l’art et c’est la vie ; et grâce à Dieu, les joies de l’effort, si sévères qu’elles soient bien souvent, valent mieux que les joies passagères et stériles du succès. » Quelle digne et loyale nature ! […] Ce noble projet, comme tant d’ébauches et tant de germes dignes de vie, est resté dans le royaume des limbes.
En supposant que l’Abbé de Marsy se soit attaché à l’imitation plus qu’il n’a fait, il auroit toujours la gloire d’avoir su bien choisir ses modeles, & dans ses modeles, les morceaux véritablement dignes d’être imités. […] « Les deux Poëmes Latins de M. l’Abbé de Marsy, l’un sur la Peinture, l’autre sur la Tragédie, sont presque dignes de Virgile & d’Horace, & fort au dessus de Lucrece, autant qu’on en peut juger dans ce Siecle ».
Le grand Corneille sembloit avoir fixé sur lui tous les suffrages, & épuisé l’admiration par la force, la hauteur & la fécondité de son génie, qui, comme un souffle impétueux, avoit tout fait plier devant lui ; Racine ne craignit pas de paroître sur la Scène, &, prenant une autre route, il se montra bientôt digne de le remplacer : la tendresse, l’harmonie, une connoissance profonde du cœur humain, furent les nouveaux ressorts de sa Muse tragique, & le conduisirent rapidement aux mêmes succès. […] L’Histoire fournit assez de révolutions dignes d’occuper Melpomene, sans recourir à des intrigues romanesques qui dégradent le Cothurne.
Dans tout l’honneur primitif de leur naissance, une majestueuse nudité les couvre : on les prendrait pour les souverains de ce nouvel univers, et ils semblent dignes de l’être. […] Il est noble, majestueux, et tout à la fois plein d’innocence et de génie ; il est tel que le peignent les livres saints, digne d’être respecté par les anges et de se promener dans la solitude avec son Créateur.
Les Dauphines littéraires12 I Un singulier phénomène, digne d’être décrit et classé par les moralistes de ce temps, c’est celui d’une Société, démocratique par envie, qui n’a pas mis du tout, comme elle s’en vante, l’aristocratie par terre, mais qui s’est seulement contentée de la transposer ; C’est convenu et c’est entendu. […] Mme de Nérondes est la cousine germaine bien digne de Mme Clémenceau.
Sont-ils dignes d’être canonisés ? […] et elle serait digne de tous les mépris, que vous pourriez, pour sa bouche en cœur et ses révérences, lui rapporter plein votre chapeau !
Tandis que les poètes et le peuple défiguraient ainsi la divinité en la célébrant, les initiés dans leurs mystères lui rendaient un hommage plus pur et plus digne d’elle. […] Elle est digne de la secte qui devait former un jour Épictète dans les fers, et les Antonins sur le trône.
Or, ce qui est parfaitement ridicule dans la discussion des droits et des devoirs humains, n’est pas, que je sache, plus digne de respect dans la discussion politique. […] Peindre l’Amérique dans le style d’Homère est assurément très inutile et très ridicule ; peindre la France dans le style des Sachems ne me semble pas moins digne de risée. […] Guizot satisfont-elles à cette condition d’immutabilité sans laquelle il n’y a qu’une ambition artificielle, nominale, digne tout au plus de l’estime des enfants ? […] Le projet est beau, et digne assurément de tenter les plus hautes ambitions. […] Il a imposé silence aux esprits ignorants et aux esprits blasés, en leur jetant comme une pâture digne d’eux des concetti énigmatiques et de triviales plaisanteries.
Voilà des recherches bien dignes d’un homme ! […] Interdire toutes ces discussions, les seules qui soient dignes d’occuper un bon esprit, c’est éterniser le règne de l’ignorance et de la barbarie. […] C’est là qu’apostrophant l’efféminé, il lui dit : « 0 l’homme vraiment digne d’être livré à la vie ! […] La circonspection de l’empereur dans cette conjoncture est digne d’éloge. […] Eschine, qui était pauvre, lui dit : « Je n’ai rien qui soit digne de vous, et ce n’est que de ce moment que je sens mon indigence.
Les défauts des Allemands sont bien plus le résultat de leurs circonstances que de leur caractère, et ils s’en corrigeront, sans doute, s’il existe chez eux un ordre politique fait pour donner une carrière à des hommes dignes d’être citoyens. […] En effet si l’on était incapable de la résignation chrétienne qui soumet à l’épreuve de la vie, au moins devrait-on retourner à l’antique beauté du caractère des anciens, et faire sa divinité de la gloire, lorsqu’on ne se sentirait pas digne d’immoler cette gloire même à de plus hautes vertus. […] L’esprit, le courage même ne sont dignes de louange que quand ils servent à ce dévouement qui peut produire plus de merveilles que le génie. […] Vous voyez, mon digne ami, que Dieu vint à mon secours dans cet instant, car la nécessité de repousser une offre si indigne de moi, me rendit les forces que j’avais perdues. […] Ces craintes étaient impies, je le confesse humblement devant vous, mon digne ami.
Conversations de Goethe, par Eckermann (3e partie) I Ne nous étonnons pas de cette admiration minutieuse qu’un grand esprit comme Goethe inspire à ceux qui sont capables et dignes de l’entendre dans le repos de sa vieillesse à la fin de ses jours. […] Ses dernières poésies sont sans frein, sans mesure, et ses attaques contre le roi, contre le gouvernement, contre l’esprit pacifique des citoyens, le rendent parfaitement digne de sa peine. […] — Dans cette seconde partie, dis-je, on voit apparaître un monde bien plus riche que dans la première. » XV Ici plusieurs pages sont consacrées à un magnifique éloge de Walter Scott ; digne sujet, digne juge. […] Pendant cette vie tout éthérée en apparence, Goethe a eu le bonheur d’inspirer une amitié très ardente et constante jusqu’à la mort au prince régnant de Weimar et à la souveraine digne de lui. […] Il était accompagné d’une lettre de David renfermant ces passages : “Je vous envoie cette faible image de vos traits, non comme un présent digne de vous, mais comme le témoignage d’un cœur qui sait mieux éprouver des sentiments que les exprimer… Vous êtes la grande figure poétique de notre époque ; une statue vous est due : j’ai essayé d’en faire un fragment ; un génie digne de vous l’achèvera.”
