Il est d’un naturel, en effet, d’un sincère, d’une intrépidité sans égale, d’une imprudence à faire peur ; il justifie ce mot de l’abbé Frayssinous sur lui (seule réponse à tant d’injures) : « Cet homme d’une candeur effrayante… » Il justifie cet autre mot de son frère, l’abbé Jean, qui le nomme de son vrai nom : « Dieu l’a fait soldat ! […] Les Lettres de Lamennais publiées déjà ou encore à publier, corrigeront heureusement ce que ses derniers excès de parole en 1848 avaient pu laisser de trop défavorable dans les esprits à son sujet ; elles le montrent au naturel, avec tous ses défauts, avec ses compensations et ses avantages.
au cœur de l’homme Vous ne pouvez avoir un naturel séjour. […] Calemard de Lafayette, un poëme qui n’est sans doute pas de tout point parfait, mais qui est vrai, naturel, étudié et senti sur place, essentiellement champêtre en un mot, et dont un poëte académicien, et non académique39, m’a dit en m’en recommandant la lecture : « Lisez jusqu’au bout ; le miel n’est pas au bord, mais au fond du vase. » J’ai, en effet, goûté le miel, et j’en veux faire part à tous !
Mais son naturel et son sentiment valent mieux que sa métaphysique, et sa belle intelligence touche à la puissance du génie. […] Un voyage et un séjour que Mme de Staël fit aux eaux d’Aix en 1811, et dans lequel elle rencontra Mme la comtesse de Boigne, me rappelle une anecdote qui a été souvent racontée devant moi, et qui donne bien l’idée de ce qu’était cette improvisation prodigieuse d’esprit, cette conversation à la fois naturelle et extraordinaire.
N’oublions pas que les hommes, y compris les femmes, ne sont pas tout d’une pièce, qu’il y a des temps d’émotion générale où une démarche, un mouvement qui ne sera pas entièrement d’accord avec l’ensemble de la ligne suivie, peut paraître la chose la plus naturelle ; et, dans ce cas-ci, le mouvement qui aurait porté Mme de Staël à écrire la lettre en question, serait infiniment honorable, et, par conséquent, digne d’elle. […] Il est plus naturel d’admettre une faute d’impression, quand déjà il y en a plusieurs qui sautent aux yeux.
C’est son penchant naturel. […] Les bains, les demi-bains, cette idée, ce semble, toute naturelle et de bon sens, cette chose si salutaire et si adoucissante, ne lui en parlez pas : on en prenait peu alors, et lui moins que personne.
Gœthe n’était pas un physicien, un géomètre ; mais il était un naturaliste, il avait à un haut degré le génie de l’histoire naturelle, le sens et le tact du monde organique, et, de ce côté, en se confiant en sa force, il ne se trompait pas. […] Montrant un jour à Eckermann deux de ses poésies dont l’intention était très-morale, mais où le détail offrait par places trop de naturel et de vérité, il se proposait bien de les garder en portefeuille, disait-il, de peur de scandaliser : « Si l’intelligence, si une haute culture d’esprit, remarquait-il à ce propos, étaient des biens communs à tous les hommes, le poëte aurait beau jeu ; il pourrait être entièrement vrai et n’éprouverait pas de crainte pour dire les meilleures choses.
Sa préconisation absolue de l’ancien régime, en ce qui est de l’état des populations rurales, peut se résumer en ces termes ; « Dans le cas de maladie, de vieillesse ou d’incendie, le presbytère, l’abbaye ou le château voisin devenaient la ressource naturelle de la victime de ces calamités. […] Cette conception de la famille-souche, cette reconstitution naturelle des grandes maisons sur une base moderne, qui est le noyau, le pivot, la pierre angulaire de la réforme proposée par M.
