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1558. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le cardinal de Bernis. (Fin.) » pp. 44-66

Voltaire le complimente au moment où il apprend qu’il va être promu au cardinalat : « Je dois prendre plus de part qu’un autre à cette nouvelle agréable, puisque vous avez daigné honorer mon métier avant d’être de celui du cardinal de Richelieu. » Il pousse la flatterie en ce moment jusqu’à lui dire : « Je ne sais pas si je me trompe, mais je suis convaincu qu’à la longue votre ministère sera heureux et grand ; car vous avez deux choses qui avaient auparavant passé de mode, génie et constance. » La correspondance ensuite ne reprend que trois ans après, pendant la disgrâce de Bernis (octobre 1761) : « Monseigneur, béni soit Dieu de ce qu’il vous fait aimer toujours les lettres ! […] Ce sont moins des remarques, dit-il, que des doutes : « J’aime votre gloire, c’est ce qui me rend peut-être trop difficile. » Puis il félicite Voltaire de ce talent que Dieu lui a donné, de corriger les ridicules de son siècle, et de les corriger en riant, et en faisant rire ceux qui ont conservé le goût de la bonne compagnie.

1559. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire du règne de Henri IV, par M. Poirson » pp. 210-230

» Henri IV a plus que le bon sens qui plante ses jalons sur la route ; il a l’éclair et l’illumination dans les périls, le rayon qui semble venir d’en haut : Les ignorants, conclut Du Fay, appelaient cela bonheur et félicité ; mais nous qui savons la vérité le devons nommer grâce et faveur de Dieu le grand monarque, le Dieu des batailles, et en tirer de là une conclusion nécessaire, que ce grand ouvrier ne fait rien à demi, et que, puisqu’il a si heureusement commencé son ouvrage en ce petit berger, il l’achèvera entièrement à sa gloire.

1560. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La femme au XVIIIe siècle, par MM. Edmond et Jules de Goncourt. » pp. 2-30

Elle domine partout où elle se trouve, et elle fait toujours la sorte d’impression qu’elle veut faire ; elle use de ces avantages presque à la manière de Dieu : elle nous laisse croire que nous avons notre libre arbitre, tandis qu’elle nous détermine… Aussi, ceux qu’elle punit de ne la point aimer pourraient lui dire : Vous l’auriez été, si vous aviez voulu l’être 2. […] Tout à coup, étant tombée sur deux ou trois prières particulières qui lui parurent bizarres et de mauvais goût, elle ne put s’empêcher de le dire ; et comme Mme de Genlis se hasardait à lui représenter qu’en fait de prières Dieu s’attachait sans doute à l’intention plutôt qu’aux paroles et au ton : «  Eh bien !

1561. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Œuvres de Louise Labé, la Belle Cordière. »

Ce n’est pas une Maintenon, grâce à Dieu ! […] La trompette finale a sonné : tous les morts se réveillent, mais il y en a parmi eux (et ce ne sont pas les coupables) qui s’obstinent à rester sourds au clairon de l’Ange et à ne pas vouloir se lever ; on entend seulement leur voix et leur refus monter en paroles déchirantes jusqu’au trône de Dieu : Quoi !

1562. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo en 1831 »

Pain merveilleux qu’un Dieu partage et multiplie ! […] Si parfois de mon sein s’envolent mes pensées, Mes chansons par le monde en lambeaux dispersées ; S’il me plaît de cacher l’amour et la douleur Dans le coin d’un roman ironique et railleur ; Si j’ébranle la scène avec ma fantaisie, Si j’entre-choque aux yeux d’une foule choisie D’autres hommes comme eux, vivant tous à la fois De mon souffle, et parlant au peuple avec ma voix ; Si ma tête, fournaise où mon esprit s’allume, Jette le vers d’airain, qui bouillonne et qui fume, Dans le rhythme profond, moule mystérieux, D’où sort la Strophe, ouvrant ses ailes dans les cieux ; C’est que l’amour, la tombe, et la gloire, et la vie, L’onde qui fuit, par l’onde incessamment suivie, Tout souffle, tout rayon, ou propice ou fatal, Fait reluire et vibrer mon âme de cristal, Mon âme aux mille voix, que le Dieu que j’adore Mit au centre de tout comme un écho sonore !

1563. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LOYSON. — POLONIUS. — DE LOY. » pp. 276-306

Descarte en vain se cherche au bout d’un syllogisme ; En vain vous trouvez Dieu dans un froid argument : Toute raison n’est pas dans le raisonnement. […] Ainsi encore, par exemple : Celui qui dès sa naissance Fut soumis à la puissance Du Dieu du sacré vallon, Des combats fuyant la gloire, Aux fastes de la victoire N’ira point graver son nom.