Ce seul travail, depuis la rupture de la paix d’Amiens jusqu’à la bataille de Trafalgar, serait de lui seul un monument historique digne de rester à jamais dans les archives de l’Europe. […] Thiers, intitulé Camp de Boulogne, une des scènes dignes de celles où le fils de Philippe ralliait ses auxiliaires et endormait ses ennemis au moment où il était campé sur la Propontide, avant de passer, avec toute sa fortune et toute son espérance, en Asie. […] Thiers donne à ce procès l’intérêt d’un grand drame ; il y est aussi juste qu’éloquent : juste envers Bonaparte, qui avait le droit de sévir contre un rival devenu un conjuré ; juste envers Moreau, qui avait failli à la patrie, à la reconnaissance et à lui-même ; juste envers la magistrature du pays, qui montre dans ce jugement des caractères dignes de Rome. […] » Le reproche était peu digne, adressé à l’un des généraux les plus désintéressés du temps. […] C’est à ce titre surtout que de pareilles pompes sont dignes d’attirer l’attention de l’histoire.
Talma me dit qu’on allait la représenter avec une solennité digne des théâtres antiques, et qu’il étudiait déjà pour cette représentation le rôle du grand-prêtre. […] Une famille illustre par le génie autant que par la naissance m’avait jugé digne de contempler un tel spectacle, pour me donner l’émulation d’une gloire dont elle avait, dans sa bienveillance, le pressentiment pour ma jeunesse. […] « Tremble, m’a-t-elle dit, fille digne de moi ; Le cruel Dieu des Juifs l’emporte aussi sur toi. […] Paraissez, cher enfant, digne sang de nos rois ! […] Il date du ciel, et il est digne d’y être parlé.
Campe était devenu l’ami de la maison ; c’était un homme d’élite, très capable et très digne d’élever un savant et un homme d’État, tels que furent Guillaume et Alexandre de Humboldt, deux frères éclos du même nid, pour une double célébrité. […] Mais Guillaume, nommé ambassadeur de Prusse auprès de la cour de Rome, retiré à Albano et plongé dans des travaux poétiques, lui écrivait alors des vers fraternels dignes de Cicéron à Atticus : « Hélas ! […] Puisse le destin, que notre affection implore en tremblant pour toi, t’accorder toujours la même faveur, toutes les fois que l’autre hémisphère attirera tes pas ; puisse-t-il te ramener toujours heureusement aux rivages de ta patrie, le front ceint d’une nouvelle couronne… Pour moi, dans le sein de l’amitié, je ne demande qu’une maison tranquille, où ton nom réveille dans mon fils le désir d’atteindre ta renommée, une tombe qui me recouvre, un jour, avec ses frères… Allez maintenant, mes vers, allez dire à celui que j’aime que ces chants vont timidement à lui, des collines d’Albano ; d’autres porteront plus haut sa gloire, sur les ailes de la poésie… » Pendant qu’Alexandre de Humboldt, faisant collaborer à son œuvre tous les savants français, par un concours de travaux spéciaux dont il leur donnait les sujets, et dont il payait les frais de sa fortune, formait une œuvre sur les régions équinoxiales, dont le prix dépassait déjà 5 ou 6 mille francs l’exemplaire, monument plus digne d’une nation que d’un particulier, Guillaume, chassé de Rome par Bonaparte, rentrait attristé dans sa patrie. […] On sentait en lui un homme digne d’étudier les hommes ; on sentait, dans l’autre, un artiste capable de leur faire jouer les rôles légers, divers, personnels d’une existence à tiroirs. […] J’en suis digne par le prix que j’y mets.
Laurent de Médicis, témoin des jeux de ce génie enfant, qui dépassait du premier jet ses modèles et ses maîtres, se prit d’une tendre et paternelle admiration pour Michel-Ange ; il lui donna une chambre dans son propre palais ; il l’admit à sa table, où Laurent le Magnifique, entouré de ses enfants, des poëtes, des savants, des philosophes, des artistes les plus renommés de la république, prolongeait dans la nuit les entretiens dignes des temps de Périclès, pour faire rejaillir jusque sur le père de Michel-Ange les bontés qu’il avait pour le fils. […] C’était le seul édifice, en effet, digne de contenir son génie. […] Les deux époux étaient dignes l’un de l’autre, l’amour le plus tendre les unissait avant la volonté de leurs familles ; mais l’héroïsme du jeune Pescaire l’arracha peu de temps après le mariage des bras de son amante. […] Vittoria Colonna, instruite de cette tentative, lui écrivit cette lettre où la vertu parle, dans ces temps corrompus, un langage digne de l’antiquité : « Souvenez-vous, lui écrivit-elle, de votre vertu, qui vous élève au-dessus de la fortune et de la gloire des rois. […] Dans le sonnet suivant, il revient à son amour et à son deuil, et il défie le sort de ruiner davantage ses espérances, dans une image digne des prophètes : « Que peut la scie ou le ver contre le chêne réduit déjà en cendres ?
Quelle douleur à la fois majestueuse et ingénue, et digne de la veuve d’Hector ! […] Telles sont les plus heureuses productions de l’art, celles qui par la force du sujet réussiraient même dans la main d’un homme médiocre ; et quand l’exécution en est digne, ce sont les chefs-d’oeuvre de l’esprit humain. […] Sa comédie des plaideurs obtint le suffrage de Molière, et en était digne. […] Racine reçut de Louis XIV et de son digne ministre Colbert des récompenses et des honneurs. […] Je vous en conjure encore, méfiez-vous de ces législateurs enthousiastes : opposez-leur toujours les anciens et Racine : opposez-leur ce grand axiome de son digne ami, ce principe qui paraît si simple et qui est si fécond, rien n’est beau que le vrai.