Quand la nature crée un homme supérieur et d’une supériorité de premier ordre, quand elle l’a fondu et coulé tout d’un jet dans un de ses plus beaux moules humains, si cet homme, après avoir fourni sa grande carrière, tombe ou sort de la scène dans la plénitude de la vie et de ses facultés, sans que la maladie ou l’âge soit venu l’altérer ou l’affaiblir, il est bien clair qu’il est et qu’il a dû rester le même pendant toute cette durée de son rôle actif, que les événements n’ont fait que le produire, un peu plus tôt ; un peu plus tard, sous ses aspects différents, le montrer et le développer plus ou moins dans quelques-unes de ses dispositions naturelles et donner occasion à ses qualités ou à ses défauts primitifs de se manifester dans tout leur relief ou même dans leur exagération ; mais il y avait en lui, dès le principe, le germe et remboîtement de tout ce qui est sorti. […] Quels appuis plus naturels pour moi que mes proches ?
Mais, sans m’engager ici dans les obscurités, même éclaircies, de la loi Sempronia ou de la loi Licinia, je n’ai voulu que faire remarquer en passant le ton naturel et humain avec lequel l’historien caractérise le premier mouvement de Tibérius Gracchus. […] » elle répond par un oui simple en rougissant. « Puis elle leva les yeux, et, n’apercevant sur la physionomie de son père aucun signe de courroux, elle se jeta dans ses bras et l’embrassa comme les demoiselles bien élevées font en pareille occasion. » Toujours un peu d’ironie, on le voit, mais qui ne fait que mieux valoir les sentiments choisis et naturels.
Mais La Fontaine, avec son caractère naturel d’oubliance et de paresse, s’accoutuma insensiblement à vivre comme s’il n’avait eu ni charge ni femme. […] Il sentit vivement le prix de ce bienfait ; et cette inviolable amitié, familière à la fois et respectueuse, que la mort seule put rompre, est un des sentiments naturels qu’il réussit le mieux à exprimer.
Voilà un couple d’espèce nouvelle, puisque son second terme n’est pas un objet dont nous puissions avoir perception et expérience, c’est-à-dire un fait entier et déterminé, mais une portion de fait, un fragment retiré par force et par art du tout naturel auquel il appartient et sans lequel il ne saurait subsister. […] Tout le corps parle ; souvent, à défaut du mot, c’est le geste qui exprime ; une grimace, un haut-le-corps, un bruit imitatif deviennent signes à la place du nom ; pour désigner une allée de vieux chênes, la taille se dresse droite, les pieds se prennent au sol, les bras s’étendent raides, puis se cassent aux coudes en angles noueux ; pour désigner un fourré de chèvrefeuille et de lierre, les dix doigts étendus se recourbent et tracent des arabesques dans l’air, pendant que les muscles du visage se recourbent en petits plis mouvants. — Cette mimique est le langage naturel, et, si vous avez quelque habitude de l’observation intérieure, vous devinez à quel état intérieur elle correspond.
Mais il ne faut pas s’y tromper : cette verve de Beaumarchais n’est pas un jet naturel de belle humeur ; le jet est réglé, dirigé, dispersé, ramassé, par une réflexion très consciente qui calcule l’effet. […] Les deux pièces donnent l’idée d’un dialogue rapide et nerveux, collé sur l’action et agissant lui-même, d’un style apte à passer la rampe, pas très naturel, mais condensé, saisissant, réveillant.
tant de goût pour la gueuserie, tant de férocité dans l’irrévérence, cela n’est pas naturel. […] Et, très évidemment, il n’a pas eu à s’efforcer pour cela, son génie naturel tenant beaucoup d’eux, notamment de François Villon et de Mathurin Régnier.
Quel est, en effet, le symbole le plus naturel du génie de Rousseau ? […] On voit par là combien il importe à l’historien de déterminer dans chaque période quel est le genre, et, si je puis ainsi parler, quel est le degré des beautés naturelles qu’on a su y apprécier.
De petits incidents, tels qu’un Bonaparte qu’on rencontre, sont de ces imprévus qui compliquent la marche naturelle des révolutions. […] C’est le reproche qui lui fut fait dans le temps même pour cet écrit de 1796 : Il est naturel aux infortunés, disait-on, de croire que celui qui développe si bien les causes de leur misère connaît aussi les moyens de les soulager : au contraire, son livre éloigne l’espérance, il n’assigne aucun terme à la Révolution, et on se trouve plus malheureux après l’avoir lu qu’auparavant.
