Elle est, inconnue comme il convient et réservée à la joie des rares qui sont dignes de la beauté originale, le plus admirable des écrivains féminins d’aujourd’hui. […] Cependant les rares petites taches qu’y découvre une lecture sévère sont des fautes du penseur, tandis que le rêveur et le musicien nous satisfont toujours. […] Il y a deux mètres qu’il manie avec une sûreté rare. […] Le penseur, cet être rare, existe chez Lacuzon. […] Ce ne sont pas les fleurs du bord de la route qui font la beauté du voyage et les rares que je vais montrer ne peuvent guère aider à juger une œuvre aussi considérable.
Et c’est un mérite qui est devenu rare en ce temps de pédants qui ont l’air d’en dire plus qu’ils n’en savent et de nerveux qui affectent, au contraire, d’avoir plus de « sensations » qu’ils n’en peuvent traduire. […] Mais, au reste, quand il voudrait s’appliquer, ciseler, fignoler, chercher l’expression rare, il n’y arriverait pas. […] Sarcey est un des très rares écrivains vraiment gais que nous ayons aujourd’hui ? […] Les plus exactes analyses de sentiments, les vues les plus profondes sur l’âme humaine, les peintures les plus fines ou les plus éclatantes du monde moral ou physique, ce qu’il y a de plus rare dans la littérature contemporaine soit pour le fond, soit pour la forme, c’est chez nos poètes, nos romanciers, nos critiques et nos philosophes qu’il faut le chercher. […] Les pages de cette vivacité et de ce mouvement ne sont point rares chez M.
Mais il ne s’intéresse qu’aux idées, aux idées générales, qu’il fait sortir avec une rare puissance. […] Il est tout occupé à son œuvre de résurrection, qu’il mène avec une rare intelligence : ses idées générales ne lui servent plus qu’à distinguer sûrement les détails aptes à figurer comme types. […] A cette sensibilité extrême il unissait tous les plus rares dons de l’artiste : la puissance d’évocation, l’imagination « visionnaire », qui obéissait à toutes les suggestions d’une sympathie effrénée, l’expression intense et solide, qui fixait le caractère en dégageant là beauté. […] A force de vibrante et candide sincérité, il est un des rares laïcs à qui il ait été donné de catéchiser sans ridicule. […] et quelle rare, large, vive intelligence avait ce romantique enragé !
Les idées neuves sont rares en ce monde : on pourrait n’en pas rencontrer une seule dans l’œuvre de plus d’un grand écrivain, qui n’en vaut pas moins. […] Les œuvres fines, nuancées, complexes, où l’on apprend à corriger les vérités absolues par des vérités contraires, qui forment le sens du relatif, si rare chez tous les hommes, devront venir ensuite. […] Le défaut que je signale est fréquent chez les femmes, il n’est pas rare non plus chez les hommes. […] Quand on lira comme il faut, c’est-à-dire sans tenir les yeux collés au livre, mais en cherchant sans cesse en soi et autour de soi la vérité de ce qu’il contient, on amassera un riche fonds de connaissances morales, et l’on aura acquis pour le reste de ses jours le don si rare de voir les faits moraux.
Emmanuel Des Essarts Qu’on proclame l’Aède éternisé parmi Les maîtres du grand Art radieux et prospère, J’adorerai Celui dont il fut dit : « le Père » Et dont nous disions, fils respectueux : « l’Ami », Mâle raison, courage ardemment affermi, Qui, de rares vertus immuable exemplaire, Vint embrasser Paris dans la chance contraire, Et ne sut ni vouloir ni souffrir à demi ; Être indulgent et bon, soulevant les poètes, Tel qu’on voit Apollon sur un socle romain Tenir un petit dieu d’ivoire dans sa main, Et qui, plein de pudeur en ses fiertés muettes, Voilait discrètement, hormis pour notre chœur, Le plus beau, le plus pur des diamants, son cœur ! […] Un homme dépourvu d’idées, de sensibilité, d’imagination, et qui n’aime pas le lieu commun, se mêle d’écrire, et écrit toute sa vie : cela n’est pas très rare ; mais il y réussit : cela est extraordinaire, ne s’est produit peut-être qu’une fois dans l’histoire de l’art, est infiniment curieux à étudier. […] Elles sont construites selon un plan déterminé dont l’auteur ne s’écarte pas ; la rime, si difficile qu’elle peut se présenter, ne l’entraîne jamais hors de la voie qu’il s’est tracée, car il la force à obéir et elle obéit, venant, à point nommé, compléter sa pensée, selon la forme voulue et le rythme choisi… Dans ses poésies, aussi bien dans celles de la jeunesse que dans celles de l’âge mur, Gautier a une qualité rare, si rare, que je ne la rencontre, à l’état permanent, que chez lui : je veux parler de la correction grammaticale… De tous ceux qui sont entrés dans la famille dont Goethe, Schiller, Chateaubriand, Byron ont été les ancêtres, dont Victor Hugo a été le père, ceux-là seuls ont été supérieurs qui ont fait bande à part… J’ai déjà cité Théophile Gautier et Alfred de Musset, qui eurent à peine le temps d’être des disciples qu’ils étaient déjà des maîtres.
— amusante, un psychologue hardi et pénétrant ; un de nos romanciers les plus dramatiques, un écrivain très original, et enfin, ce qu’il ne faut pas négliger, un des rares caractères de cette époque. […] Mais c’est que toutes les facultés de ce rare talent se font équilibre et se tiennent d’une étroite manière ; et, même à l’occasion de ces feuilles légères des Memoranda, c’est ce talent tout entier qu’il convient d’évoquer… Quoi qu’il en soit des causes dont ces habitudes ont été l’effet visible, il est certain que, pareil à ce lord Byron qu’il aime tant, M. d’Aurevilly aura vécu dans notre dix-neuvième siècle à l’état de révolte permanente et de protestation continue… M. d’Aurevilly est, au plus beau et au plus exact sens de ce mot, un poète, — un créateur ; même sa poésie est aussi voisine de celle des Anglais que sa Normandie est voisine de l’Angleterre.
Romain Coolus Courteline est un des mieux doués parmi les auteurs dramatiques de ce temps, li a le don rare de créer des types, c’est-à-dire de donner une personnalité, une individualité, esthétiques à des personnages assez généraux pour garder, après l’époque, une indestructible vérité. […] Pierre et Paul C’est du régiment, c’est de la caserne que devait se dégager le vrai Courteline ; et effectivement c’est le séjour qu’il fit au 13e chasseurs, à Bar-le-Duc, qui nous a valu ses admirables Gaîtés de l’éscadron qui partout respirent la pitié pour le soldat, et une fraternelle espérance de justice, et dont les chapitres notamment intitulés Un mal de gorge et Les Têtes de bois sont des chefs-d’œuvre de la plus rare inspiration et d’une perfection impeccable.
Il est si désespérément rare qu’on rencontre un grand poète parmi la tourbe qui s’agite sur cette grande route fangeuse : la littérature contemporaine, que, sans le connaître, je vouai à celui-ci de la reconnaissance pour m’avoir aussi splendidement évoqué la Beauté. […] Dans cette œuvre malheureusement parcimonieuse, de rares beautés s’imposent, parterre de fleurs qui s’inclinent à mourir et regrettent parmi les marbres d’automne une terre ensoleillée qu’elles n’ont point connue.
Voilà le phénomène devenu très rare et voilà précisément l’originalité d’A. […] De rares couplets font exception et rappellent un moment que le romantisme a pourtant passé par là… pour le reste (je ne vous livre là qu’une impression), le style et la versification de M.
Ils créent des idées grandioses, comme les poètes de grandioses images, et il est rare que la faculté créatrice d’images et la faculté créatrice d’idées se trouvent réunies dans le même homme, rare surtout qu’elles fonctionnent ensemble. […] Mais on s’apercevra que, si la matière est banale, elle exige un talent d’autant plus rare pour la relever, et l’on enviera la plume d’un Sainte-Beuve ou d’un Vitet.
Le don de dessiner des caractères, de faire vivre des personnages, est rare, et l’on ne peut l’attendre d’un enfant qui s’exerce à écrire dans des compositions de collège. […] Les crises sont rares dans le domaine moral : les révolutions qui déplacent l’axe d’une vie ou transforment une âme, sont des exceptions, qui ne sont guère vraisemblables que par la réalité même. […] S’il vous est arrivé jamais de concevoir l’idée d’un enfantillage, d’une équipée, d’une folie, pure fantaisie de l’esprit inquiet et désœuvré, et de passer à l’exécution sans autre raison que l’idée conçue, sans entraînement, sans plaisir, mais fatalement, sans pouvoir résister ; — si vous avez repoussé parfois de toutes les forces de votre volonté une tentation vive, si vous en avez triomphé, et si vous avez succombé à l’instant précis où la tentation semblait s’évanouir de l’âme, où l’apaisement des désirs tumultueux se faisait, où la volonté, sans ennemi, désarmait ; — si vous avez cru, après une émotion vive, ou un acte important, être transformé, régénéré, naître à une vie nouvelle, et si vous vous êtes attristé bientôt de vous sentir le même et de continuer l’ancienne vie ; — si par un mouvement de générosité spontanée ou d’affection vous avez pardonné une offense, et si vous avez par orgueil persisté dans le pardon en vous efforçant de l’exercer comme une vengeance ; — si vous avez pu remarquer que les bonnes actions dont on vous louait n’avaient pas toujours de très louables motifs, que la médiocrité continue dans le bien est moins aisée que la perfection d’un moment, et qu’un grand sacrifice s’accomplit mieux par orgueil qu’un petit devoir par conscience, qu’il coûte moins de donner que de rendre, qu’on aime mieux ses obligés que ses bienfaiteurs, et ses protégés que ses protecteurs ; — si vous avez trouvé que dans toute amitié il y a celle qui aime et celle qui est aimée, et que la réciprocité parfaite est rare, que beaucoup d’amitiés ont de tout autres causes que l’amitié, et sont des ligues d’intérêts, de vanité, d’antipathie, de coquetterie ; que les ressemblances d’humeur facilitent la camaraderie, et les différences l’intimité ; — si vous avez senti qu’un grand désir n’est guère satisfait sans désenchantement, et que le plaisir possédé n’atteint jamais le plaisir rêvé ; — si vous avez parfois, dans les plus vives émotions, au milieu des plus sincères douleurs, senti le plaisir d’être un personnage et de soutenir tous les regards du public ; — si vous avez parfois brouillé votre existence pour la conformer à un rêve, si vous avez souffert d’avoir voulu jouer dans la réalité le personnage que vous désiriez être, si vous avez voulu dramatiser vos affections, et mettre dans la paisible égalité de votre cœur les agitations des livres, si vous avez agrandi votre geste, mouillé votre voix, concerté vos attitudes, débité des phrases livresques, faussé votre sentiment, votre volonté, vos actes par l’imitation d’un idéal étranger et déraisonnable ; — si enfin vous avez pu noter que vous étiez parfois content de vous, indulgent aux autres, affectueux, gai, ou rude, sévère, jaloux, colère, mélancolique, sans savoir pourquoi, sans autre cause que l’état du temps et la hauteur du baromètre ; — si tout cela, et que d’autres choses encore !
Ils avoient passé toute leur vie dans l’étude des auteurs Grecs & Latins, dans ce talent si rare d’instruire la jeunesse, dans la composition de plusieurs ouvrages analogues à leur état. […] Si l’art faisoit l’éloquence, si le travail & la réflexion pouvoient nous en découvrir les secrets, les grands orateurs seroient-ils plus rares que les grands poëtes & les grands peintres ? […] L’étiquette d’homme de collège ne l’empêcha point d’être lu des gens du monde : Et, quoiqu’en robe, on l’écoutoit ; Chose assez rare à son espèce.
Pécontal avait des virilités de pensée qui annonçaient un poète de reploiement et de réflexion, — oiseau rare dans les temps actuels ! […] Mais les trop rares esprits qui aiment la poésie en dehors des guerres civiles de la littérature y prirent garde et en respirèrent l’espérance. […] Siméon Pécontal est un poète lyrique et élégiaque, de cette simplicité qui à toute heure est rare, mais, à cette heure-ci, extraordinaire.
Le principe de concurrence entre les organismes voisins, ou entre les descendants et leurs ancêtres, a dû rendre un pareil cas très rare ; car c’est une loi générale que les formes vivantes nouvelles et progressives tendent à supplanter les vieilles formes demeurées fixes. […] À l’égard des débris de Mammifères, un seul coup d’œil jeté sur la table historique publiée dans le Supplément du Manuel de Lyell, suffit à prouver, beaucoup mieux que de longues pages de détail, combien leur conservation est rare, et dépendante des circonstances locales. […] Or, d’après mes impressions générales, je crois que le cas doit être au moins très rare. […] On connaît bien quelques exemples d’une même espèce présentant des variétés distinctes dans les divers étages d’une même formation ; mais, comme ils sont rares, on peut les négliger. […] Une compensation parfaite entre la quantité de sédiment accumulé et la vitesse d’affaissement du fond sur lequel il s’accumule est donc très probablement une circonstance des plus rares.
Elles étaient rares. […] Il leur faut quelque chose de plus difficile et de plus rare. […] Accident rare vraiment dans la vie humaine ! […] Bien que rare, la chose arrive, dit-on. […] Certes, ce n’est pas à la critique de dédaigner ce trop rare butin.
» — « Non, répondit Bailly ; mais je vous ai donné l’exemple de ne jamais désespérer des lois de votre pays. » Il donnait de plus le bien rare exemple, lui, victime de la Révolution, de ne pas la calomnier : « L’orage qui gronde en ce moment, disait-il, ne prouve rien sans doute, et fera tomber bien des feuilles de la forêt ; il arrachera même quelques arbres ; mais il emportera aussi de vieilles immondices, et le sol épuré peut donner des fruits inconnus jusqu’ici. » L’agonie de Bailly était comme épuisée et consacrée dans toutes ses circonstances : elle s’augmente et se couronne de deux ou trois traits sublimes, grâce à M. […] De même qu’au-dessous d’une certaine taille qui est strictement celle du service militaire, il est rare de trouver une constitution physique qui ne soit pas débile, de même il semble qu’au-dessus et au-delà du niveau supérieur, il soit rare que la qualité de l’esprit soit dans toute sa vivacité. […] Sans chercher à se grandir ou à s’ennoblir, il a peint quelques-uns de ses contemporains tels qu’il les a vus ; il l’a fait avec une plume qui, au milieu de quelques défauts, a des qualités rares et des traits ineffaçables.
Le génie en monnaie n’est pas rare. […] J’ai pris la peine d’y revenir et j’ai senti leur charme riche, dense et rare. […] En une époque où, par la décadence des études d’adolescence et la désuétude de lire, cet amateur est rare, l’écrivain lui-même semble précieux. […] Il y a des lumières rares, dons des chimies nouvelles et savantes, pour qui la rétine vulgaire est un mauvais photomètre.
Quand l’original sera bien choisi, les occasions de le corriger ou de l’embellir seront rares ; si elles sont fréquentes, il ne vaut pas la peine qu’on le traduise. […] Nous ne saurions trop exhorter quelque littérateur habile à l’entreprendre ; mais ce littérateur devrait posséder deux qualités dont la réunion est assez rare, être profondément versé dans la lecture des anciens, et en même temps être dégagé de toute superstition en leur faveur. […] Aussi rien n’est peut-être plus rare en littérature, qu’une traduction généralement approuvée ; le fût-elle même dans son ensemble, combien les détails ne prêteraient-ils pas à la critique ? […] Il ne faut donc pas s’étonner, si dans ce genre d’écrire, comme dans tous les autres, les bonnes critiques sont encore plus rares que les bons ouvrages.
Il lisait constamment dans ces diverses littératures ce qu’il y avait d’ancien, de plus rare ou de plus oublié, et ne se tenait pas moins au courant de ce qui s’y publiait de nouveau. […] Lorsqu’en parcourant les manuscrits ou les vieux livres, il découvrait quelque pièce curieuse, inconnue ou très rare, et qu’il jugeait de quelque intérêt pour ses confrères les amateurs, il la faisait imprimer ou réimprimer à quelques exemplaires, et quelquefois dans les mêmes caractères gothiques que l’ancienne édition ; il faisait précéder la réimpression d’une petite notice, où il ne disait que l’essentiel, où il ne criait jamais à la découverte, et qu’il ne signait que de ses simples initiales (G.
N’étant pas Mme Sand, je ne décrirai rien, et je ne les nommerai même pas, de peur de faire quelque grossière confusion : ce que je sais bien, c’est que c’étaient des fleurs rares, de qualité ; nobles de port, vives ou tendres de couleur, exquises de parfum. […] — Or il y avait près de là, non pas dans la serre ni à titre de fleur rare (il n’en était pas digne), mais sur une fenêtre, un petit brin de réséda, poussé par hasard dans une fente de muraille ; il écoutait ces charmants discours des nobles fleurs, et quand la dernière eut parlé, il murmura de manière à être entendu : « Oui, mes sœurs (car vous l’êtes en parfum), oui le parfum est la gloire et l’orgueil des fleurs.
Chapus est un de ces rares esprits distingués par tant de tournure et une aristocratie si naturelle qu’ils doivent longtemps manquer le succès dans une société positive comme la nôtre, enragée d’égalité et d’envie, et chez qui, en fait d’appréciation des choses de goût, tout est devenu gros de ce qui était fin autrefois. […] Il a été écrivain d’instinct, naïvement, comme « de l’eau est de l’eau », dirait Diderot encore ; — il a été écrivain d’imagination et de sentiment comme on doit l’être quand on veut élargir sa renommée et donner au talent qu’on a l’air et l’espace, sans lesquels il n’est jamais qu’une fleur rare, dans un vase précieux, étiolée !
(Nous n’avons rien à ajouter au précédent portrait ; le poëte s’est tenu depuis lors dans un silence à peine interrompu par de rares productions. […] Cet article sur De Vigny demande plus d’une explication et non-seulement permet, mais exige un commentaire. il a eu, en effet, cette rare fortune d’être contesté et refuté par l’auteur lui-même. […] Trop préoccupé du Cénacle qu’il avait chanté autrefois, il lui a donné dans ma vie littéraire plus d’importance qu’il n’en eut, dans le temps de ces réunions rares et légères. […] Je suis presque avec vous tous ; bientôt j’y serai mieux encore. » Avec vous tous, cela indiquait précisément ce commencement d’union plus étroite et ces rapports plus fréquents où De Vigny, plus tard, affectait de ne voir que des rencontres rares et légères. […] Au lieu de cela, il s’enveloppa de plus en plus, se fit de plus en plus rare de communications et d’œuvres, et se retrancha, en vieillissant, dans son inviolabilité d’ange et de poëte : il y semblait véritablement confit.
zut alors, si Nadar est malade ; sous les décors bleus et autour des aquariums du moderne Parnasse, ce ne sont que gloussements et piaillements de toutes sortes ; mais le chant du rossignol est assurément devenu le plus rare de tous ; aussi l’hymne tendrement éploré de la nouvelle Philoméla a-t-il singulièrement stupéfié les premiers philistins qui l’ont entendu. […] Catulle Mendès s’est lassé très vite de ces allures tapageuses et de cette gaminerie poétique… Il explique maintenant les mystères du Lotus, fait dialoguer Yami et Yama, célèbre l’enfant Krichdna et chante Kainadèva en vers d’une rare perfection de forme, malgré la difficulté d’enchâsser dans le rythme ces vastes noms indiens qui ressemblent aux joyaux énormes dont sont ornés les caparaçons d’éléphants. […] Tenir une heure durant quelqu’un sous le charme d’une histoire rare et magnifique dite en paroles rythmées, voilà ce qui ne vous est pas étranger, et à quoi vous avez droit été, cela, avec l’incroyable talent que vous mettez partout, vous fait des aujourd’hui une place à part ; et, Les Poésies de Catulle Mendès, ce titre signifie parfaitement ce qu’il dit. […] Je connaissais la plupart de ces beaux vers, quelques-uns depuis presque mon enfance, car je vous suis depuis la Revue fantaisiste, mais quel plaisir sans pair que de faire connaissance à nouveau avec eux 1 Quant à ceux très rares, que je ne savais pas encore et qui datent des époques où j’étais absent de France et de toute littérature, je les ai dévorés et redévorés à belles et bonnes dents : aussi, ce régal ! […] L’auteur du Rapport sur le mouvement poétique français , ayant cru devoir, au cours de son travail, se borner à de rares mentions de ses propres ouvrages, il a paru nécessaire de reproduire ici un assez grand nombre des appréciations dont son œuvre a été l’objet.