Pour nous, c’est quelque chose de plus : c’est la substance même de toutes les histoires qu’on sera plus tard tenté d’écrire sur ce magnifique sujet, digne des Tertulliens futurs. […] … Ne serait-il pas mieux et plus digne d’elle de laisser dormir, dans la mémoire des hommes de nos temps de faiblesse et d’inimitié, des faits qui se réveilleront un jour ou l’autre dans la mémoire d’une postérité plus calme, et qui ne manqueront jamais de leur jugement ? […] Lui et son digne agent, le cardinal de Bernis, ne pesèrent que le poids de leur légèreté dans les décisions du conclave. […] Cet Ordre incomparable fut digne, jusqu’à la dernière heure d’injustice et de barbarie, de ses augustes Constitutions. […] Les faits exposés, l’histoire achevée, ne touchons pas rudement à la mémoire de Clément XIV, « de ce pontife moins indigne d’estime que digne de compassion ».
Ce n’est pas tant encore pour jouir que pour vivre et subsister que s’agite la majorité de l’espèce, et c’est là le problème présent qui, pour être moins noble en apparence et moins digne de figurer sur les bannières, n’en est pas moins capital et sacré. […] Ici il n’y a pas de quoi s’offenser : c’est l’auteur même qui parle, qui se démontre, et la dissection ne porte que sur les procédés de l’intelligence ; ce que l’auteur ajoute sur sa disposition morale est digne de ce qui précède, et résume nettement sa profession de foi politique : « J’ai l’orgueil de croire que je suis plus propre que personne à apporter dans un pareil sujet une grande liberté d’esprit, et à y parler sans passion et sans réticence des hommes et des choses : car, quant aux hommes, quoiqu’ils aient vécu de notre temps, je suis sûr de n’avoir à leur égard ni amour ni haine ; et quant aux formes des choses qu’on nomme des constitutions, des lois, des dynasties, des classes, elles n’ont point, pour ainsi dire, je ne dirai pas de valeur, mais d’existence à mes yeux, indépendamment des effets qu’elles produisent. […] S’il y a l’ombre d’un inconvénient, ne me le dites pas. » Mes articles faits et publiés (ceux qu’on vient de lire), le digne ami de Tocqueville et qui était bien près alors d’aller le rejoindre lui-même, aussitôt sa lâche pieuse accomplie, M. de Beaumont m’écrivait de Tours, a la date du 6 janvier 1866 : « On dit que les auteurs ne sont jamais complètement satisfaits de ce qu’on publie même de plus louangeur sur leurs œuvres. […] Si vous ne critiquez que ce qui mérite de l’être, pourrai-je me plaindre de ce que vous ne loueriez pas toujours et pas assez tout ce qui, dans Tocqueville, me paraît digne de louange ?
Wagner, en donnant la quatrième édition du Virgile consacré, et en paraissant demander grâce pour s’être permis d’y indiquer quelques corrections et d’y ajouter partout où il avait pu des perfectionnements, terminait sa préface par cette sorte d’adjuration aux mânes vénérables : « Mais toi, Âme pieuse et ingénue de Heyne, si ta pensée s’abaisse encore sur ces choses, pardonne, je t’en supplie, s’il m’est échappé, chemin faisant, quelques mots non assez respectueux à ton égard ; pardonne, si ma médiocrité a avancé quelque chose qui ne soit pas assez digne d’un si grand nom et d’une si grande renommée dont tu as acquis la plus grande part par ton zèle à éclairer ces mêmes poèmes. […] Il serait vraiment digne de la maison Hachette de vulgariser enfin cette réforme qui ne prend quelque importance que parce qu’on y résiste. […] Chacun lui paraît digne de la génisse qui fait l’enjeu : Non nostrum inter vos tantas componere lites. […] Heyne inclinait même à retrancher les deux derniers vers comme peu dignes de Virgile.
Arrivé à terre, le digne gouverneur rejoint son beau-frère lui-même, et les voilà se racontant leurs destinées mutuelles depuis la séparation. […] » Malgré les démonstrations du doyen, les passions de tous ces jolis couples allaient toujours et se compliquaient follement ; l’aimable Rose, dans sa logique de cœur, ne soutenait pas moins à son frère Patrice qu’en dépit du sort qui le séparait de son amante, ils étaient, lui et elle, dignes d’envie, et que des peines causées par la fidélité et la tendresse méritaient le nom du plus charmant bonheur. […] Ainsi se termina, par une catastrophe digne du Cléveland, cette vie romanesque et agitée. […] Énumérant les amis distingués que s’était faits l’excellent Mussard : « A leur tête, dit-il, je mets l’abbé Prévost, homme très-aimable et très-simple, dont le cœur vivifiait ses écrits dignes de l’immortalité, et qui n’avait rien dans la société du coloris qu’il donnait à ses ouvrages. » Il est permis de croire que l’abbé Prévost avait eu autrefois ce coloris de conversation, mais qu’il l’avait un peu perdu en vieillissant.
Benvenuto Cellini raconte qu’étant entré un jour au palais en montrant son portrait gravé au duc, il le trouva indisposé et couché sur le même lit que son cousin, et qu’ayant demandé à Lorenzino s’il ne consentirait pas à lui donner le sujet d’un revers de sa médaille, celui-ci lui avait répondu avec enjouement « qu’il fût tranquille et qu’en ce moment même il pensait à lui en fournir un digne de la gloire d’Alexandre, et qui étonnerait le monde. » Alexandre se tourna avec un sourire de pitié dédaigneuse sur son lit et se rendormit. […] Le dernier grand-duc, chassé par les Piémontais, était un souverain digne du nom des Médicis. […] J’ai presque entendu dire à ce digne prêtre, qui fut ensuite si admirable, qu’il n’avait jamais rien vu de plus grand, de plus incroyable que la constance et l’imperturbabilité de Laurent en face de la mort, sa mémoire de son passé, sa façon de disposer les choses présentes, et le soin si sage, si religieux qu’il montra dans sa prévoyance de l’avenir. […] Ce qui nous console dans ce grand deuil général, ce sont ses enfants, si éminemment dignes de leur père, et Pierre, l’un d’eux, leur aîné, qui, à peine dans sa vingt et unième année, soutient le poids des affaires de toute la république avec une gravité, une sagesse et une autorité telles, qu’il fait croire à une vie nouvelle du père dans son fils.
