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33. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque. Deuxième partie. » pp. 225-303

L’autre science, qui préexiste en nous, et qui est en nous une sorte de réminiscence des choses divines, est la science de ce qui est et ce qui doit être en soi-même, de ce qui est conforme au modèle intérieur divin des choses, le beau, le bon, le juste, le saint, le parfait, l’absolu, l’idéal, comme nous disons aujourd’hui. […] On dirait que Platon est jaloux de la divine sagesse du poète, mille fois plus philosophe et plus politique que lui. […] Si un tel politique est divin, Dieu n’est plus Dieu ! […] Aussi voyez combien, dans son utopie d’éducation des enfants sans mère, Platon s’enfonce dans l’absurde en contredisant la nature, plus divine heureusement que lui ! […] Y eut-il jamais un attentat de l’esprit contre les instincts plus impie et plus criminel ou plus stupide que la République du divin Platon ?

34. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXVIII. Caractère essentiel de l’œuvre de Jésus. »

On sent à chaque ligne un discours d’une beauté divine fixé par des rédacteurs qui ne le comprennent pas, et qui substituent leurs propres idées à celles qu’ils ne saisissent qu’à demi. […] C’était vraiment une de ces heures divines où le grand se produit par la conspiration de mille forces cachées, où les belles âmes trouvent pour les soutenir un flot d’admiration et de sympathie. […] Cette sublime personne, qui chaque jour préside encore au destin du monde, il est permis de l’appeler divine, non en ce sens que Jésus ait absorbé tout le divin, ou lui ait été adéquat (pour employer l’expression de la scolastique), mais en ce sens que Jésus est l’individu qui a fait faire à son espèce le plus grand pas vers le divin. […] Il ne vivait que de son Père et de la mission divine qu’il avait la conviction de remplir.

35. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXI. »

Ici, d’Adrien, du divin Théodose on remua les berceaux ornés de marbre et d’or ; ici on vit couronnés de lauriers et de jasmins les vergers qui ne sont plus que des buissons et des marais. […] N’est-ce pas elle, en effet, qui, toute ravie d’amour divin, s’écrie dans un cantique : « Je vis, sans vivre en moi-même ; j’aspire à une vie si haute, je la sens si proche, que je meurs de ne pas mourir ! » Dans ce dégoût de la terre, dans cette soif d’agonie et de bonheur céleste, les pensées de la sainte, ses stations forcées ici-bas, ses ardeurs d’espérance, sont des hymnes d’amour divin, comme n’en rêva jamais la poésie profane. […] Plus l’âme se détache des sens pour contempler le juste et le beau, plus elle mériterait de n’entrevoir que l’image de l’idéal divin. […] « Le divin Alexandre, ayant incendié la ville de Cadmus, épargna tout à fait la maison de Pindare.

36. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIIe entretien. L’Imitation de Jésus-Christ » pp. 97-176

Le mysticisme n’est que le crépuscule des vérités surnaturelles qui ne sont pas encore levées sur l’horizon de notre âme, mais qui répandent déjà une lueur entre la lumière divine et les ténèbres d’ici-bas. […] Que cela est grave, et que le fond de la sagesse divine est supérieur à notre vaine sagesse ! […] Heureuses les oreilles toujours attentives à recueillir ce souffle divin, et sourdes aux bruits du monde ! […] Après ce magnifique tableau de l’amour divin, il revient à la patience, qui est le sceau de cette vertu. […] Qui ne s’aime mieux après avoir lu cette onction divine qui découle de toutes ces lignes ?

37. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIe entretien. Phidias, par Louis de Ronchaud (2e partie) » pp. 241-331

La sagesse et la terreur divines descendent de toutes les hauteurs de ce front, de tous les poils de cette barbe, de tous les plis de ce vêtement sur l’âme du spectateur. […] il n’y est pas ; le vulgaire triomphe, et triomphe toujours de l’idéal : l’idéal est divin ! […] Il était réservé à l’anthropomorphisme grec de rencontrer la beauté souveraine dans l’union étroite de la nature humaine avec l’idée divine. […] Les temps passent, les langues s’usent ; mais il vit toujours tout entier, toujours aussi lui, aussi grand, aussi neuf, aussi puissant sur l’âme de ses lecteurs ; son sort est moins humain, mais plus divin ! […] Heureux les hommes par lesquels passent ces souffles divins !

38. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre IV. La philosophie et l’histoire. Carlyle. »

. —  Caractère divin et mystérieux de l’être. —  Sa métaphysique. […] Voilà la partie divine de notre âme. […] Qu’est-ce qu’une idole, sinon un symbole, une chose vue ou imaginée qui représente le divin ? […] Le plus rigoureux puritain a sa confession de foi ; sa représentation intellectuelle des choses divines. […] A soul, a spirit, and divine apparition.

39. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — La rentrée dans l’ordre »

par quelle entente heureuse entre le sentiment du divin et la nécessité d’honorer la vie, dans sa souveraineté et sa fécondité ? […] Exaspéré d’hystérie spirituelle, il s’acharnait au tout ou rien de la vérité divine, comme d’autres au tout ou rien de l’amour charnel. […] Le monde est un lieu d’opprobre et de péché, la nature est maudite, seul le séjour divin est pur ; l’humanité se divise en deux groupes dont l’un, celui des fidèles, possède toute la vérité, l’autre, celui des infidèles ne possède que l’erreur ; l’homme se compose d’un corps, substance vile et méprisable et d’une âme, substance divine et immortelle. […] Puisque le monde est un lieu sans espoir, orientons notre destinée vers le mystique séjour ; puisque l’Église possède toute la vérité, étouffons tout ce qui n’est pas sa doctrine ; puisque le corps de l’homme n’est qu’abjection, exaltons, à ses dépens, sa divine substance spirituelle. […] Dans notre conception moderne, tout ce qui est sans base réelle ne peut s’élever, tout ce qui s’efforce contre les lois de nature est sans force ; le sur-humain n’est que l’humain à la suprême puissance, le divin n’est que l’« âme » du naturel.

40. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre X. Suite du Prêtre. — La Sibylle. — Joad. — Parallèle de Virgile et de Racine. »

Le grand-prêtre des Hébreux, prêt à couronner Joas, est saisi de l’esprit divin dans le temple de Jérusalem : Voilà donc quels vengeurs s’arment pour ta querelle ! […] Est-ce l’esprit divin qui s’empare de moi ? […] … Pleure, Jérusalem, pleure, cité perfide, Des prophètes divins malheureuse homicide ; De son amour pour toi ton Dieu s’est dépouillé ; Ton encens à ses yeux est un encens souillé… ……… Où menez-vous ces enfants et ces femmes ? […] Cependant dans les peintures douces et tendres, Virgile retrouve son génie : Évandre, ce vieux roi d’Arcadie, qui vit sous le chaume, et que défendent deux chiens de berger, au même lieu où les Césars, entourés de prétoriens, habiteront un jour leurs palais ; le jeune Pallas, le beau Lausus, Nisus et Euryale, sont des personnages divins.

41. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Saint-Pol-Roux (1861-1940) »

Divine ? […] Le divin, l’abject, l’éclatant, le sombre, le rire, les larmes, l’espoir, le doute, le meurtre, l’amour, se partagent les multiples scènes de ce grand ouvrage qui en contient de superbes. […] L’homme s’appelle Magnus ; la femme, identifiée avec la vie, n’est autre que Divine ; Elle, c’est la mort, la Dame à la Faulx. […] Magnus aime Divine et va s’unir à elle ; survient la terrible Dame, qui le voit, le Veut, l’envoûte par la séduction de ses divers avatars, et finalement… le fauche.

42. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion dynamique »

C’était une ivresse divine, comparable à celle que les fervents de Dionysos demandaient au vin. […] Sa vie n’est donc pas encore divine. […] A travers Dieu, par Dieu, il aime toute l’humanité d’un divin amour. […] Le grand obstacle qu’ils rencontreront est celui qui a empêché la création d’une humanité divine. […] Ce serait une participation de l’essence divine.

43. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIVe entretien. Cicéron (3e partie) » pp. 257-336

qu’elle est divine, cette maîtresse de l’univers, ainsi que vous l’appelez parmi vous ! […] On voit que ce problème éternel de la toute-puissance de la providence divine et de la liberté morale de l’homme agitait, dès cette époque, l’esprit humain, comme il l’agite encore de nos jours. […] « Sache donc que tu es divin ; car c’est être divin que de sentir en soi la vie, de penser, de se souvenir, de prévoir, de gouverner, de régir et de mouvoir le corps qui nous est attaché, comme le Dieu véritable gouverne ses mondes. […] Voltaire a son étendue ; mais il n’a ni son élévation, ni sa majesté, ni son éloquence, ni son enthousiasme, ni sa piété divine envers la Providence. […] C’est que l’envie, qui l’a tué, et qui a cloué sa langue divine sur la tribune de Rome avec l’épingle d’or d’une furie, n’a pas dit encore son dernier mot contre ce plus grand des Romains.

44. (1856) Cours familier de littérature. I « IVe entretien. [Philosophie et littérature de l’Inde primitive (suite)]. I » pp. 241-320

Placé lui-même, pour les sentir et les exprimer, sur les limites de ces deux natures humaines et divines qui se touchent et se confondent en lui, l’homme n’a pas eu longtemps le même langage pour exprimer l’humain et le divin des choses. […] L’homme a parlé des choses humaines ; il a chanté les choses divines. […] Il rend la liberté à l’oiseau divin. […] Ils se mettent en route, revêtus de leur costume divin. […] Il pousse la charité divine jusqu’à pardonner au dieu jaloux la cause de tous ses malheurs.

45. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre X. Machines poétiques. — Vénus dans les bois de Carthage, Raphaël au berceau d’Éden. »

« Pour ombrager ses formes divines, le Séraphin porte six ailes. […] » Il s’avance dans le jardin du bonheur, au travers des bocages de myrtes, et des nuages de nard et d’encens ; solitudes de parfums, où la nature, dans sa jeunesse, se livre à tous ses caprices… Adam, assis à la porte de son berceau, aperçut le divin Messager. […]  » Raphaël est l’ange extérieur ; Éloa l’ange intérieur : les Mercure et les Apollon de la mythologie nous semblent moins divins que ces Génies du christianisme.

46. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXII. Machinations des ennemis de Jésus. »

Josèphe en parle avec la même admiration que de la Galilée, et l’appelle comme cette dernière province un « pays divin 1010. » Jésus, après avoir accompli cette espèce de pèlerinage aux lieux de sa première activité prophétique, revint à son séjour chéri de Béthanie, où se passa un fait singulier qui semble avoir eu sur la fin de sa vie des conséquences décisives 1011. […] Comme cela arrive toujours dans les grandes carrières divines, il subissait les miracles que l’opinion exigeait de lui bien plus qu’il ne les faisait. […] Peut-être aussi l’ardent désir de fermer la bouche à ceux qui niaient outrageusement la mission divine de leur ami entraîna-t-elle ces personnes passionnées au-delà de toutes les bornes. […] L’émotion qu’éprouva Jésus près du tombeau de son ami, qu’il croyait mort 1014, put être prise par les assistants pour ce trouble, ce frémissement 1015 qui accompagnaient les miracles ; l’opinion populaire voulant que la vertu divine fût dans l’homme comme un principe épileptique et convulsif. […] La mort, d’ailleurs, allait dans quelques jours lui rendre sa liberté divine, et l’arracher aux fatales nécessités d’un rôle qui chaque jour devenait plus exigeant, plus difficile à soutenir.

47. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Brispot »

Malgré l’indifférence dont on s’est beaucoup vanté pour une religion finie, que plusieurs considéraient, disaient-ils, comme ils auraient considéré les antiquités d’Herculanum, il s’est pourtant rencontré que le xixe  siècle, qui jouait la comédie de la plus haute impartialité à l’endroit de tous les symboles et qui avait la prétention de les ramener à une explication scientifique, s’est élevé de plus belle contre cette religion qui a fait rugir tous les impies, depuis Celse jusqu’à Condorcet, et l’a passionnément attaquée non plus dans sa morale et les conclusions politiques qui en découlent, mais dans le plus fondamental de ses dogmes, — la personnalité divine de Notre-Seigneur Jésus-Christ. […] Sachant l’immense parti que les protestants tirent de leurs traductions de la Bible, il s’est dit que les catholiques pouvaient imiter cette propagation par les livres, et il a rapproché, à l’aide d’une traduction fidèle et pure, de la pensée des plus nombreux, le texte de l’enseignement divin, afin que les simples autant que les doctes pussent y réchauffer leur foi ou y désaltérer leur piété. […] Elle a, dans les doctrines d’application et d’exécution de ce socialisme, le dernier enfant de ses entrailles, introduit avec une satanique profondeur de dessein une fausse figure historique du Sauveur des hommes, croyant sans doute qu’il resterait assez d’irrésistibles séductions dans la tête divine — défigurée par elle — pour fasciner les âmes et les entraîner à ses fins. […] L’abbé Brispot accompagne le texte concordé des Évangiles de commentaires, explications et notes, tirés des écrivains les plus illustres de l’Église dans l’ordre de la sainteté ou de la science, et c’est dans le choix de ces annotations, qui viennent ajouter leur lumière à celle du texte souvent d’une trop divine pureté pour tomber dans des yeux charnels sans les offenser, que l’abbé Brispot a montré les richesses d’une forte érudition religieuse et le tact supérieur qui sait s’en servir. […] L’abbé Brispot a réuni et choisi avec un art exquis les fragments épars de cette belle mosaïque intellectuelle étendue, pour ainsi parler, sous les pieds du texte divin.

48. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre IX, les mythes de Prométhée »

Les choses employées par la main de l’homme se personnifiaient vite dans ces temps de mythologie luxuriante, la vie divine coulait à plein bord et pénétrait tout. […] Des épithètes se détachent, comme des fragments d’astres, de ces divinités essentielles, et forment, à leur tour, des êtres divins. […] Au fond de leur âme assombrie, il laisse l’Espérance, captive divine qui la colore d’une teinte d’arc-en-ciel. […] Le Titan a tiré le feu du ciel, mais il ne peut en faire jaillir l’étincelle divine de la vie. […] Un artiste à demi divin, un Phidias titanique, y travaille comme au chef-d’œuvre des êtres.

49. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre VIII. La religion chrétienne considérée elle-même comme passion. »

Il se précipite aux pieds de la beauté divine ; il lui demande de le secourir. […] Massillon, peignant cet amour, s’écrie : « Le Seigneur tout seul51 lui paraît bon, véritable, fidèle, constant dans ses promesses, aimable dans ses ménagements, magnifique dans ses dons, réel dans sa tendresse, indulgent même dans sa colère ; seul assez grand pour remplir toute l’immensité de notre cœur ; seul assez puissant pour en satisfaire tous les désirs ; seul assez généreux pour en adoucir toutes les peines ; seul immortel, et qu’on aimera toujours ; enfin le seul qu’on ne se repent jamais que d’avoir aimé trop tard. » L’auteur de l’Imitation de Jésus-Christ a recueilli chez saint Augustin, et dans les autres Pères, ce que le langage de l’amour divin a de plus mystique et de plus brûlant52. […] Vous préférez le monde à la bonté divine, etc., etc. […] Quelle grandeur d’âme, quel divin enthousiasme, quelle dignité !

50. (1870) La science et la conscience « Chapitre IV : La métaphysique »

Quelle foi et quelle force ne donne pas une pareille doctrine à l’agent de la puissance divine ? […] La spéculation mystique les transforme en les confondant et même en les identifiant avec les actes de la nature divine. […] On ne peut, selon le conseil de Bossuet à propos de la prescience divine et de la liberté, tenir fortement les deux bouts de la chaîne sans s’inquiéter du moyen de les réunir. […] Toute âme religieuse aspire à l’union avec Dieu et tend à l’absorption de sa personnalité dans la nature divine. […] Le Dieu auquel elle se donne ne diffère d’elle-même que par le degré de perfection ; la volonté divine à laquelle elle se soumet n’est que l’idéal de sa propre volonté.

51. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre premier. Table chronologique, ou préparation des matières. que doit mettre en œuvre la science nouvelle » pp. 5-23

La cité d’Alexandre unit la subtilité africaine à l’esprit délicat des Grecs, et produisit des philosophes profonds dans les choses divines. […] Dès que les géants, quittant leur vie vagabonde, se mettent à cultiver les champs, nous voyons commencer l’âge d’or ou âge divin des Grecs, et quelques siècles après celui du Latium, l’âge de Saturne, dans lequel les dieux vivaient sur la terre avec les hommes. Dans cet âge divin paraît d’abord le premier Hermès. […] Pythagore qui vient ensuite, est, selon Tite-Live, contemporain de Servius Tullius ; on voit s’il a pu enseigner la science des choses divines à Numa qui vivait près de deux siècles auparavant. […] Ceux de Jérusalem détestaient les juifs hellénistes qui attribuaient une autorité divine à cette version.

52. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Pierre Mancel de Bacilly »

Telle est la réalité qu’il oppose aux divers systèmes des pouvoirs délégués ou consentis, et le fait fondamental, et divin puisqu’il est nécessaire, de l’existence du pouvoir bien avant qu’il ait été reconnu et consacré par nos faillibles et tardives légalités. […] Chez lui, le chrétien double les forces du penseur, et sur la notion du pouvoir telle qu’il la conçoit et l’explique resplendit toujours cette main divine qui jette la lumière à tout, comme la main de l’homme y jette l’ombre. L’auteur du Pouvoir et de la Liberté, qui appartient, par les tendances générales de sa philosophie autant que par ses convictions religieuses, à la grande école des de Maistre et des Bonald, ne croit pas à la souveraineté du peuple, et la plus grande partie de son livre est consacrée à la combattre ; mais l’originalité de son principe consiste précisément en ceci qu’il n’est faussé par l’application d’aucune théorie et qu’il embrasse et domine les plus opposées, aussi bien la théorie de la souveraineté du nombre que la théorie mystique du droit divin.

53. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre cinquième. Retour des mêmes révolutions lorsque les sociétés détruites se relèvent de leurs ruines — Chapitre I. Objet de ce livre. — Retour de l’âge divin » pp. 357-361

. — Retour de l’âge divin D’après les rapports innombrables que nous avons indiqués dans cet ouvrage entre les temps barbares de l’antiquité et ceux du moyen âge, on a pu sans peine en remarquer la merveilleuse correspondance, et saisir les lois qui régissent les sociétés, lorsque sortant de leurs ruines elles recommencent une vie nouvelle. […] Dans ce conseil éternel, il ramena les mœurs du premier âge qui méritèrent mieux alors le nom de divines. […] Certaines espèces de jugements divins reparurent sous le nom de purgations canoniques ; les duels furent une espèce de ces jugements, quoique non autorisés par les canons.

54. (1858) Cours familier de littérature. V « XXXe entretien. La musique de Mozart (2e partie) » pp. 361-440

Son nom et son génie se répandent sur les mélodies divines de ce drame musical dans tout l’univers. […] Que penseriez-vous de la sculpture qui emprunterait les couleurs de la peinture pour rendre les divines formes de Phidias plus semblables aux figures de cire coloriées devant lesquelles s’extasie l’ignorante multitude de nos places publiques ? […] Nous aimons à retrouver ainsi dans Hoffmann nos propres enthousiasmes pour les divines mélodies du Raphaël de Salzbourg. […] femme divine ! […] « Maintenant, je suis plus maître de mes sensations, et je me sens en état, mon cher Théodore, de t’indiquer ce que j’ai cru saisir dans l’admirable composition de ce divin maître.

55. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXVe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (4e partie) » pp. 429-500

Il paraît évident que c’est là qu’il a par ses instincts manifesté sa divine nature aux premiers hommes. […] C’est donc la pensée divine qui, s’associant avec la matière créée par Dieu, forme le monde. […] Elle ne pense pas ; elle obéit à la pensée divine. […] Cette union des deux substances, la pensée divine et l’obéissance matérielle, est le mystère ! […] « Laissons la divine énigme au fond des espaces, et répétons les vains mots que nous avons mis à sa place !

56. (1890) L’avenir de la science « II »

Il y a, je le sais, dans cet acte hardi par lequel l’homme soulève le mystère des choses, quelque chose d’irrévérencieux et d’attentatoire, une sorte de lèse-majesté divine. […] Un jour viendra où la raison éclairée par l’expérience ressaisira son légitime empire, le seul qui soit de droit divin, et conduira le monde non plus au hasard, mais avec la vue claire du but à atteindre. […] À mes yeux, ce système est le plus illogique et le plus irrévérencieux envers les choses divines. […] Dès lors, elle n’aura été qu’une forme transitoire du progrès divin de toute chose, et du fieri de la conscience divine, Car, lors même que l’humanité n’influerait pas directement sur les formes qui lui succéderont, elle aura eu son rôle dans le progrès gradué, comme rameau nécessaire pour l’apparition des rameaux plus élevés. […] Hegel est insoutenable dans le rôle exclusif qu’il attribue à l’humanité, laquelle n’est pas sans doute la seule forme consciente du divin, bien que ce soit la plus avancée que nous connaissions.

57. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre (2e partie) » pp. 5-80

Il semble qu’on entre dans un temple où l’Esprit divin va se faire entendre dans la sincérité de la conscience et dans le silence du recueillement. […] Que le roi donc, après avoir bien considéré la loi divine, inflige justement les peines à ceux qui agissent injustement ! […] À ce titre le meurtre et l’anthropophagie sont donc divins, car ces monstruosités sont une loi du monde. […] La saine philosophie lui aurait enseigné que la guerre est si peu divine que le plus divin progrès de l’humanité est de la tempérer et de la diminuer jusqu’à sa complète extinction (si cela devient jamais possible) chez les hommes. […] Le publiciste de l’infaillibilité des papes poussait la révolte jusqu’au sarcasme et jusqu’à des vœux de mort contre le pontife représentant de l’autorité divine à ses yeux.

58. (1857) Cours familier de littérature. III « XIVe entretien. Racine. — Athalie (suite) » pp. 81-159

Est-ce l’esprit divin qui s’empare de moi ? […] Des prophètes divins malheureuse homicide ! […] L’intervention divine apparaît au cinquième acte par un miracle de zèle dans Joad, de fidélité dans les tribus de Juda et de Benjamin. […] Mais l’art y est aussi parfait que l’inspiration y est divine. […] Mais comme les autres passions divines y parlent une langue supérieure aux langueurs de la passion des sens !

59. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Madeleine, Jacques (1859-1941) »

. — Pierrot divin (1887). — Le Conte de la Rose (1891). — Brunette, ou petits airs tendres (1892). — À l’orée (1899). — Le Sourire d’Hellas (1899). — Un jour tout de rêve (1900). — La Petite Porte feuillue (1900). […] Jamais la divine Hellade n’a été mieux comprise, mieux pénétrée, et n’a suggéré plus définitive expression de sa grâce et de sa force souveraine. […] Aristophane, mais la simplicité, la bonhomie presque, la sensualité délicate, l’amour de la lumière, la clémence d’un monde heureux, la divine eurythmie des gestes et des attitudes naturelles et nobles.

60. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIe entretien. Trois heureuses journées littéraires » pp. 161-221

La muse de Laprade était la plus divine des statues, mais une statue ; le poète était le grand statuaire de notre siècle, un Canova en vers, taillant la pensée en strophes, un sculpteur d’idées. […] La voix du barde divin résonnait grave comme un souffle d’hiver à travers les troncs caverneux d’une forêt de Calédonie. […] Quel qu’il soit, cependant, ma voix bénit ton être Pour le divin repos qu’à tes pieds j’ai goûté. […] Ces chefs-d’œuvre sont divins, mais ils sont abstraits ; ils ne peuvent servir à peupler le temple, ils le décorent : ce sont les bas-reliefs de l’âme. […] La charité est la seule passion qui palpite dans l’Évangile ; mais c’est une passion divine, collective, métaphysique, abstraite, qui généralise et qui n’individualise pas le sentiment.

61. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVIII. Lacordaire »

C’est son inclinaison vers le terre-à-terre de toutes choses qui nous emporte en bas, hors du monde des choses saintes et divines, et que le devoir d’un prêtre de la religion surnaturelle de Jésus-Christ n’est pas, je crois, de précipiter. […] La Critique qui n’a point, elle, la main sacerdotale du Père Lacordaire, tremble quand il s’agit de toucher à cette chose immense et divine, l’âme de N. […] L’histoire, la vraie et la seule histoire des relations de Notre-Seigneur et de sainte Madeleine, c’est l’Évangile, l’Évangile si sobre d’interprétation, si vivant de la seule vie du fait, l’Évangile dans lequel l’âme divine et humaine de N. […] Mais le Père Lacordaire, moderne lui-même comme le roman, a trouvé que ce n’était pas assez que les quelques mots, rayonnants dans les placidités du divin récit, que les quelques faits qui donnent Dieu et l’homme en bloc ; il a voulu, qu’on me passe le mot, y mettre plus d’homme, et il l’a voulu pour émouvoir les âmes où il y a plus de créature humaine que de chrétienne, car ce livre — on le sent par tous ses pores, — est écrit surtout pour les femmes et pour les âmes femmes, quel que soit leur sexe. […] Lacordaire ne l’éteint pas, il est vrai, ce nimbe du surnaturel et du divin autour de la tête pâle de Notre-Seigneur Jésus-Christ, mais il le voile, pour qu’on aperçoive mieux combien cette tête est humainement belle et pour que ceux qui sourient du nimbe soient touchés au moins de la beauté du plus beau et du plus doux des enfants des hommes !

62. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIe entretien. Épopée. Homère. — L’Iliade » pp. 65-160

L’homme s’humilie et se réduit à l’état d’instrument sous la main divine. […] Je le sais bien, mais je n’oserais pas le dire, de peur d’offenser l’esprit humain dans l’une ou dans l’autre de ses facultés également divines. […] C’est moi, divin Achille, qui t’ai fait ce que tu es ! […] Les dieux lui prêtent une armure divine à la place de ses propres armes, que la mort de Patrocle a livrées à Hector. […] L’amitié cependant y retrouve de divins accents.

63. (1861) Questions d’art et de morale pp. 1-449

Plus l’élément divin abonde, moins il y a de résistance et de lutte possible. […] N’est-ce pas là un aveu naïf de l’intervention divine dans l’inspiration ? […] La perfection et l’éternité, n’est-ce pas là le caractère du divin ? […] Partout la nature nous révèle un monde invisible, un monde divin. […] Son office est d’instruire l’homme des idées divines, de lui révéler l’infini.

64. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (3e partie) » pp. 5-96

Le mensonge a tué le divin menteur. […] Cependant je tiens les quatre évangiles pour parfaitement authentiques, car il y a là le reflet de l’élévation qui brillait dans la personne du Christ, élévation d’une nature aussi divine que tout ce qui a jamais paru de divin sur la terre. […] Frédéric écarta le drap, et la divine beauté de ces membres me remplit d’étonnement. […] Corneille était aussi fort, mais pas aussi divin ; Racine, moins philosophe et moins original. […] On y sent son origine indoue ; il faut remonter jusque-là pour trouver sa divine ressemblance.

65. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre X, Prométhée enchaîné »

Déjà une fois, lorsque je voulais te défendre, il me saisit par un pied, et me lança du haut des demeures divines. […] « Ô divin Ether, Vents aux ailes rapides. […] L’initiateur divin mène, de front pour eux, toutes les œuvres et tous les travaux. […] Ses contemporains des premières dynasties divines avaient subi la même déchéance. […] Sous cet aspect nouveau, Hermès devient le chef des éphèbes, le prince de la jeunesse, le pur-sang divin de la race attique.

66. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIIe entretien » pp. 87-159

C’est le mens agitat molem des poètes, le ressort surnaturel, caché mais sensible, qui remue, qui régit, qui gouverne le monde divin. […] Il s’ensuit, avec la même certitude, qu’il y a pour l’homme immatériel, ou pour l’âme incorporelle de l’homme enfin délivrée de ses sens, une autre destinée, destinée immatérielle toute correspondante aussi à la nature intellectuelle et morale de cet être créé appelé homme ici-bas, et on ne sait de quel nom divin ailleurs. […] Il s’ensuit que les poètes, ces organes réputés divins de l’imagination du genre humain, ont été forcés d’introduire dans le poème épique, ce grand résumé chanté des deux mondes, un monde invisible à côté et au-delà du monde visible, la matière et l’esprit, l’homme complet, héros ou martyr sur la terre, demi-dieu dans les olympes, ou supplicié dans les enfers. […] … Une voix qui ne s’est jamais enrouée, cassée, aigrie, irritée, profanée dans nos rixes mondaines et passionnées d’intérêts ou du siècle ; une voix qui, comme celle du tonnerre dans les nuées ou de l’orgue dans les basiliques, n’a jamais été qu’un organe de puissance ou de persuasion divine à nos âmes ! […] Ce sont des orateurs humains ; l’orateur divin, c’est Bossuet.

67. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VII. Mme de Gasparin »

Et l’écrivain qui les a décrits, ces horizons et ces environs, avec le sens et le goût des choses divines, qui est-il ? […] Vous n’y trouverez que ce problème résolu de la vie future, pressentie, et nécessitée par la misère de la vie actuelle et par la lettre, la lettre même des promesses divines. Or qui dit promesses divines, entend la foi. […] À sa manière elle a fait plus sur la question de personnalité divine que beaucoup de philosophes ; que M.  […] Il y a un rayon égaré de l’âme de sainte Thérèse dans cette protestante que la personnalité divine de Notre Seigneur Jésus-Christ transporte, mais c’est une sainte Thérèse comme le protestantisme peut en faire des plus grandes âmes qui naissent dans son sein.

68. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Les Saints Évangiles, traduction par Le Maistre de Saci. Paris, Imprimerie Impériale, 1862 »

Mais du jour où, dans une province de Judée éloignée de Jérusalem, sur une colline verdoyante, non loin de la mer de Galilée, au milieu d’une population de pauvres, de pêcheurs, de femmes et d’enfants, le Nazaréen, âgé de trente ans environ, simple particulier, sans autorité visible, nullement conducteur de nation, ne puisant qu’en lui-même le sentiment de la mission divine dont il se faisait l’organe inspiré comme un fils l’est par son père, se mit à parler en cette sorte, de cette manière pleine à la fois de douceur et de force, de tendresse et de hardiesse, « d’innocence et de vaillance », un nouvel âge moral commençait. […] Bossuet, qui tire tout à lui, a voulu y voir, de la part du plus sage des philosophes, une espèce de pressentiment divin, une manière de prédiction sans le savoir. […] — Et en effet, pour quiconque, même sans trop de science, le considère et le contemple en lui-même et dans ce qui sort immédiatement et directement de lui, le Christ est et demeure celui en qui et à l’occasion duquel s’est offerte aux yeux des hommes la manifestation la plus parfaite du sentiment, divin uni à la pitié et à la componction humaine. […] Enfin c’est un homme qui, par son excellente beauté et ses divines perfections, surpasse les enfants des hommes. » Ce Lentulus, quel qu’il soit, parle déjà comme Jean-Jacques en son Vicaire savoyard. — Et maintenant, comment cette parole du Christ, cette manne première qui tombait et pleuvait sur les cœurs simples, au penchant des collines ou le long des blés, et que le Juste avait en mourant arrosée de son sang, comment, bientôt armée et revêtue de la doctrine et de la théorie de saint Paul, est-elle sortie de la Galilée et de la Judée pour s’approprier aux Gentils et pour leur être inoculée par lui ? […] sans doute, il est à bien des égards vénérable, et il porte en soi bien des choses, humaines ou divines, qui ne se sauraient assez ménager.

69. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre V. Premiers aphorismes de Jésus. — Ses idées d’un Dieu Père et d’une religion pure  Premiers disciples. »

Le panthéisme, d’un autre côté, en supprimant la personnalité divine, est aussi loin qu’il se peut du Dieu vivant des religions anciennes. […] Ils sentaient le divin en eux-mêmes. […] Les spéculations des Pères grecs sur l’essence divine viennent d’un tout autre esprit. […] La conception réaliste de l’avènement divin n’a été qu’un nuage, une erreur passagère que la mort a fait oublier. […] Quod Deus immut., § 1 et 2 ; De Abrahamo, § 22 ; Quis rerum divin. hæres, § 13 et suiv., 55, 58 et suiv. ; De profugis, 7 et 8 ; Quod omnis probus liber, en entier ; De vita contemplativa, en entier.

70. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IX. Seconde partie. Nouvelles preuves que la société a été imposée à l’homme » pp. 243-267

On s’est fort trompé sur le droit divin. […] Le droit divin n’est pas toujours visible comme dans la théocratie des Juifs, mais il n’est jamais suspendu. Nier le droit divin est une erreur analogue à celle de nier la création. La nation anglaise, la première, a fait du droit divin un dogme antinational. […] Peut-être même sous ce point de vue était-il nécessaire que le droit divin fût nié par une société, parce que la résistance de quelques hommes isolés, pour admettre ce dogme fondamental, n’aurait pas assez prouvé la liberté.

71. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Une petite revue ésotérique » pp. 111-116

Avec Emerson, le héros devient le représentant de l’humanité, c’est le divin patron sur la véracité duquel le monde s’appuie. […] Le maniement de l’alphabet hébraïque et de ses combinaisons numériques, le symbolisme profond des noms divins et la théorie merveilleuse des Séphiroth y sont expliqués avec autant de pénétration et de clarté que possible. » Psyché commente le livre de Péladan : Comment on devient mage. […] “Le commerce avec les grands morts, la méditation des livres testamentaires de la puissance magique… la force de toute force c’est l’adhésion au plan divin.” » Il est impossible de parler en détail de toutes les autres petites revues qui pullulaient à cette époque.

72. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome III pp. 5-336

« Dis-moi de leurs combats la première origine : « Parle, remplis mon cœur de ta flamme divine. […] Renonçons à trouver l’unité dans ce chef-d’œuvre tout divin, que tant de grâce, lie variété, d’élévation et de génie mettent au-dessus de plus d’une règle classique. […] Sur le merveilleux en général, et sur le merveilleux divin, allégorique, et chimérique. […] Oui certes ; mais on n’y voit pas les dieux des païens exprimant les passions des patriarches ; et c’est une sorte de fiction bien étrange et bien compliquée que celle qui masque les figures divines d’une religion avec les figures divines d’une autre. […] De là le merveilleux divin, ou sacré.

73. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (5e partie) » pp. 145-224

L’indéfini, qui naît de la combinaison humaine et divine de l’infini et du fini, leur échappe. […] Le matérialisme, cette maladie du dernier siècle, est, à leur insu, au fond de toutes ces illusions de la chair, excepté chez Victor Hugo, trop divin pour se matérialiser. […] À l’heure dite, avec autant de désintéressement qu’un acteur qui arrive à sa réplique, obéissant au scénario divin, ils entrent dans le tombeau. […] Divins peuples éclaireurs ! […] Mais, pour tempérer nos misères et pour désarmer l’utopie, le ciel nous a laissé un divin intermédiaire, l’assistance mutuelle, cette charité de tous pour tous.

74. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

Tournons encore, nous sommes avec Magdeleine éperdue aux pieds du divin Sauveur. […] Instrument exquis, il ne peut vibrer que sous un souffle libre et divin. […] Cherchez votre Béatrix dans les cercles divins. […] Cette larme divine transforme le diable en chérubin. […] Il n’y a pas de loi divine ni sociale qui t’enchaîne à la rudesse de tes pères.

75. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Signoret, Emmanuel (1872-1900) »

Signoret, lui, arrive et, sans se soucier des insanités qui purent contaminer la beauté des choses, il chante, les bois, les eaux, les nuages, les roses, toutes banales vérités qui ont cependant la sublimité éternelle de Dieu et qui sont les prototypes primitifs des fortes œuvres des hauts génies, depuis Virgile jusqu’au vicomte de Chateaubriand et au divin vieux maître Camille Corot. […] Calixte Toesca Ici, la splendeur sans défaut de la Symphonie initiale, sa profondeur d’accent et de pensée, l’harmonie parfaite et formidable de son mouvement s’allient aux grâces divines de la Fontaine des Muses pour faire de cette œuvre le plus beau des monuments. […] Phidias s’érigeait sur l’Acropole et s’imposait au peuple comme une manifestation divine.

76. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIVe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (3e partie) » pp. 365-427

Elle est diversifiée, agitée, charmée, ennuyée par une foule d’autres passions, parmi lesquelles l’amour est la plus impérieuse et la plus brûlante, l’amour qui est le premier et le dernier mot de la nature, l’amour, image terrestre de ce suprême amour qui aspire à créer, qui jouit de créer, et qui sans savoir ce qu’il veut éprouve, en créant, quelque chose d’analogue au plaisir que la création divine donne à celui qui crée, — l’attrait divin, le plaisir de Dieu en créant l’homme et les mondes ; — attrait tel que l’homme y sacrifierait mille fois sa courte vie. […] Et elle s’endort dans ce mot humain, seule explication de la divine énigme. […] Quant au mouvement, silence ; la science cosmique n’en connaît pas la cause ; un de ces jours elle apportera un nouveau mot qui remplacera dans un néant de plus la divine, ineffable et constante volonté de l’auteur des mondes. […] Donc la pensée divine qui crée en pensant, et la matière inférieure qui reçoit et exécute les lois de Dieu : Voilà les deux éléments dont le Cosmos se compose. […] « La volonté divine, nous ne la voyons pas, donc elle n’est pas.

77. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « IV. Saisset »

Saisset et comme je le crois, la question de la personnalité divine ; si, au terme où est arrivé l’esprit humain, il faut, de rigueur, être pour l’homme-Dieu tel que la religion de Jésus-Christ nous l’enseigne, ou pour le Dieu-homme tel que l’établit M.  […] Saisset, à qui je ne demanderai pas plus qu’il ne peut me donner, a-t-il fait du moins dans son Essai de philosophie religieuse, pour le compte de la personnalité divine, quelque découverte qui fasse avancer cette question ? Je viens de lire cette longue méditation cartésienne, faite les yeux fermés et les mains jointes avec les airs de recueillement d’un philosophe en oraison, dans l’in-pace de la conscience, dans le silence profond de la petite Trappe psychologique que tout philosophe porte en soi, pour y faire des retraites édifiantes de temps en temps et s’y nettoyer l’entendement, et, je l’avoue, je n’y ai rien trouvé qui m’éclairât d’un jour inconnu et fécond la personnalité divine que nous autres catholiques nous savons éclairer du jour surnaturel de la foi. […] Saisset n’ose rien de dogmatique et de réellement décisif sur la personnalité divine, d’abord parce que le déisme pur ne le permet pas, et ensuite parce que, sur cette question de Dieu, l’Institut ne se soucie pas qu’on dépasse la ligne circonspecte d’une haute convenance sociale.

78. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Ratisbonne, Louis (1827-1900) »

Ratisbonne, Louis (1827-1900) [Bibliographie] La Divine Comédie, traduction (1857). […] En ce siècle hâtif qu’effrayent les longues besognes, à moins que ce ne soient d’interminables romans bâclés au jour le jour, il faut un singulier courage et une patience d’enthousiasme extraordinaire pour traduire en vers, avec une fidélité scrupuleuse qui n’exclut pas l’élégance, tout l’enfer de la Divine Comédie, depuis le premier cercle jusqu’au dernier.

79. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Madame de La Vallière. » pp. 451-473

On reconnaît vers la fin des Réflexions les vifs élans de cet amour tendre qui est en voie de se transformer en passion divine et en charité. […] En vérité, ses sentiments ont quelque chose de si divin, que je ne puis y penser sans être en de continuelles actions de grâces : et la marque du doigt de Dieu, c’est la force et l’humilité qui accompagnent toutes ses pensées ; c’est l’ouvrage du Saint-Esprit… cela me ravit et me confond ; je parle, et elle fait ; j’ai les discours, elle a les œuvres. […] Qu’on juge de l’attente en pareille occasion : Cette belle et courageuse personne, écrit Mme de Sévigné, fit cette action comme toutes les autres de sa vie, d’une manière noble et charmante : elle était d’une beauté qui surprit tout le monde ; mais ce qui vous étonnera, c’est que le sermon de M. de Condom (Bossuet) ne fut point aussi divin qu’on l’espérait. […] Dans le tableau qu’il traçait du second amour et des efforts de l’âme repentante pour se dégager et revenir à son divin principe, il y avait pourtant bien des traits d’une application directe et délicate. […] Disons seulement, de notre ton le moins profane, que, quand on vient de relire l’admirable chapitre v du livre III de l’Imitation, où sont exprimés les effets de l’amour divin, qui n’est dans ce chapitre que l’idéal de l’autre amour, Mme de La Vallière est une de ces figures vivantes qui nous l’expliquent en leur personne et qui nous le commentent le mieux.

80. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gautier, Théophile (1811-1872) »

Pour parler dignement de l’outil qui sert si bien cette passion du Beau, je veux dire de son style, il ne faudrait jouir de ressources pareilles, de cette connaissance de la langue qui n’est jamais en défaut, de ce magnifique dictionnaire dont les feuillets, remués par un souffle divin, s’ouvrent toujours juste pour laisser jaillir le mot propre, le mot unique, enfin de ce sentiment de l’ordre qui met chaque trait et chaque touche à sa place naturelle et n’omet aucune nuance. […] Gautier quelques heureuses innovations métriques, par exemple, l’importation de la terza rima, de ce rythme de La Divine Comédie qui n’avait pas reparu dans notre poésie depuis le xvie  siècle, et qui a droit d’y figurer par son caractère gravement approprié, surtout quand il s’agit de sujets toscans. — Tout à côté, on peut admirer à la loupe une fine miniature chinoise sur porcelaine du Japon. […] José-Maria de Heredia Sans craindre que jamais elle soit abattue Dans un marbre ignoré, dans un divin métal, Le Poète a sculpté lui-même sa statue. […] Auguste Vacquerie Toi qu’on disait l’artiste ardent mais l’homme tiède, Le rimeur égoïste et sourd à tous nos cris, Le jour où l’Allemagne assiégea ce Paris Haï des nations parce qu’il les précède, Quand sachant que Paris difficilement cède Et que, criblé, haché, broyé sous les débris, Les obus n’obtiendraient de lui que son mépris, L’Allemagne appela la famine à son aide, Quand plusieurs étaient pris du goût de voyager, Toi qui dans ce moment étais à l’étranger, Chez des amis, avec une fille chérie, Dans un libre pays, au bord d’un lac divin, Pouvant vivre tranquille et manger à ta faim, Tu choisis de venir mourir pour la patrie. […] Leconte de Lisle Toi, dont les yeux erraient, altérés de lumière, De la couleur divine au contour immortel.

81. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre I : Philosophie religieuse de M. Guizot »

L’homme lui-même n’est-il pas une incarnation divine ? […] En même temps que l’incarnation témoigne de la puissance divine, la rédemption témoigne de la bonté de Dieu. […] Quiconque admet la liberté humaine, peut et doit admettre au moins la liberté divine. […] Le spiritualisme, admettant la personnalité divine, n’a pas le même droit. […] Les nier métaphysiquement, c’est nier la liberté divine et entrer à pleines voiles dans le panthéisme et le fatalisme.

82. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre VIII. »

Sous ces deux titres on peut concevoir ce que, bien des siècles plus tard, et dans une science toute formée des traditions grecques, nous retrouvons sous la plume de Varron, divisant la théologie en mythologique, naturelle, et civile : « La première, ajoutait-il, faite pour le théâtre, la seconde pour l’univers, la troisième pour Rome. » Il paraît, d’après les courtes analyses de saint Augustin, que Varron touchait dans sa seconde théologie à cet antique panthéisme, à cette idée d’une nature éternellement vivante et par là divine, qui semble le fondement des cultes antiques de l’Inde. […] La sagesse dont il était le disciple, les croyances qu’il avait recueillies sur l’essence divine de l’âme et la vérité absolue, fortifiées de sa puissante parole, trouvaient près de lui d’autres maîtres pour les enseigner, d’autres poëtes pour les chanter. […] Parfois il se montre à eux comme un banni du ciel, obligé de regagner par ses épreuves ici-bas le séjour divin qu’il a perdu, et leur frayant lui-même la route qu’il leur conseille. […] Il est malaisé d’ailleurs de découvrir si le premier homme levé du sol fut Alcomène, chez les Béotiens, au-dessus des eaux du Céphise, ou si ce furent les Curètes d’Ida, race divine, ou les Corybantes de Phrygie, que le soleil vit alors éclore les premiers, enfantés par la tige des arbres, ou si l’Arcadie donna naissance à Pélasge, plus ancien que la Lune, ou Éleusis à son premier habitant Diaulos, ou si Lemnos, féconde en beaux enfants, mit au monde le Cabire des mystères ineffables, ou si Pallène fit naître Alcione de Phlégra, l’aîné des superbes géants. […] Après avoir montré les mortels emportés et roulant çà et là sous les coups du malheur, le poëte dit : « Homme, prends courage96 cependant : les mortels sont une race divine à qui la nature sacrée révèle toute chose. — Abstiens-toi des aliments défendus ; et, pour les expiations et la délivrance de l’âme, sois juge toi-même, et considère toutes choses avec la raison pour guide au-dessus de toi.

83. (1848) Études sur la littérature française au XIXe siècle. Tome III. Sainte-Beuve, Edgar Quinet, Michelet, etc.

Et quand on a le talent de Vinet, il est fâcheux de l’employer à soupeser des Divines épopées ou les romans d’un Drouineau. […] Il est effrayant de penser que Vinet a lu la Divine Epopée. […] Il est beau de montrer les vents d’orage devenant une haleine pacifique, et le divin, coulant dans la forme du caractère individuel, devenir humain sans en être moins divin. […] Elle passe avec le divin condamné devant la maison d’Ahasvérus. […] La foi, l’amour divin peuvent seuls, selon le poète, accomplir notre destinée.

84. (1869) Philosophie de l’art en Grèce par H. Taine, leçons professées à l’école des beaux-arts

Le poëte théologien circule dans son monde divin avec une liberté et une sérénité d’enfant qui joue. […] L’expérience des sens et le raisonnement des savants sont insuffisants et trompeurs ; prenons pour flambeau la révélation, la foi, l’illumination divine. […] Toutes les grandes puissances naturelles sont divines en Grèce, et il ne s’est point encore fait dans l’homme de divorce entre l’animal et l’esprit. […] Car la victoire de l’athlète était un triomphe public, et les vers du poëte y associaient la cité et tous ses divins protecteurs. […] Lorsqu’un peuple sent la vie divine des choses naturelles, il n’a pas de peine à démêler le fond naturel d’où sortent les personnes divines.

85. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Lamartine »

Il n’y a pas ici un vers, un seul, de cette poésie qui va tout à l’heure déborder sur le monde comme le plus beau des quatre fleuves du Paradis terrestre, et qui nous l’a souvent apporté, le Paradis, dans les flots de son azur divin ! […] Assurément, celle de Lamartine a sur la poésie de Virgile la supériorité des choses infinies sur les choses finies, des choses divines sur les choses humaines. […] Il était une équation superbe entre l’âme humaine et l’Absolu, à laquelle ceux qui ne sont pas au courant de la mathématique de l’Absolu et de l’âme ne comprennent et ne comprendront jamais rien, l’ai entendu quelquefois dire aux abjects de ce temps abject, qui ne regardent que la terre où ils mettent leurs pieds de devant comme ils y mettent leurs pieds de derrière, que le naturel divin de Lamartine n’était pas du naturel. […] C’était le naturel d’un être qui n’en était pas moins réel parce qu’il était naturel et divin… On lui reprochait sa manière de voir et de représenter les choses.

86. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXVII » pp. 306-312

Il suppléait trop souvent à cette disette d’idées par des conceptions enflées et étranges au fond desquelles on sentait l’absence de sérieux : c’est le défaut radical de sa Divine Épopée, au sujet de laquelle M. […] Sa bibliothèque, nous dit un journal, se composait en tout de six ou sept ouvrages : Homère, Virgile (l’Énéide), la Jérusalem du Tasse, les Lusiades de Camoëns, la Messiade de Klopstock, et la Divine Épopée, qu’il ajoutait d’autorité à cette illustre famille : une plume d’aigle, présent d’un ami, et avec laquelle il avait écrit cette Divine Épopée, était suspendue comme trophée au-dessus de l’œuvre.

87. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre II. Quelques traditions sur Pindare. »

Ce fut merveille, dit-il, pour tous les habitants de cette Achérontia, suspendue comme un nid, et pour ceux des bois de Bantium et des vallées fertiles de Forente, de me voir dormir, en sûreté contre les vipères et les ours, sous les ombrages enlacés du laurier divin et du myrte, enfant magnanime que j’étais, non sans l’aide des Dieux26 ». […] Après avoir remarqué, dans sa description de Tanagre, que les habitants de cette ville ont su le mieux, parmi les Grecs, régler ce qui concerne le culte divin, toujours attentifs à placer les temples à part, dans un lieu pur, loin de l’habitation des hommes, il ajoute, apparemment par cette liaison d’idées naturelle entre le culte et la poésie : « Le tombeau de Corinne28, qui seule, à Tanagre, a fait des hymnes, est placé dans le lieu le plus découvert de la ville. […] On racontait qu’Apollon l’aimait et lui donnait des marques de cette faveur divine.

88. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « L’abbé Monnin. Le Curé d’Ars » pp. 345-359

» Eh bien, ils souffriront peut-être qu’on s’occupe, sans s’économiser la besogne, d’un être angélique et même charmant à la manière des hommes, et même spirituel, dans le sens littéraire, comme les lettrés le sont rarement, après l’avoir été dans le sens divin comme ils ne le sont jamais ! […] Je n’en aurais pas pour garants les promesses divines et les expériences de la vie, déposant toutes de l’efficacité de l’aveu pour ce cœur de l’homme qui étouffe toujours, que je n’en douterais plus après avoir lu les toutes-puissantes choses que je trouve dans le livre de l’abbé Monnin, et qui me consacreraient le Curé d’Ars comme un génie, si je n’avais pas bien plus que du génie pour l’expliquer ! […] Le verbe s’était fait chair, chez ce disciple de Jésus-Christ, comme il s’était fait chair en son divin Maître, qu’il ne pensa jamais qu’à imiter, — imitation, préhension, possession plutôt, par l’amour ! […] Saint Vincent de Paul est un saint aussi, et certainement l’un des plus grands Saints des temps modernes et peut-être de tous les temps, mais l’action humaine se mêle en lui à l’action divine.

89. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre III. L’histoire réelle — Chacun remis à sa place »

L’antique voie de fait de quelques-uns sur tous, nommée droit divin, touche à sa fin. […] La grâce de Dieu procrée le droit divin. […] Les sultans sont divins ; leur cimeterre est sacré, leur poignard est sublime, leurs exterminations sont magnanimes, leurs parricides sont bons. […] La légitimité, le droit divin, la négation du suffrage universel, le trône fief, les peuples majorât, dérivent de cette histoire. […] Toutes ces phrases, expression d’une idée unique, l’idée divine, écrivent lentement le mot Fraternité.

90. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre IX. Eugénie de Guérin »

Le génie de Mlle de Guérin n’embrasse que son frère ; mais quelle grâce et quelle passion divine dans cette attitude éplorée qui résume toute une existence et la lie si étroitement autour d’une autre, — car elle l’avait bercé et elle l’a enseveli ! […] Nous avons tous une beauté divine, la seule qu’on doive aimer, la seule qu’on doive conserver pure et fraîche pour Dieu qui nous aime. » Simple et profonde manière de se voir et de s’accepter qu’elle eut toute sa vie et qui aurait sauvé Mme de Staël, qu’on appelle une laide de génie, de ses tristesses sans grandeur ! […] Ils maniaient, avec leurs grosses mains, cette divine opale aux nuances de vapeur, aussi indifféremment que les jetons de faux ivoire de leurs tables de jeu. […] …………………… …………………… Premiers vers de Guérin, flûte de pâtre qui balbutie une note divine, mais où une haleine comme celle de Mozart a déjà passé ! […] Semblable, par la marque divine, au Maurice qu’elle avait tant aimé, elle lui fut semblable encore par la maladie.

91. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XI. »

Par ses maximes sur l’éternelle justice, la providence divine, la pitié pour les faibles, la punition des méchants, Eschyle est, avec Pindare et Sophocle, le poëte le plus moral de l’antiquité, le poëte ami du droit et de la vertu contre la force et le vice. […] L’inspiration divine est restée à son âme asservie par l’esclavage. […] « Quel homme, ainsi coupable, se flatte d’écarter de son âme les traits de la colère divine ? […] Pourquoi ces discours d’un gouverneur de prince, au lieu du souvenir de cette invisible et divine maîtresse, dont l’innocent Hippolyte croit entendre la voix dans le silence des forêts ? […] Quelle poésie légère, insaisissable, dans ce chœur des Nuées : « Nuées éternelles133, élevons-nous, dans notre mobile et vaporeuse essence, du sein paternel de l’Océan tumultueux, sur les cimes ombragées des hautes montagnes, d’où nous voyons au-dessous de nous de lointaines perspectives, et la terre sacrée fertile en moissons, et les frémissements des fleuves divins, et la mer bruyante ; car l’œil infatigable de l’éther brille d’une éclatante lumière ; et, quand nous avons écarté l’ombre épaisse des pluies, nous donnons à nos regards qui percent au loin, pour vision éternelle, la terre….

92. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (3e partie) et Adolphe Dumas » pp. 65-144

« À ces mots, le divin Ulysse, en se dégageant des branches, brise de l’effort de sa main dans l’épais taillis un rameau feuillu pour en voiler autour de ses reins sa nudité. […] Elles déposent auprès du héros les aliments, le breuvage ; et le divin Ulysse, après avoir supporté tant de maux, mangeait et buvait avidement, car depuis longtemps il était reste sans nourriture. […] Là, le divin Ulysse s’assoit et implore aussitôt la fille du grand Jupiter. […] Médite la parole divine, ne la perds jamais de vue ; dirige vers elle toute la force intellectuelle de l’âme. […] que prierais-je, moi, dans mes nuits terribles, sans la consolation des affligés, sans ce confident divin qui veille à mon chevet, qui ne s’endort jamais, et qui entend tout !

93. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VII, seconde guerre médique. »

Quand les Perses approchèrent, l’Archer divin apparut sur la double cime du Parnasse, armé de l’éclair et de l’avalanche. […] Invisible, d’autant plus divin : sa présence n’était attestée que par le gâteau de miel qu’on déposait tous les mois, au bord de son trou, et qui disparaissait aussitôt. […] Sans lui, les vieux sanctuaires archaïques, protégés par la tradition, auraient continué à végéter sur le rocher de Cécrops, étouffant en germe les colonnes divines d’Ictinos. […] Il y eut choc entre les deux astres, et le divin Phœbus abattit Ormuzd sous sa flèche ailée. […] Cette musique divine des idées aurait-elle pu résonner sur ses légers modes, entre les cris d’un camp barbare et les incantations d’un collège de mages ?

94. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre VI. Milton. » pp. 411-519

toi enfin, troisième substance de la divine infinitude, esprit illuminateur, la joie et la consolation de toute chose créée ! […] Il accourt déguisé en prêtre : Se peut-il qu’un mélange mortel d’argile terrestre — exhale l’enchantement divin de pareils accents ? […] Ce n’était point une épopée divine qu’il pouvait produire, mais une épopée humaine. […] and Thou, the third substance of Divine infinitude, illuminating Spirit ; the joy and solace of created thing ! […] Can any mortal mixture of earth’s mould Breathe such divine enchanting ravishment ?

95. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre III. De la logique poétique » pp. 125-167

La première langue avait été la langue hiéroglyphique, ou sacrée, ou divine ; la seconde symbolique, c’est-à-dire employant pour caractères les signes ou emblèmes héroïques ; la troisième épistolaire, propre à faire communiquer entre elles les personnes éloignées, pour les besoins présents de la vie. — On trouve dans l’Iliade deux passages précieux qui nous prouvent que les Grecs partagèrent cette opinion des Égyptiens. […] Chez les Latins, Varron s’occupa de la langue divine ; et les trente mille dieux dont il rassembla les noms, devaient former un riche vocabulaire56, au moyen duquel les nations du Latium pouvaient exprimer les besoins de la vie humaine, sans doute peu nombreux dans ces temps de simplicité, où l’on ne connaissait que le nécessaire. […] Les fables divines des Latins et des Grecs durent être pour eux les premiers hiéroglyphes, les caractères sacrés de cette langue divine dont parlent les Égyptiens. […] Ceux qui imagineront les dieux étaient des hommes, et croyaient leur nature héroïque mêlée de la divine et de l’humaine. […] Corollaires relatifs à l’origine de l’élocution poétique, des épisodes, du tour, du nombre, du chant et du vers Ainsi se forma la langue poétique, composée d’abord de symboles ou caractères divins et héroïques, qui furent ensuite exprimés en locutions vulgaires, et finalement écrits en caractères vulgaires.

96. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIe entretien. Sur la poésie »

Il y a aussi dans toutes les choses humaines, matérielles ou intellectuelles, une partie éthérée, insaisissable, transcendante, et pour ainsi dire atmosphérique, qui semble correspondre plus spécialement à la nature divine de notre être. […] Placé lui-même pour les sentir et pour les exprimer sur les limites de ces natures humaines et divines qui se touchent et se correspondent en lui, l’homme n’a pas eu longtemps le même langage pour exprimer l’humain et le divin des choses. […] Il a parlé des choses humaines, il a chanté les choses divines. […] L’art des arts, la poésie seule chante pour tous les sens à la fois et pour l’âme, ce sens intellectuel, résumé divin et immortel de tous les sens. […] Nous trouverions partout que c’est l’émotion qui est la mesure de la poésie dans l’homme ; que l’amour est plus poétique que l’indifférence, que la douleur est plus poétique que le bonheur, que la piété est plus poétique que l’athéisme, que la vérité est plus poétique que le mensonge ; et qu’enfin la vertu, soit que vous la considériez dans l’homme public qui se dévoue à sa patrie, soit que vous la considériez dans l’homme privé qui se dévoue à sa famille, soit que vous la considériez dans l’humble femme qui se fait servante des hospices du pauvre et qui se dévoue à Dieu dans l’être souffrant, vous trouveriez partout, disons-nous, que la vertu est plus poétique que l’égoïsme ou le vice, parce que la vertu est au fond la plus forte, comme la plus divine des émotions.

97. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre III, naissance du théâtre »

Pour nous servir d’une expression trivialement expressive, il y avait à boire et à manger dans son culte, et ses fêtes, qui gorgeaient les sens, offraient en même temps à l’esprit des philtres divins. […] — « Divines branches », — chantait la foule, — « qui portez des figues et des pains friands ! […] Des vies divines expiraient et refleurissaient dans les plantes. […] Le drame naissant semblait encastré dans le rituel de Bacchus, comme un bas relief archaïque dans le fronton d’un temple ; une innovation capitale, signalée par Hérodote, l’affranchit de cette servitude. — « Les Sycioniens, dit-il, rendaient des honneurs divins à Adraste, et célébraient ses malheurs par des chœurs tragiques, où ils honoraient non plus Bacchus, mais Adraste. » — Progrès immense, conquête décisive.

98. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XIII, les Atrides. »

Hermès, par l’ordre de Zeus, jeta les morceaux de l’enfant dans une chaudière enchantée autour de laquelle Pan — la divine Nature qui transforme et qui ressuscite — exécuta une danse mystérieuse. […] Mais il manquait l’épaule mangée par Déméter ; on lui en refit une en ivoire, que les Pélopides se transmirent : une blancheur éburnéenne marquait toujours sur leur corps l’endroit où la toreutique divine avait opéré. […] Croire que ces Êtres divins pussent se repaître de la chair des hommes, était une absurde impiété. […] Le ciel se faisait sombre autour de cette race ; le trésor des colères divines amassé par elle tomba sur ses fils.

99. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préface des « Rayons et les Ombres » (1840) »

Lorsqu’il blâmerait çà et là une loi dans les codes humains, on saurait qu’il passe les nuits et les jours à étudier dans les choses éternelles le texte des codes divins. […] Voilant à dessein les exceptions honteuses, il inspirerait la vénération pour la vieillesse, en montrant la vieillesse toujours grande ; la compassion pour la femme, en montrant la femme toujours faible ; le culte des affections naturelles, en montrant qu’il y a toujours, et dans tous les cas, quelque chose de sacré, de divin et de vertueux dans ces deux grands sentiments sur lesquels le monde repose depuis Adam et Ève, la paternité, la maternité. […] Virgile et Dante sont ses divins maîtres.

100. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 1, du génie en general » pp. 1-13

Mais si le poëte m’expose des avantures, s’il me fait voir des caracteres qui m’interessent autant que ceux de Pyrrhus et de Pauline, sa piece me fait pleurer, et je reconnois l’artisan qui se joüe ainsi de mon coeur, pour un homme qui sçait faire quelque chose de divin. […] Si cet enthousiasme divin, qui rend les peintres poëtes, et les poëtes peintres, manque à nos artisans, s’ils n’ont pas, comme le dit Monsieur Perrault, ce feu, cette divine flâme, l’esprit de notre esprit, et l’ame de notre ame.

101. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Wallon »

Elle rentre dans les choses divines, et les choses divines ont, dans ces derniers temps, été assez niées ou assez obscurcies pour qu’il y ait de la profondeur à les croire et du courage à les affirmer. […] Le savant en lui n’a pas tremblé devant les fausses sciences de son époque, et c’est comme savant, c’est comme historien qui y a regardé avec l’oeil impartial et scrutateur de l’historien, qu’il a maintenu la donnée divine de l’inspiration surnaturelle de Jeanne d’Arc.

102. (1884) Propos d’un entrepreneur de démolitions pp. -294

Elle en a parlé comme les saintes parlaient de l’amour divin qui les consumait. […] L’enthousiasme, enfin, est une rage de vie supérieure et un divin mécontentement des conditions inflexibles de la vie normale. […] Il y avait là certainement des contempteurs de l’idée divine et d’austères républicains qui avaient laissé leurs écailles sur leur comptoir. […] Elle a ce charme suprême, presque divin : la pureté… Jamais une mauvaise pensée n’a frôlé le front de Geneviève. […] C’est l’inétouffable, l’inextinguible sentiment religieux survivant à la notion même de tout symbole divin.

103. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 354-356

On peut en juger par le morceau où il croit entendre l’héritier du Trône s’adresser à la Religion, & lui dire, dans une tendre effusion de son ame : « Divine Religion, viens, unissons-nous ensemble pour concourir un jour au bonheur de l’Empire auquel m’appelle ma naissance. […] Par mes bienfaits, j’enchaînerai leurs cœurs ; par tes leçons sublimes, tu les épureras ; par mes soins, je contiendrai les vices ; par ta force divine, tu feras germer les vertus ; j’encouragerai les arts, tu formeras les mœurs ; je ferai respecter la justice, tu en inspireras l’amour ; tu parleras quand les Loix se tairont ; & si jamais l’oubli des saints devoirs, si l’ivresse de la puissance pouvoit jamais m’égarer moi-même, alors tonne du haut des Cieux, remplis mon ame d’un effroi salutaire, rappelle-moi à mes sermens ; & que, traîné devant ton Tribunal, je reconnoisse qu’en toi seule les Princes ont un Juge, & les Peuples un vengeur ».

104. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXVe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (1re partie) » pp. 337-416

Les fondateurs de religions sont les oracles réputés divins ; les écrivains politiques sont les législateurs des nations. […] Encore une fois, voilà le divin Platon devenu utopiste en politique et voulant refaire l’œuvre de Dieu mieux que Dieu, et composant une société avec des rêves, au lieu de la composer avec les instincts de la nature ; et voilà ce que l’on fait admirer, sur parole, à des enfants pour pervertir en eux l’entendement par l’admiration pour l’absurde ! Arrachez à cet homme ce surnom de divin Platon, et transportez-le à Socrate, l’homme du bon sens et de la réalité, qui épluchait trop sans doute, mais qui ne découvrait ses principes que dans la nature des choses et dans les instincts révélateurs de toute sagesse et de toute institution pratique digne du nom de société. […] C’est un fragment de cette éloquence lapidaire dont les monuments de l’Inde, de la Perse, de l’Égypte, de la Grèce orphéique conservent les dogmes dans les inscriptions de leurs temples, retrouvées et déchiffrées par nos érudits ; un alphabet épelé des vérités primitives, dont toutes les lettres rassemblées disent Dieu dans la nature et lois divines dans l’humanité. […] Zoroastre avait été pontife d’un empire immense, foyer d’une théocratie à la fois divine et politique, qui résumait toutes les clartés du monde primitif ; ses lois n’étaient que des dogmes réformés par une longue expérience.

105. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance de Voltaire avec la duchesse de Saxe-Golha et autres lettres de lui inédites, publiées par MM. Évariste, Bavoux et Alphonse François. Œuvres et correspondance inédites de J-J. Rousseau, publiées par M. G. Streckeisen-Moultou. — II » pp. 231-245

Dans son ravissement, dans l’admiration qui le pénètre jusqu’au fond de l’âme et qui déborde, le philosophe, à ce moment, se prosterne la face contre terre et adresse à l’Être divin un hommage, un hymne ardent et pur, qui ne diffère en rien d’une prière. […] C’est dans ce songe qu’il va voir figurer les religions diverses, depuis les plus grossières jusqu’à la plus pure, depuis les formes les plus brutales du naturalisme et de la sensualité jusqu’à la révélation de la parole la plus simple, la plus divine, la plus humaine, celle du sermon sur la montagne. […] A-t-il voulu faire entendre qu’entre la première manière de comprendre l’Être divin et toutes les autres il y a précisément toute la distance de la vérité à la fiction, et qu’un seul et même voile d’illusion, sauf la juste différence du plus au moins, s’étendra indistinctement sur tout ce qui sera vu dans le songe ? […] Ce qu’on a droit de faire observer, c’est qu’en supposant que le morceau soit terminé (et j’aime à croire qu’il l’est), rien ne vient à l’appui d’une interprétation défavorable le moins du monde à la révélation dernière, et que la fin du songe, au contraire, s’élève et atteint à un tel degré de sérénité morale et de beauté, qu’il ne tient qu’à nous d’y voir le couronnement et le perfectionnement sublime, la divine transfiguration de la philosophie simple et nue. […] Son air, son ton, son geste, causaient dans l’assemblée une extraordinaire fermentation ; le peuple en fut saisi jusqu’à l’enthousiasme, les ministres en furent irrités jusqu’à la fureur ; mais à peine étaient-ils écoutés. — L’homme populaire et ferme, en prêchant une morale divine, entraînait tout : tout annonçait une révolution ; il n’avait qu’à dire un mot, et ses ennemis n’étaient plus. — Mais celui qui venait détruire la sanguinaire intolérance n’avait garde de l’imiter, il n’employa que les voies qui convenaient aux choses qu’il avait à dire et aux fonctions dont il était chargé ; et le peuple, dont toutes les passions sont des fureurs en devint moins zélé et négligea de le défendre en voyant qu’il ne voulait point attaquer.

106. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Soumet, Alexandre (1788-1845) »

. — La Divine Épopée (1840) […] Alexandre Vinet Plus est grand le vice du sujet (La Divine Épopée), plus nous admirons la puissance du poète qui parvient presque à le faire oublier.

107. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre II. Trois espèces de langues et de caractères » pp. 296-298

Trois espèces de langues Langue divine mentale, dont les signes sont des cérémonies sacrées, des actes muets de religion. […] Trois espèces de caractères Caractères divins, proprement hiéroglyphes.

108. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — II. (Fin.) » pp. 257-278

Au fond, il est adversaire et rival du christianisme constitué et établi dans l’Église ; il a tout bas son ordre trouvé, sa religion à lui, son règne de Dieu qui doit en partie réparer le monde et réintégrer l’homme dans un état de presque divine félicité, lui rendre même des facultés tout à fait merveilleuses et des lumières présentement surnaturelles. […] C’est à sa manière un millénaire, un utopiste à imagination pieuse ; et les beaux résultats qu’il se peint à l’avance, le futur âge d’or de sa philosophie divine, cette espèce d’Éden plus ou moins retrouvé dès ici-bas, quelles que soient les épreuves de la crise dernière, ne lui paraissent pas trop chèrement payés. — Lui, de tous les hommes le moins semblable assurément à Condorcet, il lui arrive de rêver et de délirer comme lui. […] Je crois que les négligences et les imprudences où ma paresse m’a entraîné en ce genre ont eu lieu par une permission divine, qui a voulu par là écarter les yeux vulgaires des vérités trop sublimes que je présentais peut-être par ma simple volonté humaine, et que ces yeux vulgaires ne devaient pas contempler. — Le monde et moi, disait-il encore pour se consoler, nous ne sommes pas du même âge. […] Saint-Martin se séparait profondément de Bernardin de Saint-Pierre en ce que, religieux comme lui, il croyait de plus à la chute, à une nature gâtée et corrompue et portant l’empreinte du mal ; il croyait en un mot que, dans l’univers tel qu’il est, il y a et il y aura toujours quantités de désharmonies, jusqu’à ce que le maître, le divin réparateur vienne remonter la lyre et en rajuster les cordes sacrées […] Ceci serait un sujet inépuisable de magnificences divines.

109. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre IV, Eschyle. »

Le vin a une âme lorsqu’on croit qu’une force divine y fermente ; c’était cette âme que buvait Eschyle, et dont il enflammait son esprit. […] « C’est la divine Cottys », — s’écriait-il dans ses Edoniens — « et son cortège armé d’instruments d’orage ! […] C’étaient le Chaos et la Nuit, Gaïa, la terre au vaste sein, Ouranos, l’espace étoilé, Cronos, l’ogre divin qui dévorait ses enfants ; et, dans une profondeur plus lointaine encore, Moira, la Parque suprême, l’inéluctable Destin. […] L’idée divine s’épure et se perfectionne sans cesse dans ses drames. […] De rares sourires effleurent sa bouche contractée par le rictus tragique, mais ces sourires sont divins.

110. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XII] »

S’il personnifie les remords, la colère divine, etc., s’il peint le coupable au Tartare et le juste aux Champs-Élysées, ce sont sans doute de belles fictions, mais qui ne constituent pas un code moral attaché au polythéisme comme l’Évangile l’est à la religion chrétienne. […] , réjouissez-vous avec elle d’une grande joie, et sucez avec elle par une foi vive la mamelle de ses consolations divines, afin que vous abondiez en délices spirituelles, parce que le Seigneur a dit : Je ferai couler sur elle un fleuve de paix ; et ce torrent se débordera avec abondance : toutes les nations de la terre y auront part ; et avec la même tendresse qu’une mère caresse son enfant, ainsi je vous consolerai, dit le Seigneur220. » Quel cœur serait insensible à ses divines tendresses ? […] Le discours de l’Apôtre est simple, mais ses pensées sont toutes divines. […] Il ira, cet ignorant dans l’art de bien dire, avec cette locution rude, avec cette phrase qui sent l’étranger, il ira en cette Grèce polie, la mère des philosophes et des orateurs ; et, malgré la résistance du monde, il y établira plus d’églises que Platon n’y a gagné de disciples par cette éloquence qu’on a crue divine. […] » C’est par cette vertu divine que la simplicité de l’Apôtre a assujetti toutes choses.

111. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Pommier. L’Enfer, — Colifichets. Jeux de rimes. »

L’œuvre divine se consomme. […] — se démènent les trépassés), qui vont plus tard se prononcer, et s’élargir, et devenir ce grotesque grandiose que la Divine Comédie n’a pas repoussé. […] Et jamais cette ironie divine ne se lasse, et d’un bout de ce poëme à l’autre on l’entend rugir dans ces strophes aux rimes redoublées et dociles, dans ces vers maniés, courbés, assouplis par cet impérieux Maître du rythme. […] dans sa Divine Épopée. […] Amédée Pommier est un des hommes de la première heure, et il a persévéré, vertu diabolique ou divine !

112. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Satire contre le luxe, à la manière de Perse » pp. 122-126

Applaudissez aux poëmes divins de Virgile ; promenez-vous dans une ville immense, où les chefs-d’œuvre de la peinture, de la sculpture et de l’architecture suspendront à chaque pas vos regards d’admiration ; assistez aux jeux du cirque ; suivez la marche des triomphes ; voyez des rois enchaînés ; jouissez du doux spectacle de l’univers qui gémit sous la tyrannie, et partagez tous les crimes, tous les désordres de son opulent oppresseur. […] Que m’importe vos poëmes divins ? […] Partout où vous verrez une poignée de terre recueillie dans la plaine, portée dans un panier d’osier, aller couvrir la pointe nue d’un rocher, et l’espérance d’un épi l’arrêter là par une claie, soyez sûr que vous verrez peu de grands édifices, peu de statues, que vous trouverez peu d’orphées, que vous entendrez peu de poëmes divins… et que m’importe ces monumens fastueux ?

113. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre septième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie. »

Déjà, dans René, Chateaubriand avait dit des poètes : — « Ces chantres sont de race divine : ils possèdent le seul talent incontestable dont le ciel ait fait présent à la terre. […] » Or l’esprit du Seigneur, qui dans notre nuit plonge, Vit son doute et sourit : et l’emportant en songe Au point de l’infini d’où le regard divin Voit les commencements, les milieux et la fin ; « Regarde », lui dit-il… Et l’homme finit par comprendre qu’il est, comme l’ont cru les religions orientales, l’auteur de sa propre destinée, selon la hauteur plus ou moins grande à laquelle il est parvenu dans l’échelle des êtres. […] Ainsi le divin Fils parlait au divin Père. […] Avant vous j’étais belle et toujours parfumée, J’abandonnais au vent mes cheveux tout entiers, Je suivais dans les cieux ma route accoutumée, Sur l’axe harmonieux des divins balanciers. […] S’il y avait au-dessus de la Nature des êtres supérieurs et vraiment divins, — un Dieu, des dieux ou des anges, — ils n’auraient qu’un moyen de prouver leur divinité : descendre pour partager nos souffrances, nous aimer pour ces souffrances et même pour nos fautes.

114. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIII. »

Car rien de plus divin que les rois, enfants de Jupiter. […] N’en devait-il pas sortir quelque chose de ces belles maximes de la sagesse divine ou de ces chants sublimes du prophète, de ces images lamentables ou de ces prophéties triomphantes, dont Israël dispersé nourrissait en tous lieux la foi de ses enfants ? […] Les yeux attachés au Verbe divin, repose-toi sur lui. […] Mais, satisfait de cette restriction, il ne pénètre pas plus avant dans le problème du mal physique et moral à faire coexister avec la bonté divine, et dans celui de la liberté de l’homme à concilier avec la prescience suprême. […] Les grammairiens, les eunuques, les gens de cour, tout le faste industrieux d’Alexandrie, ont pu rejeter une âme poétique vers les simples pensées de deux pauvres pécheurs, ou les gracieux souvenirs des bergers de Sicile, comme Versailles et les courtisanes du dix-huitième siècle ont pu faire rêver le désert de Paul et Virginie, et comme les cachots de la Terreur ont inspiré les vers divins à la Jeune Captive.

115. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre II. Axiomes » pp. 24-74

Ainsi le droit civil aurait été communiqué aux autres peuples par une prévoyance humaine ; ce ne serait pas un droit mis par la divine Providence dans la nature, dans les mœurs de l’humanité, et ordonné par elle chez toutes les nations ! […] Les philosophes grecs précipitèrent la marche naturelle que devait suivre leur nation ; ils parurent dans la Grèce lorsqu’elle était encore toute barbare, et la firent passer immédiatement à la civilisation la plus raffinée ; en même temps les Grecs conservèrent entières leurs histoires fabuleuses, tant divines qu’héroïques. La civilisation marcha d’un pas plus réglé chez les Romains ; ils perdirent entièrement de vue leur histoire divine ; aussi l’âge des dieux, pour parler comme les Égyptiens (Voy. […] Des trois traditions précédentes, il résulte que les nations païennes avec leurs Jupiter et leurs Hercule, furent dans leurs commencements toutes poétiques, et que d’abord naquit chez elles la poésie divine, ensuite l’héroïque. […] Grotius, Selden et Pufendorf devaient fonder leurs systèmes sur cette base, et se ranger à l’opinion des jurisconsultes romains, selon lesquels le droit naturel a été ordonné par la divine Providence.

116. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre V. Les âmes »

Que signifient certaines concordances des mythes représentés par les hommes divins ? […] y a-t-il des atomes plus divins que d’autres ? […] Tel atome, moteur divin appelé âme, n’a-t-il pas pour emploi de faire aller et venir un homme solaire parmi les hommes terrestres ? […] Si cette concordance dépendait d’eux, tous deux y résisteraient peut-être, l’un, l’homme divin, indigné dans son martyre, l’autre, l’homme humain, humilié dans son ironie ; mais cela est.

117. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre IV. Littérature dramatique » pp. 202-220

Laide d’abord, belle ensuite, elle est l’attirante… Et c’est ainsi que Magnus, l’homme — la Beauté, la Perfection, la Vie — tombe à ses pieds, tranché par son coup de faulx, après avoir donné tous les baisers d’amour à sa vierge aimée, à Divine, pâle fleur de lis qui meurt, elle aussi, peut-être parce qu’elle ressemblait trop à l’Aurore ! […] Il me faut chaque jour d’énormes hécatombes, Je mange tous les soirs un morceau d’univers… « Voici la Dame à la Faulx qui parle : « Enfin, écoutez l’amante, Divine, soupirer à son amant :                                   Maître,         N’es-tu pas ma raison d’être ? […] Cortège de la folie, Mort de Divine. […] Mais placez à son centre l’âme consciente avec tous ses pouvoirs, faites rayonner à son foyer incandescent la divine Psyché, déployez ses ailes — et le théâtre sera le miroir de la vie meilleure, l’éducateur du peuple, l’initiateur qui conduit l’homme à travers la forêt de la vie et les mirages du rêve au sommet des plus hautes vérités.

118. (1856) Cours familier de littérature. II « XIe entretien. Job lu dans le désert » pp. 329-408

… Les politiques ont parlé d’un contrat social, où le peuple n’était pas préalablement entendu ; mais le contrat humain et divin, mais ce contrat entre la vie et le néant, mais ce contrat entre la victime et le supplice, qu’en dites-vous ? […] Est-ce une bonté divine ? […] On dirait qu’il y a des climats aussi différents en intelligence des choses divines qu’il y en a en températures atmosphériques. […] Le poète de Dieu n’en pouvait pas choisir un plus conforme à ce dialogue divin. […] « À cette obscurité notre foi se mesure, « Plus l’objet est divin, plus l’image est obscure.

119. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Deuxième partie. — L’école critique » pp. 187-250

Le dénouement, par la destruction des personnalités engagées dans l’action, fait cesser la discorde allumée entre les puissances morales, et l’unité divine de leur idée sort triomphante d’entre les ruines. […] Au spectacle ou à la lecture d’un chef-d’œuvre, prétendent-ils, l’image de quelque chose de plus parfait surgit dans notre esprit ; nous comparons la réalité à ce modèle divin, et nous avons trouvé le principe de la critique littéraire. […] Ce n’est point par l’effet d’un éclaircissement progressif de l’idéal tragique, qu’Uranie a passé du mépris de Shakespeare au culte de son génie divin. […] Que chacun de nous devienne beau et divin, s’il veut contempler la beauté et la divinité. […] Corneille appelle la Poétique un divin traité (Préface du Cid) et il en dit tant qu’on est tenté de prendre cette expression à la lettre.

120. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXVIe entretien. La littérature des sens. La peinture. Léopold Robert (1re partie) » pp. 397-476

Dieu, dans son économie divine et pour des desseins que nous ne savons pas, n’a donné qu’un petit nombre de ces sens à l’âme pour la mettre en rapport de jouissance ou de souffrance avec le monde matériel. […] C’est un édifice obscur ou à demi-jour dans lequel l’architecte n’a percé que cinq fenêtres, mais où la lumière entrera à torrents quand les murailles tomberont sous la main divine de la mort. […] Ne vous sentez-vous pas divinisés devant une poésie, une musique, une peinture, une statue, un temple dont la beauté vous élève de la fange à l’idéal Ne vous écriez-vous pas : C’est divin ! […] Parce que la partie divine de la nature, l’idéal ou le beau, éclate davantage dans l’œuvre de l’artiste, et que vous sentez plus de Dieu dans la pensée et dans la main de l’homme qui a écrit, chanté, peint ou sculpté ce chef-d’œuvre. […] L’âme n’est-elle pas le modèle divin, le type éternel ?

121. (1890) L’avenir de la science « XV » pp. 296-320

Il est également faux de dire que l’homme a créé avec réflexion et délibération le langage, la religion, la morale, et de dire que ces attributs divins de sa nature lui ont été révélés. […] Le spontané est à la fois divin et humain. […] Par là ils se sont coupé la possibilité de la mythologie et de l’épopée divine : la variété d’intrigues ne pouvant avoir lieu sous un Dieu unique et souverain absolu. […] Ceci ne nuit pas, bien entendu, à l’originalité de ce produit divin. […] ne parlait-il pas des choses divines ?

122. (1857) Cours familier de littérature. IV « XIXe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset (suite) » pp. 1-80

Neuf fois sur dix, l’homme qui va quitter ce monde expire en se frappant la poitrine et en implorant le divin pardon. […] L’Océan fatigué de suivre dans les cieux Sa déesse voilée au pas silencieux, Sous les rayons divins retombe et se balance. […] Torrent divin de la source infinie ! […] — Et nous donc, n’avons-nous pas cherché de même l’oubli de la terre dans les platonismes calmants des philosophies spiritualistes, et dans l’opium divin des espérances infinies, qui donnent, dès ici-bas, les songes éternels ? […] Je ne ferais grâce qu’aux divins fragments enchâssés çà et là dans tes poèmes comme des tronçons de statues de marbre de Paros dans la muraille d’une taverne de Chio.

123. (1858) Cours familier de littérature. V « XXIXe entretien. La musique de Mozart » pp. 281-360

Comment ces mélodies ou ces combinaisons de notes, heureusement ou malheureusement posées les unes à côté des autres, selon le génie ou selon la stérilité du musicien, forment-elles des concerts divins ou des discordances stupides ? […] Enfin parut la divine Cécile, qui inventa l’harmonieux instrument, agrandit le domaine restreint de la musique, et prolongea les sons graves par un art inconnu jusqu’alors. […] De tous ces hommes privilégiés de l’oreille, le plus précoce, le plus complet et le plus divin, selon nous, jusqu’à Rossini, son seul rival, c’est Mozart. […] On pense qu’il suffit de gagner encore quelques années, qu’alors il n’y aura plus rien que de fort naturel, et que ce ne sera plus un miracle divin. […] — C’est ce que j’ai bien vu, et je me suis abandonné à la volonté divine.

124. (1874) Premiers lundis. Tome II « Doctrine de Saint-Simon »

Puis s’arrachant au vague, il en vint à s’occuper scientifiquement et historiquement des religions révélées, et c’est au fort de ces études opiniâtres dans lesquelles s’absorbait sa précoce pensée, que, le nouveau christianisme de Saint-Simon lui étant apparu sous son véritable jour, il se fit une révolution en lui ; que ses études, jusque-là confuses, s’enchaînèrent ; que le chaos du passé se déroula harmonieusement à ses yeux, et qu’il saisit la raison divine des choses, s’écriant à la vue de l’Église de toutes parts croulante et de la synagogue encore debout : « Oui, nous marchons vers une grande, vers une immense unité : la société humaine, du point de vue de l’homme ; le règne de Dieu sur la terre, du point de vue divin ; ce règne que les fidèles appellent tous les jours par leurs prières depuis dix-huit ceints ans. […] Nous recommandons la dernière lettre à ceux qui demandent à la doctrine une vive expression de son Dieu, et qui seraient tentés de contester aux disciples de Saint-Simon la puissance de l’amour divin, l’allégresse, de l’adoration.

125. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre III. Suite des Époux. — Adam et Ève. »

À travers leurs regards divins, brillent les attributs de leur glorieux Créateur : la vérité, la sagesse, la sainteté rigide et pure, vertu dont émane l’autorité réelle de l’homme. […] nous avons tué le divin Hector  ; c’est de même que les Saliens, célébrant la fête d’Hercule, s’écrient brusquement dans Virgile : Tu nubigenas, invicte, bimembres, etc. « C’est toi qui domptas les deux centaures, fils d’une nuée, etc. » Cet hymen met le dernier trait au tableau de Milton, et achève la peinture des amours de nos premiers pères15. […] Toute ardeur terrestre s’éteint et est remplacée par une tendresse divine : l’âme échauffée se replie autour de l’objet aimé, et spiritualise jusqu’aux termes grossiers dont elle est obligée de se servir pour exprimer sa flamme.

126. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre II. Qu’il y a trois styles principaux dans l’Écriture. »

Entre ces styles divins, trois surtout se font remarquer : 1º Le style historique, tel que celui de la Genèse, du Deutéronome, de Job, etc.  […] C’est là que la sublimité des prophètes se change en une tendresse non moins sublime ; c’est là que parle l’amour divin, c’est là que le Verbe s’est réellement fait chair. […] Le cœur de Jean ne put se méprendre aux traits de son divin ami, et la foi lui vint de la charité.

127. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre second. Philosophie. — Chapitre III. Des Philosophes chrétiens. — Métaphysiciens. »

Nos derniers idéologues sont tombés dans une grande erreur, en séparant l’histoire de l’esprit humain de l’histoire des choses divines, en soutenant que la dernière ne mène à rien de positif, et qu’il n’y a que la première qui soit d’un usage immédiat. […] C’est ce que Platon appelait par excellence la science des Dieux, et Pythagore, la géométrie divine.

128. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque (2e partie) » pp. 81-155

Sainte Thérèse l’inventait en sens inverse vers le même temps en Espagne, appliquant à l’amour divin les extases, les expressions, les images de l’amour terrestre. […] On m’a beaucoup insulté en Italie et en France, l’année dernière, pour avoir osé dire que la Divine Comédie du Dante ressemblait plus à une apocalypse qu’à un poème épique. […] Je ne résiste pas à citer textuellement les paroles de la lettre de Pétrarque à Boccace sur la Divine Comédie du Dante. […] On recueillit, on répandit à profusion toutes les œuvres et toutes les correspondances de cet homme divin. […] Les sonnets dans lesquels il épanche ses larmes et ses parfums sont comme des psaumes de l’amour humain et divin.

129. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juillet 1885. »

Wotan, la béatitude de l’Être Divin parvenant à l’ataraxie. […] Le Mage Divin est sourd, niais, méprisé ; alors il Voit, sous les apparences, l’Être, et cette Vision, qui désolerait un pessimiste, lui est tellement radieuse et prestigieuse qu’il évoque, en lui-même, désormais, une extraordinaire Joie. […] Alors il comprend les raisons du cauchemar : il regarde en soi-même, se connaît la seule cause ; il est libre, et le Prisonnier de la Caverne devient le Mage Divin. […] Et le Mage sera Parsifal ; et le Gral divin, par lui regagné, sera la bienheureuse joie de l’Orgueil, l’Apparence enfin recréée. […] Il est Beethoven, et le Vinci, et Racine, et Tolstoï, et Wagner, il les est, le Mage Divin.

130. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIIe entretien. Poésie sacrée. David, berger et roi » pp. 225-279

Bien qu’il soit impossible de diviser les facultés indivisibles de notre nature pensante, on appelle âme, dans les langues des idées, cette partie de notre être immatériel qui est la plus distincte de nos sens et qui se confond ainsi le plus avec l’essence divine. […] L’âme, ainsi entendue, est la partie la plus divine, la plus complète, la plus sentante, et par là même la plus émue et la plus expressive de nos facultés pensantes. […] La puissance poétique s’accroît quand elle est soutenue par la musique. » Moïse avait donné à ce don de prophétie ou d’inspiration une immense autorité, en faisant de son peuple, gouverné par Dieu même, une république théocratique dont la tribu de Lévi avait exclusivement le sacerdoce, organe alors de la souveraineté divine. […] On voyait qu’elle avait été construite, comme celle de Job, pour un dialogue quelquefois familier, quelquefois âpre et terrible, entre la foudre humaine et la foudre divine. […] Cette préservation divine étonne et intimide de plus en plus le roi.

131. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre VI. De la politique poétique » pp. 186-220

De cette manière, on peut dire avec Pomponius, rebus ipsis dictantibus regna condita  ; pensée profonde, qui s’accorde bien avec le principe établi par la jurisprudence romaine : le droit naturel des gens a été fondé par la Providence divine ( jus naturale gentium divinâ Providentiâ constitutum ). […] Les pères de famille avaient reçu les terres de la divine Providence, comme une sorte de fiefs divins ; souverains dans l’état de famille, ils formèrent par leur réunion les ordres régnants dans l’état de cités. […] C’est la divine Providence qui règle les sociétés, et qui a fondé le droit naturel des gens En voyant les sociétés naître ainsi dans l’âge divin, avec le gouvernement théocratique, pour se développer sous le gouvernement héroïque, qui conserve l’esprit du premier, on éprouve une admiration profonde pour la sagesse avec laquelle la Providence conduisit l’homme à un but tout autre que celui qu’il se proposait, lui imprima la crainte de la Divinité, et fonda la société sur la religion. […] Maintenant recourons à ces preuves divines dont on a parlé dans le chapitre de la Méthode ; examinons combien sont naturels et simples les moyens par lesquels la Providence a dirigé la marche de l’humanité, rapprochons-en le nombre infini des phénomènes qui se rapportent aux quatre causes dans lesquelles nous verrons partout les éléments du monde social (les religions, les mariages, les asiles et la première loi agraire), et cherchons ensuite entre tous les cas humainement possibles, si des choses si nombreuses et si variées ont pu avoir des origines plus simples et plus naturelles.

132. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Deux tragédies chrétiennes : Blandine, drame en cinq actes, en vers, de M. Jules Barbier ; l’Incendie de Rome, drame en cinq actes et huit tableaux, de M. Armand Éphraïm et Jean La Rode. » pp. 317-337

Ils s’imaginaient qu’une eau divine sortait du flanc de Jésus pour les rafraîchir. […] Les croyants en proposent encore une autre, qui est la grâce divine. […] Mais, en outre, les chrétiens de la bonne société, Attale, Æmilia, Épagathus, Alexandre même, tout en la regardant comme leur sœur en Dieu, n’eussent pas, d’abord, fait grande attention à elle, lui eussent témoigné tout juste les sentiments fraternels qui sont « de commandement », et, malgré eux, se ressouvenant de leur condition sociale, eussent considéré l’humble servante comme une créature égale sans doute à eux-mêmes par sa participation au rachat divin, mais inférieure par l’intelligence, l’éducation, la distinction morale. […] Elle demeurerait modeste, elle ne se mettrait point en avant ; mais on irait à elle parce qu’on sentirait en elle une divine flamme de charité et de foi.

133. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXVI. La sœur Emmerich »

Ces visions, qui ne sont jamais que l’entre-deux des lignes de l’Évangile, écrit par une main inspirée ; que les blancs remplis du Livre divin, ont, comme nous l’avons dit, trois parties distribuées maintenant en trois ouvrages : — la Vie de la Vierge, — la Vie de Notre-Seigneur Jésus-Christ, — et le Récit de sa Passion. […] Suppléer au mutisme volontaire ou forcé de l’histoire, c’est déjà téméraire pour tout être qui a le respect de la vérité humaine : mais ajouter à l’Évangile, le continuer là où il s’arrête, cela peut être si facilement sacrilège pour qui doit avoir le respect chrétien de la vérité divine ! […] Oui, même à la lueur de la céleste lampe de l’Évangile, dites s’il n’y a pas là une simplicité approchant de celle du livre dont jusque-là rien ne s’était tant approché, et un genre de pathétique, qui du moins ne détonne pas, avec le pathétique sans pareil du livre divin. […] Mais elle a cela de commun avec son divin Maître, qu’elle a tant aimé et qui serait plus incompréhensible s’il était homme qu’il ne l’est certainement étant Dieu, — c’est que si, elle, l’extatique de Dulhmen, fut visitée de Dieu et éclairée d’en haut, elle est bien moins étonnante, bien moins phénoménale que si elle n’est qu’une vile maladie humaine, — une lèpre, — un pian, — un tétanos !

134. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre cinquième. Retour des mêmes révolutions lorsque les sociétés détruites se relèvent de leurs ruines — Chapitre IV. Conclusion. — D’une république éternelle fondée dans la nature par la providence divine, et qui est la meilleure possible dans chacune de ses formes diverses » pp. 376-387

. — D’une république éternelle fondée dans la nature par la providence divine, et qui est la meilleure possible dans chacune de ses formes diverses Concluons en rappelant l’idée de Platon, qui ajoute aux trois formes de républiques une quatrième, dans laquelle régneraient les meilleurs, ce qui serait la véritable aristocratie naturelle. […] Mais la sagesse divine n’a pas besoin de la force des lois ; elle aime mieux nous conduire par les coutumes que nous observons librement, puisque les suivre, c’est suivre notre nature. […] Au contraire nous établissons avec les philosophes politiques, dont le prince est le divin Platon, que c’est la providence qui règle les choses humaines.

135. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mikhaël, Éphraïm (1866-1890) »

Edmond Pilon Le Parnasse fut une école de forme, et, dans cette forme, Mikhaël eut la gloire de modeler une pensée nouvelle ; il eut la noble intuition d’en ôter toutes les images extérieures, de s’affranchir de toutes les mythologies et d’y couler, comme un bronze divin, l’émotion de son rêve, la poignante sensation de ses désirs et de ses espoirs. […] Henri de Régnier Sur un vers d’Éphraïm Mikhaël Vers le marbre funèbre où ta cendre repose, Ton ombre transparente et divine revient Voir le sombre laurier survivre aux rouges roses Dont la jeunesse ardente embauma ses deux mains.

136. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Lamartine »

« Je te dirai le fin mot, à toi seul : c’est par religion que je veux absolument me marier… Il faut enfin ordonner sévèrement son inutile existence, selon les lois établies, divines ou humaines ; et, d’après ma doctrine, les humaines sont divines. […] Ces « psaumes modernes », comme Lamartine avait voulu les nommer, sont en effet un vaste cantique au Divin perçu et considéré successivement dans toutes ses manifestations et tous ses modes ; mais ils suivent, si je ne m’abuse, une espèce d’ordre logique, naturel  et ascendant. […] Dans ces moments-là, on est à ce point envahi de sensations puissantes et suaves qu’on serait fort incapable de faire nettement le départ des effets et de la cause et d’abstraire Dieu de tout ce « divin » où l’on est plongé, et qu’on ne discerne plus bien si Dieu est dans la nature, ou si la nature est Dieu. […] Mais c’est qu’au fond il n’y a qu’un seul sujet de « divine comédie ». […] Si jamais poète fut pareil aux divins Oiseaux d’Aristophane, qui « ne roulaient que des pensées éternelles », c’est bien lui.

137. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome IV pp. 5-

La foi de l’auteur, la noblesse de son genre, et la pureté de son goût, lui ont peu permis d’associer les agents divins du paganisme à ceux de la chrétienté. […] De plus, elle justifie implicitement la Divine Comédie du Dante, à qui l’on impute la même faute. […] Là c’est une main divine qui trace au fond d’un vestibule l’arrêt du coupable Balthazar ; là c’est Nabuchodonosor, abruti par l’ivresse du pouvoir, qui se transforme en bête immonde : ici ce sont les Machabées qui se sacrifient à la défense des lois divines et de la liberté de leurs frères. […] La colère d’Achille n’est qu’héroïque ; la passion du Christ est divine. […] « Jamais sujet plus grand et plus majestueux « Des poètes divins n’échauffa le délire.

138. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre VII. Des Saints. »

« Ces héros pleins de bonté et de lumière pensent toujours à leur Créateur, et sont tout éclatants de la lumière qui rejaillit de la félicité dont ils jouissent en lui. » — Et plus loin, « héros vient d’un mot grec qui signifie amour, pour marquer que, pleins d’amour pour Dieu, les héros ne cherchent qu’à nous aider à passer de cette vie terrestre à une vie divine et à devenir citoyens du ciel69. » Les Pères de l’Église appellent à leur tour les saints des héros : c’est ainsi qu’ils disent que le baptême est le sacerdoce des laïques, et qu’il fait de tous les chrétiens des rois et des prêtres de Dieu 70. […] Pour nous, qui à la vérité ne sommes pas poète, il nous semble que ces enfants de la vision feraient d’assez beaux groupes sur les nuées : nous les peindrions avec une tête flamboyante ; une barbe argentée descendrait sur leur poitrine immortelle, et l’esprit divin éclaterait dans leurs regards.

139. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Le docteur Revelière » pp. 381-394

Historien avant tout, le droit divin n’est pour lui que « la seule loi rationnelle des successions », et vous voyez par cela seul que, si royaliste qu’il soit, il ne l’est pas comme les Royalistes qui s’appellent les Légitimistes de nos jours. […] C’est moins une histoire — comme le dit, du reste, son sous-titre, — qu’un Cours tout entier philosophique et critique de l’histoire moderne ; c’est une démonstration en sens contraire de tous les problèmes agités, à cette heure, par l’esprit révolutionnaire, et dont la solution dernière serait, sous le nom imposteur de progrès, de faire rétrograder la civilisation du monde… Après avoir, dans ses premières pages, comme donné le dictionnaire de la langue qu’il va parler en fixant l’origine et en déterminant la grandeur de la Monarchie française, en traitant de « la providence des dynasties inamovibles », de la propriété, du droit divin, dont il dit : « La primogéniture, le droit successif, la légitimité, le droit divin, ne sont qu’une même expression, une même vérité, une loi de raison », le métaphysicien politique aborde vaillamment l’Histoire.

140. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Silvio Pellico »

Talent insincère et même nul, c’est du moins un esprit auquel le Christianisme, qui fait marcher droit les boiteux et voir les aveugles, comme son divin Maître, est venu en aide, comme il y vient toujours, par la douleur et l’épreuve de la vie, tandis que Foscolo, inaccessible au Christianisme, ne se redressa jamais, bronze mal venu, tordu à faux, et qui grimace une énergie convulsive au lieu de pleinement l’exprimer. […] C’est la grandeur de la petitesse, de la médiocrité sentie, acceptée, épousée, la grandeur à part de tous ces renoncements qui seraient si tristes si la Résignation n’y passait pas son petit filet d’un or si pâle et si divin ! […] Il n’a pas seulement, suivant le précepte divin, béni et glorifié la main qui châtie ; il a, au nom de la vérité toute simple et de l’étroite justice, amnistié l’Autriche de ses châtiments.

141. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXVII. Silvio Pellico »

Talent insincère, et même nul, c’est du moins un esprit auquel le christianisme, qui fait marcher droit les boiteux et voir les aveugles comme son divin Maître, est venu en aide, comme il y vient toujours, par la douleur et l’épreuve de la vie, tandis que Foscolo, inaccessible au christianisme, ne se redressa jamais, bronze mal venu, tordu à faux, et qui grimace une énergie convulsive, au lieu de pleinement l’exprimer. […] C’est la grandeur de la petitesse, de la médiocrité sentie, acceptée, épousée, la grandeur à part de tous ces renoncements qui seraient si tristes, si la Résignation n’y passait pas son petit filet d’un or si pâle et si divin ! […] Il n’a pas seulement, suivant le précepte divin, béni et glorifié la main qui châtie ; il a, au nom de la vérité toute simple et de l’étroite justice, amnistié l’Autriche de ses châtiments.

142. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Vigny. Œuvres complètes. — Les Poèmes. »

Réduction des molécules de l’homme, qui le fait passagèrement divin ! […] C’est l’interprétation de la générosité divine par la plus touchante des générosités humaines. […] Toutes ces choses, il faut les voir dans ce poème incroyable, que Raphaël essaierait peut-être de peindre, s’il revenait au monde, et où les traits pareils a ceux-ci tombent à travers des magnificences d’expressions radieuses, comme de blanches larmes divines : Puisque vous êtes beau, vous êtes bon sans doute !

143. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Pécontal. Volberg, poème. — Légendes et Ballades. »

Et ce n’est pas toujours aux mêmes origines Qu’elle prend ses héros et ses races divines. […] Dans ce poème dont il est facile de constater la faiblesse d’invention et de drame, et où l’homme seulement se promet, il y a un chant intitulé « L’Église », entièrement lyrique de mouvement et de rythme, et dont la simplicité est divine. […] Lorsque ces fils de la Vierge ne se rompent pas, on les croirait vraiment tombés du fuseau divin.

144. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre VI. Le beau serviteur du vrai »

De là, dans toutes les religions et chez tous les peuples, la foi aux hommes divins. […] Tendre, il désaltère les malheureux et crée l’épopée sociale ; indigné, il flagelle les mauvais, et crée la satire divine. […] Orphée a enseigné l’horreur du meurtre, Musée les oracles et la médecine, Hésiode l’agriculture, et ce divin Homère, l’héroïsme. […] Il dit : Le roi prendra vos fils et les mettra à ses chariots ; il prendra vos filles et les fera servantes ; il prendra vos champs, vos vignes et vos bons oliviers, et les donnera à ses domestiques ; il prendra la dîme de vos moissons et de vos vendanges, et la donnera à ses eunuques ; il prendra vos serviteurs et vos ânes et les fera travailler pour lui ; et vous crierez à cause de ce roi qui sera sur vous, mais comme vous l’aurez voulu, l’Éternel ne vous exaucera point ; et vous serez des esclaves. » Samuel, on le voit, nie le droit divin ; le Deutéronome sape l’autel, l’autel faux, disons-le ; mais l’autel d’à côté n’est-il pas toujours l’autel faux ? […] Tout le droit divin ne s’est pas dissipé.

145. (1884) Articles. Revue des deux mondes

Ces muets mystérieux, si voisins ou si éloignés de lui, les uns inoffensifs, les autres terribles, son ignorante imagination les arma de pouvoirs divins. […] Admirable dans le détail, l’ouvrage l’est peut-être plus encore par les généralités philosophiques qui marquent, en un langage élevé, le caractère divin de cette fonction universelle. […] « A considérer l’ensemble des choses, les unes sont éternelles et divines, tandis que les autres peuvent être ou ne pas être. Le beau et le divin sont toujours, par leur nature propre, causes du mieux dans les choses qui ne sont simplement que possibles. […] C’est au fond l’âme qui crée le corps, comme c’est l’attrait de la perfection divine qui crée le progrès dans la nature et peut-être la nature elle-même.

146. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre II. Prière sur l’Acropole. — Saint-Renan. — Mon oncle Pierre. — Le Bonhomme Système et la Petite Noémi (1876) »

Les sensations entièrement nouvelles que j’y trouvai, les visions que j’y eus d’un monde divin, étranger à nos froides et mélancoliques contrées, m’absorbèrent tout entier. […] Quand je vis l’Acropole, j’eus la révélation du divin, comme le l’avais eue la première fois que je sentis vivre l’Évangile, en apercevant la vallée du Jourdain des hauteurs de Casyoun. […] Mais ces temples me plaisaient ; je n’avais pas étudié ton art divin ; j’y trouvais Dieu. […] si ce n’est pour faire aimer le divin qui fut en eux, et pour montrer que ce divin vit encore et vivra éternellement au cœur de l’humanité ? […] Les Rhodiens furent riches ; mais les Athéniens eurent de l’esprit, c’est-à-dire la vraie joie, l’éternelle gaieté, la divine enfance du cœur.

147. (1856) Cours familier de littérature. I « Ve entretien. [Le poème et drame de Sacountala] » pp. 321-398

La beauté presque divine de la jeune vierge éblouit et enlève le cœur du roi. — « Qui donc es-tu, fille céleste ? […] Ce récit redouble la passion de Douchmanta pour la jeune fille issue d’une race divine. […] ” dit-elle, les joues colorées par la divine pudeur, “s’il est vrai qu’en consentant à être ton épouse sans le consentement de mon père adoptif, je ne pèche pas contre la sainte voix du devoir ; s’il est vrai que je puisse, ainsi que tu me le dis, ô mon roi, (et voudrais-tu me tromper ?) […] Trop heureux insecte, tu peux donc dans ton vol effleurer l’angle de cet œil à demi fermé, où la crainte excite un tremblement enchanteur ; faire entendre à cette oreille charmante un murmure semblable à ces petits mots furtifs d’une amie à l’oreille d’une amie ; puiser un torrent de délices sur ces lèvres divines, dont une main délicate cherche en vain à t’éloigner ? […] Quand je réfléchis sur la puissance de Brahma et sur les perfections de cette femme incomparable, il me semble que ce n’est qu’après avoir réuni dans sa pensée tous les éléments propres à produire les plus belles formes, et les avoir combinés de mille manières dans ce dessein, qu’il s’est enfin arrêté à l’expression de cette beauté divine, le chef-d’œuvre de la création.

148. (1856) Cours familier de littérature. I « VIe entretien. Suite du poème et du drame de Sacountala » pp. 401-474

Je ne vois pas s’élever le plus léger nuage de poussière ; je n’ai ressenti aucun choc, et, quoique touchant à la terre, le char cependant n’en a pas éprouvé le moindre contrecoup… Et dans quelle partie de la montagne habite donc le divin anachorète ? […] Petit mutin, c’est donc ainsi que tu feras sans cesse le tourment de ces jeunes animaux, placés comme nous sous la protection de notre divin Gourou. […] J’augure de ma victoire, et par ce front pudique dépouillé d’ornements, et par cette pâleur qui a remplacé l’incarnat de ta bouche divine. […] Ô mon divin protecteur ! […] La quatrième règle concerne le dénouement ; il doit être toujours heureux, c’est-à-dire conforme à la justice et à la bonté divine, qui prévalent, à la fin de toutes choses, sur le mal et sur le crime.

149. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, par M. J. Zeller. Et, à ce propos, du discours sur l’histoire universelle. (suite.) »

Cependant, du de hors, des conquérants surviennent, instruments la plupart de la vengeance divine : Nabuchodonosor en est le ministre direct ; Jérusalem est détruite, et le peuple emmené en captivité à Babylone. […] Les miracles, il commence par là ; naturellement et nécessairement il est tout entier croyant, et de toutes ses forces, au surnaturel et au divin dans les prodiges opérés ; mais il en distingue le caractère particulier et nouveau, qui est tout humain : « Ce ne sont point, dit-il, des signes dans le ciel, tels que les Juifs les demandaient : il les fait presque tous sur les hommes mêmes et pour guérir leurs infirmités. […] Un homme un peu moins profondément croyant que Bossuet n’eût pas été si long ; il n’entre si à fond dans les mystères du Christianisme divin que parce qu’il ne se contente pas, comme tant d’autres, du christianisme social. […] L’auteur conclut en revenant à son dessein principal et en rattachant cette troisième partie à la seconde par un rappel énergique des conseils divins et des ordres secrets de la Providence.

150. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre XI. Quelques philosophes »

Mais, ayant opposé « une divine négation, même au devoir », il devient enfant pour « la sainte affirmation » qui créera des « valeurs nouvelles ». […] Mais il va bientôt, de lion destructeur devenu un enfant qui joue « le jeu divin de la création », forger au monde et à l’individu des chaînes aussi lourdes que les anciennes. […] [Maurice Maeterlinck] Constater que les dieux personnels sont morts ; détruire les temples extérieurs qui jettent sur nous une ombre malsaine ; ne laisser aux puissances divines, justice, chance, destinée, d’autre refuge que le cœur de l’homme, ou mieux la partie inconsciente et comme souterraine de notre être, « le temple enseveli » : tel est bien, malgré quelques incertitudes et quelques retours en arrière, l’effort de Maurice Maeterlinck. […] Il est puni justement de philosopher en industriel qui touche à la science divine avec des mains lourdes et avides, propres seulement aux grossiers labeurs terrestres : les entreprises qu’il étudie aboutissent toutes à l’inévitable faillite.

151. (1828) Introduction à l’histoire de la philosophie

L’intelligence divine elle-même. […] La création divine est de la même nature. […] L’ordre admirable qui y règne est une image de l’ordre divin, et ses lois ont Dieu lui-même pour principe. […] de la divine providence ? […] En effet, la jurisprudence a beau s’appeler scientia rerum humanarum et divinarum, la science des choses humaines et divines, elle est surtout la science des choses humaines, dans lesquelles elle contemple les choses divines.

152. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Préface »

On a retrouvé le sens profond et naïf, divin et enfantin à la fois, des vieux mythes éclos de l’imagination primitive. […] Ces découvertes capitales qui ont ouvert sur la Mythologie des points de vue si nouveaux, j’ai lâché de les amener en partie de l’érudition à la vie de l’art, en les introduisant dans le théâtre d’Athènes, par les personnes divines ou héroïques qui y jouent un rôle.

153. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Doyen  » pp. 153-155

Au-dessus de la gaze qu’elle aurait tenue suspendue de ses doigts délicats, se serait montrée la tête divine de la déesse, sa gorge d’albâtre, ses beaux bras, et le reste de son corps mollement balancé dans les airs. […] Il fallait pour cela leur donner encore plus de transparence, plus de légèreté, moins de corps et de solidité ; mais en revanche leur chercher un caractère divin, et les mettre dans une activité incroyable ; comme on les voit dans le morceau de Bouchardon où Ulisse évoque l’ombre de Tiresias, et où cette foule de démons étranges accourent à son sacrifice.

154. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre IV. De la morale poétique, et de l’origine des vertus vulgaires qui résultèrent de l’institution de la religion et des mariages » pp. 168-173

C’est le premier de tous les symboles divins après celui de Jupiter…   Considérons le genre de vertu que la religion donna à ces premiers hommes : ils furent prudents, de cette sorte de prudence que pouvaient donner les auspices de Jupiter ; justes, envers Jupiter, en le redoutant (Jupiter, jus et pater), et envers les hommes, en ne se mêlant point des affaires d’autrui ; c’est l’état des géants, tels que Polyphème les représente à Ulysse, isolés dans les cavernes de la Sicile : cette justice n’était au fond que l’isolement de l’état sauvage. […] Nous venons de traiter de la morale du premier âge, ou morale divine ; nous traiterons plus tard de la morale héroïque.

155. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. » pp. 124-157

Ses poésies, à chaque page, attestent ce doux culte refleurissant, et dans des stances d’hier, adressées à une amie gracieuse qu’elle appelle la comtesse Marie 45, nous en ressaisissons un nouvel écho : L’Ange nu du berceau, qui l’appela Marie, Dit : « Tu vivras d’amère et divine douleur ; Puis, tu nous reviendras toute pure et guérie, Si la grâce à genoux désarme le malheur. […] J’ai des moments où je croule, mais je me sens toujours soutenue par cette main divine qui nous a faits frère et sœur pour nous aider et nous chérir, mon bon Félix. […] Au milieu de sa fatale maladie, elle était encore agitée du désir de placer mon cher Valmore à Paris. — Mon bon Félix, je t’en prie, dis une prière pour cette femme presque divine. […] Elle avait, en un mot, le catholicisme individuel ; elle croyait au divin crucifié, à sa mère, à l’efficacité de son intervention, mais d’un élan direct et sans se sentir le besoin d’aucun intermédiaire auprès d’eux. — Je donnerai quelques passages encore de ses lettres d’après 1848 ; celles-ci sont adressées à ses parents de Rouen. […] Elle a rempli tous ses devoirs envers Dieu, envers nous. — Épargnons-nous ce remords de frapper cet esprit pur et divin. » Et après la mort : « (11 septembre 1850)… La volonté du Ciel est terrible, quand elle s’accomplit sur des êtres si faibles et si tendres que nous. » Mais tout à coup, dans ce ciel si lourd, si chargé, si sombre, un éclair inespéré a lui : « (14 janvier 1851)… Ondine se marie !

156. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mendès, Catulle (1841-1909) »

. — La Divine Aventure, en collaboration avec Richard Lesclide (1881). — Le Roi vierge, roman contemporain (1881). — Le Crime du vieux Blas, nouvelle (1882). — Monstres parisiens, 1re série (1882). — L’Amour qui pleure et l’Amour qui rit, nouvelles (1883). — Les Folies amoureuses, nouvelles, réédition (1883). — Le Roman d’une nuit, réédition (1883). — Les Boudoirs de verre, contes (1884). — Jeunes filles, nouvelles (1884). — Jupe courte, contes (1884). — La Légende du Parnasse contemporain (1884). — Les Mères ennemies, drame en trois parties (1883). — Les Contes du rouet (1885). — Le Fin du fin ou Conseils à un jeune homme qui se destine à l’amour (1885) […] Cette idée, voici comment, pour être clair, je la formulerais sous la forme d’un axiome : « La Justice absolue est, par sa nature même, essentiellement idéale et divine ; la Justice humaine ne peut et ne doit agir que d’une manière relative, et sans tenir compte de ce qui jetterait le trouble dans ses indispensables règles, car la société doit songer avant tout à sa conservation… » Telle est à peu près la situation de Valentin ; il a de toute façon et sous toutes les formes offensé les hommes et le devoir humain ; c’est Dieu seul qu’il a quelquefois essayé de satisfaire ; aussi est-ce seulement à Dieu qu’il peut demander la pitié, qui, dans l’ordre divin est la même chose que la justice. […] Ou Peppa qui s’embobeline Dans une pâle manteline ; Que du jeune et cher Courteline Tu nous chantes le juste fos, Ou que tu piques jusqu’à l’os Brunetière et Monsieur Buloz ; Toujours ta grâce reste sûre ; Tu jongles sans une blessure À l’Art noble ; ton goût rassure ; Tu fais toujours, divin pervers, Loucher tous les poètes vers La perfection de ton vers ; Car il est le tissu qui : tulle (Mot vraiment ailé), s’intitule, Moins léger que ton vers, Catulle ! […] Rachilde Gog : Enamourés tous les deux des choses du divin, ces deux esprits si opposés, Villiers et Catulle Mendès, en même temps amis intimes et adversaires l’un à l’autre également redoutables, liés normalement par la parité de leur merveilleuse puissance de travail, et non moins normalement séparés par leur différente compréhension du mystère, ces deux hommes terribles pouvaient seuls, au monde des lettres, concevoir la terrible idée d’une substitution de Dieu. […] Mendès vit ; toujours battant l’enclume de diamant de la pensée romantique, il continue la belle tradition du poème-légende, et, peut-être, pour cela surtout que sa poigne implacablement vigoureuse fait jaillir encore l’étincelle divine, nombre de jeunes ont l’air de lui reprocher de rester… après l’Autre.

157. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — L’avenir du naturalisme »

Il est juste d’ajouter que M. de Bouhélier lui nie la « notion du divin » ; et cette remarque est importante à noter car nous verrons qu’elle est apparentée à celle que nous formulerons nous-même plus loin.‌ […] L’homme, sanctifié par le spiritualisme, tendait la main à ses frères les anges, se croyant si près d’eux que le monde animal, le monde végétal n’étaient plus rien dans son esprit qu’un décor gracieux planté par le divin régisseur des forces cosmiques. Le corps n’avait déraison d’être que dompté par l’âme ; la chair, aux libres sensations, n’était que la prison d’une étincelle divine, en perpétuelle mélancolie de son exil terrestre. […] C’est ce que Giordano Bruno exprimait en ces termes : « Un esprit se trouve dans toutes les choses, et il n’y a pas de corps si petit qui ne contienne en soi une parcelle de la substance divine, par laquelle il est animé. » Et Goethe lui-même : « L’essence éternelle se meut sans cesse en toutes choses13 ». […] Pour moi le monde religieux, divin, idéal, quoique latent uniquement dans l’humanité, a une existence aussi réelle que la chimie ou tout autre ordre de phénomènes ; et la gloire des savants consiste en cela qu’ils ouvrent les voies à une théologie plus splendide, à des chants plus divins que la théologie et les chants du passé15.

158. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre I. Les origines du dix-huitième siècle — Chapitre II. Précurseurs et initiateurs du xviiie  siècle »

Il n’y a pas eu de révélation ; les lois de la nature n’ont jamais été dérangées par une intervention divine ; tout ce qui est arrivé, arrive, arrivera dans la vie de l’univers et de l’humanité, est naturel, donc rationnel. […] Elle prit le dogme corps à corps, elle essaya d’y mettre en évidence toutes les marques de l’invention humaine et d’y rendre inutile l’hypothèse d’une action divine. […] Les protestants, qui prétendaient restaurer la primitive Église, avaient été amenés à faire la part du divin et de l’humain dans le corps des traditions chrétiennes, soit contre le catholicisme romain, soit contre les sectes rivales issues également de la Réforme.

159. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVI. Miracles. »

Quant aux miracles, ils passaient, à cette époque, pour la marque indispensable du divin et pour le signe des vocations prophétiques. […] À quelques lieues de Jésus, à Samarie, un magicien nommé Simon se créait par ses prestiges un rôle presque divin 735. […] Il est probable que l’entourage de Jésus était plus frappé de ses miracles que de ses prédications si profondément divines.

160. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Mgr Rudesindo Salvado »

Mgr Salvado aurait pu ajouter aux paroles si sensées et si courageuses du docteur, ce passage des Monthly Records, plus courageux et plus explicite encore : « S’il est un fait incontestable, — disent les Monthly Records, — qui nous humilie et qui nous afflige, c’est que là où nous, anglicans, nous agissons timidement, dans nos possessions australiennes, l’Église de Rome est activement à l’œuvre avec un zèle et une sagesse que nous ferions bien d’imiter… Ses évêques sont partout où il y a des âmes à conquérir et à changer… Une maîtresse pensée (master mind) anime et dirige leurs travaux… Quand un seul membre de notre clergé poursuit solitairement une tâche accablante, sans être assisté des conseils de ses supérieurs, l’Église de Rome ne cesse d’apparaître avec tous ses moyens d’action au grand complet… » Certainement, jamais le sentiment de ce qui manque à sa patrie n’a inspiré à un anglais plus de noble jalousie et de justice, et il n’y aurait qu’à admirer, si, en sa qualité d’anglican, l’écrivain auquel on applaudit ne provoquait pas le sourire en nous parlant des moyens d’action au grand complet de cette Église romaine dont il faut bien compliquer le génie pour en comprendre la puissance, quand on ne croit plus à sa divine autorité ! […] Voilà le secret de la force de cohésion de ce ciment romain qui relie si subitement et si solidement les âmes entre elles, de ce socialisme divin devant lequel tous les socialismes de la terre doivent, un jour ou l’autre, s’avouer vaincus ! […] Au contraire, elle rayonne, complète et divine, dans le livre de Mgr Salvado.

161. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Henri Cantel »

Mais s’il l’avait pincée plus dru, s’il avait auguré (les poètes sont des augures) que là nichait, comme un rossignol divin, l’accord divin qu’on cherche si longtemps de la pensée et de la vie, — et que nous nommons la poésie, faute d’un autre nom, — il l’aurait peut-être fait jaillir ! […] S’il moule quelque chose de sa main lumineuse et forte, c’est ce qu’il y a de plus divin au fond de nos âmes ; car c’est ce que l’homme n’a pas fait.

162. (1865) La crise philosophique. MM. Taine, Renan, Littré, Vacherot

Kant les a admises, il est vrai, comme de simples lois de l’entendement ; mais enfin il les a reconnues et démontrées sans y voir des idées divines. […] Suivant les hégéliens, un grand homme est une incarnation de l’idée éternelle, c’est par la participation avec l’absolu et avec le divin qu’un homme est grand. […] C’est ce que l’on appelle l’intuition pure, l’intuition immédiate du divin. […] La théologie chrétienne est plus profonde et plus vraie en admettant des mystères dans la nature divine. […] Nous touchons ici au plus profond des abîmes que cache la recherche des mystères divins.

163. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine »

Le plus haut type, parmi ceux qui ont produit leur pensée sur ces matières divines, est assurément Dante, comme le plus édifiant parmi ceux qui ont agi d’après les divines prescriptions est saint Vincent de Paul. […] Dans sa vocation invincible, cette vie n’était pas à la merci d’un heureux hasard : il ne pouvait manquer un jour ou l’autre de conquérir lui-même en plein et de faire retentir par le monde son divin organe. […] N’ont envahi ton cœur de tant d’odeurs divines[…] Tu sais l’âge où tu vis et ses futurs accords ; Ton œil plane ; ta voile, errant de bords en bords, Glisse au cap de Circé, luit aux mers d’Artémise ; Puis l’Orient t’appelle, et sa terre promise, Et le Mont trois fois saint des divines rançons !

164. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre II. Shakespeare — Son œuvre. Les points culminants »

Cette création seconde, qui n’est autre chose que l’action divine faite par l’homme, c’est ce qu’on nomme le génie. […] De la création divine directe sort Adam, le prototype. De la création divine indirecte, c’est-à-dire de la création humaine, sortent d’autres Adams, les types. […] Qu’on ne l’oublie pas, l’esprit humain, à demi divin qu’il est, crée de temps en temps des œuvres surhumaines. […] Cette admirable création humaine, Lear, sert de support à cette ineffable création divine, Cordelia.

165. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Laprade, Victor de (1812-1883) »

La muse de Laprade était la plus divine des statues, mais une statue ; le poète était le grand statuaire de notre siècle, un Canova en vers taillant la pensée en strophes, un sculpteur d’idées. […] La Charité, plus forte que le Désir, va donner à l’homme la mesure du sacrifice divin.

166. (1841) Discours aux philosophes. De la situation actuelle de l’esprit humain pp. 6-57

Croyez-vous que l’homme, après s’être toujours fait une solution du problème humain et divin, soit arrivé, de progrès en progrès, à une époque où il vivra sur la terre, comme l’animal, sans conscience et sans souci de la destinée générale ? […] Pourquoi ce divin, poids vers le ciel, qui remplace l’attrait vers la terre, se trouve-t-il ainsi l’apanage des femmes ? […] Apprends donc mon secret, qui est le tien : cet amant existe, le plus grand, le plus beau, le plus divin de tous ; et il veut que tu souffres pour lui. […] Je prends pour exemple la plus grande âme peut-être qui, depuis l’apparition de Jésus, ait incarné l’esprit divin sur la terre, sainte Thérèse, et je vous demande : Vers quoi voulez-vous que l’âme de Thérèse gravite ? […] Vous n’avez pas seulement affaibli, mais vous avez éteint l’influence de la loi divine, dans un pays chrétien, et pourtant vous avez laissé subsister la liberté qui en était la suite pour les femmes.

167. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. BALLANCHE. » pp. 1-51

En face de cette école des constitutionnistes dont Sieyès était le grand prêtre et qui pensait qu’une bonne constitution écrite pouvait s’appliquer immédiatement à un peuple quelconque, l’auteur du Sentiment réclamait pour le caractère profond, historique et presque divin, de toute institution sociale ayant racine dans une nation. […] N’est-ce point parce qu’étant privées d’eau sur les lieux élevés et exposées à l’ardeur du soleil, cette divine Providence, qui donne sa parure aux lis des champs, a voulu que leur calice pût retenir la rosée du matin, et que la fleur épanouie rendît à sa tige le bienfait qu’elle en avait reçu avant d’éclore ?  […] Ballanche ne portait pas l’horizon le plus lointain de cette émancipation moderne au delà des limites du Christianisme lui-même ; il proclamait la perfection de celui-ci en tant qu’institution spirituelle et divine, et s’il croyait que les sociétés humaines dussent se gouverner désormais selon une loi de liberté, le résultat de cette action immense ne lui semblait pouvoir être autre chose que l’introduction de plus en plus profonde du Christianisme dans la sphère politique et civile. […] Ballanche parle de la légitimité dans l’Essai, il s’agit, non point du droit divin tel qu’on l’entend vulgairement, mais d’une légitimité historique que nul publiciste spiritualiste ne conteste aujourd’hui. […] Il est chrétien, c’est-à-dire il croit à la révélation apportée au monde une fois pour toutes par Jésus, à l’excellence divine de son précepte, à la destinée humaine qui se dirige à cette seule clarté au travers d’une vallée d’épreuve et d’exil ; il croit même au dogme un, à la lettre sacrée qui n’est pas à remanier.

168. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — I. » pp. 180-197

En politique aussi, quelque peu partisan que l’on soit de la théorie sacrée et du droit divin, tel que Bossuet l’institue et le renouvelle, on serait presque fâché que cette doctrine n’eût pas trouvé un si simple, si mâle, si sincère organe, et si naturellement convaincu. […] Il se distingua de bonne heure par une capacité surprenante de mémoire et d’entendement ; il savait par cœur Virgile, comme un peu plus tard il sut Homère : « On comprend moins, a dit M. de Lamartine, commentil s’engoua pour toute sa vie du poète latin Horace, esprit exquis, mais raffiné, qui n’a pour corde à sa lyre que les fibres les plus molles du cœur ; voluptueux indifférent, etc. » M. de Lamartine, qui a si bien senti les grands côtés de la parole et du talent de Bossuet, a étudié un peu trop légèrement sa vie, et il s’est posé ici une difficulté qui n’existe pas ; il n’est fait mention nulle part, en effet, de cette prédilection inexplicable de Bossuet pour Horace, le moins divin de tous les poètes. […] Et c’est alors que, tandis que Jésus descend le long de la montagne des Olives, il le présente touché au vif dans son cœur d’une tendre compassion, et pleurant sur la ville ingrate dont il voit d’avance la ruine ; puis, tout d’un coup, sans transition et par une brusque saillie qui peut sembler d’une érudition encore jeune, Bossuet s’en prend à l’hérésie des marcionites qui, ne sachant comment concilier en un seul Dieu la bonté et la justice, avaient scindé la nature divine et avaient fait deux Dieux : l’un purement oisif et inutile à la manière des épicuriens, « un Dieu sous l’empire duquel les péchés se réjouissaient », le Dieu qu’on a nommé depuis des bonnes gens ; et, en regard de ce Dieu indulgent à l’excès, ils en avaient forgé un autre tout vengeur, tout méchant et cruel : et aussi, poussant à bout la conséquence, ils avaient imaginé deux Christs à l’image de l’un et de l’autre Père. […] La langue de ce sermon, comme de tous les discours de ces années, est un peu plus ancienne que celle de Bossuet devenu l’orateur de Louis XIV ; on y remarque des locutions d’un âge antérieur : « Or encore que nous fassions semblant d’être chrétiens, si est-ce néanmoins que nous n’épargnons rien, etc. » Il est dit que l’exemple de la ruine de Jérusalem et de cette vengeance divine, si publique, si indubitable, « doit servir de mémorial ès siècles des siècles ».

169. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXV. Mort de Jésus. »

» Mais son instinct divin l’emporta encore. À mesure que la vie du corps s’éteignait, son âme se rassérénait et revenait peu à peu à sa céleste origine. 11 retrouva le sentiment de sa mission ; il vit dans sa mort le salut du monde ; il perdit de vue le spectacle hideux qui se déroulait à ses pieds, et, profondément uni à son Père, il commença sur le gibet la vie divine qu’il allait mener dans le cœur de l’humanité pour des siècles infinis. […] Désormais hors des atteintes de la fragilité, tu assisteras, du haut de la paix divine, aux conséquences infinies de tes actes.

170. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 272-292

Marmontel, qui, en soutenant qu’il n’est pas de l’essence du Poëme héroïque d’être écrit en vers, & en appelant Télémaque un Poeme divin *, n’a certainement rien prouvé en faveur de son Bélisaire. […] Tout se fait dans son Poëme par des secours divins, & tout paroît opéré par des forces humaines. […] Un siecle où l’on n’a pas rougi de comparer un fade & ennuyeux Roman1 à un Poëme divin, est-il donc fait pour donner des loix, contre les décisions d’un siecle plein de lumieres & de goût, qui avoit déjà fixé la question ?

171. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « M. Théodore de Banville »

Il y a une Muse qui ne descend pas du ciel, celle-là, mais qui sort du sang de la France et vient mettre sa pâle, main divine et blessée sur l’épaule rose divine d’une autre Muse invulnérable. […] Seulement, cette composition brillera d’une étincelle divine qui n’est pas dans ses éléments constitutifs, — qui n’est ni dans Musset, ni dans Hugo, — et c’est la gaieté, la gaieté dans le lyrisme, le lyrisme qui semble l’exclure !

172. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre III. Trois principes fondamentaux » pp. 75-80

Trois principes fondamentaux Maintenant, afin d’éprouver si les propositions que nous avons présentées comme les éléments de la Science nouvelle, peuvent donner forme aux matériaux préparés dans la table chronologique, nous prions le lecteur de réfléchir à tout ce qu’on a jamais écrit sur les principes du savoir divin et humain des Gentils, et d’examiner s’il y trouvera rien qui contredise toutes ces propositions, ou plusieurs d’entre elles, ou même une seule ; chacune étant étroitement liée avec toutes les autres, en ébranler une, c’est les ébranler toutes. […] Cicéron disait à l’épicurien Atticus qu’il ne pouvait raisonner avec lui sur la législation, à moins qu’il ne lui accordât l’existence d’une Providence divine.

173. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Chapitre V. Observations philosophiques devant servir à la découverte du véritable Homère » pp. 268-273

La raison doit en être que l’esprit humain, infini de sa nature, étant resserré dans la grossièreté de ses sens, ne peut exercer ses facultés presque divines qu’en étendant les idées particulières par l’imagination. […] C’est par l’effet de ce défaut de réflexion, qui rend les barbares incapables de feindre, que Dante, tout profond qu’il était dans la sagesse philosophique, a représenté dans sa Divine Comédie, des personnages réels et des faits historiques.

174. (1874) Premiers lundis. Tome I « Bonaparte et les Grecs, par Madame Louise SW.-Belloc. »

Il est beau, il est consolant sans doute de voir, dans les mouvements des peuples, les inspirations de l’esprit de Dieu, et, dans le sentiment qui les pousse au bien-être, la marque infaillible et divine qu’ils l’atteindront ; il serait doux de penser que les obstacles apparents contre l’affranchissement des Hellènes n’en sont que des moyens dans l’ordre de la providence ; qu’Ali-Pacha, par exemple, a servi la Grèce en détruisant les Armatolikes et en renversant les peuplades libres ; que surtout les puissances d’Europe la servent par leur politique indifférente ou ennemie ; que la Russie la sert, que l’Autriche la sert, que la France et Soliman-bey aident à son triomphe : tout cela, encore une fois, serait doux à croire. Mais n’est-il pas téméraire de proclamer telle la volonté divine ?

175. (1910) Muses d’aujourd’hui. Essai de physiologie poétique

ô chère et divine tendresse ! […] Elle a cherché à retrouver cet état de divine inconscience qui fait que l’être humain participe à la vie générale. […] Cette plaie divine qui s’épanouit comme une rose, c’est la poésie. […] je dors Et je songe aux choses divines. […] Mais l’homme, relégué en ses terrestres contingences, saura, des déchets de ses rêves mystiques et ancestraux, se bâtir une nouvelle cathédrale, encore divine : le surhumain.

176. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIVe entretien. Épopée. Homère. — L’Odyssée » pp. 445-524

Dans l’un et dans l’autre de ces poèmes différemment divins, Homère est égal à lui-même, c’est-à-dire supérieur à tout ce qui a été raconté ou chanté avant lui. […] Là étaient rangés contre la muraille des tonneaux de vin vieux et délectable, contenant une boisson pure et divine. […] puisez dans des urnes un vin délicieux, le meilleur après celui que vous réservez pour le divin Ulysse, si toutefois il doit jamais revoir ses foyers ! […] » Nous battions des mains de plaisir à ces ressemblances, et nous nous demandions comment on pouvait faire un livre divin avec le tableau fidèle d’une lessive à la campagne ? « Il est divin parce qu’il est fidèle, disait notre père.

177. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 257-320

Mais leur essence divine, Mais eux, Seigneur, sont-ils là ? […] Mets, ô divine clémence, Mets ton poids dans la balance, Si tu pèses le néant ! […] J’en sortais souvent seul, le matin, pour aller, dans les hautes montagnes de ce pays enchanté, chercher des points de vue et des paysages ; je ne m’attendais certainement pas à rencontrer de point de vue sur le cœur humain, ni des poèmes en nature ou en action qui me feraient penser toute ma vie, comme à un songe, à la plus divine figure et à la plus mélancolique aventure qu’un poème eût jamais fait lever devant moi. […] Non, je n’essayerai pas de vous la décrire ; il n’y a pas de pinceaux, même ceux du divin Raphaël, pour une pareille tête. […] Je retenais ma respiration pour mieux contempler cette divine figure ; elle ressemblait à une belle villageoise le matin du dimanche, qui va faire sa toilette à la source, au lever du jour, derrière le jardin.

178. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. John Stuart Mill — Chapitre III : Théorie psychologique de la matière et de l’esprit. »

Supposez que je considère l’Esprit divin simplement comme la série des pensées divines prolongée pendant l’éternité, ce serait assurément considérer l’existence de Dieu comme aussi réelle que la mienne ; ce serait faire ce qu’au fond on fait toujours, c’est-à-dire se fonder sur la nature humaine pour en inférer la nature divine.

179. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Joubert » pp. 185-199

Ce n’était là qu’un tôt, mais, par ce qu’il contenait, était un têt divin ! […] Rendu, ni l’habit gris, ni la vie et les mœurs modernes, ennemies jurées de toute grandeur, n’empêchaient pas qu’il eût en lui, ce Joubert, je ne dirai point tout le Platon grec, dont le génie spacieux ne pourrait tenir dans cette bonbonnière d’homme, mais les meilleures miettes de cette substance divine qui pensait vers la 95e olympiade et qui est immortellement Platon. III Et parce qu’il était de cette substance divine, nul mieux que lui n’a jamais parlé de Platonisme et de Platon.

180. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Ernest Hello » pp. 389-403

Mais le mystique, à la parole perdue dans le désert d’hommes sans écho de ce monde ambiant, a dû nécessairement se détourner quelque peu des choses divines pour envisager les choses humaines qu’il voulait voir, et il les a percées d’un tel regard que le monde, inattentif et indifférent au mystique, prendra peut-être garde à l’observateur ! […] Dans les chapitres de son livre, qui n’a que des chapitres et dont l’unité n’existe que dans la personnalité très particulière de l’auteur, ceux-là qui sont intitulés : La Lumière et la Foule, Les Ténèbres et la Foule, Les Sables mouvants, Les Préjugés, Les Caractères, Les Passions et les Âmes, La Charité intellectuelle, sont de ces choses qu’il est difficile dénommer, parce qu’elles n’ont pas d’analogue en littérature… Le côté que j’oserai appeler le côté divin de cette critique, échappera sans nul doute à ceux qui ont le mépris insolent et bestial du mysticisme de l’auteur. […] — pouvait soudainement renoncer à ce mysticisme qui est la vie de son cœur et de sa pensée et fouler aux pieds le flambeau à la lueur divine dont la clarté n’éclaire que lui, vous verriez le sourire s’arrêter sur les lèvres impertinentes des sceptiques, l’éclat de rire bête ravalé par la bouche ouverte des incrédules et des blasphémateurs !

181. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Montmorency » pp. 199-214

Nous croyons, nous, qu’elle a gagné à ne pas porter ce reflet bleu du salon de Rambouillet sur la rougeur de sa joue chaste, et qu’on voit mieux ainsi la pureté divine de son type, bien au-dessus, par le calme et par la tendresse, des affectations de ce temps. […] Elle y était venue, attirée par son amie madame de Chantai, qui en était supérieure, et elle y resta, captivée par la règle de ce François de Sales qui savait mêler à tout un miel divin. […] Elle se dépouilla des derniers songes, et, quand ce fut fini, cette veuve de saint Paul, à la fidélité immortelle, ne crut pas manquer de foi à son époux, cet époux sanglant du billot de Toulouse qu’elle avait toujours dans la pensée, en choisissant un autre époux, sanglant aussi, le divin Époux de la Croix.

182. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVII. Saint-Bonnet »

Saint-Bonnet, la Raison, c’est la faculté divine, impersonnelle, qui nous met en rapport avec l’infini. […] La Raison, c’est ce qui nous est resté du rayon divin après la grande rupture de la Chute ; l’intelligence, c’est la puissance de l’homme, le résultat, soit du hasard, soit du mystère de sa contingente organisation. […] Saint-Bonnet, est de placer continuellement la notion de l’être, la notion de la loi, du nécessaire, de l’unité, du juste, du bien en soi, en un mot, du Divin, sous les perceptions innombrables du phénomène, du variable, du relatif, du fini, que lui transmet sans cesse l’Intelligence recueillant le produit des sens, et d’empêcher que nous ne restions de simples animaux.

183. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Raymond Brucker » pp. 27-41

Les rois très-chrétiens doivent penser autrement que les souverains philosophes qui trouvent absurde le mot divin : « Bienheureux ceux qui souffrent et bienheureux ceux qui Pleurent !  […] Brucker a le dessein de refondre Les Intimes comme il a refondu Le Maçon, et d’infuser dans ce cadavre brûlant le sang divin de la morale éternelle. […] Avant de tomber jusqu’au fond de l’abîme de sa vie, le rayon divin lui en dora les sommets.

184. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre VI. La poésie. Tennyson. »

Et çà et là aussi on aperçoit la profonde expression de leurs grands yeux rêveurs. « Des larmes, chante l’une d’elles, de vaines larmes, je ne sais pas ce qu’elles veulent dire. —  Des larmes sorties de la profondeur de quelque divin désespoir — s’élèvent dans le cœur et se rassemblent dans les yeux — lorsqu’on regarde les heureux champs de l’automne — et qu’on pense aux jours qui ne sont plus1530. » — Voilà la volupté exquise et étrange, la rêverie pleine de délices et aussi d’angoisses, le frémissement de passion délicate et mélancolique que vous avez déjà trouvés dans Winter’s Tale ou dans la Nuit des Rois. […] La Muse et sa beauté pacifique, la Nature et sa fraîcheur immortelle, l’Amour et son bienheureux sourire, tout l’essaim de visions divines passe à peine devant ses yeux, qu’on voit accourir parmi les malédictions et les sarcasmes tous les spectres de la débauche et de la mort. […] ce sont ces laideurs et ces vulgarités de bouge et d’hôtel garni qui ont fait ruisseler cette divine éloquence ! […] — To hear the emerald-color’d water falling Thro’ many a wov’n acanthus-wreath divine ! […] Tears, idle tears, I know not what they mean, Tears from the depth of some divine despair Rise in the heart, and gather to the eyes, In looking on the happy autumn-fields, And thinking of the days that are no more.

185. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIVe entretien. Littérature, philosophie, et politique de la Chine » pp. 221-315

Ils ont fait beaucoup de lois, mais ce sont des lois athées, des lois de propriété, des lois d’héritage, des lois de famille, des lois d’administration, aucunes lois vraiment divines et humaines selon la grande acception de ces deux mots ; race de brigands qui s’est contentée de bien distribuer les dépouilles du monde. […] « Pour qu’elle soit obéie, il lui faut une autorité non seulement forte et irrésistible, mais morale et en quelque sorte divine. » Où trouver cette autorité ? […] Confucius, à l’exemple du premier législateur de toute antiquité de cette partie de l’extrême Orient, cherche et trouve dans la nature le principe incontesté et humainement divin des sociétés. […] La première paternité fut donc une première royauté, la première famille une première monarchie de droit naturel ou de droit divin ! […] Ce sont ces trois principes divins, incorporés par le ciel dans notre nature, qui lient les hommes vivants entre eux en leur manifestant et en leur imposant ce qu’ils se doivent les uns aux autres.

186. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (3e partie) » pp. 193-271

Ainsi nulle cause n’est cachée ; le mystère de la volonté divine rend raison de tout. […] La plus magnifique étude sur le mouvement, point par lequel la matière touche à sa cause, Dieu, est le texte de la Physique d’Aristote ; c’est la dynamique divine. […] L’éternité est divine ; le temps est purement humain. […] « En comparaison de ces biens intérieurs et sans prix, de ces biens divins, comme disait Platon, les biens du dehors sont assez peu estimables. […] La troisième fut une stupide accusation populaire, qui, pour un hymne familier à un de ses amis de Macédoine, inculpa Aristote d’impiété et lui attribua la pensée de donner à un homme des qualités divines.

187. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre septième »

Les personnes divines ne sont pas pour Bossuet des symboles. […] Comme le divin perce sous l’humain ! […] L’illusion est la même ; ce sont les mêmes rayons de l’essence divine que réfléchissent la page du prédicateur et la muraille dégradée où le temps a effacé les traits du visage divin, sans effacer l’expression de bonté et l’auréole. […] Il ne faut pas d’ailleurs chercher dans les sermons de Bourdaloue ces vives peintures des personnes divines dont Bossuet anime l’explication des dogmes. […] Aurait-il fait une fin chrétienne et trouvé la paix dans la foi aux sources divines de l’unique morale ?

188. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIIe entretien. I. — Une page de mémoires. Comment je suis devenu poète » pp. 365-444

Mais l’amour divin, s’il a des ivresses et des voluptés de moins, a de plus l’infini et l’éternité de l’être qu’on adore ! […] Les violettes y représentaient les saintes tristesses du repentir, les muguets l’encens qui s’élève de l’autel, l’aubépine la miséricorde qui pardonne et sourit après les sévérités divines, l’églantine la joie pieuse qui rentre dans le cœur et qui l’enivre, l’œillet rouge de poète y représentait le cantique, les marguerites et les boutons d’or les voluptés et les passions méprisables du monde, qu’il faut fouler aux pieds, sans les voir ou sans les compter, en marchant au ciel. […]              Moi, je le lis sans nuages              Dans le livre à mille pages              Que la nature et les âges              Déroulent incessamment ;              Dans les syllabes divines              Qui luisent sur les collines,              Majuscules cristallines Dont l’étoile l’imprime au bleu du firmament. […] « Une admirable providence se fait remarquer dans les nids des oiseaux ; on ne peut contempler sans être attendri cette bonté divine qui donne l’industrie au faible et la prévoyance à l’insouciant. […] André Chénier n’avait pas encore été recueilli en volume ; je n’en connaissais que la sublime et divine élégie de la Jeune Captive, citée en partie par M. de Chateaubriand.

189. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français »

Il y avait là un mystère en germe ; et, en effet, ce mot de mystère signifiait primitivement office ou service divin : un même mot pour deux choses très-voisines et encore unies qui se confondaient. […] Un jésuite très instruit, le Père Cahour, qui se livre à d’utiles travaux de littérature, vulgarisant et développant à son point de vue les résultats des premiers investigateurs, s’est attaché à faire valoir les mérites et l’espèce de pathétique grave et majestueux de cette sorte de drame primitif moderne qui était une annexe de l’office divin les jours de grandes fêtes, qui fleurissait et se déroulait dans le sanctuaire et avait sa racine jusque sous l’autel. […] Moland, c’est cette même arrière-pensée de miséricorde, terminant la sentence divine qui-a-inspiré plus tard à Milton de faire descendre, pour juger l’homme déchu, non le Père, mais le Fils, le futur Rédempteur en personne, le « doux juge et intercesseur à la fois », venant porter la sentence avec une colère tranquille « plus fraîche que la brise du soir » ; et même temps qu’il condamnait les coupables en vertu de la loi de justice, les revêtant incontinent, corps et âme, dans leur nudité, les aidant en ami, et faisant auprès d’eux, par avance, l’office du bon serviteur, de celui qui lavera un jour les pieds de ses disciples : admirable et bien aimable anticipation du rachat évangélique et des promesses du salut ! […] Le voyage de Satan dans l’espace, hors du chaos, à la découverte, son arrivée aux limites du monde nouvellement créé, son déguisement, son entrée furtive dans le Paradis, le spectacle de bonheur et de délices conjugales dont il est témoin et qui le navre d’envie, ce premier tableau divin et unique du bonheur dans le mariage, tout cela prépare, inquiète, intéresse, ouvre des horizons immenses, crée un fond, une perspective antérieure, donne à la scène tout son sens et toute sa portée, fait de la place à l’action qui va suivre.

190. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Méditations sur l’essence de la religion chrétienne, par M. Guizot. »

Ici il y a un pont plus mince, plus long, plus suspendu, à franchir ; on est entouré d’abîmes, pour peu qu’on regarde à droite ou à gauche (liberté, fatalité, prédestination, prescience divine, responsabilité humaine) ; le pont tremble sous vos pieds ; mais enfin il est jeté, il est franchi ; M.  […] C’est le christianisme de Channing, de Chalmers, sans aucune marque calviniste expresse : il a réduit le christianisme à ses éléments les plus simples, les plus essentiels ; mais il lui garde expressément son caractère divin, surnaturel ; il le laisse entouré et glorifié des prophéties, prises au vrai sens, et des miracles ; il ne souffre aucune amphibologie sur la personne même du Christ, il voit en lui l’homme-Dieu et ne permet point qu’à cette nature divine on substitue, à aucun degré, le plus sage, le plus saint, et fût-ce même le plus divin des hommes.

191. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Un symbole »

Jules Simon : « La loi que je sollicite aurait donc ce double objet : « 1° D’approuver la proposition faite par l’archevêque de Paris d’ériger sur la colline de Montmartre en un point déterminé après une enquête, un temple destiné à appeler sur la France la protection et la bonté divines ;‌ « 2° D’autoriser l’archevêque à acquérir, tant en son nom qu’au nom de ses successeurs, les « terrains nécessaires, à l’amiable et, s’il y a lieu, par voie d’expropriation, après déclaration d’utilité publique, à la charge par lui de payer le prix d’acquisition des terrains et les frais de construction de l’édifice, avec les ressources mises ou à mettre à sa disposition par la piété des fidèles. »‌ Il est inutile, je pense, de faire remarquer la profonde habileté et la prudence d’expression de cette requête, qui cache, sous son apparente modestie, le piège où allait se prendre l’Assemblée nationale. […] Tolain qui, après avoir longtemps discuté la valeur du culte du Sacré-Cœur, et devant les explosions de colère que cette sacrilège dissection du viscère divin provoqua sur les bancs de la droite, ne put qu’ajouter : « S’il était permis, s’il était possible de caractériser d’un mot la ligne politique que vous suivez, — je dirais que c’est la ligne politique des Jésuites et de Loyola !  […] Ce que le prélat demande à l’Assemblée par l’intermédiaire du ministre, nous l’avons vu tout à l’heure : c’est la simple autorisation d’élever une église « destinée à appeler, sur la France, la protection et la bonté divines » ! […] Le pauvre vestige du « Vœu national » que l’on pouvait encore deviner sous la phrase de l’archevêque — « un temple destiné à appeler sur la France la protection et la bonté divines » — a maintenant tout à fait disparu.

192. (1859) Moralistes des seizième et dix-septième siècles

Si elle tenoit et estoit plantee par une attache divine, chose du monde ne nous en pourroit esbranler. […] Qu’elle soit législation, ou qu’elle soit religion, je la tiens pour divine dans toute la valeur et la force du terme. […] Tout se réunit pour rendre sensibles la présence et l’unité divines. […] En un mot, tous les caractères d’une législation temporaire se retrouvent dans cette législation divine. […] Telle est la divine psychologie du christianisme, et le développement rationnel de la grande folie de l’Évangile.

193. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XIV, l’Orestie. — Agamemnon. »

Si tu es le plus brave, si une mère divine t’a enfanté, celui-ci est le plus puissant et commande à un plus grand nombre. […] Mais Égisthe enleva le chantre divin et le jeta dans une île déserte, en pâture aux oiseaux de proie. […] Le Chœur dénonce sévèrement ce crime dont il pressent la vengeance, et il évoque la mort de la vierge dans une divine élégie. […] Toute chaude du souffle divin, je m’étendrai bientôt sur la terre. » Le Chœur se plaint de l’obscurité de ses prédictions ; elle lui répond par cette triste et gracieuse image, où brillent les larmes de la vierge qui ne connaîtra pas les joies de l’hymen : — « Eh bien ! […] Tout y est inspiré ; dans le sens immédiat du mot ; tout y respire l’égarement divin.