Il lui a fallu une rare valeur personnelle pour y suppléer plus tard, comme il fit, par le sentiment. […] Dans l’une des rares rencontres où j’ai eu le plaisir de voir M. de Latouche, je lui ai entendu raconter une petite anecdote que je retrouve consignée par lui-même dans un de ses nombreux écrits ; car s’il contait bien, il n’aimait point à perdre ses récits ni ses jolis mots. […] Le nom d’André Chénier n’était pas tout à fait inconnu en 1819 ; quelques mois après sa mort, La Décade philosophique avait publié de lui La Jeune Captive ; M. de Chateaubriand, dans une note du Génie du christianisme, Millevoye, dans une note de ses Élégies, avaient donné aussi des fragments qui avaient vivement excité l’intérêt des rares amis de la muse. […] En un mot, M. de Latouche, en cette occasion, fit un acte de goût, original et courageux, ce qui est aussi rare et plus rare encore qu’un acte de courage dans l’ordre civil. […] [NdA] Béranger, dans sa biographie posthume, a essayé, on ne sait pourquoi, de donner crédit à ces vanteries de Latouche : ce n’est pas en causant avec nous que Latouche se les serait permises, il n’était et ne voulait être qu’un adorateur d’André Chénier : mais je dois dire que j’ai toujours remarqué que le succès d’André Chénier contrariait Béranger, et, de ce côté, l’éditeur plus ou moins scrupuleux de ces rares et neuves Poésies profitait de l’ouverture qu’il trouvait pour glisser ses insinuations malignes.
Oui, mais plus grand et plus rare est le danger, plus rare aussi et plus charmante est la poésie habile à produire ce danger des esprits éclairés, des âmes impatientes, des imaginations avides de tout savoir. […] Il parla ainsi longtemps, et c’est à peine si je pus lui représenter — que les chefs-d’œuvre purifiaient toutes choses ; — que cet art de la comédie était un si grand art, qu’on ne pouvait lui faire de trop rares sacrifices ; — que vrai ment il se faisait bien temps qu’on n’allât pas chercher, uniquement dans la loge des portières parisiennes, les Agnès et les Iphigénies ; et enfin, pour dernier argument, je lui contai ce que voici : — Il y a déjà un fort longtemps, mon cher Henri, que dans ce même rôle d’Agnès débutait une petite fille plus jeune encore que la débutante d’hier. […] Cela est si doux, en effet, et si rare au théâtre, une belle jeune fille innocente, naïve, toute blanche, heureuse, qui récite avec beaucoup d’esprit et de grâce les vers incisifs de Molière, avec beaucoup de tact et de goût la prose élégante de Marivaux ! […] Quelques lecteurs croient « néanmoins le payer avec usure s’ils disent magistralement qu’ils ont lu son livre, et qu’il y a de l’esprit ; mais il leur renvoie tous ces éloges qu’il n’a pas cherchés par son travail et par ses veilles ; il porte plus haut ses projets ; il agit pour une fin plus relevée ; il demande aux hommes un plus grand et un plus rare succès que les louanges et même que les récompenses, qui est de les rendre meilleurs. » Ce sont là des pages admirables et tout à fait dignes que le critique honnête homme les ait sans cesse sous les yeux. […] Il est vrai de dire que ce danger est assez rare. — « Il y en a beaucoup que le trop d’esprit gâte, qui voient mal les choses à force de lumière, et qui même seraient bien fâchés d’être de l’avis des autres pour avoir la gloire de décider. » Ces gens-là, si l’opinion publique s’exprime avant qu’ils n’aient parlé, s’écrient à l’attentat !
Mme de Staël, on le sait, fut pour Mme Récamier cette chose rare, plus rare que cette autre déjà si rare, un ami !
Elle en a la pureté… Elle a la pureté de la plume, cette rareté maintenant plus rare que le talent ; la pureté de la plume, à une époque où toutes les plumes se plongent et se barbouillent dans l’encrier du réalisme, et où, comme la Xantippe de Socrate, M. […] On doit y applaudir, d’autant plus qu’à présent, les livres femmes deviennent plus rares, — les livres femmes que les femmes manquent toutes, par la prétention d’être, ma foi ï aussi hommes que nous. […] Je pourrais en citer des douzaines, si j’en voulais citer… C’est qu’au xviiie siècle, les femmes n’aspiraient pas à changer de sexe ; c’est qu’alors le bas-bleu était rare… D’ailleurs, nous avons tous un peu perdu de notre légèreté héréditaire et de cette grâce de France, exécrée des pédants, issus de la Révolution française, la grave coquine, avec qui nos pères ont couché.
… Les livres sur l’éducation sont prodigieusement difficiles et rares ; malgré des tentatives et des travaux assez nombreux, on peut même dire qu’il n’y en a pas. […] L’auteur est un charmant et facile esprit, d’une plume limpide, qui a de la raison et de la distinction dans le langage, chose assez rare dans ce temps d’esprits hâves, incorrects, troublés. […] Comme écrivain, Corne a de l’élégance, et il est même rare qu’on en ait tant avec des idées communes.
Il prenait avec intelligence le mouvement indiqué et savait tenir la pose, qualité rare ! […] Il est rare qu’on en parle ou qu’on la cite. […] Dans son œuvre, Delacroix a toujours cherché le signe caractéristique, le trait de passion, le geste significatif, la note étrange et rare. […] Louis Boulanger avait un défaut bien rare, l’admiration portée à l’excès. […] Vous trouverez son nom toutes les fois qu’il s’agit de luxe intelligent, d’art rare et délicat dans les pages des poètes, des romanciers, des critiques.
Il doit être un des rares auteurs de ce temps-ci qui réciteraient par cœur des pages de Rabelais. […] Qu’il continue son labeur de rare ouvrier. […] Il les ciselait avec lenteur, comme des joyaux rares. […] — La proposition est rare. — Le rare est le bon.
Il se trouva un conteur gracieux, délicat et touchant, sans y avoir visé ; il sut garder et cultiver discrètement sous tous les cieux sa bouture d’olivier ou d’oranger, sans croire que ce fût un arbuste si rare. […] nous faisions, ma rose et moi, une fort triste figure… Au moment où la parure commence, l’amant n’est plus qu’un mari, et le bal seul devient l’amant. » Dans ce charmant chapitre, je relèverai une des taches si rares du gracieux opuscule : redoublant sa dernière pensée, l’auteur ajoute que, si l’on vous voit au bal ce soir-là avec plaisir, c’est parce que vous faites partie du bal même, et que vous êtes par conséquent une fraction de la nouvelle conquête : vous êtes une décimale d’amant. […] Ma vie est sans variété, mes jours sont sans nuances ; et cette monotonie fait paraître le temps court, de même que la nudité d’un terrain le fait paraître moins étendu. » Le simple et doux Lépreux fit son chemin dans le monde sans tant de façons et sans qu’on lui demandât, rien davantage ; il prit place bientôt dans tous les cœurs, et procura à chacun de ceux qui le lurent une de ces pures émotions voisines de la prière, une de ces rares demi-heures qui bénissent une journée. […] Les légères fautes d’incorrection sont presque aussi rares chez M. de Maistre que celles du goût. […] Cette femme d’un esprit si rare augurait mal, il faut le dire, de la publication : elle trouvait, par exemple, que Prascovie arrivée à Pétersbourg perdait du temps, qu’elle n’entendait rien aux affaires ; elle avait horreur de cet homme (Ivan) qui tue une femme, etc., etc. ; son opinion était partagée par plusieurs personnes de sa société.
Sa pensée se reportait en arrière, et ce temps, dont il n’aurait pas voulu la continuation, il le regrettait par une sorte de contradiction singulière, et qui n’est pas si rare. […] Par une délicatesse rare, autant il avait été question entre eux, au début, de cet époux, leur matière ordinaire, autant, depuis l’amour avoué, il n’en était jamais fait mention qu’à l’extrémité, pour ainsi dire. […] Cet amour durait depuis des saisons et composait, après tout, un rare bonheur dans une exacte fidélité, sans aucune des coquetteries du monde, ni aucun échec du dehors ; il n’était troublé que de lui-même et par des torts légers. […] Les lettres de Mme de Pontivy étaient plus rares, plus abattues ; tous les souvenirs attiédissants s’accumulaient en elle de préférence, et lui devenaient son principal aliment. […] Ce qu’il écrivait de ses pensees rompues a Mme de Pontivy ne recevait que réponses rares et bonnes, mais chaque fois plus découragées.
— Ce même n° de la Revue des Deux Mondes peut montrer combien l’invention devient rare et combien la critique est obligée de se replier et de vivre sur soi : ce sont des amis qui se prennent à parti et s’analysent : Lerminier sur Quinet, Rémusat sur Jouffroy, Sainte-Beuve sur Daunou. — Nous faisons cette remarque, non point pour nous plaindre, car nous nous accommodons très-bien de ces judicieux et ingénieux retours, mais il est impossible de ne pas voir que la critique, qui a besoin de pâture et qui ne trouve guère où fourrager, se replie en pays ami. […] Mais une quantité de traits secondaires assemblés et resserrés sur un fond très-fixe constituaient en sa personne une rare et même une tout-à-fait unique originalité.
Epouvantée par psycho-physiologie, par splanchnologie 115, par conchyliologie, elle n’aurait d’objections ni contre gaffe, ni contre écoper, mots très français, très purs, le premier l’une des rares épaves du celtique (gaf, croc), le second, anciennement escope, venu sans doute d’une forme scoppa, doublet latin de scopa 116 . […] Déjà il n’est pas très rare de rencontrer une phrase qui se croit française et dont plus de la moitié des mots ne sont pas français.
Mais, comme je l’ai dit, les personnes qu’un sang sans aigreur et des humeurs sans venin ont prédestinées à une vie interieure si douce, sont bien rares. […] Quand les hommes dégoutez de ce qu’on appelle le monde prennent la resolution d’y renoncer, il est rare qu’ils puissent la tenir.
Dieu merci, les livres qui s’adressent aux grossières passions sont rares aujourd’hui, plus rares, je le crois, que jadis. […] Si le génie est rare chez nous, le talent, dans toute la force du terme, court les rues. […] Chose rare pour un poëte, il sait distinguer le blé de l’orge et le trèfle du sainfoin. […] Les poëmes sont rares parmi les livres de vers, presque toujours composés de pièces détachées. […] Dans la nouvelle école elles sont rares ; l’art de Boufflers, de Désaugiers et de Béranger est un peu dédaigné comme frivole et badin.
Par suite du cours longtemps continué des choses, cette influence des croisements, si rares qu’ils soient, doit avoir un effet puissant sur les progrès de l’espèce. […] Il suit de là que les espèces rares varient et progressent moins dans le même temps et, par conséquent, doivent être vaincues dans le combat de la vie par les descendants modifiés d’espèces plus répandues. Il me paraît donc suffisamment établi par ces considérations que, comme de nouvelles espèces se sont formées dans le cours des temps par sélection naturelle, d’autres doivent aussi devenir de plus en plus rares et finalement s’éteindre. […] Nous avons vu aussi que les espèces les plus communes et les plus répandues varient plus que les espèces rares dont la station est très limitée. […] Dans toute contrée où le nombre des espèces s’accroîtrait indéfiniment, chaque espèce deviendrait rare ; et, d’après les principes que nous avons posés, les espèces rares doivent, dans une période donnée, présenter très peu de variations favorables ; de sorte que la formation d’espèces nouvelles se trouverait ralentie d’autant.
* * * Cependant, sur le tard, la quarantaine passée, comme si tout ce que d’épars ils avaient produit n’eût été que pour se faire prendre patience à eux-mêmes, tant ils sentaient le mal de leurs poésies sans lien en même temps qu’ils n’acceptaient de sortir du malaise Baudelairien par aussi quelque facile acceptation du néant : esprits très rares, MM. […] Charles Morice qui par les rares vers donnés et à travers des articles critiques, paraît là primer. […] Petits « chers Maîtres » et leurs disciples copieurs, contristés de ce que l’on ne me contestait pas, à moi, — quelques rares et puissants esprits — une « maîtrise d’idée » la seule rare, la seule valable et durable maîtrise… Mais des cordialités sont aussi venues.
Est-il donc si rare que deux méchans se concertent, que deux hommes de bien se trompent ? […] Vous possédez les règles de la composition ; vous connaissez tous les accords et leurs renversemens ; les modulations s’enchaînent à votre gré sous vos doigts ; vous avez l’art de lier, de rapprocher les cordes les plus disparates ; vous produisez, quand il vous plaît, les effets d’harmonie les plus rares et les plus piquans ; c’est beaucoup. […] Il faut savoir qu’à quatre pieds, ceux-ci seize fois plus rares, ou répandus sur un espace seize fois plus grand, doivent éclairer seize fois moins. […] Je n’aime pas qu’on fasse épais, matte, compacte comme quelquefois La Grenée, mais je veux que des chairs tiennent, et qu’on ne fasse pas rare, mou, cotoneux, neigeux comme cela.
On n’imaginait pas qu’elle pût jamais changer dans le poète, et pourtant ce rare phénomène s’est accompli ! […] Élégiaque aussi, mais moins élégiaque que lyrique, et quoique élégiaque, à ses heures, comme les romantiques, qui ont tous, plus ou moins, chanté la romance du Saule avant de mourir, ayant, lui, une qualité d’esprit rare chez les romantiques, et que les romantiques qui ne l’avaient pas se permettaient de mépriser… Bien entendu, puisqu’ils ne l’avaient pas, M. […] En effet, toutes les pièces de ce recueil d’Idylles sont superbes, et d’un pathétique d’autant plus grand que le désespoir y est plus fort que l’espérance ; qu’il y a bien ici, à quelques rares moments, des volontés, des redressements et des enragements d’espérance, mais tout cela a l’air de s’étouffer dans le cœur et la voix du poète, et on épouse sa sensation… Les hommes sont si faibles et ont tant besoin d’espérer, que c’est peut-être ce qui a fait un tort relatif aux Idylles prussiennes de M.
Bouniol est un poète satirique d’une rare vigueur de conviction. […] Deux qualités positivement bonnes, supérieures et rares, et qui constituent à notre jeune poète une originalité meilleure que celle que nous lui composions plus haut avec les indigences de son génie !
Wollaston, qu’en général, lorsqu’il se présente des variétés intermédiaires entre deux autres formes, elles sont numériquement beaucoup plus rares que les formes auxquelles elles servent de lien. […] Car toute forme très nombreuse en individus aura toujours plus de chances, dans une même période donnée, de présenter des variations favorables dont la sélection naturelle puisse se saisir, que des formes plus rares qui existent en plus petit nombre. […] C’est, je crois, d’après le même principe que les espèces les plus communes dans chaque contrée présentent, en moyenne, un plus grand nombre de variétés bien tranchées que les espèces plus rares, ainsi que nous l’avons déjà vu autre part. […] Constatons pour le moment qu’on en a trouvé, puisqu’on connaît à l’état fossile de nombreux Ptérodactyles et de rares poissons volants. […] Mais ce phénomène est aussi trop rare pour pouvoir être convenablement étudié.
Quelques rares critiques ont reproché à M. […] Les cerveaux et les caractères de cette trempe sont rares. […] Une œuvre rare, enfin, où sont d’admirables pages, et comme il en paraît peu dans le cours d’une année. […] Stéphane Mallarmé, quelque chose d’aussi rare et d’aussi sublime ? […] Brunetière étant peu nombreux, ses joies littéraires doivent être assez rares et sans surprises.
Il le signifiait lui-même en ne les imprimant qu’à de rares exemplaires. […] Même goût des idées originales et rares. […] Rare succès de l’intelligence et que vient achever un art supérieur. […] Être maître de soi-même et de son existence : rare faculté et que M. […] L’anecdote n’y est pas rare et filée à la perfection.
A eux se rattache une lignée de rares artistes en style, qui va de M. […] A l’être d’un métier ou d’une classe s’adjoint chez elles une personnalité rare et solitaire. […] Elles sont rares dans les romans de nos écrivains, elles abondent dans ceux de Tourguéniev. […] Il ne lui suffit pas d’écrire juste, il veut écrire d’une manière rare. […] Telle sensation dont vous souffrez, me dirait-il, est rare, même chez vous.
Si courtes et si rares ont été les apparitions que j’y ai faites depuis que le vaste monde m’a pris, que je peux dire qu’il y a quarante ans que je l’ai quittée. […] À part un très petit nombre d’êtres, dont il sera possible de diminuer indéfiniment le nombre, il n’y a pas de déshérités du bonheur ; notre bonheur, sauf de rares exceptions, est entre nos mains.
Amitié de pays : il n’est pas rare, surtout dans les régiments de réserve, que douze, quinze hommes d’une compagnie soient du même village, et cela c’est l’amitié fondamentale. […] Après les avoir vus à l’œuvre deux ans sous les obus, à Reims, le cardinal Luçon leur rend ce témoignage : « Mêlés à leurs camarades dans le rang, les Jeunes Catholiques ont certainement exercé par leurs discours et leurs exemples un véritable apostolat et secondé très efficacement celui du prêtre soldat. » Rares seront les survivants, constate l’un de leurs chefs, et relevant avec fierté une phrase effroyable, il dit : « Il est trop vrai que la jeune génération catholique est enterrée dans les tranchées.
Elle eut cet art si rare de vieillir, non-seulement sans chagrin, mais avec gaieté. […] Balzac posséda ce rare mérite. […] Ceux qui se sacrifient à l’idéal sont assez rares pour que leurs orphelins soient sacrés. […] Grâce à Baudelaire, nous avons eu la surprise si rare d’une saveur littéraire totalement inconnue. […] Ce volume fut un événement rare dans les siècles.