« Dans Malesherbes ministre, a dit un historien bien digne de le comprendre (M. […] Il semblait qu’en se retirant alors comme il fit, en se consacrant uniquement désormais aux soins de l’agriculture dans ses beaux jardins de Malesherbes, ce noble et digne vieillard de près de soixante-dix ans avait clos définitivement sa carrière. […] Enfin, monsieur, je croyais mon neveu digne des larmes du public, et je ne crois mon cousin digne que des larmes de ses amis : vous voyez combien je vous parle naturellement.
Nous l’avouerons cependant, si jamais révolution nous parut digne et capable d’abolir la peine de mort, c’est la révolution de juillet. […] alors, votre séance eût été vraiment digne, grande, sainte, majestueuse, vénérable. […] Elle veut mener désormais meilleure vie et rester digne de sa dernière belle action. […] Il s’est bien prononcé çà et là quelques belles et dignes paroles.
Nous avons dit comment le digne ouvrier français respecte en lui-même une qualité de bon travailleur, une aptitude à créer qui est le résultat d’une longue sélection le fruit de sa propre vie et des vies de ses aïeux. […] Ces vues sont dignes d’attention. […] Le Français digne de ce nom, fier de son histoire, fier de sa pensée ou de sa foi, le Français veut être juste ou ne pas être. […] La morale, fondée clairement sur le principe nouveau du « refus de parvenir », fait de chacun de ces Français un citoyen méprisant de jouir, désireux de servir, préoccupé de son travail, désintéressé de lui-même, digne de l’amour… Pourquoi la censure a-t-elle zébré, déchiqueté ce testament d’un génie innocent ?
Le présent volume, digne du précédent, contient trois excursions pédestres, l’une ancienne, de 1833, à la Grande-Chartreuse, l’autre à Gênes et à la Corniche ; mais surtout on y voit la dernière grande excursion que Töpffer a conduite au cœur de la Suisse, la plus importante, celle du moins où, comme en prévision de sa fin prochaine, il a rassemblé le plus de souvenirs, de résultats d’observation ou d’expérience, son Voyage de 1842 autour du Mont-Blanc et au Grimsel. […] Ces dignes gens ont là-haut des solitudes et de douces cabanes, ce qu’on appelle le Mayen de la famille ; ils se hâtent d’y monter dès qu’avril a fondu les neiges, et ils ne redescendent plus à Sion qu’à l’approche de l’hiver. […] Sous cette impression d’une douce piété communicative, il appellera donc plus d’une fois les dignes religieux du Grand-Saint-Bernard ses frères, ses coreligionnaires très certainement en dépit de quiconque pourrait y trouver à redire.
Ce dernier était pour la continuation de la guerre dans laquelle il voyait le point d’appui de sa puissance militaire et de son autorité : Barneveld était pour la paix, mais pour une paix digne. […] Ce prud’homme était digne d’un siècle moins corrompu que le nôtre, où sa vertu n’a pas été estimée selon son prix. […] Le président, en effet, n’avait qu’un fils, le baron de Montjeu, qui, selon les uns, était un des cavaliers les plus braves et les plus accomplis de la Cour, mais qui n’était guère digne de son père, selon les autres.
Certes, ce sentiment exprimé par un jeune homme de vingt-deux ans, cette leçon donnée aux esprits forts (appelés ici par politesse des âmes fortes), en présence de la philosophie du siècle, à deux pas de Voltaire et pendant la vogue de l’abbé Raynal, annonce, encore mieux que Le Jeune d’Olban et que les Élégies, combien Ramond appartient d’avance à un mouvement réparateur et à une inspiration digne des régions sereines où se passeront les plus belles heures de sa vie83. […] Elles sont si peu connues aujourd’hui du grand nombre des lecteurs et elles sont tellement dignes de l’être, elles sont si belles de vérité et si irréprochables de forme, que j’éprouve un extrême embarras de choix dans le désir que j’aurais de les faire lire par amples extraits et de les faire goûter de tous : Arrivé dans cette forêt, dit-il quelque part, et prêt à descendre, j’éprouvais une sorte de tristesse que, depuis ce temps-là, j’ai toujours retrouvée, quand du haut des Alpes je suis descendu dans les plaines. […] On sent à cette vive peinture que Ramond, malgré sa précoce expérience, n’a pas épuisé encore cette puissance d’enthousiasme, cette ardeur de confiance et d’initiation qui peut entraîner même les plus éclairées des jeunes âmes : ici, il est presque fasciné par Lavater, il le sera tout à l’heure et pour quelque temps par un moins digne, par Cagliostro, un Lavater bien moins innocent.
Les autres écrivains et citoyens genevois, restés plus fidèles que lui, ont besoin, pour être appréciés, d’une étude attentive, et d’être écoutés de très près ; et ils en sont dignes. […] Chacun d’eux, lorsqu’il est reçu dans ce corps, prononce un discours comme pour montrer de nouveau et de vive voix qu’il est digne du choix qu’on a fait en sa personne, et ce discours qui servira de modèle à d’autres, et qui montre sur quoi principalement un orateur a bonne grâce de s’exercer, doit contenir des éloges, des éloges donnés aux vivants et aux morts. […] Mais faut-il donc, pour cette république studieuse et intelligente, parce qu’elle est devenue démocratique dans sa forme, dans son ménage intérieur, lui faut-il renoncer à l’idée de voir sortir désormais de son sein des continuateurs et de dignes héritiers de ces hommes qui ont exercé sur leur temps une action si suivie, si salutaire, qui ont rempli dans le monde savant une telle fonction, plus efficace et plus utile encore que brillante ?