1564. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre I. Roman de Renart et Fabliaux »

Voici le montage de Renart, dont les pacifiques hommes de Dieu ne tireront guère plus de satisfaction que de Rainoart au tinel. […] Nous apprenons comment se jouait une partie de dés au xiiie  siècle, de quels cris de joie ou de colère les joueurs saluaient le point qu’ils amenaient, et que le perdant jurait par le corps de Dieu ou des saints.

1565. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre II. Clément Marot »

De là son mysticisme : elle aime Dieu passionnément, d’une libre et vive tendresse qui déborde hors de tous les cadres artificiels des idées. De là son amour fraternel : elle se donne au roi comme à Dieu, d’une pure ferveur, par un entier sacrifice.

1566. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Biographie de Camille Desmoulins, par M. Éd. Fleury. (1850.) » pp. 98-122

Et, selon sa détestable habitude de ne point respecter les croyances d’autrui, il apostrophe les ecclésiastiques qui ont voté pour le décret ; après mainte épithète injurieuse : « Ne voyez-vous donc pas, leur crie-t-il, que votre Dieu n’aurait pas été éligible ?  […] Il en est perpétuellement ainsi de Camille ; il est homme à associer jusqu’à la fin sous sa plume Pindare et Piron (on l’a vu), Corneille et le compère Mathieu, le Palais-Royal (Dieu me pardonne !)

1567. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Henri Heine »

» « Oui, je suis revenu à Dieu. » et ailleurs, dans cette préface du Romancero qui est sa confession finale, comme l’enfant prodigue, après avoir gardé les pourceaux chez les Hegeltiens : « Le mal de la patrie céleste m’a saisi et m’a entraîné par monts et par vaux, à travers les sentiers les plus ardus de la dialectique. En roule, j’ai rencontré le Dieu des panthéistes, mais je n’ai su qu’en faire, ce pauvre être étant vague et tout mêlé au monde ; il y est emprisonné, et vous bâille au nez, sans volonté et sans pouvoir.

1568. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre II : De la méthode expérimentale en physiologie »

Enfin ils le placent jusqu’en Dieu lorsqu’ils lui prêtent une volonté absolue, supérieure au bien et au mal, au vrai et au faux, décidant et créant par un sic volo, sic jubeo absolu. […] Il est vrai que, si l’on remonte jusqu’à la cause créatrice, jusqu’à la cause suprême, on doit croire que tous les phénomènes de la nature sont les produits d’une cause libre ; mais ce n’est pas de celle-là que nous parlons, ce n’est pas de la liberté de Dieu qu’il s’agit, c’est de la mienne, de la vôtre, de celle des autres hommes : il s’agit en un mot de la liberté d’une cause seconde appelée l’homme, et si cette cause seconde est assimilée aux autres causes qui agissent dans la nature, on ne voit plus à quels signes et à quelles conditions se manifesterait sa liberté.

1569. (1860) Ceci n’est pas un livre « Hors barrières » pp. 241-298

— Dieu est juste ! […] Ils me font revenir en mémoire cette parole d’un ami : « Dieu nous a donné la nature pour nous consoler des petits jeunes gens. » Et, les montrant d’une main, mon ami m’indiquait de l’autre la Maladetta avec ses effets de neige étincelants, ses arêtes aiguës qui prennent sous le soleil des teintes ardoisées, — et ses précipices aussi pittoresques et aussi dangereux que peut les souhaiter un Anglais atteint d’un spleen à son dernier période.

1570. (1920) Action, n° 4, juillet 1920, Extraits

Elle lance son cosmorama… en un paroxysme extatique, en une tristesse martyrisante, en une douce et musicale élégie, avec la simultanéité de sentiments qui s’entrechoquent, dans la destruction chaotique de la langue, dans la caricature térébrante de l’enfer terrestre, dans sa nostalgie démente de Dieu, de la bonté, de l’amour et de la fraternisation. […] Son pathétique moralise, car les malédictions et les anathèmes dont il accable Dieu et les hommes, reposent sur sa volonté ferme et inébranlable de changer le contenu du monde.

1571. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Philarète Chasles » pp. 147-177

Il n’a trouvé, enfin, en Galilée, qu’un pauvre caractère, qui n’avait rien de ce qui fait le grand homme quoiqu’il fût un formidable mathématicien, un de ces êtres infirmes qu’on punit maternellement, comme un vieil enfant plein de génie, mais aussi d’obstination et de désobéissance, en lui donnant pour noir cachot un palais Italien, au centre d’une belle terre italienne de douze arpents sur laquelle il pouvait promener ses soixante-quinze ans et ses gouttes, en y ajoutant pour geôliers son ami, l’archevêque de Sienne, et ses propres filles, à lui, Galilée, ses filles qu’il adorait, deux religieuses qui lui parlaient de Dieu, ce dont il avait très probablement grand besoin. […] Dans sa Psychologie sociale, ce qu’il dit des plus célèbres de ceux qu’il rencontre sur le terrain de la littérature est incroyable de préoccupation, et d’une préoccupation qui va jusqu’à la perte de la mémoire, la méconnaissance de ce qui est, et la frontière (Dieu me pardonne !)

