la critique des abus fondamentaux de la société du xviie siècle : abus dans la noblesse, qui s’achète, et qui n’est plus qu’un moyen de ne pas payer l’impôt quand on est riche ; abus dans la religion, tournée en spectacle mondain ; abus dans la famille, où la vanité et l’intérêt ruinent l’institution du mariage, où les filles sont inhumainement sacrifiées à l’orgueil social, et cloîtrées sans vocation ; abus dans la justice, lente, coûteuse, injuste, etc. […] On retrouve, dans ses idées politiques et sociales, un curieux mélange du chrétien, du grand seigneur, et du lettré enivré des Grecs. […] Il a l’amour de l’humanité, le sentiment social et philanthropique ; il est bienfaisant et prêche la bienfaisance.
La conception anglaise atteste une générosité sociale différente. […] Tant de bienveillance comme une invite à parler sur ce que j’aime ; aussi la considérable appréhension d’une attente étrangère, me ramènent on ne sait quel ancien souhait maintes fois dénié par la solitude, quelque soir prodigieusement de me rendre compte à fond et haut de la crise idéale qui, autant qu’une autre, sociale, éprouve certains : ou, tout de suite, malgré ce qu’une telle question devant un auditoire voué aux élégances scripturales a de soudain, poursuivre : — Quelque chose comme les Lettres existe-t-il ; autre (une convention fut, aux époques classiques, cela) que l’affinement, vers leur expression burinée, des notions, en tout domaine. […] Le titre, proposé à l’issue d’une causerie, jadis, devant le messager oxonien, indiqua Music and Letters, moitié de sujet, intacte : sa contrepartie sociale omise.
Aucun problème social n’est abordable de face ; du moment où une solution paraît claire et facile, il faut s’en défier. […] Elle ne signifie qu’en tant que révolution sociale. […] On pourrait employer le fouet pour les forcer à bâtir de grands monuments sociaux, des pyramides, etc. ; il serait permis d’être tyran pour procurer le triomphe de l’esprit.
On se raille de ceux qui s’enquièrent encore de la réalité des choses, et qui, pour se former une opinion sur la morale, la religion, les questions sociales et philosophiques, ont la bonhomie de réfléchir sur les raisons objectives, au lieu de s’adresser au critérium plus facile des intérêts et du bon ton 191. […] Des générations jeunes et vives et parfois des races nouvelles viennent sans cesse lui donner de la sève, et d’ailleurs ce mal, par sa nature même, ne saurait durer plus de quelques années comme mal social. […] Que sont la Guerre de la succession d’Autriche, la Guerre de sept ans, le Pacte de famille, comparés comme événements au Contrat social ou à l’Esprit des Lois ?
Il y mêle des considérations politiques qui sont toutes dans le sens de l’ordre et de la défense sociale : mais, même quand il serait plus sobre de ce genre de discussions, le seul tableau des faits, la suite même des textes, les pièces à l’appui qu’il produit avec étendue, fournissent une base de jugement irréfragable, et tout lecteur, en se laissant conduire par le biographe, peut statuer à son tour en connaissance de cause et en sûreté de conscience. […] La pensée d’ailleurs est juste, et certes, s’il y avait moyen d’établir la proportion entre le degré de liberté qui peut être accordé par les lois et le degré de vertu qu’indiquent les mœurs, on aurait résolu le problème social ; mais les hommes sont peu bons juges dans cet examen d’eux-mêmes, et Saint-Just, tout le premier, commence par se trouver une très grande dose de vertu ; il se pose dès l’abord en sage : N’attendez de moi, dit-il, ni flatterie, ni satire ; j’ai dit ce que j’ai pensé de bonne foi. […] On a recueilli ses Fragments et pensées sur les institutions républicaines, trouvés dans ses papiers : en ce qui est de l’éducation, du mariage, de la pénalité, des fêtes et de toute l’organisation sociale, c’est une parodie sérieuse de la République de Platon, des lois de Lycurgue ou de celles de Minos.
Et même lorsque nos auteurs dramatiques de la nouvelle génération, avec une générosité d’intention véritable, portent au théâtre certaines questions du grand problème social, n’est-il pas évident qu’ils les traitent pour l’instruction de leurs égaux, des philosophes, des économistes ou des gens du monde, et, qu’à de rares exceptions près, ils voient plutôt l’autorité à réformer que l’ouvrier lui-même à former ? […] Le nom de celui qui l’émettait pourra faire sourire, car le spirituel fantaisiste qui eut ses premiers succès au Chat-Noir, avant de devenir l’un de nos hommes de théâtre les plus modernes et les plus mondains, ne passe pas encore pour un auteur avant tout préoccupé du problème social. […] Maurice Donnay, interrogé sur ses projets de demain, répondait : « Toutes les questions se réduisent à la question sociale.