*** Mais (de quelques mots sur l’Expression poétique et les métriques), il est heureux de dire que presque partout une intuition, une spontanéité plus qu’une attention demeurée latente, sut plus ou moins apporter la vraie expression poétique, — don rare, d’ailleurs, qui n’est point l’expression proprement dite ou descriptive, non plus qu’allégorique : mais suggestive, qui doue le réel de prolongement dans le rêve, dans le non-perçu, et, à son degré conscient, rend participante du Tout universel toute partie de l’Œuvre poétique. […] *** Nous nous sentons ainsi au terme des seuls développements dont nous avons voulu élargir le texte des Principes, — auquel il nous plut de garder un sens et une atmosphère ainsi que rares, et la sensation de vertige qui émane de l’Essence… De l’entier développement toute la poétique mouvance, maintenant l’épandra en dramatique diaprure des natures et des êtres l’Œuvre qui prit âme en mon esprit en même temps que la Méthode, dont (au titre générique de Œuvre) elle sort. […] Et, montant des plus rares et sourds aux multiples et hauts harmoniques : les « voix », ou timbres-vocaux, — ainsi qu’il suit se sérient, selon qu’en elles sont présents tels ou tels harmoniques de la suite de sons respectivement dans les rapports de : 1, 2, 3, 4, etc. […] Il est universel et de tous les temps que le langage poétique, et des lettrés, de plus en plus s’éloigne du langage des Foules : l’un ne pouvant être, ainsi que nous le disions, qu’un rapide intermédiaire, de quotidien et précis usage et aux seules qualités de concision, — et l’autre exigeant, de par son origine double, tous les apports de musique verbale, et picturaux et plastiques — et rythmiques, en perceptions et représentations les plus rares et retravaillées sans cesse. […] Or, au xvie siècle, nous trouvons les notations suivantes, que sont : a et o, et m, pour la grandeur, et pour la plénitude et l’amplitude, é et i, pour l’expression de délié, de rare, de menu, d’aigu et de pénétrant, et de deuil et de douleur, o et r, s et x, pour les grandes passions, et la rudesse et l’impétuosité, et l’âpreté, u et n, pour l’expression de voilé et de doute, et de noir. — Un autre note, que : e est le son le plus nué, le plus varié… Mais Socrate et plus tard Lucrèce, voient la vérité d’une dépendance naturelle entre l’idée, et le son et les lettres du mot qui l’expriment.
J’y vois la preuve que ces rares esprits ont conservé dans son intégrité la religion littéraire, la foi au lendemain, à ce qu’on appelait anciennement la postérité. […] L’art de louer, on la remarqué, est une des plus rares épreuves du talent littéraire, un signe bien plus sûr et plus délicat que ne le serait tout l’art de la satire. […] Il y a là un côté faible chez ce rare esprit.
Rare esprit, âme plus rare encore ; âme tendre et forte qui n’a peur de rien, pas même du ridicule ; dévouement sincère, amour passionné, bonne foi complète, Alceste, en un mot. […] » Au Misanthrope, un bonheur assez rare est arrivé ; Le Misanthrope devait avoir une suite (ici n’est pas le miracle ; on a la suite de Don Quichotte, on a la suite de Manon Lescaut).
Le poète est presque aussi rare que le juste. […] Son esprit, à l’origine de sa vie, a dû être trempé dans cet attendrissement dont Lamartine pénétra tout son siècle, au temps de sa jeunesse, quand, après le sang qu’avait fait couler ce terrible poète de Napoléon Bonaparte, ce fut au tour des larmes de couler… A ce moment unique dans l’Histoire, toutes les imaginations faites pour la poésie s’imbibèrent de celle-là, inconnue dans la littérature française, car avant Lamartine, excepté La Fontaine, en quelques vers trop rares, mais divins, quel poète français avait vraiment rêvé ? […] Chose rare, et qu’il faut savoir apprécier ce qu’elle vaut, l’émotion que le poète ressent et qu’il donne, cette émotion, contenue et continue, qui est le caractère de son poème, ne cesse pas une minute, dans ce récit en vers de plus de trois cents pages.
Dans cette œuvre nouvelle, le romancier disparaît, il n’y a plus qu’un voyageur, mais un voyageur poète et qui pourtant sait voir avec une rare précision. […] Le tableau est d’une rare vérité d’impression. […] Cette qualité si rare, il l’a conservée, et c’est ce qui a fait dire à Théophile Gautier : « Sa poésie est ondoyante et diverse comme l’homme de Montaigne. […] Larroumet, il faut dire que son érudition les traite avec une rare sagacité et sait les approfondir en paraissant les effleurer seulement. […] Renan a écrit ; rares sont ceux qui savent transcrire sa parole.
Il doit cependant au commerce de son maître et ami, et à son propre sens, bien de bonnes pensées qu’il exprime heureusement : dès le début de son second livre, où il en vient à exposer les instructions et règles générales de sagesse, il remarque combien, telle qu’il l’entend et qu’il la conçoit, elle est chose rare dans le monde, et il le dit avec bien de la vivacité (je suppose que l’expression dans ce qui suit est de lui et non de Montaigne, car je n’ai pas tout vérifié, et l’on a toujours à prendre garde, quand on loue Charron, d’avoir affaire à Montaigne lui-même) : Chacun, dit-il donc, se sent de l’air qu’il haleine et où il vit, suit le train de vivre suivi de tous : comment voulez-vous qu’il s’en avise d’un autre ? […] Il y en a bien aucuns et rares, je les vois, je les sens, je les fleure et les haleine avec plaisir et admiration : mais quoi ? […] Il y a bien quelques exceptions en ceci, mais elles sont bien rares. […] Ce qui parlait surtout en sa faveur, c’était sa vie, la pureté de ses mœurs, l’égalité et la tranquillité de son âme : « C’est une science divine et bien ardue, disait-il, que de savoir jouir loyalement de son être, se conduire selon le modèle commun et naturel, selon ses propres conditions, sans en chercher d’autres étranges. » Cette science pratique, à laquelle, sauf de rares et courts instants de passion, il avait toujours été disposé, il paraît qu’il l’avait tout à fait acquise en vieillissant ; l’équilibre de son humeur et de son tempérament l’y aidait ; il avait pris pour sa devise : Paix et peu, et il la justifiait par toute sa vie.
Son rare bon sens, qui, dans ses éloquents écrits, se revêt si souvent et s’arme ou se voile d’éblouissants éclairs, n’a jamais paru plus élevé, plus net, mieux discernant, aux yeux de tous ceux qui ont l’honneur de l’approcher. […] Ils n’ont pourtant pas renoncé à assister aux suites, à y présider même par leur esprit ; ils ont donné de leur présence constante des témoignages trop rares sans doute pour ceux qui les admirent et auraient voulu les suivre encore, mais des témoignages suffisants pour maintenir leur influence supérieure et leur nom. […] Avec bon nombre de ces qualités qui peuvent à bon droit sembler souveraines, il ne s’est rien rencontré (exception bien rare !) […] Un retour, ne fût-il qu’assez rare de la part d’un chacun, s’il est réel et suivi, peut suffire à renouer le lien et à maintenir les lignes.
La Société des bibliophiles, fondée en 1820 par MM. de Châteaugiron, de Pixerécourt, Walckenaer, et autres gens de lettres ou amateurs distingués, est une institution essentiellement aristocratique, qui suppose de l’argent, du loisir, le goût des belles choses, des choses rares, de ces curieuses inutilités qui tiennent ou qui mènent aux études sérieuses. […] La Société des bibliophiles (je reviens à elle) a donc été instituée « pour entretenir et propager le goût des livres, pour publier ou reproduire les ouvrages inédits ou rares, surtout ceux qui peuvent intéresser l’histoire, la littérature ou la langue, et pour perpétuer dans ses publications les traditions de l’ancienne imprimerie française ». […] Il faut en ce siècle faire la part à l’utile, même dans le rare et dans le choisi ; il faut se faire pardonner chaque distinction par quelque titre auprès du grand nombre. […] Ceux qui l’ont jugée avec le plus de sévérité conviennent d’ailleurs qu’elle se corrigea avec l’âge, et que sa volonté, son rare esprit, le sentiment du rang qu’elle allait tenir, triomphèrent, sur la fin, de ses impétuosités premières et de ses pétulances : Trois ans avant sa mort (écrit la duchesse d’Orléans, mère du Régent, honnête et terrible femme qui dit crûment toute chose), la Dauphine s’était entièrement changée à son avantage ; elle ne faisait plus d’escapade, et ne buvait plus à l’excès.
Le contraste était surtout sensible pour moi quand je comparais cette frappante apparition au spectacle que présentent les pays musulmans en-deçà de la Perse, pays où la curiosité scientifique et philosophique est si rare. […] Reinhard Dozy, dont l’Europe savante déplore en ce moment la perte, appliquait avec une rare sagacité.
Or, pour ceux qui savent un peu les choses, ce sont là deux cas très rares, et même le second se rencontre à peine. […] Un chrétien qui, dans la pratique, pousse jusqu’à leurs dernières conséquences les obligations de sa foi est déjà une créature rare et singulière et qui se distingue fortement du reste des hommes : rappelez-vous les solitaires de Port-Royal. […] Ce plaisir si rare et si noble, le plus pauvre desservant peut sans doute le goûter ; mais on connaît, d’autre part, l’état de sujétion absolue où les prêtres sont tenus par leurs évêques. […] On a dit que sa passion du pouvoir n’avait guère les allures d’une passion ecclésiastique ; qu’elle était trop fougueuse, imprudente et emportée ; qu’il n’est pas vraisemblable qu’un vicaire général laisse dehors, la nuit, devant la porte fermée de la cathédrale, sous le vent et la pluie, le cercueil d’un évêque : l’esprit de corps est si puissant dans le clergé qu’il est infiniment rare que les haines particulières s’y manifestent par des actes capables de compromettre le clergé tout entier, de scandaliser les fidèles et de réjouir les impies ; et comme ici la publicité de la vengeance s’aggrave d’une sorte de sacrilège, on peut hardiment contester la vérité de cet épisode si lugubrement dramatique. […] Encore un coup, il est rare que la question se pose avec cette netteté tragique et que l’Église ait l’occasion de revendiquer ses droits sur toute l’âme ; mais la question se pose ainsi pour tout prêtre qui réfléchit dès que certaines circonstances mettent en opposition directe ses sentiments naturels et sa foi.
On rechercha l’expression rare et l’archaïsme. […] Le culte pieux de l’épithète rare devait donc aboutir à cette hérésie : la discorde du Poète et de la Nature. […] Mais surtout, ils s’infatuent de la façon toute particulière, dont ils acquièrent une sensibilité personnelle, rare et distinguée. […] La langue s’enrichit de métaphores et les statues se couvrirent de joyaux rares. […] — de rares et fantomatiques villages semblent avoir survécu.
Andrieux y déploya dans un cadre plus général les qualités précieuses de critique, de finesse délicate, de malice inoffensive et ingénieuse, qu’attestaient ses œuvres trop rares, et dont ses amis particuliers avaient joui. […] En somme, ce fut un honorable caractère, et plus fort peut-être que son talent ; mais ce talent lui-même était rare.
Il sait aussi que l’amour est inséparable de la mort, parce que la mort est inséparable de la vie… Et maintenant lisez les Chants de l’Amour et de la Mort : Je voudrais te parer de fleurs rares, de fleurs Souffrantes, qui mourraient pâles sur ton corps pâle. […] Ce fond est d’une qualité rare.
La conséquence, c’est que, pour exceller dans la première partie de ce programme, le chirurgien doit avoir, avec une connaissance toujours présente de tout le corps humain, un sang-froid inaltérable, un regard lucide et sûr, une main délicate et intelligente, et comme des yeux au bout des doigts, une initiative toujours prête, la puissance d’inventer ou de modifier, à mesure, les procédés de son art, une faculté divinatoire, bref un « don », aussi rare peut-être, aussi instinctif et incommunicable que celui du grand poète ou du grand capitaine. […] * * * Puisque j’ai dû au docteur Eugène Doyen quelques-unes de mes émotions les plus rares — émotions artistiques, car le bon sorcier était beau à voir ; il respirait la force et la joie dans sa fonction salutaire et sanglante, et je sentais le « drame » conduit par une main délicate et forte, et cette main elle-même dirigée par une intelligence audacieuse et inventive ; — puisque, d’autre part, ce poète du scalpel m’apparaît comme un des hommes les plus évidemment prédestinés à diminuer parmi nous la somme du mal physique, pourquoi ne vous le dirais-je pas ?
Théophile Gautier Quand on marche toujours sur le grand chemin, il est rare qu’on tombe. […] Victor Hugo Quoique la faculté du beau et de l’idéal fût développée à un rare degré chez M.
Oui, malgré tout ce qu’on a fait pour corrompre l’homme, je pense que la bonté et la vertu sont moins rares encore que le génie, et je le prouve. […] Mais l’être rare par excellence, c’est celui qui réunit la force qui fait agir et le génie qui fait dire grandement, celui à qui j’obéissais en remplissant cette tâche.
Elle nous montre que le sens profond de la douleur est rare. […] Mais ce sont des rares échappées. […] Ses partisans sont rares. […] Les images sont ici très rares et d’une simplicité absolue. […] Ils sont d’essence rare et de forme complexe.
Il est rare d’ailleurs qu’un second ouvrage soit accueilli comme le premier. […] Rien n’y trahit l’ardeur de ces strophes rares et immortelles où passe « le vent d’été qui court là-bas vers Mytilène ». […] Cependant le style de Béranger est le plus souvent sain et clair, il est franc avant tout, mérite rare en 1814 et notable à toute époque. […] Ses Nouveaux lundis ont aidé grandement à forcer la réputation des hommes jeunes d’une rare valeur. […] C’est quelque chose de si singulier, de si rare que son propriétaire l’admire, l’honore, le révère, le salue chaque matin.
L’Art, dont la Poésie est l’expression éclatante, intense et complète, est un luxe intellectuel accessible à de très rares esprits. […] Sauf de rares morceaux pleinement venus, il y a dans ce gémissement continu une telle absence de virilité et d’ardeur réelle, cette langue est tellement molle, efféminée et incorrecte, le vers manque à ce point de muscles, de sang et de nerfs, qu’il est impossible d’en poursuivre la lecture et l’étude sans un intolérable malaise. […] La nature de ce rare talent le circonscrit dans une sphère chastement lumineuse et hantée par une élite spirituelle très restreinte, non de disciples, mais d’admirateurs persuadés. […] Il voit les choses par les masses plus que par les détails, et il les voit bien, ce qui est un rare mérite. […] C’était un esprit entier et résolu, de ceux, très rares, qui se font une destinée conforme à leur volonté, et que les objections étonnent ou laissent indifférents, impuissantes qu’elles sont à rien enseigner et à rien modifier.
Cinq ou six fois du moins, Vigny a su inventer, pour les idées les plus profondes et les plus tristes, les plus beaux symboles et les mythes les plus émouvants, et fondre de telle sorte la pensée et l’image que les objets sensibles sont, chez lui, tout imprégnés d’âme, que la forme précise et rare y est suggestive de rêves infinis, et que ses vers, signifiant toujours au-delà de ce qu’ils expriment, retentissent en nous longuement et délicieusement, y parachèvent leur sens et s’y égrènent en échos lents à mourir… Et c’est, comme vous savez, une poésie de cette espèce, plus libre seulement et plus fluide, mais pareillement évocatrice, que poursuivent les derniers venus de nos joueurs de flûte. […] Il lui reproche paternellement ses lettres trop courtes et ses trop rares visites ; et cependant il sait qu’elle ne peut lui donner que cela : un plaisir d’« apparition », le plaisir de la voir de temps en temps vivre sa vie gracieuse et inutile. […] Huysmans, En route, nous fait concevoir une aventure morale d’un rare intérêt : la transformation du naturalisme en mysticisme et la purification d’une âme par le dégoût. […] Et c’est pourquoi, parmi la banalité ou la hâte forcée des panégyriques que cette mort a suscités, il y a eu — chose rare en telle circonstance — de la tendresse, une émotion non jouée, des larmes ou, comme le disaient les Grecs, pères lointains d’Alphonse Daudet, « un désir de larmes ». […] * * * Et l’écrivain, chez Daudet, est de la qualité la plus rare.
II Les véritables historiens sont très rares au contraire, et, pour tout dire, plus rares peut-être que les grands poètes ; plus rares certainement que les grands hommes d’action. […] On voit, à ces principales conditions d’un historien parfait, combien il est rare que toutes ces conditions se trouvent réunies dans un même homme, et combien peu de chefs-d’œuvre historiques doivent exister et surnager sur cet océan d’annales ou de chroniques qui encombrent les archives des nations.
J’accorde qu’ils sont rares — comme tout ce qui est vraiment beau. […] Henry Bordeaux, qui veut sa part de l’aubaine, nous conte, au Pays Natal, la « rare aventure d’un déraciné qui reprend racine ». […] Il amenuise ces vieilleries et les brise au poids de mots dont la précision abstraite et la netteté pédante lui semblent rares. […] » L’incohérence n’est pas rare : « Jamais je n’y consentirai en ce moment. » Ni l’incorrection la plus ignorante ou la plus étourdie : « Ils nous ont dit qu’il ne fallait pas convoiter le bien d’autrui, se montrer charitables, ne pas tenir aux choses. » Partout flottent des ombres d’idées banales et l’expression, qui n’est pas plus vivante, ne parvient pas à saisir un seul de ces fantômes.
Cet homme rare mourut à trente-deux ans, après avoir publié un court volume de réflexions et de maximes qu’on a grossi depuis plus ou moins heureusement, mais où il était déjà renfermé tout entier avec tous les germes qui indiquent le génie. […] Voltaire, le premier, l’avait dénoncé au monde avec un sentiment de respect, chez lui bien rare, et qu’il n’a éprouvé à ce degré pour aucun de ses contemporains. […] Les images chez lui sont rares et sobres ; on a souvent cité ces mots charmants : Les feux de l’aurore ne sont pas si doux que les premiers regards de la gloire. […] Il offre le rare exemple d’un homme supérieur longtemps retenu au-dessous de son niveau, comprimé, abreuvé de disgrâces, qui ne s’aigrit ni ne se révolte, mais prend sa revanche noblement et se rouvre la carrière dans l’ordre de l’esprit avec vigueur et sérénité.
Ils sont hors de prix, en effet, et bien rares de tout temps les auteurs, c’est-à-dire ceux qui augmentent réellement le trésor de la connaissance humaine. […] Son rare bon sens corrigea ce que cette première éducation pouvait avoir d’un peu trop idéal et de trop poétique ; il n’en garda que cette habitude heureuse de tout faire et de tout dire avec fraîcheur et gaieté. […] que vous en semble du nôtre où nous avons tant de personnages évidemment distingués comme du temps de Montaigne, l’un par l’esprit, l’autre par le cœur, un troisième par l’adresse, quelques-uns (chose plus rare) par la conscience, une quantité par la science ou par le langage ? […] Car, « pour se laisser tomber à plomb et de si haut, il faut que ce soit entre les bras d’une affection solide, vigoureuse et fortunée : elles sont rares, s’il y en a. » À cette manière dont il parle, on voit assez que La Boétie dès longtemps n’était plus.
Cet homme rare, qui n’était bien connu que de ses amis, a rendu dans sa vie de grands services aux Lettres, mais des services qu’il se plaisait en quelque sorte à ensevelir : il aimait à perdre ses travaux dans la renommée de ses amis. […] Le bienfait de ces hommes rares est loin d’égaler le bruit, l’éclat, le tapage qui fait la gloire, — ce dont on aime mieux à entendre parler. […] Dans le petit nombre des maîtres universellement salués et reconnus qui tiennent, à leur époque, le sceptre de l’esprit et qui pourraient être dans tous les sens les arbitres des grâces, il s’en est rencontré un (chose rare !)
