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1009. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le duc d’Antin ou le parfait courtisan. » pp. 479-498

Tous ces déchus du pouvoir anticipent de leurs vœux l’heure de leur rentrée en scène, et les plus sages se bornent à l’attendre. […] On a raconté aussi que plus tard, dans un séjour de Louis XIV à Fontainebleau, le roi ayant blâmé un bois qui masquait la vue, la même scène se renouvela avec quelque variante : peu de jours après l’observation du roi, d’Antin, alors directeur des Bâtiments, avait préparé avec art son coup de théâtre : il avait fait scier tous les arbres près de la racine ; des cordes étaient attachées aux troncs, et toute une armée de bûcherons invisibles attendait en silence.

1010. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — III. (Suite et fin.) » pp. 242-260

Énonçant les motifs, réels ou non, qu’il avait eus pour entrer dans la discussion, il alla droit, avant tout, à l’adversaire, et le frappant de l’épée au visage, selon le conseil de César, il le raillait sur cette prétention au patriotisme, au désintéressement et au bien public, de laquelle Beaumarchais aimait (et assez sincèrement, je le crois) à recouvrir ses propres affaires et ses spéculations d’intérêt : Tels furent mes motifs, s’écriait-il déjà en orateur, en maître puissant dans la réplique et dans l’invective ; et peut-être ne sont-ils pas dignes du siècle où tout se fait pour l’honneur, pour la gloire, et rien pour l’argent ; où les chevaliers d’industrie, les charlatans, les baladins, les proxénètes n’eurent jamais d’autre ambition que la gloire sans la moindre considération de profit ; où le trafic à la ville, l’agiotage à la Cour, l’intrigue qui vit d’exactions et de prodigalités, n’ont d’autre but que l’honneur sans aucune vue d’intérêt ; où l’on arme pour l’Amérique trente vaisseaux chargés de fournitures avariées, de munitions éventées, de vieux fusils que l’on revend pour neufs, le tout pour la gloire de contribuer à rendre libre un des mondes, et nullement pour les retours de cette expédition désintéressée… ; où l’on profane les chefs-d’œuvre d’un grand homme (allusion à l’édition de Voltaire par Beaumarchais), en leur associant tous les juvenilia, tous les senilia, toutes les rêveries qui, dans sa longue carrière, lui sont échappées ; le tout pour la gloire et nullement pour le profit d’être l’éditeur de cette collection monstrueuse ; où pour faire un peu de bruit, et, par conséquent, par amour de la gloire et haine du profit, on change le Théâtre-Français en tréteaux, et la scène comique en école de mauvaises mœurs ; on déchire, on insulte, on outrage tous les ordres de l’État, toutes les classes de citoyens, toutes les lois, toutes les règles, toutes les bienséances… Voilà donc Mirabeau devenu le vengeur des bienséances et des bonnes mœurs contre Beaumarchais, et Figaro passant mal son temps entre les mains du puissant athlète, qui le retourne et l’enlève de terre au premier choc. […] Il adressait aux Comédiens-Français de très judicieuses et très prudentes observations à ce sujet (9 novembre 1789) : La pièce de Charles IX, disait-il, a certainement du mérite ; elle est dans quelques scènes d’un effet terrible et déchirant, quoiqu’elle languisse dans d’autres et n’ait que peu d’action… Mais, en me recherchant sur sa moralité31, je l’ai trouvée plus que douteuse.

1011. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

Cette scène est unique parmi les monuments connus jusqu’ici. […] Voyez-le sur la scène et dans les romans : il y paraît presque toujours méchant et lâche, cruel et avare, composé de Tartuffe et de Tibère, de Malade imaginaire et de Patelin. […] Son droit d’aînesse reléguait César au second plan de la scène. […] Ignorante sei tu che gli di villania, che non gliene diciam noi. » Cellini eut, avec ses papes, des scènes toutes pareilles. […] La plus tragique fantasmagorie du plus grand des poètes est surpassée par cette scène de l’histoire réelle.

