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1018. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre III : Sentiments et Volonté »

Son analyse a pour objet de montrer que nos sentiments les plus forts sont des agrégats, et que c’est de là qu’ils tirent leur force ; qu’ils sont formés par la juxtaposition, ou pour mieux dire, par la fusion des sentiments simples ; que l’affection étant le résultat d’un plaisir, une affection profonde résulte d’une grande somme de plaisirs ressentis. […] Ainsi les sons qui s’associent avec des idées de puissance, de majesté, de profonde mélancolie sont en général sublimes : tels le mugissement d’une tempête, la chute d’une cataracte, le son de l’orgue.

1019. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Montalembert orateur. » pp. 79-91

Quelles que soient les convictions profondes du dedans, c’est là un grand pas de fait pour la vérité pratique et applicable. […] Jamais, à la faveur d’une conviction religieuse profonde, on n’a eu moins de souci ni de ménagement de l’adversaire.

1020. (1901) La poésie et l’empirisme (L’Ermitage) pp. 245-260

Paul Bourget ajoute : « Je ne saurais les relire, ces lignes si simples, sans une émotion presque pieuse, et je crois que beaucoup des écrivains qui ont eu leurs vingt ans entre 1855 et 1880 y retrouveraient de même, en un raccourci puissant, ce qui fut la foi profonde de leur jeunesse. » Nous retiendrons ce mot : l’empirisme était devenu une foi. […] « Romantique il fit vrai, formiste il fit profond, réaliste il fit beau.

1021. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Évolution de la critique »

Envisageant l’histoire comme un problème de psychologie et émettant cette vue profonde que de tous les documents historiques, le plus significatif est le livre, et de tous les livres le plus significatif encore, celui qui a la plus haute valeur littéraire, M.  […] Il déduit d’une littérature quelque chose de plus profond même que l’histoire, la connaissance des états d’âmes intimes et successifs de tout un peuple : c’est par là que son œuvre inaugure et fait date.

1022. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces diverses — Préface du « Rhin » (1842) »

Chaque fois qu’il quitte Paris, il y laisse un ami profond et cher, fixé à la grande ville par des devoirs de tous les instants qui lui permettent à peine la maison de campagne à quatre lieues des barrières. […] Il commence comme un ruisseau ; traverse un ravin près d’un groupe de chaumières, sous un petit pont d’une arche ; côtoie l’auberge dans le village, le troupeau dans le pré, la poule dans le buisson, le paysan dans le sentier ; puis il s’éloigne ; il touche un champ de bataille, une plaine illustre, une grande ville ; il se développe, il s’enfonce dans les brumes de l’horizon, reflète des cathédrales, visite des capitales, franchit des frontières, et, après avoir réfléchi les arbres, les champs, les étoiles, les églises, les ruines, les habitations, les barques et les voiles, les hommes et les idées, les ponts qui joignent deux villages et les ponts qui joignent deux nations, il rencontre enfin, comme le but de sa course et le terme de son élargissement, le double et profond océan du présent et du passé, la politique et l’histoire.

1023. (1904) La foi nouvelle du poète et sa doctrine. L’intégralisme (manifeste de la Revue bleue) pp. 83-87

Plusieurs des collaborateurs de la Revue bleue ont précédemment signalé l’évolution profonde qui se produit actuellement en poésie, et dont les manifestations ont déjà retenu l’attention du public et des lettrés. […] Il est le mouvement même de l’inspiration, matérialisé en quelque sorte par le vers, et il a son origine dans les lois profondes de l’organisme et de l’univers.

1024. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXII. La comtesse Guiccioli »

profond, à fond d’âme, qui nous vengerait des étouffements de l’étouffeur Moore, ne serait pas, ne pourrait pas être, sous un titre fallacieux, ce vieux procès de lord Byron, jugé par tous les témoins de sa vie, ces témoins que nous connaissons tous, — que nous avons rapprochés et comparés tous, et dont nous avons épuisé tous les témoignages ! […] Le caractère de ce singulier génie, c’est d’être profond et mobile tout à la fois, — quelque chose comme un arc-en-ciel sur un gouffre… Or ce n’est pas le gouffre à sonder qui est difficile.

1025. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. de Lacretelle » pp. 341-357

C’était simple et profond à la fois comme jamais chants de poète ne le furent. […] Il n‘en avait pas, même en littérature : il insulta Rabelais, méconnut La Fontaine, s’éprit de Ponsard, traita Thiers d’esprit profond et transparent et de bon sens métallisé !