194. (1868) Curiosités esthétiques « IV. Exposition universelle 1855 — Beaux-arts » pp. 211-244

Peu d’hommes ont, — au complet, — cette grâce divine du cosmopolitisme  ; mais tous peuvent l’acquérir à des degrés divers. […] Que dirait, qu’écrirait, — je le répète, — en face de phénomènes insolites, un de ces modernes professeurs-jurés d’esthétique, comme les appelle Henri Heine, ce charmant esprit, qui serait un génie s’il se tournait plus souvent vers le divin ? […] Je laisse de côté la question de savoir si, délicatisant l’humanité en proportion des jouissances nouvelles qu’il lui apporte, le progrès indéfini ne serait pas sa plus ingénieuse et sa plus cruelle torture ; si, procédant par une opiniâtre négation de lui-même, il ne serait pas un mode de suicide incessamment renouvelé, et si, enfermé dans le cercle de feu de la logique divine, il ne ressemblerait pas au scorpion qui se perce lui-même avec sa terrible queue, cet éternel desideratum qui fait son éternel désespoir ? […] Voici la fameuse tête de la Madeleine renversée, au sourire bizarre et mystérieux, et si surnaturellement belle qu’on ne sait si elle est auréolée par la mort, ou embellie par les pâmoisons de l’amour divin. […] Delacroix me paraît être l’artiste le mieux doué pour exprimer la femme moderne, surtout la femme moderne dans sa manifestation héroïque, dans le sens infernal ou divin.

195. (1831) Discours aux artistes. De la poésie de notre époque pp. 60-88

Ce n’est plus ni la terre ni le ciel des Chrétiens, unis entre eux par une chaîne à la fois humaine et divine, visible et invisible : espérance, foi, charité, terre et ciel, tout a disparu devant la solitaire contemplation de ce vaste océan de l’Être où tout va s’engloutir. […] On peut être sceptique tout en s’occupant beaucoup de la grandeur divine ; on peut vivre dans le doute et l’incertitude avec un sentiment religieux très actif et très profond. […] Toujours abîmé dans la contemplation de la force divine, les êtres finis ne lui apparaissent que sous des traits peu arrêtés, comme des ondulations de la Vie générale. […] En effet, sauf les différences de leur génie et du point de vue où ils se placent, la terre est pour tous deux une vallée de larmes, et la vie de la terre, prise même dans son ensemble et dans la succession des générations, une chose transitoire et misérable, tandis qu’à ce monde réel répond pour eux je ne sais quel monde mystérieux, qui est le monde divin. […]  » Ta poésie, en s’élevant de plus en plus à la contemplation de l’Être universel, n’est pas pour cela devenue plus religieuse ; bien au contraire, en devenant plus divine, si l’on peut parler ainsi, elle a de plus en plus perdu la foi, l’espérance et la charité.

196. (1896) Essai sur le naturisme pp. 13-150

Nous recherchons l’émotion saine et divine. […] Barrès se montre si indifférent, M. de Bouhélier les considère comme des missions divines et héroïques. […] Nous sommes présents à de frustes repas et à des accueils rustiques dans nos promenades campagnardes qui surpassent en grâce divine la Cène chrétienne et le Banquet platonicien. […] L’individu n’est jamais pur, seules les fonctions des hommes sont divines, et c’est sur celles-ci qu’il eût fallu insister. […] Un destin divin s’y représente.

197. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Jean Lahor (Henri Cazalis). »

On y voit clairement de quelles façons la philosophie du divin Çakia-Mouni peut modifier et enrichir les divers sentiments d’un homme de nos jours : sentiment de la nature, amour de la femme, sentiment moral. […] Les fleurs sont des femmes, puisque femmes et fleurs sont l’épanouissement inégalement complet, à la surface du monde, de la même âme divine.

198. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XVI, les Érynnies. »

» — Et Prométhée leur répond : — « Les trois Parques et les Érynnies à la mémoire fidèle. » — Héraclite, cité par Plutarque, disait que « si le Soleil s’avisait de franchir les bornes qui lui sont proscrites, les Érynnies, agents de la Justice, sauraient bien lui faire rebrousser chemin. » — Dans l’Iliade, Xanthos, un des chevaux divins d’Achille, prend une voix humaine pour prédire sa mort au héros rentrant dans la guerre de Troie : mais les Érynnies, indignées de cette violation des lois naturelles, accourent aussitôt, et font taire impérieusement l’animal qui ose usurper la parole réservée aux hommes. […] Ce n’est point sans raison que Dante fait dire à la Porte de son Enfer : — « La Justice anima mon grand architecte ; je fus faite par la divine Puissance, la suprême Sagesse et le premier Amour. » Giustizia mosse il mio alto Fattore : Fecemi la divina Potestate, La somma Sapienza e il primo Amore.

199. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — L’abbé Boileau, et Jean-Baptiste Thiers. » pp. 297-306

Non contens d’avoir donné ce spectacle pendant le jour, ils couroient la nuit les rues, espérant fléchir, par ce moyen, la justice divine. […] Dans une médaille qu’il fit frapper, il étoit représenté d’un côté avec ces mots : au divin Aretin : Sur le revers, il étoit sur un trône, & recevoit les présens des envoyés des princes ses tributaires.

200. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre viii »

Chapitre viii Catholiques, protestants, socialistes, tous en défendant la France, défendent leur foi particulière Un trait commun à ces diverses familles d’esprit durant cette guerre, c’est qu’elles sentent toutes que le meilleur, le plus haut d’elles-mêmes, leur part divine est engagée dans le drame, et périrait avec la France.‌ […] C’est la vérité profonde et divine ; elle ne peut pus être renversée ; elle peut être troublée, mais passagèrement ; l’équilibre se rétablit toujours ainsi.

201. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIIe entretien. Poésie lyrique. David (2e partie) » pp. 157-220

assiste-moi, non à cause de moi, mais à cause de ta compassion divine !  […] Il célèbre l’immatérialité de Jéhovah pour apprendre au peuple à discerner l’idée divine de l’image et le culte visible de l’être invisible. […] — lieu doublement sacré pour moi, dont ce chantre divin a si souvent touché le cœur et ravi la pensée. […] Tu défendis aux vents d’en sécher le rivage, Et tu dis aux échos : Roulez-la dans les âges, Humectez tous les yeux, mouillez tous les visages         Des larmes du divin chanteur ! […] Ainsi sur ta corde arrosée, Par le divin débordement, Tes larmes, comme une rosée, Se boiront éternellement Ô berger !

202. (1890) L’avenir de la science « XXIII »

Voilà un superbe système de vie, tout idéal, tout divin, et vraiment digne de la liberté des enfants de Dieu. […] L’humanité ne se convertit qu’éprise par l’attrait divin de la beauté. […] Je préfère Pierre Leroux, tout égaré qu’il est, à ces prétendus philosophes qui voudraient refaire l’humanité sur l’étroite mesure de leur scolastique et avoir raison avec de la politique des instincts divins du cœur de l’homme. […] Tout se réduit à ce fait de la nature humaine : l’homme en face du divin sort de lui-même, se suspend à un charme céleste, anéantit sa chétive personnalité, s’exalte, s’absorbe. […] Quoi, vous admettriez que la matière est, parce que vos yeux et vos mains vous le disent, et vous douteriez de l’être divin, que toute votre nature proclame dès son premier fait ?

203. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XVII, l’Orestie. — les Euménides. »

Ces nouveaux venus qu’elles ont vus naître et croître, les voilà qui insultent leurs doyennes dans la vie divine. — « Jeune dieu ! […] Imaginons donc le dieu tel qu’il nous le montre, sa chlamyde volante sur l’épaule, les yeux pleins d’une splendeur terrible, la lèvre soulevée d’un dégoût divin, dans ce rayonnement de colère sereine qui fait songer, devant sa statue, à la foudre éclatant au sein d’un ciel pur. […] C’est l’Aréopage qu’elle installe, et c’est l’Aréopage qu’Eschyle défendait en remettant au jour ses fondements divins. […] Avant Eschyle qui l’ignorait, Ézéchiel avait eu l’intuition de ces grands changements opérés dans la conscience des Êtres divins. […] Dante, qui est de sa race, l’ignorait sans doute ; sans quoi il se serait ménagé quelque illustre rencontre avec sa grande Ombre, au tournant d’un cercle de la Divine Comédie.

204. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre II. Littérature dramatique — Chapitre I. Le théâtre avant le quinzième siècle »

Mais la source immédiate du drame, c’était la variation de l’office du jour, les prières ou le récit qui rappelaient l’acte divin, le saint, ou le martyr, dont l’office du jour consacrait particulièrement la mémoire ; c’était l’Evangile, les Actes des apôtres, ces délicieux poèmes de la religion naissante, que l’usage de l’Église découpait pour servir à l’éducation du peuple selon l’ordre de l’année chrétienne. […] Dans un temps où le peuple ne lisait pas, où le latin lui était devenu inintelligible, il était naturel que les clercs songeassent à dégager le sens du service divin par une figuration plus expressive, à instruire les esprits des fidèles, en saisissant leurs imaginations : ils réalisèrent par des interpolations de plus en plus considérables et dramatiques les actes dont l’office du jour était la commémoration. […] On joue encore le drame dans l’église, mais on le déplace, selon les convenances locales : il tient moins étroitement au service divin, qu’il gênerait par ses longueurs. […] L’élan non encore lassé des croisades, la touchante confiance en la sollicitude divine, la vulgarité passablement matérialiste, qui, pour n’être pas dupe, réclame de Dieu, de son saint, un service temporel et des miracles lucratifs, voilà les hauts et les bas de la foi du moyen âge : mais dans la vie facile et bruyante de la province artésienne, que de place prennent les tavernes, les « beuveries », les drôles insolents et amusants que la police bourgeoise pourchasse, mais qui font les délices de la gaieté bourgeoise !

205. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre IV. Ordre d’idées au sein duquel se développa Jésus. »

Elle crut avoir les promesses divines d’un avenir sans bornes, et comme l’amère réalité qui, à partir du IXe siècle avant notre ère, donnait de plus en plus le royaume du monde à la force, refoulait brutalement ces aspirations, elle se rejeta sur les alliances d’idées les plus impossibles, essaya les volte-face les plus étranges. […] Des représentants d’un tout autre esprit, des thaumaturges, considérés comme des espèces de personnes divines, trouvaient créance, par suite du besoin impérieux que le siècle éprouvait de surnaturel et de divin 180. […] Les actes les plus importants de sa carrière divine se passent sur les montagnes ; c’est là qu’il était le mieux inspiré 189 ; c’est là qu’il avait avec les anciens prophètes de secrets entretiens, et qu’il se montrait aux yeux de ses disciples déjà transfiguré 190.

206. (1861) Cours familier de littérature. XI « Atlas Dufour, publié par Armand Le Chevalier. » pp. 489-512

Mais si l’on considère de l’humanité son âme, son intelligence, sa moralité, sa destinée évidemment supérieure à cette vie et à cette mort entre lesquelles elle s’agite, sa connaissance de Dieu, l’hommage qu’elle rend à ce maître suprême de ses destinées individuelles ou collectives, la transition entre le fini et l’infini dont elle paraît être le nœud par sa double nature de corps et de pensée, sa conscience, faculté involontaire, révélation, non de la vérité, mais de la justice, son instinct évidemment religieux, son inquiétude sacrée qui lui fait chercher son Dieu, avant tout créature sacerdotale, chargée spécialement par l’Auteur des êtres de lui rapporter en holocauste les prémices de ce globe, la dîme de l’intelligence, la gerbe de l’autel, l’encens des choses créées, la foi, l’amour, l’hymne des créations muettes, la parole qui révèle, le cri qui implore, l’obéissance qui anéantit le néant devant l’Être unique, le chant intérieur qui célèbre l’enthousiasme, qui soulève comme une aile divine l’humanité alourdie par le poids de la matière, et qui la précipite dans le foyer de sa spiritualité pour y déposer son principe de mort et pour y revêtir d’échelons en échelons sa vraie vie, son immortalité dans son union à son principe immortel ! […] Les mondes ne sont-ils pas les caractères de l’imprimerie divine avec lesquels l’Infini écrit ses leçons à l’intelligence de ses créatures, le catéchisme de l’infini ? Si j’étais père de famille, au lieu d’être un solitaire de l’existence entre deux générations tranchées par la mort, du passé et de l’avenir de ce globe, qui n’a plus pour moi que le tendre et triste intérêt du tombeau ; ou si j’étais un instituteur de la jeunesse, chargé de lui enseigner le plus rapidement et le plus éloquemment possible ce que tout homme doit savoir du globe et de la race à laquelle il appartient, pour être vraiment intelligent de lui-même, je suspendrais un globe terrestre au plancher de ma modeste école, et j’expliquerais, avec ce miraculeux démonstrateur de l’astronomie, le second Herschel, la place et le mouvement de notre globule au milieu des espaces et des mouvements de cette armée des astres, qui exécutent, chacun à son rang et à son heure, la divine stratégie des mondes.

207. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Leconte de Lisle, Charles-Marie (1818-1894) »

Alexandre Dumas fils Si vous prenez Le Lac de Lamartine, la Tristesse d’Olympio de Victor Hugo, le Souvenir ou une des Nuits, celle que vous voudrez de Musset, vous aurez avec les chœurs d’Athalie, d’Esther et de Polyeucte, avec l’admirable traduction en vers de l’Imitation par Corneille, vous aurez à peu près le dernier mot de notre poésie d’amour terrestre et divin. […] Ne devons-nous pas à ce fier poète l’inestimable, le divin présent : une révélation nouvelle de la Beauté ? […] Pierre Quillard L’un des plus stupides reproches que l’on eut coutume d’adresser à cette œuvre fut d’alléguer qu’elle n’allait pas au-delà d’une facile beauté extérieure et purement formelle, et que toute véhémence et toute vie lui faisaient défaut ; et c’était un jeu familier à la basse critique de comparer les poèmes de Leconte de Lisle à de froides images de marbre que nul Prométhée n’aurait animées du feu divin.

208. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Le comte de Gasparin » pp. 100-116

Le germe divin devait rester atome. Le grain de sénevé apporté par la main du Divin Semeur ne devait pas lever sur le sillon… Cette incroyable idée chrétienne ne devait chercher ni son accroissement, ni son organisation. […] C’est toujours la séparation de Jésus-Christ et de son Église, malgré les paroles divines de Jésus-Christ, auquel croit pourtant le comte de Gasparin, sur leur identification éternelle. « Si Jésus-Christ ne ment pas, l’Église ne peut errer », disait ce saltimbanque de Luther, qui, par là, se condamnait lui-même… C’était assez, à ce qu’il semblait, pour l’hérésie, que ce mensonge de Jésus-Christ, mais l’historien d’Innocent III a cru devoir ajouter aux raisons connues, et réfutées tant de fois par les théologiens catholiques, d’être et de rester protestant, une conception nouvelle, qui ne fausse pas que l’idée chrétienne, mais la nature des choses elle-même, et c’est cette conception, qui n’est qu’une chimère, qui donne à la publication intitulée Innocent III le peu qu’elle a de triste originalité.

209. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Rêveries sur un empereur »

Ce qu’un gouvernement démocratique hésiterait à faire (peut-être parce qu’il ne serait pas assez sûr de pouvoir limiter les conséquences d’un essai de cette espèce) ; ce que n’avait pas osé chez nous un César aux tendances socialistes, issu du suffrage universel, il l’a fait, lui, Empereur de droit divin. […] Ils ne croient plus à leur droit divin.

210. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « Introduction »

L’humble soumission au pouvoir divin, au monarque céleste et terrestre leur parut l’unique destin de l’homme, qui ne pouvait pas même demander l’oubli de son servage à la nature, abîme grouillant de tentations et de péchés. […] Dès qu’il a connu la nature, l’homme a rejeté l’artificiel divin autrefois imposé à son ignorance.

211. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIIe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset » pp. 409-488

C’était un caractère semi-sérieux ; c’est ainsi que les Italiens désignent cette espèce d’œuvre et cette espèce d’homme dont le divin Arioste est dans leur langue le type le plus original et le plus achevé, comme Sterne l’est pour l’Angleterre. […] Le plaisir est, en effet, aussi une des fonctions de l’homme ; par une divine indulgence de la Providence, la vie de tous les êtres a été partagée en travail et en repos, en veille et en sommeil, en effort et en détente du corps et de l’esprit. […] Mais de là aussi une incrédulité impie à l’amour vertueux, une ironie habituelle contre l’amour fidèle, une moquerie de l’amour de l’âme, un culte à l’amour des yeux, et enfin un abandon sans résistance à l’amour capricieux et volage de l’instinct qui est à la fois la profanation et la vengeance de ce qu’il y a de plus divin dans le calice où l’homme boit ses délices et ses larmes. […] Et puisque tôt ou tard l’amour humain s’oublie, Il est d’une grande âme et d’un heureux destin D’expirer comme toi pour un amour divin ! […] Je ne voudrais pas passer l’âge de Raphaël, de Mozart, de Weber, de la divine Malibran ! 

212. (1890) La vie littéraire. Deuxième série pp. -366

Il serait impossible d’ôter de l’esprit d’un caniche que la lune est divine. […] c’est divin ! […] Pourquoi mutilaient-ils ainsi ces petites images humaines ou divines ? […] Dans l’un comme dans l’autre les grandes idées divines sont exclues. […] Elles sont divines, les poupées de M. 

213. (1895) La vie et les livres. Deuxième série pp. -364

Vos paroles sont divines. […] L’art, la poésie, voilà les créations vraiment divines qu’il a jetées dans le torrent des choses. […] On y respirerait sans doute ce parfum de divine sagesse dont parlait Platon à propos de Socrate. […] Ont-elles jamais été plus gracieuses, plus souveraines, plus divines que maintenant ? […] Presque partout la routine machinale a tué l’âme des liturgies et aboli le sens divin des hymnes.

214. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Werther. Correspondance de Goethe et de Kestner, traduite par M. L. Poley » pp. 289-315

Il eut, en un mot, une saison morale toute poétique et divine, quatre mois célestes et fugitifs qui suffisent à illuminer tout un passé. […] Ma sœur vous salue, mes demoiselles vous saluent, mes dieux vous saluent, nommément le beau Pâris à ma droite et la Vénus d’or de l’autre côté, et Mercure, le messager, qui se réjouit des courriers rapides, et qui attacha hier à mes pieds ses belles et divines semelles d’or, qui le portent avec le souffle du vent à travers la mer stérile et la terre sans limites56. […] Admirable élan et salut vraiment divin ! […] Or, jugez de l’impression pénible qu’il dut faire à une première lecture sur les deux jeunes époux, qui y voyaient toute leur liaison de ces quatre divins mois dans la vallée de la Lahn divulguée en même temps et comme profanée par un mélange avec d’autres événements et des circonstances étrangères, moins délicates et moins pures. […] Mais certes, on n’a jamais plaidé avec plus de hauteur et de passion le droit qu’a l’œuvre, fille immortelle du génie, d’éclore à son heure, de jaillir du divin cerveau, et de vivre, dût-elle, en entrant, heurter quelques convenances établies, et froisser quelques susceptibilités même légitimes.

215. (1889) La littérature de Tout à l’heure pp. -383

Comment donc pourraient-ils plaire, eux que la divine Intuition retient dans la nature, à des intelligences faussées qu’une demi-science jeta dans l’artifice ? […] La réponse du Sphinx, Pascal croyait la trouver dans cet Évangile qui offre à nos faiblesses l’appui divin, et il entreprit sa Démonstration de la Religion Chrétienne. […] Quant aux éléments quasi divins du génie de Shakespeare, ils passèrent inaperçus au regard de ses imitateurs. […] — le son divin, et passe. […] Il se recule d’elle par son incuriosité des mystères divins.

216. (1813) Réflexions sur le suicide

Le remords tient nécessairement à l’idée qu’on se fait de la Justice divine, car si nous ne comparions pas nos actions à ce type suprême de l’équité, nous n’aurions dans la vie que des regrets. […] Quant au Suicide causé par un moment de délire, par un accès de désespoir, il se peut que le divin Législateur des hommes n’ait pas eu l’occasion d’en parler au milieu des Juifs qui n’offraient guère d’exemples de ce genre d’égarement. […] — Quel secours il prêtait au martyr en lui rappelant son divin modèle ! […] Toutes nos peines avaient passé dans son divin être. […] — Il faut, lui répondis-je, laisser l’esprit divin se ressaisir de ce qu’il a donné.

217. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIIIe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (1re partie) » pp. 5-96

Ce philosophe perdit peu à peu son crédit, et il paraît que, se voyant disgracié, il devint le défenseur des mœurs anciennes et des usages de ses pères, en s’opposant aux honneurs divins qu’on voulait rendre au conquérant macédonien. […] Anaxarque, les sophistes grecs et les grands de Perse, de concert avec Alexandre, avaient résolu de décerner les honneurs divins à ce prince. […] « Les Grecs, ajouta Callisthène, ne décernèrent point les honneurs divins à Hercule de son vivant, mais après sa mort, lorsque l’oracle de Delphes, consulté sur ce sujet, l’eut ainsi ordonné. […] Il y a dans les faits une réalité occulte qui est aux choses politiques ce que la gravitation est aux choses physiques, et qui leur assigne leur poids et détermine leur équilibre divin. […] Il cherche à relever le sophisme par la raison, mais il ne peut, malgré son génie, prévaloir sur l’égalité divine.

218. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paul Féval » pp. 107-174

Shakespeare, l’indifférent sublime, eut l’impartialité, cette impartialité dont l’homme ne peut dire si elle est infernale ou divine. […] », de ce vieux joyeux au rire divin. […] Seulement, il n’aurait pas mouillé son rire de ces belles larmes d’admiration et d’attendrissement qui se mêlent au rire si gai pourtant de cet enchanteur de Paul Féval, dont l’enchantement est précisément le mélange, divin à force d’être humain, du rire et des larmes ! […] Quand Werner, l’auteur d’Attila, de Luther, du Vingt-quatre Février, fut percé à Rome du rayon divin, le poète se tut en lui tout à coup. […] Il nous a donné une révélation plus vaste que celle de saint Aubert, en faisant précéder par l’histoire divine de l’Archange l’histoire du Mont qui lui a été consacré.

219. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XI, les Suppliantes. »

Ne souffre pas que, suppliante, je sois arrachée du pied de ces statues divines, entraînée comme une cavale, saisie par mes bandelettes bigarrées, tirée par mes voiles. » — Une image bucolique semble évoquer leur mère commune dans sa métamorphose douloureuse : — « Regarde-moi, je suis là, suppliante, exilée, errante, comme la vache poursuivie par le loup sur un haut rocher. […] » — Un vœu touchant sur ces bouches de vierges, est celui qu’Artémis, la chasseresse, patronne des couches heureuses, « visite les épouses, au jour de l’enfantement ». — La gloire poétique n’est même pas oubliée dans ces sorts propices jetés sur Argos ; les Danaïdes lui promettent le sourire des Muses et le chant des lyres : — « Que les chanteuses divines accordent ici leurs voix, et que le son de la cithare se mêle harmonieusement au son de leurs bouches sacrées !  […] Perséphone précipitée sous la terre par le sombre Hadès, Europe emportée par le taureau divin à travers les flots, Orythie saisie par Borée, le Vent orageux dont le souffle fécondait les femmes, figurent peut-être, par un côté, ces tragédies de la plage. […] » — « Crains de scruter les choses divines. » — La transition est ainsi tracée entre le salut apparent et la catastrophe.

220. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Henri Heine »

Henri Heine est un génie éminemment tendre, nuancé des plus ravissantes et (dans le sens religieux) des plus divines mélancolies, chez qui le sourire et même le rire trempent dans les larmes, et les larmes se rosent de sang… C’est une âme d’une si grande puissance de rêverie et d’un désir si amoureux du bonheur, que l’on peut dire qu’elle est faite pour le Paradis tel que les chrétiens le conçoivent, comme les fleurs sont faites pour habiter l’air et la lumière. […] … Qu’ils sont donc sots et cruels les philosophes athées, ces dialecticiens cruels et bien portants, qui s’évertuent à enlever aux hommes souffrants leur consolation divine, le SEUL calmant qui leur reste. […] Je confesse donc ouvertement et franchement que tout ce qui a rapport dans ce livre (De l’Allemagne) à la grande question divine est aussi faux qu’irréfléchi. […] Et quand il écrit tant devers divins, qui ont la beauté des plus cruelles amertumes humaines, n’a-t-il pas encore, pour nids, son propre cœur saignant, et la nature radieuse et immortelle, à travers laquelle il va semant les gouttes de sang de ce cœur déchiré ?

221. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre X. »

Jamais cette poésie de l’hymne religieux ou de l’hymne guerrier, de l’adoration divine ou de l’ardeur patriotique, n’éclata dans des vers plus hardis, d’un tour plus extraordinaire et plus libre. […] Les frères d’Eschyle, les deux guerriers dignes de son nom par leur courage, comme son courage à lui-même était digne de son génie, le pressaient un jour d’écrire un hymne à l’honneur d’Apollon ; il leur répondit « que la chose était faite dès longtemps, et pour le mieux, par le poëte Tynnichos ; que si à l’œuvre de celui-ci il opposait maintenant une œuvre nouvelle et sienne, elle aurait même fortune que les statues récentes des dieux, en présence de leurs statues antiques : c’est-à-dire que celles-là, rudes et simples, sont réputées divines, et que les autres, plus jeunes et travaillées avec plus d’art, sont admirées, mais qu’elles ont moins du dieu en elles. » Devant Eschyle, son ancien de si peu d’années, Pindare dut raisonner de même ; et, content de sa gloire lyrique renouvelée sous tant de formes, liée à tant de faits royaux et domestiques, il n’avait pas à essayer cette autre gloire du théâtre élevée si haut dans Athènes. […] C’étaient peut-être les vers mêmes, que nous retrouvons, au début de la Théogonie108 : « Ayons les Muses en tête de nos chants, les Muses qui habitent le grand et fertile sommet d’Hélicon, et dansent de leurs pieds légers autour de la fontaine bleuâtre et de l’autel du puissant fils de Saturne ; les Muses qui, lavant aux sources du Permesse leur beauté délicate, auprès de l’Hippocrène, ou sur le divin sommet d’Holmios au plus haut de l’Hélicon, forment des chœurs gracieux, sous leurs pas tressaillants ; puis, élancées de là, sous le voile d’un épais nuage, ont marché dans la nuit, jetant d’harmonieuses clameurs, en hymnes à Jupiter porte-égide, à la sainte Junon, reine d’Argos aux brodequins dorés, à la fille du dieu porte-égide, Minerve aux yeux pers, à Phébus Apollon, à Diane chasseresse, à Neptune qui enceint la terre et l’ébranlé, à la vénérable Thémis, à Vénus aux roulantes prunelles, à Hébé parée d’une couronne d’or, à la belle Dioné, à l’Aurore, au Soleil immense, à la Lune brillante, à Latone, à Japet, au ténébreux Saturne, à la Terre, au vaste Océan, à la Nuit sombre et à la race sacrée des autres dieux : célébrons ces Muses, qui enseignaient une si belle chanson à Hésiode, occupé de paître ses agneaux, aux bords de l’Hélicon divin. » Cette poésie brillante et gracieuse, non moins ancienne que les chants homériques, mais indigène en Béotie, offerte aux yeux et gravée dans les temples de cette religieuse contrée, suffisait à dénouer la langue du jeune homme, né pour les vers, qui vivait dans ces lieux.

222. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — K — Kahn, Gustave (1859-1936) »

Remy de Gourmont Ce poème de vingt-huit feuillets (Domaine de fée) est sans doute le plus délicieux livret de vers d’amour qui nous fut donné depuis les Fêtes galantes et, avec les Chansons d’amant, les seuls vers peut-être de ces dernières années où le sentiment ose s’avouer en toute candeur, avec, la grâce parfaite et touchante de la divine sincérité. […] Une douceur en émerge, c’est le lied : restitution d’humanité, définitive en sa musique suave et brève, où chante l’âme de banales et divines aventures plébéiennes ou de ces souvenirs que les héroïsmes, les joies ouïes malheurs séculaires incrustent en le cœur des races ; le lied, dont l’adaptation au verbe français est le bien évident de M. 

223. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Dédicace, préface et poème liminaire de « La Légende des siècles » (1859) — La vision d’où est sorti ce livre (1857) »

Ce rêve était l’histoire ouverte à deux battants ; Tous les peuples ayant pour gradins tous les temps ; Tous les temples ayant tous les songes pour marches ; Ici les paladins et là les patriarches ; Dodone chuchotant tout bas avec Membré ; Et Thèbe, et Raphidim, et son rocher sacré Où, sur les juifs luttant pour la terre promise, Aaron et Hur levaient les deux mains de Moïse ; Le char de feu d’Amos parmi les ouragans ; Tous ces hommes, moitié princes, moitié brigands, Transformés par la fable avec grâce ou colère, Noyés dans les rayons du récit populaire, Archanges, demi-dieux, chasseurs d’hommes, héros Des Eddas, des Védas et des Romanceros ; Ceux dont la volonté se dresse fer de lance ; Ceux devant qui la terre et l’ombre font silence ; Saül, David ; et Delphe, et la cave d’Endor Dont on mouche la lampe avec des ciseaux d’or ; Nemrod parmi les morts ; Booz parmi les gerbes ; Des Tibères divins, constellés, grands, superbes, Étalant à Caprée, au forum, dans les camps, Des colliers que Tacite arrangeait en carcans ; La chaîne d’or du trône aboutissant au bagne. […] c’était la confrontation De ce que nous étions avec ce que nous sommes ; Les bêtes s’y mêlaient, de droit divin, aux hommes, Comme dans un enfer ou dans un paradis ; Les crimes y rampaient, de leur ombre grandis ; Et même les laideurs n’étaient pas malséantes À la tragique horreur de ces fresques géantes.

224. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre III. Parallèle de la Bible et d’Homère. — Termes de comparaison. »

La simplicité de l’Écriture est celle d’un antique prêtre qui, plein des sciences divines et humaines, dicte du fond du sanctuaire les oracles précis de la sagesse. […] Les noms propres y sont hérissés d’épithètes ; un héros manque rarement d’être divin, semblable aux Immortels, ou honoré des peuples comme un dieu.

225. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Léon Bloy »

Le livre de Léon Bloy, que les ennemis de l’Église traiteront de mystique pour l’insulter et pour n’y pas répondre, — comme si le mysticisme n’était pas la dernière lueur que Dieu permette à l’homme d’allumer au foyer de son amour pour pénétrer le mystère de sa Providence, — ce livre, creusé plus avant que l’histoire du comte Roselly de Lorgues dans les entrailles de la réalité divine, est encore plus la glorification de l’Église que la glorification de Christophe Colomb. […] Cette partie dogmatique du livre de Léon Bloy est réellement de l’histoire sacrée, comme aurait pu la concevoir et l’écrire le génie même de Pascal, s’il avait pensé à regarder dans la vie de Christophe Colomb et à expliquer la prodigieuse intervention, dans les choses humaines, de ce Révélateur du Globe, qu’on pourrait appeler, après le Rédempteur Divin, le second rédempteur de l’humanité !

226. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre cinquième. Retour des mêmes révolutions lorsque les sociétés détruites se relèvent de leurs ruines — Chapitre II. Comment les nations parcourent de nouveau la carrière qu’elles ont fournie, conformément à la nature éternelle des fiefs. Que l’ancien droit politique des romains se renouvela dans le droit féodal. (Retour de l’âge héroïque.) » pp. 362-370

À l’âge divin ou théocratique dont nous venons de parler, succéda l’âge héroïque avec la même distinction de natures qui avait caractérisé dans l’antiquité les héros et les hommes. […] Le vertueux Dion de Syracuse, l’ami du divin Platon, avait délivré sa patrie de la tyrannie d’un monstre ; il n’en fut pas moins assassiné pour avoir essayé de rétablir l’aristocratie.

227. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXIXe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe (2e partie) » pp. 161-232

Assistons à la dernière partie de son œuvre, et laissons son divin génie le louer mieux que nous. […] La comparaison était caractéristique ; car, après Phidias, aussi divin dans l’expression de la force que dans l’expression de la grâce, il n’y avait eu que Goethe pour créer de la même main, du même ciseau et du même bloc, Faust et Marguerite ! […] Sa foi se serait plus justement appelée polythéisme que panthéisme, c’est-à-dire qu’il reconnaissait et qu’il adorait la Divinité dans toutes ses œuvres sans la confondre avec ses œuvres : sorte de paganisme sans idolâtrie, qui adorait la puissance divine dans la puissance matérielle des éléments, mais qui dans l’élément adorait l’impulsion divine et non l’élément lui-même. Complétement incrédule à telle ou telle révélation historique par des miracles, Goethe admettait seulement cette révélation naturelle et progressive par la raison humaine, comme miroir de l’intelligence divine, successivement frappé de plus de clarté à mesure qu’il se dégage davantage des ignorances et des superstitions qui le ternissent. […] , le monde physique comme le monde moral avait commencé par un état plus parfait, plus pur et plus lumineux, par un Éden dans lequel l’homme naissant avait entendu les confidences de Dieu par des révélateurs divins.

228. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre II, grandeur et décadence de Bacchus. »

Aucun Olympien ne le surpasse pourtant en noblesse divine. […] Les bêtes, flairant une odeur bestiale dans l’orgie divine, s’y associent joyeusement. […] Malheur au divin Orphée s’il s’égare au milieu de la horde horrible ! […] Un miroir étrusque, d’une beauté divine, le montre amoureusement renversé, passant les bras autour du cou de sa mère, et recevant le baiser reconnaissant de l’Ombre sur sa bouche ouverte. […] D’anciens rapports le liaient au fils de Myrrha et à Cypris, sa divine maîtresse.

229. (1882) Types littéraires et fantaisies esthétiques pp. 3-340

Celle-là est en proie au repentir, à un repentir qui n’a rien de divin, je vous assure, et qui ne lui ouvrira pas les portes du ciel. […] Grâce à cette pitié divine, l’homme est donc visité par des forces qui lui sont inconnues et qui agissent en lui sans son concours. […] Ce livre n’a pas le don divin des miracles et ne peut ni ressusciter les morts ni rappeler les agonisants à la santé. […] Ceux-là mêmes qui sont le plus justement réputés divins ne sont rien moins cependant que rapprochés de Dieu. […] comme alors on se sent convaincu que cet univers où nous vivons est divin et repose sur un fondement divin !

230. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « HOMÈRE. (L’Iliade, traduite par M. Eugène Bareste, et illustrée par M.e Lemud.) —  second article  » pp. 342-358

Ce qu’on sait mieux, c’est qu’à partir de cette rédaction sous Pisistrate, de nombreux travaux sont venus ordonner de plus en plus, resserrer, éclaircir et aussi polir dans le détail l’œuvre du poëte, en simplifier peut-être les contours, en faire mieux saillir le dessin, en rendre surtout plus nettes les épreuves et le texte même, jusqu’à ce qu’enfin l’œuvre soit sortie telle que nous la possédons, aussi parfaite et divine qu’on la pouvait désirer, des mains du plus grand des critiques, de celui dont le nom est devenu comme celui d’Homère un immortel symbole de perfection et de louange, — des mains d’Aristarque. […] Cette vaste mer de poésie, encore épurée et de plus en plus assainie par le temps et la distance, ne laisse arriver à nous que son souffle fortifiant dans un murmure divin et majestueux. […] En un endroit, lorsqu’elle apprend brusquement à Mars la mort de son fils chéri Ascalaphus, le dieu terrible dans l’accès de sa douleur se met à frapper violemment ses deux florissantes cuisses de la paume de ses mains : le traducteur met simplement qu’il se frappe le corps de ses mains divines ; il oublie que cette forme expressive de désespoir s’est conservée fidèlement jusque chez les Grecs modernes.

231. (1874) Premiers lundis. Tome II « Jouffroy. Cours de philosophie moderne — II »

Alors l’homme élu. dans les entrailles duquel toutes les souffrances de l’humanité doivent retentir ; qui doit sentir en son sein s’amasser douloureusement un amour immense ; qui doit concevoir en sa tête féconde la forme nouvelle, plus large et plus heureuse, de l’association humaine ; cet homme vraiment divin, ce poëte, cet artiste, ce révélateur fils de Dieu, est déjà né ; que ce soit Moïse, Orphée, Jésus, Confucius ou Mahomet, il grandit, se développe miraculeusement, se perfectionne avant tous ses contemporains ; véritable fruit providentiel, il mûrit et se dore sous un soleil encore voilé pour d’autres, mais dont la chaleur lui arrive déjà, à lui, parce qu’il est au foyer de l’univers, et qu’il ne perd pas un seul des rayons de Dieu. […] Du moment que Dieu n’est plus conçu comme un être à part et hors du monde, du moment qu’il est inséparable de la nature et de l’humanité, et qu’il se manifeste uniquement en elles et par elles, du moment enfin que le mal cesse d’être un principe positif ennemi du bien, dès lors l’homme n’a plus peur de Satan, de même qu’il n’a plus besoin de médiateur pour entrer en rapport avec Dieu ; la communication est directe, immédiate ; il sent l’influence divine dans chacune de ses relations avec les hommes et avec les choses ; il ne s’imagine aucunement devoir recourir à des envoyés mystérieux, à des anges ; et les anges, les envoyés mystérieux, les démons ne lui viennent pas. […] La conception du révélateur est alors soumise par les disciples qui la recueillent, à un travail d’élaboration et de réalisation plus éclairé que dans les temps passés où l’instrument divin se sentait confirment sans se comprendre ; mais dans aucun cas une religion ne se fait toute seule ; un homme la conçoit et la produit ; la conception primitive ainsi produite se crée d’autres hommes qui la transforment encore et la réalisent ; les religions font les hommes et les hommes les font.

232. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre VIII. De l’éloquence » pp. 563-585

Ce que les anciens appelaient l’esprit divin, c’était sans doute la conscience de la vertu dans l’âme du juste, la puissance de la vérité réunie à l’éloquence du talent. […] Sans doute quand vous vous adressez à quelques individus réunis par le lien d’un intérêt commun, ou d’une crainte commune, aucun talent ne peut agir sur eux ; ils ont depuis longtemps tari dans leurs cœurs la source naturelle qui peut sortir du rocher même à la voix d’un prophète divin ; mais quand vous êtes entourés d’une multitude qui contient tous les éléments divers, les hommes impartiaux, les hommes sensibles, les hommes faibles qui se rassurent à côté des hommes forts ; si vous parlez à la nature humaine, elle vous répondra ; si vous savez donner cette commotion électrique dont l’être moral contient aussi le principe, ne craignez plus ni le sang-froid de l’insouciant, ni la moquerie du perfide, ni le calcul de l’égoïste, ni l’amour-propre de l’envieux ; toute cette multitude est à vous. Échappe-t-elle aux beautés de l’art tragique, aux sons divins d’une musique céleste, à l’enthousiasme des chants guerriers ?

233. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre II. L’homme »

» Et il envoie à la divine Amaranthe des vers un peu risqués, pleins d’insinuations vives et d’adorations mythologiques, Ces sourires et ces rires, cette galanterie caressante, ces douceurs, ce mélange d’esprit gracieux et de tendresses fugitives composent l’amour en France ; La Fontaine n’en a guère connu d’autre, et il y a passé le meilleur de son temps. […] L’illusion le prend, sa raison s’en va, les choses se transfigurent, une lumière divine se répand sur le monde, le vieux moqueur atteint l’accent, le ravissement de Platon et de Virgile. […] Nous mangeons, nous dormons, nous songeons à gagner un peu de considération et d’argent ; nous nous amusons platement, notre train de vie est tout mesquin, quand il n’est pas animal ; arrivés au terme, si nous repassions en esprit toutes nos journées, combien en trouverions-nous où nous ayons eu pendant une heure, pendant une minute, le sentiment du divin ?

234. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lamartine, Alphonse de (1790-1869) »

Leurs rêveries secrètes, leurs sentiments inexprimés, leurs voix intérieures trouvaient en lui un divin organe. […] Et aussitôt les hommes reconnaissent que cette merveille leur est née : un poète vraiment inspiré, un poète comme ceux des âges antiques, ce « quelque chose de léger, d’ailé et de divin » dont parle […] Il en écoutait l’harmonie qui, volontiers, lui paraissait divine ; il en notait les avis, sans efforts, tantôt comme « le roseau qui soupire », tantôt comme le chêne qui crie dans la tempête, allant du doute à la foi, de la mélancolie à la joie, ballotté entre tous les extrêmes, sans seulement s’en apercevoir.

235. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VIII. Jésus à Capharnahum. »

C’est avec ce premier noyau d’Église qu’il annonce hardiment, dès son retour en Galilée, la « bonne nouvelle du royaume de Dieu. » Ce royaume allait venir, et c’était lui, Jésus, qui était ce « Fils de l’homme » que Daniel en sa vision avait aperçu comme l’appariteur divin de la dernière et suprême révélation. Il faut se rappeler que, dans les idées juives, antipathiques à l’art et à la mythologie, la simple forme de l’homme avait une supériorité sur celle des chérubs et des animaux fantastiques que l’imagination du peuple, depuis qu’elle avait subi l’influence de l’Assyrie, supposait rangés autour de la divine majesté. […] Le lac, l’horizon, les arbustes, les fleurs, voilà donc tout ce qui reste du petit canton de trois ou quatre lieues où Jésus fonda son œuvre divine.

236. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIII. Dernière semaine de Jésus. »

Son âme fut triste jusqu’à la mort ; une angoisse terrible pesa sur lui ; mais la résignation à la volonté divine l’emporta 1063. […] Il est sûr, au moins, que sa nature divine reprit bientôt le dessus. […] On comprend que le ton exalté de Jean et sa préoccupation exclusive du rôle divin de Jésus aient effacé du récit les circonstances de faiblesse naturelle racontées par les synoptiques.

237. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XV, l’Orestie. — les Choéphores. »

Au déclin du polythéisme, Cicéron écrivait encore : « Nos ancêtres ont voulu que les hommes qui avaient quitté cette vie fussent comptés au nombre des dieux… Rendez aux dieux Mânes ce qui leur est dû ; ce sont des hommes qui ont quitté la vie, tenez-les pour des êtres divins. » Dans cette vie muette et voilée qu’il continuait sous la tombe, le mort gardait ses passions terrestres : des haines et des amours brûlaient sous sa cendre, une éruption pouvait toujours sortir de ce volcan mal éteint. […] Elle se faisait toute à tous ; divine envers les dieux, héroïque avec les héros, populaire avec les esclaves et les personnages subalternes. […] On rencontre un vers stercoraire au coin d’un chant de la Divine Comédie.

238. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — I. La Poësie en elle-même. » pp. 234-256

Pourquoi flétrir un art émané du ciel, & qui porte tous les caractères d’une inspiration divine ? […] Ils maintiennent la poësie assez riche de son propre fonds, assez abondante par elle-même pour fournir à l’imagination, à l’enthousiasme, à ce feu rapide & divin qui décèle le génie. […] Au sortir du sacrifice divin, il dicta les vers.

239. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Ce que tout le monde sait sur l’expression, et quelque chose que tout le monde ne sait pas » pp. 39-53

Je rajeunis de deux mille ans, pour vous exposer comment dans les temps anciens ces artistes influaient réciproquement les uns sur les autres, comment ils influaient sur la nature même, et lui donnaient une empreinte divine. […] Nous nous servons cependant encore des expressions de charmes divins, de beauté divine ; mais sans quelque reste de paganisme que l’habitude avec les anciens poètes entretient dans nos cerveaux poétiques, cela serait froid et vide de sens.

240. (1899) La parade littéraire (articles de La Plume, 1898-1899) pp. 300-117

Montfort se rapproche surtout — bien que plus pure, — de celle que dans le Banquet, le divin Platon attribue à Aristophane. […] Quand ceux-ci viennent de lire ensemble les mots divins que soupirent les poètes, leurs étreintes se font plus pures et leurs caresses plus ravissantes. […] Il faudra que nous en écrivions les divines prières. […] D’où naîtra-t-il l’enfant divin, l’homme nouveau, d’où sortiront les futures races ? […] Hostie délicieuse et divine surtout celle-ci, par qui l’homme se transforme et devient l’Homme.

241. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (6e partie) » pp. 129-176

Elle demanda pour toute grâce un prêtre fidèle à sa foi pour sceller sa mort du pardon divin. […] La justice divine n’a pas d’amnistie contre les lâches ! […] C’était la pensée égalitaire devenue homme, l’incarnation d’une impossibilité à laquelle tend l’idéal, mais à laquelle la nature résiste, et qui n’est pas par conséquent le plan divin des sociétés. […] Un historien n’a pas le droit de jeter ainsi son manteau sur les nudités hideuses de son siècle et de dire : « Tout est bien », quand le bien et le mal sont là sous ses yeux, demandant chacun qu’on lui fasse sur la terre la part que Dieu lui-même lui doit dans sa rétribution divine.

242. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les poètes décadents » pp. 63-99

« Nous postposerons, à la suite, des variantes contradictoires propres, comme il nous semble, pour atténuer les lacunes et masquer les effondrements, heureux si nous érigeâmes ce “Grande signum et insigne” qu’atteste, dans une prose épiphanique, le Missel de Cluny, si nous pûmes restituer aux Lettres humaines ces Reliquaires jusqu’alors épars : les Rythmes effeuillés du Divin Jeune Homme, pareils aux clous d’or que sème, en la frappant du pied, l’Hippogriphe conculcateur de l’Omnipotente Béotie. […] SONNET Il splendit sous le bleu·d’athlétiques natures Dont le roc a fourni les éléments altiers : Les fontes et l’airain de leurs musculatures Excèdent les parois des divins compotiers. […] Princes, régnons, doux et divins. […] Seuls régnons divins et pédants.

243. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XII. La littérature et la religion » pp. 294-312

Ce monarque divin, qui trône au ciel, est, comme le roi qui le représente sur terre, jaloux d’hommages et d’adorations. […] Bossuet, dans ses Oraisons funèbres, représente comme des ennemis du Tout-Puissant, comme des rebelles à l’autorité divine, tous ceux-qui en Angleterre ont ébranlé et renversé le trône des Stuarts, tous ceux qui en France ont, au temps de la Fronde, réclamé tumultueusement des libertés ; Dieu apparaît ainsi comme le garant de l’ordre social, comme le protecteur particulier de la royauté de droit divin. […] Chez toutes les sectes, quoiqu’elles aient gardé certains traits constants, il s’est produit des variations analogues dans la façon de concevoir les rapports de l’homme avec le divin et par suite avec la vie et l’art.

244. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — CHAPITRE XIV »

Son héros, Claude Ripert, n’est pas seulement un inventeur de génie, c’est aussi un juste doublé d’un stoïque, un cénobite de la science, aussi grand de coeur que d’esprit, le front illuminé d’un rayon divin. […] S’il sait les formules qui font vivre les personnages, en chair et en os, il ignore les mots enchantés qui évoquent les Esprits divins. […] La vengeance de Claude, au lieu d’être l’exécution de la justice divine et humaine, n’est plus que l’assassinat d’un maniaque. […] Elle s’indigne qu’on puisse ainsi arracher les enfants des bras de leurs mères pour les jeter aux premiers venus ; elle atteste la justice divine et humaine ; elle parle en pleurant, comme elle se parlerait à elle-même, si elle était seule.

245. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Introduction »

On dénonce sans cesse les libres penseurs comme portant atteinte à toutes les lois divines et humaines, comme menaçant les bases mêmes de la société, comme effaçant la distinction du bien et du mal au profit de l’anarchie et du triomphe des passions. […] Est-ce volontairement que les enfants nés dans les États-Unis du Sud apprenaient dès le plus bas âge que l’esclavage était une institution divine, nécessaire à l’ordre de la société et au bonheur des esclaves eux-mêmes ? […] Quelques poètes seuls ont quelquefois réclamé pour toutes les fantaisies de leur imagination cette sorte de droit divin, mais personne ne leur a donné raison ; c’était d’ailleurs dans le royaume des chimères et des rêves. […] Il est, dit-on, une limite où la pensée doit nécessairement s’arrêter : c’est lorsqu’elle rencontre la parole divine, l’autorité de la révélation.

246. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « V. M. Amédée Thierry » pp. 111-139

Puisque nous avons parlé de son Attila, rappelons que ce fut à propos de cet homme si effroyablement providentiel, de ce Marteau de Dieu sur le manche duquel l’historien, et surtout quand il est chrétien, doit montrer le serrement de la main divine, que nous avons soulevé contre M.  […] Pourquoi n’ose-t-il pas affirmer en lui le prophète et aime-t-il mieux (page 239) nous le montrer habile dans le sens moderne qu’inspiré dans le sens divin ?… Pourquoi voir dans le Mystique et dans le Saint « seulement un pauvre moine grand par le cœur et par son dévouement à la patrie », et parler, avec l’embarras du rationalisme, cette lâcheté de la raison, du génie héroïque presque divin du grand homme dont oh extrait doucement Dieu pour le faire humainement plus grand. Presque divin !

247. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXIV. »

Quel que soit le hasard ou le calcul qui réglait ce mélange, c’étaient là les semences de feu que, dans cette fournaise où il forgeait sa pensée, le poëte remuait incessamment et revêtait de mille formes, comme Virgile a peint ces ouvriers divins, lançant pêle-mêle, pour former la foudre, trois jets de pluie tordue, trois rayons du rapide Auster, et la colère avec les flammes qui la suivent : Tres imbris torti radios, tres alitis Austri Miscebant operi, flammisque sequacibus iras. […] « Jamais, s’écrie-t-il, je n’ai senti comme aujourd’hui mon abandon, ma solitude, mon lamentable manque d’amour. » Un art plus heureux du poëte, c’est de ne point s’arrêter aux seules grandeurs de la matière, tout étonnantes qu’elles soient, mais de remonter à la pensée divine. […] Élevée dans ce séjour colonial, sans école et sans théâtre, la jeune Gomez s’instruisit et s’inspira seule par la lecture de quelques poëtes espagnols et la vue de cet horizon du tropique, « le plus splendide pavillon, dit un poëte, que Dieu lui-même ait pu jeter sur les fêtes de son culte divin ». […] Élevez-le, tel que Constantin le fit resplendir sur son front impérial, en alliant les aigles de Rome au labarum divin.

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