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405. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre troisième »

Par le dogme de la chute, il amena l’homme à se regarder hors de sa condition extérieure hors du temps et du lieu où il vit ; il lui découvrit tous les mystères de son intérieur, et tout ce fonds de malaise qui couve en lui, sous quelque forme de société qu’il vive, irréparable contre-coup d’une première chute. […] Plus tard et principalement au xviie  siècle, il faudra l’entendre de cette profondeur particulière que l’esprit chrétien donne à tous les écrits supérieurs sans exception, même à ceux qu’on pourrait appeler profanes, et qui ont tant profité de ces lumières dont la philosophie chrétienne a éclairé l’intérieur de l’homme. […] On opposait aux œuvres une sorte de christianisme intérieur qui s’entretenait et se renouvelait par la déclaration souvent répétée, et du plus profond de l’âme : La foi justifie saris les œuvres.

406. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre VIII »

La toile se relève sur l’intérieur de M.  […] On peut trouver que Bernard procède avec des façons bien cassantes à cette réforme intérieure, qu’il s’y montre dur et presque bourru : quand on dépouille une femme de ses falbalas, il est convenable de mettre des gants. […] Les huit cent mille francs de madame Fourchambault ne lui ont rapporté que la tyrannie d’une union sans intimité, les aigreurs et les avanies d’un caractère acariâtre, des enfants dévoyés par une éducation insouciante, la ruine de ses affaires et de son crédit : elle a été la plaie et le désordre dans son intérieur.

407. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre VI. Le Bovarysme essentiel de l’humanité »

Mais cela ne fera pas qu’ils soient libres de rien changer à leur disposition intérieure ; ce vain désir n’empêchera pas les uns d’être condamnés à se satisfaire, quelque conséquence sociale qui puisse d’ailleurs en résulter pour eux ; il n’empêchera non plus les autres d’être condamnés à se contraindre, à s’interdire toute joie, en raison de la suprématie dans leur organisme du sentiment du devoir, qui ne cessera de les tenir en laisse à l’écart des plaisirs où ils aspirent. […] Si le châtiment social lui fait défaut, il s’invente avec le remords une peine intérieure et qu’il emporte avec lui. […] Le sentiment du mérite, avec la satisfaction intérieure qu’il apporte à ceux que le sort favorisa d’un équilibre profitable et de facultés en harmonie avec les nécessités du milieu, telle est en effet la face heureuse de cette conception bovaryque en vertu de laquelle l’homme se croit libre de se modifier et de créer sa destinée.

408. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

Le combat intérieur qui la précède est plus magnifique encore, et il est conduit, ravivé, mené à son terme avec un art prodigieux. » De nos jours, un critique, l’un des plus sagaces et aussi l’un des plus sévères qui aient jugé Victor Hugo, — j’ai nommé Edmond Biré, — n’hésite pas à écrire ces lignes : « Si les Misérables avaient été continués et terminés dans le même esprit qui avait présidé à leur conception ; s’ils n’avaient pas été dénaturés, envenimés par les passions de l’auteur devenu démagogue et socialiste ; s’ils n’avaient pas été démesurément enflés par des épisodes qui débordent le cadre primitif, … l’œuvre du poète, qui reste encore très puissante et très belle, serait la plus admirable qu’il eût écrite, une des plus belles de notre littérature. » Tout le monde connaît la thèse, l’idée maîtresse des Misérables. […] Qu’on se rappelle le début du premier volume, le vol chez Mgr Myriel et le pardon de l’évêque, la lutte intérieure, chez Jean Valjean, entre l’instinct mauvais et la conscience qui s’éveille : quel est l’ouvrier, l’apprenti enfermé avec son livre, un soir de dimanche, qui ne comprendra pas cela ? […] Remarquez d’ailleurs, qu’en peinture également, toutes nos préférences s’attachent aux peintres de la vie d’intérieur… Une vieille fille qui file près d’une fenêtre, d’où tombe un rayon de soleil ; une porte s’entrouvrant sur une chambre qu’on devine paisible ; la perspective d’une rue calme et déserte, retiennent longtemps notre attention et nous suggèrent mille pensées.

409. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre I. La conscience et la vie »

Ne sont-ce pas les moments de crise intérieure, où nous hésitons entre deux ou plusieurs partis à prendre, où nous sentons que notre avenir sera ce que nous l’aurons fait ? […] Il est difficile de jeter un coup d’œil sur l’évolution de la vie sans avoir le sentiment que cette poussée intérieure est une réalité. […] L’une et l’autre manifestent une poussée intérieure, le double besoin de croître en nombre et en richesse par multiplication dans l’espace et par complication dans le temps, enfin les deux instincts qui apparaissent avec la vie et qui seront plus tard les deux grands moteurs de l’activité humaine : l’amour et l’ambition.

410. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mélanges de critique religieuse, par M. Edmond Scherer » pp. 53-66

J’aurais eu regret cependant que l’auteur eût complètement supprimé dans le volume offert à notre public deux ou trois morceaux. « La crise de la foi » est un beau chapitre intérieur, et qui rappelle, à quelques égards, le touchant monologue de Jouffroy au moment où il s’aperçut que la foi première sur laquelle il s’appuyait s’était écroulée dans son cœur. […] Ces trente pages sont à la fois une réfutation solide et un portrait. — Et cependant (car je suis l’homme des doutes et des repentirs), tout en reconnaissant, surtout quand je considère certains disciples, que cette conception théocratique, telle que l’a présentée de Maistre, est en effet comme une armure du Moyen Âge qu’on va prendre à volonté, dans un vestiaire ou dans un musée et qu’on revêt extérieurement sans que cela modifie en rien le fond, je me demande, quand je considère d’autres disciples, s’il n’y avait pas un côté mystique en lui, plus intérieur, et répondant aux sources secrètes de l’intelligence et de l’âme.

411. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’impératrice Catherine II. Écrits par elle-même, (suite.) »

Un jour qu’il était allé avec un de ses amis, le comte de Horn, faire une visite au grand-duc à sa maison d’Oranienbaum, le grand-duc, qui avait la noce d’un de ses chasseurs en tête et qui voulait y aller boire, les planta là, et la grande-duchesse dut leur faire les honneurs de la maison : « Après le dîner, je menai la compagnie qui m’était restée, et qui n’était pas fort nombreuse, voir les appartements intérieurs du grand-duc et de moi. […] Il est constant néanmoins, à lire ce que nous avons sous les yeux que, dans, sa fermeté de pensée, Catherine avait prévu le cas extrême où elle aurait été prise au mot pour sa demande de renvoi, et elle exprime en cette circonstance les dispositions de son âme en des pages admirables et qui font le plus grand honneur en elle au philosophe et au moraliste : c’est là un autre portrait d’elle et qui, pour être tout intérieur, ne paraîtra pas moins digne d’être mis à côté et en regard de tous ceux que l’on possède déjà, soit du portrait de la grande-duchesse que nous avons découpé précédemment, soit de ceux de l’Impératrice que l’on doit à la plume des Rulhière, des prince de Ligne et des Ségur.

412. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite.) »

C’est surtout dans son second recueil intitulé : Station poétique à l’abbaye de Haute-Combe, dont deux seules livraisons parurent de son vivant et qui ne fut publié en entier qu’après sa mort (1847), c’est dans cette suite de journées et de veilles funèbres que se déroule tout l’orage intérieur, l’abîme et la profondeur des souffrances et des agonies auxquelles il était en proie. […] si mes doigts jamais ne te rendent sensible, Poëme intérieur dont je suis consumé, Tu chanteras en moi sur la lyre invisible Que l’art suspend au cœur de ceux qui l’ont aimé.

413. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Le Brun »

Aussi, plus tard, bien qu’il conservât au fond l’indépendance intérieure qu’il avait annoncée dès ses premières années, on le voit toujours au service de quelqu’un. […] On lui tiendra compte de ses efforts, de ses veilles, de sa poursuite infatigable de la gloire, de la tradition lyrique qu’il soutint avec éclat, de cette flamme intérieure enfin, qui ne lui échappait que par accès, et qui minait sa vie.

