Cette Révolution qui, tout en le réduisant, lui, à la misère et à l’exil, a changé l’Europe, ce n’est rien. […] Mais on dirait que sa disposition d’âme a changé à mesure qu’il écrivait. […] Mes écrits de moins dans mon siècle, y aurait-il eu quelque chose de changé aux événements et à l’esprit de ce siècle ? […] Lui-même aura changé au cours de ces lectures, et le monde aussi aura changé autour de lui. […] Pensez-vous que je sois assez bête pour me croire changé de nature parce que j’ai changé d’habit ?
Je n’ai plus qu’une passion, c’est la soif de changer d’opinion, le délire palinodique. Il me semble que changer d’opinion ce serait recommencer une nouvelle vie. […] Jaurès a évolué, mais n’a pas du tout changé. […] On nous montre le monde changeant ; nous le trouvons meilleur pour l’avoir vu changer. […] Ensuite on se donne le change à soi-même de la façon suivante.
Il y a cette diférence, dit Ciceron, entre les figures de pensées et les figures de mots, que les figures de pensées dépendent uniquement du tour de l’imagination ; elles ne consistent que dans la maniére particuliére de penser ou de sentir, ensorte que la figure demeure toujours la même, quoiqu’on viène à changer les mots qui l’expriment : de quelque maniére que M. […] Il est si vrai que chaque langue a ses métaphores propres et consacrées par l’usage, que si vous en changez les termes par les équivalans même qui en aprochent le plus, vous vous rendez ridicule. […] Mon génie me porte à raconter les formes changées en de nouveaux corps : il étoit plus naturel de dire, à raconter les corps, c’est-à-dire, à parler des corps changés en de nouvèles formes. […] On comence par atacher à (…) la même idée que nous atachons à notre verbe changer ; doner ce qu’on a pour ce qu’on n’a pas, ensuite sans avoir égard à la phrase latine, on traduit, Faune change le lucrétile pour le lycée : et come cette expression signifie en françois que Faune passe du lucrétile au lycée, et non du lycée au lucrétile, ce qui est pourtant ce qu’on sait bien qu’Horace a voulu dire, on est obligé de recourir à l’hypallage pour sauver le contre-sens que le françois seul présente : mais le renversement de construction ne doit jamais renverser le sens, come je viens de le remarquer ; c’est la phrase même, et non la suite du discours, qui doit faire entendre la pensée, si ce n’est dans toute son étendue, c’est au moins dans ce qu’elle présente d’abord à l’esprit de ceux qui savent la langue. […] Virgile l’a pris dans un sens actif lorsqu’il a dit : (…) : les fleuves changés, c’est-à-dire, contre leur usage, contre leur nature, arêtèrent le cours de leurs eaux, (…).
Je n’en ai changé ou retranché que les choses qui m’ont paru exiger des corrections, et celles qui, tenant à des localités, eussent perdu leur intérêt pour les lecteurs, toujours plus dédaigneux qu’un auditoire. […] L’implexe, où les intérêts opposés changent les heureux en malheureux, et réciproquement. […] Si la poésie n’a plus le droit de faire des mots, elle a celui de les détourner de leur propre sens, par des alliances qui changent leur signification. […] Son sujet renferme déjà cette particularité de tendre à une double catastrophe, qui change l’infortune des bons en prospérité, et le bonheur des méchants en malheur : élément nouveau à méditer. […] Ne serait-il pas plus raisonnable que le lieu changeât, puisque Voltaire ne se fit aucun scrupule d’altérer l’unité de lieu dans la pièce de Tancrède.
L’érudition ou ce qui pourrait en avoir l’air, en s’appliquant à ces sujets qui en sont si éloignés par nature, change véritablement de nom et prend quelque chose de la piété qui se met en quête vers les moindres reliques d’un mort chéri. […] Craufurd72 rentre tout à fait dans cette opinion qu’on avait généralement, et on sent qu’il ne change d’avis que sur la prétendue preuve écrite. […] Ils changeraient bien leur prétendu bonheur contre vos infortunes. » Un trait bien honorable pour Mlle Aïssé, c’est l’antipathie violente et comme instinctive qu’elle inspirait à Mme de Tencin. […] Va, porte dans son sang la plus subtile flamme ; Change en désirs ardents la glace de son cœur ; Et qu’elle sente la chaleur Du feu qui brûle mon âme ! […] Frappé vivement des objets, il les rend comme la glace d’un miroir les réfléchit, sans ajouter, sans omettre, sans rien changer. » Voilà l’idéal primitif du bien-dire parmi les femmes du xviiie siècle, au moment où elles se détachent du pur genre de Louis XIV.