1012. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [M. de Latena, Étude de l’homme.] » pp. 523-526

Là où d’autres, en vieillissant, abondent en anecdotes, en noms propres et en souvenirs, en scènes où leur imagination se plaît à retrouver des couleurs et à ranimer les personnages, eux ils s’appliquent à dégager la substance de leur observation, et à disposer leur trésor moral comme un blé mûr ou comme un fruit qu’on réserve.

1013. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Sur Adolphe de Benjamin Constant » pp. 432-438

Des réveils bien cruels, pourtant, des déchirements et des scènes s’ensuivirent, dont les ombrages de Coppet auraient couvert et enseveli le souvenir, si l’un des hôtes de ce temps-là, M. de Sismondi, dans des lettres posthumes, publiées depuis peu, n’était venu se faire indiscrètement l’écho du mystère et rendre témoignage fidèle devant la postérité.

1014. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XI » pp. 39-46

C'est la poésie des recueils sur le théâtre ; » voulant faire entendre que le succès de Lucrèce est d’avoir fait connaître à tous sur la scène, en fait de beautés de style, ce qui auparavant s’imprimait un peu à la sourdine et n’était lu que des gens du métier.

1015. (1874) Premiers lundis. Tome I « M.A. Thiers : Histoire de la Révolution française Ve et VIe volumes — I »

Telle s’ouvrait la scène de la période nouvelle.

1016. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Et Lamartine ? »

« En peignant ainsi la nature à grands traits et par masses, en s’attachant aux vastes bruits, aux grandes herbes, aux larges feuillages, et en jetant au milieu de cette scène indéfinie et sous ces horizons immenses tout ce qu’il y a de plus vrai, de plus tendre et de plus religieux dans la mélancolie humaine, Lamartine a obtenu du premier coup des effets d’une simplicité sublime, et a fait, une fois pour toutes, ce qui n’était qu’une seule fois possible. » Loué soit-il à jamais !

1017. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Rêveries sur un empereur »

Il a congédié le serviteur impérieux, nettement et, sans le vouloir, plaisamment, en l’accablant de respects et d’honneurs… Et comme l’autre n’a pas su cacher son dépit ni son étonnement furibond, nous devons à Guillaume II une des meilleures scènes tragi-comiques de toute l’histoire moderne.

1018. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Maeterlinck, Maurice (1862-1949) »

Et sans avoir peut-être cette unité dans la gradation qui produisit de si énormes effets dans les deux drames précédents, les scènes sont menées vers le but avec une puissance magistrale.

1019. (1863) Molière et la comédie italienne « Préface » pp. -

Mais il a eu chez nous une destinée à part : il n’a brillé que sur les théâtres de marionnettes ; il n’apparaît point ou guère dans les troupes italiennes qui vinrent en France ; il ne s’est point fait place, non plus, sur notre scène comique.

1020. (1887) Discours et conférences « Discours à l’Association des étudiants »

Quand vous nous succéderez sur la scène de la vie, soyez indulgents pour la génération qui vous précéda.

1021. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Rousseau et M. de Voltaire. » pp. 47-58

Il publie & brode, je ne sçais quelles scènes qu’il disoit s’être passées, tantôt à l’église des Sablons, tantôt chez madame de Prie, tantôt chez la princesse de la Tour, & généralement dans tous les endroits où le célèbre poëte avoit paru.

1022. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre quatrième. »

La scène du déjeûné, les questions du seigneur, l’embarras de la jeune fille, l’étonnement respectueux du paysan affligé, tout cela est peint de main de maître.

1023. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre V. La Henriade »

Telle est néanmoins la puissance des idées religieuses, que l’auteur de la Henriade doit au culte même qu’il a persécuté les morceaux les plus frappants de son poème épique, comme il lui doit les plus belles scènes de ses tragédies.

1024. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre second. Philosophie. — Chapitre II. Chimie et Histoire naturelle. »

Assise à l’ombre d’un chêne, couronnée de fleurs qu’elle avait cueillies sur la montagne, elle se contentait de peindre les scènes qui l’environnaient.