414. (1874) Premiers lundis. Tome II « Jouffroy. Cours de philosophie moderne — II »

Un individu humain quelconque, bien organisé toutefois, pris au hasard dam l’époque présente ou dans toute autre époque, et se traitant lui-même par la méthode expérimentale intérieure, découvrira, autant qu’il est donné à l’homme de le faire, sa destinée propre, et la destinée des autres hommes ses semblables, et la destinée de l’espèce tout entière ; il saura déterminer, autant que cela nous est possible, la loi du passé et de l’avenir de l’humanité. […] La vie de l’homme en effet lui afflue de tous côtés par les relations qu’il soutient avec les autres hommes et avec la nature ; cette vie qu’il reçoit de l’univers, il la rend, il la rayonne à son tour en vertu d’une force propre et d’un foyer intérieur.

415. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre II. Diderot »

Il n’y aperçoit plus cette nature intérieure que le xviie  siècle étudiait surtout, dont Descartes croyait l’existence plus assurée et la connaissance plus facile que de la nature extérieure. […] Mais, avec un instinct étonnant d’art objectif, tout ce qui était sien s’est incorporé à la substance du personnage original dont la vision intérieure guidait sa plume.

416. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Barbey d’Aurevilly. »

tout ce que les hommes se disent entre eux se ressemble : les idées qu’ils échangent sont presque toujours les mêmes dans toutes leurs conversations ; mais dans l’intérieur de toutes ces machines isolées quels replis, quels compartiments secrets ! […] Mais, par contre, ne vous est-il pas arrivé, en présence de tel homme obscur ou célèbre, de sentir que vous êtes bien réellement devant un masque impénétrable dont l’intérieur ne vous sera jamais révélé ?

417. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Les Confidences, par M. de Lamartine. (1 vol. in-8º.) » pp. 20-34

Des yeux d’un bleu noir comme ceux de ma mère ; des traits accentués, mais adoucis par une expression un peu pensive, comme était la sienne ; un éblouissant rayon de joie intérieure éclairant tout ce visage ; des cheveux très souples et très fins, d’un brun doré comme l’écorce mûre de la châtaigne, tombant en ondes plutôt qu’en boucles sur mon cou bruni par le hâle (je supprime, j’en demande pardon à l’auteur, quelques détails sur la finesse de la peau)… En tout, le portrait de ma mère avec l’accent viril dans l’expression : voilà l’enfant que j’étais alors. […] Tantôt on retrouve en elle ce sourire intérieur de la vie, cette tendresse intarissable de l’âme et du regard, et surtout ce rayon de lumière si serein de raison, si imbibé de sensibilité, qui ruisselait comme une caresse éternelle de son œil un peu profond et un peu voilé, comme si elle n’eût pas voulu laisser jaillir toute la clarté et tout l’amour qu’elle avait dans ses beaux yeux.

418. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de mademoiselle Bertin sur la reine Marie-Antoinette »

Que les hommes qui vivent dans une révolution, et qui en sont ou spectateurs éclairés ou acteurs principaux, lèguent à la postérité le dépôt fidèle de leurs souvenirs, c’est un devoir que nous réclamons d’eux ; que ceux mêmes qui, dans une situation secondaire, n’ont vu qu’un coin du vaste tableau et n’en ont observé que quelques scènes, nous apportent leur petit tribut de révélations, il sera encore reçu avec bienveillance ; et si surtout l’auteur nous peint l’intérieur d’une cour dans un temps où les affaires publiques n’étaient guère que des affaires privées, s’il nous montre au naturel d’augustes personnages dans cette transition cruelle de l’extrême fortune à l’extrême misère, notre curiosité avide pardonnera, agrandira les moindres détails ; impunément l’auteur nous entretiendra de lui, pourvu qu’il nous parle des autres ; à la faveur d’un mot heureux, on passera à madame Campan tous les riens de l’antichambre et du boudoir : mais que s’en vienne à nous d’un pas délibéré, force rubans et papiers à la main, mademoiselle Rose Bertin, modiste de la reine, enseigne du Trait galant, adressant ses Mémoires aux siècles à venir, la gravité du lecteur n’y tiendra pas ; et, pour mon compte, je suis tenté d’abord de demander le montant du mémoire.

419. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre IV. — Molière. Chœur des Français » pp. 178-183

Pour comprendre ses écrits, tantôt il faut relire les historiens, et suivre les phases diverses d’une guerre on les mouvements d’une révolution intérieure ; tantôt il faut demander des détails à un scholiaste, et scruter jusqu’au dégoût les mystères scandaleux d’une biographie oubliée262.

420. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre premier »

C’est le moyen de connaître la vie intérieure de chacun de nos soldats, le secret du ressort héroïque de la France.‌

421. (1883) Essais sur la littérature anglaise pp. 1-364

Bien loin de faire de l’homme extérieur et physique le point de départ de l’homme moral, elles n’admettent l’homme extérieur que comme la traduction de l’homme intérieur. […] Taine, trois grandes forces primordiales concourent à la création de l’homme intérieur : la race, le milieu, le moment. […] D’ailleurs, le lecteur comprendra sans peine la nature étroite des relations des diverses provinces de la civilisation morale, s’il admet que la littérature n’est autre chose que la traduction de l’homme intérieur. […] Ainsi l’homme intérieur est, au fond, identique dans toutes les races et préexiste à toute action des forces auxquelles il est soumis. […] L’homme intérieur n’est donc pas créé, mais seulement dégagé et traduit par toutes ces forces de race, de milieu et de moment qui lui sont des auxiliaires en même temps que des obstacles.

422. (1899) La parade littéraire (articles de La Plume, 1898-1899) pp. 300-117

La première, c’est de veiller au développement sentimental des jeunes auteurs, de les aider dans la recherche de leurs dons personnels, d’avoir sur eux une occulte influence, en se gardant bien de déparer leur grâce intérieure, de froisser leur sensibilité native. […] Nous pénétrerons ensemble, nous déchirerons le travesti des âmes, nous connaîtrons de terribles tragédies intérieures. […] Camille Mauclair se décider sur le tard à abandonner Éleusis et les mornes architectures de la Cité Intérieure, pour se mêler à la vie publique et nous donner dans l’Aurore d’intéressants commentaires sur l’évolution sociale. […] Ce caractère sentimental apparaît surtout dans ses œuvres de poésie, où il s’est efforcé de traduire, avec des mots en grisaille et des métaphores en demi-teinte les mélancoliques aspects de son songe intérieur. […] Elles nous apparaissent comme d’émouvantes monographies de races mourantes, figées dans un songe passé, résorbées dans une existence intérieure, silencieuse comme des logis clos.

423. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Mémoires du général La Fayette (1838.) »

Ce côté intérieur, chez La Fayette, ne déjouait pas l’autre, extérieur, et ne le démentait pas, comme il arrive trop souvent pour les personnages de renom ; il y avait accord au contraire, sur beaucoup de points, dans la continuité des sentiments, dans la tenue et la dignité sérieuse des manières, et par une simplicité de ton qui ne devenait jamais de la familiarité. […] Quoi qu’il en soit (rare éloge et peut-être applicable à lui seul entre les hommes de sa nuance qui ont fourni au long leur carrière), chez La Fayette le rôle extérieur et l’inspiration intérieure se rejoignaient, se confirmaient pleinement, constamment ; l’homme d’esprit, poli et fin, intéressant à entendre, qu’on rencontrait en l’approchant, ne faisait qu’une agréable diversion entre le personnage public toujours prochain et l’intérieur moral toujours présent, et n’allait jamais jusqu’à interrompre ni à laisser oublier la communication de l’un à l’autre. […] Beaucoup de persécutions ont cessé, beaucoup d’autres ont été redressées ; la tranquillité intérieure a été rétablie sur les ruines de l’esprit de parti ; et si l’on suivait les derniers résultats de l’influence française en Europe, on verrait qu’il s’exerce continuellement une force de choses nouvelle qui, en dépit de la tendance personnelle du chef, rapproche les peuples vaincus des moyens d’une liberté future. […] Cette lettre démontre de plus, à mes yeux, que ce qui arriva, à partir du 8 août 1830, ne déjoua pas l’idée intérieure de La Fayette autant que lui-même le crut et le ressentit. […] Ainsi encore à propos des tiraillements intérieurs qui, après la conclusion de la paix et avant l’établissement de la Constitution fédérale, allaient à déconsidérer l’Amérique aux yeux de l’Europe attentive et surtout des cours méfiantes : « Malheureusement pour nous, écrit Washington (10 mai 1786), quoique tous les récits soient fort exagérés, notre conduite leur donne quelque fondement.

424. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VI. Les romanciers. » pp. 83-171

. —  Sa fougue intérieure. —  Sa volonté obstinée. —  Sa patience au travail. —  Son bon sens méthodique. —  Ses agitations religieuses. —  Sa piété finale. […] Il a cette force de volonté, cette fougue intérieure, ces sourdes fermentations d’imagination violente qui jadis faisaient les rois de la mer, et qui aujourd’hui font les émigrants et les squatters. […] Tous ces romans sont des romans de caractères ; c’est que les hommes de ce pays, plus réfléchis que les autres, plus enclins au mélancolique plaisir de l’attention concentrée et de l’examen intérieur, rencontrent autour d’eux des médailles humaines plus vigoureusement frappées, moins usées par le frottement du monde, et dont le relief intact est plus visible qu’ailleurs. […] Voilà le domaine de Fielding ; son art et son plaisir, comme celui de Molière, consistent à lever un coin du manteau ; ses personnages paradent d’un air raisonnable, et tout d’un coup, par une ouverture, le lecteur aperçoit le fourmillement intérieur des vanités, des folies, des concupiscences et des rancunes secrètes qui les font marcher. […] On y voit les sources de cette vertu, née du christianisme et de la bonté naturelle, mais alimentée longuement par la réflexion intérieure.

425. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre III. La critique et l’histoire. Macaulay. »

Il ne condamne point les actions de Strafford ou de Charles ; il les explique ; il montre dans Strafford le naturel impérieux, le génie dominateur qui se sent né pour commander et briser les résistances, qu’un penchant invincible révolte contre la loi ou le droit qui l’enchaîne, qui opprime par une sorte de nécessité intérieure, et qui est fait pour gouverner comme une épée pour frapper. […] Aussi éprouve-t-on un contentement profond et une sorte de paix intérieure, lorsqu’on quitte tant de doctrines écloses au jour le jour dans nos livres ou dans nos revues, pour suivre la marche assurée d’un guide si clairvoyant, si réfléchi, si instruit, si capable de nous bien conduire. […] Cette abondance de pensée et de style, cette multitude d’explications, d’idées et de faits, cet amas énorme de science historique va roulant, précipité en avant par la passion intérieure, entraînant les objections sur son passage, et ajoutant à l’élan de l’éloquence la force irrésistible de sa masse et de son poids. […] Les petites anecdotes curieuses, les détails d’intérieur, la description d’un mobilier viennent couper l’exposé d’une guerre sans le rompre. […] Bien plus, par la structure de son esprit, par son éloquence et par sa rhétorique, il est latin ; en sorte que la charpente intérieure de son talent le range parmi les classiques ; c’est seulement par son vif sentiment du fait particulier, complexe et sensible, par son énergie et sa rudesse, par la richesse un peu lourde de son imagination, par l’intensité de son coloris, qu’il est de sa race.

426. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1865 » pp. 239-332

Un intérieur d’art, une resserre de livres, de lithographies, d’esquisses peintes, de dessins, de faïences ; un jardinet ; des femmes ; une petite fille ; un petit chien, et des heures où l’on feuillette des cartons effleurés par la robe d’une jeune, grasse et gaie chanteuse, au nom de Mlle Hermann. […] * * * — … Banville fait aujourd’hui le croquis de Rouvière et de son intérieur. […] Les grandes folies, les grandes dépenses, les grandes magnificences intérieures du temps de François Ier sont remplacées par des appartements sobres, des châteaux sévères, des salles nécessiteuses, des chambres à faire des comptes, enfin de petites bastilles de bourgeois serrés, à l’image de Villebon. […] Ici, c’est un autre intérieur, de petites pièces, des meubles de damas, des gravures consacrées : la Vierge à la Chaise, Napoléon Ier, des photographies parmi lesquelles un portrait de Delaunay en regard d’un portrait de femme. […] Et comme on parle de l’amour et de tous les sentiments complexes qui peuvent y entrer, il raconte l’histoire de son ami Malleville, enlevant une religieuse en diligence, vivant trois jours avec elle, au bout desquels, en apprenant qu’il était protestant, elle éprouva une telle révolution intérieure, que sa digestion fut dérangée.

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