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321. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre premier. Sujet de ce livre » pp. 101-107

. — Enfin la sagesse parmi les Hébreux et ensuite parmi les Chrétiens a désigné la science des vérités éternelles révélées par Dieu ; science qui, considérée chez les Toscans comme science du vrai bien et du vrai mal, reçut peut-être pour cette cause son premier nom, science de la divinité. […] Toutes se réunissent dans la contemplation de la Providence divine ; cette Providence qui conduit la marche de l’humanité, voulut qu’elle partît de la théologie poétique qui réglait les actions des hommes d’après certains signes sensibles, pris pour des avertissements du ciel ; et que la théologie naturelle, qui démontre la Providence par des raisons d’une nature immuable et au-dessus des sens, préparât les hommes à recevoir la théologie révélée, par l’effet d’une foi surnaturelle et supérieure aux sens et à tous les raisonnements.

322. (1863) Cours familier de littérature. XV « XCe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin (3e partie) » pp. 385-448

Mon Dieu, recevez ce que j’en souffre et toutes les douleurs de cette affection. […] Aujourd’hui à Lentin, dans la pluie, les poignants souvenirs et la solitude… Mais, mon âme, apaise-toi avec ton Dieu que tu as reçu dans cette petite église. […] Je reçois un charmant billet de M. de Sainte-Beuve, cet homme exquis dont je reçois l’écriture vivante. » M. de Sainte-Beuve avait rendu à son frère Maurice une justice qui eût été bien plus juste si elle s’était adressée à la sœur ! […] Que doit-ce être d’une harmonie de science et de génie, sur qui comprend cela, sur qui a reçu une organisation musicale, développée par l’étude et la connaissance de l’art ? […] Je vais partir avec les souvenirs les plus agréables et les plus doux, tant du dedans que du dehors : famille charmante où je suis adoptée, où j’ai reçu les témoignages les plus touchants d’affection, affection si vraie puisqu’elle est désintéressée.

323. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIVe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

Elle fut reçue à Rome par le pape et par le cardinal-ministre Consalvi avec la distinction et la bonté qu’ils croyaient devoir à la personne d’une amie du défenseur de l’Église. […] Ce général reçut de mes mains le ministère et mes instructions. […] Lainé en prit un incognito, et ne voulut jamais en recevoir le prix restitué, ne voulant pas de cet hommage à un grand homme retirer même son intention généreuse. […] M. de Chateaubriand donna sa démission et voulut parler au roi ; le roi refusa de le recevoir. […] M. de Chateaubriand eut la faiblesse d’aller à Londres pour y recevoir quelques puérils hommages ; il en revint plus seul que jamais.

324. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance de Voltaire avec la duchesse de Saxe-Golha et autres lettres de lui inédites, publiées par MM. Évariste, Bavoux et Alphonse François. Œuvres et correspondance inédites de J-J. Rousseau, publiées par M. G. Streckeisen-Moultou. — I » pp. 219-230

Il considère cette société antérieure et postérieure à l’individu ; il la voit subsistante, nécessaire, harmonieuse, agissant en mille façons et par toutes sortes d’influences inappréciables, plus mère encore que marâtre, ne retirant à l’homme primitif du côté des forces physiques que pour rendre davantage par le moral à l’homme actuel, et imposant dès lors à quiconque naît dans son sein des devoirs, des obligations qui ne sont point proprement de particulier à particulier, mais qui prennent un caractère commun et général : Car les individus, dit-il, à qui je dois la vie, et ceux qui m’ont fourni le nécessaire, et ceux qui ont cultivé mon âme, et ceux qui m’ont communiqué leurs talents, peuvent n’être plus ; mais les lois qui protégèrent mon enfance ne meurent point ; les bonnes mœurs dont j’ai reçu l’heureuse habitude, les secours que j’ai trouvés prêts au besoin, la liberté civile dont j’ai joui, tous les biens que j’ai acquis, tous les plaisirs que j’ai goûtés, je les dois à cette police universelle qui dirige les soins publics à l’avantage de tous les hommes, qui prévoyait mes besoins avant ma naissance, et qui fera respecter mes cendres après ma mort. Ainsi mes bienfaiteurs peuvent mourir ; mais, tant qu’il y a des hommes, je suis forcé de rendre à l’humanité les bienfaits que j’ai reçus d’ellex. […] [1re éd.] je suis obligé de rendre à l’humanité les bienfaits que j’ai reçus d’elle.

325. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Chateaubriand, jugé par un ami intime en 1803 » pp. 2-15

Il parle aux autres, c’est pour eux seuls et non pas pour lui qu’il écrit ; aussi c’est leur suffrage plus que le sien qu’il ambitionne, et de là vient que son talent ne de rendra jamais heureux, car le fondement de la satisfaction qu’il pourrait en recevoir est hors de lui, loin de lui, varié, mobile et inconnu. […] Cette vertu suppose un esprit de réflexion pratique, d’attention à autrui, d’occupation du sort des autres et de détachement de soi, qu’il n’a pas reçu, ce me semble, infus avec la vie, et qu’il a encore moins songé à se donner. […] J’en ai reçu hier une lettre de Florence.

326. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XI. Il Convitato di pietra (le Convié de pierre) » pp. 191-208

Je vais te dénoncer au roi, t’accuser d’avoir tué le commandeur, je reçois les dix mille écus, et nous partageons.” […] Don Juan dit au fiancé : “Recevez mon compliment, seigneur Cornelio. — Mais ce n’est pas mon nom. — Il le sera bientôt.” […] Don Juan saisit un flambeau sur la table et va le recevoir.

327. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVIII. Institutions de Jésus. »

On communique le trésor caché ; on paye ainsi ce que l’on reçoit ; la politesse et les bons rapports y aidant, la maison est touchée, convertie. […] Quelques-uns hésitaient, le selâm étant alors comme aujourd’hui, en Orient, un signe de communion religieuse, qu’on ne hasarde pas avec les personnes d’une foi douteuse. « Ne craignez rien, disait Jésus ; si personne dans la maison n’est digne de votre selâm, il reviendra à vous 831. » Quelquefois, en effet, les apôtres du royaume de Dieu étaient mal reçus, et venaient se plaindre à Jésus, qui cherchait d’ordinaire à les calmer. […] Jésus insista sur ce point 847, et annonça à ses disciples un baptême par le feu et l’esprit 848, bien préférable à celui de Jean, baptême que ceux-ci crurent un jour recevoir, après la mort de Jésus, sous la forme d’un grand vent et de mèches de feu 849.

328. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXI » pp. 338-354

être obligée de recevoir comme princes de la maison royale les fruits des infidélités du roi ! […] Il y en a à Saint-Germain, mais ils n’ont pas encore paru. » Sans doute on travaillait à préparer l’esprit de la reine à les recevoir, et on ne voulait pas qu’ils parussent dans le monde avant cette espèce d’adoption d’un genre nouveau. […] C’est bien à présent, madame, que vous auriez à me reprocher de l’aimer avec excès. » Peu après le retour d’Anvers, les nouveaux princes furent enfin reçus chez la reine ; alors on les établit, avec leur gouvernante, à Versailles.

329. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre III. Besoin d’institutions nouvelles » pp. 67-85

Comment voudrions-nous imposer à nos enfants un joug que nous n’aurions pas voulu recevoir de nos pères ? […] Cependant le véritable caractère d’une loi est d’être immuable, et non pas d’être transitoire ; d’être d’une application générale, et non point de ne recevoir que des applications particulières, locales et catégoriques. […] Un tel fait est beaucoup trop démenti pour qu’il soit possible de l’admettre : consentons toutefois à le recevoir sans examen, et, pour parler le langage de la jurisprudence, en force de chose jugée.

330. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre VI. Du trouble des esprits au sujet du sentiment religieux » pp. 143-159

Du trouble des esprits au sujet du sentiment religieux Toutes les révolutions politiques se mêlent ou se lient à une révolution religieuse ; celle qui agite en ce moment l’Europe fait seule exception à ce principe général : l’impulsion qu’elle a reçue a été plutôt antireligieuse ; ainsi nous ne devons pas nous étonner si, dans la plupart de ses phases, elle a été antisociale. […] Les nations soumises à l’empire romain reçurent une nouvelle existence du christianisme. […] On pense bien que c’est du philosophe que je parle, car c’est comme philosophe qu’il vient de recevoir une nouvelle apothéose.

331. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVI. Buffon »

Il adore Buffon, et depuis trente ans il lui a donné probablement bien plus de vie qu’il n’en a reçu de ce grand-homme. […] Il l’interrompait, cependant, pour recevoir dignement ceux qui venaient visiter cette gloire qui n’était pas sauvage, mais qui sentait qu’elle ne grandirait que dans le labeur et l’isolement des hommes, toujours plus ! […] Buffon est bien plus une imagination qui reçoit des impressions et qui en fait jaillir des tableaux vivants qu’un observateur dans la force exacte de ce mot.

332. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXX. Saint Anselme de Cantorbéry »

Il recevait alors, — comme un homme plus grandement doué que lui, M.  […] Cousin, avec son ardente sensibilité et l’éclat chaleureux de son esprit, recevait l’impression de la pensée allemande, comme une cire bouillante et splendide reçoit l’empreinte dans laquelle jouera la lumière, tandis que M. de Rémusat la gardait comme une cire pâle et tiède, sans cohésion et sans solidité.

333. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Conduite de l’action dramatique. » pp. 110-232

Dans le Cid, par exemple, un vieillard respectable vient de recevoir un affront ; il ne peut se venger : il rencontre son fils, il le charge de sa vengeance. […] Voilà pourquoi l’on ne doit pas changer les fables déjà reçues : par exemple, il faut que Clytemnestre soit tuée par Oreste, et Ériphyle par Alcmæon. […] Ptolomée pouvait délibérer en son cabinet s’il recevrait Pompée ou s’il lui donnerait la mort, et rentrer en apprenant au spectateur le parti qu’il a pris. […] Ces premières idées, qui naissent dans l’âme lorsqu’elle reçoit une affection vive, et qu’on appelle communément sentiment, touchent toujours, quoiqu’elles soient énoncées par les termes les plus simples. […] Il est reçu de chanter les plaintes, la joie et la fureur ; mais la musique, faite pour toucher, ne raisonne pas.

334. (1835) Critique littéraire pp. 3-118

Il entre au séminaire ; trois ans après, il reçoit les ordres. […] Aussi Victor Jacquemont fut très bien reçu ; Runjet-Sing le prit pour un espion anglais. […] Si Jacquemont a fait un discours politique à Meerut, c’est au grand jour, vous le savez, et il n’avait reçu mission que de son zèle patriotique. […] Arrivé à Cachemyr, Jacquemont avait ainsi reçu, en témoignages solides de la considération de S.  […] Il venait de recevoir un travail remarquable de M. 

335. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Alfred de Vigny. »

Thiers, reçut les jours suivants lettres sur lettres de tous les Chatterton en herbe, qui lui écrivaient : « Du secours, ou je me tue !  […] Molé, qui se trouvait directeur de l’Académie, avait donc en cette qualité à recevoir M. de Vigny, qu’il avait efficacement contribué à faire nommer et pour qui il avait voté lui-même : voilà le point de départ véritable et des moins compliqués. […] Molé n’était pas homme à se laisser initier, ni à recevoir de la main à la main le fil conducteur. […] Il refusa obstinément d’être présenté au roi, comme c’était l’usage, par le même directeur qui l’avait reçu. […] J’ai reçu une lettre charmante de l’auteur ; mais, comme il met les numéros tout de travers, elle ne m’est parvenue qu’après des courses sans fin.

336. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Delille »

De cette école du presbytère, le jeune Delille fut envoyé à Paris, et vint faire ses études au collège de Lisieux, où on le reçut comme boursier. […] Voltaire reçoit, jeune, des coups de bâton d’un grand seigneur, et il ne reste pas moins ami de la noblesse, du beau monde, et l’opposé en cela de Jean-Jacques. […] Le goût des arts, des lettres, les sentiments d’un esprit vif et honnête, s’y montrent selon les traditions reçues. […] On lui fit bientôt réparation, et il fut reçu en 1774 à la place de La Condamine. […] On y lit le très-amusant récit d’un voyage que fit l’abbé Delille, en 1786, à Metz, à Pont-à-Mousson, à Strasbourg, reçu dans chaque ville par les gouverneurs, par les colonels à la tête de leurs régiments, par les maréchaux de Stainville et de Contades au sein de leurs états-majors, et commandant lui-même les petites guerres.

337. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxve entretien. Histoire d’un conscrit de 1813. Par Erckmann Chatrian »

Goulden se trompe, Joseph est déclaré valide, il part pour la campagne de Leipzig, il est blessé, il revient à Phalsbourg, il retrouve sa cousine, il l’épouse ; Goulden les reçoit, eux et leur tante. […] Je boitais bien un peu de la jambe gauche, mais tant d’autres avec des défauts avaient reçu leur feuille de route tout de même ! […] Il faudrait que le chirurgien fût aveugle pour te recevoir. […] Il avait son cheval à la caserne de gendarmerie, et disait à son soldat d’aller voir s’il était bien bouchonné, s’il avait reçu son avoine. […] Enfin je bouclai mon sac, et je descendis sans avoir le temps de remercier les bonnes gens qui m’avaient si bien reçu, pensant remplir ce devoir après l’appel.

338. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre troisième »

Enfin, à toutes les époques, les caractères reçoivent, du temps et des événements, des nuances qui rajeunissent les mêmes types, et la galerie de la Bruyère pouvait s’enrichir de quelques portraits de plus. […] Les conseils de Voltaire ne montent pas jusqu’à ces hauteurs où l’on est plus accoutumé à commander en maître qu’à recevoir des leçons. […] Rollin semble avoir reçu, comme un legs du dix-septième siècle, la tâche d’exprimer, dans la langue qu’on y parlait, ce qu’ont pensé tous ses grands esprits sur le meilleur régime d’éducation publique dans une société civilisée et chrétienne. […] Par le commentaire il prête aux textes qu’il cite presque autant d’autorité qu’il en reçoit, et il fait sien le précepte commun. […] Quelle bonne grâce aurais-je à ne pas compter parmi les mérites de ce livre le bien que j’en ai reçu ?

339. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre III. De la survivance des images. La mémoire et l’esprit »

Mais notre souvenir reste encore à l’état virtuel ; nous nous disposons simplement ainsi à le recevoir en adoptant l’attitude appropriée. […] C’est donc le lieu de passage des mouvements reçus et renvoyés, le trait d’union entre les choses qui agissent sur moi et les choses sur lesquelles j’agis, le siège, en un mot, des phénomènes sensori-moteurs. […] En S se concentre l’image du corps ; et, faisant partie du plan P, cette image se borne à recevoir et à rendre les actions émanées de toutes les images dont le plan se compose. […] Notre corps, avec les sensations qu’il reçoit d’un côté et les mouvements qu’il est capable d’exécuter de l’autre, est donc bien ce qui fixe notre esprit, ce qui lui donne le lest et l’équilibre. […] Et voilà peut-être tout ce qu’il y a, s’il est vrai que le corps ne soit qu’un lieu de rendez-vous entre les excitations reçues et les mouvements accomplis, ainsi que nous l’avons supposé dans tout le cours de notre travail.

340. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Froissart. — I. » pp. 80-97

On ne m’en doit point blâmer si à cela ma nature étoit encline ; car en plusieurs lieux il est reçu que toute joie et tout honneur viennent et d’armes et d’amours. […] Elle reçut Froissart gracieusement, l’attacha à son service et lui donna part à sa familiarité : elle lui commandait souvent des vers (virelais et rondeaux) ; il avait titre clerc (secrétaire) de la chambre de la reine, et de plus il était de l’hôtel du roi, comme on disait, et de celui de plusieurs grands seigneurs et chevaliers, c’est-à-dire qu’il en recevait des cadeaux et qu’il mangeait chez eux quand il lui plaisait. […] Ses premières et très étroites liaisons avec l’Angleterre, les bienfaits qu’il reçoit de la reine Philippe de Hainaut et de son époux, tout semble le rendre un peu partial pour ce pays ; et de même il est difficile qu’étant lié et obligé à tant de seigneurs, il n’ait pas payé de retour leurs bienfaits et leurs largesses, ou même simplement leurs bonnes informations, en leur accordant une trop belle place dans ses récits.

341. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Maucroix, l’ami de La Fontaine. Ses Œuvres diverses publiées par M. Louis Paris. » pp. 217-234

Cependant, disons à son honneur que lorsque la marquise, ayant épuisé ses coquetteries à la Cour et en tous lieux, délaissée de son mari, frappée dans sa beauté, se voyant malade et dépérissante, cherchait un lieu où s’abriter, ce fut à Reims, chez MM. de Maucroix, le nôtre et son frère, qu’elle fut recueillie, qu’elle reçut les derniers soins et qu’elle mourut, aussi bien que sa mère, qui y était morte également. […] C’est pendant qu’il était à Rome que Maucroix reçut de La Fontaine ce récit moitié vers et moitié prose qui contient la description des Fêtes de Vaux, et qui était une sorte de dépêche poétique tout en l’honneur du surintendant (août 1661). […] C’est là qu’il recevait Boileau et Racine lorsque ceux-ci faisaient quelque voyage de ce côté à la suite du roi ; et, à l’époque de la mort de La Fontaine, Boileau rappelait à Maucroix le souvenir de ces visites dans une lettre touchante et plus sensible qu’on ne l’attendrait du sévère critique : … Le loisir que je me suis trouvé aujourd’hui à Auteuil m’a comme transporté à Reims, où je me suis imaginé que je vous entretenais dans votre jardin, et que je vous revoyais encore, comme autrefois, avec tous ces chers amis que nous avons perdus, et qui ont disparu velut somnium surgentis. […] Avant que tu reçoives ce billet, les portes de l’éternité seront peut-être ouvertes pour moi.

342. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Henri IV écrivain. par M. Eugène Jung, ancien élève de l’École normale, docteur es lettres. — I » pp. 351-368

Et cependant l’amour de la comtesse et de Henri a déjà reçu son atteinte et son échec ; le doute s’y est glissé. […] Cette méfiance de la comtesse nous revient dans presque toutes les lettres du roi, qui est surtout occupé à la rassurer sur le chapitre de la fidélité : (1er mars 1588) J’ai reçu une lettre de vous, ma maîtresse, par laquelle vous me mandez que ne me voulez mal, mais que vous ne vous pouvez assurer en chose si mobile que moi. […] Toutes les gênes que peut recevoir un esprit sont sans cesse exercées sur le mien ; je dis toutes ensemble. […] Le charme pour elle n’existe plus du tout, et elle prend l’habitude, dans son irritation, d’annoter les lettres qu’elle reçoit de Henri et de les charger dans les interlignes de contradictions piquantes et moqueuses ; par exemple, à cet endroit où il est dit qu’il se propose de faire venir bientôt près de lui Mme Catherine, sa sœur, et qu’il la prie de l’accompagner, elle ajoute ironiquement : « Ce sera lorsque vous m’aurez donné la maison que m’avez promise près de Paris, que je songerai d’en aller prendre la possession, et de vous en dire le grand merci. » Il perce dans ce reproche un coin d’intérêt et de calcul qu’on ne voudrait pas en elle.

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