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762. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome I pp. 5-537

De là cette infatigable activité de la race humaine à multiplier les sciences qui étendent ses rapports avec tout l’univers. […] Ainsi l’attrait des beaux-arts et des sciences tient pareillement à notre désir de nous bien connaître et de jouir de nous-mêmes. […] La littérature nous sert d’interprète universel : ce privilège la rend égale en nécessité aux plus hautes sciences, et supérieure en agrément aux beaux-arts. […] Les sciences ont une borne qui les arrête : c’est celle de la raison humaine. […] Elle est la source de l’instruction, de la félicité, de la gloire dont s’enorgueillirent les mémorables nations du monde ; et seule enfin, elle développe, ainsi que je l’ai dit, la plus vaste, la plus mystérieuse et la plus profonde de nos sciences, la science du cœur de l’homme.

763. (1894) La vie et les livres. Première série pp. -348

« C’était la statistique faite homme… La géographie et la statistique étaient ses sciences favorites : il en avait la passion ; il les représentait l’une et l’autre à l’Institut, comme membre de deux Académies, l’Académie des sciences et l’Académie des sciences morales et politiques. […] Trop de science l’eût gêné dans ses raisonnements. […] Brindes, où mourut Virgile, a été une ville de gaie science et d’ingénieuse allégresse. […] L’état des sciences historiques est essentiellement variable. […] Mais cette science est de bon aloi ; on lit ces catalogues avec sécurité.

764. (1913) Les livres du Temps. Première série pp. -406

En dehors des sciences positives, toutes les opinions sont indéfiniment livrées à la controverse. […] Dans Bouvard et Pécuchet, Flaubert raille cette fausse notion de la science, non la science elle-même. […] Il dédaignait l’étalage d’une vaine science et faisait peu de cas des pédants. […] On ignorait avec délices les sciences et les langues étrangères. […] Anatole France n’en demeurera pas moins un monument de science historique.

765. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre huitième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Victor Hugo »

La philosophie doit être une énergie ; elle doit avoir pour effort et pour effet d’améliorer l’homme… Faire fraterniser chez les hommes la conscience et la science, les rendre justes par cette confrontation mystérieuse, telle est la fonction de la philosophie réelle. […] La science ne peut nous apprendre d’une façon certaine si le fond des choses est le bien, si l’espérance a raison ou tort ; d’autre part, notre conscience nous commande de tendre au bien et d’espérer : de là la nécessité d’un libre « choix » entre deux thèses spéculativement incertaines. […] La pure science en effet, alors qu’elle paraissait éclairer les choses, n’a fait que les assombrir pour les yeux de l’âme ; et cependant elle est le premier et nécessaire degré de toute ascension vers l’infini : Vous savez bien que l’âme affronte     Ce noir degré. […] Car la science en l’homme arrive la première, Puis vient la liberté216. […] Hugo pour faire de la critique qui soit à la hauteur de la science.

766. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre troisième. Les sensations — Chapitre II. Les sensations totales de la vue, de l’odorat, du goût, du toucher et leurs éléments » pp. 189-236

Ici s’arrête la science positive ; nous ne pouvons remonter par l’expérience au-delà des trois sensations élémentaires de couleur. […] Nous voyons, du premier coup et par l’expérience ordinaire, que tel corps excite en nous telle sensation d’odeur ou de saveur, que tel corps excite en nous la sensation de bleu ou de rouge ; mais l’un et l’autre n’éveillent la sensation que par des intermédiaires ; il a fallu faire l’optique pour trouver que le second a comme intermédiaire des ondulations éthérées de telle vitesse et de telle longueur ; il faudrait aussi avoir recours à une science toute faite pour trouver l’intermédiaire par lequel agit le premier. — Cherchons pourtant cet événement dernier et immédiat à la suite directe duquel le nerf olfactif ou les nerfs gustatifs entrent en action. […] Composés d’éléments semblables, ils constituent des types ou rhythmes dissemblables ; indéfinissables pour nous dans l’état présent de la science, ils sont, comme tout déplacement, définissables en eux-mêmes par la vitesse, la grandeur et l’ordre de leurs éléments ; et nous pouvons admettre que, selon l’ordre de leurs éléments, ils éveillent en nous tantôt la sensation de température, tantôt la sensation de contact ou de pression ; qu’au minimum de vitesse et de grandeur, ils éveillent en nous les sensations faibles de pression, de contact et de température ; qu’au maximum de vitesse et de grandeur, ils éveillent en nous la sensation de douleur. […] Une particule avait telle situation par rapport aux autres ; cette situation change, rien de plus ; au bout des toutes les sciences qui traitent des corps, on n’aperçoit jamais que la mécanique ; en sorte que les diverses actions nerveuses qui provoquent les diverses sensations ne peuvent être conçues que comme des systèmes de mouvements : ainsi toutes ces actions, diverses en quantité, sont les mêmes en qualité […] « Cette hypothèse d’Young, dit-il, donne une vue d’ensemble et une explication extraordinairement claire et simple de tous les phénomènes qui appartiennent à la science physiologique des couleurs. » 79.

767. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Gustave Flaubert. Étude analytique » pp. 2-68

Sa science des causes qui produisent les grands traits du caractère est merveilleuse, comme le montrent les antécédents parfaitement calculés d’Emma et de Charles Bovary, la vague adolescence de Frédéric Moreau. […] Cet art réaliste étayé de faits et d’où l’imagination est presqu’exclue, atteint, par là, selon le vœu d’une de ses lettres « à la majeste de la loi et à la précision de la science ». […] Elle est, comme un livre de science, un recueil d’observations  ou, comme un livre d’histoire, un recueil de traditions, bien _ différente de tous les romans d’idéalistes que composent une série d’effusions au public à propos de motifs ordinaires ou de faits clairsemés. […] Dans ce livre, qui est l’œuvre suprême du style, des procédés fragmentaires, de la science historique, de l’amour du beau, de la philosophie de Flaubert, celui-ci a signifié toutes les passions, les cultes et les spéculations de l’humanité. […] En fonction de cette science, il existait dans l’intelligence de Flaubert d’une part une série de données des sens et une sérié de mots qui s’accordaient avec elles et les exprimaient naturellement ; de l’autre, une série de formes verbales acquises, et développées, auxquelles correspondaient non des données sensorielles, mais de simples prolongements idéaux et qui tendaient pourtant comme les autres vocables, à être articulées.

768. (1856) Cours familier de littérature. I « IIIe entretien. Philosophie et littérature de l’Inde primitive » pp. 161-239

Le mot littérature, dans sa signification la plus universelle, comprend donc la religion, la morale, la philosophie, la législation, la politique, l’histoire, la science, l’éloquence, la poésie, c’est-à-dire tout ce qui sanctifie, tout ce qui civilise, tout ce qui enseigne, tout ce qui gouverne, tout ce qui perpétue, tout ce qui charme le genre humain. […] C’est ce qu’on appelle la théologie, la religion, le sacerdoce, la morale, la philosophie d’un peuple : La théologie, science de Dieu et de l’âme, la première et la dernière de toutes les sciences, celle qui commence tout, celle qui finit tout, celle qui contient tout. […] Nous aimerions mieux rêver, imaginer et croire que l’homme fut plus doué et plus accompli dans sa jeunesse que dans sa caducité ; nous aimerions mieux rêver, imaginer et croire que l’homme, encore tout chaud sorti de la main de Dieu d’où il venait de tomber, encore tout imprégné des rayons de son aurore, instruit par la révélation de ses instincts intellectuels, pourvu d’une science innée plus nécessaire et plus vaste, d’un langage plus expressif du vrai sens des choses, vivait dans la plénitude de vie, de beauté, de vertu, de bonheur, Apollon de la nature devant lequel toute autre créature s’inclinait d’admiration et d’amour. […] XI Ces races en passant nous ont laissé, soit dans leurs livres, soit dans leurs monuments maintenant ruinés, quelques vestiges de leur science et de leur force, qui attestent au moins l’égalité avec nous. […] Il ne connaît l’éternité, l’espace, le temps, la science, le bonheur que de nom.

769. (1868) Curiosités esthétiques « I. Salon de 1845 » pp. 1-76

Cette couleur est d’une science incomparable, il n’y a pas une seule faute, — et, néanmoins, ce ne sont que tours de force — tours de forces invisibles à l’œil inattentif, car l’harmonie est sourde et profonde ; la couleur, loin de perdre son originalité cruelle dans cette science nouvelle et plus complète, est toujours sanguinaire et terrible. — Cette pondération du vert et du rouge plaît à notre âme. […] Delacroix avait progressé dans la science de l’harmonie. — En effet, déploya-t-on jamais en aucun temps une plus grande coquetterie musicale ? […] Cela prouve tout simplement que c’est un artiste fort adroit et qui déploie une science très-apprise dans sa spécialité de vieilleries gothiques ou religieuses, un talent très-roué et très-décoratif. […] Victor Robert Voilà un tableau qui a eu du guignon ; — il a été suffisamment blagué par les savants du feuilleton, et nous croyons qu’il est temps de redresser les torts. — Aussi quelle singulière idée que de montrer à ces messieurs la religion, la philosophie, les sciences et les arts éclairant l’Europe, et de représenter chaque peuple de l’Europe par une figure qui occupe dans le tableau sa place géographique ! […] Étex Ô sculpteur, qui fîtes quelquefois de bonnes statues, vous ignorez donc qu’il y a une grande différence entre dessiner sur une toile et modeler avec de la terre, — et que la couleur est une science mélodieuse dont la triture du marbre n’enseigne pas les secrets ?

770. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XVIII. »

Aussi, de bonne heure, la science s’en occupa comme l’instinct populaire. […] C’est Grégoire qui le dit, celui qu’avait nourri la terre de Cappadoce et qui s’est fortifié de toute science pour le Christ. » Dans ce regret, dans cet adieu, dans cette joie prétendue, dans cet espoir d’oubli, vous sentez, n’est-ce pas, les dernières passions d’une âme chrétienne mais humaine ? […] Moins théologien, moins éloquent que saint Grégoire, Synésius a pourtant de grands traits de similitude avec lui, la même science et le même amour des lettres profanes, le même goût de l’élégance et de l’harmonie, et, ce qui vaut mieux, la même élévation de cœur, la même fierté sensible et délicate, à travers tout l’effort de l’humilité chrétienne. […] Reste pour nous le spectacle même de l’état des âmes décelé par cette poésie : la ferveur dans une foi confuse encore, le jeu de la fantaisie dans l’abstraction même ; quelque chose enfin de semblable aux rêves de Proclus, ramenant les vieilles fables du polythéisme vers une sorte d’allégorie morale, vers un mystique amour de la science et de la vertu. […] « Lorsque, du sein d’une mortelle, tu jaillis sur la terre, la science des mages, devant une étoile levée dans les cieux, s’arrêta stupéfaite, se demandant quel était ce nouveau-né, quel serait ce Dieu inconnu : un Dieu, un mort ou un roi ?

771. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre V. Le Séminaire Saint-Sulpice (1882) »

L’érudition était énorme, la science des langues, très solide. […] La science qu’il avait de l’erreur était toute spéculative, une cloison étanche empêchait la moindre infiltration des idées modernes de se faire dans le sanctuaire réservé de son cœur, où brûlait, à côté du pétrole, la petite lampe inextinguible d’une piété tendre et absolument souveraine. […] J’avais, en effet, pour les sciences ecclésiastiques un goût particulier. […] Si Dieu lui donne encore dix ans de vie, ce qui malheureusement semble douteux, nous pourrons l’opposer à ce que la science critique de l’Allemagne a de plus colossal. […] La méthode des sciences physiques et naturelles, qui, à Issy, m’était apparue comme la loi du vrai, faisait que je me défiais de tout système.

772. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « M. Boissonade. »

Les auteurs chez qui le style et la langue sont admirables, je les aime, je les lis, je les relis avec enthousiasme, je tâche d’entrer dans le sanctuaire de leur pensée et d’en concevoir toutes les beautés ; mais je ne les éditerai jamais, parce que je ne me crois pas assez de pénétration ni assez de science pour suffire à une telle entreprise. […] On est tenté de s’écrier d’impatience en le lisant : Sparge, marite, nuces… Homme aimable, vous vous amusez à la bagatelle, et les grandes batailles de la science se livrent sans vous. […] Un jour, dans mon respect pour sa science et pour ses condescendances d’amabilité, il m’était arrivé de l’appeler savant et vénérable. […] Mérimée ces vers d’Orphise à Clitandre, dans la Coquette corrigée : Mon amitié pour vous ne saurait s’augmenter, Clitandre ; j’aime en vous cet heureux caractère, Qui vous rend agréable à la fois et sévère, Cet esprit dont le ton plaît à tous les états, Que la science éclaire et ne surcharge pas, Qui badine avec goût et raisonne avec grâce. » C’est flatteur et c’est vrai ; mais assurément personne autre n’eût jamais eu l’idée d’aller demander au poète Lanoue un portrait de Mérimée.

773. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « M. MIGNET. » pp. 225-256

Ce n’est certes pas de nos jours que Voltaire aurait droit de dire : « La France fourmille d’historiens et manque d’écrivains72. » Car, si la France n’a jamais été plus fertile en historiens dignes de ce nom par la science et par la pensée, plusieurs se trouvent être à la fois des écrivains éminents. […] Et, en général, on voit M.Mignet s’appliquer constamment à tirer l’histoire de la région des doutes et des accidents, de la sphère du hasard, et viser à l’élever jusqu’à la certitude d’une science. […] Les deux volumes de Notices et Mémoires historiques (1843) qui contiennent le tribut payé par M.Mignet à titre de membre et d’organe de deux académies, et particulièrement de celle des Sciences morales et politiques, demanderaient plus d’espace pour l’examen que nous ne pouvons leur en donner ici. […] C’est ainsi que M.Mignet a eu tour à tour à apprécier des philosophes, des hommes d’État, des jurisconsultes, des médecins, des économistes : il n’a failli à aucun de ces emplois, et on l’a vu porter dans tous la même conscience d’études, une vue équitable et supérieure, et une grande science d’expression ; mais il nous semble n’avoir jamais mieux rencontré que dans les portraits qui se détachent par la hauteur et l’unité de la physionomie, ou dans ceux qui se lient naturellement à de grands exposés de systèmes, par exemple dans ceux de Sieyès et de Broussais.

774. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre IV. Construction de la société future »

Depuis cent cinquante ans, il règne dans la littérature, dans la philosophie, dans la science, dans l’éducation, dans la conversation, en vertu de la tradition, de l’habitude et du bon goût. […] Une filiation exacte et continue rattache à nos perceptions les plus simples les sciences les plus compliquées, et, du plus bas degré au plus élevé, on peut poser une échelle ; quand l’écolier s’arrête en chemin, c’est que nous avons laissé trop d’intervalle entre deux échelons ; n’omettons aucun intermédiaire, et il montera jusqu’au sommet  À cette haute idée des facultés de l’homme s’ajoute une idée non moins haute de son cœur. […] « Les méthodes des sciences mathématiques, appliquées à de nouveaux objets, ont ouvert des routes nouvelles aux sciences politiques et morales. » — Cf. dans Rousseau, Contrat social , le calcul mathématique de la fraction de souveraineté qui revient à chacun.

775. (1890) L’avenir de la science « XVIII »

XVIII La fin de l’humanité, et par conséquent le but que doit se proposer la politique, c’est de réaliser la plus haute culture humaine possible, c’est-à-dire la plus parfaite religion, par la science, la philosophie, l’art, la morale, en un mot par toutes les façons d’atteindre l’idéal qui sont de la nature de l’homme. […] Rien ne cause plus de malentendus dans les sciences morales que l’usage absolu des noms par lesquels on désigne les systèmes. […] Il n’y a pas en effet de tradition pour le bonheur, et il y a tradition pour la science. […] Je me berce parfois de l’espoir que les machines et les progrès de la science appliquée compenseront un jour ce que l’humanité aura perdu d’aptitude au sacrifice par le progrès de la réflexion.

776. (1856) Les lettres et l’homme de lettres au XIXe siècle pp. -30

Toutes les sciences, tous les arts sont de son domaine : il a bien ses préférences, ses prédilections ; mais il n’exclut, il ne méprise rien. […] Appuyée sur la science, servie par le commerce et les institutions de crédit, elle a ses princes qu’elle couronne d’un diadème d’or ; grands propriétaires, puissants banquiers, suzerains d’ateliers et de comptoirs, plus riches que des rois et plus indépendants. […] Elle renferme dans son sein toute vérité connue de l’homme ; toutes les découvertes de la science, tous les faits constatés par l’observation des sens ou par l’instinct du cœur, tous les axiomes de la raison et de la morale sont les dogmes bienfaisants qu’elle nous propose. […] Le 27 août 1855, l’Académie des sciences de Paris a reçu, de la Société des naturalistes de Moscou, une invitation à la séance solennelle qui doit se tenir le 23 décembre prochain, jour anniversaire de la fondation de leur société.

777. (1868) Curiosités esthétiques « IV. Exposition universelle 1855 — Beaux-arts » pp. 211-244

L’insensé doctrinaire du Beau déraisonnerait, sans doute ; enfermé dans l’aveuglante forteresse de son système, il blasphémerait la vie et la nature, et son fanatisme grec, italien ou parisien, lui persuaderait de défendre à ce peuple insolent de jouir, de rêver ou de penser par d’autres procédés que les siens propres ; — science barbouillée d’encre, goût bâtard, plus barbare que les barbares, qui a oublié la couleur du ciel, la forme du végétal, le mouvement et l’odeur de l’animalité, et dont les doigts crispés, paralysés par la plume, ne peuvent plus courir avec agilité sur l’immense clavier des correspondances ! […] Et toujours un produit spontané, inattendu, de la vitalité universelle venait donner un démenti à ma science enfantine et vieillotte, fille déplorable de l’utopie. […] J’irai encore plus loin, n’en déplaise aux sophistes trop fiers qui ont pris leur science dans les livres, et, quelque délicate et difficile à exprimer que soit mon idée, je ne désespère pas d’y réussir. […] Je n’ai ni le temps, ni la science suffisante peut-être, pour rechercher quelles sont les lois qui déplacent la vitalité artistique, et pourquoi Dieu dépouille les nations quelquefois pour un temps, quelquefois pour toujours ; je me contente de constater un fait très-fréquent dans l’histoire.

778. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre I. La conscience et la vie »

Elle progressera comme la science positive. […] Pour savoir de science certaine qu’un être est conscient, il faudrait pénétrer en lui, coïncider avec lui, être lui. […] Dans des conditions déterminées, la matière se comporte de façon déterminée, rien de ce qu’elle fait n’est imprévisible : si notre science était complète et notre puissance de calculer infinie, nous saurions par avance tout ce qui se passera dans l’univers matériel inorganisé, dans sa masse et dans ses éléments, comme nous prévoyons une éclipse de soleil ou de lune. […] La science a d’ailleurs montré par quels effets se traduit, tout le long de l’évolution de la vie, la nécessité pour les êtres vivants de s’adapter aux conditions qui leur sont faites.

779. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — I. » pp. 446-462

Cette réflexion est la première qui s’offre quand il s’agit de l’écrivain dont je voudrais aujourd’hui donner une juste idée ; Ramond, mort le 14 mai 1827, membre de l’Académie des sciences, objet d’un éloge historique de Cuvier, apprécié de tous les savants comme historien et géographe des montagnes, mais non assez estimé et prisé des littérateurs comme peintre et comme ayant heureusement marié les couleurs de Buffon et de Rousseau aux descriptions précises des De Luc et des Saussure. […] Les langues, les sciences, le droit public, la médecine, entrèrent pour beaucoup et presque à la fois dans cette éducation que favorisait la plus heureuse intelligence. […] Dix années pourtant devaient s’écouler encore avant que Saussure, après Balmat et Paccard, parvînt à atteindre la cime du Mont-Blanc (3 août 1787) ; mais de tous côtés le signal était donné, et il n’y avait plus de trêve dans cette conquête entreprise sur tous les points et ouverte désormais à la science comme aux pinceaux.

780. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — I » pp. 417-434

Bonnet essaya peu à peu de le ramener à la réalité, et il y réussit en partie ; il essaya de le convaincre que la liberté n’est pas une pure sensation, une exaltation vague ; qu’elle est une véritable science, et que le citoyen qui veut s’en rendre digne a tout autant de devoirs que de droits. […] Cela n’est pas aisé, je le sais ; mais si l’éducation de l’enfance est une science que les siècles n’épuisent pas, celle de l’adolescence, qu’à peine on a ébauchée, est plus difficile encore. […] La ville de Cambridge, avec ses collèges solitaires, n’était qu’une réunion de couvents, où les mathématiques et quelques sciences ont pris la forme et le costume de la théologie du Moyen Âge.

781. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Œuvres de Maurice de Guérin, publiées par M. Trébutien — I » pp. 1-17

Il y a peu à gagner pour la science, mais beaucoup pour la poésie, pour l’élévation de l’âme et la contemplation de la nature. […] Brizeux a la science du vers, et s’il fait trop peu courir sa source, si, pour de bonnes raisons, il ne la déchaîne jamais, s’il n’a jamais ce que le généreux poète Lucrèce appelle le « magnum immissis certamen habenis », la charge à fond et à bride abattue, du moins il ramène toujours les plis de sa ceinture, il a des manières habiles et charmantes de l’agrafer. […] Il y avait en ce moment à La Chênaie, ou il allait y venir, quelques hommes dont la rencontre et l’entretien donnaient de pures joies, l’abbé Gerbet, esprit doux et d’une aménité tendre, l’abbé de Cazalès, cœur affectueux et savant dans les voies intérieures ; — d’autres noms, dont quelques-uns ont marqué depuis en des sciences diverses, Eugène Boré, Frédéric de La Provostaie : c’était toute une pieuse et docte tribu.

782. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

La science lui est venue, par grâce infuse, avec la vertu. […] Alors que signifie ce mépris subit que Clotilde fait de lui à certain jour, comme s’il était indigne d’elle, comme si, « avec toute sa science, il n’avait ni cœur, ni âme, ni esprit…, rien de ce qui peut relever à ses yeux une femme qui tombe, lui voiler sa faute, lui ennoblir sa faiblesse, etc., etc. ? » On n’a jamais vu de femme, dans le cas de Clotilde, adresser de telles paroles à un homme distingué et de cet ordre, à quelque illustre membre de l’Académie des sciences à qui elle aurait tant fait que de se donner.

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