Et puis, est-ce rendre à leurs œuvres le plus digne hommage que d’éviter d’en parler devant tous ? […] L’idée qui prévalut et qui fut aussitôt celle de la politique de la paix et de se faire pardonner par l’Europe la révolution accomplie, était-elle l’idée la plus digne, et même l’idée la plus politique ? […] Il en résulte que la politique la plus digne et la plus hautaine consistait en ce temps-là, après un déplaisir et un léger affront reçu, à le constater : « Vous m’avez fait une insulte, je tiens à vous témoigner par mon attitude que je la ressens. » Et puis après… et puis après ?
La Grèce, depuis que ses dissensions intestines ont éclaté, depuis qu’elle a cru devoir se passer du roi modeste qu’elle avait gardé pendant trente ans et en quêter partout un autre, a présenté à ses anciens amis et admirateurs un spectacle bien digne de réflexion et qui reporte la pensée avec d’étranges vicissitudes vers des temps de meilleure mémoire. […] Aller en Grèce dès 1824, c’était, pour bien des âmes lassées et rassasiées de tout, le réveil moral, la guérison des passions factices, des vagues ennuis ; — pour le vieux soldat des grandes guerres, c’était retrouver un digne emploi de son épée non rouillée encore ; — pour le jeune homme en proie aux lâches oisivetés et aux inoccupations rongeantes, c’était la réalisation inespérée d’un beau rêve, cette fois saisissable et palpable ; c’était le baptême et la consécration pour une grande cause. […] Grenier, quand il fera réimprimer son excellent livre, nous doit, ce me semble, un court résumé historique de tout ce passé, un chapitre narratif où se dessineraient quelques figures originales de philhellènes : je vois d’ici sous sa plume trois beaux portraits aussi peu semblables entre eux que possible, mais dignes d’être réunis et rapprochés sous une même invocation et à un même titre de pieuse reconnaissance : lord Byron, le banquier genevois Eynard et le colonel Fabvier, trois types de cœurs passionnés, dévoués et sans réserve aucune au service de la même cause.
« La Gazette parle de lui en termes magnifiques : je les transcrirais ici comme dignes d’être retenus et comme si bien mérités par cet homme vraiment illustre, sans que (si ce n’est que) vous la voyez ordinairement. […] Despréaux est droit d’esprit et de cœur, plein d’équité, généreux ami ; mais la nécessité de pardonner une injure, où est un chrétien qui veut être digne de son nom, ne semble pas avoir encore fait assez d’impression sur son esprit ni sur son cœur. […] Ainsi finit cette petite guerre, peu digne des funérailles littéraires de Racine.
Janin, en composant le roman qu’il vient de publier, a eu l’excellente idée, et bien digne d’un véritable homme de lettres, de se distraire depuis deux ans du spectacle des choses publiques, du spectacle de la rue, et de chercher dans un sujet emprunté au Grand Siècle un oubli des misères et des ennuis du présent. […] Janin affectionne soit surtout celle de fantaisie et de broderie, elle lui a servi plus d’une fois à recouvrir l’autre, la vraie critique digne de ce nom. […] Privées de leur supérieure, ses filles, à Toulouse, se montrèrent dignes d’elle, et soutinrent le choc des puissances, comme elles auraient soutenu un siège et un assaut.
des anciens augustes, vénérables, des Eschyle, des Sophocle, mais tout mutilés, et qui ne sont là debout que pour nous représenter un débris d’eux-mêmes, le reste de tant d’autres aussi dignes qu’eux sans doute de survivre, et qui ont succombé à jamais sous l’injure des âges. […] Montaigne a été une espèce de classique anticipé, de la famille d’Horace, mais qui se livrait en enfant perdu, et faute de dignes alentours, à toutes les fantaisies libertines de sa plume et de son humeur. […] Avant tout je voudrais n’exclure personne entre les dignes, et que chacun y fût à sa place, depuis le plus libre des génies créateurs et le plus grand des classiques sans le savoir, Shakespeare, jusqu’au tout dernier des classiques en diminutif, Andrieux.
Mais les personnes qui l’ont le mieux connue, et qui sont le plus dignes de foi, assurent qu’une telle disposition était bien loin d’être la sienne. […] Elle s’y montre très frappée de la dignité de sa mère qui, aux paroles de diverse sorte qu’on adressait aux nobles captifs, n’opposait le plus souvent que le silence : Ma mère, comme à l’ordinaire, ne dit mot, écrit Madame à propos d’une nouvelle insultante qu’on leur annonçait, et elle n’eut pas même l’air d’entendre ; souvent son calme si méprisant et son maintien si digne en imposèrent : c’était rarement à elle qu’on osait adresser la parole. […] Un des commissaires chargés de visiter la jeune princesse au Temple l’a représentée dans son attitude digne, souffrante et appauvrie ; tricotant, assise près de la fenêtre et loin du feu (car elle ne voyait pas assez clair pour son travail près de la cheminée), les mains enflées par le froid et pleines d’engelures (car on ne lui donnait pas assez de bois pour la chauffer à cette distance).
Ainsi Monsieur, ce père de la branche des d’Orléans, et, en général, un père si faible et si peu digne, avait cela déjà de ses successeurs, d’aimer à tenir sa cour au Palais-Royal et à être bien vu à Paris, à y faire un peu concurrence au roi ; si nul qu’il fût, la vanité chez lui devançait et devinait la politique. […] Ce fut le moment aussi où il agit avec le plus de zèle sur l’esprit de Monsieur pour le porter à devenir un prince digne d’estime et à la hauteur de sa naissance. […] Je n’ai plus rien à dire de cette princesse, sinon qu’elle aurait été la gloire et l’honneur de son siècle, et que son siècle l’aurait adorée, s’il avait été digne d’elle.