1572. (1868) Curiosités esthétiques « VII. Quelques caricaturistes français » pp. 389-419

Les quelques milliards d’animalcules qui broutent cette planète n’ont été créés par Dieu et doués d’organes et de sens que pour contempler le soldat et les dessins de Charlet dans toute leur gloire. […] « Un petit baiser, ma bonne dame charitable, pour l’amour de Dieu !

1573. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVIII. Des obstacles qui avaient retardé l’éloquence parmi nous ; de sa renaissance, de sa marche et de ses progrès. »

Les grands objets inspirent de grandes idées ; il est impossible de n’être pas quelquefois sublime en parlant de Dieu, de l’éternité et du temps. […] L’éloquence s’éleva donc surtout dans la chaire, et c’est là qu’elle parvint à sa plus grande hauteur ; car pour être vraiment éloquent, on a besoin d’être l’égal de ceux à qui l’on parle, quelquefois même d’avoir ou de prendre sur eux une espèce d’empire ; et l’orateur sacré parlant au nom de Dieu, peut seul déployer dans les monarchies devant les grands, les peuples et les rois, cette sorte d’autorité et cette franchise altière et libre, que dans les républiques l’égalité des citoyens, et une patrie qui appartenait à tous, donnait aux anciens orateurs.

1574. (1892) Un Hollandais à Paris en 1891 pp. -305

Mais, nom de Dieu ! […] « Nom de Dieu ! […] Et elles ont raison, nom de Dieu ! […] de la communion par laquelle je participe au corps de Dieu ! […] Ceci n’est pas dit pour moi, Dieu merci, non.

1575. (1924) Souvenirs de la vie littéraire. Nouvelle édition augmentée d’une préface-réponse

Une fois embarqué avec lui, Dieu sait à quelle heure on rentrait chez soi ! […] N’êtes-vous pas à présent un ami de Dieu ?  […] Qu’est-ce que ce Dieu qui veut de pareilles choses ? […] La vie n’aurait aucun sens, si Dieu existait. […] Il me reçut et m’encouragea aimablement  : « Quelle que soit, me dit-il, la part de talent que Dieu vous a donnée, suivez votre voie.

1576. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome I

Les pages où Ernest Psichari raconte le dialogue de son Maxence, de lui-même, avec Dieu dans le désert, rappellent par leur éloquence et leur pathétique le célèbre Mystère de Jésus. […] Dieu sait s’il les aimait, pourtant, s’il se donnait à elles tout entier ! […] » Avec quelle précision il dénonce « la haine démagogique, cette dissolution radicale qui s’attaque à l’ordre politique, à l’existence de la patrie, aux fondements de la société, à Dieu lui-même » ! […] Sans doute un mysticisme malsain le gagnait, et cette étrange aberration qui lui persuade que les Hohenzollern ayant été créés par un décret spécial de Dieu, la Providence est avec eux, quoi qu’ils fassent. […] Que cette évidence soit, sinon une consolation, du moins une douceur pour les nobles parents qui, n’ayant que ces deux fils, les ont donnés, comme dit cette même image mortuaire, à Dieu et à la France.

1577. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Appendice. — Post-scriptum sur Alfred de Vigny. (Se rapporte à l’article précédent, pages 398-451.) »

-B. m’aime et m’estime, mais me connaît à peine et s’est trompé en voulant entrer dans les secrets de ma manière de produire… Il ne faut disséquer que les morts… Dieu seul et le poète savent comment naît et se forme la pensée.

1578. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « AUGUSTE BARBIER, Il Pianto, poëme, 2e édition » pp. 235-242

Il prête à qui l’embrasse une force immortelle ; De tout haut monument c’est la base éternelle ; C’est le genou de Dieu, c’est le divin appui ; Aussi malheur !

1579. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Mignet : Histoire de la Révolution française, depuis 1789 jusqu’en 1814. 3e édition. »

Bossuet n’avait point paru encore ; le Discours sur l’histoire universelle n’était pas là pour apprendre au disciple de Descartes quel immense parti l’on pouvait tirer même de Josèphe et d’Eusèbe, et comment, si l’on voulait de gré ou de force tout faire rentrer en Dieu, il ne coûtait pas plus de voir en lui des actions que des idées.

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