Quelque bonne que fût la cause, de semblables défenseurs pensèrent la ruiner. […] « J’aime mieux, leur répondit-il, être le premier des poëtes Toscans, que de me voir dans un rang inférieur entre les poëtes Latins. » C’est ce que pensa de bonne heure notre célèbre Racine, qui, dit-on, eût pu effacer, s’il avoit voulu, les Rapin & les Commire ; & c’est aussi ce qu’auroit dû se dire le fameux cardinal de Polignac.
Ainsi pensent ceux, pour qui l’âme n’est que la résultante des actions cérébrales ; mais on oublie qu’une lyre ne tire pas d’elle-même et par sa propre vertu les accents qui nous enchantent, — et que tout instrument suppose un musicien. […] Ainsi deux âmes qui auraient intrinsèquement et en puissance la même aptitude à penser seront cependant diversifiées par la différence des cerveaux.
Au moment où je vous parle, je suis à côté de son lit ; je le vois, j’entends sa plainte, je touche ses genoux froids ; je pense qu’un jour… ah ! […] La petite portion du peuple qui médite, qui réfléchit, qui pense, qui prend pour unique mesure de son estime le vrai, le bon, l’utile, pour trancher le mot, les philosophes dédaignent les fictions, la poésie, l’harmonie, l’antiquité.
Il ne sçavoit s’il avoit eu tort de croire que Jodelet maitre et valet, et Dom Japhet D’Armenie , fussent dans le bon goût, ou s’il avoit tort de penser que c’étoit le Misantrope qui étoit dans le bon goût. […] J’ai allegué déja les opera de Quinault, et je pense en avoir dit assez pour faire convenir du moins intérieurement ceux de nos poëtes dramatiques dont les pieces n’ont pas réussi, que le public ne proscrit que les mauvais ouvrages.
Nous en arriverons à ne plus les compter, comme par exemple, lorsqu’on nous reproche de penser que Pascal et de Retz n’ont pas de goût ! […] Zola pensa balayer Chateaubriand.
De là devrait résulter cette conséquence que notre intelligence, au sens étroit du mot, est destinée à assurer l’insertion parfaite de notre corps dans son milieu, à se représenter les rapports des choses extérieures entre elles, enfin à penser la matière. […] Et, le plus souvent, quand l’expérience a fini par nous montrer comment la vie s’y prend pour obtenir un certain résultat, nous trouvons que sa manière d’opérer est précisément celle à laquelle nous n’aurions jamais pensé.
Ici ce n’est pas un enlèvement, comme bien l’on pense, ce n’est qu’une atteinte, ce n’est qu’une page ! […] Qu’on veuille penser à tout ce qu’il y avait de réfléchi et de profond d’éclairé au sens chrétien, dans cette piété qui sentait le besoin d’expier et de payer pour les autres, — pour son époux, le prince de Conti, fauteur de guerres civiles et artisan de désastres dans tant de villages et de chaumières, — pour son oncle le cardinal, acquéreur avide et si peu scrupuleux de richesses innombrables. […] — Soyez certain, dit-il encore à propos de quelques manèges qu’il voit se pratiquer autour de lui, que cela ne me fera pas prendre un moment d’humeur ; mais je vous avoue que je voudrais que mon caractère pût se prêter à un peu de hauteur, qui, quand elle sera jointe avec de la sagesse et de la raison, fera toujours, je crois, un bon effet ici ; je sens que cette qualité me manque, mais je ne chercherai pourtant pas à affecter de l’avoir, parce que, ne l’ayant pas intérieurement, il serait impossible que je l’affectasse si bien que le naturel ne me trahît souvent ; et je pense, pour cette raison, qu’il ne faut jamais se proposer un système de conduite qui ne s’accorde pas avec le caractère qu’on a ; car, celui-ci venant à démentir le système comme il arrive toujours en ce cas, la conduite d’un homme ne paraît plus qu’une bigarrure tissu d’inégalités, ce qui est, je crois, fort préjudiciable à la réputation, et par conséquent aux affaires. […] Elle est la décente amie de M. de Nivernais ; car en ce pays aucune intimité n’est permise que sous le voile de l’amitié. » Le duc a son mérite ; comme écrivain, il est « au sommet du médiocre », et Horace Walpole cite à ce propos le mot de Mme Geoffrin, qu’il corrige légèrement, puis il ajoute : Il serait disposé à penser avec liberté, s’il n’avait l’ambition de devenir gouverneur du dauphin (Louis XVI), et de plus il craint sa femme et sa fille qui sont des fagots d’Église. […] Je ne sais pas ce que penseront vos clients, mais, pour moi, si j’avais actuellement une affaire à moi entre vos mains, j’aimerais mieux perdre mon procès que de vous y voir travailler. — Ménagez-vous, mon voisin, je vous en conjure, et ne me répondez pas, mais aimez-moi et croyez-moi, etc.
