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1725. (1896) Les idées en marche pp. 1-385

Il cherche voluptueusement sa propre perte. […] Elle les a soumis à son propre rythme, inquiet, fiévreux, légèrement maniéré. […] Il semble que notre cerveau ait un rythme propre auquel le rythme des vers coïncide. […] Comment surtout analyse-t-il tant ses sensations propres ? […] L’aveugle écoute, en sueur sur son lit, sa propre extase rythmée par ce verbe triomphant.

1726. (1896) Le livre des masques

Il doit se créer sa propre esthétique, — et nous devrons admettre autant d’esthétiques qu’il y a d’esprits originaux et les juger d’après ce qu’elles sont et non d’après ce qu’elles ne sont pas. […] La gravité n’est pas nécessaire à l’expression de ce que l’on croit être la vérité ; l’ironie pimente agréablement la tisane morale ; il faut du poivre dans cette camomille ; affirmer avec dédain est un moyen assez sûr de n’être pas dupe, même de ses propres affirmations. […] Alors on raconte, non pas des anecdotes, mais sa propre anecdote à soi, la seule que l’on dise bien et que l’on puisse redire bien plusieurs fois, si l’on a du talent et le don de varier les apparences. […] Seul, l’ancien cadre peut encore servir ; il est quelquefois nécessaire, pour amorcer le public à des sujets très ardus, de simuler de vagues intrigues romanesques, que l’on dénoue selon son propre gré, quand on a dit tout ce que l’on voulait dire. […] Alors, rejetant le bâton souvent changé, coupé en des taillis si divers, il s’appuiera sur son propre génie et nous le pourrons juger, si cela nous amuse, avec une certaine sécurité.

1727. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre II. Les directions divergentes de l’évolution de la vie. Torpeur, intelligence, instinct. »

Ce qu’elle aura donc d’inné, c’est la tendance à établir des rapports, et cette tendance implique la connaissance naturelle de certaines relations très générales, véritable étoffe que l’activité propre à chaque intelligence taillera en relations plus particulières. […] Ainsi va s’ouvrir aux yeux de l’intelligence, qui regardait dehors, tout un monde intérieur, le spectacle de ses propres opérations. […] Elle profite de ce que le mot est lui-même une chose pour pénétrer, portée par lui, à l’intérieur de son propre travail. […] Puis, par la communication sympathique qu’elle établira entre nous et le reste des vivants, par la dilatation qu’elle obtiendra de notre conscience, elle nous introduira dans le domaine propre de la vie, qui est compénétration réciproque, création indéfiniment continuée. […] La vie, c’est-à-dire la conscience lancée à travers la matière, fixait son attention ou sur son propre mouvement, ou sur la matière qu’elle traversait.

1728. (1888) Impressions de théâtre. Première série

Chimène demande la mort de Rodrigue ; Rodrigue, par deux fois, prie Chimène de le frapper de sa propre main : mensonges ! […] Mais ce sont surtout les mœurs qui, dans la comédie de Molière, sont propres à nous surprendre, quand nous y faisons attention. […] Au fond (je n’en sais rien, mais j’en suis sûr), c’est bien sa propre incrédulité que Molière prête au grand « trompeur de Séville ». […] C’est la clarté propre, le jour spécial des pays chimériques. […] Gondinet a certainement imaginé les détails les plus propres à mettre en lumière le parisianisme spécial de Brichanteau.

1729. (1895) Nos maîtres : études et portraits littéraires pp. -360

Voyez les effets de vos maux : tenez Hermione et Phèdre pour les images de vos propres passions !  […] Les divers signes de l’art ne sont que des signes : leur valeur propre doit être négligée, pour l’unique perception des choses qu’ils signifient. […] Chaque mélodie fut marquée d’un Ethos ou caractère propre, constitué par un rythme et un mode particuliers. […] Il destina chaque rythme, chaque mouvement à une signification propre. […] Chacun a des plaisirs qui lui sont propres, et des besoins qu’il a seul.

1730. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre V. Swift. » pp. 2-82

. —  Vers sur sa propre mort. —  À quels excès il aboutit. […] Une fois l’imagination prise, il ira criant, se persuadant par ses propres cris, intraitable. « Votre paragraphe, dit Swift à ses adversaires, rapporte encore ceci, que sir Isaac Newton a rendu compte d’un essai fait à la Tour sur le métal de Wood, par quoi il paraissait que Wood a rempli à tous égards son traité. […] Quel journal plus intime et plus âcre que ses vers sur sa propre mort ? […] Un père avait trois fils, Pierre, Martin et Jean ; il leur légua en mourant à chacun un habit1002, les avertissant de le tenir propre et de le brosser souvent. […] Swift a le génie de l’insulte ; il est inventeur dans l’ironie, comme Shakspeare dans la poésie, et ce qui est le propre de l’extrême force, il va jusqu’à l’extrémité de sa pensée et de son art.