M. le ministre d’État et de la Maison de l’Empereur et M. le Ministre de l’Intérieur de désigner les ouvrages dramatiques, dont les auteurs lui paraîtraient dignes des primes instituées par l’arrêté ministériel du 12 octobre 1851, vient vous prier de vouloir bien transmettre à MM. les ministres qui l’ont conjointement nommée le résultat des travaux auxquels elle s’est livrée et que vous avez si bien dirigés vous-même. […] si un jour, dans ces concours annuels, les juges rencontraient quelque jeune ouvrage digne de ces époques fortunées, nous ne croyons pas les engager à l’avance en disant qu’ils n’auraient qu’un regret, celui d’estimer leur prix trop inférieur, leur couronne trop incomplète ; ils la mettraient au pied du chef-d’œuvre.
Nous avons ouvert un théâtre ; la marquise l’a entrepris avec une ardeur digne de ses père et mère18 ; elle s’est chargée de mettre du rouge à deux soldats du régiment du roi qui faisaient Pauline et Stratonice, et bien qu’ils en fussent plus couverts qu’un train de carrosse neuf, elle ne leur en trouvait pas assez. […] Le public, disposé à tout blâmer, trouva, pour cette fois avec raison, que tout le monde avait tort : Voltaire, d’avoir offensé le chevalier de Rohan ; celui-ci, d’avoir osé commettre un crime digne de mort, en faisant battre un citoyen ; le gouvernement, de n’avoir pas puni la notoriété d’une mauvaise action, et d’avoir fait mettre le battu à la Bastille pour tranquilliser le batteur.
D’ici à quelques jours, tout mot sincère sur notre glorieuse Révolution, tout hommage à son jeune et digne historien nous seront peut-être interdits 10 ; peut-être notre comité de salut public aura repris sa tâche. […] Le Directoire en effet, composé de cinq bourgeois, plus ou moins dignes d’estime, n’avait rien, en ces temps d’effervescence, qui pût éblouir et subjuguer.
Les jugements de Jefferson sur la France et sur la Révolution qu’il avait vue commencer, sont dignes d’être médités et portent à un haut degré l’empreinte du caractère judicieux, circonspect et persévérant que tout nous signale en lui. […] Une foule de pensées justes et d’observations frappantes ressortent de cette Correspondance et augmentent le trésor du lecteur : « Je ne crois pas avec les La Rochefoucauld et les Montaigne que les quatorze quinzièmes des hommes soient des fripons : je crois que cette proportion doit être singulièrement restreinte en faveur de l’honnêteté commune ; mais j’ai toujours reconnu que les fripons abondent à la surface, et je ne crois pas que la proportion soit trop forte pour les classes supérieures et pour ceux qui, s’élevant au-dessus d’une multitude ignorante et abrutie, trouvent toujours moyen de se nicher dans les positions où il y a du pouvoir et du profit à acquérir. » L’expression, en maint endroit, s’anime de bonhomie et de grâce : « Cela, dit-il, en parlant de l’incandescence politique, cela peut convenir aux jeunes gens, pour qui les passions sont des jouissances ; la tranquillité est le lait des vieillards. » Le portrait que Jefferson a tracé de Washington est digne de tous deux : la beauté morale reluit dans ces lignes calmes et précises, dans cette touche solide.
Roland a fini, comme Valazé, comme Condorcet : est-ce donc de ce seul mot rapetissant qu’il convenait de payer sa digne mémoire ? […] Lerminier étudiât de plus près cette opposition dans laquelle Nonotte ou Fréron, ou l’abbé Guénée, lui auraient offert peut-être des pages dignes de considération.
Nonobstant cette renommée, il n’en est pas moins constant que ces trois poètes restent, dans leur essence, éminemment absolus et dignes par cela même de figurer dans la plaquette qui nous occupe. […] Mais ce rôle doux et miséricordieux qu’il aurait voulu que le sort lui assignât, il l’a vu confié à de moins dignes, et ce n’est pas là une des moindres amertumes de sa vie.
La littérature est l’expression mémorable, c’est-à-dire digne de mémoire, de l’esprit humain. […] Des peuples nouveaux recommencent à penser, à parler, à écrire des choses dignes de mémoire.
La pensée doit se présenter, et c’est sa façon d’attirer à elle, de manière à être entendue, du premier abord, en son ensemble, de manière à être apparemment et même partiellement accessible ; il faut ensuite qu’à la reprendre on s’aperçoive qu’on ne l’avait pas entièrement entendue et qu’elle est digne d’être creusée, et qu’on la creuse en effet, et qu’on la trouve toujours plus riche ; et s’il se peut, il faut enfin qu’elle soit pour ainsi dire inépuisable. Et la pensée, qu’on aura, pour ainsi parler, vidée du premier coup, n’est assurément qu’un lieu commun ; mais il est très important qu’une pensée originale soit d’abord accessible et comme hospitalière, ensuite se révèle comme digne d’un examen prolongé et l’exigeant.
— Les débris d’un miroir Que l’on retrouve un jour au fond d’un vieux tiroir ; La figure y grimace, et la glace brisée Nous y montre des traits dignes de la risée… Tombez, vieux chênes morts ! […] Et puis, il avait, pour lui mettre son manteau sur les épaules et de la ouate autour du cœur, les deux belles mains dévouées de celle qui fut un jour digne de les poser, ses belles mains, dans la main couvre-empire de Louis XIV !
Deltuf, le pathétique et le comique se combattent, mais il reste toujours la vieille fille idéale à nous donner, l’être fier et pur qui n’a pas trouvé un cœur digne d’elle et qui a accepté la tristesse du célibat sans en prendre les ridicules. […] Deltuf, qui a l’œil aux nuances et qui, quoique fin, a parfois le naturel de la force, était digne, ce me semble, d’entr’ouvrir ce sujet superbe et de nous donner une confession qui aurait été la confession de toute une vie, et non plus celle d’un moment dans la vie, comme La Confession d’Antoinette.
Pourquoi donc venir troubler méchamment la quiétude du digne archevêque ? […] » une ou deux fois, bien souvent ces pacifiques Auvergnats ont dû vous regretter, digne monsieur Comboulas ! […] en profitait qui voulait ; le digne baron en profitait tout le premier. […] Pour nous, il n’y a que les luttes du talent qui soient dignes d’attention ou d’intérêt. […] Ce monument est tout à fait digne du sculpteur qui l’a élevé.