Il est bon de temps en temps de repasser et de se redire ce que signifient ces gloires consacrées : il n’est jamais sans intérêt de ressaisir et de se représenter au naturel l’homme autrefois célèbre qui n’est plus resté pour nous qu’à l’état de nom et d’image. […] Il s’y refusait sans faste, avec une dignité simple et qui laissait voir la hauteur naturelle de l’âme.
Il le range, pour son Contrat social, dans ce qu’il appelle la secte des politiques, gens inutiles et dangereux qui, au lieu de s’appliquer à faire aller la société et à la servir, ont la manie de la décomposer pour en rechercher les raisons et les causes, comme si elle n’était pas chose naturelle et conforme à la nature humaine. […] L’Ancien Régime était à bout ; l’esprit s’était retiré de cette vieille monarchie durant le long affaissement de Louis XV ; ceux mêmes qui en étaient les gardiens naturels y portaient, sans le savoir, les plus rudes atteintes.
Trois fois dans ma vie j’ai eu le bonheur de le voir en des lieux qui lui convenaient à souhait et qui semblaient son cadre naturel : en 1831, à Juilly, sous les beaux ombrages que Malebranche avait hantés ; en 1839, à Rome, sous les arceaux des cloîtres solitaires ; et hier encore, dans les jardins de l’évêché d’Amiens où il vit près de son ami M. de Salinis. […] L’abbé Gerbet, à ces mérites élevés que je n’ai pu que faire entrevoir, mêle une douce gaieté, un agrément naturel et fleuri, qui rappelle, jusque dans les jeux de vacances, l’enjouement des Rapin, des Bougeant et des Bouhours.
L’histoire de l’abbé Prévost commence déjà elle-même à ne plus être de notre temps ni de notre civilisation ; on passe encore sur le manque de cœur de Manon, mais il est difficile de pardonner l’avilissement du chevalier, et il faut le parfait naturel de l’auteur pour nous amener à l’émotion à travers les scènes dégradantes où il nous conduit. […] Une conséquence assez naturelle du surcroît de couleur et d’énergie qu’a employé M.
Avant lui, beaucoup d’autres avaient dit déjà que nul pouvoir humain ne doit être absolu, que la toute-puissance est en soi une chose mauvaise et dangereuse, au-dessus des forces de l’homme, que la démocratie a une tendance naturelle à devenir despotique, et qu’il faut par conséquent la tempérer, la limiter, la contenir par les lois. […] Si mes impressions étaient aussi tristes que vous le pensez, vous auriez raison de croire qu’il y a une sorte de contradiction dans mes conclusions, qui tendent, en définitive, à l’organisation progressive de la démocratie, J’ai cherché, il est vrai, à établir quelles étaient les tendances naturelles que donnait à l’esprit et aux institutions de l’homme un état démocratique.
Ainsi, chez les deux peuples, la marche progressive a été tout à fait naturelle. […] Le bon goût et l’élégance des manières, qui pour être parfaits ont besoin d’être des choses naturelles au lieu d’être des choses apprises, donnent tout de suite de grands avantages aux femmes sur les hommes, et entretiennent dans notre nouveau système social des limites analogues à celles qui existaient auparavant.
Aussi ses vers, loin de paraître communs, ont-ils le charme du naturel et de la grâce. […] Alors ils s’écrient contre les devoirs imposés par la société ; ils les accusent d’étouffer les sentiments naturels, et ne s’aperçoivent pas que les devoirs ne sont autre chose que des sentiments permis et consacrés. […] L’idée de la divinité, un sentiment vague de reconnaissance et de respect pour elle, en un mot ce qu’on a appelé la religion naturelle, tout cela est du domaine de l’imagination. […] De cet esprit naquirent les sciences naturelles ; leur principe, ainsi que nous l’avons dit, fut de considérer la nature en elle-même, abstraction faite de l’effet qu’elle peut produire sur un homme en particulier. […] Les sciences naturelles sont embrassées par un écrivain qui les expose avec génie et leur prête un langage éloquent.