Quant aux personnages spirituels, aventureux, pleins de ressources et de souplesse, que ces derniers penchants tout extérieurs emportent sans contre-poids à travers la vie, rien n’est plus rare que de les voir unir la moralité et la véracité rigoureuse à une curiosité si courante et si dissipée. […] A partir de ce temps, Bettine soigna, peigna, lava si exactement et si longuement chaque matin le petit Casanova dans sa chambre, qu’il faillit en résulter mille accidents ; cette fille malicieuse et ce précoce enfant s’en tirèrent, l’une avec duplicité et coquetterie consommée, l’autre avec une fermeté rare et une sorte de vertu qu’il ne devait pas garder longtemps. […] Trois mois se passèrent dans une félicité sans mélange, chaque jour révélant un surcroît de perfection et un talent imprévu dans cette personne rare, dont il ignora jusqu’à là fin l’histoire antérieure et le secret.
Ferdinand Brunetière Les vers de Baudelaire suent l’effort ; ce qu’il voudrait dire, il est rare, très rare qu’il le dise ; et sous ses affectations de force et de violence, il a le génie même de la faiblesse et de l’impropriété de l’expression… Prenez, une à une, dans ces Fleurs du mal, les pièces les plus vantées, à peine y trouverez-vous une douzaine de vers à la suite qui soutiennent l’examen ; et un examen où il en faut venir, parce que Baudelaire est un pédant… Le pauvre diable n’avait rien ou presque rien du poète que la rage de le devenir. […] Dirai-je ton séjour sous les cieux exotiques, Ton amour pour l’étrange, le rare et le beau, Tes maîtresses plus parées que des idoles antiques, Ta pensée plus choisie que le chant des oiseaux, Plus profonde que la mer et que les tombeaux, Plus haute que les colonnades et les portiques… Dirai-je tes amours, tes cris et tes blasphèmes, Tes appels au dieu noir, ta recherche des poisons, La sauge et la ciguë tressées pour tes diadèmes.
Suggérées par leurs préjugés, leur impunité et leur ambition professionnelle, elles étaient entachées d’une indigne familiarité. » Il est quotidien de parler de la malveillance des tribunaux ; ce qui est rare, c’est d’en parler sans indignation, sans emphase, comme d’une chose connue et naturelle ; c’est surtout de joindre à l’observation de la servilité tyrannique des magistrats l’accusation purement artistique que leurs insolences sont gâchées par leurs familiarités. […] Rien n’est plus subtil, plus rare et plus heureux. […] Mais le rare est que le ton de polémique prédicatrice n’exclut pas chez Adam la désinvolture du tour, la joie du mot.
En montant, rien n’était changé en lui, si ce n’est qu’il montait… Évêque, délégat, nonce, archevêque, cardinal, et finalement camerlingue, c’est-à-dire pape de l’interrègne, qui devait — chose frappante et bien rare ! […] Le caractère et l’unité dans la vie, c’est-à-dire, après tout, les qualités les plus mâles et les plus rares toujours, mais particulièrement dans ce temps d’inconséquence et d’amollissement universels ! […] Léopold savait se mouvoir avec une rare souplesse dans cette forme de gouvernement imposée aux rois par la défiance des peuples, et qui lie toujours plus ou moins les bras à la Royauté, en attendant qu’elle l’étrangle… L’honneur historique de Léopold sera d’avoir dégagé sa personnalité de roi d’un système qui ne tend qu’à l’effacer, quand on en a une.
Il est de plus en plus rare que cela arrive dans des familles nobles, dans celles où se recrutait autrefois le haut clergé. […] De tels membres sont malheureusement trop rares dans le clergé français.
En ce temps-ci, c’est chose aussi rare qu’édifiante de voir si bien réussir dans le monde un pauvre orphelin posthume, et de méchantes langues, qui cherchent malice à tout, se sont permis de gloser sur une adoption si paternelle. […] M. de Montgaillard n’a jamais eu l’intelligence des grands mouvements politiques qu’il enregistre et qu’il narre dans son journal ; il n’a été dirigé, en écrivant, par aucun système de principes, auquel il soit resté conséquent et fidèle ; les variations de son humeur se retrouvent dans ses opinions sur les partis et sur les hommes ; il réduit tout en personnalités, et, à propos d’un même personnage, il n’est pas rare qu’il passe, à quelques pages de distance, de l’éloge à l’injure.
Il y a là comme une gageure, et elle est toujours gagnée ; il y a là comme un parti pris de montrer que notre « gueuse fière », c’est à savoir la langue française, est capable, pour qui connaît ses ressources, des richesses de couleur et des richesses de sonorité les plus rares et les plus abondantes que jamais langue colorée et langue sonore ait pu étaler ; et ce parti pris, je suis enchanté que M. de Heredia ait montré par le succès qu’on pouvait le prendre. […] Il est demeuré grand lecteur de mémoires érudits, de brochures rares, de commentaires peu connus.
Mais, dira-t-on, rien n’est moins rare qu’un géomètre qui a l’esprit faux. […] Les bons maîtres sont rares, parce qu’ils traînent leurs élèves pied à pied ; et qu’on fait avec eux une route immense, sans qu’ils s’avisent d’arrêter leurs élèves sur les sommités, et de promener leurs regards autour de l’horizon.
À cela on aurait gagné, non seulement le fond de son livre, mais la forme, — la forme, qui devient chaque jour dans le roman plus difficile, la forme, plus rare que ce qui est déjà si rare : les idées et les observations !
Dombey, d’une assemblée d’hommes positifs et rassis, discutant, à mots rares, leurs affaires d’intérêt ou de gloriole, d’une réception guindée dans le monde, des conciliabules d’un couple de mielleux coquins, les insinuations, les mots manifestement hostiles et moqueurs ne manquent pas de postuler l’aversion et le mépris du lecteur. […] Mais ces descriptions pures sont rares dans Dickens ; le plus souvent, ce qui remplit ses pages, ce sont les aventures, les conversations de ses héros, les scènes où ils parlent et agissent à la fois, et ici encore, soit dans ses procédés de personation, soit dans l’aspect résultant de ses personnages, le romancier anglais demeure l’écrivain impressionnable et essentiellement subjectif que nous avons appris à connaître. […] En se souvenant encore de quelques fantastiques harpagons de Dickens, tels que le vieux Gride de Nicolas Nickleby ou le vieux Scrooge de l’un des Contes de Noël, on aura de bons exemples de ce que peut donner un art essentiellement réticent et suggestif, qui se borne à de rares indications disconnexes en laissant à l’imagination des lecteurs le soin de compléter les linéaments des figures ainsi esquissées dans l’ombre. […] Les idées sont chez Dickens rares et faibles. […] L’enfant qui était alors chétif et faible, qui avait des goûts studieux, un peu pédants même, bien rares parmi ses compatriotes, se pénétra de tous ces livres ; il passa dans sa famille pour un petit prodige et, comme il était habile à retenir les chansons de café-concert qu’on le menait entendre, on l’exhibait souvent aux voisins, juché sur une table et faisant montre de ses talents.
Ce sera l’amour du mal pour le mal, sentiment rare sans doute, mais non pas si exceptionnel ni si inexplicable qu’on le suppose. […] Et la mort de lord Annandale, dans la Faustin, est peut-être un peu le produit de cette disposition fort rare chez les adeptes de l’école naturaliste. […] Parmi les rares auteurs antiques qu’ils paraissent avoir goûtés, il n’en est qu’un à qui ils aient consacré quelques lignes admiratives : c’est Lucien. […] Il se décèle constamment dans ses actes et dans ses pensées, avec une fréquence telle que nous n’avons pu en citer que les plus rares exemples. […] Ce n’est pas un phénomène rare que l’engouement de sociétés très mûres pour les œuvres des civilisations très rudimentaires, et notre siècle seul fournirait de ce fait d’innombrables exemples.
Embrassons, étreignons en nous ces rares moments, pour qu’après qu’ils auront fui, ils augmentent encore de perspective, pour qu’ils dilatent d’une lumière magnifique et sacrée le souvenir. […] comme il bénirait ce fils dont il a contristé la jeunesse, et verserait sur lui une de ces rares larmes que sa joue sèche avait si vite dévorées ! […] Si j’osais adresser un seul reproche à quelques rares endroits de cette douleur presque innée que je comprends et que j’admire, ce ne serait pas de s’exagérer et de se surfaire, ce serait de se croire plus unique au monde, plus privilégiée en amertume qu’elle ne l’est en effet. […] On voit çà et là, l’hiver, venir de rares hôtes à cheval avec le porte manteau en croupe ; ce sont ceux que le père reçoit tête nue sur le perron. […] Il la suivait, cette Sylphide, par les prairies, sous les chênes du grand mail, sur l’étang monotone où il restait bercé durant des heures ; il lui associait l’idée de la gloire. « Elle était pour lui la vertu lorsqu’elle accomplit les plus nobles sacrifices ; le génie, lorsqu’il enfante la pensée la plus rare. » Il y a à travers cela d’impétueux accents sur le désir de mourir, de passer inconnu sous la fraîcheur du matin. « L’idée de n’être plus, s’écrie-t-il, me saisissait le cœur à la façon d’une joie subite ; dans les erreurs qui ont égaré ma jeunesse, j’ai souvent souhaité de ne pas survivre à l’instant du bonheur.
Le poète s’isole pour chercher le précieux, le rare, l’exquis. […] Les peaux décolorées par les fards, les yeux cerclés de vert ou de bleu, les sangs pauvres et les nerfs détraqués des races vieillies, les humeurs fantasques précédant les maladies mentales, les vierges d’une perversité précoce, les vices qui s’épanouissent comme des moisissures sur le fumier des sociétés en décomposition, toutes les dépravations savantes des civilisations faisandées, ont naturellement la séduction des choses rares pour le décadent qu’horrifient les simples amours comprises de tout le monde. […] Mais, autant ils mettent de vanité à rechercher des sensations inédites, autant ils apportent de soins à les exprimer dans des rythmes rares et dans une langue renouvelée. […] Leurs infractions à l’hiatus restent rares, mais ils se sont décidément affranchis de la césure et de l’alternance des deux rimes. […] Leurs infractions à l’hiatus restent rares, mais ils se sont décidément affranchis de la césure et de l’alternance des deux rimes.
La galanterie étoit si rare parmi eux, qu’Alcibiade, né galant, y parut comme un phénomene. […] Ce livre eut deux sortes de succès également rares ; il corrigea l’abus que l’Auteur avoit censuré, & ne trouva lui-même aucuns censeurs. […] Hamilton, quoiqu’étranger, manioit notre langue avec une facilité bien rare jusqu’ alors. […] Quoi qu’il en soit, il est assez rare que cet Auteur ennuie, & c’est une assez bonne réponse à faire aux meilleures critiques. […] Un tel caractere est d’une espece rare.
Il l’observait avec finesse et savait la peindre avec un rare talent. […] Rare et précieuse aptitude ! […] C’était une femme de la plus rare intelligence, du goût le plus éclairé. […] Or une originalité si marquée est, chez ceux qui écrivent, un don très rare. […] D’ailleurs, cette sensation n’a rien de rare.
La première ode de Malherbe qui le mit en vue fut celle qu’il présenta, étant à Aix en 1600, à Marie de Médicis, la jeune reine qui venait prendre possession du trône : Peuples, qu’on mette sur la tête Tout ce que la terre a de fleurs… André Chénier, commentateur excellent, a remarqué les beautés rares, et à cette date toutes neuves, de cette ode qui aujourd’hui frappe bien plutôt le lecteur par ses côtés exagérés et faux. […] Dans ses œuvres rares, difficiles, toujours remaniées, qu’il prise haut, mais qu’il n’estima jamais assez terminées pour en publier lui-même le recueil, il semble avoir cherché surtout à donner des exemples d’une nouvelle et meilleure manière de faire : on dirait qu’il n’a voulu que changer le procédé et remonter l’instrument plutôt que d’en user largement lui-même. […] Il y a quelquefois chez Malherbe une grâce fine et rare qui, au milieu de cette hauteur et de cette roideur lyrique, a tout son prix. […] S’il dit les choses avec moins de particularité qu’Horace, il ne les rend pas avec moins de naturel ; car, en admettant que (les derniers vers exceptés) il n’y ait point d’ironie proprement dite dans le courant de l’ode d’Horace, on ne peut s’empêcher de remarquer qu’Alfius, ce soudain amateur des champs, se complaît fort, au milieu de son vœu frugal, à nommer les huîtres et les poissons du lac Lucrin, auxquels il déclare renoncer ; il y parle en détail des mets rares, des gelinottes, faisans ou autres oiseaux recherchés, auxquels il se promet désormais de préférer la mauve et l’olive.
Qu’ils sont rares les êtres qui sembleraient également à leur place, bons et excellents dans la vie privée, grands dans le public, comme Washington ou Mme Roland ! […] La jeune Phlipon, dans son avidité de savoir, dans son instinct de talent, lit toutes sortes d’auteurs, s’en rend compte, en fait des extraits, et s’en entretient, non sans étude, avec son amie : « Car, dit-elle très-judicieusement, on n’apprend jamais rien quand on ne fait que lire ; il faut extraire et tourner, pour ainsi dire, en sa propre substance, les choses que l’on veut conserver, en se pénétrant de leur essence. » Esprit ferme et rare, chez qui tout venait de nature, même l’éducation qu’elle s’est donnée ! […] Roland aussi commence à paraître, rare, austère, assez redouté d’abord. […] Roland qui, prudent observateur, s’en doute peut-être, qui ne s’en inquiète d’ailleurs qu’autant qu’il le faut, et qui s’avance, tardif, rare et sûr, comme la raison ou comme le destin.
On y peut étudier en abrégé le progrès croissant de ses bizarreries et de ses humeurs, entremêlées de retours pleins de grâce, et de rares mais charmants rayons. […] Pour montrer, avant tout, ce qu’était Mme de La Tour, cette Julie qui se croyait en droit d’être comparée à Julie d’Étanges, et pour prouver qu’elle n’en était pas trop indigne, je ne puis faire rien de mieux que de citer son propre portrait, envoyé par elle à Rousseau, un jour que celui-ci, dans une de ses rares boutades de galanterie, lui avait demandé comment elle s’habillait, afin de pouvoir se fixer l’imagination, disait-il, et se faire quelque idée d’elle. […] Elle se soumit à ces diminutions pénibles de témoignages déjà si marchandés et si rares, et se montra encore reconnaissante de ce qu’elle obtenait. […] Son amour était celui de l’idéale beauté, du fantôme auquel lui-même prêtait, vie et flamme : c’était ce fantôme seul, tiré de son sein, et formé d’un ardent nuage, qu’il aimait, qu’il embrassait sans cesse, à qui il donnait chaque matin ses baisers de feu, sur qui il plaçait, en les rassemblant, ses rares souvenirs de bonheur ; et quand il se présenta une femme réelle qui eut l’orgueil de lui montrer l’objet terrestre de son idéal et de lui dire : Je suis Julie, il ne daigna point la reconnaître ; il lui en voulut presque d’avoir espéré se substituer à l’objet du divin songe.
Parmi les modernes, on a les lettres latines d’Héloïse ; celles d’une Religieuse portugaise ; Manon Lescaut, la Phèdre de Racine, et quelques rares productions encore, parmi lesquelles les lettres de Mlle de Lespinasse sont au premier rang. […] Il est très rare en France de rencontrer, poussé à ce degré, le genre de passion et de mal sacré dont Mlle de Lespinasse fut la victime. […] Un moraliste du xviiie siècle, qui savait son monde, M. de Meilhan, a dit : « En France, les grandes passions sont aussi rares que les grands hommes. » M. de Mora ne trouvait pas même que les femmes espagnoles pussent entrer en comparaison avec son amie : « Oh ! […] « Je ne me sens le besoin d’être aimée qu’aujourd’hui ; rayons de notre dictionnaire les mots jamais, toujours. » Le second volume n’est plus qu’un cri aigu avec de rares intermittences.
La tête du malade est du plus grand goût de dessin, de la plus rare expression. […] Non, puisqu’il y a une image plus rare, celle de l’oiseau qui bat les ailes de joie. […] Si au contraire elle ne serpente pas assez, si elle parcourt un long espace sans trouver aucun objet qui la rompe, la composition sera rare et décousue. […] Je crois avoir déjà remarqué dans quelques-uns de mes papiers, où je m’étais proposé de montrer qu’une nation ne pouvait avoir qu’un beau siècle, et que dans ce beau siècle un grand homme n’avait qu’un moment pour naître, que toute belle composition, tout véritable talent en peinture, en sculpture, en architecture, en éloquence, en poésie, supposait un certain tempérament de raison et d’enthousiasme, de jugement et de verve, tempérament rare et momentané, équilibre sans lequel les compositions sont extravagantes ou froides.
Je distinguerai les imbéciles et les rares. […] Il l’était de par tout son être exquis et rare.
Combien est rare, parmi nous, ce culte pur de toutes les parties de l’âme humaine ? […] Situation déplorable à une époque surtout où, sauf de rares exceptions, le morcellement de la propriété rend impossible les grandes choses aux particuliers.
« Qu’ont-ils vu, ces rares génies, qu’ont-ils vu plus que les autres ? […] Mais, en dérobant à ce rare génie la misère de l’homme, nous n’avons pas su, comme lui, en apercevoir la grandeur.
La nature a fait un partage inégal de ses biens entre ses enfans, mais elle n’a voulu deshériter personne, et l’homme entierement dépourvû de toute espece de talent, est aussi rare qu’un génie universel. Des hommes sans aucun esprit, sont aussi rares que les monstres, dit celui de tous les hommes qui s’est fait la plus grande réputation dans la profession d’instruire les enfans.
L’amour est plus rare que le génie même. Il est aussi rare que la sainteté. Et l’amitié est plus rare que l’amour. […] « Même je remarquais, touchant les expériences qu’elles sont d’autant plus nécessaires qu’on est plus avancé en connaissance ; car, pour le commencement, il vaut mieux ne se servir que de celles qui se présentent d’elles-mêmes à nos sens, et que nous ne saurions ignorer pourvu que nous y fassions tant soit peu de réflexion, que d’en chercher de plus rares et étudiées : dont la raison est que ces plus rares trompent souvent, lorsqu’on ne sait pas encore les causes les plus communes, et que les circonstances dont elles dépendent sont quasi toujours si particulières et si petites, qu’il est très malaisé de le remarquer. […] Tout est dans l’insertion et l’insertion est extrêmement rare.
Quant à ceux qui veulent étudieriez différentes manières de Wagner, de tels programmes leur sont des bonheurs précieux autant que rares. […] C’est les émotions, la passionnante angoisse et la fervi de joie, états suprêmes, et rares de l’esprit ; elles sont encore un tourbillon confus de couleurs, de sonorités et de pensées : et puis un éblouissement devant ce vertige. […] Il fut, d’abord, la première sculpture polychrome des Égyptiens9, puis la sculpture monochrome, ou plutôt achrome, des Grecs, non moins soucieuse, en ses rares chefs-d’œuvre, de la sincérité et de la vie. […] Des maîtres admirables, aux yeux doués d’une rare sensibilité, habituèrent les artistes à voir les choses dans l’air qui les baignait. […] Son rare enthousiasme ne peut être excité que par une violente harangue politique, ou bien par un chœur de Haendel chanté par cinq mille voix avec accompagnement du plus grand orgue de l’Europe, d’un orchestre de mille hommes et de plusieurs fanfares.
Que la vogue change, que la faveur se porte sur un autre genre, et les romans deviendront aussi rares que sont devenues rares les tragédies. […] Improbable nullement, rare certainement. […] Enfin, qualité exquise autant que rare, il n’a jamais aimé que les succès de bon aloi. […] C’est cette richesse poétique, rare et cachée comme l’émeraude, dont M. […] Cherbuliez les a distingués et nommés avec une sagacité rare.
