Nous voyons sans cesse la nuit succéder au jour, et pourtant nous ne faisons pas du jour la cause de la nuit, nous concevons très bien un jour continuel ou une nuit perpétuelle. […] Ce mode est le plus défectueux de tous, car outre qu’on ne peut être sûr d’être complet en l’employant, une définition ainsi faite a toujours une longueur qui nuit à sa netteté.
C’est qu’entre autres raisons, si nous jeûnons, l’appétit nous rendra tantôt notre repas meilleur : « Loin de prendre la nourriture comme un soulagement nécessaire accordé enfin à la longueur de l’abstinence, on y porte encore un corps tout plein des fumées de la nuit… » Il pouvait s’arrêter là, mais il ne sait pas s’arrêter, et il ajoute : « et on n’y trouve pas même le goût que le seul plaisir aurait souhaité pour se satisfaire 82 ». […] la Tempête ou le Songe d’une nuit d’été ? […] La nuit, j’eus la fièvre avec de fortes convulsions… Depuis, l’appétit n’est pas revenu, ni les forces, ni le sommeil, et voici le quatrième jour qu’il m’est impossible de manger.
. — Cela est vrai pour les cas ou couples de données particulières, comme pour les lois proprement dites ou couples de données générales ; il y a une raison pour la chute de cette feuille qui vient de tomber tout à l’heure et pour la gravitation de toutes les planètes vers le soleil, pour la rosée de cette nuit et pour la liquéfaction de toute vapeur, pour le battement de pouls que je constate sur mon poignet en ce moment même et pour la présence d’une fonction ou d’un appareil quelconque dans un être vivant quelconque. — Cela est vrai pour les lois dans lesquelles la première donnée est un composé plus complexe, comme pour les lois dans lesquelles la première donnée est un composé plus simple ; il y a une raison pour les actions totales d’une société humaine et pour les actions individuelles de ses membres, pour les propriétés d’un composé chimique et pour les propriétés de ses substances constituantes, pour les effets d’une machine et pour les effets de ses rouages. — Cela est aussi vrai pour les lois qui concernent les composés mentaux que pour les lois qui concernent les composés réels ; il y a une raison pour les propriétés de l’ellipse ou du cylindre comme pour les propriétés de l’eau ou du granit. — Cela est aussi vrai pour les lois qui régissent la formation d’un composé que pour celles qui lui rattachent ses caractères ; il y a une raison pour la formation comme pour les propriétés d’une planète ou d’une espèce. — Mais le point le plus remarquable, c’est que cela est aussi vrai pour les lois dont l’explication nous manque que pour celles dont nous avons aujourd’hui l’explication.
Saint-John, il en est qui rapportent au logis du gibier ailé, d’autres des Lièvres ou des Lapins, d’autres chassent au marais, et, presque chaque nuit, attrapent des Bécasses ou des Bécassines.
Et combien d’autres œuvres d’importance ont été ou omises de propos délibéré, ou présentées sous un jour qui leur nuit, ou placées hors de l’endroit qui leur convient, parce qu’elles ne se pliaient pas assez commodément à la théorie des pertes et des gains ! […] Ce sont les chiens qui aboient, les carrioles emportées au galop le long des routes, les fiacres roulant dans les rues de la grande ville, le claquement des roseaux secs, le bruit clair des louis d’or qui tombent sur les tapis, les battements de la pendule, le cri des volailles qu’on poursuit dans la cour pour les tuer, quelquefois un bruit vague, derechef les chiens qui aboient, et toujours dans la nuit et au loin. […] Écoutez ce souvenir charmant de la vie conjugale : « Ensuite il avait vécu pendant quatorze mois avec la veuve dont les pieds dans le lit étaient froids comme des glaçons. » Ou cet autre : « Le messager arriva de nuit… Il présenta délicatement sa lettre à Charles, qui s’accouda sur l’oreiller pour la lire. […] Et pour cadre à ce tableau des Mille et Une Nuits, au-dessus de vous, le ciel divin de l’Afrique ; autour de vous, Alger la blanche, couchée sur sa colline, semblable à une odalisque qui se baigne dans la lumière ; à vos pieds, ravissante de grâce et de douceur, la mer, plus lumineuse, s’il se peut, que le ciel.
Je craignais seulement d’être égorgé cette nuit…. » 64. — Mille autres traits ; car c’est à cette idée qu’il s’attache de toutes ses forces.
La nuit tombait lorsque nous commencions à gravir des pentes abruptes, par des chemins étroits qui côtoient des précipices, un peu inquiétants en tel équipage. […] Curieux de philosophie comme de toute chose, mais pas plus, Goethe se méfiait de ces penseurs occupés à « remâcher leur moi » et « des nuits cimmériennes de la spéculation » : il préférait l’art, la poésie, la création effective. […] Il explique qu’il peut sans fatigue passer des heures et des nuits entières à composer de la musique, mais s’il s’agit d’écrire de la prose, ce n’est pas sans effort qu’il se décide à commencer, et dès la dixième ligne, il se lève, marche dans sa chambre, regarde dans la rue, s’agite, rature, barbouille et met ordinairement deux jours à terminer un feuilleton.
On a observé que la rosée ne se dépose jamais abondamment dans des endroits fort abrités contre le ciel ouvert, et point du tout dans les nuits orageuses ; mais que, si les nuages s’écartent, fût-ce pour quelques minutes seulement, de façon à laisser une ouverture, la rosée commence à se déposer et va en augmentant.
