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52. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome II pp. 1-419

Avec des personnages ainsi conçus, il était difficile que M.  […] Le vers qu’il a choisi est de tous les vers anglais le plus sérieux et le plus difficile. […] Il est difficile d’imaginer une confusion plus singulière et plus divertissante. […] Il est difficile de suivre dans le récit de M.  […] Avec un pareil adversaire, le triomphe de Julien n’est pas difficile.

53. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. CHARLES MAGNIN (Causeries et Méditations historiques et littéraires.) » pp. 387-414

Pour les gens du métier qui savent combien ces jugements portés sur les livres du jour par les critiques compétents sont utiles à l’histoire littéraire, et combien, à une certaine distance, il devient difficile de se les procurer dans des feuilles si vite disparues, il semblera tout naturel qu’un homme qui connaît autant les circonstances et les destinées des livres que M. […] Cela est difficile à trouver178. » Il ajoute encore : « Les artistes sont les juges compétents de l’art, il est vrai ; mais ces juges compétents sont presque tous corrompus… Il y a environ trois mille ans qu’Hésiode a dit : Le potier porte envie au potier, le forgeron au forgeron, le musicien au musicien. » Sans doute un artiste, sur l’objet qui l’occupe et qu’il possède, aura des vues, perçantes, des remarques précises et décisives, et avec une autorité égale à son talent ; mais cette envie, qui est un bien vilain mot à prononcer, et que chacun à l’instant repousse du geste loin de soi comme le plus bas des vices, il l’évitera difficilement s’il juge ses rivaux ; sa noble jalousie (appelons ainsi la chose) le tiendra éveillé aux moindres défauts, et il sera prompt à voir et à noter ce qu’involontairement il désire ; ou bien, si la générosité du cœur s’en mêle, il ira au-devant du défaut, il passera outre et tombera alors dans des indulgences extrêmes, dans des libéralités qui ne sont plus d’un juge. […] Magnin n’est pas du tout ainsi : à vouloir conclure ce qu’il est intimement et par nature d’après ses écrits, il serait difficile de le deviner, sinon que c’est un homme d’esprit, de fine et excellente littérature. […] Mais que ces lents et difficiles travaux, que les arcanes de l’Académie des inscriptions elle-même et les exercices philologiques du Journal des Savants n’éloignent jamais M. […] Magnin sait le faire, si désintéressée que soit d’ailleurs cette douce passion, il est difficile d’y résister.

54. (1759) Réflexions sur l’élocution oratoire, et sur le style en général

La diction n’a proprement de rapport qu’aux qualités grammaticales du discours, la correction et la clarté : le style au contraire renferme les qualités de l’élocution plus particulières, plus difficiles et plus rares, qui marquent le génie ou le talent de celui qui écrit ou qui parle ; telles sont la propriété des termes, la noblesse, l’harmonie et la facilité. […] Il est difficile à l’orateur, pour peu qu’il ait d’oreille et d’organe, de se méprendre sur ces deux points. […] Cicéron, si difficile d’ailleurs sur tout ce qui avait rapport à l’harmonie du style, condamne avec raison Théopompe, pour avoir porté jusqu’à l’excès le soin minutieux d’éviter le concours des voyelles2. […] C’est aussi cette réunion, si difficile à imiter, qui rend ce grand orateur si difficile à traduire ; surtout dans une langue comme la nôtre, où l’inversion n’est point permise, et ou l’arrangement forcé des mots est l’écueil continuel de l’harmonie.

55. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — III. (Fin.) » pp. 162-179

S’interposant entre le prince Maurice et Barneveld, il les rapprocha autant qu’il le put, ce qui était difficile : « car le premier, disait-il, montre de fuir et avoir en horreur tout ce qui plaît à l’autre ». […] Le prince Maurice était le plus difficile à manier : « Il est si retenu avec nous qu’on ne le peut apprivoiser », écrivait le président Jeannin. […] Il fut plus difficile de l’y faire consentir que d’y résoudre le roi d’Espagne. » À lire les dépêches du président Jeannin, on admire beaucoup moins une résistance dont les motifs personnels sont évidents. […] Sully, lui écrivant dans les derniers mois, n’avait pu s’empêcher de le louer : J’ai toujours fort estimé la vivacité de votre esprit et la solidité de votre jugement, lui disait ce témoin difficile, mais ces dernières actions m’en donnent meilleure opinion que jamais, ayant su vous débarrasser de tant de diversités et opinions différentes qui tombent d’heure à autre dans l’esprit de toutes les parties avec lesquelles vous avez à traiter ; car non seulement il faut concilier deux ou trois partis fort éloignés de désirs et intentions les uns des autres, mais il semble que vous ayez à faire autant de traités qu’il y a de personnes d’autorité de tous bords, y ayant autant d’opinions que de têtes.

56. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Biot. Essai sur l’Histoire générale des sciences pendant la Révolution française. »

Quoi qu’il en soit, il est difficile de supposer qu’un autre que Saint-Just ait exercé cette autorité durant le voyage et ait usurpé son nom au dernier moment. […] Il fallait armer neuf cent mille hommes ; et, ce qui était plus difficile, il fallait persuader la possibilité de ce prodige à un peuple méfiant, toujours prêt à crier à la trahison. […] Une Instruction courte et simple, répandue avec une inconcevable activité, fit, d’un art difficile, une pratique vulgaire. […] Après l’enseignement supérieur, on s’occupa de l’enseignement élémentaire, « le plus difficile, dit M. 

57. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier. »

à une peau très-blanche et à des cheveux blonds, donnaient à sa beauté un tel éclat qu’il était difficile, à sa vue, de ne pas sentir tout à coup saisi et subjugué. […] Par malheur, ces renseignements nous manquent. » — Mais vous êtes bien curieux, en vérité, mon cher biographe ; ces sortes de renseignements de chambre à coucher et d’alcôve sont difficiles à constater, et quand il éclate un soir des cris tels que ceux qu’on vient d’entendre, c’est déjà bien suffisant pour nous avertir de tout ce qui a dû se répéter souvent, et qu’on ne sait pas. Quand un homme a pris l’habitude de tomber ivre mort, il est difficile au cœur ou au bras d’une faible femme de le relever, et lorsque avec cela il lui vient, de temps en temps, de soudaines envies de la saisir à la gorge et de la traîner par les cheveux, ce qu’elle a de mieux à faire pour sa dignité comme pour sa sûreté, c’est de se mettre à couvert. […] il nous a détestés et abhorrés hautement, il nous a exécrés, et il lui est difficile, en revanche, de se faire bien venir de nous et de nous plaire.

58. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Paragraphe sur la composition ou j’espère que j’en parlerai » pp. 54-69

C’est sous ce point de vue surtout, que le travail du peintre d’histoire est infiniment plus difficile que celui du peintre de genre. […] Il marche sur une ligne difficile à garder. […] C’est que l’exécution en est encore plus savante et plus difficile. […] C’est que cela est trop difficile.

59. (1799) Dialogue entre la Poésie et la Philosophie [posth.]

Non, non, ne craignez rien ; cependant si je prenais la liberté de vous aborder avec des vers semblables à ceux que vous venez d’entendre, je ne vous conseillerais pas, pour votre honneur, de vous montrer si difficile. […] je ne crains pas que le petit nombre de bons poètes soit offensé d’un dégoût si légitime ; mais je m’attends bien qu’il soulèvera contre moi tout le bas Parnasse, des auteurs de pièces sifflées, des rimailleurs qui ont manqué le prix de l’Académie Française, et qui le manqueraient pendant cent ans, quoique les juges n’y soient pas toujours difficiles ; en un mot, qui défendent leur art aussi mal qu’ils l’exercent ; voilà mes redoutables adversaires. […] Après cette explication, si vous n’êtes pas contente de ce que je pense de vous, votre amour-propre est bien difficile.

60. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Louis XVI et sa cour »

La transfusion spirituelle est aussi difficile que la transfusion matérielle. […] Pour un homme de monarchie et d’entrailles (et Renée est l’un et l’autre), il est difficile, en effet, de parler de Louis XVI. […] On a rarement peint (car ceci est de la peinture historique) des choses plus vulgaires avec un plus noble pinceau, et l’on n’a point résolu mieux, depuis Murillo, le difficile problème de faire tomber sur de la vermine un jour d’or !

61. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Matter. Swedenborg » pp. 265-280

ou l’histoire de ce Visionnaire prodigieux, né en pleine époque rationaliste et rationaliste lui-même, quoique visionnaire, cette histoire, difficile à écrire et plus difficile à comprendre, soulève-t-elle trop de questions pour que la Critique, ce feu follet du feuilleton, s’attache à ces questions et les éclaire de son phosphore de passage ? […] Rappelez-vous ce livre, le plus difficile à écrire de tous les livres de Balzac, le plus sublime et le plus incompréhensible aux esprits vulgaires… heureusement !

62. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « A. P. Floquet »

La difficulté n’était pas de faire mieux, c’était de faire bien ; c’était de peindre ressemblant ce qu’il y a de plus difficile à peindre, c’est-à-dire un homme dont toutes les imaginations sont remplies, et d’appuyer un ferme regard sur la personnalité la plus capable de décontenancer qui la juge. […] Comme la plupart des grands hommes acceptés par l’opinion des siècles, il s’est moulé dans un de ces types d’une trivialité sublime auxquels il est difficile d’ajouter ou de retrancher quelque chose. […] La faute n’en est pas à l’auteur des Études, mais à Bossuet lui-même, à cette mine d’or fouillée et retournée depuis deux cents ans, et dans laquelle il est bien difficile de trouver un filon de plus.

63. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « En guise de préface »

Il me semble que cela ne serait pas très difficile. […] … J’ajoute que cette critique ascétique et raisonneuse, difficile à exercer supérieurement, est de ces emplois qui supportent le mieux une médiocrité honorable.

64. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre second » pp. 200-409

Il est bien plus difficile de n’être pas corrompu par la richesse, et Sénèque ne le fut point. […] les amis sont si difficiles à trouver ! […] Il ne serait pas difficile de concilier ces deux écoles sur la morale. […] C’est un problème difficile à résoudre. […] Et qu’on n’imagine pas que j’allège la tâche du physicien ou du naturaliste : rien de plus difficile que de bien observer, rien de plus difficile que de bien faire une expérience, rien de plus difficile que de ne tirer de l’expérience ou de l’observation que des conséquences rigoureuses ; rien de plus difficile que de se garantir de la séduction systématique, du préjugé et de la précipitation.

65. (1887) Discours et conférences « Discours prononcé à Tréguier »

Enfant, j’étais difficile à remuer, ne jouant jamais, porté à m’asseoir et m’acoquiner. […] Les rhumatismes, qui me rendent maintenant la marche si difficile, je les avais déjà. — Quant à l’âme, oh !

66. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre V : Lois de la variabilité »

C’est une question bien difficile à résoudre. […] Comme il est difficile d’admettre que des yeux, même inutiles, puissent être d’une façon quelconque nuisibles à des animaux qui vivent dans l’obscurité, je ne puis attribuer leur perte qu’au défaut d’exercice. […] C’est une question très difficile à résoudre. […] La nature du lien de corrélation entre les modifications simultanées de deux ou de plusieurs organes est fréquemment très difficile à découvrir. […] Il est difficile d’établir que cette loi soit d’application universelle chez les espèces à l’état sauvage, mais de bons observateurs, et plus particulièrement les botanistes, la croient générale.

67. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre premier. La sélection et la conservation des idées dans leur relation à l’appétit et au mouvement. »

. — A cette façon de poser le problème, il n’est pas difficile de prévoir en quel sens le problème sera résolu. […] Si un savant, après avoir reçu un coup violent sur la tête, oublie tout ce qu’il sait de grec sans oublier autre chose, et si plus tard, par l’effet d’un second coup, il retrouve soudain son grec perdu, il est bien difficile de voir dans le souvenir une « action toute spirituelle ». […] Ribot et Richet, qu’il y a ici quelque chose non seulement de physiologique, mais de mental en même temps qui subsiste ; seulement, il nous paraît bien difficile de comprendre qu’une idée subsiste comme idée. […] Enfin les perceptions comme telles sont surtout, à notre avis, la conscience de relations, de différences, de changements et de mouvements : conséquemment elles tiennent de la nature abstraite et superficielle des signes ou symboles ; les émotions, au contraire, sont des états généraux et profonds : elles sont donc autrement difficiles à reproduire qu’une simple esquisse de nature intellectuelle. […] Autant les premières sont difficiles à reproduire, autant les secondes se renouvellent aisément quand on se remet par l’imagination dans le même courant d’idées : c’est qu’ici ce sont les idées mêmes qui produisent les sentiments.

68. (1870) La science et la conscience « Chapitre II : La psychologie expérimentale »

Si donc Stuart Mill n’entend parler que du moment actuel, il est difficile de ne point convenir que sa satisfaction est légitime. […] Mais, quand des esprits aussi attentifs, aussi sagaces, aussi pénétrants que les psychologues dont nous venons de parler, explorent une réalité positive, bien que d’une observation délicate et difficile, il est impossible qu’il n’y ait pas quelque chose de vrai et d’instructif dans leurs analyses et leurs explications, quel que soit d’ailleurs le point de vue auquel ils se placent. […] Il est difficile de refuser à l’animal un certain degré de sentiment quand on voit le chien attaché à son maître au point de souffrir de son abandon et de son indifférence, au point même de mourir parfois d’inanition volontaire devant son cadavre. […] Et si l’on équivoque ici comme pour l’institution politique, en disant que l’animal parle aussi à sa façon, il n’est pas difficile de montrer qu’entre le langage des animaux et le langage humain, il n’y a pas moins de différence qu’entre la société des bêtes et la société des hommes. […] Et comment s’y prend Maine de Biran pour résoudre ce grave et difficile problème de l’antithèse de la nécessité et de la liberté en l’homme ?

69. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre troisième. De la sympathie et de la sociabilité dans la critique. »

Il est beaucoup plus difficile de découvrir une pensée profonde au milieu de certaines divagations ou de certaines bizarreries de Shakespeare ou de Hugo que de remarquer ces bizarreries mêmes. […] Le dernier point est le plus difficile. […] En somme, ce ne sont point les lois complexes des sensations, des émotions, des pensées mêmes, qui rendent la critique d’art si difficile ; on peut toujours, en effet, vérifier si une œuvre d’art leur est conforme ; mais, lorsqu’il s’agit d’apprécier si cette œuvre d’art représente la vie, la critique ne peut plus s’appuyer sur rien d’absolu ; aucune règle dogmatique ne vient à son aide : la vie ne se vérifie pas, elle se fait sentir, aimer, admirer.

70. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre second. Philosophie. — Chapitre premier. Astronomie et Mathématiques. »

Une page éloquente de Bossuet sur la morale est plus utile et plus difficile à écrire qu’un volume d’abstractions philosophiques. […] Nugae difficiles 159. » Toute pénible que cette vérité puisse être pour les mathématiciens, il faut cependant le dire : la nature ne les a pas faits pour occuper le premier rang. […] Au reste, il n’est peut-être pas difficile de mettre d’accord ceux qui déclament contre les mathématiques et ceux qui les préfèrent à tout.

71. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « L’Angleterre depuis l’avènement de Jacques II »

Question difficile à résoudre, mais qui se pose de soi dans tout esprit, en le lisant. […] Il se contente de poser, sans le prouver, le fait étrange de cette monarchie tempérée qu’il est assez difficile d’établir quand on a un Henri VIII ou une Élisabeth derrière soi, et il ne commence, à proprement parler, son histoire qu’à la date éclaircie et certaine de la vraie monarchie anglaise : la fin des Stuarts et du droit divin. […] Comme un Anglais, il s’est payé des formes d’une légalité consacrée, il a été puérilement vaincu par le spectacle ; mais lui, le critique exercé, dont la sagacité a vu tant de choses autrement difficiles à voir, peut-il être dupe à ce point de faits qui ne prouvent rien en Angleterre, et nous dire sérieusement qu’il n’y eut aucun changement fondamental dans la grande révolution de 1688, parce qu’on y vit Clarencieux, Norroy, Portcullis, Dragon-Rouge et les cottes d’armes brodées de Lions et de Lys, et qu’on y donna à Guillaume le titre de roi de France, comme c’était l’usage depuis Crécy ?

72. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Hector de Saint-Maur »

Il m’était bien difficile d’admettre que Saint-Maur eût dit son dernier mot dans ce livre, qui, selon moi, était son premier dans la grande publicité, — la publicité retentissante. […] Rien de moins difficile que de faire pleurer ; Excepté les larmes que l’admiration fait couler, excepté celles de César devant la statue d’Alexandre, je méprise assez cette eau qui coule et je la laisse couler… Saint Maur, qui est d’un naturel trop franc et trop à pleine main pour jamais rien affecter, tempère, sous le dictame de son esprit, les tristesses qui sont le fonds commun de la misérable nature humaine. […] La côte est difficile et raide, — c’est très haut ; Sur le sommet du mont, dans la mousse et dans l’herbe, Sainte Cécile est là, devant vous : — regardez L’humble chapelle avec ses vieux murs lézardés.

73. (1864) Études sur Shakespeare

Ni l’une ni l’autre des opinions en présence n’offrait à la lâcheté, qui se révèle si abondamment dans les jours difficiles, le refuge d’un parti vainqueur. […] Il est difficile de douter que la famille du jeune poëte n’ait partagé, avec toute la population de la contrée, le plaisir et l’admiration qu’excitèrent ces pompeux spectacles. […] Dans les temps où la vie est difficile et les mœurs rudes, il en est rarement ainsi pour le poète que forme la seule nature. […] Le goût ne se montrait pas plus difficile que les mœurs. […] Quoi qu’il en soit, il est plus difficile de démêler les causes qui déterminèrent son départ de Londres, que d’entrevoir celles qui avaient pu y prolonger son séjour.

74. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — I » pp. 298-315

Quelques vieux papiers retrouvés, et qui souvent, si on les lit bien (mais rien n’est plus difficile que de bien lire, surtout ce qui n’est pas imprimé), n’en apprennent pas plus que ce qui est connu déjà ; quelques documents inédits qui, dans tous les cas, doivent se combiner avec les notions déjà certaines et acquises, sont des prétextes à bouleversement ; on casse les jugements reçus, on refait des réputations à neuf ; chacun embouche des trompettes pour la découverte qu’il veut avoir faite, et, dans l’empressement de réussir, volontiers on accorde tout à son voisin pour qu’en retour il vous accorde tout à vous-même. […] C’est une entreprise bien difficile, pour ce que la perte des choses certaines et présentes qu’on voit et qu’on touche est préférable, parmi un peuple ignorant, aux choses dont les événements sont incertains et les utilités éloignées : et nul ne peut bien comprendre cette difficulté, qui ne l’a expérimentée au gouvernement des peuples. Chef de ligue et d’une ligue religieuse, M. de Rohan eut donc à lutter contre tous les inconvénients de sa situation, prédications fanatiques et dénonciations au dedans, violences populaires, excès et crimes à punir (comme autrefois M. de Mayenne avec les Seize), troupes volontaires et difficiles à ramasser ou à contenir sous le drapeau. […] D’un autre côté, il eut à se défendre par-devant les siens contre des censeurs qui, la plupart, avaient eu les bras croisés durant la guerre, et à justifier « ses bonnes intentions blâmées, et ses meilleures actions calomniées. » Nous commençons à voir le rôle ingrat et difficile qu’il eut à remplir, et qui le deviendra bien davantage dans les deux guerres suivantes, en présence de Richelieu.

75. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Les Faux Démétrius. Épisode de l’histoire de Russie, par M. Mérimée » pp. 371-388

En entamant l’histoire dans ses parties les plus sévères et dans ses périodes les plus difficiles, et en se proposant de l’embrasser un jour à son instant le plus lumineux dans la personne et dans l’époque de Jules César, M.  […] On ne devait pas être bien difficile dans le premier moment sur la vérification des preuves ; on voulait avant tout être délivré de Boris, sauf à voir ensuite, et quand on aurait changé de maître, si le Démétrius était de bon aloi. […] Il l’a rendu aussi intéressant que peuvent l’être ces époques difficiles, ces événements mêlés d’obscurité, et il a traité le problème du faux Démétrius avec une sagacité piquante. […] L’histoire de l’abbé Prévost commence déjà elle-même à ne plus être de notre temps ni de notre civilisation ; on passe encore sur le manque de cœur de Manon, mais il est difficile de pardonner l’avilissement du chevalier, et il faut le parfait naturel de l’auteur pour nous amener à l’émotion à travers les scènes dégradantes où il nous conduit.

76. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre II : Variations des espèces à l’état de nature »

Le terme de variété est presque également difficile à définir ; mais ici, l’idée d’une descendance commune est presque généralement impliquée, quoiqu’elle puisse bien rarement se prouver. […] — Il existe un phénomène, en connexion avec les différences individuelles, très difficile à expliquer. […] Mais il se présente des cas que je ne veux pas énumérer ici, où il devient extrêmement difficile de décider si une forme doit être ou n’être pas rangée comme variété d’une autre, même lorsqu’elles sont étroitement reliées par des formes intermédiaires ; d’autant que les formes intermédiaires sont communément regardées comme étant d’une nature hybride, ce qui ne tranche pas toujours la difficulté. […] Il serait difficile de choisir un meilleur exemple de deux formes spécifiquement distinctes ; pourtant elles sont reliées par un grand nombre de formes intermédiaires dont on ne saurait affirmer l’origine hybride ; et de nombreuses preuves expérimentales établissent qu’elles descendent l’une et l’autre de parents communs, et, par conséquent, qu’elles doivent être rangées comme deux variétés. » D’autres passages de l’ouvrage faisant allusion à ce paragraphe ont également été supprimés ou modifiés par l’auteur.

77. (1848) Études critiques (1844-1848) pp. 8-146

Il serait difficile de lui découvrir un motif de satisfaction dans ces dernières semaines ; la stérilité de ce que nos pères appelaient les campagnes du Parnasse, a été effrayante. […] La position est difficile, on en conviendra, et si l’on aimait comme cela dans la vie, il semble qu’on n’aimerait ni beaucoup ni souvent. […] La cause est quelquefois difficile à trouver, le rapprochement plus subtil qu’on ne le souhaiterait ; mais, encore une fois, qu’importe ? […] Mais c’est chose difficile que de prouver la descendance illustre d’un homme nouveau. […] Ainsi qu’il arrive pour tous les efforts difficiles, M. 

78. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 181-190

«  Il avoit si bien acquis, dit-il, la pénible habitude de l’attention, que, quand on lui proposoit quelque chose de difficile, on voyoit dans l’instant son esprit se pointer vers l’objet & le pénétrer. […] Il eût été difficile d’être en liaison particuliere avec un homme toujours plein d’un systême qu’on eût rejeté ; & si l’on recevoit le systême, il n’étoit pas possible qu’on ne goûtât infiniment le caractere de l’Auteur, qui n’étoit, pour ainsi dire, que le systême vivant.

79. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre V. Première partie. Les idées anciennes devenues inintelligibles » pp. 106-113

Les idées anciennes devenues inintelligibles Avançons dans la route difficile que nous nous sommes tracée : je l’ai déjà dit, ma fonction est de venir expliquer des ruines. […] Dans les temps où la société est ainsi agitée par la lutte des idées anciennes qui voudraient ressaisir le sceptre du pouvoir, et des idées nouvelles qui ne veulent pas souffrir de partage, souvent c’est un malaise vague et intérieur dont il est difficile de marquer les périodes et de signaler tous les symptômes.

80. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — II » pp. 57-80

Déjà il avait, dans son zèle, remis un mémoire à Chamillart pour indiquer les moyens de rendre le siège de Landau difficile, ou, en cas de perte, de prendre sa revanche sur Kehl, ou de pourvoir tout au moins à la sûreté des frontières. […] Ce qui n’est que difficile ne lui paraît jamais impossible ; ce qu’on dit impossible le tente : l’extrême activité est un de ses moyens. […] Ainsi, le 2 juin de cette année 1702, il écrivait à Chamillart : Ne voulez-vous point, Monseigneur, dans la guerre la plus difficile qu’on ait vue depuis trente ans, peser la différence qu’il y a d’un homme à un autre ? […] J’en demande pardon à Saint-Simon : mais il est fâcheux, lorsqu’après tant de langueur et de médiocrité dans la conduite des armées, on apprend qu’on a enfin gagné une bataille, et qu’on l’a gagnée dans des circonstances difficiles et par un général nouveau qui se déclare, il est fâcheux de ne la prendre aussitôt que par un petit côté et par le ridicule. […] Voici ce post-scriptum, qui n’est plus d’un homme qui badine, mais d’un général : Sur ce que vous me faites l’honneur de me dire que le courtisan veut s’imaginer que j’évite la jonction, j’aurai celui de vous répondre que je la désire passionnément, mais que je regarde le commandement d’une armée séparée de nos frontières comme l’emploi le plus difficile qui ait jamais été donné à personne.

81. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XII : Distribution géographique (suite) »

Il me semble difficile de répondre à cette question. […] L’archipel entier présente bien sous ce rapport quelques anomalies ; et en quelques cas il est très difficile de décider si la naturalisation de certains mammifères ne doit pas être attribuée à l’intervention de l’homme. […] Je citerai seulement un de ces cas difficiles. […] Longtemps cette objection me parut difficile à lever. […] On ne peut guère mettre en doute que cette règle ne soit vraie en général, bien qu’elle soit difficile à prouver.

82. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre V. Du jeu, de l’avarice, de l’ivresse, etc. »

Le grand jeu de la gloire est difficile à préparer ; un tapis vert, des dés y suppléent. […] Ce qu’il y a de plus difficile à supporter pour un joueur, ce n’est pas d’avoir perdu, mais de cesser de jouer.

83. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre V. Le Séminaire Saint-Sulpice (1882) »

Trois, c’est plus difficile. […] Garnier fit encore, dans sa chambre, le cours supérieur, celui où l’on expliquait les textes difficiles, à deux ou trois élèves. […] Il devait se présenter dans des conditions où aucun livre ne se présente : « Vous n’êtes pas si difficile, dira-t-on, pour Hérodote, pour les poèmes homériques. » Sans doute ; mais Hérodote, les poèmes homériques ne sont pas donnés pour des livres inspirés. […] Carbon fut peiné ; il vit combien ma situation allait devenir difficile et me promit de chercher pour moi une position tranquille et honnête. […] Ma sœur Henriette m’avait donné douze cents francs pour traverser ce moment difficile.

84. (1772) Éloge de Racine pp. -

Tel est celui du grand Racine, de l’écrivain le plus parfait qu’aient produit tous les siècles dans le plus difficile et le plus beau de tous les arts. ô Racine ! […] Enfin, chez les athéniens, les spectacles donnés par les magistrats en certains temps de l’année, étaient des fêtes pompeuses et magnifiques où se signalait la brillante rivalité de tous les arts, et où les sens, séduits de toutes les manières, rendaient l’esprit des juges moins sévère et moins difficile ; ici, la satiété, qui naît d’une jouissance de tous les jours, doit ajouter beaucoup à la sévérité du spectateur, lui donner un besoin plus impérieux d’émotions fortes et nouvelles ; et de toutes ces considérations, on peut conclure que l’art des Corneille et des Racine devait être plus étendu, plus varié et plus difficile que l’art des Euripide et des Sophocle. […] Rien ne serait si difficile que de refaire un vers de Racine. […] Nul n’a manié avec plus d’empire un idiome souvent rebelle, ni avec plus de dextérité un instrument toujours difficile. […] Et qu’on doit avoir d’ennemis quand il est si difficile d’avoir des rivaux !

85. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre VI. L’effort intellectuel »

Pour simplifier l’étude, nous examinerons les diverses espèces de travail intellectuel séparément, en allant du plus facile, qui est reproduction, au plus difficile, qui est production ou invention. […] Le lendemain, il réussissait à faire additionner d’un coup d’œil trois et quatre dés, le surlendemain cinq : en ajoutant chaque jour de nouveaux progrès à ceux de la veille, il finit par obtenir instantanément la somme des points de douze dominos. « Ce résultat acquis, nous nous occupâmes d’un travail bien autrement difficile, auquel nous nous livrâmes pendant plus d’un mois. […] Même, il nous est difficile de distinguer ce qui est souvenir de l’oreille et ce qui est habitude d’articulation. […] L’acte d’intellection s’accomplissant sans cesse, il est difficile de dire ici où commence et où finit l’effort intellectuel. […]   À cette question le simple bon sens répond qu’il y a effort, en plus du travail, quand le travail est difficile.

86. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Correspondance de Louis XV et du maréchal de Noailles, publiée par M. Camille Rousset, historiographe du ministère de la guerre (suite et fin) »

Et en dehors de ce corps d’élite, il y avait peu de régiments d’infanterie dont on pût dire du bien. » Dans une lettre particulière au roi, le maréchal ne dissimulait rien de cette mauvaise conduite des troupes : la perte matérielle n’était pas grande, elle était même moindre peut-être, à ce combat de Dettingen, que celle de l’ennemi ; mais c’était le rendre aux troupes le courage et de ranimer la confiance du soldat qui semblait le plus difficile. […] Ces soins sont une partie essentielle de ceux de la royauté, et ne sont pas les moins difficiles à remplir ; mais ils ne le seront pas pour Votre Majesté, vu les talents que Dieu lui a donnés pour se faire aimer de ceux dont elle veut l’être, et pour discerner le mérite. » Un peu de flatterie, il en faut ; il faut le passeport au conseil. […] Je sais qu’on m’a mené vite à Paris ; mais, Dieu merci, je n’ai eu qu’un effort dans le col, lequel a dégénéré en rhumatisme, dont je me sens encore un peu, mais qui ne m’empêche de rien, et mon sang est resté tout entier dans mes veines, sans qu’il en soit sorti plus d’une goutte, occasionnée par une coupure que je me suis faite au petit doigt, en soupant, dimanche dernier, au grand couvert. » Je ne sais si c’est la Correspondance de Napoléon dont je suis plein, qui me gâte et me rend plus difficile, mais il me semble qu’il est impossible d’écrire une phrase telle que celle qu’on vient de lire, à la Louis XV, et de partir vaillamment en guerre le lendemain pour être un héros. […] Si le projet qu’il a indiqué après coup est bien exact et s’il paraît assez bien combiné, l’exécution en fut déplorable. » — Je cherche partout des témoignages à l’appui de mes réserves, car il est bien difficile d’oser mettre un peu de vérité dans ces articles que j’écris, et l’on aurait peine à croire à combien de suggestions et d’instances j’ai dû résister pour maintenir ce jugement modéré et un peu restrictif sur le maréchal de Noailles.

87. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — I. » pp. 401-420

Mme de Maintenon, pourtant, lui écrivait à ce propos, en la félicitant : « Comme je ne perds jamais vos intérêts de vue, je suis ravie que vous n’ayez plus trois cents femmes à gouverner. » Ainsi elle-même, Mme de Maintenon, croyait trois cents femmes plus difficiles à gouverner que trois cents hommes. […] Il se trouva que la princesse des Ursins réunissait seule les conditions difficiles de cet emploi : elle avait habité l’Espagne, en savait la langue et les usages, y jouissait de la grandesse par son mari. […] Dans cette première disgrâce, elle déploie des qualités plus rares et plus difficiles qu’elle n’en eût certes prouvé dans un constant bonheur. […] Les plaintes élevées contre elle étaient alors universelles, au moins à Versailles, et de loin il devenait difficile de démêler celles qui étaient fondées d’avec les autres.

88. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 38, que les peintres du temps de Raphaël n’avoient point d’avantage sur ceux d’aujourd’hui. Des peintres de l’antiquité » pp. 351-386

Ceux qui nous restent des peintres de l’ancienne Rome, sont en si petite quantité, et ils sont encore d’une espece telle, qu’il est bien difficile de juger sur l’inspection de ces tableaux de l’habileté des meilleurs ouvriers de ce tems-là, ni des couleurs qu’ils emploïoient. […] Rendissent les anciens connoisseurs, et même difficiles sur l’expression. […] L’énigme n’étoit pas bien difficile à comprendre, et il seroit à souhaiter que les peintres modernes n’eussent jamais inventé d’allegorie plus obscure. […] Les passages de ces auteurs que nous ne comprenions pas bien quand les peintres modernes ignoroient encore quels prestiges on peut faire avec le secours de cette magie, ne sont plus si embroüillez et si difficiles depuis que Rubens, ses éleves, Michel Ange de Caravage, et d’autres peintres les ont expliquez bien mieux les pinceaux à la main que les commentateurs les plus érudits ne le pouvoient faire dans des livres.

89. (1904) La foi nouvelle du poète et sa doctrine. L’intégralisme (manifeste de la Revue bleue) pp. 83-87

Mais pour nous, qui n’en sommes plus à croire que l’âme humaine, à travers les âges, reste imperturbablement égale à elle-même ; qui la concevons en perpétuel devenir, formée par toutes les capitalisations du passé et de l’hérédité, par toutes les acquisitions et par toutes les influences du savoir et des milieux, il est difficile d’admettre que le poète se doive complaire indéfiniment dans la contemplation de deux ou trois phénomènes généraux de la nature, signalés, d’ailleurs, depuis fort longtemps sous toutes les latitudes. […] Il sera de plus en plus difficile de faire voir monts et merveilles au public dans un vers idiot. « Mais vous n’avez pas le sens anagogique, ma chère !  […] Il faut donc qu’elles aient entre elles des rapports, des correspondances, difficiles à découvrir parfois, encore plus à déterminer.

90. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « IX »

Ce que nous soutenons, ce que nous répétons dans notre dernier livre peut ainsi se résumer ; « Il est matériellement démontré que tous les grands écrivains ont travaillé ; il faut donc travailler comme tous les grands écrivains, car pourquoi serions-nous plus difficiles, et de quel droit nous croirions-nous plus de talent ?  […] Chacun sait, aussi bien que nous, que tous les bons auteurs travaillent, et il serait difficile de nous démentir. […] Croit-il qu’il me serait difficile de découvrir chez lui un mot douteux, une expression hâtive ?

91. (1859) Critique. Portraits et caractères contemporains

Nisard à la recherche de la littérature difficile. […] tu veux de la littérature difficile ! […] tu veux de la littérature difficile ! […] Questions difficiles ! […] Accepter était dangereux, refuser était difficile.

92. (1875) Premiers lundis. Tome III « Le roi Jérôme »

Savoir être roi est chose difficile ; savoir ne plus l’être après l’avoir été est chose plus difficile encore.

93. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Silvestre, Armand (1837-1901) »

. — Les Cas difficiles (1885). — Contes à la comtesse (1885). — Contes de derrière les fagots (1886). — Histoires inconvenantes (1887). — Le Livre des fantaisies (1887) […] — Les Cas difficiles (1895). — Le Nu au Salon (1895). — Le Passe-Temps des farceurs (1895). — Contes au gros sel (1896). — Contes irrévérencieux (1896)

94. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre II. « Faire de la littérature » » pp. 19-26

Faire éditer un roman est difficile ; mais placer de la vaseline est ardu ; et, métier pour métier, celui-là ne serait ni plus malaisé, ni moins lucratif qu’un autre. […] Ce qu’à la vérité il conviendrait de répondre aux aspirants littérateurs qui sollicitent les conseils, pour obtenir les protections, ce n’est pas que la littérature est le plus difficile des métiers ou le plus ingrat des arts, c’est qu’elle n’est ni l’un ni l’autre.

95. (1887) Discours et conférences « Discours à l’Association des étudiants »

Les révolutions m’ont rendu la tâche difficile. […] Vous ferez mieux sans doute ; mais souvenez-vous de ceux qui vous ont préparé la voie dans des temps difficiles.

96. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Rousseau et M. de Voltaire. » pp. 47-58

L’un a moins fait d’excellentes odes, que l’autre n’a donné de chefs-d’œuvre dans les genres les plus élevés, & les plus difficiles. […] Il est bien difficile, en effet, qu’un long séjour hors de sa patrie, que les infirmités & les années ne changent la manière d’un écrivain.

97. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Jean-Jacques Rousseau »

Ces dix mille Adams se donnèrent, spontanément, bien entendu, un rendez-vous commun, on ne sait quand (la date est restée supra-historique et métaphysique, comme il convient à une bonne philosophie de l’histoire), on ne sait comment (car alors il n’y avait ni courriers ni télégraphie : on a mis quatre mille ans, dit Jean-Jeannot Fourier, l’aîné des fils de Jean-Jacques, pour inventer l’étrier), on ne sait où (le point est resté vague sur la mappe monde, et si ce fut partout, ce fut difficile à trouver), et enfin pourquoi ? […] Difficile de se tirer de là, et l’auteur du Contrat social ne s’en tire pas ; — il y reste !

98. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « ??? » pp. 175-182

Il regrette sa patrie, et c’est bien, mais il est malade du mal d’un pays bien autrement difficile à reconstituer que la Pologne. […] À cela on aurait gagné, non seulement le fond de son livre, mais la forme, — la forme, qui devient chaque jour dans le roman plus difficile, la forme, plus rare que ce qui est déjà si rare : les idées et les observations !

99. (1915) La philosophie française « II »

Chez Descartes, l’union est si intime entre la philosophie et les mathématiques qu’il est difficile de dire si sa géométrie lui fut suggérée par sa métaphysique ou si sa métaphysique est une extension de sa géométrie. […] L’unification des choses ne pourra s’effectuer que par une opération beaucoup plus difficile, plus longue, plus délicate : la pensée humaine, au lieu de rétrécir la réalité à la dimension d’une de ses idées, devra se dilater elle-même au point de coïncider avec une portion de plus en plus vaste de la réalité.

100. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — I. » pp. 166-193

Pour nous, qui adoptons ces résultats et qui les goûtons, tout en sentant leur misère au prix de ce que nous avions rêvé, qui croyons à un perfectionnement social, bien lent toutefois et de plus en plus difficile grâce aux fautes de tous, nous continuons de nous tourner par instants vers ces horizons dont le vaste éclat enflammait notre aurore, vers ces noms que nous avons si souvent invoqués, espérant avoir à en reproduire les exemples et les vertus. […] Méconnaissant donc tout à fait le rôle de plus en plus difficile des hommes sincères de 89, ne voyant dès lors dans l’opposition patriotique et les Constituants qu’amis et ennemis du peuple en présence, et persuadée que là aussi on n’avait rien à emporter que de haute lutte, son point de départ, pour sa conduite politique active, fut une grave erreur de fait, une fausse vue de la situation. […] Mme Roland, quinze jours avant sa mort, rétractait sans aucun doute ses anciennes âcretés contre La Fayette, en justifiant dans les termes suivants, Brissot, accusé par Amar de complicité avec le général : « Il avait partagé l’erreur de beaucoup de gens sur le compte de La Fayette ; ou plutôt il paraît que La Fayette, d’abord entraîné par des principes que son esprit adoptait, n’eut pas la force de caractère nécessaire pour les soutenir quand la lutte devint difficile, ou que peut-être, effrayé des suites d’un trop grand ascendant du peuple, il jugea prudent d’établir une sorte de balance. » Ces diverses suppositions sont évidemment des degrés par lesquels Mme Roland revient, redescend le plus doucement qu’elle peut de son injustice première. […] Aux approches de la crise imminente du 10 août, elle ne réclamait déjà plus, comme après Varennes, des mesures brusques, absolues ; elle désirait que les sections réunies demandassent, non la déchéance, difficile à prononcer sans déchirer l’acte constitutionnel, mais la suspension provisoire, qu’il serait possible, quoique avec peine, écrivait-elle dix jours avant le 10 août à Brissot, d’accrocher, pour ainsi dire, à l’un des articles de la Constitution. […] Il est difficile, à cinquante ans de distance, de laver Brissot des calomnies de Morande ; mais toute la partie publique de sa vie repousse et anéantit les récriminations adressées à la partie antérieure et obscure.

101. (1824) Observations sur la tragédie romantique pp. 5-40

Nous avons donc, les faits le prouvent, une autre manière de sentir, un goût plus difficile, plus superbe, puisque nos antagonistes ne veulent pas qu’on dise plus exercé et plus sûr. […] Mais la tâche a paru difficile, on s’en est lassé, l’on a mieux aimé se déclarer maîtres et modèles. […] Ce qu’il y a de plus difficile à expliquer, c’est la bonne contenance des dames anglaises aux pièces du grand poète. […] Il est difficile d’expliquer comment, avec un goût si décidé pour la plus fidèle représentation des hommes et de la nature, les spectateurs romantiques accueillent néanmoins tous les rêves de l’imagination, pourvu qu’ils soient extrêmement bizarres et n’aient aucune teinte classique. […] D’une part, l’enfance de l’art ; de l’autre, la maturité du génie : ici, des spectateurs incultes, amateurs de prestiges et disposés aux émotions fortes ; là, des juges difficiles, accoutumés à des plaisirs délicats, qu’il faut séduire et non pas corrompre, entraîner et non éblouir : chez les premiers, point de spectacle sans machine ; chez les seconds, point de drame sans illusion.