Mais je crois aussi que c’est une exception fort rare. […] Certes, cela n’est point vulgaire ; la noblesse est ce qui manque le moins à un sentiment aussi exquis, aussi rare. […] Les rares et magnifiques sonnets de M. […] Si la gloire du nom est rare, la vie de l’œuvre l’est infiniment plus. […] Ce qui est rare, c’est la mise en œuvre, c’est le talent ; et ce qui est unique, c’est le bonheur de naître à propos.
Mais ces cas sont extrêmement rares. […] Car les spécimens n’en sont point rares. […] Il n’est point rare qu’elle se trouve au début. […] C’est une contradiction qui n’est point rare, mais dont il est rare qu’on ait souffert plus cruellement. […] Mais il faut ajouter tout de suite que la recherche du rare, des types rares, des sentiments rares et des mots rares est justement le contraire du réalisme.
Il aime les livres ; il en a réuni depuis des années une fort belle et riche collection qui, si l’on y jetait seulement les yeux, permettrait d’apprécier l’esprit du collecteur ; — chose rare ! […] — les meilleurs auteurs latins et français dans leurs éditions les plus estimées, dans leurs conditions les plus parfaites et les plus irrépréhensibles ; pas trop de curiosité, pas de ces goûts d’exception qu’on voit présider au choix singulier de quelques cabinets rares ; une bibliothèque à la fois de luxe et de bon sens, et faite pour être lue. […] Mais celui qui ne sentirait pas tout ce qu’il y a de rare, de foncièrement salubre et de moralement exquis dans les bonnes pages que nous indiquons, ne s’expliquerait pas l’estime universelle qu’il inspire.
Entouré des génies les plus rares, c’est à eux qu’il rend son hommage, & non aux idoles de la Fortune. […] Retenir l’empire de la puissance est un héroïsme trop grand pour qu’il ne soit pas aussi peu rare, & qui peut blamer Christine parce que à sa place il auroit eu le courage de ne point abandonner l’autorité suprême, le Philosophe sera-t’il toujours orgueilleux de la trempe heureuse de son ame, & exigera-t-il sans cesse des Souverains cette même fermeté qu’il auroit pû avoir. […] Nous ne redouterons pas vos talens, lorsqu’ils contribueront à embellir ce qui nous environne ; je m’éleverai contre cette coutume barbare qui étouffe dans les jeunes personnes de votre sexe les germes précieux des plus rares talens.
vous qui m’entendez, qui possedez ce sentiment rare, ce tact fin & délicat, ce feu subtil inconnu, vous me dispenserez de définir ce que vous sentez avec transport. […] Tandis que l’ennemi des beaux Arts sur le déclin de ses années, à charge à lui-même & aux autres, éprouvera un vuide affreux, n’envisageant que le spectre de l’ennui, & les ombres horribles de la mort : l’homme éclairé jouira du spectacle de sa vie passée ; il aura sçû apprécier, ce que vaut l’existence, & fort par sa pensée, il ne redoutera point l’instant inévitable qui doit terminer sa carrière : ainsi le généreux Fénélon, qui montra à l’Univers le caractère rare & sacré d’une ame remplie à la fois d’une extrême vertu & d’une extrême douceur, ne perdit point dans les Cours la simplicité de ses mœurs, & conserva dans son exil cette égalité d’ame que rien ne pût corrompre. […] Oubliez-vous qu’on ne pardonne pas à l’envieux, & au méchant même en faveur de son génie, & que le souverain mépris s’allie quelquefois à l’admiration des plus rares talens.
Et, à m’analyser moi-même, je reconnais que, sauf les rares satisfactions de malignité à découvrir des défaillances chez un camarade de lettres, agrément de mes lectures a toujours coïncidé avec la reconnaissance de leur valeur. […] La sincérité en critique est la vertu la plus rare. […] Mais, outre que le risque est de nos jours assez rare, les couronnes tressées à des médiocres ne sont pas moins ridicules auprès un siècle.
Louis XIV donnait à Charles II des subsides, il lui donna aussi une maîtresse : l’émigration de Jacques II le rendit à Louis XIV en lui donnant un grand guerrier, Berwick, et, ce qui est plus rare, un charmant écrivain, le chroniqueur léger des élégances. […] Rien n’égale cette façon de dire et de conter, facile, heureuse, unissant le familier au rare, d’une raillerie perpétuelle et presque insensible, d’une ironie qui glisse et n’insiste pas, d’une médisance achevée. […] Au train dont y va le monde, l’espèce de ces esprits rares se perdra-t-elle ?
Et, en effet, le caractère de ces lilliputiennes comédies, c’était la faculté très inattendue, dans un journal très hardi et qui, comme un postillon de noce, n’avait pas peur de verser dans toutes les ornières, de se risquer avec une grâce incomparablement audacieuse et… heureuse sur les bords les plus glissants de cet abîme de l’indécence qui fait tourner la tête aux imaginations pudiques, et de se retenir… et de n’y tomber jamais… Est-ce assez rare, cela ? […] Eh bien, la femme de ce talent rare, — plus rare que des talents plus grands, — et que je vous donne comme la plus suave boîte à rouge nuancé que les femmes puissent se mettre sur la joue, et qui ne s’y fonce jamais trop, c’est cette femme qui prend le parti de nous écrire un roman !
L’espèce en est rare et les romanciers que nous avons étudiés après Poe n’y appartiennent pas. […] Mais cette tristesse spéculative est rare chez nos littérateurs et nos poètes. […] Que ce large état de paix soit le partage de quelques rares et gigantesques penseurs, on peut l’affirmer encore, en entendant l’immense lamentation qu’exhale le chœur des beaux livres « Pour les délicatesses, les mélancolies exquises d’une œuvre, dit M. de Goncourt, les fantaisies rares et délicieuses sur la corde vibrante de l’Aine et du cœur, faut-il un coin maladif dans l’artiste ? […] Les initiés, les admirateurs sont rares et M. […] Ces analogies sont rares.
Marivaux n’a pas seulement un talent fin et une rare fertilité d’idées qu’il rend avec imprévu, il a la théorie de son talent et il sait le pourquoi de sa nouveauté ; car, de tous les hommes, Marivaux est celui qui cherche le plus à se rendre compte. […] Il lui faut une expression qui fixe positivement ses idées ; et c’est de cette justesse si rare que naît cette façon de s’exprimer simple, mais sage et majestueuse, sensible à peu de gens autant qu’elle le doit être, et que, faute de la connaître, n’estiment point ces sortes de génies qui laissent débaucher leur imagination par celle d’un auteur dont le plus grand mérite serait de l’avoir vive. […] C’est en ce sens qu’il y a vraiment des grands hommes, toujours rares, toujours possibles, reconnus et salués bientôt (malgré les contradictions) quand ils apparaissent. […] Aussi qu’il est rare qu’un auteur le soit véritablement, et qu’il se donne au public avec sa valeur propre et sa physionomie entière !
Raoul-Rochette, pour quelques bons mots de Courier qui sont piqués comme des étiquettes à quelques noms, et que la politique, dans le temps, a fait retenir, on laisse en paix les estimables travailleurs et les rares inventeurs, les gens d’esprit et les manœuvres ; la méthode apparente est la même ; on les confond ensemble et l’on passe. […] Il y aurait bien plus de profit à découvrir, à dénoncer au public les gens à idées dans l’érudition : ils sont rares. […] En quelques rares endroits, si je l’osais remarquer, son raisonnement, en faveur de l’authenticité historique qu’il soutient, m’a paru plus spécieux que fondé, comme quand il dit par exemple : « Les premiers siècles de Rome vous sont suspects à cause de la louve de Romulus, des boucliers de Numa, du rasoir de l’augure, de l’apparition de Castor et Pollux… ; effacez donc alors de l’histoire romaine toute l’histoire de César, à cause de l’astre qui parut à sa mort, dont Auguste avait fait placer l’image au-dessus de la statue de son père adoptif, dans le temple de Vénus191. » Une fable qu’on aura accueillie dans une époque tout avérée et historique ne saurait en aucune façon la mettre au niveau des siècles sans histoire et où l’on ne fait point un pas sans rencontrer une merveille. […] Après tout, aux diverses époques de la république expirante ou de l’empire, dans les rares intervalles de liberté comme sous la censure des maîtres, il n’y avait à Rome que le journal en quelque sorte rudimentaire, un extrait de moniteur, de petites affiches et de gazette de tribunaux ; le vestige de l’organe, plutôt que l’organe puissant et vivant.
Cette chose rare, le respect, que M. […] Sa pensée lui naît toute rédigée, dans cette forme rare, savante et assez imprévue, qui est la sienne. […] Ce double dédain est rare et lui semble facile ; c’est ici qu’on pourrait trouver que la hauteur de cœur et un reste de hauteur de race se confondent en lui. […] Depuis lors M. de Broglie était rentré au sein de ce qu’on pouvait appeler la plus honorable retraite, et il ne reparut qu’à de rares moments dans l’action politique.
Un Magistrat allait par son mérite à la première dignité, il était homme délié et pratique dans les affaires ; il a fait imprimer un ouvrage moral, qui est rare par le ridicule. […] Un tissu d’énigmes leur serait une lecture divertissante ; et c’est une perte pour eux que ce style estropié qui les enlève soit rare, et que peu d’écrivains s’en accommodent. […] Il est peut-être moins difficile aux rares génies de rencontrer le grand et le sublime, que d’éviter toute sorte de fautes. […] Il porte plus haut ses projets et agit pour une fin plus relevée : il demande des hommes un plus grand et un plus rare succès que les louanges, et même que les récompenses, qui est de les rendre meilleurs.
Celui même qui a dressé dans son cerveau, avec des assises dans l’être entier, un autel au dieu des voluptés secrètes, contemplant sa propre image que des rides précoces lui interdisent seules de comparer à l’éclatante beauté d’un Narcisse, s’adresse à lui-même ces paroles dans la mystérieuse solitude de son être : « Restons de plus en plus en nous-mêmes, d’essence toujours plus rare et sans cesse plus précieuse ; ne troublons pas ce qui doit rester pur, pour dominer les vains fantômes illusoires des réalités et l’immense troupeau des apparences. […] Cette variété d’esprits précieux et rares dépend d’une esthétique tellement raffinée que tout usage de la vie leur est insupportable et vulgaire, s’ils ne l’ont auparavant épurée jusqu’au point où il leur est impossible d’en jouir matériellement et sensuellement. Les enfants de cette race élue pour les exceptionnels destins, ne sont pas rares parmi nous, et nous n’avons pas à craindre pour aujourd’hui l’extinction de cette aristocratie du non-sens. […] Si, d’aventure, vous le questionnez, soyez sûr qu’il vous faudra prendre l’exact contraire de sa réponse, si vous ne voulez pas commettre une erreur, et cela toujours par le même besoin invincible de cacher la vérité afin de la conserver plus rare et plus personnelle.
Très rares sont ceux qui parviennent à prendre conscience de leur état véritable, du mal qui les ronge sans qu’ils s’en doutent, et très rares donc sont ceux qui en guérissent. […] Après dix ou quinze années de cette culture, il est rare qu’elle ne soit pas arrivée à son but, qu’elle n’ait pas l’outil qu’elle voulait. […] L’absorption du prêtre par l’humanité, sa rentrée dans l’ordre naturel m’apparaît pour cela d’une haute signification, comme le signe avant-coureur d’un avenir où l’imposture et le sophisme ne verront plus autour de leurs autels ébranlés que quelques rares dévots.
Trop préoccupé du Cénacle qu’il avait chanté autrefois, il lui a donné dans ma vie littéraire plus d’importance qu’il n’en eut dans le temps de ces réunions rares et légères. […] Cette légère réserve faite, je ne sais rien de mieux raconté. » M. le comte de Circourt enfin, cet homme de haute conscience et de forte littérature, dans une lettre qu’il m’écrivait le 24 avril 1864, reconnaissait la vérité du Portrait et s’exprimait en ces termes par lesquels je terminerai et qui me couvrent suffisamment : « Les grands côtés du talent de M. de Vigny sont mis par vous en relief d’une manière tout à la fois large et fine ; et malgré la sévérité de quelques-unes de vos appréciations, je n’ai rien à souhaiter de mieux pour la mémoire de M. de Vigny, si ce n’est que la postérité s’en tienne sur lui à votre jugement, ce que j’espère ; j’apprends que ses vrais (et par conséquent rares) amis sont tout à fait de ce sentiment. » 79.
M. de Bernard est un romancier ; il unit un rare et facile entrain dramatique à un précoce esprit d’observation ; à vingt-cinq ans il savait la vie, et il s’y joue en l’exprimant. […] Ce qui est si rare de nos jours, M. de Bernard a du comique.
En cette occasion, le symbolisme fut attaqué avec violence par les nouveaux écrivains, qui critiquaient moins les poètes et les personnalités qui s’en dégagèrent que les stériles principes et les rares œuvres de cette époque inféconde. […] René Ghil, ce genre de littérature ne peut séduire que de rares adolescents dépourvus de sens vital et un nombre plus restreint encore de jeunes femmes oisives, mais il ne correspond en aucune façon à la totalité des aspirations actuelles.
Les beaux vers, ces perles du collier des nations jeunes, qu’elles ne mettent plus dans leur vieillesse, les beaux vers deviennent de plus en plus rares ; les âmes tarissent, les imaginations se décolorent, et ce douloureux et magnifique oiseau, au bec lumineux, à la gorge teinte de la pourpre éclatante de son cœur : la Poésie, meurt, étouffé sous le large pouce de ces intérêts matériels dont la main brutalise à cette heure les plus pures et les plus fortes intelligences… Seulement, s’il y avait à faire une exception en faveur des poésies sur lesquelles les reflets d’un enthousiasme sincère se voyaient encore, n’était-ce pas en faveur de celles qui s’étoilent d’un nom glorieux et s’appellent Poésies de l’Empire 57? […] Il doit à ce précieux accord, plus rare qu’on ne le croit chez les artistes, si souvent en lutte, comme hommes, avec leur idéal, l’accent quelquefois très profond et toujours passionné de sa poésie, — cet accent qui reste et qui vibre dans l’expression, quand même cette expression n’a pas trouvé, sous la main du poète, toute sa perfection et toute sa rondeur.
Cela n’est plus de ces espèces de vins joyeux qu’il a si largement versés et sablés toute sa vie, ce sont les gouttes précieuses d’un Lacryma Christi poétique des plus rares, et qui mérite ce nom mélancolique ; car il verse au cœur moins l’ivresse qu’une divine mélancolie. […] Il ne l’a été que par veines rares ; il ne l’a été que par gouttes et par gouttelettes, retrouvées au fond de ce verre étroit qu’il a appelé ses Poésies complètes.
À la suite de tous ces noms de guerriers ou de princes rassemblés des trois parties du monde, c’est un spectacle curieux de retrouver les noms du Dante, de Pétrarque, de Boccace, de l’Arioste, du cardinal Bibiéna, auteur de la comédie de la Calandre, jouée au Vatican sous Léon X, et du célèbre Machiavel ; sans compter cette foule innombrable de savants, presque tous Grecs ou Italiens, qui dénués, il est vrai, de ce mérite rare du génie, contribuèrent, cependant, par leurs travaux, au rétablissement des lettres, en faisant revivre les langues qui ne s’étaient conservées que chez les chrétiens de Constantinople, et la philosophie ancienne qui, depuis la chute de l’empire, n’avait été cultivée que par les musulmans arabes. […] « Je te salue trois fois, très grand, auguste Charles-Quint, qui par le concours et l’union des vertus les plus rares, as mérité le surnom de très invincible empereur. » On reconnaît à cette grande phrase, que Charles-Quint devait lire l’article.
Mallarmé fut rare de ces deux manières, entre lesquelles il nous aide à établir des correspondances. […] On n’est un poète qu’à tels moments fulgurants et rares, dans tels états de grâce. […] La chambre serait malaisément prête à la visite sublime, à l’inspiration, rare hélas ! […] Mallarmé n’est pas d’abord un hermétiste qui enferme, de propos délibéré, sous une forme rare, des symboles profonds. […] Mallarmé est un artiste en métaphores rares, jolies, délicatement filées.
Une convenance naturelle ; ce bon ton inné, qui n’est que le rapport juste de l’homme avec tout homme ou avec toute chose ; un langage sonore, cadencé et grave, quoique gracieux dans ses inflexions un peu lentes ; un recueillement respectueux, mais nullement bas ou servile, devant ceux qu’il écoutait ; la dignité d’un cœur libre dans la déférence d’un disciple ou d’un fils : voilà ce rare jeune homme. […] Il y vit aimé, indépendant, studieux, dans ce délicieux loisir des jeunes années, repos d’une union formée par le cœur, lune de miel prolongée de l’existence, où la destinée bien rare verse du jour sans ombre, des joies sans lie et des douceurs sans mélange d’amertume à ses favoris. […] Il est doux, même pour les misérables, de contempler ces félicités complètes ; elles leur prouvent que, si le bonheur est rare, au moins il est possible en ce triste monde, et que, parmi tant de mauvais rêves, il y a aussi de phénoménales réalités. […] Cette chaîne, boisée d’épaisses bruyères et de rares châtaigniers, est un amphithéâtre d’où l’on a pour spectacle, d’un côté, les neiges dentelées des Alpes, de l’autre, la vallée creuse et verte de Saint-Point, avec ses tours dorées par le soleil des soirs : site solennel, quand on s’y assied en regardant le mont Blanc ; site modeste et recueilli, quand on s’y retourne pour regarder la vallée sombre et la vieille ruine du château. […] ils deviennent rares dans cette dernière et précaire demeure de nos bonnes années.
Les images, comme chez ceux-ci, y sont rares et justes ; le descriptif n’y a rien de l’inventaire ; il est de sentiment, comme tout le reste. […] Mais de Vigny avait le don si rare des beaux vers, et telle est l’excellence de la beauté poétique, que là où elle brille il y a vie et durée. […] Une seule chose est de source dans Casimir Delavigne, c’est l’esprit ; et cet esprit, joint à un rare talent de versification et au don de l’élégance, lui a fait faire le meilleur de ses ouvrages, celui qui lui appartient le plus en propre, l’École des Vieillards. […] Dans l’Histoire de la conquête de l’Angleterre par les Normands, un critique si éminent a signalé un genre d’injustice d’ailleurs si rare, qu’il y a du mérite à en encourir le reproche, la partialité pour les vaincus. […] Une mode vient-elle à tourner les esprits d’un autre côté, tout ce bruit cesse, et voilà de la pâture pour les rares curieux des livres qui ne se lisent plus.
C’est que, pour la faire, l’économiste se contente de se recueillir, de prendre conscience de l’idée qu’il se fait de la valeur, c’est-à-dire d’un objet susceptible de s’échanger ; il trouve qu’elle implique l’idée de l’utile, celle du rare, etc., et c’est avec ces produits de son analyse qu’il construit sa définition. […] Mais quand on songe aux faits innombrables dont une pareille théorie doit rendre compte, comment accorder la moindre valeur démonstrative aux faits, nécessairement très rares, qui sont ainsi cités au hasard de la suggestion ? […] Il est logique que les industries les plus productives soient les plus recherchées ; que les détenteurs des produits les plus demandés et les plus rares les vendent au plus haut prix. […] Or, les faits que l’on n’observe que sur soi-même sont trop rares, trop fuyants, trop malléables pour pouvoir s’imposer aux notions correspondantes que l’habitude a fixées en nous et leur faire la loi. […] S’il y en a et si le concept formé par le groupement des faits ainsi rapprochés coïncide, sinon totalement (ce qui est rare), du moins en majeure partie, avec le concept vulgaire, on pourra continuer à désigner le premier par le même mot que le second et garder dans la science l’expression usitée dans la langue courante.