Il ne lui importe pas de le sçavoir ; mais il m’importe beaucoup de ne lui paroître pas digne de son mépris par un orgueil extravagant. […] On croiroit d’abord que le courage seroit d’autant plus digne d’admiration, qu’il se resoud à un plus grand mal pour un plus petit avantage : mais il n’en est pas ainsi. […] Tous deux par leur vertu sont dignes d’être aimés, autant qu’ils le sont, et le paroissent encore plus par la maniere dont ils pensent l’un de l’autre. […] Un instant va décider de mon innocence ou de ma perfidie ; et ma mort va vous venger d’un traître, ou les dieux vont vous rendre un fils digne de vous. […] Il est vrai, monsieur, mais pour des pensées si communes, qu’à peine les auroit-il jugées dignes d’être dites, si elles lui avoient moins coûté.
Au-delà du paisible horizon de la famille, il n’aperçoit pas de bonheur digne d’envie. […] Je ne dis pas qu’il récite des odes dignes de Pindare, ni des sonnets dignes de Pétrarque ; mais il est lyrique autant qu’il est permis de l’être dans la comédie. […] Non seulement ses œuvres sont dignes de pitié, mais il est impossible de savoir où sont ses œuvres. […] Le suicide lui paraissait la seule vengeance digne de lui. […] Hugo ce qui m’a paru le plus digne d’attention et de critique.
Sully Prudhomme Le spectacle de l’Océan, l’un des plus variés et des plus grands de la nature, vous a suggéré des enseignements moraux bien dignes d’un pareil maître.
Le dernier volume de ces Mémoires est composé en partie des Ecrits de son fils, qui s'y montre digne, par ses talens, d'avoir été le successeur d'un tel pere.
Selon lui, en effet, dans le récit des plus circonstanciés qu’il nous offre des dispositions des puissances à ce congrès et des phases diverses par lesquelles on passa successivement, M. de Talleyrand, qui eut l’art et le mérite, dès le premier jour, de s’y faire une place digne de la France, n’aurait point été également habile à profiter de la situation qu’il s’y était faite ; il aurait dû tenter d’autres alliances que celles qu’il pratiqua, se rapprocher de la Russie et de la Prusse plutôt que de se lier avec l’Angleterre et avec l’Autriche. […] Cet ensemble de procédés, cette rigueur européenne, d’où la France est sortie réduite à ses plus justes limites et à son strict nécessaire, mais digne et à son honneur, sinon à son profit, arrache à M.
Jusque dans les Bucoliques pourtant, Virgile, ce génie naturellement grave, sérieux et mélancolique, présage déjà son originalité sur deux points : la Xe églogue, si passionnée, en mémoire de Gallus, laisse déjà éclater les accents du chantre de Didon, et la IVe églogue à Pollion, toute religieuse et sibylline, toute digne d’un consul, fait entrevoir dans le lointain les beautés sévères et sacrées du VIe livre de l’Enéide. […] Rossignol est de cette école, de même qu’il est aussi de celle du digne et fin M.
Rien n’avertit une littérature d’être digne, sérieuse, honnête, comme de sentir qu’on a l’œil sur elle et qu’elle est l’objet d’une haute attention. […] Ce que l’armée, ce que l’industrie, ce que les serviteurs de la France et les travailleurs de tout genre ont obtenu de l’attention magnanime du prince, que la littérature sente qu’elle l’obtient aussi à son tour ; et ces gens de lettres, qui hier encore se décourageaient ou se dispersaient au hasard en laissant s’égarer leur talent, deviendront véritablement alors des serviteurs de la France, des travailleurs utiles et dignes.
Ce n’est donc pas une limite étroite que nous posons à la nature humaine, en proposant à son activité une seule chose comme digne d’elle : car cette seule chose renferme l’infini. […] Ainsi, tout ce qui se rattache à la vie supérieure de l’homme, à cette vie par laquelle il se distingue de l’animal, tout cela est sacré, tout cela est digne de la passion des belles âmes.
Or, sans établir ici de comparaisons qui exigeraient des restrictions et des développements, le beau dans Shakespeare est tout aussi classique (si classique signifie digne d’être étudié) que le beau dans Racine ; et le faux dans Voltaire est tout aussi romantique (si romantique veut dire mauvais) que le faux dans Calderon. […] Ici, du moins, les adversaires peuvent espérer de s’entendre, parce qu’ils en sont dignes.
Racine, & commençant par convenir qu’il y avoit encore dans ce siècle des écrivains dignes de l’autre, il a mieux saisi & marqué les causes véritables du contraste de ces deux siècles. […] enfin, l’abus qu’on fait d’une réputation acquise, pour se relâcher, & pour en imposer à la faveur d’un nom célèbre, en osant publier des ouvrages dignes des premiers qu’on a donnés ; cette inégalité choquante qu’on est étonné de voir quelquefois dans le même homme, me rappelle ce que les Italiens disoient du Tintoret, qu’il avoit trois pinceaux, un d’or, un d’argent, & l’autre de fer *.
Il fit une réponse à l’adversaire qu’il ne jugeoit pas un concurrent digne de lui, mais une réponse simple, courte, & dans laquelle il lui reproche ses erreurs, ses bevues & ses mauvais raisonnemens. […] Il fait lui-même allusion à sa qualité de fils d’un maître coutelier à Paris, dans une épigramme Latine qu’il envoya à un de ses amis, accompagnée d’un couteau & de cette réflexion : « Ce présent vous semblera plus digne de Vulcain que des Muses.
Son Traité des moyens de conserver la paix dans la société, est digne de Sénéque ; mais il est peut-être aussi difficile d’établir cette paix, que de terminer les procès de deux Normands vieillis dans la chicane. […] Les traités de l’Amitié & de la Gloire par M. de Saci, ami de Madame de Lambert, & digne de l’être de tous les honnêtes gens, sont un tissu de sentimens nobles, délicats & vertueux qu’on ne voit presque que dans les livres.