Cette conscience ne change pas de nature en s’appliquant aux grandes choses de la politique ; elle s’agrandit, voilà tout. […] Alors on n’y veut rien changer, parce qu’on ne juge rien au-dessus d’elle. En poésie on choisit, on ne change pas la nature ; en histoire on n’a pas même le droit de choisir, on n’a que le droit d’ordonner. […] L’honnêteté de son origine, un vote au lieu d’un attentat, une loi au lieu d’une épée au 18 brumaire, et toute la destinée de l’Europe, de la France et de l’homme, était changée. […] Lui parti, tout changeait de face.
La conception mécanique du style se change ainsi, comme on pouvait s’y attendre chez un Anglais, en une conception utilitaire ; le comfort du lecteur ou de l’auditeur, pour ne pas dire sa paresse, devient le régulateur de l’écrivain : faire tout saisir en peu de temps, voilà le but, time is money. […] Dans les plus belles pages d’Hugo il y a bien des passages gâtés par la superstition de la rime riche ; voyez même le Satyre : Oui, l’heure énorme vient, qui fera tout renaître, Vaincra tout, changera le granit en aimant, Fera pencher l’épaule en morne escarpement Et rendra l’impossible aux hommes praticable. […] Puisque la poésie est tout entière non dans une manière déterminée d’exprimer la pensée, mais dans la pensée émue elle-même, puisqu’elle traverse les formes et les temps alors que le vers change avec les pays et les époques, pourquoi vouloir la renfermer dans une forme à l’exclusion de toute autre ? […] Selon le caractère du moment, elle prend l’allure du grave alexandrin ou celle des vers plus courts et plus variés : certes, le poète a toute liberté, en présence d’un changement marqué dans le sentiment ou l’émotion, de changer aussi de rythme ; mais en prose, c’est à chaque instant que la pensée se taille sa forme et sa mesure, chacun de ses mouvements se traduit aussitôt par le nombre des mots et la coupe des phrases. […] C’est ainsi qu’une statue, pour être véritablement œuvre d’art, ne communique pas à l’homme qu’elle représente l’immobilité, mais donne plutôt à un mouvement qui changeait avec l’instant, à une vie fuyante et fragile la durée et l’inaltérabilité des choses éternelles.
Ou plutôt, à mesure que nos sens s’affinent, que notre intelligence s’élargit, plus cosmopolite, plus compréhensive, le prisme à travers lequel se réfracte le réel change de couleur. […] Or cette double interprétation varie d’après l’idée que chacun se fait de la vie et le monde change de nuance suivant la projection lumineuse de notre philosophie propre. […] Mais veut-il l’exprimer, l’objectiver, la réfléchir dans le miroir de l’intelligence discursive pour en faire participer ses concitoyens, alors tout change. […] « Bref, le mot aux contours bien arrêtés, le mot brutal, qui emmagasine ce qu’il y a de stable, de commun et par conséquent d’impersonnel dans les impressions de l’humanité, écrase ou tout au moins recouvre les impressions délicates et fugitives de notre conscience individuelle35. » Sitôt qu’on pénètre à l’intérieur de la réalité vivante, l’expression, quelque creusée qu’elle soit, se brise sous la poussée de l’idée, et sa plus intime finesse se change en marbre qui s’effrite. […] La manœuvre seule a changé. » 24.
RAOUL. — En changer ? […] La nuit vient, endeuille l’espace, change les massifs de feuillages en rideaux de guipures, apaise les reflets sur l’eau, neutralise les couleurs. […] Sa voix et son geste ont changé. […] Eh bien, l’arrivée de l’aîné des Colbert changea cette disposition. […] Il n’avait point changé de contenance.
Et ce souvenir, cette persuasion vont en se fortifiant en lui à mesure qu’il réussit à se donner à lui-même l’objectivité littéraire, à se changer en une œuvre, comme si d’être assuré au moins de cette réalité, ressemblante mais extérieure à lui-même, lui donnait de plus en plus de force pour regarder en face la grande illusion que sont êtres et gens. […] Autrement dit son effort sur l’espace va se changer en un effort sur le temps. […] Devant le monstre qu’est l’amour, si nous faisons preuve de cette « virilité mentale » qu’Auguste Comte signale comme le trait essentiel de l’esprit positif, nous le voyons aussitôt s’évanouir ou se changer en ce monstre tout intérieur, tout solitaire, si j’ose dire, que Proust a décrit. […] Mais l’indifférence que Swann jouait facilement quand Rémi ne pouvait plus rien changer à la réponse qu’il apportait tomba, quand il le vit essayer de le faire renoncer à son espoir et à sa recherche 81. […] Son besoin réaliste se change en le simple besoin de savoir la vérité et ce qu’il cherche désormais à arracher à ses impressions, à tout ce qui vient ébranler ses sens, ce n’est plus qu’une formule où soit décelé ce qu’ils peuvent avoir de général, de perceptible par tous les esprits.