À mesure qu’on avance dans la vie, on s’aperçoit que le courage le plus rare est celui de penser. […] Ces trésors étaient rares à Rome et ils abondaient à Alexandrie. […] Elle est encore un habile et rare conteur, mais adieu la poésie, adieu le charme ! […] Il faut enfin avoir ce don de sympathie qui est rare et que Tellier possédait si pleinement. […] Il unissait la tolérance à la foi et c’est une rare et belle alliance.
C’est partout, sous des formes diverses, une recherche du rare, du raffiné, du brutal ou du poignant. […] Ils ont aimé passionnément les lettres, avec une sincérité entière et un désintéressement rare ; poussant bravement leur manière jusqu’à l’extrême, sans consentir jamais à des atténuations qui eussent peut-être suffi à leur amener le grand public ; poussant dans les derniers temps le courage de leur opinion jusqu’au baragouin le plus distingué. Et leur talent est bien aussi celui de Charles Demailly : … Talent nerveux, rare et exquis dans l’observation, toujours artistique, mais inégal, plein de soubresauts, et incapable d’atteindre au repos, à la tranquillité des lignes, à la santé courante des œuvres véritablement grandes et véritablement belles9. […] Non qu’ils ne soient en bien des passages de rares psychologues. […] Rappelons quelques passages caractéristiques : Anatole était le vivant exemple du singulier contraste qu’il n’est pas rare de rencontrer dans le monde des artistes.
Il y a des hommes à qui la sagesse du conseil a été donnée : ils sont rares, et pourtant il y en a eu dans tous les temps. […] Dans les temps qui ont précédé et suivi la Terreur, sous la Constituante, sous le Directoire, sous le Consulat, il y a eu de tels hommes ; il serait curieux d’en pouvoir étudier de près quelques-uns, et dans leurs mémoires, dans leur correspondance, de pouvoir montrer ces preuves de bon conseil et de rare jugement qui les recommandaient de près, même aux adversaires, et qui les ont ensuite naturellement portés aux premiers rangs civils dans la société rétablie. […] À la requête des états de Bourgogne, Jeannin fut pourvu d’un office de conseiller au parlement de Dijon, office créé tout exprès en juin 1579, « et il y fut reçu à condition de ne pouvoir résigner son office qu’après cinq aimées d’exercice, tant la Cour de parlement appréhendait de perdre un si rare esprit ».
Il avait aussi un sens exquis de l’art : il avait ce don rare, la mesure dans l’énergie. […] De l’Italie, et de l’antiquité, même de l’antiquité grecque qu’il eut le rare talent de percevoir à travers les insuffisantes traductions, il a tiré son goût délicat, et ce sens de la forme, ce besoin d’une perfection difficile, qui ont réglé l’emploi de ses facultés poétiques : c’est par là qu’il est devenu un artiste, et qu’il a travaillé sa matière en œuvre d’art. […] Chaque fable déroule ses rythmes particuliers, insaisissables, instables, sans loi apparente ni périodicité définie : on compterait les pièces où le mètre est fixe et uniforme, et il est rare qu’elles soient parmi les chefs-d’œuvre.
(Chroniqueurs parisiens III) Henri Rochefort Il est rare qu’en étudiant une œuvre, même celle d’un auteur dramatique ou d’un romancier, on puisse séparer nettement l’homme de l’écrivain et toucher à celui-ci sans effleurer au moins celui-là. […] Il eut alors ce rare bonheur, et qu’il n’a guère retrouvé depuis, de faire une œuvre bonne et juste tout en obéissant à son démon intérieur, d’avoir raison en ayant de l’esprit, et le genre d’esprit dont il est capable. […] Et ces plaisirs doivent être d’une espèce assez rare et délicate pour qu’il soit fort éloigné d’y renoncer jamais.
Mais le volume trop rare ne suffisait plus aux curiosités des jeunes hommes de vingt ans : le poète voulut bien leur « donner lui-même un Florilège, ou très modeste anthologie de ses écrits ». […] l’on vous a dit qu’autrefois j’ai composé des vers, des livres riches et rares, qu’on ne trouve plus aux bibliothèques, N’en croyez rien. […] Défions-nous de prétendre saisir le charme grec… Il reste à Leconte de Lisle d’avoir composé d’admirables vers, ce qui est bien la seule œuvre qu’on puisse demander à un poète, de les avoir faits non seulement avec âme, avec intelligence, avec adresse, mais encore avec cette rare loyauté d’homme qu’on louangea justement sur sa tombe.
Mais il est rare qu’un écrivain se borne à retracer une seule espèce de sentiments. […] La Fontaine trahit une certaine antipathie pour l’enfance, « cet âge sans pitié », en même temps qu’une sympathie profonde et fort rare de son temps pour les bêtes. […] Le simple examen du nouveau tableau qu’on forme ainsi permet de constater si les idées de l’écrivain qu’on étudie étaient rares ou nombreuses, claires ou obscures, indécises ou arrêtées ; si elles ont changé au cours de sa carrière s’il y a des matières auxquelles il songeait peu ; si au contraire il a été obsédé par la préoccupation de tel ou tel problème.
Sterne n’a certainement pas les qualités épiques du Rieur gigantesque qu’est l’auteur du Pantagruel ou du Gargantua, mais il en a d’autres non moins rares. […] Stapfer, en faisant cela, a démontré aussi qu’il avait de rares aptitudes de critique. […] Avec l’admiration qu’il a pour Sterne et qui nous paraissait d’un heureux augure, nous aurions cru qu’il eût saisi l’occasion de nous donner sur ce rare génie que Jean-Paul appelle, je ne sais plus où « la rose bleu de ciel dans l’ordre des intelligences », quelques pages de critique humaine et profonde.
Les exemples de relations aussi nettes sont rares dans l’histoire. […] Or on sait que l’histoire ne se répète guère ; il est rare qu’elle ramène deux fois les mêmes combinaisons de conditions. […] Supposons, par exemple, que la coïncidence historique de l’égalitarisme avec la centralisation ne se révèle que très rarement ; si du moins nous saisissons clairement, sur ces exemples rares, les processus en vertu desquels les esprits exposés à l’action d’un régime centralisé doivent être portés vers les idées égalitaires, nous jugerons légitimement que la coïncidence en question cache une loi : la psychologie peut suppléer aux insuffisances de l’histoire pour conférer aux propositions sociologiques toute la vraisemblance dont elles sont aujourd’hui capables.
Avec les rares fragments qui nous restent de son œuvre, nous avons la preuve du contraire. […] Enfin un curieux témoignage à la gloire de ce vieux poëte de la république, c’est le brillant abréviateur de l’histoire romaine, le flatteur de l’empire, Velléius Paterculus, écrivant, à une des dates mémorables de son récit : « Dans le cours de cette même époque169, parurent les rares génies d’Afranius dans la comédie romaine, de Pacuvius et d’Accius dans la tragédie, d’Accius élevé jusqu’à l’honneur de la comte paraison avec les Grecs, et digne de se faire une si grande place parmi eux qu’il soit presque impossible de ne pas reconnaître, chez eux plus de perfection, et chez lui plus de verve. » Alors même que cet éloge expressif était arraché au bon goût de Velléius, l’éclat du siècle d’Auguste, l’urbanité nouvelle et aussi les précautions politiques de son règne avaient, selon toute apparence, bien éloigné de la mémoire et de la vue des spectateurs romains les drames de la vieille école. […] Quant à Pollion, que Virgile comparait à Sophocle, nous ne connaissons de ses drames que le conseil d’Horace lui disant : « Laisse quelque temps la Muse sévère de la tragédie manquer au théâtre171. » Et rien, dans les monuments trop rares de cette époque, ne nous apprend que cette interruption ait cessé.
Ces qualités sont immenses, diverses, rares à rencontrer dans un même homme. […] Voilà, selon nous et selon tout le monde, les conditions si rares et si élevées que l’histoire bien faite exige du grand historien. […] Nous n’avons jamais reconnu ni petitesse ni gaucherie dans l’esprit de cet homme d’État et de cet écrivain ; ce ne sont pas là les défauts que ses ennemis eux-mêmes éplucheront dans sa rare nature. […] Pitt est une des rares préventions d’esprit et une des rares injustices de cœur de M. […] Pitt est, selon nous, une des rares mais grandes défaillances d’esprit politique dans le livre de M.
Il n’est pas rare de voir une passion non satisfaite s’épanouir en inventions intellectuelles plus ou moins originales. […] Voilà une des rares journées de ma vie que j’aie passée dans l’illusion complètement et depuis un bout jusqu’à l’autre. […] Certes, on peut être à la fois un grand logicien et un grand inventeur, mais cela suppose une rare souplesse, et une force à peu près aussi rare de l’intelligence. […] Prenons, en effet, une pensée originale, la plus haute et la plus rare. […] Mais les exemples ne sont pas très rares de génies originaux devenant les victimes de leur invention à laquelle ils n’ont pas su s’adapter.
Ses beaux volumes, magnifiquement imprimés, ne le sont pas à ses frais (chose rare parmi les poètes modernes). […] Turquety, ce qui est rare, est un poète convaincu37.
C’était la détresse fière et décente, le ménage soutenu par la vente lente d’albums, de collections, de bouquins rares, et puis la maladie, aggravée… Une nuit, Mme Laforgue, au réveil, trouvait son mari mort à côté d’elle. […] Les rares amis qu’il a, achèvent de le tirailler en tous sens.
De là, les raffinements les plus extraordinaires : après la Rime riche, on a voulu la Rime rare ; et toutes les gentillesses exotiques imaginables s’implantèrent comme des panaches de roi nègre au derrière du pauvre Alexandrin. — De là, un étrange abus du Sonnet dont on fit une sorte de monstre tour à tour tableau, statue, orfèvrerie, quinquaille, appelant cet éloge : « Comme c’est bien fait ! […] Va, suis-le, il est l’enfant nouveau qui dira ton âme à toi et la dira librement, se moquant de la Rime riche et de la Rime rare, du nombre et de la quantité des syllabes et des choses « bien faites » et de tout cela qu’inventèrent les Maîtres et les Habiles. » IV « Or, sais-tu ce qui arrivera ?
L’homme qui a fixé ces souvenirs fut un professeur savant et modeste, qui, doué des aptitudes les plus rares de la pédagogie, dévoua sa vie à l’enseignement et ne chercha que là sa gloire. […] Eh bien, ce sont les souvenirs de cette lointaine et première époque de sa vie que Vaultier avait écrits avec un détachement de tout, avec une absence de prétention si rare, que cela est presque de l’originalité dans ce temps où les grenouilles de l’individualisme crèvent dans tous les livres pour se donner des airs de bœuf insupportable !
Les éloges funèbres des particuliers devinrent donc beaucoup plus rares ; cet honneur ne fut presque rendu qu’à la famille impériale. […] Enfin, il vint à parler de sa rare prudence et de sa profonde sagesse, c’est-à-dire, de la profonde sagesse d’un empereur qui n’avait ni une idée dans la tête, ni un sentiment dans le cœur ; qui ne sut jamais ni vouloir, ni aimer, ni haïr ; toujours prêt à obéir à qui daignait lui commander, jouet de ses courtisans, esclave de ses esclaves même, et si stupide qu’il inspirait encore plus de pitié que de mépris.
Chose rare dans le temps où nous vivons, chose rare dans tous les temps, il n’a pas voulu plus qu’il ne pouvait ; il pouvait sans doute plus qu’il n’a voulu. […] Toutes les métamorphoses que j’ai tâché d’indiquer sont racontées dans Raphaël avec une rare vivacité d’expression. […] Il est bien rare qu’elle se concilie avec la pratique de l’industrie littéraire. […] L’improvisation éblouit l’auditoire ; il est bien rare qu’elle éblouisse les lecteurs. […] L’auditoire de la première représentation a fait preuve, nous l’avouons, d’une rare longanimité.
Le génie poétique est rare, ses éléments sont invariables. […] Le génie du calcul n’est pas très rare. […] Un homme de génie peut devenir fou, comme un imbécile, mais cela est rare, les grands hommes étant rares, et cela ne prouve rien, ni en faveur des sots ni contre les gens d’esprit. […] C’est le cas le plus rare. […] Aussi les appellations modernes sont-elles très rares.
Il est si rare que nous puissions nous rendre la justice de leur avoir prodigué assez de tendresse, quand ils vivaient ! […] Il fut, par essence, un génie rare. […] Il a pratiqué la plus rare des intransigeances, celle de la délicatesse. […] C’est là une condition mauvaise pour la floraison de certaines plantes rares, mais les moralistes négligent d’ajouter que l’espèce des plantes rares est bientôt détruite, quand la marée démocratique déferle à plein flot. […] De là dérive leur souci de l’épithète rare, leur scrupule sur là délicatesse et sur la sonorité des termes.
A la maison attenait un jardin où Mirbeau cultivait des fleurs rares. […] Néanmoins ses engouements étaient plus rares que ses haines. […] Verhaeren est l’évocateur d’une réalité idéalement déformée, où l’apport du réel est amplifié par une optique imaginative d’une rare et magnifique puissance. […] Des arbustes rares y mêlaient leurs feuillages métalliques et vernissés. […] Certes, les fleurs de ces plates-bandes ne sont pas des fleurs rares, mais y a-t-il des fleurs communes ?
Telle est l’idée maîtresse de cette Gloire du Verbe, l’un des rares poèmes de ce temps où l’idée et le mot marchent d’accord en harmonieux rythme. […] Il dédaigne tout le connu, ou l’ignore ; sa collection n’est que de pièces rares et même uniques, mais qu’il n’a pas le souci de mettre sous clef, car elles lui appartiennent tellement qu’un larron les déroberait vainement. […] Que de choses, sans doute, il n’a pas transcrites, n’osant pas, doutant d’avoir trouvé l’expression vraie, la seule, la très rare, l’inédite ! […] C’est un don assez rare pour qu’on en parle. […] Cette pleine conscience de soi-même peut s’appeler l’originalité de l’âme, — et tout cela n’est dit que pour signaler le groupe d’êtres rares auquel appartient M.
D’ailleurs, j’en prends à témoin les maîtres, l’émulation dans les collèges est bien rare ; et à l’égard de la société, elle n’est pas sans de grands inconvénients. […] Un ouvrage fait dans ce goût pourra joindre au titre de dictionnaire celui de raisonné, et ce sera un avantage de plus : non seulement on saura assez exactement la grammaire de la langue, ce qui est assez rare, mais ce qui est plus rare encore, on la saura en philosophe. […] Ne serait-ce point pour cette raison qu’il est rare de lire, sans être fatigué, bien des vers de suite, et que le plaisir causé par cette lecture diminue à mesure qu’on avarice en âge. […] Voltaire est presque le seul de nos grands poètes dont la prose soit du moins égale à ses vers ; cette supériorité dans deux genres si différents, quoique si voisins en apparence, est une des plus rares qualités de ce grand écrivain. […] Et si, par un malheur très rare, la conduite a déshonoré les ouvrages, quel parti prendre ?
Je ne trouve pourtant rien dans ce billet ni de beau ni de rare, et plus je le considère, moins j’en fais de cas. […] Il ne faut attendre que d’une vertu bien rare une faveur si extraordinaire. […] On me donna une chambre fort commode, et je m’étonnois qu’en un lieu si sauvage il y eût tant d’ordre et de propreté ; mais j’admirois principalement qu’une si rare personne y fût cachée. […] Il n’en est pas ainsi de cette qualité si rare ; on se doit bien garder de dire qu’on est honnête homme, quand on le seroit du consentement des plus difficiles… On ne trouve que fort peu de ces excellents maîtres d’honnêteté, et l’on n’en voit point qui se vantent de l’être. » (Discours de la vraie Honnêteté, Œuvres posthumes.) […] Mitton ne se connaît bien que dans les Lettres de M. de Méré : c’est là qu’on apprend que cet épicurien insouciant avait écrit quelques pages sur l’Honnêteté qui se sont trouvées comprises dans les Œuvres mêlées de Saint-Évremond : « Vous savez dire des choses », lui écrit M. de Méré, et vous devez être persuadé qu’il n’y a rien de si rare.
Je ne puis entrer ici dans le détail énorme des renseignements que j’ai recueillis sur ce curieux sujet ; mais pour donner un exemple de la singularité des lois qui gouvernent la reproduction des animaux prisonniers, je n’ai qu’à rappeler que les Carnivores, et même ceux des tropiques, se reproduisent assez volontiers en nos contrées à l’état de réclusion, à l’exception des Plantigrades ou Ursides, qui rarement donnent des petits ; tandis que les oiseaux Rapaces, sauf de très rares exceptions, ne produisent presque jamais d’œufs féconds. […] Ces affolements de plantes (sports) sont extrêmement rares à l’état sauvage, mais assez fréquents sous l’action de la culture ; et, en pareil cas, l’on voit que le traitement de la plante mère a pu affecter un bourgeon ou un rejeton, sans altérer les ovules ou le pollen. […] Si donc des déviations de structure étranges et rares s’héritent réellement, on doit admettre que des déviations moins extraordinaires et même communes sont transmissibles. […] J’ai croisé quelques Pigeons-Paons entièrement blancs, et de race très pure, avec quelques Barbes noirs, et je dois dire que les Barbes de variété bleue sont si rares, que jamais je n’en ai vu d’exemple en Angleterre : les oiseaux que j’obtins étaient noirs, bruns et bigarrés. […] « Les monarques de l’Iran et du Touran lui envoyaient des oiseaux très rares. » Et le chroniqueur royal ajoute que « Sa Majesté, en croisant les races, méthode qu’on n’avait encore jamais pratiquée jusque-là, les améliora étonnamment. » Vers cette même époque, les Hollandais se montraient aussi passionnés pour les Pigeons que les anciens Romains.
Les journées n’étaient pas rares pour lui où il pouvait écrire à son ami, après des pages toutes remplies d’effusions : « Je suis dans un jour où je vois tout idéalement et douloureusement, et enfin, s’il m’est possible de m’exprimer ainsi, lamartinement. » Faisant allusion à quelque projet de poème ou d’élégie, où il s’agissait de peindre un souvenir qui datait de l’âge de douze ans (ils en avaient seize), il écrivait à la date de juin 1832 : « Mais revenons au souvenir. […] Un caractère digne d’être noté honore en mille endroits ces premiers épanchements d’une vie naturelle et pure : ce sont les sentiments de croyance et de moralité, si familiers, ce semble, à toute jeunesse qu’on ne devrait point avoir à les relever, mais si rares (nous assure-t-on) chez les générations venues depuis Juillet, qu’elles sont vraiment ici un trait distinctif. […] J’ai ma conviction là-dessus, et il est bien rare que ces sortes de convictions trompent. […] Autrefois il existait deux sortes de notices littéraires : l’une toute sèche et positive, sans aucun effort de rhétorique et sans étincelle de talent, la notice à la façon de Goujet et de Niceron, aussi peu agréable que possible et purement utile ; elle gisait reléguée dans les répertoires, tout au fond des bibliothèques : et puis il y avait sur le devant de la scène et à l’usage du beau monde la notice élégante, académique et fleurie, l’éloge ; ici les renseignements positifs étaient rares et discrets, les détails matériels se faisaient vagues et s’ennoblissaient à qui mieux mieux, les dates surtout osaient se montrer à peine : on aurait cru déroger. […] Charles Labitte, qui était un esprit resté naturel parmi les jeunes (qualité des plus rares aujourd’hui), dans le livre utile où il apporte toutes sortes de preuves nouvelles en aide à la saine tradition, fait justice de ces travers en sens opposé.