102. (1911) Enquête sur la question du latin (Les Marges)

En face de lui, nous avons eu nettement l’impression qu’il serait difficile de convaincre les pouvoirs publics et le parlement, et que nous trouverions de ce côté de grands préjugés à combattre. […] Capoulié du Félibrige Bernard, Valère (1860-1936) Il m’est difficile de répondre à votre première question, ne m’occupant exclusivement que de littérature provençale, et étant arrivé à la conviction absolue — par de longues observations — que ce que vous appelez l’esprit français, dans le sens particulier que vous paraissez donner à ce terme, n’existe nulle part en France, hors de Paris, sauf dans des milieux littéraires — et, partant, artificiels. […] Jules Bertaut 1º Il est assez difficile d’observer les dégradations qui ont été subies par la langue ou l’esprit français, du fait des primaires sans culture latine. […] Marcel Boulenger Je crois « l’esprit français » vivace et difficile à gâter. […] Edmond Sée Il m’est difficile de vous citer des exemples témoignant d’une décadence de l’esprit français.

103. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre VI. Premiers pas hors de Saint-Sulpice  (1882) »

Elle se figurait ma position encore plus difficile qu’elle ne l’était, et, comme, en me gâtant malgré notre pauvreté, elle m’avait rendu très délicat, elle croyait qu’une vie rude et commune ne pourrait jamais m’aller. « Toi, qu’une pauvre petite souris empêchait de dormir, m’écrivait-elle, comment vas-tu faire ? […] Il faut que les questions sociales et philosophiques soient bien difficiles pour que nous ne les ayons pas résolues dans notre effort désespère. […] Berthelot et l’approbation de ma sœur furent les deux grandes consolations qui me soutinrent dans ce difficile moment où le sentiment d’un devoir abstrait envers la vérité m’imposa de changer, à vingt-trois ans, la direction d’une vie déjà si fortement engagée. […]   2. — Il est très difficile de prouver qu’on est modeste, puisque, du moment qu’on dit l’être, on ne l’est plus. […] Egger, dès les premiers mois de 1846, devenait mon ami et mon guide dans l’œuvre difficile de reprendre tardivement mes études classiques.

104. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VII : Instinct »

Ainsi, rien n’est si difficile que d’apprivoiser les petits des Lapins sauvages ; et, au contraire, il n’est peut-être pas d’animal plus aisé à apprivoiser que les petits du Lapin domestique. […] Les mathématiciens avouent que les Abeilles ont pratiquement résolu, bien longtemps avant eux, l’un des plus difficiles problèmes de la géométrie, en ce qu’elles ont trouvé le moyen de faire leurs cellules de manière qu’elles pussent contenir la plus grande quantité possible de miel, en employant la moins grande quantité possible de cire. […] Pourtant, l’explication d’une telle merveille n’est pas à beaucoup près aussi difficile qu’on le croit généralement, et tout cet admirable travail peut résulter de la combinaison de quelques instincts très simples. […] Il est réellement curieux d’observer dans les cas difficiles, tels que la rencontre de deux rayons sous un angle quelconque, combien de fois il arrive que les Abeilles renversent une cellule déjà construite, et la reconstruisent d’une autre manière, pour revenir quelquefois à une forme qu’elles avaient d’abord rejetée. […] — Sans nul doute, on pourrait opposer à la théorie de sélection naturelle beaucoup d’instincts dont il est très difficile de rendre compte.

105. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — I. » pp. 329-349

Je pourrais relever bien d’autres singularités de pensée et d’expression dans ce discours ; je me hâte d’ajouter que, malgré tout, il réussit fort tant à l’Académie que devant le public ; les juges les plus difficiles, en s’accordant à reconnaître « que la langue semblait manquer à tout moment à l’auteur », le lui passèrent en faveur de ce qu’on appelait l’énergie ou la nouveauté de ses pensées. […] M. de Vergennes, dans un mémoire confidentiel adressé au roi, s’attachant à définir l’espèce de calme, si difficile à ménager, dont jouissait alors la France, le caractérisait en ces mots : « Il n’y a plus de clergé, ni de noblesse, ni de tiers état en France ; la distinction est fictive, purement représentative, et sans autorité réelle. […] En publiant son fameux Compte rendu au roi (janvier 1781), et en appelant ainsi, lui ministre, tout le public à discuter ces matières difficiles, il ne put résister à l’idée de se glorifier lui-même et de se féliciter de ses premiers succès plutôt que de s’appliquer à les poursuivre en silence et à les consolider pour l’avenir. […] Il pensait qu’il était difficile à chacun d’avoir de soi-même l’opinion qu’il en doit avoir : Les hommes qui ont une parfaite opinion d’eux-mêmes sont des heureux ridicules.

106. (1874) Premiers lundis. Tome I « [Préface] »

Rien n’est plus difficile d’ailleurs que de faire un choix dans des œuvres posthumes ; et, en l’absence de l’auteur, nous ne nous sommes pas cru le droit de substituer notre goût à celui du public, d’élaguer la matière à notre gré. […] Sa collaboration devient d’autant plus difficile à saisir, qu’elle s’est fondue quelquefois dans des articles écrits avec Pierre Leroux, de telle sorte qu’on sent par moments les idées de l’un, le style de l’autre.

107. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — K — Kahn, Gustave (1859-1936) »

Paul Ginisty J’arrive aux chercheurs d’une formule nouvelle qui, malgré les railleries, continuent à donner des vers d’une intelligence difficile pour les profanes. […] Gustave Kahn est aujourd’hui fort diverse, et pour écarter tout ce qui n’appartient pas à son labeur de poète, il est encore difficile, sinon impossible, d’esquisser en lignes hâtives ce qui fait le caractère particulier de sa physionomie.

108. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mallarmé, Stéphane (1842-1898) »

Stéphane Mallarmé était ce qu’on appelle au collège un « auteur très difficile ». […] Tous deux furent parnassiens et d’abord baudelairiens… On a bien dit de lui qu’il était difficile comme Perse ou

109. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre VI. Conclusions » pp. 232-240

« Bien que, dans notre siècle, les livres ne soient guère que des objets de distraction, de pures superfluités, où l’agréable, ce bouffon suranné, oublie innocemment son confrère l’utile, il me semble que si je me trouvais chargé, pour une production quelconque, du difficile métier de critique, au moment où je poserais le livre pour prendre la plume, la figure vénérable de Goethe m’apparaîtrait avec sa dignité homérique et son antique bonhomie. […] Dès lors, il serait plus difficile de le blâmer !

110. (1863) Causeries parisiennes. Première série pp. -419

Évidemment le Pays n’est pas difficile en fait de liberté. […] Il serait trop difficile de passer immédiatement de la Révolution à Sylvie. […] Cela n’est pas difficile à Paris. […] Sauf au Conservatoire, il est difficile d’entendre une exécution plus satisfaisante. […] Il est difficile d’imaginer un système de critique plus ingénieusement injuste.

111. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’impératrice Catherine II. Écrits par elle-même, (suite.) »

Si j’avais compris, dès le commencement, qu’aimer un mari qui n’était pas aimable, ni ne se donnait aucune peine pour l’être, était une chose difficile, sinon impossible, au moins lui avais-je, et à ses intérêts, voué l’attachement le plus sincère qu’un ami, et même un serviteur, peut vouer à son ami et son maître ; mes conseils avaient toujours été les meilleurs dont j’avais pu m’aviser pour son bien ; s’il ne les suivait pas, ce n’était pas ma faute, mais celle de son jugement qui n’était ni sain ni juste. […] Or, si vous ne fuyez pas, il n’y a rien de si difficile, selon moi, que d’échapper à ce qui vous plaît foncièrement. […] Parler de Catherine empereur serait une tâche difficile, mêlée, périlleuse et infinie, vaste champ de toutes parts ouvert aux polémistes, encore refusé à l’historien.

112. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre quatrième »

Pour en revenir à Gilbert, il prouve combien il est difficile à qui s’est défendu de l’illusion publique sur les écrivains contemporains, de se défendre de leurs défauts, et de sauver à la fois de la contagion ses sentiments et son goût. […] Là encore les modèles antiques le guidèrent où le poussait son instinct, dans ce genre si difficile, surtout en France, où l’amour est si près de se confondre avec la galanterie. […] C’est à l’école des élégiaques anciens qu’il apprit l’art si difficile d’idéaliser la passion et de ne montrer de son cœur que ce qui peut toucher le nôtre. […] S’il eût vécu en ce temps-là, Boileau l’eût peut-être rendu plus difficile sur la correction ; mais en retour il eût appris à Boileau un idéal de l’élégie et de l’idylle bien autrement aimable que celui de l’Art poétique.

113. (1900) Poètes d’aujourd’hui et poésie de demain (Mercure de France) pp. 321-350

Il est difficile de dire comme je m’y suis engagé par le titre même de cette Conférence ce que sont les Poètes d’aujourd’hui et ce que pourra être la Poésie de demain, sans y joindre quelques mots sur ce que furent les Poètes et la Poésie d’hier. […] La plupart tombent d’elles-mêmes après une étude attentive de ces admirables et difficiles chefs-d’œuvre. […] Ce très haut et très difficile désir artistique est tout à leur honneur. […] Il est difficile de le dire.

114. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XI. La littérature et la vie mondaine » pp. 273-292

Fontanes, dans la Maison rustique, voulant parler poétiquement de la ménagère qui fait des confitures, tirait de l’Etna le vieux roi des Cyclopes pour l’aider en cette besogne difficile et il écrivait : Cette pâte épaissie au souffle de Vulcain. […] Ils ont aidé la comédie à remplir la tâche difficile de faire rire les honnêtes gens ; mais, dans la comédie même, le jeune premier est parfois trop réduit au rôle d’éternel soupirant. […] Feint-on de mépriser les douceurs dont il est prodigue, il répond, la bouche en cœur101 : « Il ne s’agit pas de compliments, Madame ; vous êtes bien au-dessus de cela, et il serait difficile de vous en faire. » N’essayez pas de l’empêcher de débiter ses sucreries ; vous n’y réussiriez pas. — « Tu peux te passer de me parler d’amour, dit Silvia. — Tu pourrais bien te passer de m’en faire sentir, répond Dorante. — Ahi ! […] Il n’est pas jusqu’aux paysans qui sont bien difficiles à amener dans ce salon qu’est alors la scène tragique.

115. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XII. La littérature et la religion » pp. 294-312

Il n’est pas difficile de retrouver l’onction et parfois le patelinage ecclésiastique chez des hommes qui, élevés au séminaire et destinés à entrer dans les ordres, ont abandonné cette carrière. […] Il n’est pas difficile non plus de retrouver un fond de gravité et de sévérité protestantes chez des hommes, qui, vivant à Paris, dans un milieu sceptique, ont jonché leur route des débris de leur orthodoxie. […] Question difficile, à laquelle il est peut-être nécessaire de répondre par un subtil distinguo. […] La statistique en est, je l’avoue, fort difficile à dresser dans la plupart des cas.

116. (1899) Esthétique de la langue française « Le cliché  »

L’homme qui écrit par clichés est difficile à tromper ; à défaut de mémoire, il a de l’instinct et on ne le ferait pas coucher avec une phrase qui ne se serait pas prostituée à plusieurs générations de grimauds. […] Il est difficile de voir ; c’est une faculté animale et c’est un don humain. […] Cette méthode est difficile à concilier avec la sensibilité esthétique, et nul, qui aime l’art, ne peut répondre qu’il n’en déviera jamais, l’ayant adoptée : on en laisse le choix aux volontés, selon leurs tendances. […] Les clichés du patriotisme professionnel sont difficiles à citer dans une étude où l’on ne veut ni indigner, ni faire rire.

117. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Première partie. Écoles et manifestes » pp. 13-41

Il est difficile de prophétiser, il est plus consolant d’espérer. […] La méthode classique subordonnait les détails à l’ensemble ; les romantiques, les parnassiens, les symbolistes, les naturalistes, — comme tous les artistes, — s’hypnotisèrent dans la contemplation du détail original. « L’harmonie des couleurs est d’un effet plus puissant que leur opposition brusque, mais c’est un effet plus difficile à obtenir. […] Ce très haut et très difficile désir artistique est tout à leur honneur. […] Il est difficile de le dire.

118. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Études sur Blaise Pascal par M. A. Vinet. »

Vinet ; il serait difficile d’analyser ici une série de leçons et d’articles critiques qui sont déjà des analyses. […] Il me serait difficile de vous exprimer tous les sentiments que j’ai éprouvés en le lisant ; je ne les démêle pas très-bien moi-même.

119. (1874) Premiers lundis. Tome I « Madame de Maintenon et la Princesse des Ursins — I »

Les temps étaient difficiles. […] Marmontel, qui avait eu entre les mains cette correspondance manuscrite, a jugé très favorablement madame des Ursins, et en vérité, d’après ce qu’on y lit, il est difficile de se défendre envers elle d’indulgence et d’estime.

120. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre V. Transition vers la littérature classique — Chapitre II. La langue française au xvie siècle »

Nous trouvons le témoignage curieux de cet embarras dans la Préface que Pierre Robert Olivetan mit à sa traduction de la Bible (1533) : « Aujourd’hui pour la plupart le François est mêlé de latin et souvent de mots corrompus : dont maintenant nous est difficile les restituer et trouver. […] Toutefois que, à suivie la propriété de la langue française, elle est si diverse en soi selon les pays et régions, voire selon les villes d’un même diocèse, qu’il est bien difficile de pouvoir satisfaire à toutes oreilles et de parler à tous intelligiblement.

121. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Le lyrisme français au lendemain de la guerre de 1870 » pp. 1-13

J’ai dû dire qu’il était bien difficile à des esprits exacts, armés de critique et se livrant à l’examen, de croire ce qu’on croyait autrefois. […] Il serait juste du moins que, dans ce cas-là, il y eût le jury : car autrement il est bien difficile d’éviter les jugements à la Caïphe et à la Ponce-Pilate.

122. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre I. Les travaux contemporains »

Sans doute Haller, Sœmmering, et avant eux Willis, avaient abordé déjà ces difficiles recherches ; mais Gall, par ses sérieuses découvertes aussi bien que par son aventureux système, leur a donné un puissant élan, et depuis cette époque un très-grand nombre de recherches importantes ont été faites dans cette voie. […] Il est précisément un de ceux que les fausses doctrines de Gall ont sollicités à rechercher la vérité par des méthodes plus scientifiques ; il est l’un des premiers qui aient appliqué à cette question difficile la méthode expérimentale.

123. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Deuxième cours des études d’une Université » pp. 489-494

Sans l’histoire, il est difficile d’entendre les auteurs anciens ; sans la morale universelle, il est impossible de fixer les règles du goût : et, sous ces deux points de vue, l’enseignement de ce second cours reflète encore sur l’enseignement du premier. […] Il serait difficile de parler de la richesse sans parler, du moins sommairement, de l’agriculture, source de toute richesse.

124. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 7, nouvelles preuves que la declamation théatrale des anciens étoit composée, et qu’elle s’écrivoit en notes. Preuve tirée de ce que l’acteur qui la recitoit, étoit accompagné par des instrumens » pp. 112-126

Cela veut dire que la déclamation theatrale est si variée, qu’il est si difficile d’entrer avec justesse dans tous ses differens tons, qu’on a besoin lorsqu’on veut déclamer comme on déclame sur la scene, de se faire soutenir par un accompagnement qui aide à bien prendre ces tons, et qui empêche de faire de fausses inflexions de voix. […] Ainsi je crois que dans l’execution des dialogues la basse continuë ne faisoit que jouer de temps en temps quelques notes longues qui se faisoient entendre aux endroits où l’acteur devoit prendre des tons dans lesquels il étoit difficile d’entrer avec justesse.

125. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Louandre »

… Dans de telles circonstances, qui sont les circonstances présentes, les grandes ou fortes œuvres tarissent et les petits livres abondent, les petits livres qui sont aux œuvres dignes de ce nom ce que le tableau de genre est aux grandes toiles ; les petits livres qui ne demandent que des facultés secondaires et qui dispensent de tout ce qui est difficile : la profondeur dans l’inspiration, la combinaison, l’ordre, la distribution de la lumière dans le fourmillement des détails, l’étoffe de l’ensemble enfin ; les petits livres dont ce brillant dandy, Mirabeau manqué dans l’intrigue, lord Bolingbroke, disait, avec sa fatuité épigrammatique, « qu’au moins ils avaient le mérite d’être bientôt lus ». […] Assurément, s’il est un homme fait pour mieux que le petit livre, c’est Louandre, le robuste traducteur de Tacite, un des érudits les plus râblés de ce temps, et dans tous les temps l’homme le plus capable d’œuvres fortes, noblement laborieuses et difficiles ; et cependant, obéissant, malgré lui sans doute, aux exigences de ce siècle superficiel et pressé, Louandre publie aussi un petit livre, comme s’il appartenait, lui, à la race des écrivains sans haleine qui ont inventé la phrase courte, le hachis des petits paragraphes et les écrits de quelques pages à l’usage d’une société qui ne lit plus !

126. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Erckmann-Chatrian » pp. 95-105

En d’autres termes, sans être dans son genre un lord Byron, Erckmann-Chatrian a-t-il senti la vocation — cette tigresse qui dort parfois comme une marmotte — s’éveiller en lui sous le rude toucher de la Critique, et nous forcera-t-il à reconnaître qu’il a le génie fantastique, qui doit être le plus étonnant et le plus rare de tous les génies, puisque, ainsi que je l’ai avancé, il se permet tout, et que l’imagination, cette Rêveuse difficile, a toujours le droit de lui dire : Je m’y attendais ? […] Il faut qu’il renonce à prendre ce bel oiseau bleu des Nuits, encore plus farouche et plus difficile à saisir que le bel oiseau bleu des Jours.

127. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre VII. De la physique poétique » pp. 221-230

En traitant de ce sujet, nous ne pouvons omettre une observation importante qui jette beaucoup de jour sur celle que nous avons faite dans la Méthode (il nous est aujourd’hui difficile de comprendre, impossible d’imaginer la manière de penser des premiers hommes qui fondèrent l’humanité païenne 80). […] Les héros, récemment sortis des géants, étaient au plus haut degré grossiers et farouches, d’un entendement très borné, d’une vaste imagination, agités des passions les plus violentes ; ils étaient nécessairement barbares, orgueilleux, difficiles, obstinés dans leurs résolutions, et en même temps très mobiles, selon les nouveaux objets qui se présentaient.

128. (1905) Promenades philosophiques. Première série

Bacon est infiniment difficile à entendre. […] La poésie de Léopardi est difficile à goûter, M.  […] Mais s’il est toujours difficile de traduire, il est particulièrement difficile de traduire Léopardi, En prose comme en vers, c’est un pessimiste de nature, plus que de raisonnement. […] Voilà un mot, qui, dans la circonstance, est difficile à justifier. […] C’est assurément très difficile.

129. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VI : Difficultés de la théorie »

Cas difficiles : Natura non-facit saltum. — VII. […] Mais l’on aurait pu choisir d’autres exemples : si l’on avait demandé comment un quadrupède insectivore peut avoir été métamorphosé en une Chauve-Souris, capable de vol, la question eût été plus difficile à résoudre, et je n’aurais pu y répondre pour le moment d’une manière satisfaisante. […] Mais il est difficile de dire, et d’ailleurs de peu d’importance pour nous, si, en général, les habitudes changent d’abord et l’organisation ensuite, ou si de légères modifications de structure conduisent naturellement à des habitudes nouvelles. […] Cas difficiles : Natura non facit saltum. […] Nous devrions admirer aussi, bien que cela nous puisse paraître difficile, la haine sauvage et instinctive qui pousse la reine-Abeille à détruire les jeunes reines, ses filles, aussitôt qu’elles sont nées, ou à périr elle-même dans le combat ; sans doute, c’est le bien de la communauté qui l’exige, et la haine maternelle peut provenir comme l’amour, bien que par bonheur plus rarement, de ce même principe inexorable de sélection naturelle.