Pour Diomede qui s’amuse à écouter des histoires, et à changer d’armes avec Glaucus, il me semble que son tort est aussi manifeste que celui des autres. […] Ainsi l’ancienne réputation et les langues sçavantes leur imposent, et changent tout à leurs yeux. […] Une autre ressource de modestie pour le poëte sensé, c’est que dans son art même il lui manque toûjours bien des choses ; il ne sçauroit embrasser tous les genres, ni se plier à toutes les manieres ; il a des graces propres, mais dont il est, pour ainsi dire, l’esclave ; il n’en sçauroit changer. […] Nos expressions françoises par elles-mêmes ne jettent point de faux sur une pensée vraye, elles n’en avilissent pas une grande, elles n’en ternissent pas une gracieuse ; mais aussi elles ne sçauroient mettre ni vérité, ni grandeur, ni grace, où il n’y en a pas, qu’en substituant des circonstances qui changent absolument le fond des choses. […] Mais le lecteur, s’il s’en vouloit donner le plaisir, pourroit suppléer lui-même à ces gros volumes dont je lui fais grace ; il pourroit en comparant Homere avec mon imitation, chercher ce qui m’a pû blesser dans ce que je change, et ce qui m’a pû plaire dans la maniere dont je le change.
L'indifférence des esprits et l’insignifiance de la situation ont bien changé depuis trois semaines.
Le monde qu’ils voient est, a été, sera toujours ainsi : ceux qu’il écrase le plus dans son état présent ne travaillent pas à le changer : ils n’en rêvent pas un autre qui serait mieux construit ; ils se persuadent que tout sera bien, s’ils l’amènent à réaliser plus complètement ce qui est contenu dans son principe.
La lecture de son recueil (De l’Angélus de l’aube à l’Angélus du soir) m’a fait changer d’avis.
Présenter au point de vue comique, et dans la partie secrète, une de ces révolutions qui changent les États, telle est l’intention de l’auteur.
Le monsieur Renan de l’année dernière, est vraiment bien changé.
Girac, écrivain de la moyenne classe, versé dans les langues, dans l’histoire & dans la connoissance de l’antiquité, eut le jugement assez droit pour sentir qu’on prenoit le change, qu’on s’égaroit sur le goût.
L’âge philosophique de l’antiquité ne changea rien à cette manière.
Le gouvernement de Rome fut, dans son origine, plus aristocratique que monarchique, et malgré l’expulsion des rois, il ne changea point de caractère, jusqu’à l’époque où les plébéiens acquirent le droit des mariages solennels et participèrent aux charges publiques.
Non, ce n’était pas du Voltaire, parce que Voltaire était sincère, passionné, possédé jusqu’à son dernier soupir du désir de changer, d’améliorer, de perfectionner les choses autour de lui ; parce qu’il avait le prosélytisme du bon sens ; parce que, jusqu’à sa dernière heure, et tant que son intelligence fut présente, il repoussait avec horreur ce qui lui semblait faux et mensonger ; parce que, dans sa noble fièvre perpétuelle, il était de ceux qui ont droit de dire d’eux-mêmes : Est deus in nobis ; parce que, tant qu’un souffle de vie l’anima, il eut en lui ce que j’appelle le bon démon, l’indignation et l’ardeur. […] Ce n’est pas que ses sentiments sur le fond des choses eussent le moins du monde changé. […] À peine eut-il fermé les yeux (et j’emprunte à cet endroit le récit du témoin cité par sir Henry Bulwer) que la scène changea brusquement : « On aurait pu croire qu’une volée de corneilles venait subitement de prendre son essor, si grande fut la précipitation avec laquelle chacun quitta l’hôtel, dans l’espoir d’être le premier à répandre la nouvelle au sein de la coterie ou du cercle particulier dont il ou elle était l’oracle.
Quand tout change pour toi, la nature est la même. […] Jocelyn, lorsqu’il s’était informé de la santé de cette mère bienaimée auprès de sa sœur lors de leur retour, avait dit avec cette beauté de cœur qui n’est qu’à lui : Mais, dis-moi, rien n’a-t-il changé dans ses beaux traits ? […] Mais quand il la revoit si changée, quelle douleur est la sienne, mêlée de funèbre pressentiment !
Mais l’imitation et l’autorité changent le caractère. […] La chose est pourtant la même, et rien n’a changé que lui. […] Mais la vérité seule est une, est éternelle ; Le mensonge varie, et l’homme trop fidèle Change avec lui : pour lui les humains sont constants, Et roulent de mensonge en mensonge flottants… Ici, il y a lacune ; le canevas en prose y supplée : « Mais quand le temps aura précipité dans l’abîme ce qui est aujourd’hui sur le faîte, et que plusieurs siècles se seront écoulés l’un sur l’autre dans l’oubli, avec tout l’attirail des préjugés qui appartiennent à chacun d’eux, pour faire place à des siècles nouveaux et à des erreurs nouvelles… Le français ne sera dans ce monde nouveau Qu’une écriture antique et non plus un langage ; Oh !