Un frère, vêtu de bure brune, une corde pour ceinture, un capuchon de laine relevé sur le visage, quelques rares cheveux blancs ramenés en couronne sur ses tempes, ouvrit la porte et me demanda en italien si je désirais visiter le tombeau du Tasse. « Le tombeau du Tasse ? […] VIII Il est rare (nous l’avons déjà remarqué ailleurs) qu’un grand homme, surtout dans les lettres, où la fortune n’est pour rien dans la gloire, il est rare qu’un grand homme sorte tout à coup de lui-même comme un hasard sans précédent et sans préparation d’une famille illettrée. […] » On voit par ces lettres que la mère du Tasse était une de ces femmes rares qui forment de leur sang les hommes supérieurs, poètes, philosophes, héros. […] Les angoisses du père et du fils se calmèrent bientôt en apprenant que les Turcs avaient respecté la rare beauté de Cornélia, et l’avaient rendue à son mari pour une modique rançon.
À part de rares exceptions, le théâtre est uniquement digestif : on va là pour s’amuser, après dîner et avant de souper, et pour se montrer. […] Or, à de rares exceptions près, le théâtre d’aujourd’hui est illisible. […] Mais, direz-vous, ce théâtre-là n’a qu’une scène, une demi-douzaine d’acteurs et de très rares représentations où l’on sent l’insuffisance des répétitions ? […] Député Il y a théâtre et théâtre ; il existe des drames ou des comédies qui me paraissent parmi les plus rares chefs-d’œuvre de l’esprit humain ; j’ajoute tout de suite que ce n’est pas vers eux que se porte généralement « le goût de la société contemporaine » et que l’intérêt manifesté par le public pour tout ce qui touche les acteurs, les chandelles, les planches et les coulisses, n’a rien à voir, selon moi, avec la littérature, ni avec le développement intellectuel de notre civilisation. […] Pour lutter contre cette superstition, les moyens sont rares et malaisés.
Cependant, nous devons l’avouer, ces inconséquences, presque fatales, sont assez rares dans le livre de M. […] Le caractère de la poésie des Fleurs du mal, à l’exception de quelques rares morceaux que le désespoir a fini par glacer, c’est le trouble, c’est la furie, c’est le regard convulsé, et non pas le regard sombrement clair et limpide du Visionnaire de Florence. […] Charles Baudelaire, m’occuper de signaler et d’expliquer ce que je vois de beau et de rare dans son talent, plutôt que de perdre mon temps à relever des taches qu’on verra bien sans que je m’en mêle, et que la charité de tels de nos confrères saura merveilleusement faire valoir. […] Il a les dons rares, et qui sont des grâces, de l’évocation et de la pénétration. […] Si je voulais citer d’autres preuves de cette rare faculté de magie et de création pittoresque, les exemples afflueraient sous ma plume.
C’est que pour juger la prose, il faut de l’esprit, de la raison et de l’érudition, et qu’il y a beaucoup de tout cela en France ; tandis que pour juger la poésie il faut le sentiment des arts et l’imagination, et ce sont deux qualités aussi rares dans les lecteurs que dans les auteurs français. […] Racine écrivait en prose avec une rare élégance. […] Si, à l’examen de l’éloquence, le célèbre professeur joignait l’examen de la poésie française, vers laquelle il ne peut faire que de rares et trop courtes excursions, quel champ fécond et nouveau lui serait ouvert ! […] C’est que les fables tragiques sont extrêmement rares, et que les hommes de génie sont très rares aussi ; les poètes dramatiques peuvent se diviser en trois classes : d’abord, ceux qui inventent ou plutôt qui trouvent des fables et les traitent d’une manière également inventée ; il y en a trois ou quatre comme cela depuis le commencement des siècles ; ensuite ceux qui traitent franchement de grands et beaux sujets traités trop faiblement avant eux, et qui, les embellissant et les rajeunissant par la vigueur de leur pensée et les formes nouvelles de leur talent, sont au moins créateurs par l’exécution ; de ces auteurs-là, il s’en rencontre tout au plus deux ou trois par époque ; enfin, ceux qui traitent et écrivent d’une manière commune et connue de prétendus sujets créés, dont il n’y a d’inventé que le titre et dont toute l’originalité disparaît avec l’affiche : cette classe d’auteurs a toujours été très nombreuse.
Ses chefs, tant qu’il servit, nous le présentent comme « le type du vrai et excellent sous-officier d’élite, apportant dans l’exercice de ses devoirs un zèle, une fermeté et un dévouement exemplaires, faisant parfaitement honneur à sa modeste position, et trouvant le moyen de venir constamment en aide à sa bonne mère, sans jamais en dire mot à personne : une enquête a été nécessaire pour arriver à la preuve de sa belle action et de sa pieuse conduite filiale. » En 25 ans de service, c’est à peine si quelques punitions sont venues le frapper, et pour les manquements les plus légers : trois fois en tout consigné, et une seule fois à la salle de police ; il paraît que c’est rare et presque phénoménal eu égard à la sévérité de la discipline militaire. […] Or, de nos jours, le nombre a été grand de ceux qui, doués d’une faculté rare et d’un talent fécond, ont été mis en demeure d’en prodiguer les fruits à chaque saison. […] Il est tel cas, en effet, rare sans doute, mais à prévoir, et dont un auteur seul est juge, où il lui importe de laisser en des mains plus fermes que celles d’une femme le soin de reproduire sa pensée et d’exercer ses droits. […] J’allais oublier de rappeler à titre d’innovation, et d’une innovation juste qui a été suggérée par la fréquence des exemples, autrefois plus rares, que le mari de la femme auteur aura dorénavant le droit qu’avait seule autrefois la femme du mari auteur.
Sa famille immédiate se composait de cinq êtres les plus chers : un mari, la probité et la droiture même, qui souffrait en homme de son inaction forcée, et qui ne demandait qu’emploi honnête et labeur73 ; trois enfants de rare nature, un fils né en 1820, et deux filles, Ondine née vers 1822, et Inès née vers 1826. […] C’est cet humble frère qu’il s’agissait à tout instant de relever, de réconforter, de secourir aussi par de rares envois d’argent (20 francs par mois, quand on le pouvait) ; mais, en lui servant sa minime obole, cette âme de sœur trouvait moyen de diversifier à l’infini le baume moral qu’elle répandait sur ses blessures. […] Les beaux vers ne sont pas rares, mais on croirait que la plupart ont été dictés plutôt par l’esprit que par le cœur. Ne devoir à l’art que la forme et sentir naître en soi l’inspiration sans la chercher, rien n’est plus rare, et Mme Valmore avait en elle cette merveilleuse faculté… » Telle elle était dans ses vers, telle on l’a vue dans ses pages les plus intimes, dans les lignes qu’elle ne réservait pas au public, dans sa prose la moins travaillée, dans une lettre à un ami.
Arthur, doué de toutes les qualités de la naissance, de la fortune, de l’esprit et de la jeunesse, Arthur, doué d’une puissance rare d’attraction et du don inappréciable d’être aimé, a reçu de bonne heure, d’un père misanthrope, un ver rongeur, la défiance ; la défiance de soi et des autres. […] Le réveil de ce camp agreste eût été beau au matin sous l’ardent soleil, au sein de cette végétation rare et forte, aux hautes odeurs. […] Toutes ces critiques, au reste, ces observations mêlées d’éloges et de réserves, l’auteur qui en est l’objet et à qui nous les soumettons nous les passera ; elles sont même, disons-le, un hommage indirect que nous adressons en lui à une qualité fort rare aujourd’hui et presque introuvable chez les hommes de lettres et les romanciers célèbres. […] Ce bon goût que sans doute il a pu, comme nous tous, choquer plus d’une fois dans bien des pages écrites, il l’a eu (mérite plus rare) dans l’ensemble de sa conduite littéraire.
Celui-ci y trouva même sujet d’écrire à celui qui pouvait devenir un juge l’un de ces rares petits billets qui semblèrent de tout temps la suprême faveur. […] Ce rare bon sens de détail, cette habileté persévérante d’application, qui ressortent si visiblement des pièces produites par M.Mignet, diminuent bien de prix, lorsque, embrassant l’ensemble du règne, on les voit mener en définitive à de si déplorables résultats et à de si cuisants retours. […] La hauteur personnelle de Louis XIV et ses ténacités d’orgueil compliquèrent toujours et traversèrent plus ou moins la vue de ses vrais intérêts comme roi ; son rare bon sens, en se mettant au service de cette passion personnelle, ne la dominait pas assez. […] Et puisque nous sommes en train d’oser, il ne serait pas juste, en quittant l’un des écrivains les plus respectés et les plus considérables de notre temps, de ne pas toucher à l’homme, et de ne pas au moins nommer en lui quelques-uns de ces traits si rares et qui accompagnent si bien le talent, sa simplicité, un caractère aimable, resté fidèle à ses goûts et à ses affections, quelque chose de gracieux qui, ainsi que nous l’avons noté chez son ami M.Thiers, se rattache à la patrie du Midi et aux dons premiers de cette nature heureuse.
Pour avoir dit que, si nul poète ne parlait plus haut à mon imagination, deux ou trois autres disaient peut-être des choses plus rares à ma pensée et à mon cœur. […] Voici un jeu que je propose aux rares honnêtes gens qui ont vraiment lu les poètes contemporains. […] Vous y verrez qu’aucun homme n’a jamais su développer une seule idée par un si grand nombre de comparaisons et de métaphores, ni si justes, ni si brillantes, ni si rares, ni, en général, si claires, et n’a su enchaîner ces images dans des périodes qui eussent tant de mouvement, ni un mouvement si large, si emporté, si continu, — ni qui emplissent l’oreille de rythmes plus sensibles, d’une musique plus drue et plus sonore. […] Ils sont rares, ceux pour qui Victor Hugo a été l’éducateur, le directeur de la vie intellectuelle et morale.
M. de Régnier est surtout un droit et pur artiste ; son vers a des lignes bien tracées, des couleurs transparentes et rares disposées avec justesse ; il démontre une grande probité d’écriture, un idéal d’art austère, la volonté d’un homme qui garde haute sa conscience. […] Le cadre populaire n’est pour lui, d’habitude, qu’un décor propice judicieusement interprété, mais dont le choix s’indique seulement par une préférence momentanée, un goût de personnages plus humbles après de brillantes ou de rares visions. […] Quant à M. de Régnier il n’eut guère avec cette école d’autres attaches que les complexités encore artificielles d’un talent subtil et rare — comme l’est assurément celui de MM. […] Quant à la voix nouvelle de M. de Régnier, elle a des inflexions spécialement rares et pures, avec parfois une sorte de chaleur interne qui, pour les Sites, les Épisodes, les Poèmes anciens, l’Alérion et la Gardienne, demeurait étrangement inconnue ; on l’entendra chanter en tous ses derniers vers, et surtout en ceux-ci qui sont des plus proches de la perfection et s’orientent vers un mystère émouvant et discret : J’ai vu fleurir, ce soir, des roses à ta main, — Ta main pourtant est vide et semble inanimée — Je t’écoute comme marcher sur le chemin, — Et tu es là pourtant et la porte est fermée — J’entends ta voix, mon frère, et tu ne parles pas ; L’horloge sonne une heure étrange que j’entends Venir et vibrer jusques à moi de là-bas… L’heure qui sonne est une heure d’un autre temps.
Seulement, comme d’ordinaire on ne sait par cœur que ce que l’on a étudié, il est rare qu’un effort intellectuel soit nécessaire pour interpréter les mots qui se succèdent dans l’esprit ; l’effort mental se concentre sur la remémoration, et nous comprenons à mesure sans intervalle appréciable. […] Aussi le sens commun et le bon sens ne cherchent-ils pas leurs mots ; mais les grands, les vrais penseurs cherchent leurs mots ; à moins que le génie de la pensée ne soit complété chez eux, — chose bien rare, — par le génie du style, ils connaissent par leur propre et fréquente expérience cet état d’esprit qu’on a voulu contester, dans lequel on poursuit l’expression claire, adéquate, saisissante, d’une pensée déjà bien arrêtée. […] Ces accidents peuvent arriver à la parole intérieure comme à la parole extérieure, dans les mêmes conditions ; ils sont plus rares sans doute, mais ils ne sont pas sans exemple257. […] Au degré où on la remarque, cette heureuse qualité est un privilège assez rare ; on l’a dit : beaucoup d’esprits bien faits ne trouvent la formule vraie qu’en descendant l’escalier ; les habiles la conservent dans un coin de leur mémoire ; elle servira pour une seconde visite.
Cette circonstance détermina le choix de Favre ; vers 1810 il rédigea une Vie de cet érudit, qui est fort instructive à lire et pour laquelle il a rassemblé les notes les plus fines et les plus rares : avec lui on va hors des sentiers battus, et l’inaperçu est ce qui le tente. […] Lorsqu’il eut quitté la Suisse, il le tenait au courant de ses études qu’il allait diversifiant sans cesse ; il était d’un certain âge déjà lorsqu’il s’appliqua au sanscrit ; il s’occupait à la fois de la langue et des poésies provençales, mais le sanscrit au premier abord éclipsa tout : Voilà, écrivait-il de Paris à Favre en 1815 en lui parlant de livres indiens très rares qu’il avait fait acheter à Londres, voilà mes confessions en fait de folies érudites. […] Toutes les fois qu’on voudra citer les hommes qui ont eu le goût passionné de la lecture, de l’étude, de la critique historique désintéressée, de l’érudition en elle-même, à la suite de ces noms fameux et toujours répétés des Huet, des Gabriel Naudé, des président Bouhier et de tant d’autres, lorsqu’on arrivera à notre siècle si rare en esprits de ce genre, en esprits aussi avides de savoir que peu empressés de le dire, on ne pourra s’empêcher de nommer Guillaume Favre.
Il avait eu le bon goût d’en paraître, somme toute, satisfait, et j’avais été touché d’un procédé si rare. […] Je ne sais pourquoi, peut-être est-ce parce qu’elles sont rares, mais ces rencontres me plaisent toujours ; j’y gagne, j’y apprends de ces gaies et folles nouvelles qui autrement courraient risque de ne m’arriver jamais, j’entends de ces mots spirituels que toute la méditation ne donnerait pas, je m’y aiguise ; je crois même voir, sauf quelques rares exceptions, une bienveillance réelle à mon égard sur ces visages fins et travaillés.
Il semble qu’en avançant dans la vie, le poète ait renoncé à souffrir ou qu’il en ait honte ; lui-même il nous le dit : J’aurais pu souffrir davantage ; Mais, de bonne heure, plein d’orgueil, J’eus toujours le rare courage De cacher les pleurs de mon œil. […] Érudit et bibliographe, chassant sur la piste de Charles Nodier, il s’est de bonne heure attaché à de certains noms secondaires, à des écrivains plus cités que connus : en ce genre le rare, le clandestin, l’amusant, le tentent. […] Selon moi, il n’a pas tiré un parti assez sérieux de Linguet et de ses nombreux écrits ; Linguet le paradoxal, si éloquent lorsqu’il a raison ; celui de qui Voltaire écrivait dans une lettre à Condorcet (24 novembre 1774) : « Si ce Linguet a d’ailleurs de très-grands torts, il faut avouer aussi qu’il a fait quelques bons ouvrages et quelques belles actions » ; celui dont Mme Roland, qui l’avait vu à Londres en 1784, a parlé comme d’un homme « doux, spirituel, aimable », corrigeant dans sa personne et dans sa conversation ce que sa plume pouvait avoir d’âpre et d’amer, et en particulier (chose rare chez un exilé) ne s’exprimant sur la France et les Français qu’avec circonspection, réserve et modestie17.
Il prête à ses ouvrières l’acuité et la délicatesse oculaires qu’il possède, leur attribue, dans les contemplations auxquelles il les soumet, les plus rares qualités d’observateur. […] Les fleurs rares et étranges dont le duc Jean garnit son vestibule, ne lui présentent que des images de charnier et d’hôpital : « Elles, affectaient cette fois une apparence de peau factice sillonnée de fausses veines ; et la plupart comme rongées par des syphilis et des lèpres, tendaient des chairs livides, marbrées de roséoles, damassées de dartres ; d’autres avaient le teint rose vif des cicatrices qui se ferment, ou la teinte brune des croûtes qui se forment ; d’autres étaient bouillonnées par des cautères, soulevées par des brûlures ; d’autres encore montraient des épidermes poilus, creusés par des ulcères et repoussés par des chancres ; quelques-unes enfin paraissaient couvertes de pansements, plaquées d’axonge noire mercurielle, d’onguents verts de belladone, piquées de grains de poussière, par les micas jaunes de la poudre d’iodoforme. […] Huysmans acquiert l’acéré discernement et l’intense jouissance des choses supérieurement belles et rares, le raffinement, qui, comme la pointe d’un cône, concentre, termine et raccorde toutes les lignes de son organisation intellectuelle.
Albalat a consacré trois volumes, qui sont le résultat à la fois d’un énorme travail de documentation et d’une rare concentration de pensée. […] J’ajoute cette dernière restriction, pour cette bonne raison qu’ils sont rares, ceux qui lisent avec soin ou même qui lisent simplement les ouvrages au sujet desquels ils tranchent. […] Il est rare qu’une phrase bien faite, qui ne remue plus, à laquelle on ne peut ni ajouter ni retrancher, ne soit pas naturellement harmonieuse.
J’omets d’abord une possession absolue de la syntaxe même en ses tours rares, la gouverne d’un vocabulaire énorme. […] Et il en est, nécessairement, qui sentent un peu le manuel Roret ; elles sont rares.
Faute de mieux, on s’est borné jusqu’à présent, sauf de rares exceptions, à grouper les faits par siècles : groupement commode, si l’on veut, mais grossier et très artificiel. Il est bien rare qu’un mouvement d’idées finisse juste avec un siècle.
Il est bien rare qu’il nous faille emprunter d’autrui des expressions pour rendre ce que nous avons pensé. Il est même rare qu’il les faille chercher avec peine.
Mais à côté et au-dessous de ces colosses, à côté et au-dessous de ces dramaturges complets de la double action humaine et du double récit, il y a le tragique, comme Tacite, par exemple, et le comique, beaucoup plus rare. […] Il ne nous a donné là que des variétés historiques, mais je suis sûr qu’il pourrait nous donner une fort rare variété d’historien.
A l’heure qu’il est, les livres les plus difficiles et les plus rares sont des livres légers, et, quand je dis légers, je ne dis pas inconsistants. […] Paul Deltuf a mise en scène avec une rare énergie et un tour comique et attendri tout ensemble, fait pour étonner, si M.
Mais, en somme, cette erreur est rare chez lui. […] On jouit de telle rime rare ou jolie ; on attend, on est aise de voir arriver sa jumelle. […] Les sympathies qu’il inspire sont rares et austères. […] Il est, chose rare aujourd’hui, presque constamment périodique. […] Or il y a plusieurs écrivains de notre temps, même intéressants et rares, que M.