1731. (1841) Discours aux philosophes. De la situation actuelle de l’esprit humain pp. 6-57

Comme si leurs souffrances, en tant que femmes, les avaient affranchies de ce lien de la pesanteur qui attache les hommes à la terre, elles s’élèvent par leur propre poids, pour ainsi dire, vers la céleste demeure, sans ailes et sans anges qui les supportent et les aident à monter. […] Tu serviras l’homme, lui disait-il ; tu n’auras pas de liberté ; tu détourneras tes regards de ton propre cœur, tu feras abnégation de tes idées, comme de tes désirs, comme de tes instincts ; l’homme fera la loi, et tu t’y assujettiras ; ton père te choisira un époux, et tu suivras ton époux ; ton époux sera ton maître, tu lui obéiras. […] Les Borgia trouvèrent dans leur propre sein une femme qui ferait douter si le mal vint pour eux d’Alexandre VI ou de son fils César, ou de ses trois autres fils, tous dignes de leur père, tous dignes de leur sœur ! […] Vainement vous reculez, Matérialistes, devant vos propres conceptions ; vainement, devenus lâches à force d’avoir été audacieux, vous essayez de rassurer la conscience ébranlée du juge et du bourreau. […] Ce n’est donc plus un corps ; ce sont les membres séparés d’un cadavre, lesquels, en tant qu’on les considère en eux-mêmes, peuvent encore vivre d’une vie propre, mais n’ont plus de vie commune.

1732. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

Il y a là-dedans du centón, de trop visibles artifices pour amener des citations, pour mêler à la trame du dialogue les propres vers du vieux poète. […] Puis, ayant su que son propre père eut autrefois une maîtresse, la vertueuse fille lui reproche avec énergie son immoralité… Ainsi, l’attache trop forte à un devoir peut nous en faire oublier d’autres. […] Entre son génie propre et celui de poètes même plus grands que lui, nous perdrions notre temps à chercher une commune mesure. […] Elle le cache donc dans sa propre chambre. […] Mirelet fils, dans une lumière de bengale, y profère maintes choses bardies, propres à étonner les théologiens.

1733. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 3665-7857

Peut-être par cette fiction ont-ils voulu nous donner à entendre que chaque art, chaque science, a ses termes propres & consacrés pour définir ses objets. […] Oüi sans doute, & c’est le propre du sentiment qui les inspiroit, de redoubler par l’attention qu’on donne à le peindre. […] La fiction tient lieu aux amans de la réalité, & les plus passionnés n’adorent souvent que leur propre ouvrage, comme le sculpteur de la fable. […] Il nous semble qu’il faut aller plus loin, pour trouver le vrai caractere de naïveté qui est essentiel & propre à la fable. […] En lui, chaque idée réveille soudain l’image & le sentiment qui lui est propre ; on le voit dans ses peintures, dans son dialogue, dans ses harangues.

1734. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre II. La Nationalisation de la Littérature (1610-1722) » pp. 107-277

Pour beaucoup d’historiens de la littérature, le rôle des précieuses n’aurait consisté qu’à rayer quelques mots du vocabulaire, à y en introduire quelques autres, et surtout à remplacer l’usage habituel du terme propre, direct et précis, par l’emploi de la métaphore. […] Il nous l’a dit en propres termes, dans un endroit bien curieux de son livre, qui n’est pas un livre, mais un recueil d’observations, d’observations directes et d’observations précises sur ses contemporains. […] [La Relation à Ménandre et Les Passages défendus, qui sont sa propre défense contre les attaques du père Goulu, l’auteur des Lettres de Phyllarque à Ariste, font partie des Dissertations chrétiennes. […] Ravaisson, Archives de la Bastille]. — Le motif le plus intérieur de la conversion de Racine a été l’horreur de ses propres fictions ; — et c’est pour cela qu’à partir du jour où il a eu quitté le théâtre, il ne s’est même plus soucié des rééditions de ses propres pièces ; — et qu’il s’est renfermé dans ses fonctions d’historiographe et ses devoirs de père de famille. […] — Les dernières années de Racine. — Racine historiographe et Racine courtisan. — Son intervention dans la querelle des anciens et des modernes. — Son détachement de ses propres œuvres [Cf. la lettre à Boileau, datée du 4 avril 1696].