Les hommes n’ayant encore que des idées très particulières, et ne pouvant comprendre ce que c’est que le bien commun, la Providence sut, au moyen de cette forme de gouvernement, les conduire à s’unir à leur patrie, dans le but de conserver un objet d’intérêt privé, aussi important pour eux que leur monarchie domestique ; de cette manière, sans aucun dessein, ils s’accordèrent dans cette généralité du bien social, qu’on appelle république. Maintenant recourons à ces preuves divines dont on a parlé dans le chapitre de la Méthode ; examinons combien sont naturels et simples les moyens par lesquels la Providence a dirigé la marche de l’humanité, rapprochons-en le nombre infini des phénomènes qui se rapportent aux quatre causes dans lesquelles nous verrons partout les éléments du monde social (les religions, les mariages, les asiles et la première loi agraire), et cherchons ensuite entre tous les cas humainement possibles, si des choses si nombreuses et si variées ont pu avoir des origines plus simples et plus naturelles. […] Ignorance complète du luxe, des commodités sociales, des doux loisirs.
Le règne de Louis XIV avait trop duré : la dernière partie de ce règne produisit un bon nombre d’esprits, très sensibles aux défauts, aux abus et aux excès d’un si long régime, qui passèrent à une politique tout opposée et rêvèrent une amélioration sociale moyennant la paix, par de bonnes lois, par des réformes dans l’État et par toutes sortes de procédés et d’ingrédients philantrophiques. […] La Bruyère fut surtout frappé chez le jeune abbé du manque absolu de tact, de la confiance à se mettre en avant soi et ses idées, de la distraction sur tout le reste, et de ce parfait oubli des nuances sociales.
Peau-d’Ane, en un mot, est un mythe social, dont la pensée se produit dans les chants qui terminent chaque journée. […] Son espérance blessée, mais patiente, s’est réfugiée aux perspectives d’un avenir social, terre promise que tant de voix de poëtes aiment à saluer.
Les usages communs de la vie étaient ennoblis par des pratiques religieuses ; notre luxe commode, nos machines combinées par les sciences, nos relations sociales simplifiées par le commerce, ne peuvent se peindre en vers d’un genre élevé. […] L’esclavage, cet abominable fléau de l’espèce humaine, en augmentant la force des distinctions sociales, faisait remarquer davantage encore la hauteur des grands caractères.
Si vous confondez par une égalité grossière et jalouse ce que distingue l’inégalité naturelle, votre état social ressemble à la mêlée d’un combat dans lequel l’on n’entend plus que des cris de guerre ou de fureur. […] Ou dans un autre sens : Le temps des abstractions est passé ; l’ordre social est raffermi sur ses bases, etc.
Enfin, pour que tout soit net et clair, pour que les quatre ou cinq grands principes sociaux que la révolution française a coulés en bronze restent intacts sur leurs piédestaux de granit, pour qu’on ne puisse attaquer sournoisement le droit commun des Français avec ces quarante mille vieilles armes ébréchées que la rouille et la désuétude dévorent dans l’arsenal de nos lois, la charte, dans un dernier article, abolit expressément tout ce qui, dans les lois antérieures, serait contraire à son texte et à son esprit. […] Vraiment, le pouvoir qui s’attaque à nous n’aura pas gagné grand’chose à ce que nous, hommes d’art, nous quittions notre tâche consciencieuse, tranquille, sincère, profonde, notre tâche sainte, notre tâche du passé et de l’avenir, pour aller nous mêler, indignes, offensés et sévères, à cet auditoire irrévérent et railleur qui, depuis quinze ans, regarde passer, avec des huées et des sifflets, quelques pauvres diables de gâcheurs politiques, lesquels s’imaginent qu’ils bâtissent un édifice social parce qu’ils vont tous les jours à grand’peine, suant et soufflant, brouetter des tas de projets de loi des Tuileries au Palais-Bourbon et du Palais-Bourbon au Luxembourg !
Pour être vrai, il faut reconnaître que ce n’est point par la métaphysique, c’est par la philosophie sociale et politique que le principe de la personnalité est entré dans la pensée moderne. […] Cette distinction fut la conquête de la philosophie sociale du xviiie siècle, de Locke, de Voltaire, de Montesquieu, de Rousseau et de Turgot.