Et pourquoi, si c’est à Balzac un mérite si rare que « d’avoir dégagé de l’argent tout le pathétique terrible qu’il contient », n’en serait-ce pas un tout aussi rare à Rousseau que d’avoir le premier fait descendre le pathétique de l’amour des hauteurs de la scène tragique dans le roman de la vie commune ! […] Rare et précieuse faculté ! […] Qu’on puisse au surplus tenter l’épreuve, et dans l’épreuve déployer les plus rares qualités de l’écrivain, la question n’est pas là. […] Voilà de rares qualités, sans doute ; et qui témoignent d’une rare fécondité d’invention dans la forme. […] C’en est un, très réel, plus rare qu’on ne pense, comme c’en est un autre que de savoir durer, et un autre encore que de savoir finir à son heure.
Philippe Gille Ces chants ont le rare mérite d’être l’œuvre d’un poète convaincu.
Sandeau ne méritait ce rare privilège. […] Rien de rare ni d’exceptionnel dans leurs aventures. […] Les progrès sont constants à chaque œuvre nouvelle, et les néologismes se font de plus en plus rares. […] Mais ces mots pris à même la nature sont assez rares chez M. […] C’est un rare don, mais il en abuse.
Louis Dupont C’est un poète aimable que M. de Fleurigny, et le volume qui vient de paraître sous son nom (Éclats de verre) renferme plus d’une pièce d’un rare sentiment d’à-propos et d’humour.
Jean Court Les jolis vers ne sont point rares dans cette œuvrette, mais l’âme de l’adolescent qui écrivit ces pseudo-confidences est sans doute un peu artificieuse et dénuée de toute sincérité !
Raymond Février (dans les Élévations poétiques) est chaste, grave, religieuse… Sa langue poétique est très ferme, très solide, et — chose plus rare — les pensées abondent sous sa plume.
Victor Billaud ont été inspirées par les beautés naturelles ou les coutumes pittoresques de son pays natal et révèlent une rare délicatesse de goût et de sentiment.
Auguste Lacaussade Ses vers écrits et composés de temps à autre, entre deux articles de journal, ne sont guère qu’une distraction ou plutôt une récréation littéraire prise et reprise à de rares intervalles.
Il est si rare de voir des femmes chausser le cothurne, que Mademoiselle Barbier méritoit d’être encouragée.
Les vrais bons observateurs sont très rares. […] Le spectacle n’est pas absolument rare d’un cerveau malade et d’un esprit sain. […] Mais il s’agit là, heureusement, d’accidents fort rares. […] J’ai cependant vu un renard suivre son maître ; mais c’est très rare. […] La musique est rare, qui vaut d’être écoutée.
Paul Collin a une spécialité, un rare bonheur : ses vers si faciles, si musicaux, d’un rythme si délicat, inspirent, depuis bien des années, une bonne moitié de nos compositeurs, — et pas les moins illustres.
Parmi les poëtes dont les extraits font l’honneur et l’agrément du volume, il me prend envie d’en mentionner trois ou quatre à peu près au hasard : ce sera une occasion pour moi de citer d’eux quelques échantillons de rare et fine poésie. […] On l’a oublié ; on n’a pas assez remarqué dans le temps et signalé au passage deux recueils de lui (1840, 1847), pleins de fines galanteries, de rares et voluptueuses élégances.
Pour mettre aux prises ces deux rares génies, il ne falloit qu’une occasion ; elle s’offrir bientôt. […] Cet homme d’un sens droit & naturel, d’une charité rare, digne en tout de la place qu’il occupoit, fit à son hôte l’accueil convenable à son grand mérite.
C’est, en effet, le vide, que son livre, le vide agité par les coups de chapeau d’un homme qui salue perpétuellement, avec la plus rare politesse, et dont le langage, beaucoup trop vanté par Livet, n’a qu’une gravité monotone. […] Lui, Boileau, le rare jugeur, l’énergique bon sens, qui ne cherchait pas des arbres et des fontaines pour dire la vérité sur ses confrères, a dit la seule qui restera ; et les compilations de Livet, qui ne sont pas les portes de l’enfer, mais les portes de l’ennui, ne prévaudront pas contre elle.
II Cela dit brusquement à Wey, pour l’honneur d’une conception première qui me plaisait excessivement, mais qui supposait la chose la plus rare : l’impersonnalité, ou plutôt la personnalité caméléonesque d’un poète dramatique, je n’ai plus qu’à louer un livre vrai, spirituel, érudit, attentif à tout, et qui, sous prétexte de voyage, nous parle tour à tour politique, art, histoire, morale, société, avec une originalité qui n’a pas le profond, le mordant, la couleur étrange de l’originalité anglaise, mais qui, après tout, a la sienne. […] Le meilleur, en lui, c’est l’antiquaire, c’est le déchiffreur de titres, c’est le savant, — un savant rare, le savant qui ne rabâche jamais !
Ce fut un homme de caractère, ce qui, dans un temps comme le nôtre où l’on n’en a qu’à certains jours, est plus rare peut-être que le génie. […] De ces trois hommes, dont deux l’emportent incontestablement par le génie, le plus rare est celui qui en a le moins, mais dont la supériorité, d’un autre ordre, virile, positive et presque militaire, est certainement plus éloignée que le génie lui-même des niaiseries qui gouvernent ce temps, et tous les temps, hélas !
Consolation qui n’est jamais complète, et c’est son charme, — un homme consolé est presque aussi plat qu’un homme heureux, — résignation plutôt, chose que je ne vanterai jamais assez, tant elle est rare, et dont le poète est doué en M. de Châtillon, comme s’il avait été élevé auprès du rouet de quelque bienfaisante Fée pauvre ! […] Mais lorsque les grandes choses deviennent plus rares, lorsque les convictions fléchissent et que l’Idéal s’est abaissé, alors tout est menacé du chef-d’œuvre de Dieu dans le poète.
L’Auteur s’y montre aussi élégant dans son style, que fidele à conserver le sens de ses Originaux, deux points de perfection assez rares dans les Traducteurs.
Et puis une intelligence de lumière tout à fait rare et précieuse.
Henri Mazel Il a intitulé son livre de vers les Opales… Il affectionne les coupes rares, les strophes régulières, tercets et cinquaines de préférence ; le vers semble pour lui un coursier à chanfrein haut et à galop sonore que le poète dompte et dirige.
Louis Malosse pour dire qu’il a quelquefois le souffle épique et une largeur de facture qui est assez rare.
Le talent du versificateur se montrait à un degré rare chez ce jeune homme doué d’une vive intelligence et d’une étonnante facilité.
On peut donc reprocher au Public son indifférence à l’égard d’un mérite historique aussi rare.
On peut tirer plus de fruit de ses Traités sur des matieres de Physique, assez curieuses, & de ses Dissertations sur différens Traités d’Histoire, Ouvrages écrits aussi en Latin, mais d’un style net & pur ; mérite assez rare parmi les Modernes.
Nous ne parlons pas de ses Poésies : nous dirons seulement qu'elles n'annoncent aucune prétention, modestie assez rare parmi les Poëtes médiocres.
Massillon en chaire n’avait presque point de gestes : cet œil qu’il baissait d’abord, qu’il tenait baissé d’habitude, lorsqu’ensuite, à de rares intervalles, il le levait et le promenait sur l’auditoire, lui faisait le plus beau des gestes ; il avait, a dit l’abbé Maury, l’œil éloquent . […] Louis XIV, qui avait des mots si justes quoique trop rares, disait à Massillon un jour, au sortir d’un de ses sermons : « Mon père, j’ai entendu plusieurs grands orateurs, j’en ai été fort content ; pour vous, toutes les fois que je vous ai entendu, j’ai été très mécontent de moi-même. » On a cité des exemples de conversions soudaines opérées par l’éloquence de Massillon. […] Nous en sortions transportés, et nous regrettions des moments que sa solitude et ses occupations rendaient tous les jours plus rares.
Ce recueil en quatre volumes qui, même depuis sa réimpression, est resté rare, n’était destiné en premier lieu qu’à un petit nombre de lecteurs, et ce fut dans son château, pour plus de sûreté, que M. de Lassay le fit d’abord imprimer. […] En essayant, sans trop d’effort, de rejoindre ensemble ce que Saint-Simon nous dit de Lassay et ce que Lassay nous dit de lui-même, il arrivera pourtant que nous serons peut-être plus indulgent envers l’homme : c’est un résultat moins rare qu’on ne pense. […] Les grâces et les qualités rares de cette jeune personne, sa distinction naturelle, l’avaient mise, même dans ce monde de cour, sur un pied tout différent de celui où la plaçaient sa condition et sa naissance.
Mon attachement à l’État s’est réveillé ; je me suis dit : Ce n’est pas dans la bonne fortune qu’il est rare de trouver des détenteurs, mais c’est dans la mauvaise. […] Les lettres de la margrave et de son frère dans les premiers mois de 1758 sont assez rares, soit qu’on en ait perdu ou supprimé un bon nombre, soit que la maladie de la margrave les ait rendues moins fréquentes. […] Contentons-nous de reconnaître et de saluer dans la margrave une des femmes originales du xviiie siècle, un esprit piquant, une rare fierté d’âme, un caractère et un profil qui a sa place, marquée non seulement dans l’anecdote, mais dans l’histoire de son temps, et qui, à meilleur droit encore que le prince Henri et à un degré plus rapproché, se distinguera toujours au fond du tableau à côté du roi son frère.
Je ne suis pas de ceux qui, par une estime exagérée, mettent les pièces et les matériaux au-dessus de l’œuvre définitive ; mais comme les monuments historiques vraiment dignes de ce nom sont rares, comme ils se font longtemps attendre, et comme d’ailleurs ils ne sont possibles et durables qu’à la condition de combiner et de fondre dans leur ciment toutes les matières premières, de longue main produites et préparées, il n’est pas mauvais que celles-ci se produisent auparavant et soient mises en pleine lumière ; ceux qui aiment à réfléchir peuvent, en les parcourant, s’y tailler çà et là des chapitres d’histoire provisoire à leur usage ; ce ne sont pas les moins instructifs et les moins vrais. […] Dans le récit domestique où il raconte, sans prétendre la surfaire, cette vie si honorable d’un homme de médiocre condition, son fils André avait bien raison de dire au début : Ceux qui liront ce discours souhaiteront peut-être sa bonne fortune et tâcheront d’imiter ses vertus et perfections ; car étant aîné d’une famille médiocre en extraction et en biens, ayant perdu son père à cinq ans, sa mère s’étant remariée deux ans après, avoir par tous moyens amassé des biens suffisamment et être parvenu à des charges très honorables, n’est-ce pas un bonheur très grand et très rare ? […] Il est humain, chose assez rare chez les magistrats de ce temps !
Il arrachait par son intelligence et sa capacité de travail l’admiration de son oncle le bailli et, pendant leurs rares trêves, celle même de son père. […] « Il était laid, nous dit un contemporain628 : sa taille ne présentait qu’un ensemble de contours massifs ; quand la vue s’attachait sur son visage, elle ne supportait qu’avec répugnance le teint gravé, olivâtre, les joues sillonnées de coutures ; l’œil s’enfonçant sous un haut sourcil, … la bouche irrégulièrement fendue ; enfin toute cette tête disproportionnée que portait une large poitrine… Sa voix n’était pas moins âpre que ses traits, et le reste d’une accentuation méridionale l’affectait encore ; mais il élevait cette voix, d’abord traînante et entrecoupée, peu à peu soutenue par les inflexions de l’esprit et du savoir, et tout à coup montait avec une souple mobilité au ton plein, varié, majestueux des pensées que développait son zèle. » Et Lemercier nous montre « les gestes prononcés et rares, le port altier » de Mirabeau, « le feu de ses regards, le tressaillement des muscles de son front, de sa face émue et pantelante ». […] Puis, dans les harangues du Consul, de l’Empereur, ces ornements emphatiques se font rares.
Elle était d’une abondance stylisée, d’une élégance nourrie, d’une nouveauté pleine de paillettes rares ». […] Il formulait une sagesse rare, une philosophie élégante et dédaigneuse en axiomes imprévus. […] Il n’a laissé que de rares fragments.
Il a raison de remarquer quelque part que presque tous ceux qui ont fait de grandes choses ont commencé fort jeunes ; mais ce qui est bien rare, c’est de conseiller si sagement et de voir si juste, de tenir la balance si exacte, dès cette première moitié de la vie. […] En un mot, Commynes est tellement moderne par les idées et par les vues, qu’on pourrait assigner en le lisant (ce qui est bien rare pour les auteurs d’une autre époque) la place qu’il aurait tenue à coup sûr dans notre ordre social actuel, et sous les divers régimes que nous avons traversés depuis 89. […] Dans un temps où tout le monde se croit propre à la politique, il ne serait pas mal d’aller regarder en lui quelles sont les qualités requises chez ceux que la nature a destinés à cette rare science.
Mais la simplicité de Fontenelle, dans sa rare distinction, ne ressemble à nulle autre : c’est une simplicité tout exquise, à laquelle on revient à force d’esprit et presque de raffinement. […] Mais Pariset avait assurément une faculté rare, à laquelle il n’a manqué que d’être plus contenue à temps pour acquérir toute sa force et tout son ressort. […] La grandeur, pour peu qu’elle y entre naturellement, n’y a place que dans de rares occasions.
À vingt-quatre ans, l’abbé Gerbet annonçait un talent philosophique et littéraire des plus distingués ; en Sorbonne, il avait soutenu une thèse latine avec une rare élégance ; il avait naturellement les fleurs du discours, le mouvement et le rythme de la phrase, la mesure et le choix de l’expression, même l’image, ce qui, en un mot, deviendra le talent d’écrire. […] Les Catacombes, qui ont été le berceau et l’asile du christianisme pendant les trois premiers siècles, l’occupent particulièrement, et lui ont inspiré des pensées d’une rare élévation. […] C’est le sentiment vif de cette incomparable et idéale agonie qui lui inspira un Dialogue entre Platon et Fénelon, où celui-ci révèle au disciple de Socrate ce qu’il lui a manqué de savoir sur les choses d’au-delà, et où il raconte, sous un voile à demi soulevé, ce que c’est qu’une mort selon Jésus Christ : Ô vous, qui avez écrit le Phédon, vous, le peintre à jamais admiré d’une immortelle agonie, que ne vous est-il donné d’être le témoin de ce que nous voyons de nos yeux, de ce que nous entendons de nos oreilles, de ce que nous saisissons de tous les sens intimes de l’âme, lorsque, par un concours de circonstances que Dieu a faites, par une complication rare de joie et de douleurs, la mort chrétienne, se révélant sous un demi jour nouveau, ressemble à ces soirées extraordinaires dont le crépuscule a des teintes inconnues et sans nom !
Plus tard, il a essayé de corriger ce défaut de son éducation première, et il était arrivé sur l’ancien régime à une érudition assez fine et assez rare, mais trop récente, et par conséquent toujours un peu incertaine. […] Je dispense volontiers un publiciste de me présenter des projets de constitution et des projets de loi ; il est bien rare que ces constructions artificielles, combinées à priori dans le cabinet, soient d’une application utile. […] Un écrivain démocrate d’un rare talent, M.
Parmi les plantes cultivées, chacune des rares variétés connues, qui portent régulièrement des fleurs ou des fruits de formes différentes, est due à une modification soudaine. […] Les genres qui sont polymorphes en une contrée sont aussi polymorphes en toutes les autres, sauf quelques rares exceptions ; et il en a été de même. à d’autres époques géologiques, si l’on en juge d’après les coquilles de Brachiopodes fossiles. […] On ne saurait même se refuser à reconnaître que ces variétés douteuses sont loin d’être rares.
Il est rare qu’un lecteur de romans idéalistes écrive lui-même des romans ; il est rare, au contraire, que le lecteur de poètes ne fasse pas des vers lui-même. […] Au XVIe siècle, un humaniste est un homme que le problème religieux, ou plus exactement ce qu’il y a de problèmes dans le sentiment religieux et dans la croyance, ne torture pas ; au XVIIe siècle, « le partisan des anciens » est un homme que la gloire de Louis le Grand, encore qu’elle le touche, n’éblouit point et n’hypnotise pas ; au XVIIIe siècle, l’homme de goût (très rare) est celui qui n’est pas très persuadé que l’univers vient pour la première fois d’ouvrir les yeux à la raison éternelle et que le monde date d’hier, d’aujourd’hui ou plutôt de demain ; au XIXe siècle, le classique, vraiment digne de ce nom, est celui qui n’est pas comme subjugué par les Hugo et les Lamartine et qui s’aperçoit, de tout ce qu’il y a, Dieu merci, de classique dans Hugo, Lamartine et Musset, et qui garde assez de liberté d’esprit pour lire Homère pour Homère lui-même et non pas en tant qu’homme qui annonce Hugo et qui semble quelquefois être son disciple.
Je ne lui reprocherai point son inutile couplet sur L’amant du verbe Rare et bizarre, Blafard, cafard !
L'Histoire de ses Voyages est peu intéressante pour le commun des Lecteurs, parce qu'il parcourut peu de pays, & que la découverte des Livres rares, soit imprimés, soit manuscrits, fut son principal objet.
les Ibsens sont rares ; ils ne courent pas les rues, même en Norvège. […] Pour arme, ils n’ont qu’un inoffensif bâton, de même que les militaires, très rares, qu’on rencontre, une petite badine. […] Le Portrait de Dorian Gray atteste, chez l’infortuné Oscar Wilde, un art brillant et précieux, en même temps qu’une intelligence profonde et rare, rare aux deux sens de ce mot. […] Quelques femmes — exceptions très rares — ont pu donner, soit dans l’art, soit dans la littérature, l’illusion d’une force créatrice. […] Comme moi-même, ils y goûteront des joies rares, ils y sentiront une émotion nouvelle et très forte.
Mais n’est-ce pas le lot fatal de l’exquis et du rare d’avoir tort devant la brutalité ? […] Il est rare qu’un artiste tout jeune en ait la divination. […] Ce style est d’une qualité unique aujourd’hui, et très rare dans toute l’histoire de notre littérature. […] Renan, ce qui vaut mieux que toutes les habiletés techniques, ce trésor rare et divin : une pâture pour l’âme. […] Ce sont des conditions rares, mais qui donnent une singulière valeur aux écrits d’un homme.
Surtout il savait les hommes, ce qui est le plus rare. […] Il était de ces hommes si rares à qui les écoles qu’ils font servent de leçons. […] Ses railleries, qui sont très rares, sont d’un tour discret et joli. […] Rien n’est plus rare. […] Son bon sens est de qualité très rare et de trempe extrêmement solide.
O Dieux, qui d’un si rare effort, Mîtes tant de vertus en elle, Détournez un si mauvais sort ; Qu’elle ne soit point infidelle : Et faites plutôt que la Belle Vienne à soupirer de ma mort, Que non pas d’une amour nouvelle !
Soucieux de conserver tout ce qu’a produit ce rare esprit, nous n’avons pas cru devoir nous laisser arrêter par les considérations qui l’auraient arrêté lui-même, et il nous a semblé que, prise isolément, chacune des études que nous présentons aujourd’hui offrait un assez haut intérêt pour honorer encore la mémoire d’Émile Hennequin et pour entretenir les regrets de ceux qui ont vu disparaître avec lui une des plus belles intelligences et l’un des plus purs talents de la jeune génération.
Mais si le style de M. l’Abbé Auger n’est pas aussi rapide, aussi animé, aussi mâle que celui de Démosthene, aussi élégant, aussi fleuri que celui d’Eschine, il a du moins de la correction & de la netteté, qualités qui deviennent tous les jours plus rares parmi nos Ecrivains.