Ce père de l’histoire avait, comme tous les pères dignes de ce titre, quelque chose de pontifical. Ce caractère religieux a frappé Pierre Saliat, qui, ramenant tout à la préoccupation de son temps comme les vieux peintres au costume du leur, quels que soient les sujets qu’ils traitent, finit par appeler « chrétien » Hérodote, comme il rayait appelé « un gentilhomme grec ». « Une chose que je ne veux oublier, — dit-il en son style d’une senteur antique et exquise, — c’est que les vieux historiens (comme aussi les poètes)sont dignes véritablement d’être révérés et honorés, et principalement pour cette révérence qu’ils portent à leurs Dieux, quoique feints ils soient.
C’est un sensualiste naïf qui ne se préoccupe que de la forme, un païen parfaitement digne d’une époque qui a toutes les aberrations de la Renaissance sans leur excuse, s’il y en a… Debay ne voit dans le monde que la femme, et dans la femme que sa beauté matérielle. […] Elle était l’amie de Saint-Évremond, exilé qui remplissait tout de sa personne absente, philosophe qui prenait son égoïsme pour de la sagesse, et qui était bien digne de s’accointer à Ninon, plus égoïste que lui encore, espèce de Fontenelle en femme, qui cachait sa monstruosité morale sous cette beauté sans grandeur qui conseille aux hommes l’insolence.
Assurément, ce serait une analyse curieuse à faire, et très digne, du reste, de la Critique, qui doit regarder autant à l’effet des livres qu’à leur substance, que de rechercher les causes de l’insouciance affectée pour le livre de Crétineau-Joly… Qui sait ? […] Et, pamphlet ou libelle alors, un pareil livre doit prendre, sous l’examen et les réserves de la Critique, la place qu’on eût bien voulu lui ôter et dont il est digne, parmi ces compositions graves et consciencieuses qu’il est convenu d’appeler de l’Histoire.
Cet abbé Galiani, qui n’était abbé que par ses abbayes, s’il l’avait été autrement eût été digne d’être cardinal. […] Par le tour hardi de son esprit, qui méprisait la vérité bête et qui la croyait moins, à cause de sa bêtise, la vérité, Galiani était digne et peut-être capable d’écrire cette histoire qui épouvante les plumes timorées.
Gérard, lui (grâce à ses compagnons cette histoire est devenue légendaire), acheta un jour aussi un lit superbe, historique, digne d’une reine, pour y coucher, disait-il, ses amours. […] Cette érudition si particulière et si malsaine, Edgar Poe, le tempérament américain, le puffiste immense dans l’ordre de l’imagination, le visionnaire qui fit entrer dans les constructions de la plus idéale ou de la plus sombre fantaisie une force de calcul digne de Pascal, en fut certainement moins victime que de l’ivrognerie, son vice favori, qui le tua !
Les Odes funambulesques sont essentiellement un livre de fantaisie, mais la fantaisie du poète est-elle réellement digne des soins infinis, et nous allions presque dire des caresses de la fantaisie de l’éditeur ? […] Houlette en main, souriante à demi, Plus d’une encore fait voir au blond Arsène Où c’est…… Voilà les sornettes idiotes et enragées, — ces deux caractères sont également dans ce volume de rythme forcé et de pensée atone, — voilà les sornettes dignes de Vadius et de Trissotin : Ne dis plus qu’il est amarante, Dis plutôt qu’il est de ma rente !
… peut-être de manière à désarmer et à faire accepter sans horreur l’idée d’une publication qui a blessé en madame Heine des susceptibilités très nobles, mais qu’il aurait été plus digne du génie de son mari de ne pas écouter. […] pas, en Angleterre, le mol Tennyson, le lauréat de la reine, le poète des élégances et des convenances anglaises, tout camélia blanc et rose thé, très digne d’écrire, comme un chinois, ses vers sur de la soie ou de la porcelaine, qui pourrait remplacer dans les imaginations le fantaisiste passionné d’Atta Troll, de La Mer du Nord, des Romanceros, du Livre de Lazare, le plus tendre, le plus rêveur, le plus blessé, le plus rieur des hommes, malgré ses blessures, et qui, comme les Douglas d’Écosse, mériterait de porter ce beau surnom : Au Cœur sanglant !
Ils les mariaient pour leur propre avantage, c’est-à-dire, pour faire entrer dans leurs maisons les femmes qu’ils en jugeaient dignes. […] Une erreur digne de remarque est celle des commentateurs de la loi des douze tables : ils prétendent qu’avant que cette loi eût été portée d’Athènes à Rome, et qu’elle eût réglé les successions testamentaires et légitimes, les successions ab intestat rentraient dans la classe des choses quæ sunt nullius.
Chompré, qui prouvent que ceux qu’on appelle Pédans de Collége, sont quelquefois plus dignes de l’estime du Public, que tant d’Auteurs frivoles, qui ne l’instruisent pas & l’amusent encore moins.
Il faut feuilleter les Recueils obscurs, pour y trouver quelques autres Ouvrages de sa façon, dignes tout au plus de figurer dans les Collections oubliées.
Il se montra digne rival des Normand & des Cochin, & auroit fourni sans doute une carriere aussi brillante que celle de ses deux Confreres, si la mort ne l’eût enlevé à la fleur de son âge.
Si le style répondoit au mérite de ses travaux, il seroit digne d’occuper une des premieres places parmi les Ecrivains ; mais sa diction très-négligée, & souvent barbare, ne permet pas de le tirer de la classe des Erudits, où il a des droits assurés aux premiers rangs.
Il faut remarquer que ses Epigrammes ne sont que des saillies sans fiel, sans aigreur, sans satire, &, par cette raison, plus dignes d’amuser, que toutes celles que la haine, la jalousie ou la causticité ont produites.
Ses autres Productions mériteroient aussi un pareil titre ; pour être moins mauvaises, elles n’en sont pas plus dignes d’être lues.
En revanche, tous ces Discours sont écrits avec une noblesse & une élégance qui les rendent dignes de tous les sujets qu'il a traités.