130. (1925) Comment on devient écrivain

Le difficile est de combler une rédaction primesautière avec une pensée très mûrie. […] Le difficile, c’est l’originalité. […] C’est qu’en art, le difficile, c’est de voir. […] La méthode est bonne, et on n’a pas le droit de supprimer l’effort, sous prétexte que la réalisation est difficile.‌ […] Ils s’en débarrassent comme d’une corvée et ne sont pas difficiles sur les procédés d’exécution.

131. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Note »

Il en est ainsi de la privation des bras ; cette faiblesse a bien d’autres effets que d’empêcher de faire certains mouvements et de rendre difficiles ou embarrassantes les moindres actions de la vie commune, ce qui serait déjà un mal bien triste par sa continuité ; cette faiblesse ôte toute confiance dans l’avenir, entrave la vie entière, borne toute perspective, assujettit à cent besoins qu’on eût méprisés et, à la place d’un rôle d’homme, vous jette dans une dépendance aussi grande que celle des femmes. […] « Le lieu de la retraite paraîtrait fort difficile à choisir ; n’ayant pu vivre avec un ami, j’ai des amis, ils sont épars : près de qui se fixer ? […] « Après avoir passé une partie de la vie d’une manière indécise, ne devient-il pas plus difficile de sortir de ce vague ?

132. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre III. Grands poètes : Verlaine et Mallarmé, Heredia et Leconte de Lisle » pp. 27-48

Du mystère et de l’attente au seuil de cette œuvre difficile à connaître même matériellement, bibliotechniquement. […] Mendès : « Mallarmé est un auteur difficile. » C’est-à-dire que sa forme n’est pas celle de tout le monde, mais elle est, au moins en prose, claire et rapide : puisqu’il ne fait presque jamais, pour l’enchaînement des propositions, remonter qu’aux mots les plus proches. […] Il est difficile à ceux qui jamais n’en furent témoins d’indiquer ce qu’est une conférence, une causerie, une conversation de M. 

133. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre VII. L’antinomie pédagogique » pp. 135-157

Il y a une manière d’enseigner l’esprit critique qui donne un pli à l’intelligence et tout aussi difficile à détruire que celui que donne l’enseignement dogmatique. […] Ce moyen d’action suppose une condition particulièrement difficile à réaliser : un personnel d’éducateurs vraiment exemplaires et possédant une supériorité morale éclatante et incontestée. […] Problème difficile.

134. (1890) L’avenir de la science « XII »

Un grand seigneur comme M. de Maistre devait se trouver en effet humilié d’aussi pénibles investigations, et la vérité était bien irrévérencieuse de se rendre pour lui si difficile. […] Rien de plus difficile que de prédire l’importance que l’avenir attachera à tel ordre de faits, les recherches qui seront continuées et celles qui seront abandonnées. […] Il serait peut-être assez difficile de trouver quelque philosophie dans la théorie de l’accentuation grecque : est-ce une raison pour la déclarer inutile ?

135. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 16, des pantomimes ou des acteurs qui joüoient sans parler » pp. 265-295

Il n’étoit pas difficile de concevoir qu’il vouloit dire par-là qu’un homme plus grand homme que les autres, c’étoit un homme qui pensoit plus profondément qu’eux. […] En effet, Lucien dit que rien n’étoit plus difficile que de trouver un bon sujet pour faire un pantomime. Après avoir parlé de la taille, de la souplesse, de la legereté et de l’oreille qu’il doit avoir, il ajoute, qu’il n’est pas plus difficile de trouver un visage à la fois doux et majestueux.

136. (1759) Observations sur l’art de traduire en général, et sur cet essai de traduction en particulier

Il est d’autant plus difficile de représenter l’original dans une traduction, qu’il est souvent aisé de se méprendre à ses traits, et de ne le voir que par une face. […] Peut-être est-il difficile de décider auquel des deux poètes on doit donner la préférence ; mais il est aisé de voir que les vers français ne sont nullement la traduction des vers latins. […] La principale chose à laquelle je me suis appliqué, a été de conserver la précision, la noblesse et la brièveté de l’original, autant que me l’a permis mon peu de talent pour lutter contre un écrivain tel que Tacite, et le faible secours d’une langue aussi difficile à manier que la nôtre, aussi ingrate, aussi traînante et aussi sujette aux équivoques.

137. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXIII. Des éloges ou panégyriques adressés à Louis XIV. Jugement sur ce prince. »

Il est probable que si Louis XIV avait reçu une éducation digne de la vigueur de son caractère, il eût joint à sa passion des grandes choses le génie qui les juge, et que surtout il eût appris l’art le plus difficile des rois, celui de n’abuser ni de ses vertus ni de ses forces. […] Il est peut-être difficile de déterminer à quel point il connut les talents et les hommes. […] Ne lui reprochons pas des malheurs encore plus que des fautes ; mais la disgrâce de Fénelon et son exil ; mais la proscription de l’ouvrage le plus éloquent que la vertu ait jamais inspiré au génie : il est difficile, sans doute d’excuser cette erreur dans un roi aussi célèbre.

138. (1890) Dramaturges et romanciers

Difficiles problèmes que M.  […] Il m’est difficile d’y voir autre chose qu’un gracieux et amusant récit. […] Si c’est là son idéal du prêtre, il est fort acceptable, et les plus difficiles pourraient s’en contenter. […] Une ligne de démarcation bien difficile à maintenir et à observer que celle qui sépare la violence de l’audace ; M.  […] Pour réaliser ce difficile programme, M. 

139. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre VIII. Du crime. »

il serait si difficile de ne pas s’intéresser à l’homme plus grand que la nature, alors qu’il rejette ce qu’il tient d’elle, alors qu’il se sert de la vie pour détruire la vie, alors qu’il sait dompter par la puissance de l’âme le plus fort mouvement de l’homme, l’instinct de sa conservation : il serait si difficile de ne pas croire à quelques mouvements de générosité dans l’homme qui, par repentir, se donnerait la mort ; qu’il est bon que les véritables scélérats soient incapables d’une telle action ; ce serait une souffrance pour une âme honnête, que de ne pas pouvoir mépriser complètement l’être qui lui inspire de l’horreur.

140. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section II. Des sentiments qui sont l’intermédiaire entre les passions, et les ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre II. De l’amitié. »

Les femmes, ayant toutes la même destinée, tendent toutes au même but ; et cette espèce de jalousie qui se compose du sentiment et de l’amour propre, est la plus difficile à dompter. […] Dès qu’un homme et une femme ne sont point attachés ailleurs par l’amour, ils cherchent dans leur amitié tout le dévouement de ce sentiment, et il y a une sorte d’exigence naturelle, entre deux personnes d’un sexe différent, qui fait demander par degrés, et sans s’en apercevoir, ce que la passion seule peut donner, quelque éloigné que l’un et l’autre soit de la ressentir ; on se soumet d’avance et sans peine à la préférence que son ami accorde à sa maîtresse ; mais on ne s’accoutume pas à voir les bornes, que la nature même de son sentiment met aux preuves de son amitié ; on croit donner plus qu’on ne reçoit, par cela même qu’on est plus frappé de l’un que de l’autre, et l’égalité est aussi difficile à établir sous ce rapport que sous tous les autres ; cependant elle est le but où tendent ceux qui se livrent à ce lien.

141. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Samuel Bailey »

Quoique l’ensemble de ses arguments ne paraisse pas de nature à produire la conviction, il faut reconnaître qu’il a produit des faits difficiles à expliquer dans l’opinion contraire à la sienne. […] Il semble difficile d’être d’un autre avis.

142. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXV » pp. 402-412

Il n’est pas difficile de deviner ce que madame de Maintenon pensait et des bouderies de madame de Montespan et des dérèglements continuels du roi. […] Du moment qu’elle devint confidente et dépositaire des sentiments et des pensées du roi, et même des secrets de l’État, elle cessa de s’appartenir à elle-même : ce fut un devoir pour elle de donner au roi une parfaite sécurité sur le dépôt que sa confiance mettait à la discrétion de son amie ; elle lui devait de rompre toute familiarité qui aurait pu compromettre ce dépôt : il n’y a rien de si difficile à cacher qu’un secret avec tes personnes à qui l’on parle habituellement à cœur ouvert ; et il y a des secrets à la cour qui se découvrent par le soin de les cacher ; si bien qu’affecter de taire certaines choses, c’est les dire.

143. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 239-252

Il est difficile, après cela, de se rendre aux raisons par lesquelles M. […] Nous dirions d’abord que le larcin feroit peut-être difficile à prouver ; mais quand il existeroit, que peut-on en inférer à son désavantage ?

144. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre VII. Des ouvrages périodiques. » pp. 229-243

Il seroit difficile de vous faire connoître les différentes personnes qui ont eu part à ce Journal commencé en 1701. […] Il seroit difficile de dire à laquelle de ces Feuilles on doit donner la préférence.

145. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Michel Van Loo » pp. 66-70

J’ai un masque qui trompe l’artiste, soit qu’il y ait trop de choses fondues ensemble, soit que les impressions de mon âme se succédant très-rapidement et se peignant toutes sur mon visage, l’œil du peintre ne me retrouvant pas le même d’un instant à l’autre, sa tâche devienne beaucoup plus difficile qu’il ne la croyait. […] Il est difficile de dire lequel du frère et de la sœur est le plus roide et le plus froid.

146. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Casanove » pp. 192-197

Il y a des connaisseurs d’un goût difficile qui prétendent que ce faire est faux, sans aucun modèle approché dans la nature. […] Ces comparaisons multipliées vous rendraient bien difficile.

147. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 15, observations concernant la maniere dont les pieces dramatiques étoient représentées sur le théatre des anciens. De la passion que les grecs et les romains avoient pour le théatre, et de l’étude que les acteurs faisoient de leur art et des récompenses qui leur étoient données » pp. 248-264

Quand on est accoutumé une fois à faire une chose plus difficile que les fonctions ordinaires de son emploi, on en remplit mieux et de meilleure grace ces fonctions. […] Il faut que les travaux ausquels on nous assujettit pour nous faire faire un apprentissage, soient plus difficiles que le travail dont on veut nous rendre capables. (…), dit Seneque le pere.

148. (1865) La crise philosophique. MM. Taine, Renan, Littré, Vacherot

Ne la compliquons pas, elle est déjà assez difficile. […] C’est là une entreprise des plus difficiles. […] J’avoue qu’il me paraît bien difficile de ne pas donner raison, dans une certaine mesure, à d’aussi graves objections. […] Mais s’il est facile de proposer un programme philosophique, rien de plus difficile que de le réaliser. […] Le passage de Dieu au monde, ou, si l’on veut de l’infini au fini, est un passage difficile et obscur dans toutes les écoles.

149. (1898) Essai sur Goethe

Une doctrine difficile à définir, parce qu’elle repousse tout dogmatisme par trop brutal et appelle beaucoup de nuances. […] Mais que le héros nous en soit donné comme un modèle de chevalerie, c’est ce qu’il nous est plus difficile d’admettre. […] C’est ce qu’il est difficile de mesurer exactement. […] Il est pourtant difficile de croire que Goethe n’ait en rien souffert de cette irrégularité. […] Vous cherchez le nécessaire de la nature, mais sur une route si difficile que tout esprit moins fort que le vôtre se garderait bien de s’y aventurer.

150. (1925) Portraits et souvenirs

Pourtant, il a ce qu’il appelle des principes, et qui lui font préférer ce qu’il nomme « les méthodes difficiles ». […] Aussi, rien n’est-il plus difficile que de faire la critique d’un poème. […] Le théâtre est le pays de l’illusion et il est difficile de n’en pas subir les mirages. […] Elles était plutôt d’une lecture difficile. […] On sait combien la prudence du gouvernement rendait ces rapports difficiles.

151. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre II. Vérification de la loi par l’examen de la littérature française » pp. 34-154

Les faits que nous connaissons de l’histoire politique, sociale et religieuse, sont souvent difficiles à interpréter, d’abord à cause de leurs propres lacunes, et ensuite parce que notre information est d’origine presque exclusivement cléricale. […] En France, c’est Napoléon III, auquel on commence à rendre justice ; puis les débuts de la troisième République, difficiles et héroïques ; un travail immense, que la guerre de 1870 semble scinder en deux par une catastrophe ; et si c’était une nécessité heureuse ? […] La sympathie que j’ai pour ses idées (et qui n’a rien à voir ici) me trompe peut-être ; à si brève distance il est difficile de discerner… Je vois bien, sous la verve spirituelle, les trucs et les ficelles, et pourtant il me semble un maître trop dédaigné aujourd’hui. […] c’est un fait difficile à expliquer, mais c’est un fait ; on ne l’analyse jamais jusqu’au fond, on le sent ; et cette personnalité est l’essentiel ; les lignes et les couleurs sont les moyens de tous ; la vision est de l’individu. […] Deux traits dominants, difficiles à concilier bien que conciliables, semblent se disputer la priorité dans la littérature française : le goût de l’analyse psychologique et le goût des idées générales, propagandistes.

152. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre II. L’antinomie psychologique l’antinomie dans la vie intellectuelle » pp. 5-69

Mais de ce que l’hérédité devient plus difficile à déterminer dans les sociétés complexes, à cause de la richesse accrue des mentalités individuelles, il ne s’ensuit nullement qu’elle n’existe pas. Elle est seulement plus difficile à mesurer et à prévoir. […] Conclusion arbitraire : car il suffit d’admettre que les races furent autrefois un élément de différenciation mesurable pour être obligé d’accorder qu’aujourd’hui elles restent encore un élément de différenciation, difficile à déterminer, il est vrai, et à mesurer dans le détail. […] Sans doute l’originalité véritable est difficile, faible et rare. […] D’ailleurs, si on a quelques chances de rencontrer çà et là des aristes isolés, il est plus difficile de trouver une aristocratie digne de ce nom.

153. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Charles Dickens »

Pickwick, dans Le Magasin d’antiquités, Dickens aborde le chapitre des comédiens errants ; dans Olivier Twist, il décrit le monde des voleurs et des filles de Londres ; dans les Temps difficiles, ce sont des ouvriers et une troupe d’écuyers ambulants ; chacun de ces tableaux de mœurs est assurément peint avec les couleurs les plus fausses et les plus faibles, et quand Dickens veut parler du grand monde, c’est encore en homme qui s’est plu à s’en faire une idée directement contraire à la réalité ; l’école de M.  […] La Louise des Temps difficiles, cette singulière jeune femme, silencieuse et passionnée, chez laquelle éclate tout à coup le grand flot des sentiments, malgré l’étroite et toute positive éducation qu’elle a reçue, est de même, dans le décousu de sa composition, une figure frappante, et Dickens atteint presque au grand art réaliste dans l’effrayant et misérable forçat des Grandes Espérances ; le rude et sombre récit que cet homme fait de sa vie pourrait prendre rang à côté des grandes pages de Balzac. […] Les effets que peuvent produire des livres de cette sorte qui ont pour caractéristique l’outrance dans l’expression des mille émotions du romancier, les sentiments auxquels il fait appel chez ses lecteurs, ne sauraient être difficiles à démêler. […] Le fabricant et le député des Temps difficiles, M.  […] L’effroi le lui a permis ; plus rarement c’est la pitié qui l’inspire, comme pour cette bizarre et excessive jeune femme, la Louise des Temps difficiles, qui s’échappe si violemment de la dure éducation de chiffres et de faits, de brutal égoïsme et de froid détachement dans laquelle l’enserraient son père et son mari, pour sentir sourdre en elle la révolte des sentiments cordiaux.

154. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre I : Variations des espèces à l’état domestique »

Rien n’est plus aisé que d’apprivoiser un animal ; mais rien n’est plus difficile que de l’amener à se reproduire régulièrement à l’état de réclusion, même dans les cas nombreux où le mâle et la femelle s’unissent. […] En cas de variation, il est très difficile d’estimer ce qui provient de l’action directe de la chaleur, de l’humidité, de la lumière, de la nourriture, etc., etc. […] Toutes les expériences les plus récentes montrent combien il est difficile d’amener les animaux sauvages à se reproduire régulièrement en domesticité ; cependant, selon l’hypothèse des origines multiples de nos Pigeons, il faudrait admettre qu’au moins sept ou huit espèces ont été assez complétement apprivoisées, dans les temps anciens et par des hommes à demi civilisés, pour être parfaitement fécondes à l’état de réclusion. […] Il est difficile au contraire, et peut-être impossible, de citer un seul exemple d’hybrides provenant de deux espèces évidemment distinctes qui se soient montrés cependant parfaitement féconds. […] En des contrées à demi civilisées, où les communications sont difficiles, cette race serait encore plus lentement multipliée et appréciée.

155. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « M. Paul Verlaine et les poètes « symbolistes » & « décadents ». »

Dans quelle mesure les jeunes symbolards tiennent encore compte du sens des mots, c’est ce qu’il est difficile de démêler. […] Un poète selon la plus récente formule est avant tout un être étonné  Mais ce monsieur qui est si fier de penser à Platon en flânant sur le trottoir, l’a-t-il lu   A la vérité, je ne crois pas  Mais le paysage nocturne qu’il nous décrit n’est-il pas difficile à concevoir ? […] Sentiment singulier quand on y songe, difficile à comprendre, difficile à éprouver dans sa plénitude. […] Ce qui rend le sonnet difficile à saisir, c’est que l’expression de sentiments assez clairs en eux-mêmes y est coupée de menus détails, tirés précis, mais dont on ne sait d’où ils viennent ni à quoi ils sont empruntés.

156. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [IV] »

. — Situation difficile ; conseils à Dresde, à Leipsick. — Services rendus à la Suisse en 1814. […] Dès les premières discussions qui s’étaient élevées devant Alexandre, Jomini avait représenté à l’empereur qu’isolé et sans fonctions il lui était fort difficile de juger des affaires et de donner un conseil ; on décida donc de l’attacher officiellement à l’état-major de Schwartzenberg, en lui donnant Toll, général russe, pour adjoint ; mais la volonté du puissant autocrate ne parvint jamais à l’accréditer comme il aurait fallu. […] Cet homme d’étude, qui, dans sa jeunesse, avait été précepteur du comte Tanneguy Duchâtel (les Suisses sont volontiers précepteurs dans leur jeunesse), n’avait pas varié une minute au fond du cœur ni faibli dans sa première et vieille trempe helvétique ; et quand je pense à cet homme de bien, vétéran des universités, ancien membre de la Diète aux heures difficiles, si modeste de vie, mais intègre et grand par le caractère, je me le figure toujours sous les traits d’un soldat suisse dans les combats, inébranlable dans la mêlée comme à Sempach, la pique ou la hallebarde à la main. […] Nous avons traversé la période difficile de la carrière de Jomini.

157. (1875) Premiers lundis. Tome III «  À propos, des. Bibliothèques populaires  »

Et cependant parler, je le sens, est bien difficile ; venir contredire dans sa forme, dans sa tendance et dans ses conclusions, le Rapport que vous avez entendu dans la séance de vendredi et qui est l’ouvrage d’un savant collègue, d’un esprit pratique et positif, que je respecte tout particulièrement et qui m’a toujours montré de la bienveillance, ce n’est pas chose aisée, et il n’est pas agréable, je vous l’assure, de paraître prendre en main, ne fût-ce même qu’incidemment, une cause qui est déclarée détestable, funeste, perverse ; de paraître le moins du monde s’associer à ce qu’on a appelé les efforts des méchants. […] Que l’on vienne, dans une bibliothèque populaire, distribuer à des lecteurs inexpérimentés des aliments ou malsains, ou trop forts et d’une digestion intellectuelle difficile, ce n’est pas, vous le sentez bien, ce que je m’efforcerai de justifier ; mais ce qui me paraît d’autre part excessif, injustifiable, c’est qu’on prenne occasion de ce qui peut être un fait controversable ou blâmable, pour venir afficher une sorte de jugement public et officiel d’ouvrages et de noms livrés à la dispute des hommes, établir contre eux une sorte de sentence définitive et sans appel, les frapper d’une note odieuse de censure, et instituer dans notre libre France une sorte d’index des livres condamnés, comme à Rome. […] Cessons donc le plus tôt possible, hommes et femmes, d’être des enfants : ce sera difficile à bien des femmes, direz-vous, — à bien des hommes aussi. […] Si cette sorte d’arbitrage avait eu lieu, il m’eût été bien difficile de ne pas faire sourire l’illustre Président lui-même en m’autorisant auprès de lui d’un texte de droit romain qui semble fait exprès pour le cas en litige.