Ce visage si propre à donner de l’amour, Pour qui mille beautés soupirent nuit et jour ; Bref, en tout et partout, ma personne charmante N’est donc pas un morceau dont vous soyez contente ? […] Molière a pris l’idée de son prologue dans le Dialogue de Mercure et Apollon de Lucien ; mais l’idée seulement, et le dialogue de Mercure et de la Nuit dans Molière, qui est si spirituel, est absolument de Molière seul.
Mais il a toutes les nuits des espèces d’attaques nerveuses et de somnambulisme qui font tout manquer.
Plus loin, ce sont des tableaux vivants d’une nouveauté aussi piquante que leurs titres : le Crépuscule, la Nuit, le Sommeil de Vénus !
On est fâché de voir, dans Andromaque, Pilade si fort au-dessous d’Oreste, qui le tutoie, et à qui il répond avec un respect qui nuit à l’effet que produirait le spectacle de leur amitié.
Les Romains ont attaqué mon père vers l’Euphrate, et trompé sa prudence ordinaire dans la nuit , etc.
Sur notre personnalité, sur notre liberté, sur la place que nous occupons dans l’ensemble de la nature, sur notre origine et peut-être aussi sur notre destinée, elle projette une lumière vacillante et faible, mais qui n’en perce pas moins l’obscurité de la nuit où nous laisse l’intelligence.
Il nous le montre prêtant un langage à tout ce qui, avant lui, était resté muet dans la nature, pénétrant au fond des phénomènes de l’aurore, de la forêt qui bruit, du nuage qui passe, de la colline qui s’éclaire des rayons du soleil, de la nuit qui rêve aux pâles rayons de la lune, découvrant partout le désir secret des éléments d’avoir une voix et leur donnant cette voix qu’ils cherchaient. […] Dans la chanson du mendiant et de l’enfant des rues, dans la mélopée monotone des Italiens vagabonds, dans la danse au cabaret de village ou dans les nuits de carnaval, c’est là qu’il découvrait ses “mélodies” : il les récoltait comme une abeille, saisissant au vol, ici ou là, un son ou un court dessin.
Le sentiment que nous avons de notre évolution et de l’évolution de toutes choses dans la pure durée est là, dessinant autour de la représentation intellectuelle proprement dite une frange indécise qui va se perdre dans la nuit.
Il n’est pas vrai que la nuit se soit étendue subitement sur le monde quand s’effondra l’énorme édifice de l’empire romain. […] Tel mot que l’on prête à Molière, absolument faux, et pour cause : « Messieurs, nous comptions avoir l’honneur de vous donner aujourd’hui la seconde représentation de Tartuffe, mais M. le premier président ne veut pas qu’on le joue », fait naturellement fortune ; et telle anecdote invraisemblable, comme celle qui nous représente Molière partageant « l’en-cas de nuit » du roi, se pousse aisément dans le monde, tandis que l’on ne voit pas bien, au premier abord, qu’il importe beaucoup de savoir si Molière a fondé l’Illustre Théâtre en 1643 ou 1645, s’il a passé jamais au Mans et s’il a traversé Bordeaux.
Corneille nous a fait un grand tort, disait plus tard une comédienne en renom ; nous avions ci-devant des pièces de théâtre pour frais écus que l’on faisait en une nuit ; on y était accoutumé et nous gagnions beaucoup : présentement, les pièces de M. […] mon frère, ce sont de pures idées, dont nous aimons à nous repaître… Lorsqu’un médecin vous parle d’aider, de secourir, de soulager la nature, de lui ôter ce qui lui nuit et lui donner ce qui lui manque, de la rétablir et de la remettre dans une pleine facilité de ses fonctions ; lorsqu’il vous parle de rectifier le sang, de tempérer les entrailles et le cerveau, de dégonfler la rate, de raccommoder la poitrine, de fortifier le cœur et d’avoir des secrets pour étendre la vie à de longues années, il vous dit justement le roman de la médecine. » Ces paroles me semblent assez caractéristiques, et en même temps qu’elles éclairent le ridicule d’Argan — qui est de vouloir être malade « en dépit de la nature », — on voit sans doute où elles nous ramènent.
— Cette nuit, en éteignant le feu d’une maison, je me suis brûlé le bras. — Dormez dans votre lit ; pourquoi vous faire pompier ? […] Il a dit à ses chers bourgeois : Si vous pouvez, ne soyez pas affectés dans votre langage, vous seriez ridicules ; ne soyez pas parcimonieux, vous seriez ridicules ; ne cherchez pas à sortir de votre sphère ni par le mariage ni par vos manières d’être et d’agir, vous seriez ridicules ; ne craignez pas incessamment d’être cocus, vous seriez ridicules ; ne vous droguez pas nuit et jour, vous seriez ridicules ; n’outrez pas la dévotion, vous seriez ridicules ; n’outrez pas les meilleures choses, même la franchise, vous seriez ridicules.
Ibant obscuri solâ sub nocte per umbram, pour dire qu’ils marchoient tout seuls dans les ténebres d’une nuit sombre. […] Solâ sub nocte, pendant la nuit seule, c’est-à-dire, qui semble anéantir tous les objets, & qui porte chacun à se croire seul ; c’est une métonymie de l’effet pour la cause, semblable à celle d’Horace (1.
Et à quoi nous sert l’histoire du caractère, des coutumes de telle Nation enfoncée dans la nuit des tems, si on la considere sur-tout par rapport à notre théâtre.
Mais qu’une surprise brusque paralyse ces activités superficielles, que la lumière où elles travaillaient s’éteigne pour un instant : aussitôt le naturel reparaît, comme l’immuable étoile dans la nuit.