N’y pensez pas : ce qu’il faut à la France et à la civilisation dans nos rapports avec l’Angleterre, c’est la paix, la paix difficile, la paix agitée, mais la paix méritoire, la paix utile au monde, mais la paix l’œil ouvert et la main armée. […] Voilà son destin, voilà sa nature, voilà sa pensée, même quand elle ne pense pas : la force des choses pense sans elle. […] Un illuminé peut la rêver, un patriote ne peut la penser sans crime. […] Que la France y pense. […] Cela est naturel : c’est par en haut que les peuples pensent, c’est par le cœur que les peuples sentent ; la pensée et le sentiment ne sont pas dans les membres.
Un philosophe anglais a remarqué avec une admirable justesse que « si la nature douait un être d’une faculté de sentir et de penser trop supérieure à la faculté de sentir et de penser du commun des hommes, cet être en apparence privilégié ne pourrait pas vivre dans le milieu humain, ou vivrait le plus infortuné de tous les êtres. […] Beaucoup imaginer, c’est beaucoup prétendre ; beaucoup penser, c’est beaucoup souffrir ; être grand, c’est être disproportionné dans un monde de médiocrités ou de petitesses ; être disproportionné, c’est être déplacé ; être déplacé, c’est créer autour de soi des inimitiés, c’est éprouver soi-même une inimitié involontaire et générale contre tous ceux qui ne vous cèdent pas la place aussi vaste que la demandent vos facultés supérieures. […] Je pense que ces désordres de son esprit viennent de quelques humeurs mélancoliques qui pèsent sur le cœur et sur le cerveau. […] Car je suis fou, mais pas cependant si fou qu’on le pense. » Les chaleurs de l’été de 1577 accrurent tellement ses dispositions maladives, qu’il tomba dans cette terreur stupéfiante dont J. […] J’ai pensé enfin qu’il serait bon de montrer ainsi au duc que, si j’avais péché autrefois par trop d’ombrages et de défiance, je me livrais maintenant à lui avec un abandon sans réserve. » Comment concilier cet aveu avec les aspirations éthérées et désintéressées d’une passion aussi exclusive et aussi immatérielle qu’un noble amour ?
Si cette pièce singulière, que ses enthousiastes veulent faire envisager comme une nouvelle lumière apportée aux hommes qui se piquent de penser, est écrite en quelques endroits d’une manière forte, sublime & pathétique, elle est froide dans tout le reste. […] L’abbé Sallier pense qu’ils remplissent parfaitement cet objet. […] Il a le courage de s’élever au-dessus des préjugés de son état, & de dire librement ce qu’il pense. […] Voilà ce qu’il pense des tragédies, même de celles où le crime est puni : en quoi, je le trouve d’accord avec La Mothe, qui dit : « Quelque forte que soit la leçon que puisse présenter la catastrophe qui termine la pièce, le remède est trop foible & vient trop tard. » Mais on a combattu l’idée de M. […] Tout ce qui pense chez eux, la laisse s’enivrer & fumer, & se rend en foule à la comédie à Carouge.