158. (1890) L’avenir de la science « XVIII »

» À l’état où en sont venues les choses, le problème est posé dans des termes excessivement difficiles. […] Les sages, qui savent combien le problème est difficile, haussent les épaules. […] C’est notre gloire d’être difficiles et mécontents. […] Les consciences fortes et individuelles comme les nôtres sont bien plus difficiles à atteler à une grande œuvre.

159. (1767) Sur l’harmonie des langues, et en particulier sur celle qu’on croit sentir dans les langues mortes

On s’est donné bien de la peine pour étudier une langue difficile, on ne veut pas avoir perdu son temps, on veut même paraître aux yeux des autres récompensé avec usure des peines qu’on a prises, et on leur dit avec un froid transport, ah ! […] Si le centon n’est que d’un seul auteur, ce qui est pour le moins fort difficile, j’avoue que la bigarrure n’aura plus lieu ; mais, en ce cas, à quoi bon cette rapsodie, et que peuvent ajouter à nos richesses littéraires ces petits lambeaux d’un ancien, ainsi décousu et mis en pièces ? […] Je dis plus ; il ne serait peut-être pas difficile de montrer par des exemples, qu’un écrivain français, qui pour paraître bien posséder sa langue affecterait dans ses ouvrages beaucoup de gallicismes (même de ceux qu’on peut se permettre en écrivant), se ferait un style qu’il faudrait bien se garder d’imiter. […] Il faut avouer qu’à cet égard elle est bien commode pour un auteur qui ne sait ni penser ni sentir ; et lui, et ceux qui le lisent, sont beaucoup plus occupés des mots que des choses ; et il est bien doux en composant de n’avoir rien à produire, et de savoir que ses juges n’y seront pas difficiles.

160. (1868) Curiosités esthétiques « IV. Exposition universelle 1855 — Beaux-arts » pp. 211-244

J’irai encore plus loin, n’en déplaise aux sophistes trop fiers qui ont pris leur science dans les livres, et, quelque délicate et difficile à exprimer que soit mon idée, je ne désespère pas d’y réussir. […] Quant à Guérin et Girodet, il ne serait pas difficile de découvrir en eux, d’ailleurs très-préoccupés, comme le prophète, de l’esprit de mélodrame, quelques légers grains corrupteurs, quelques sinistres et amusants symptômes du futur Romantisme. […] Mais aujourd’hui nous sommes en face d’un homme d’une immense, d’une incontestable renommée, et dont l’œuvre est bien autrement difficile à comprendre et à expliquer. […] Cette impression, difficile à caractériser, qui tient, dans des proportions inconnues, du malaise, de l’ennui et de la peur, fait penser vaguement, involontairement, aux défaillances causées par l’air raréfié, par l’atmosphère d’un laboratoire de chimie, ou par la conscience d’un milieu fantasmatique, je dirai plutôt d’un milieu qui imite le fantasmatique ; d’une population automatique et qui troublerait nos sens par sa trop visible et palpable extranéité.

161. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — II » pp. 268-284

J’en conclus que, s’il est si difficile, même de près, de saisir la qualité dominante chez un de nos contemporains, il est bien plus difficile, ou, pour mieux dire, tout à fait impossible de prétendre la retrouver et surtout la contrôler, la rectifier avec certitude, à une telle distance, chez les personnages de l’histoire de Tite-Live ou chez l’historien lui-même. […] J’ai toujours eu de la disposition à retenir en moi les impressions et les idées ; l’expansion est toujours plus ou moins lente, difficile et embarrassée.

162. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Essais de politique et de littérature. Par M. Prevost-Paradol. »

Prevost-Paradol avait dès lors acquis ce qu’il ambitionnait comme premier degré et comme point de départ : il s’était fait un nom et avait pris son rang en estime auprès d’un petit nombre de juges difficiles qui l’appréciaient pour ce qu’il était et ce qu’il pouvait. […] Je laisse de côté sa vocation politique active que j’admets en effet qu’il manque, je lui trouve deux talents de second plan, deux pis aller qui seraient de nature à satisfaire de moins difficiles : talent d’écrivain politique qui trouvera toujours moyen de dire ce qu’il pense, et qui a même intérêt à être gêné un peu ; car il y gagne le tour, et avec le tour l’agrément, ce qui cesse quand il écrit dans les journaux où il ne se gêne pas ; — talent de critique ou de discoureur littéraire des plus sérieux et des plus aimables, qui peut se jouer sur tous sujets anciens ou modernes, et s’exercer même sur des matières de religion, d’un ton de philosophe respectueux à la fois et sceptique. […] Le vieux Michaud de l’Académie, journaliste spirituel, celui que l’empereur Napoléon appelait un mauvais sujet, avait une maxime : « On ne dit bien que ce qui est difficile à dire. » 21.

163. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Louis XIV et le duc de Bourg, par M. Michelet. (suite.) »

Difficile à instruire dans les commencements par son extrême vivacité qui l’empêchait de s’assujettir aux règles, il emportait tout par la promptitude de sa pénétration et la force de son génie. […] Fénelon, plus difficile que ses autres précepteurs et plus clairvoyant, voudrait le voir un homme, un grand prince, ouvert, sociable, accessible à tous, non étroit ni particulier, ni renfermé et borné à un petit nombre de gens qui l’obsèdent et qui l’admirent, à une coterie, comme nous dirions ; ayant de la religion la moelle et l’esprit, non pas les simples pratiques minutieuses et les scrupules (comme de ne pas savoir pendant une marche en campagne, s’il peut, en conscience, loger dans les dehors d’une abbaye de filles), s’inspirant de lui-même dans les occasions, prenant sur lui, brave à la guerre, sachant y acquérir de la gloire, sinon par des succès éclatants qui peuvent manquer, par sa fermeté du moins, son génie et son esprit de ressource jusque dans les tristes événements. […] Michelet, et si hérissé, si difficile à suivre dans son Bétail de la France !

164. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’Impératrice Catherine II. Écrits par elle-même. »

Il est vrai que l’impression croissante et totale, la conclusion irrésistible résultant de la quantité de détails accumulés chemin faisant, est qu’il était impossible que Pierre III régnât, et bien difficile que Catherine, au contraire, ne devint point Impératrice de son chef ; ce qui avait été sa première pensée en mettant le pied en Russie et n’avait cessé d’être son secret désir. […] Je montrais un grand respect à ma mère, une obéissance sans bornes à l’Impératrice, la considération la plus profonde au grand-duc, et je cherchais avec la plus profonde étude l’affection du public. » Et encore « Je m’attachais plus que jamais à gagner l’affection de tout le monde en général : grands et petits, personne n’était négligé de ma part, et je me fis une règle de croire que j’avais besoin de tout le monde, et d’agir en conséquence pour m’acquérir la bienveillance ; en quoi je réussis. » Elle rencontra, à ce moment difficile et décisif, un conseiller excellent : c’était un Suédois de beaucoup d’esprit, qui n’était plus jeune, le comte Gyllenbourg. […] S’il avait voulu être aimé, la chose n’aurait pas été difficile pour moi ; j’étais naturellement encleinte (encline) et accoutumée à remplir mes devoirs ; mais pour cela il m’aurait fallu un mari qui eût le sens, commun , et celui-ci ne l’avait pas. » On voit poindre chez elle, peut-on s’en étonner ?

165. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite.) »

J’ai cru remarquer pourtant que de ces deux parties de Don Quichotte, toutes deux si agréables dans leur diversité et qui se complètent si bien, les lecteurs d’un goût difficile et d’un jugement plus froid estiment la seconde supérieure, tandis que les esprits plus poétiques ou qui accordent davantage à la fantaisie, continuent de donner la préférence à la naïveté de la première. […] G. de Lavigne que l’ouvrage du continuateur n’est nullement méprisable et qu’il n’est difficile à lire aujourd’hui que parce que la place est prise et que chaque lecteur a dans l’esprit la suite si agréable de Cervantes, c’est tout ce que vraiment on pourrait faire ; je viens, dans mon désir d’impartialité, d’essayer de lire quelques chapitres de ce Don Quichotte d’Avellaneda ; tout ce que j’en ai vu me paraît lent, logique et lourd ; on ne peut s’empêcher de dire à chaque instant : « Ah ! […] Ce qu’il y a de plus certain en tout ceci, c’est que Cervantes avait beaucoup vu, qu’il avait probablement observé des aliénés, et qu’avec le tact de l’artiste, encore plus qu’avec le tact médical, il a présenté la folie de son héros du côté le plus plausible et le plus acceptable, de manière à entraîner son lecteur. — Mais qu’il est donc difficile de garder la juste mesure dans l’admiration comme dans la critique, et quel ingrat métier que celui qui consiste à venir sans cesse dire gare à tout excès, à vouloir toujours remettre le cavalier d’aplomb sur sa monture !

166. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Préface »

Et puisque nous sommes en veine de confession et d’une défense qui n’est pas difficile, il y avait plus d’un an, si l’on veut le savoir, que M.  […] C’était une époque difficile, et une bonne information n’eût pas été, je crois, inutile. […] Aussi l’état de ma santé étant ce qu’il est, il ne me sera pas difficile, si l’ancien Moniteur suivait une ligne qui fût par trop en contradiction avec ma pensée, de m’abstenir et de rester dans ma chambre.

167. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « La comtesse Diane »

Il est donc furieusement honorable pour notre temps qu’un genre si difficile y fleurisse : apparemment, si nous écrivons tant de Pensées, c’est que, tard venus dans le monde et à une époque où l’observation est plus et mieux pratiquée qu’elle ne l’a jamais été, nous sommes un tas de moralistes très forts qui avons fait le tour des choses, qui sommes allés partout, et qui en revenons surchargés d’expérience… Mais je me méfie, comme dit M.  […] Jeu assez difficile, il faut le reconnaître, mais qui s’apprend enfin. […] L’amitié naît des confidences… — voilà qui n’est pas difficile à trouver.

168. (1912) L’art de lire « Chapitre IV. Les pièces de théâtre »

Il ne suffit pas de lui donner un style laconique ; il faudrait qu’il ne dît rien ; ce n’est pas un personnage de théâtre. » Il est plus difficile de trouver le style d’un caractère que d’inventer le caractère lui-même. Bellac, du Monde où l’on s’ennuie, n’était pas difficile à inventer, puisqu’il est toujours dans la réalité et qu’il suffisait de s’en aviser ; ce qui était malaisé, c’était de lui trouver son style, et c’est à quoi Pailleron a admirablement réussi. […] On voit aussi que cette recherche est difficile et qu’il n’y manque pas de chances de se tromper ; ce n’est qu’une raison de plus pour la faire, quand il s’agit de plaisir, et, dans le petit livre que j’écris, il n’est question que de cela ; le risque de se tromper aiguise le désir de voir juste et relève le plaisir d’avoir probablement raison, et il y a un plaisir, je ne dirai pas plus grand, mais plus piquant, à être à peu près certain qu’on a raison, qu’à en être pleinement sûr.

169. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Hippolyte Babou »

Ils veulent des pièces de résistance, et comme ils ne lisent pas en général pour des raisons très littéraires, mais pour passer le temps, quand ils sont oisifs, et pour se distraire, quand ils sont occupés ; comme ce ne sont pas des questions pour eux dans un livre que la profondeur des caractères ou la beauté du langage, ils se détournent naturellement de ce qui est fin, est susceptible de dégustation, pour se retourner vers ce qui est gros et peut s’avaler comme une pâtée… Alors les nouvelles, qui sont des romans concentrés, doivent être, en raison de leur concentration même, d’un très rare et d’un très difficile succès. […] Soit, en effet, qu’il eût compris qu’il faut plus d’art peut-être pour construire un drame ou un récit dans les proportions de Madame Firmiani ou de la Grande Bretèche que dans celle des Mystères de Paris ou de Monte-Cristo, soit qu’il ne se sentit dans l’esprit, pour chacune de ses conceptions, que le cadre étroit d’une nouvelle et qu’il ne voulût pas trop embrasser pour mal étreindre, il n’en a pas moins donné à la Critique le spectacle de deux choses l’une, auxquelles elle est peu accoutumée : — l’amour désintéressé de ce qui est difficile, et l’exacte conscience de soi. […] Mais, au fond, pour les esprits qui lui font l’honneur d’être difficiles, rien de plus.

170. (1900) Le lecteur de romans pp. 141-164

C’est que, en effet, une autre règle plus délicate, infiniment plus difficile à observer, s’impose à l’écrivain, à celui-là surtout qui prétend raconter et analyser le monde des passions humaines. […] Mais, pour cette leçon difficile, je récuse l’école du roman. […] Il se nomme Jacques et il est amoureux ; il se nomme Albert et il pleure sur l’abandon de sa meilleure amie ; il se nomme Dominique et des embarras de fortune lui rendent difficile la résignation nécessaire à la vieillesse qui s’annonce.

171. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Note »

Cela d’abord m’a paru difficile, car je puis vous assurer en toute bonne foi que vous n’êtes pour rien dans aucun de ces portraits. Il y en a deux (à l’endroit qu’on m’indiquait)  de fort clairs, et si j’eusse voulu vous mettre dans le troisième, il ne m’eût pas été difficile de le faire plus reconnaissable.

172. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « EUPHORION ou DE L’INJURE DES TEMPS. » pp. 445-455

On rassemble leurs moindres vestiges, on rapproche et on discute les plus légers témoignages ; la conjecture n’a plus ensuite qu’à jouer et à s’ébattre ; c’est ce qu’il est difficile qu’elle ne s’accorde point à de certains moments. […] Mais de ce que Properce est érudit et quelque peu difficile à entendre par endroits jusqu’au sein de la passion, la perte de ses étincelantes élégies serait-elle moins pour l’homme de goût une calamité littéraire ?

173. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 5, explication de plusieurs endroits du sixiéme chapitre de la poëtique d’Aristote. Du chant des vers latins ou du carmen » pp. 84-102

Examinons d’où procedoient ces beautez du langage préparé pour plaire dont il est ici fait mention, et nous trouverons qu’elles n’étoient pas l’ouvrage d’un seul, mais de plusieurs arts musicaux, et par consequent qu’il n’est pas si difficile de bien entendre l’endroit de ce passage, qui dit qu’elles émanoient de sources differentes. […] L’appareil de la representation fait aussi un spectacle imposant, mais il n’est point aussi difficile d’y réussir que dans la composition.

174. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « II »

Maintenant encore, je reste persuadé qu’il sera difficile de détruire on de remplacer ce genre d’enseignement, parce que je l’ai tiré, non de moi, mais des grands écrivains classiques. […] Maintenant encore, je reste persuadé qu’il sera difficile de détruire on de remplacer ce genre d’enseignement, parce que je l’ai tiré, non de moi, mais des grands écrivains classiques.

175. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre XI. Troisième partie. Conséquences de l’émancipation de la pensée dans la sphère des idées politiques. » pp. 350-362

Il a été difficile, dans tous les temps, d’accorder la liberté de l’homme et la prescience de Dieu : cet accord a été difficile surtout pour les peuples chez qui le flambeau des traditions n’a pas été directement transmis.

176. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Dante »

Il semblait moins difficile, et peut-être l’était-il moins, de constater tous ces gens-là que nous venons d’énumérer dans Alighieri le multiface, que de sentir en lui cette unité et cette simplicité sublime : — le poète ! […] Magnier a cherché à hiérarchiser par ordre de mérite les trois parties de ce poème prodigieux : l’Enfer, le Purgatoire et le Paradis, et il a montré une grande sûreté de tact et de jugement dans cette opération difficile.

177. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « J.-J. Ampère ; A. Regnault ; Édouard Salvador »

Regnault ; Édouard Salvador18 I Depuis que cela est devenu si facile, rien de plus difficile que de voyager ! […] Le moindre livre de voyage écrit… même par un grimaud, peut être instructif et piquant pour les sociétés sédentaires ; mais pour celles qui passent leur vie à se déverser les unes dans les autres, il faut, sous peine de ne rien apprendre et de ne pas intéresser, que les livres de voyage soient écrits par des esprits d’un ordre élevé et d’une vue perçante, qui voient ce qu’il est difficile de voir en tout état de cause, soit qu’on reste au logis, soit qu’on s’en aille au bout du monde, — je veux dire : l’âme et l’esprit des choses.

178. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Conclusion »

Or, en matière historique — sans parler de la rareté avec laquelle se montrent des rapports constants entre deux phénomènes — qui ne sait combien il est difficile de dire avec précision quand commence ou, quand finit chacun d’eux, et d’établir, par suite, celui qui est apparu le premier ? […] En réalité, si son influence sur une ou deux d’entre elles est plausible, elle est, en ce qui concerne les autres, très difficiles à concevoir.

179. (1900) La culture des idées

Cela est difficile, ces mots du lexique moral n’ayant plus qu’une signification fuyante et toute relative. […] La mode change ou dure selon des caprices impossibles à prévenir et difficiles à déterminer. […] Ensuite, il ne s’agit que de les éplucher sans se salir les doigts ; des gens prétendent que cela est fort difficile, « qu’il en reste toujours quelque chose » : oui, cela est difficile, mais si vos doigts restaient tachés, vous en seriez quitte pour porter des gants ; un autre motif m’a déjà fait vous recommander cet usage. […] Une île est une proie difficile à atteindre, mais dès qu’elle est touchée, c’est une proie paralysée. […] Le français est-il plus difficile aujourd’hui qu’il y a un siècle ?

180. (1898) Introduction aux études historiques pp. 17-281

C’était difficile, alors que les bibliothèques étaient rares, les archives secrètes et les documents dispersés. […] Quand trois documents sont apparentés, leurs relations mutuelles sont déjà, en certains cas, plus difficiles à spécifier. […] Mais l’histoire peut en tirer parti parce qu’elle n’a pas besoin, comme les autres sciences, d’atteindre des faits difficiles à constater. […] Si nombreuses que soient les chances d’erreur il y a des faits si « gros » qu’il est difficile de les voir de travers. […] Cette méthode est d’une application difficile.

181. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » p. 315

Dussaulx, qui vient d'en donner une qu'il sera difficile de surpasser.

182. (1763) Salon de 1763 « Sculptures et gravures — Tapisserie »

Mon ami, il n’est guère moins difficile de faire prendre des laines pour de la couleur, que de la couleur pour des chairs, et je ne crois pas qu’il y ait quelque chose dans toute l’Europe qui puisse lutter contre nos ouvrages des Gobelins.

183. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article »

Le Surintendant Fouquet s’en amusa sans doute, puisqu’il fit du Rimeur un de ses Pensionnaires ; mais il seroit difficile de s’amuser aujourd’hui de la lecture de ces Gazettes, qu’on a pourtant pris la peine de recueillir dans trois gros volumes.

184. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers, Tome xix. (L’île d’Elbe, — L’acte additionnel. — Le champ de mai.) » pp. 275-284

Tacite, là où il est beau et où il se déploie, est un grand peintre ; il est même, a-t-on dit, le plus grand peintre de l’Antiquité ; mais j’ai tant de peine, je l’avoue, à comprendre chez lui certains contournements de pensée, qu’il m’est difficile de croire que ce soit là l’unique manière de bien dire, ou même l’unique manière de bien voir et de juger. […] Jouissons de celle que nous avons et qui nous apprend tant de choses neuves, qui nous fait assister non seulement à tant de batailles, mais à tant de conseils, qui présente aux esprits les plus difficiles tant d’éléments exacts de jugement.

185. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Hommes et dieux, études d’histoire et de littérature, par M. Paul De Saint-Victor. »

Mais M. de Saint-Victor est un délicat et un difficile entre tous ; il a le goût élevé et même superbe : il n’est pas homme à se contenter aisément. […] J’ai dit que M. de Saint-Victor avait ses dieux : il est difficile, quand on a ses dieux, de ne pas avoir ses démons aussi et ses diables, c’est-à-dire, en regard de ceux qu’on adore, de ne pas dénoncer et repousser d’un geste ceux qu’on réprouve et qu’on range parmi les maudits.

186. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « en tête de quelque bulletin littéraire .  » pp. 525-535

Le public demande de la critique, et il a raison puisqu’il n’y en a plus guère ; mais il ne sait pas combien ce qu’il demande est difficile, et, osons le dire, impossible presque aujourd’hui, pour une multitude de causes qui tiennent à l’état même de la société et à la constitution de la littérature. […] Depuis dix ans, la main-d’œuvre poétique s’est divulguée ; les procédés que la nouvelle école avait cru rendre plus rares et plus difficiles ont été saisis du second coup par une foule de survenants qui, à chaque saison, pullulent.

187. (1890) L’avenir de la science « IX »

Il était d’ailleurs difficile au XVIIe siècle de deviner la haute critique et le grand esprit de la science. […] Tant il est difficile de savoir apprécier la nécessité et la légitimité des révolutions successives de l’esprit humain.

188. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre X. Prédictions du lac. »

Mais il est difficile d’admettre qu’une influence bouddhique se soit exercée en ceci. […] Jésus, dont les rapports avec les Esséniens sont très difficiles à préciser (les ressemblances, en histoire, n’impliquant pas toujours des rapports), était ici certainement leur frère.

189. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre XVII. Morale, Livres de Caractéres. » pp. 353-369

Son Traité des moyens de conserver la paix dans la société, est digne de Sénéque ; mais il est peut-être aussi difficile d’établir cette paix, que de terminer les procès de deux Normands vieillis dans la chicane. […] Mais il y a des lecteurs difficiles qui n’aiment un ouvrage, que lorsqu’il renferme un grand nombre de choses neuves & importantes.

190. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Baudouin » pp. 198-202

-vous êtes difficile. […] Je joue de l’orgue ; cela n’est pas si difficile que je croyais.

191. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Lenient » pp. 287-299

Et cependant, quand on écrit l’histoire de la Satire, fût-ce en France, fût-ce au Moyen Âge, c’est-à-dire, après tout, dans un assez chétif fragment de l’espace et du temps, on n’écrit pas moins que l’histoire de l’esprit humain, — et de l’esprit humain par son côté le plus varié, le plus profond, le plus mystérieux, car le rire est plus difficile à expliquer que les larmes, dont la source est si large en nous qu’on n’a pas besoin de la chercher ! […] Affriolant et mordant sujet, difficile et oublié !

192. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXII. Philosophie politique »

Et ce n’est point difficile, quand on a la tête nette et qu’on ne se laisse pas envahir et entamer par la niaiserie des phrases et des livres. […] et il ajoute, par une opposition qu’il est difficile de comprendre : « La philosophie politique ne vogue pas sans boussole sur cette mer des destinées où Dieu lui apparaît comme pôle et la vraie liberté pour port. » Mais l’utopie aussi a parlé ce langage.

193. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Duranty » pp. 228-238

But lointain, conquête difficile ! […] Monde, personnes, choses, faits, inventions, tout cela, dans son roman, est, il faut bien le dire, sans intérêt pour l’imagination difficile, la seule qu’il faille invoquer en fait d’art ou de littérature, et on n’a point une seule fois à dire, pendant la lecture qu’on en fait : « Voilà qui est beau », mais au plus : « Voilà qui est exact », et encore de la plus facile des exactitudes.

194. (1759) Salon de 1759 « Salon de 1759 — Aved »

Mais je suis trop difficile.

195. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » p. 442

Le grand nombre d’inepties qui se produisent tous les mois dans ce Journal, étoit un préjugé contre le mérite de ces Drames ; mais il est aussi difficile aux Rédacteurs du Mercure de décréditer un bon Ouvrage, que d’en faire valoir un mauvais.

196. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 159

Ce fut, il est vrai, à la sollicitation de M. de Pontchartrain, Contrôleur-Général des Finances, qui le protégeoit ; car on fit des difficultés pour l’admettre, parce que l’Académie étoit alors plus difficile qu’à présent.

197. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » p. 493

On peut lire avec plaisir ses Odes Latines, sans croire, avec Ménage, qu’elles sont supérieures à celles de Santeuil, qu’il est difficile de surpasser.

198. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (1re partie) » pp. 413-491

Les prétextes ne sont pas difficiles en logique. […] La tragédie ainsi développée, lorsqu’il ne reste plus au poète d’autre souci que de la versifier à son aise, et de distinguer le plomb de l’or, l’inquiétude que communique à l’esprit le travail des vers et cette passion de l’éloquence, si difficile à satisfaire, ne sauraient nuire en rien au transport et à l’enthousiasme qu’il faut aveuglément suivre dès que l’on veut concevoir et créer une œuvre terrible et passionnée. […] Mais ma nature austère, réservée, difficile, me rend, et, tant que je vivrai, me rendra peu propre à inspirer à d’autres ce sentiment qu’à mon tour je n’accorde pas sans une extrême difficulté. […] Il m’en était resté dans les yeux et en même temps dans le cœur une première impression très agréable ; des yeux très noirs et pleins d’une douce flamme, joints (chose rare) à une peau très blanche et à des cheveux blonds, donnaient à sa beauté un éclat dont il était difficile de ne pas demeurer frappé, et auquel on échappait malaisément. […] Le difficile était de déjouer la surveillance du comte, qui ne la quittait pas un instant, et la mettait littéralement sous clef chaque fois qu’il était obligé de sortir sans elle.

199. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Agrippa d’Aubigné. — I. » pp. 312-329

Il comprend la dignité du genre qu’il traite ; il est des particularités honteuses ou incertaines que l’histoire doit laisser dans les satires, pamphlets et pasquins, où les curieux les vont chercher : d’Aubigné, qui aime trop ces sortes de pasquins ou de satires, et qui ne s’en est jamais privé ailleurs, les exclut de son Histoire universelle, et, s’il y en introduit quelque portion indispensable, il s’en excuse aussitôt : ainsi en 1580, à propos des intrigues de la cour du roi de Navarre en Gascogne, quand la reine Marguerite en était : J’eusse bien voulu, dit-il, cacher l’ordure de la maison ; mais, ayant prêté serment à la vérité, je ne puis épargner les choses qui instruisent, principalement sur un point qui, depuis Philippe de Commynes, n’a été guère bien connu par ceux qui ont écrit, pour n’avoir pas fait leur chevet au pied des rois… Quand il s’étend longuement sur certaines particularités purement anecdotiques, il s’en excuse encore ; il tient à ne pas trop excéder les bordures de son tableau ; il voudrait rester dans les proportions de l’histoire : mais il lui est difficile de ne pas dire ce qu’il sait de neuf et d’original ; et d’ailleurs, s’il s’agit de Henri IV, n’est-il pas dans le plein de son sujet, et n’est-il pas en droit de dire comme il le fait : « C’est le cœur de mon Histoire ? » Dans une Histoire contemporaine comme celle qu’il écrit et où il est témoin et quelquefois acteur, il lui est difficile de ne point parler de soi ; il n’évite pas ces sortes de digressions ou d’épisodies, selon qu’il les appelle ; il s’y complaît même ; toutefois, malgré le coin de vanité et d’amour de gloire, qui est sa partie tendre, il a soin le plus souvent de ne pas se nommer, et ce n’est qu’avec quelque attention qu’on s’aperçoit que c’est lui, sous le nom tantôt d’un écuyer, tantôt d’un mestre de camp, qui est en cause dans ces endroits, et qui donne tel conseil, qui tient tel discours. […] … » Mais c’est la réponse de l’Amiral qui est belle de tristesse, de prévoyance et de prophétie ; tout un abrégé de sa destinée tragique s’y dessine ; il répond : « Puisque je n’ai rien profité par mes raisonnements de ce soir sur la vanité des émeutes populaires, la douteuse entrée dans un parti non formé, les difficiles commencements (et il revient ici à l’énumération des obstacles)… ; — puisque tant de forces du côté des ennemis, tant de faiblesse du nôtre ne vous peuvent arrêter, mettez la main sur votre sein, sondez à bon escient votre constance, si elle pourra digérer les déroutes générales, les opprobres de vos ennemis et ceux de vos partisans, les reproches que font ordinairement les peuples quand ils jugent les causes par les mauvais succès, les trahisons des vôtres, la fuite, l’exil en pays étrange… ; votre honte, votre nudité, votre faim, et qui est plus dur, celle de vos enfants.

200. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Léopold Robert. Sa Vie, ses Œuvres et sa Correspondance, par M. F. Feuillet de Conches. — I. » pp. 409-426

J’ai choisi un effet trop difficile à rendre ; et d’ailleurs je m’aperçois qu’une Corinne est trop élevée pour moi qui n’ai jamais fait que des brigands et des paysannes… C’est un sujet trop difficile. […] J’ose dire que je me sens des moyens dont je n’ai pu donner que des échantillons jusqu’ici ; car, pour rendre ce que je sens, ce que je vois, il faut un travail difficile et pénible.

201. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres publiées par M. de Falloux. »

Elle veut quelque chose de difficile, sans quoi ce ne serait pas digne d’elle, et elle ne l’entreprendrait pas. […] Elle en fait quelque chose d’essentiellement à part et qui ne ressemble pas à ce que le commun des gens entend sous ce nom : car se résigner, après tout, n’est pas si rare ni si difficile, et il n’y a pas tant de mystère ; tous les hommes y viennent plus ou moins quand la nécessité est là ; mais Mme Swetchine se méfie de ce qui est trop simple et trop commun : « Ce qui me gâte un peu la résignation, avait-elle dit, c’est de la voir si conforme aux lois du bon sens : j’aimerais encore un peu plus de surnaturel dans l’exercice de ma plus chère vertu. » En conséquence elle s’est appliquée à y introduire le plus de surnaturel possible, et elle y a réussi. […] Son énergie sa volonté et la destinée difficile qu’elle ne s’était point choisie tinrent longtemps ce caractère en forme et à la gêne, avant qu’il nous apparût tout fait, tout cimenté et dans sa pleine consistance.

202. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

Du moment qu’on déclare que l’humanité, dans ses diverses manifestations historiques, a tout fait, mais en même temps a tout bien fait, et qu’on se révolte, comme si c’était un sacrilège, à l’idée qu’elle a pu commettre en masse quelque grosse sottise, il est difficile de ne pas admettre un plan auquel, même à son insu, elle obéit : il y a un Dieu là-dessous. […] Je ne crois pas que, si on le poussait, il insistât sur ces caprices de sa philosophie en ses heures de rêve ; il m’est difficile notamment de concevoir quelle époque précise du haut Moyen-Âge a pu être si favorable au développement vigoureux de l’intelligence individuelle, à moins que ce ne soit dans le même sens qu’une prison avec ses barreaux est favorable à l’exercice de la force du prisonnier, s’il parvient à en sortir. […] Mais on écoute sur tous les bancs, on se tait avec avidité, on admire même la finesse de pensée et de parole qui, pour la première fois, s’applique dans une telle méthode à ces graves et difficiles questions.

203. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vie de Jésus, par M. Ernest Renan »

Il a eu présent à la pensée ce mot d’un grand révolutionnaire : « Il n’y a de détruit que ce qui est remplacé. » Il ne s’est donc pas contenté de défaire une vie de Jésus, ce qui n’est pas difficile à la critique en se tenant sur ce terrain de pure discussion ; il a prétendu la refaire. […] Il se rencontrait un moment difficile et périlleux, dans une Vie du Christ ainsi conçue : c’est celui où, d’une première prédication toute tendre et plus modeste, il passe à son rôle divin plus déclaré et à son affectation de Messie. […] Traiter la Passion et la reprendre en sous-œuvre n’était pas moins difficile.

204. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Jean-Bon Saint-André, sa vie et ses écrits. par M. Michel Nicolas. »

Michel Nicolas, je me suis adressé à lui-même pour avoir les moyens, à mon tour, de remonter directement aux sources ; j’ai questionné par lettres des membres de la famille de Jean-Bon qui avaient gardé des récits de tradition orale ; j’ai reçu, de Montauban, la communication de pièces originales et rares, difficiles à retrouver29. […] Un second discours ou sermon « sur la vocation à la liberté et sur les obligations qu’elle impose », prononcé à Montauban le dimanche 9 octobre 1791, jour où la Constitution y fut proclamée, un vrai sermon encore, commençant par Mes frères, et finissant par Amen, nous le montre également dans l’exercice de son ministère pastoral ; et il serait difficile de deviner, en le lisant, ce qui devait éclater le lendemain, ce qui s’était déjà passé la veille. […] Homme obscur, ignoré dans la république des lettres ; jeté, par cette force invisible qui maîtrise nos destinées, dans les agitations d’une vie errante et toujours malheureuse ; appelé, par un concours de circonstances extraordinaires, à des emplois redoutables, où le moment de la réflexion était sans cesse absorbé par la nécessité d’agir ; remplissant encore aujourd’hui des fonctions administratives, bien plus par l’amour de la justice et l’instinct du devoir que par la connaissance approfondie des principes sur lesquels nos grands maîtres ont établi l’art si difficile de l’administration publique ; demeuré, par une captivité longue et douloureuse, presque entièrement étranger aux nouveaux progrès que des savants recommandables ont fait faire à la science, mon premier devoir, Citoyens, est de faire ici l’aveu public de mon insuffisance, et de vous déclarer que tout ce que je puis offrir à cette Société respectable est l’hommage sincère, mais sans doute impuissant, de ma bonne volonté… » Et se voyant amené, par l’ordre des idées qu’il développait dans ce discours, à parler de la Révolution française, explosion et couronnement du xviiie  siècle, de « cette Révolution à jamais étonnante qui, déplaçant tout, renversant tout, après des essais pénibles, souvent infructueux, quelquefois opposés, avait fini par tout remettre à sa véritable place », il s’écriait, cette fois avec le plein sentiment de son sujet et avec une véritable éloquence : « La Révolution !

205. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre V. La littérature et le milieu terrestre et cosmique » pp. 139-154

En attendant, il est toujours utile de constater certaines coïncidences curieuses où il est bien difficile de voir un pur effet du hasard. […] Mais ce qui est plus difficile et plus intéressant à savoir, c’est la conception que telle époque s’est faite de la nature, c’est l’espèce de sentiments qu’elle a éprouvés pour elle. […] En ce temps-là toutefois, les voyages étaient lents, difficiles, périlleux.

206. (1886) De la littérature comparée

Pour ce nouveau-venu de même, ce moment est plus pénible qu’il ne saurait le dire, et il sent avec angoisse combien il lui sera difficile de se faire pardonner sa témérité. […] Marc Monnier a signalé — après les avoir résolues — les difficultés d’un enseignement aussi vaste que celui de la littérature comparée : « Mener toutes les littératures de front, a-t-il dit ; montrer à chaque pas l’action des unes sur les autres ; suivre ainsi, non plus seulement en deçà ou au-delà de telle frontière, mais partout à la fois, les mouvements de la pensée et de l’art, cela paraît ambitieux et difficile... » Il a pu ajouter : « On y arrive cependant, à force de vivre dans son sujet qui petit à petit se débrouille, s’allège, s’égaie... » Mais ce qu’il n’a pas dit, ce sont les rares qualités d’esprit qui lui ont permis d’accomplir un tel travail et de le perfectionner d’année en année : une érudition qui s’élargissait sans cesse ; un sens critique habile à choisir entre la masse des documents les plus propres à marquer la physionomie d’un homme ou d’une époque, ou à dégager les caractères essentiels d’une œuvre ; une intelligence si enjouée qu’elle a pu, pour conserver son expression, « égayer » cette grave étude de l’histoire littéraire, si alerte, que d’heureuses échappées dans tous les domaines, elle a su rapporter des œuvres également distinguées. […] Sans désespérer de réaliser plus tard la première et la plus difficile partie de ce programme, nous nous en tiendrons, pour le moment, Messieurs, à la seconde.

207. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Pline le Naturaliste. Histoire naturelle, traduite par M. E. Littré. » pp. 44-62

Après une préface sous forme de lettre familière adressée à Titus, lettre spirituelle, mais difficile à saisir en quelques parties, et qui n’est pas du même ton que le reste de l’ouvrage, Pline entre en matière. […] Au chapitre sur les météores et les principaux souffles des vents, il faut l’entendre parler des anciens observateurs grecs et de leur supériorité relative : Mon étonnement est extrême, dit-il, quand je vois que dans le monde, autrefois si plein de discordes et divisé en royaumes comme en autant de membres, un aussi grand nombre d’hommes s’est livré à la recherche de choses si difficiles à trouver, et cela sans en être empêchés par les guerres, par les hospitalités infidèles, par les pirates ennemis de tous, et interceptant presque les passages ; et cela avec un tel succès, que, pour des lieux où ils ne sont jamais allés, on en apprend plus sur certains points, à faire de leurs livres, que par toutes les connaissances des habitants. […] Il est difficile pourtant, si indulgent qu’on soit, de n’en point apercevoir quelques-unes dans l’homme, tel du moins que nous le voyons.

208. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « L’abbé Gerbet. » pp. 378-396

Je voudrais tâcher de le leur expliquer, leur donner idée d’un des hommes les plus savants, les plus distingués et les plus vraiment aimables que puisse citer l’Église de France, de l’un de nos meilleurs écrivains, et, sans m’embarquer dans aucune question difficile ou controversée, mettre doucement en lumière la personne même et le talent. […] Ces nigauds de l’abbé Gerbet sont pleins d’esprit et d’à-propos : il les fait par obéissance, ce qui le sauve, dit-il, de tout reproche et de toute idée de ridicule, il est difficile de détacher ces riens des circonstances de société qui les produisent ; voici pourtant une de ces petites pièces improvisées à l’usage et pour la consolation des perdants, elle a pour titre Le Jeu du soir : C’est aujourd’hui la Fête de la Vierge, Mais, entre nous, je voudrais bien savoir Si, quand on doit le matin prendre un cierge, On peut tenir une carte le soir. Je ne veux pas, censeur trop difficile, Blâmer un jeu que permet le salon, Mais je vous dis que, sous un air futile, Ce jeu vous donne une grave leçon.

209. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Étienne, ou une émeute littéraire sous l’Empire. » pp. 474-493

Il est difficile d’asseoir un jugement littéraire complet sur les premiers essais dramatiques de M.  […] On y voit déjà toutes ses qualités, une imagination naturelle et gaie, un style clair et piquant, surtout l’art si difficile de conduire une action et d’enchaîner les scènes. […] En somme, il n’était pas difficile de sentir que ces hommes faisaient de l’opposition parce que c’était l’opposition qui était alors le pouvoir.

210. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre V. Le génie et la folie »

Si l’on admet ces prémisses, on comprend que la thèse soit facilement prouvée ; car, lorsque l’on a commencé par décrire le génie comme une sorte de folie, il n’est pas difficile plus tard de conclure que le génie et la folie sont identiques en essence. […] il est déjà bien difficile de diagnostiquer une maladie, lorsque le sujet est présent et qu’on a toutes les indications possibles à sa disposition, et vous voulez déterminer avec précision le caractère d’une maladie, mentale ou autre, à deux mille ans de distance sur des indications données longtemps après l’événement, et par des témoins peu spéciaux ! […] En effet, le génie peut certainement placer l’homme dans des conditions sociales très douloureuses : la supériorité d’un homme sur son temps peut lui rendre l’existence très difficile, et ainsi devenir pour lui cause occasionnelle de certaines douleurs, qui amèneraient la folie tout aussi bien chez un autre que chez lui, si elles s’y produisaient.

211. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre II : Philosophie politique de Tocqueville »

L’art de faire les lois est un art difficile que les sociétés démocratiques ne possèdent que rarement. […] Plus les conditions sont inégales, plus il y a de manières différentes de sentir parmi les hommes, plus aussi par conséquent il leur est difficile de sympathiser entre eux : celui qui n’est pas votre égal n’est pas votre semblable. […] Ainsi c’est précisément la force des pouvoirs qui amène les révolutions, et les révolutions à leur tour augmentent par mille raisons la force du pouvoir ; de là un cercle d’où il est difficile de sortir.

212. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre III : La littérature du xviiie et du xixe  siècle »

S’il eût vécu en ce temps-là, Boileau l’eût rendu peut-êtreplus difficile sur la correction ; mais en retour il eût appris à Boileau un idéal de l’élégie et de l’idylle bien autrement aimable que celui de l’Art poétique. » Cependant, quelque agrément et quelque intérêt que puisse avoir la littérature proprement dite au xviiie  siècle, il est clair que ce grand siècle n’est pas là, il est tout entier dans la philosophie et dans ces quatre hommes illustres : Voltaire, Buffon, Montesquieu et Rousseau. […] Nisard me paraît avoir jugés avec une parfaite justesse : c’est Voltaire et Buffon ; on lira avec plaisir et instruction les chapitres qu’il leur a consacrés, mais il est difficile de ne pas faire d’assez nombreuses réserves quant aux deux autres. […] Qu’on lise et qu’on relise les admirables chapitres sur la corruption des démocraties ; on verra quels sont les devoirs difficiles qui attendent les citoyens le jour où ils veulent être libres.

213. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Fervaques et Bachaumont(1) » pp. 219-245

Arsène Houssaye, l’auteur des Parisiennes et des Grandes Dames, un livre qui eut, l’honneur d’être loué au Constitutionnel par Nestor Roqueplan, le difficile dandy, qui se connaissait également en choses de talent et de monde. […] le tragique idéal qu’il lui faut, sous peine de n’être plus qu’une réalité dégoûtante… C’est cela, c’est ce difficile cela, que MΜ.  […] Il continue ce difficile exercice dans son livre des Femmes du Monde, et il s’en tire avec sa souple habileté ; mais, malgré le gant de velours avec lequel il touche les papilles nerveuses des amours-propres ; malgré les clairs-obscurs qu’il jette sur cette vieille société qui, comme les femmes passées, ne peut plus faire d’illusion qu’à contre-jour et dans les pénombres, on voit bien ce qu’elle est devenue, on sent bien que ce qui était « le monde » autrefois est fini.

214. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Alfred de Vigny »

Il serait étrange, en effet, que les hommes les plus forts dans le maniement d’une langue, et qui ont acquis l’habitude de la faire obéir et de la ployer à tous les rhythmes de la plus capricieuse tyrannie, ne pussent pas s’en servir dans des conditions bien moins difficiles. […] Il a montré le soldat dans son obscurité, dans sa patience, dans son abnégation, dans son héroïsme d’humilité, plus beau et plus difficile que l’héroïsme de la vaillance. […] La résignation qui nous est la plus difficile est celle de notre ignorance.

215. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XII : Pourquoi l’éclectisme a-t-il réussi ? »

Refaire des doctrines est plus difficile, et il fallait en refaire. […] On finit par faire des avances au clergé, présenter la philosophie comme l’alliée affectueuse et indispensable de la religion, offrir le dieu de l’éclectisme comme une base « qui peut porter la trinité chrétienne », et l’éclectisme tout entier comme une foi préparatoire « qui laisse au christianisme la place de ses dogmes, et toutes ses prises sur l’humanité99. » Il eût été bien difficile de ne pas réussir avec tant d’adresse, avec tant de soin pour séduire, amuser, entraîner et ménager les esprits, avec tant de précautions pour suivre ou devancer leur marche. […] La chose n’est guère probable ; car la science s’agrandissant chaque jour, chaque jour il devient plus difficile d’être universel, et Humboldt lui-même n’a fait qu’un catalogue des faits acquis. — Il se peut aussi que le goût de l’analyse reparaisse.

216. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Ledent, Richard »

Sur cette donnée, que d’aucuns auraient volontiers compliquée ou d’épisodes secondaires ou de dissertations savantes, il a écrit une œuvre qu’il nous est bien difficile d’exactement apprécier.

217. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Parrocel »

Quand j’ai regardé ce morceau ; que j’y ai aperçu quelque dessin, un peu de couleur, un grand travail, et que je me suis dit, Cela est détestable, j’ai ajouté tout de suite, Ah, que l’art de peindre est un art difficile.

218. (1853) Portraits littéraires. Tome I (3e éd.) pp. 1-363

Il serait vraiment bien difficile de le dire. […] Résolu à sauver des Grieux, il poursuit sans relâche, sans découragement, cette tâche difficile. […] Il serait difficile de présenter d’une façon plus poignante la lutte de l’égoïsme contre la passion. […] Ponsard se plaçait dans une condition beaucoup plus difficile. […] Je sais qu’un tel personnage était difficile à mettre en scène ; je sais qu’il était difficile d’intéresser le spectateur aux douleurs d’une reine répudiée qui semble condamnée à subir la marche des événements sans pouvoir la ralentir ou la hâter.

219. (1908) Promenades philosophiques. Deuxième série

Il est difficile de se prononcer. […] Mais, dans cette hypothèse, la provenance est difficile à fixer. […] Les limites du langage sont difficiles à déterminer. […] Ces choses sont, pour les profanes, très mystérieuses ; difficiles à comprendre, elles sont encore plus difficiles à faire comprendre. […] C’est difficile à préciser.

220. (1874) Histoire du romantisme pp. -399

Nous n’avons vu cette expression à personne ; le croire Français, né dans ce siècle, eût été difficile. […] Les charpentes arrachées, les briques, les moellons jetés en tas remplissaient la cour de décombres et en rendaient l’accès assez difficile. […] Il ne serait pas difficile à un œil visionnaire, comme celui d’Hoffmann, de trouver là le décor d’un conte fantastique. […] Monpou aimait les rythmes difficiles, et prétendait que les coupes peu usitées amenaient des motifs nouveaux. […] Cette gamme, qui s’accordait avec la tumultueuse effervescence des esprits, était difficile à soutenir en temps plus paisible.

221. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — J. — article » p. 539

Les Notes qu’il a faites sur Horace, Perse & Juvenal, sont des modeles de clarté & de précision ; il est difficile de développer l’esprit d’un Auteur avec plus de substance & en moins de mots, contre la coutume des Commentateurs.

222. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VIII : Hybridité »

— Il est certain, d’une part, que la stérilité des croisements entre espèces diverses varie considérablement en degré et disparaît insensiblement ; d’autre part, que la fécondité des espèces pures est très aisément affectée par diverses circonstances ; de sorte que rien n’est plus difficile que de déterminer pour un but pratique où finit la fécondité parfaite et où commence la stérilité. […] Les hybrides provenant de deux espèces très difficiles à croiser et dont les premiers croisements sont très rarement féconds, sont généralement très stériles. […] Pourquoi quelques espèces croisent-elles avec facilité, et cependant ne produisent que des hybrides stériles, quand d’autres espèces, très difficiles à croiser, produisent des hybrides très féconds ? […] Girou de Buzareingues a croisé trois variétés de Courges, qui, de même que le Maïs, ont des sexes séparés, et il assure que leur fécondation réciproque est d’autant plus difficile que leurs différences sont plus grandes. […] Rien n’est donc plus difficile que d’établir la preuve de l’infécondité des variétés à l’état de nature ; parce que toutes les variétés supposées qui se trouveraient le moins du monde stériles en cas de croisement seraient aussitôt considérées comme des espèces distinctes.

223. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Victor Hugo »

La conception de l’Homme qui rit, que j’ignore, mais qu’il n’est pas si difficile de deviner, est peut-être différente ; mais les mêmes manières ou les mêmes absences d’art s’y retrouvent. […] Mais l’engoulevent n’est qu’une grive en comparaison du poète dramatique qui avale, lui, des choses bien plus difficiles à avaler que le vent, quand ces choses peuvent se réduire en drame, en effets à produire, en applaudissements… Or, la Lucrèce Borgia d’Hugo est une de ces choses-là… Lucrèce Borgia avait été, comme son père Alexandre VI, arrangée de longue main, pour le scandale et pour l’horreur, par des drôles, ennemis de la Papauté, qui trouvaient joli de faire la Renaissance des crimes de l’Antiquité en même temps que la Renaissance littéraire ; et l’engoulevent dramatique avala cette Lucrèce comme Gargantua avala ses six pèlerins en salade, et nous la rendit, cette Lucrèce, en cette chose qu’on joue pour apprendre au peuple la véritable histoire. […] Il a commencé par innocenter l’homme dans le Borgia avant d’être pape, et cet homme-là était plus difficile à reconstituer que ne sera le pontife, vu à la lueur éternelle et pure, pour ceux qui osent le regarder, d’un irréprochable bullaire. […] … Il est excessivement difficile de parler maintenant avec agrément de Victor Hugo. […] Le faire entendre, c’était tout simple, mais il trouve plus ingénieux, et vraiment cela l’est, mais cela l’est trop, de le montrer à Lantenac, ce tocsin, qui sonne à vingt endroits différents dans le paysage, par l’agitation de la corde de la cloche, se détachant, grêle, sur la lumière, dans la cage à jour des clochers, et cela à des distances où il est encore plus difficile de voir que d’entendre !

224. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 357-358

Les obscénités étoient les plaisanteries de son temps, & rendoient l’art de faire rire & d’amuser moins difficile.

225. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — J. — article » p. 514

Le style de cet Auteur est coulant & rapide, mais incorrect, négligé ; défaut ordinaire à ceux qui écrivent en pays étranger, où l’Ecrivain oublie son langage, & où les Lecteurs ne sont pas difficiles à contenter.

226. (1769) Les deux âges du goût et du génie français sous Louis XIV et sous Louis XV pp. -532

Elle veut qu’on l’amuse en l’instruisant ; double condition difficile à remplir : il fallait du moins l’essayer. […] Il était difficile de se refuser à des raisons de cette nature. […] Il paraissait difficile d’y joindre un chant sur la danse ; les détails de cet art avaient encore bien peu exercé nos Poëtes. […] Il serait difficile d’ajuster plus heureusement ce sujet au théatre. […] Ajoutons que cet Auteur possede supérieurement l’art de filer une scene, art difficile & peu commun.

227. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » p. 356

Nous ne pouvons nous empêcher de remarquer, au sujet de ce dernier, qu’à force d’avoir cherché à l’enrichir, on l’a tellement surchargé d’exemples & augmenté de volumes, qu’on en a rendu l’usage aussi difficile que l’acquisition couteuse.

228. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DES MÉMOIRES DE MIRABEAU ET DE L’ÉTUDE DE M. VICTOR HUGO a ce sujet. » pp. 273-306

Si l’on essaye d’énumérer la quantité d’hommes honnêtes, recommandables par le talent, l’étude et des vertus de citoyen, que 89 avait fait sortir du niveau, qui avaient traversé avec honneur et courage les temps les plus difficiles, que la Terreur même n’avait pas brisés, que le Directoire avait trouvés intègres, modérés et prêts à tous les bons emplois ; si l’on examine la plupart de ces hommes tombant bientôt un à un, et capitulant, après plus ou moins de résistance, devant le despote, acceptant de lui des titres ridicules auxquels ils finissent par croire, et des dotations de toutes sortes qui n’étaient qu’une corruption fastueusement déguisée, on comprendra le côté que j’indique, et qui n’est que trop incontestable. […] dit l’historien, il est difficile de les lire sans être ému. […] En parlant de Mirabeau, il était difficile qu’une imagination amante des gloires sombres et fortes, qui s’était attaquée déjà à Cromwell, à Richelieu, à Charles-Quint, à Louis XI, à Napoléon, ne se prît pas au côté purement et simplement grand, et n’y sacrifiât point les considérations autres qui tempèrent et corrigent, qui agrandissent les fonds du tableau, mais diminuent la hauteur de la principale figure. […] Il est difficile à ces puissantes organisations subjectives de se détacher de soi.

229. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

« J’avais le projet, dit-il en faisant l’exposition de ce sonnet, de rapporter les persécutions que j’ai éprouvées ; mais la crainte de paraître orgueilleux et plein d’ostentation me détermine à passer rapidement sur ces circonstances : véritablement, il est difficile d’éviter ces imputations lorsqu’on parle de soi. […] « Je conçois bien qu’il vous sera plus difficile de mettre ces avis à profit, à Rome, dans ce séjour de corruption et d’iniquité où vous allez vivre désormais. […] Il serait trop difficile de vous donner des instructions précises sur ce qui regarde votre conduite et vos conversations ; je me bornerai donc à vous recommander d’avoir avec les cardinaux et les autres personnes élevées en dignité le langage du respect et de la déférence, sans néanmoins renoncer à vous servir de votre propre raison, et vous laisser entraîner par les passions des autres, qui peuvent être égarés par des motifs peu estimables. […] Et tant que vous serez pénétré de ces principes, il ne vous sera pas difficile de rendre à votre famille et à votre patrie des services importants ; au contraire, vous pouvez devenir le lien heureux qui attachera plus étroitement cette ville à l’Église et votre famille à cet État ; et, quoiqu’il soit impossible de prévoir quels événements peuvent arriver un jour, je ne doute point que cela ne se puisse faire avec un égal avantage pour tous, observant néanmoins que vous devez toujours préférer les intérêts de l’Église.

230. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre III : Règles relatives à la distinction du normal et du pathologique »

De plus, un groupe de cette nature est bien difficile à constituer et à isoler de tous les autres, comme il serait nécessaire, pour que l’on pût observer la constitution organique dont il a le privilège et qui est la cause supposée de cette supériorité. […] III On est tellement habitué à trancher d’un mot ces questions difficiles et à décider rapidement, d’après des observations sommaires et à coup de syllogismes, si un fait social est normal ou non, qu’on jugera peut-être cette procédure inutilement compliquée. […] Cependant, une fois que l’on a dominé cette première impression de surprise, il n’est pas difficile de trouver les raisons qui expliquent cette normalité et, du même coup, la confirment. […] Nous n’avons pas à traiter ici cette question ex professo; répondons seulement : 1° qu’elle est toute théorique, car, en fait, le type normal, l’état de santé est déjà assez difficile à réaliser et assez rarement atteint pour que nous ne nous travaillions pas l’imagination à chercher quelque chose de mieux ; 2° que ces améliorations, objectivement plus avantageuses, ne sont pas objectivement désirables pour cela ; car si elles ne répondent à aucune tendance latente ou en acte, elles n’ajouteraient rien au bonheur, et si elles répondent à quelque tendance, c’est que le type normal n’est pas réalisé; 3° enfin que, pour améliorer le type normal, il faut le connaître.

231. (1898) Les personnages de roman pp. 39-76

Brunetière, à propos des romans ruraux de George Eliot, remarque justement : « Il n’y a rien de si difficile, dans le roman et ailleurs, que de borner le vocabulaire des gens que l’on fait parler aux limites exactes de leur petit univers intellectuel et moral. » Épreuve dangereuse, en effet, piège redoutable. […] Brunetière, ont cet inconvénient qu’il n’y a rien de si difficile que de résister à la tentation de s’en servir. » Je réponds que cela dépend, et que s’il est un usage dangereux des notes, il en est un autre fort légitime et utile. […] Je suis sur pied toute la journée, courant d’un salon à l’autre, parlant toujours, ayant affaire à des madames très difficiles, qui veulent être jolies quand même, et commandée par une première on ne peut plus légère, avec laquelle on est forcé d’être politique. […] J’ignorais complètement ce que j’écrirais plus tard, quand je tâchais de pénétrer la vie difficile, pauvre et miroitante de l’employée de la mode.

232. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre II. La qualité des unités sociales. Homogénéité et hétérogénéité »

On sait assez, par l’histoire des explorations ou le spectacle des colonies, combien il est difficile aux blancs de conserver l’idée que les noirs ont des droits, et sont des hommes comme les autres. […] Or plus il sera complexe, et plus le groupe sera homogène ; mais plus aussi il sera difficile à ses membres de rencontrer, jamais, en dehors de lui, un semblable. […] Il ne nous est donc pas difficile de retrouver des frères chez les étrangers. […] Mais c’est ce qui est plus difficile qu’on ne la cru à constater directement.

233. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » pp. 111-112

Il est difficile de concilier avec un acharnement aussi peu mesuré, la haute idée qu’on veut nous donner des vertus sociales de ce Dissertateur.

234. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XVIII. Gentils conteurs » pp. 218-231

Mais sa nuit de noce qu’il escomptait difficile, douloureuse, saignante et écœurante, se passe très bien. […] C’est difficile d’écrire du dandysme : Brummel lui-même est de beaucoup le plus pâle écrit de Barbey.

235. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre VII » pp. 56-69

Il serait difficile de dire s’il est plus nécessaire à la république qu’agréable aux citoyens. […] Je crois cet éloge bien mérité : et il est difficile de le croire une plate louange, quand on considère l’homme qui la donne, le fonds de l’ouvrage où il l’a placé, le sentiment qui l’anime en l’écrivant, celui qu’il suppose à la personne pour qui il l’écrit ; et enfin cet éloge vient si naturellement à la place où il se trouve, qu’on ne peut y méconnaître une sorte d’à-propos qui ne serait pas venu à l’auteur pour une femme vulgaire.

236. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les Kœnigsmark »

Sur ce point, le livre de Blaze de Bury, qui a fouillé profondément les cours d’outre-Rhin, nous donne les détails les plus scandaleux et les plus difficiles à récuser. […] Ces deux têtes historiques, aux méplats creusés et noirs, plus difficiles à fouiller que le marbre, il faudrait une espèce de Michel-Ange pour les sculpter dans un livre d’histoire magistral.

237. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Quitard »

III Et cette objection que je commence par faire à Quitard, je ne la lui ferais pas si je l’estimais moins, si je n’éprouvais pas une sérieuse considération et une grande estime pour un homme qui, tout philologue qu’il puisse être, ne s’est pas laissé dévorer par le travail rongeur des mots, et a bien moins songé — tout en chassant aux proverbes et aux locutions proverbiales à travers les langues et les littératures — à nous donner des curiosités de formes littéraires qu’à construire une histoire de mœurs par l’expression, chose délicate et difficile ! […] Déjà dans la préface de son Dictionnaire il nous avait dit — et c’était à nous faire venir l’eau à la bouche, à la bouche trompée, — « qu’il avait d’abord conçu son Dictionnaire de manière à suivre la langue proverbiale des troubadours jusqu’à nos jours et à former trois gros volumes in-8o », mais que prudemment il l’a diminué de deux volumes « parce qu’il aurait été trop difficile de rencontrer un éditeur », et c’est devant cette fuite d’éditeur que son épicurisme de savant s’est déconcerté et qu’il a sacrifié deux chers volumes à cette panique.

238. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « César Daly »

Entreprise énorme et difficile, que César Daly, après douze années et à travers tous les obstacles, a menée à bonne fin avec un talent qui tient du miracle, et qui, comme artiste réalisant, l’a, du premier coup, très grandement classé. […] Ardemment synthétique de tendance, quand le siècle et ses misérables philosophies ne jurent que par cette Fée aux miettes de l’analyse, en avant sur toutes les idées de son temps, et, pour preuve, dès 1845 repoussant, avec un mépris mérité, cette théorie obstinée de l’art pour l’art, triomphante alors, et qui prétend encore, à l’heure qu’il est, n’être pas battue, la revue de César Daly avait, parmi les autres buts qu’elle voulait atteindre, le but plus difficile et plus spécial de dégager l’inconnue de l’art qui va naître, et de prédire, en étudiant profondément la société moderne et ses nouvelles conditions, le caractère du style architectonique de l’avenir ; car l’architecture du xixe  siècle n’est pas née.

239. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Prévost-Paradol » pp. 155-167

À l’exception des gens d’un goût difficile qu’il faut plaindre et qu’il est encore mieux de détester, tout le monde a goûté sur-le-champ cette musiquette. […] Homme d’esprit dans le sens le plus léger du mot, doué d’un de ces genres de talent que je ne nie point, mais qui n’était pas de nature à donner de grandes jalousies à personne, Prévost-Paradol est arrivé, dès les premiers pas qu’il a faits dans la littérature, à monter les trois échelons, mystérieux toujours quoique très connu, après lesquels en France, dans ce pays de la moquerie despotisé par les coutumes dont on se sera le plus moqué, il ne reste rien de bien difficile à grimper.

240. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Maintenon » pp. 27-40

C’est par là que, n’étant plus jeune, et que, n’étant presque plus belle, elle avait arraché Louis XIV — l’homme le plus difficile à séduire et le plus difficile à captiver — à la plus belle de ses maîtresses, à la plus altière, à la plus sanguinement spirituelle, à cette Armide des Mortemart qui l’avait enlacé par plus puissant que ses bras, — l’habitude, — et qui lui avait mis aux quatre membres ce boulet des enfants qui fait enfoncer un homme dans une liaison encore plus que le boulet de bronze ne fait s’enfoncer celui qu’on y jette dans la mer !

241. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « A. Dumas. La Question du Divorce » pp. 377-390

mais ce serait encore plus dans la logique de ce principe de liberté qui règne si despotiquement sur le monde, que de demander l’union libre… Dans un temps qu’il n’est pas difficile de prévoir, ce qu’on dit actuellement contre l’indissolubilité du mariage, des Naquet ou des Alexandre Dumas, qui ne sont pas des phénomènes qu’on ne rencontrera jamais plus, le diront contre le divorce. […] … Sans comparaison le premier dans l’art difficile et épuisé, du théâtre, tombé jusqu’à n’être plus qu’un spectacle, mais adoré toujours à une époque d’un histrionisme exaspéré, M. 

242. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Mgr Rudesindo Salvado »

Le bruit qui s’attache aux livres est une telle ironie, qu’il est difficile de prévoir si la majorité des intelligences sera convaincue au même degré que nous de tous les mérites des Mémoires que nous annonçons. […] Mgr Salvado n’a pas été seulement le charmant et naïf Hérodote chrétien de sa mission apostolique ; il n’a pas seulement tracé l’histoire de la colonie anglaise à travers laquelle il a passé ; mais il nous a donné l’histoire, plus difficile à connaître, de cette curieuse race indigène avec laquelle il a vécu.

243. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. J. Autran. Laboureurs et Soldats, — Milianah. »

Il est difficile, en effet, de donner à distance une idée très-exacte de cette poésie consciencieuse et bien intentionnée, mais qui n’a guère pour elle que son intention et sa conscience. […] Seulement il y a près de lui et autour de lui des Écoles qui le vantent et qui lui assignent le rang difficile à reprendre lorsqu’on l’a donné à un homme ou qu’on a souffert qu’il le prît.

244. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Mm. Jules et Edmond de Goncourt. » pp. 189-201

Ils en avaient le droit… Seulement il faut porter dans les sujets bas des facultés d’autant plus hautes qu’ils sont plus bas, et que l’idéal dans le laid et dans le mauvais est aussi difficile à atteindre que dans le beau et dans le bon, et peut-être qu’il l’est beaucoup plus. […] Les hommes de lettres, c’est là tout un monde, — le monde de l’esprit, le plus difficile à manier et le plus dangereux.

245. (1925) Promenades philosophiques. Troisième série

Elle est d’ailleurs très difficile à vérifier. […] C’est bien plus compliqué que cela, la certitude est difficile à acquérir. […] Il est donc difficile de trouver du nouveau à propos de ces passions. […] C’est ce qu’il est très difficile de comprendre. […] Il est fort difficile de deviner le motif de leur choix.

246. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hollande, Eugène (1866-1931) »

Hollande, deux cents pages durant, il m’est difficile de protester.

247. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 255-256

Le grand nombre d’éditions qu’a eues cet Ouvrage, prouve que, s’il pouvoit être mieux écrit, il étoit difficile de le rendre plus utile.

248. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Le Bel  » p. 146

Il a très bien rendu un effet de nature très difficile à rendre, c’est l’affaiblissement et la couleur de la lumière du soleil, lorsqu’elle s’élance à travers les vapeurs dont l’atmosphère est quelquefois chargée à l’horizon.

249. (1902) Les poètes et leur poète. L’Ermitage pp. 81-146

— Il est difficile de répondre d’une manière explicite. […] — Diablement difficile, votre question, savez-vous ? […] Savez-vous que cette question est diablement difficile ? […] — Il est difficile de répondre à votre question. […] — Il m’est difficile de vous répondre autrement qu’en vous désignant mes lectures favorites ; je vous les révèle, pour faire acte de bonne volonté : je relis donc de préférence Vigny, Lamartine, Verlaine et Laforgue ; mais je ne m’interdis pas les mauvais poètes dont je suis particulièrement friand.

250. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Beauvoir, Roger de (1809-1866) »

Ses vers, diront les amis d’une littérature difficile, ne sauraient que gagner à des veilles plus sérieuses.

251. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Cantacuzène, Charles-Adolphe (1874-1949) »

Celui-ci, en effet, sans autre labeur que de suivre son naturel, atteint aussitôt l’étrange et le compliqué ; les mots s’assemblent pour lui en couples imprévus et extravagants et, jusque dans le titre de ses livres, il consent même au calembour, si bien qu’il est assez difficile de distinguer en son œuvre où finit la farce et où commence l’émotion.

252. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Veyrat, Jean-Pierre (1810-1844) »

Il est toujours très difficile de parler à Dieu autrement que dans la prière, en disant son Pater ou en s’écriant : Altitudo !

253. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » pp. 482-483

Dans ces temps encore barbares, les Auteurs & les Spectateurs étoient également peu difficiles ; on n’étoit nullement étonné de voir le début d’une Piece s’annoncer dans un lieu, & le dénouement arriver dans un autre vingt ans après.

254. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 135-136

Il paroît, ou que le Maître n’étoit pas difficile sur le choix de ses Eleves, ou que l’Eleve a bien peu profité des soins du Maître ; car les Poésies de M.

255. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 515-516

Le sacré & le profane, la dévotion & la galanterie, le sérieux & le comique, l’histoire & la fiction, les traits d’esprit & les platitudes, la raison & la folie, y forment un tissu bizarre qui amuse toutefois le Lecteur, même le plus difficile, par des saillies toujours variées & toujours imprévues.

256. (1868) Curiosités esthétiques « V. Salon de 1859 » pp. 245-358

Celle-là n’a jamais craint d’escalader les hauteurs difficiles de la religion ; le ciel lui appartient, comme l’enfer, comme la guerre, comme l’Olympe, comme la volupté. […] Diaz a senti s’éveiller en lui une ambition plus difficile. […] Il est difficile de déterminer les causes qui ont si rapidement diminué la vive personnalité de M.  […] Aussi il n’est pas difficile de comprendre de quel amour il aime les noblesses de la vie patriarcale, et avec quel intérêt il contemple ces hommes en qui subsiste encore quelque chose de l’antique héroïsme. […] Mais la silhouette générale des formes est souvent ici difficile à saisir.

257. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Brandenburg, Albert-Jacques (1878-1934) »

Anonyme En un temps où, assoupli, préparé par l’admirable usage qu’en ont fait nos derniers grands poètes, le vers français régulier est devenu si facilement beau, il est difficile de juger de la réelle valeur des poèmes de M. 

258. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Ricard, Louis-Xavier de (1843-1911) »

Il serait bien difficile de caractériser, à moins de nombreuses citations, la manière et le type de chacun de ces jeunes écrivains, dont l’originalité n’est pas encore dégagée des premières incertitudes.

259. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 306-307

Il a travaillé pour le Théatre, & sa Tragédie d’Orphanis, par laquelle il a débuté, a pleinement justifié l’idée que nous avions donnée de sa capacité pour réussir dans un genre plus difficile & plus élevé.

260. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 221-222

A cela près, il étoit difficile de réunir dans cet Ouvrage plus de sagacité pour démêler les passions & les caprices des hommes, plus d’adresse à les développer, plus d’énergie & de vivacité pour les peindre.

261. (1902) Symbolistes et décadents pp. 7-402

Ils admiraient la beauté verbale de ses poèmes et sa didactique lorsqu’il esthétisait, et son exégèse du beau difficile, du rare, de l’absolu. […] Le livre a paru difficile. […] Il y aura toujours des auteurs difficiles, et il faut sans doute qu’il y en ait puisqu’il y en a. […] Il serait difficile au signataire de cet article d’étudier par le menu les quinze ans d’histoire de ce mouvement, à cause même de la part qu’il y prit. […] Elle est difficile à définir à cause de son évidence même ; c’est trop clair.

262. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Instruction générale sur l’exécution du plan d’études des lycées, adressée à MM. les recteurs, par M. Fortoul, ministre de l’Instruction publique » pp. 271-288

On avait cherché à diminuer le nombre croissant des candidats aux carrières dites libérales, en n’admettant que les seuls d’entre eux vraiment capables ; les épreuves imposées étaient devenues plus sérieuses, plus difficiles : on faisait la barrière plus haute, pour que tous indifféremment ne pussent la franchir. […] Pourtant, dans une société où l’industrie, et les arts dont elle dispose, gagnaient de plus en plus et pénétraient la vie ; où les sciences physiques, dans leurs mille applications, se partageaient le monde ; où mille voies légitimes étaient offertes à l’activité et à l’intelligence humaine, il était difficile (chose singulière !) […] Il serait difficile de rien extraire ici d’un travail qui s’adresse particulièrement aux gens du métier ; dont tous les articles, développés avec un soin égal, sont destinés à l’application, et où rien n’est donné à l’effet.

263. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le baron de Besenval » pp. 492-510

On a remarqué que ce fut le père de Besenval qui, en mai 1720, lorsque Law était déjà menacé par le peuple, eut ordre de le protéger avec un détachement des Gardes suisses, et que Besenval eut plus tard un ordre du même genre au commencement des troubles de la Révolution, mais un peu plus difficile à exécuter. […] Il applaudit à ce défaut, que l’on pourrait presque appeler vice dans un tel rang… » Il est difficile de faire à Besenval sa part précise dans ce goût de raillerie qui était alors universel et celui de toute la société. […] La reine, à cette occasion, me dit : « Il est doux d’avoir des amis ; mais, dans ma position, il est difficile que les amis de nos amis nous conviennent autant. » — Besenval ne fut point disgracié pour cela, et il ne laissa pas d’être toujours des Trianon.

264. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — III — Toujours Vauvenargues et Mirabeau — De l’ambition. — De la rigidité » pp. 38-55

Sa lettre en réponse est longue, abondante, difficile à couper : Vauvenargues n’est pas de ceux qui étranglent leur pensée, ou qui la gravent et la frappent en quelques mots splendides ; il aime à l’étendre, à raisonner ; il est proprement dans son élément quand il disserte ; il a une belle langue intérieure, mais un peu molle parfois, à demi oratoire, périodique, et qui se complaît dans ses développements. […] Au risque de démentir ses propres conseils de tout à l’heure, il dira à Mirabeau : Il n’est pas facile de changer son cœur, mais il est encore plus difficile de détourner le cours rapide et puissant des choses humaines ; c’est donc principalement sur nous que nous devons travailler, et la véritable grandeur se trouve dans ce travail. […] Malheur aussi à qui, dans l’ordre de la pensée, n’a pas été une fois ou stoïcien à lier, ou platonicien ébloui, ou péripatéticien forcené, ou toute autre chose, mais enfin quelque chose d’élevé, d’ardent et de difficile !

265. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « M. Émile de Girardin. »

Il paraît difficile de conquérir ce nom à la littérature ; et pourtant c’est ce que je voudrais faire jusqu’à un certain point. […] Il est difficile aux auteurs de ne pas se peindre, surtout dans un premier ouvrage : Émile, qui ne fait autre chose que se raconter à Mathilde, essaye à un endroit de se peindre aussi, ou du moins de tracer l’idéal relatif qu’il a parfois devant les yeux et qu’il est tenté de réaliser : « Il y aurait, dit-il, un caractère intéressant à développer dans un roman ; ce serait celui d’un jeune homme né comme moi sans famille, sans fortune, suffisant à tout ce qui lui manquerait par sa seule énergie, et dont les forces croîtraient avec les obstacles ; un jeune homme qui se placerait au-dessus d’une telle position par un tel caractère ; qui, loin de se laisser abattre par les difficultés, ne penserait qu’à les vaincre, et, esclave seulement de ses devoirs et de sa délicatesse, aurait su parvenir, en conservant son indépendance, à un poste assez élevé pour attirer sur lui les regards de la foule et se venger ainsi de l’abandon. […] L’un, fier et chevaleresque, jetait le gant aux Gouvernements existants et se tenait debout, presque seul à la fin, dans une position étroite, difficile, contentieuse, se couvrant des habiletés et de la vigueur de sa plume, disputant le terrain pied à pied, sans rompre d’une semelle, comme on dit.

266. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite) »

Son livre, dans sa composition, a l’avantage de mettre surtout en lumière les parties les plus difficiles et les plus ardues, les hautes époques antérieures de la littérature anglaise : la Renaissance y est admirablement traitée. […] Les soins qu’il prenait pour cela et pour se rendre capable, avec sa santé chétive, de cette tâche difficile et immortelle, peut-on lui en faire un reproche et un tort ? […] Et en général je dirai : combinons nos efforts, ne les opposons pas et ne détruisons rien, Vous nous invitez, vous nous obligez, à force de talent, à marcher avec vous vers le grand, le fort, le difficile, vers ce que nous n’aurions pas abordé à ce degré sans vous ; mais aussi ne nous supprimez pas nos points de vue habituels et agréables, nos paysages de Windsor et nos jardins de Twickenham.

267. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite et fin.) »

Il est difficile, je le sais, de l’aborder autrement aujourd’hui qu’avec bien des objections. […] Le critique philosophe, ayant porté toutes ses forces sur les parties difficiles et comme sur les hauts plateaux, descend un peu vite ces pentes agréables, si riches toutefois en accidents heureux et en replis ; il dédaigne de s’y arrêter, oubliant trop que c’eût été pour nous, lecteurs français, la partie la plus accessible et une suite d’étapes des plus intéressantes par le rapprochement continuel avec nos propres points de vue. […] Taine nous entretenait l’autre jour27, — occupés, dis-je, à rechercher uniquement et scrupuleusement la vérité dans de vieux livres, dans des textes ingrats ou par des expériences difficiles ; des hommes qui voués à la culture de leur entendement, se sevrant de toute autre passion, attentifs aux lois générales du monde et de l’univers, et puisque dans cet univers la nature est vivante aussi bien que l’histoire, attentifs nécessairement dès lors à écouter et à étudier dans les parties par où elle se manifeste à eux la pensée et l’âme du monde ; des hommes qui sont stoïciens par le cœur, qui cherchent à pratiquer le bien, à faire et à penser le mieux et le plus exactement qu’ils peuvent, même sans l’attrait futur d’une récompense individuelle, mais qui se trouvent satisfaits et contents de se sentir en règle avec eux-mêmes, en accord et en harmonie avec l’ordre général, comme l’a si bien exprimé le divin Marc-Aurèle en son temps et comme le sentait Spinosa aussi ; — ces hommes-là, je vous le demande (et en dehors de tout symbole particulier, de toute profession de foi philosophique), convient-il donc de les flétrir au préalable d’une appellation odieuse, de les écarter à ce titre, ou du moins de ne les tolérer que comme on tolère et l’on amnistie par grâce des errants et des coupables reconnus ; n’ont-ils pas enfin gagné chez nous leur place et leur coin au soleil ; n’ont-ils pas droit, ô généreux Éclectiques que je me plais à comparer avec eux, vous dont tout le monde sait le parfait désintéressement moral habituel et la perpétuelle grandeur d’âme sous l’œil de Dieu, d’être traités au moins sur le même pied que vous et honorés à l’égal des vôtres pour la pureté de leur doctrine, pour la droiture de leurs intentions et l’innocence de leur vie ?

268. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE SOUZA » pp. 42-61

Une jeune fille qui sort pour la première fois du couvent où elle a passé toute son enfance ; un beau lord élégant et sentimental, comme il s’en trouvait vers 1780 à Paris, qui la rencontre dans un léger embarras et lui apparaît d’abord comme un sauveur ; un très-vieux mari, bon, sensible, paternel, jamais ridicule, qui n’épouse la jeune tille que pour l’affranchir d’une mère égoïste et lui assurer fortune et avenir ; tous les événements les plus simples de chaque jour entre ces trois êtres qui, par un concours naturel de circonstances, ne vont plus se séparer jusqu’à la mort du vieillard ; des scènes de parc, de jardin, des promenades sur l’eau, des causeries autour d’un fauteuil ; des retours au couvent et des visites aux anciennes compagnes ; un babil innocent, varié, railleur ou tendre, traversé d’éclairs passionnés ; la bienfaisance se mêlant, comme pour le bénir, aux progrès de l’amour ; puis, de peur de trop d’uniformes douceurs, le monde au fond, saisi de profil, les ridicules ou les noirceurs indiqués, plus d’un original ou d’un sot marqué d’un trait divertissant au passage ; la vie réelle, en un mot, embrassée dans un cercle de choix ; une passion croissante qui se dérobe, comme ces eaux de Neuilly, sous des rideaux de verdure, et se replie en délicieuses lenteurs ; des orages passagers, sans ravages, semblables à des pluies d’avril ; la plus difficile des situations honnêtes menée à fin jusque dans ses moindres alternatives, avec une aisance qui ne penche jamais vers l’abandon, avec une noblesse de ton qui ne force jamais la nature, avec une mesure indulgente pour tout ce qui n’est pas indélicat : tels sont les mérites principaux d’un livre où pas un mot ne rompt l’harmonie. […] Le difficile est de récidiver lorsqu’on a dit ce premier mot si cher, lorsqu’on a exhalé sous une enveloppe plus ou moins trahissante ce secret qui parfume en se dérobant. […] On était moins difficile du temps de la Princesse de Clèves, on l’était moins du temps même où parut Mademoiselle de Clermont : on ne saurait s’en plaindre ; si cette charmante nouvelle n’était pas faite heureusement, pourrait-elle se tenter aujourd’hui qu’on a lu dans le méchant grimoire de la Princesse Palatine : « Madame la Duchesse avait les trois plus belles filles du monde.

269. (1899) Esthétique de la langue française « Le vers libre  »

Qu’on veuille bien remarquer que, sauf le cas d’élision, cet élément, l’e muet, ne disparaît jamais même à la fin du vers ; on l’entend fort peu, mais on l’entend.  » Il a fallu citer ce passage pour montrer combien l’analyse des sons est difficile puisqu’un poète tel que M.  […] Le début du Speculum humanæ Salvationis est un exemple de ce vers libre latin, mais fort médiocre ; il ne tient plus que par la rime, qui est lourde et banale ; ce sont des versets dont la nudité est vraiment sans aucun mystère ; les accents sont difficiles à situer et le rythme est nul : c’est loin de toute poésie. […] Les vers des séquences ne paraissent pas toujours d’excellents vers ; c’est que la rythmique en est difficile et que, composées pour ou sur de la musique, elles boitent sans cet appui.

270. (1882) Qu’est-ce qu’une nation ? « [Préface] »

Tâchons d’arriver à quelque précision en ces questions difficiles, où la moindre confusion sur le sens des mots, à l’origine du raisonnement, peut produire à la fin les plus funestes erreurs.

271. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 83-84

Il seroit difficile de présenter sous un jour plus frappant le Charlatanisme, les intrigues, les manéges & tous les travers de la Philosophie moderne, qu’ils ne le sont dans ces Mémoires ; Production vraiment originale, où la critique est mise en action de la maniere la plus piquante & la plus capable de faire impression sur les esprits mêmes prévenus.

272. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 165-166

du Pin, qui s’exprime ainsi au sujet de ce Savant : Il seroit difficile de louer ce Religieux, comme il le mérite ; la voix du Public & l’estime générale de tous les Savans font son éloge beaucoup mieux que tout ce que nous pourrions en dire.

273. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 203-204

Nous ne connoissons, de M. l’Abbé Mangenot, aucun Ouvrage en prose, à moins qu’on ne veuille regarder comme un Ouvrage son Histoire abrégée de la Poésie Françoise, plaisanterie aussi juste qu’agréable, où il seroit difficile de trouver beaucoup de fautes, car elle se réduit à une demi-page.

274. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — N. — article » pp. 397-398

Ce n’est pas l’intérêt qui a manqué à ses sujets ; car, en choisissant Moïse, Saül, Hérode, Antiochus, il étoit difficile d’en trouver de plus connus & de plus capables d’animer le génie poétique, si M. l’Abbé Nadal en eût été doué ; mais le choix du sujet ne suffit pas pour faire réussir un Ouvrage, il faut encore le bien traiter.

275. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hirsch, Charles-Henry (1870-1948) »

Il taille ses statuettes en un marbre difficile, et s’il y a aux murs de son atelier les esquisses les plus nouvelles et les reproductions des plus récentes œuvres d’art connues, il sait les oublier quand il travaille… La beauté d’Yvelaine réside plus dans la forme, dans les heureuses et sobres métaphores et les précieuses analogies que dans son symbole même… M. 

276. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 263-264

Il seroit plus difficile de lui assigner un rang parmi ceux qui ont travaillé pour le Théatre, que parmi les Citoyens jaloux de la gloire de leur Patrie.

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