1025. (1895) Le mal d’écrire et le roman contemporain

Eh bien, je voudrais qu’on suivît cet exemple et qu’on élargît la scène littéraire exclusivement limitée à Paris. […] Jean Aicard n’a pas tardé à la mettre en scène dans les Poèmes si connus qui portent ce nom. […] Shakespeare mettait moins de façons pour nous faire entendre sur la scène des dialogues d’amour adultère devant un cercueil. […] Après la scène du suicide, la vie de Lucile et de son frère est changée. […] Peut-on lire la première scène de l’Avare, entre Elise et Valère, sans être ému jusqu’aux larmes ?

1026. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

Je vais essayer d’en donner quelque idée en citant textuellement une ou deux scènes. […] Et toutes les scènes de l’Évangile sont ainsi teintées de couleur locale et de romantisme. Mais cet ouvrage n’est pas seulement une suite de scènes plastiques. […] César assassiné, Cléopâtre s’enfuit au milieu des scènes sanglantes des jours parricides et regagne l’Égypte. […] Celle brutalité ne contribue pas peu au sentiment de rudesse répandu sur toute cette scène de nécromancie.

1027. (1888) Portraits de maîtres

Le poète a la faculté d’interpréter, comme il l’entend, les grandes scènes de l’histoire, les grandes manifestations de l’esprit humain. […] L’un de ces récits met en scène une des fables répandues sur le compte du Masque de fer. […] Ô scènes ineffaçables de la Mare au diable et des Maîtres sonneurs ! […] Le premier Sainte-Beuve demanda l’inspiration et l’émotion à des scènes et à des incidents de la vie bourgeoise, populaire, domestique. […] Ainsi les Burgraves sont plus près d’Eschyle que toutes les œuvres tragiques accumulées depuis la disparition de la scène athénienne.

1028. (1905) Propos littéraires. Troisième série

Ils devraient s’intituler « scènes et portraits de la vie contemporaine » ou, presque, « notes sur la société de notre temps ». […] Cette scène de famille est très fréquente ; mais elle n’a pas d’ordinaire les mêmes effets. […] La scène, un peu truquée, peut-être, ne laisse pas d’avoir de la grandeur, et je ne sais quelle puissance sauvage. […] Il y a une scène divine à cet égard. […] Il y a des scènes plus risquées et de moins bon goût.

1029. (1886) Le naturalisme

De sorte que, même quand Diderot réclama la vérité sur la scène et dans le roman, et quand Rousseau fit fleurir dans sa prose le lyrisme romantique, les lettres demeurèrent stationnaires. […] Tout est vulgaire dans Madame Bovary, le sujet, le lieu de la scène, les personnages. […] De ces aquarelles, il passa à des tableaux de chevalet, c’est-à-dire des scènes de mœurs, jusqu’à ce qu’enfin il osa couvrir de couleurs de vastes toiles, de grands romans sociaux. […] Quelques scènes rurales de Trueba plaisent comme il plaît de contempler le cours d’un ruisseau peu profond et aux bords agréables>12. […] Le Réalisme espagnol a un vaillant champion dans Pereda ; quand on lit quelques pages de l’auteur des Scènes Montagnardes, il semble que nous voyions ressusciter Téniers ou Tirso de Molina.

1030. (1925) Portraits et souvenirs

J’ai vu souvent se renouveler cette scène toujours surprenante, et je crois vraiment que personne ne manifesta pour son siècle un pareil mépris que Villiers, et pour ce dont s’enorgueillit faussement notre époque. […] Ce goût, très marqué chez Laurent Evrard, a pour conséquence une prédilection à mettre en scène des personnages un peu exceptionnels qui, par une certaine bizarrerie d’âme, se prêtent favorablement au genre d’analyse où excelle l’auteur de la Nuit. […] Quel contraste entre ces deux scènes, entre la belle peinture réaliste d’en bas et l’étrange vision qui la domine ! […] On dit que l’endroit en question se trouve exactement sous la scène de l’actuel Théâtre de la Ville, à la place du Châtelet… f. […] Henry Murger (1822-1861) est surtout resté dans les mémoires pour ses Scènes de la vie de bohème (1848), roman vif et touchant qui servit de base au livret de La Bohème de Puccini (1896).

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