Il fait alors des vers de la famille de ceux de Pradon : Depuis que je vous vois, j’abandonne la chasse, Et quand j’y vais, ce n’est que pour penser à vous ! […] V Nous pensions en avoir fini avec M. […] Sans cette magnanimité attendrie, ils penseraient comme nous, ils diraient comme nous, de ces deux volumes sous lesquels la réputation poétique de M. […] L’arbre noir, c’est l’intelligence qui a pensé, non ! […] Hugo encore ; — pour le coup, caractérisant très bien son genre de travail, — nous avons trouvé un poète que nous n’attendions guère, un poète vivant quand nous pensions trouver un poète mort !
les charmantes et profondes paroles d’amour, écrites il y a dix-huit cents ans, je pense, et toujours jeunes ! […] Je ne pense pas qu’il faille s’en prendre à M. […] Tous deux pensaient sensiblement de même sur la valeur morale de la bourgeoisie conservatrice. […] Et ce qu’il pense et dit n’est pas si banal ! […] La cinquantaine, je pense.
Il fut retardataire comme vous pensez bien ; mais il fut des plus vifs. […] C’est encore maintenant, à très peu près, ce que je pense. […] du moins me faites-vous dire ce que je n’ai dit, ni ne pense. […] Tout fier de penser comme vous, je m’exclamai : « Ce qu’exprime M. […] Les acteurs proprement dits, comme bien vous pensez, ne savaient pas un mot de leurs rôles.
Or, douter, c’est penser. Penser, c’est être. […] Que pensait Homère ? Que pensait Shakespeare ? […] Ainsi pensait celui des deux jeunes gens qui transcrivit cette causerie d’un matin d’hiver, ainsi ai-je pensé en la recopiant du mieux que j’ai pu.
Un symbole, c’est toujours, je pense, un signe, c’est-à-dire un objet destiné à représenter un autre objet. […] … Tu n’es que ce que tu penses : pense-toi donc éternel ! […] Renan s’est, pour longtemps, donné le moyen de paraître tel, quoi qu’il pense et affirme. […] On manda Chalek, comme vous pouvez penser : mais cette fois l’herbe était impuissante. […] Il voulait en effet qu’on ne pensât pas au dogme, mais c’était afin qu’on fut plus à l’aise pour y croire.
Le héros disparoît de la scene, dès qu’on y apperçoit le comédien ou le poëte ; cependant comme le poëte fait penser & dire au personnage qu’il employe, non ce qu’il a dit & pensé, mais ce qu’il a dû penser & dire, c’est à l’acteur à l’exprimer comme le personnage eût dû le rendre. […] Ce sont communément ceux qui ont pensé vers-à-vers. […] La nature dans ses opérations ne pense à rien moins qu’à être pittoresque. […] On admire celui qui l’a ravagée ; à peine daigne-t-on penser à celui qui la rend fertile. […] Un légionnaire pense en homme, une légion pense en héros ; & ce qu’on appelle l’esprit du corps, ne peut avoir d’autre aliment, d’autre mobile que la gloire.
Vous êtes entré dans une voie que vous ne sauriez suivre jusqu’au bout sans mettre en péril une foule d’idées qui vous sont encore chères et sacrées. » Nous sommes avertis, en effet, par l’auteur dans la courte préface qu’il a mise en tête, que ce volume renferme « des manières de dire et de penser qui lui sont devenues à peu près étrangères ». […] Je ne sais pas en notre langue d’article critique de pareille étendue qui soit mieux pensé, mieux frappé. […] Scherer, ouvrent une série assez nombreuse de pamphlets politiques dans l’examen desquels nous ne croyons pas devoir entrer : aussi bien, nous pensons qu’ils ont mal servi la réputation de Lamennais.