1735. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXVI » pp. 301-305

Dans cette seconde moitié, Casimir Delavigne s’attache à servir les goûts du public plutôt que les siens propres ; il côtoie et suit, il ne précède pas ; c’est le poëte obséquieux.

1736. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gautier, Judith (1845-1917) »

Elle parle, sans efforts, une langue imagée où éclatent les couleurs de l’Orient ; elle en a surpris le secret au foyer de famille, en écoutant causer son illustre père et aussi en traduisant pour son propre compte tant de récits empruntés aux romanciers et aux poètes de la Chine.

1737. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Sainte-Beuve, Charles-Augustin (1804-1869) »

Il quitte Baïf, revient à Mme Swetchine, se repose avec Théophile Gautier, caresse l’antiquité, coquette avec la nouveauté, effleure tout, illumine tout, ne se contredit jamais, se modifie sans cesse, fait étinceler les points saillants, arrive aux profondeurs, ne s’y attarde pas, et ne s’arrête que si un scrupule de millésime ou une erreur de nom propre le met en désarroi.

1738. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 296-302

Ceux qui s’obstinent à reprocher à l’Eglise un caractere odieux de dureté, d’intolérance, n’ont qu’à parcourir les instructions qu’il donnoit à ses Diocésains pendant les troubles des Cévenes ; ils verront comment un esprit vraiment pastoral sait allier la fermeté de la foi avec la charité qu’elle ordonne ; ils admireront des exhortations propres à affermir le courage des Ministres de la Religion, & à soutenir leur patience dans les persécutions ; ils seront pénétrés de respect & d’attendrissement pour cette douceur de morale, cette générosité de sentiment, cette indulgence qui plaint l’erreur en la combattant, cette magnanimité qui se refuse même la plus légere satisfaction, lorsque les persécuteurs les plus atroces sont devenus malheureux.

1739. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 532-537

A le considérer comme lyrique, depuis Rousseau, on ne pourra citer aucun de nos Poëtes plus propre à remplacer ce Grand Homme, auquel il n’est pas inférieur dans plusieurs de ses Odes, & particuliérement dans celle qu’il a composée sur sa mort.

1740. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préface des « Voix intérieures » (1837) »

Il faut qu’il soit attentif à tout, sincère en tout, désintéressé sur tout, et que, nous l’avons déjà dit ailleurs, il ne dépende de rien, pas même de ses propres ressentiments, pas même de ses griefs personnels ; sachant être, dans l’occasion, tout à la fois irrité comme homme et calme comme poète.

1741. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Étienne Dolet, et François Floridus. » pp. 114-119

Mais, outre ce mérite qu’il partageoit avec la plupart des écrivains de son temps, il avoit un talent particulier, celui d’écrire encore mieux dans sa propre langue.

1742. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « De la comédie chez les Anciens. » pp. 25-29

Elle ne présente pas les hommes comme le jouet du hasard ; mais comme les victimes de leurs vices ou de leurs ridicules ; elle leur présente le miroir, et les fait rougir de leur propre image.

1743. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre IV. Pourquoi les Français n’ont que des mémoires. »

Concluons donc que c’est au changement des affaires humaines, à un autre ordre de choses et de temps, à la difficulté de trouver des routes nouvelles en morale, en politique et en philosophie, que l’on doit attribuer le peu de succès des modernes en histoire ; et, quant aux Français, s’ils n’ont en général que de bons mémoires, c’est dans leur propre caractère qu’il faut chercher le motif de cette singularité.

1744. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre IV. Des Ecrits sur la Poétique & sur divers autres genres de Littérature. » pp. 216-222

A la tête de l’ouvrage, on trouve le traité des Beaux-Arts réduits à un même principe, qui est l’imitation de la belle nature : principe simple, aisé à saisir, facile à expliquer, également propre à soulager l’artiste qui travaille & l’amateur qui juge.

1745. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 49, qu’il est inutile de disputer si la partie du dessein et de l’expression, est préferable à celle du coloris » pp. 486-491

Vouloir persuader à un homme qui préfere le coloris à l’expression en suivant son propre sentiment, qu’il a tort, c’est lui vouloir persuader de prendre plus de plaisir à voir les tableaux du Poussin, que ceux du Titien.

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