Pour bien entrer dans le sens intime de sa satire, il est nécessaire de considérer l’époque de révolution sociale où il écrivait. […] Non, quand même nous ne saurions pas que Vollichon est le procureur Rollet, que Charroselles est Charles Sorel, et la plaideuse Collantine Mme de Cressé, le roman de Furetière n’en serait pas pour cela dépourvu de charme et d’intérêt ; il y resterait, indépendamment du mérite aléatoire de sa caricature, l’observation des mœurs intimes d’une époque importante et curieuse comme toute époque de transition ; il resterait la lutte du vieil esprit frondeur, égoïste et sournois des corporations, avec les mœurs d’une société plus polie et plus cordiale ; il resterait la fusion de l’élément bourgeois et de la noblesse, s’effectuant par l’ambition de l’une et par la corruption de l’autre ; il resterait enfin de précieux enseignements pour l’histoire judiciaire et pour l’histoire littéraire, au moment où, en raison de révolutions inattendues, le métier d’hommes de lettres, le métier d’avocat, allaient monter au premier rang des fonctions sociales.
C’est alors qu’on sent le prix d’une existence simple et dégagée de sensualités ; c’est alors qu’on trouve, dans le calme d’un cœur pur et dans l’énergie d’un corps sain, la récompense de la modération et des sacrifices de la jeunesse ; c’est alors enfin qu’on reconnaît combien la morale serait bonne encore quand même elle n’aurait pas de sanction dans une autre vie. » — « Jeunesse sensuelle, dit-il aussi, vieillesse douloureuse. » — « Un vieillard sans dignité est comme une femme sans pudeur. » Lorsqu’il en est particulièrement aux qualités et aux passions sociales, M. de Latena a de bonnes analyses et des définitions judicieuses.
Tout cela est encore histoire des lettres, et le serait strictement resté malgré les incursions médicales les plus avancées6, si les nouveaux savants, fiers du titre arrogé, n’en avaient immédiatement tiré les conclusions suivantes : « Aujourd’hui que le roman s’élargit et grandit, qu’il commence à être la grande forme sérieuse, passionnée, vivante de l’étude littéraire et de l’enquête sociale, qu’il devient par l’analyse et la recherche psychologique l’histoire morale contemporaine, aujourd’hui que le roman s’est imposé les études et les devoirs de la science, il peut en revendiquer les libertés et les franchises » 7, et treize ans plus tard, Edmond de Goncourt insistait encore : « Ces libertés et ces franchises, je viens seul, et une dernière fois peut-être, les réclamer hautement et bravement pour ce nouveau livre écrit dans le même sentiment de curiosité intellectuelle et de commisération pour, les misères humaines » 8.
Représentation des mœurs sociales dans le cercle de la vie privée249, le drame comique a pour condition l’observation250.
Roumanille obtint ce succès du premier coup ; et comme, en toute occasion, il continua de chanter, ici un conte joyeux, là une élégie, comme il joignait d’ailleurs à cette œuvre de rénovation poétique un apostolat social et défendait les vieilles mœurs au milieu des fièvres de 1848, il devint bientôt le chef d’un travail d’esprit qui fut un véritable événement, pour la Provence, durant plusieurs années.
Ils reconnaissent que la justice est dans le camp des Alliés et décident unanimement de servir la France au nom de la République sociale.
Magistrat ou avocat, dans l’une comme dans l’autre occasion, chacun d’eux prêtait sa voix à des intérêts plus généraux que lui-même, et dont on peut dire que l’importance sociale se subordonnait, effaçait, absorbait la personnalité du défenseur ou du procureur général. […] Je vois d’une part l’intérêt social, et d’autre part l’intérêt de la défense ; je sais qu’ils se limitent l’un l’autre, et par leur conflit même ; cependant, et tour à tour, on essaye de me persuader qu’ils doivent l’emporter l’un sur l’autre. […] La réputation d’un avocat dépend du nombre de grands ou de petits coupables qu’il a ôtés des prisons pour les restituer à la circulation sociale. […] Si elle a une mission sociale, c’est de nous enseigner les moyens d’entretenir la paix parmi les hommes, et, selon le terme consacré, c’est de nous élever, par un peu de « désappropriation de nous-mêmes », au-dessus des motifs habituels de nos disputes et de nos querelles. […] Tandis qu’en effet la philosophie de Voltaire, celle de Montesquieu, de Rousseau, de Diderot, sont essentiellement des philosophies sociales, si l’on peut ainsi dire, des philosophies dont le progrès ou la réformation de l’institution sociale est le commencement et la fin, le philosophie de Buffon, prenant son origine dans celle même des mondes, et prolongeant ses suites au-delà de l’existence de l’espèce, a ouvert l’infini à la pensée humaine.
Au lieu de « traîner jusqu’au mariage une jeunesse inutile », elles apportent leur quote-part au progrès social. […] On sait combien George Eliot était attentive à toutes les crises politiques, religieuses, sociales. […] Le jour où elles désespèrent de l’atteindre, elles se jettent dans les sociétés de tempérance ou dans les entreprises de réforme sociale. […] La question sociale lui apparut, simplifiée. […] ce que nous appelons, faute d’un mot plus précis, la question sociale.