Il fut pris, à dix-sept ans, de ce que son compatriote Segrais appelait la petite vérole de l’esprit, c’est-à-dire qu’il voulut se faire religieux ; par bonheur pour ses lecteurs futurs et pour le bien du genre humain (c’est lui-même qui nous le dit aussi naïvement qu’il le pense), on le jugea trop faible de santé pour soutenir les exercices du chœur, et sa fièvre de vocation eut le temps de se dissiper. […] Vers cette date de 1686, quand on parlait des réunions du faubourg Saint-Jacques, on pensait généralement à Messieurs de Port-Royal, dont les derniers débris s’y rassemblaient avec mystère ; on était disposé à se les exagérer, soit qu’on les admirât ou qu’on les craignît ; on ne se doutait pas qu’il y avait là, tout près d’eux, quatre ou cinq jeunes gens encore ignorés, à la veille de se produire, animés de l’esprit le moins théologique, et qui feraient faire aux idées et aux sciences bien plus de chemin désormais que tous ces jansénistes dont les coups étaient depuis longtemps portés, qui avaient vidé leur carquois depuis Pascal, et qui finissaient de vider leur sac avec Arnauld. […] je le vois, mon cher, vous avez le préjugé du style. » J’aurais aimé à savoir ce que le digne abbé pensait de La Bruyère, et s’il lui en voulut un peu.
Oui, en France, dans ce qu’on déprime ou ce qu’on arbore en public, on ne pense guère le plus souvent au fond des choses ; on pense à l’effet, à l’honneur qu’on se fera en défendant telle ou telle opinion, en prononçant tel ou tel jugement. […] Il aime en toute chose qu’on ne garde pas sur le cœur ce qu’on pense.
Et pourtant il faut bien dire un mot de ce que nous pensons : c’est le propre et, si l’on veut, le faible de l’esprit critique, quand il a quelque chose (ne fût-ce qu’un petit mot) à dire, de ne pouvoir le garder ni sur le cœur ni sur la langue : il faut absolument que le grain de sel sorte, si grain de sel il y a. […] Non, je ne le pense pas. […] Il est rapporté dans la Vie de saint Jérôme qu’il fut battu de verges par un Ange, qui lui reprochait, en le frappant, de lire avec plus d’ardeur Cicéron que l’Évangile : combien plus vos lectures mériteraient-elles ce châtiment, si Dieu nous témoignait toujours, dès cette vie, ce qu’il pense de nos actions ?
Il raconte à Mme de La Fontaine que son premier soin, en entrant dans un pays, est de s’enquérir des jolies femmes : « Je m’en fis nommer quelques-unes, à mon ordinaire. » Il entre dans une allée profonde et couverte, et explique (toujours à Mme de La Fontaine) « qu’il se plairait extrêmement à avoir en cet endroit une aventure amoureuse. » Il insiste pour plus de clarté (toujours dans une lettre à Mme de La Fontaine) : « Si Morphée m’eût amené la fille de l’hôte, je pense bien que je ne l’aurais pas renvoyée. […] On l’appelle « le bonhomme. » En conversation, il ne sait pas de quoi on parle autour de lui, « rêve à toute autre chose, sans pouvoir dire à quoi il rêve. » Il paraît « lourd, stupide. » Il ressemble à « un idiot », ne sait raconter ce qu’il vient de voir, et, « de sa vie, n’a fait à propos une démarche pour lui-même. »14 Sa sincérité est naïve ; il pense tout haut, montre aux gens qu’ils l’ennuient. […] Il pense tout haut, il vit à coeur ouvert devant les contemporains, devant ses lecteurs.
« Le portrait qu’il trace du Français, de corps chétif, sans vigueur musculaire, incapable d’avoir des enfants, ignorant l’orthographe (t la géographie, hors d’état d’apprendre une langue étrangère, libre penseur sans avoir jamais pensé, ne songeant qu’à être décoré d’un ordre quelconque et à émarger au budget, dépaysé quand il a dépassé le boulevard des Italiens, hostile au gouvernement et acceptant servilement tous les régimes, incapable de comprendre ni les mathématiques, ni le jeu d’échecs, ni la comptabilité ; ce portrait, dis-je, est une vraie caricature. […] Il faut faire pour les opinions ce que Kant recommandait de pratiquer pour les actes de moralité : il faut ériger sa façon de penser en maxime universelle ; et il est rare alors que ce qui n’est point évidemment vrai continue de le paraître. […] Dans un propos de morale pratique, on ne cherchera pas les fondements de l’idée du bien ; on n’en discutera point l’essence et l’origine, et, quoiqu’on pense là-dessus, on admettra les définitions vulgaires du bien et du mal.