1026. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VIII. Du mysticisme et de Saint-Martin »

Celui-là n’est point une déviation de la faculté religieuse, il en est l’exaltation, mais l’exaltation dirigée, l’enthousiasme ardent et profond, et cependant gouverné ; cette espèce d’enthousiasme qui a le regard clair au lieu de l’avoir ébloui et qui, multipliant pour la première fois son intensité par sa durée, ne défaille jamais parce qu’il se retrempe dans l’inextinguible flamme de l’Unité comme à la source vive de la lumière. […] En détaillant, sous son analyse, l’individualité de Saint-Martin, il a compris que cette plante étrange avait pourtant sa racine dans le terrain de son siècle, et, pour qu’on ne pût s’y méprendre, il nous a retourné le siècle en quelques traits justes et profonds, et nous en a ainsi montré le fond et la superficie.

1027. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « IX. L’abbé Mitraud »

Toute profonde réalité lui échappe. […] Mitraud, et qui créent une parenté d’erreur profonde entre son ouvrage et tant d’autres écrits fades et dangereux.

1028. (1892) Un Hollandais à Paris en 1891 pp. -305

M. de Porto-Riche a l’accent profond et vrai ; il porte au théâtre une sincérité inconnue. […] Une œuvre de longue haleine exige naturellement, en dehors de l’inspiration, la connaissance profonde du métier. […] Moi, imbécile, je restais en arrière, plongé dans une méditation profonde et ne pensant à rien, comme vous pouvez croire. […] Mais on s’aperçoit bientôt que dans ce cercle restreint circule un large courant de vie profonde. […] Ce qui est factice se manifeste sous forme de réclame ; et d’ordinaire les sentiments profonds se dissimulent.

1029. (1907) Propos littéraires. Quatrième série

Herckenrath n’a rien de très profond ni rien d’excellemment nouveau. […] Hæckel, absolument loyal, ne dissimule rien du mal profond qui existe dans l’univers. […] Un surtout — vous l’attendiez — M. de Prédern, l’admire avec un trouble profond. […] Cette conception ne se fait jamais, on le sait, sans une grande tristesse, sans une mélancolie profonde, qui naît tout de suite, dès qu’on va, même approximativement, au fond de tout. […] d’un père ou d’une mère, une de ces douleurs profondes, incurables, qui bouleversent l’existence, brisent jusqu’aux forces du corps et font descendre au sépulcre avant le temps ?

1030. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXIII » pp. 244-246

Ampère celui des littératures comparées, l’homme, enfin, qui a su inspirer tant d’illustres amitiés et coopérer par ses conseils à tant de monuments aujourd’hui célèbres, ne peut manquer de laisser des regrets profonds dans tous ceux qui ont eu l’honneur de le pratiquer. » 42.

1031. (1875) Premiers lundis. Tome III « Senac de Meilhan »

C’était à la fois de l’à-propos et du contretemps : — de l’à-propos, parce que Tacite reprenait tout son sens profond à la clarté des événements nouveaux ; — du contretemps, parce qu’on jouissait bien peu alors de cette liberté d’esprit qui seule eût permis d’être attentif à un tel essai littéraire et de rendre justice aux efforts méritoires du nouveau traducteur.

1032. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 358-361

Son style est aussi simple que noble, aussi clair que profond, aussi nombreux qu’énergique.

1033. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 2-5

Dans les bras de ce Dieu, cette Déesse nue Dissipe l’épaisseur d’une profonde nue, Et paroît, à nos yeux, telle que le Soleil, Sur les bords d’Orient, au point de son réveil : Son teint blanc & vermeil montre son innocence ; Les Princes & les Dieux redoutent sa puissance : C’est elle qui confond l’artifice & l’erreur, Qui rend aux bons l’amour, aux méchans la terreur.

1034. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 343-347

Un Esprit aisé, profond, indépendant ; une imagination féconde, forte, hardie, & presque toujours agréable ; un langage familier, naïf, quelquefois énergique ; une érudition vaste, choisie, & le talent assez rare de s’en parer à propos, auront toujours des charmes propres à établir la réputation d’un Auteur, & le pouvoir de soutenir son Ouvrage contre l’inconstance des temps, malgré les défauts multipliés qu’on y remarque.

1035. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 368-371

L’Observateur Hollandois, espece de Journal Politique, composé de quarante-sept Lettres, n’eut pas plutôt paru, que tous les Connoisseurs applaudirent à la sagacité, aux connoissances profondes, à la méthode, à la netteté, avec lesquelles l’Auteur développe les intérêts & la situation des différentes Puissances de l’Europe.

1036. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 555-559

Si quelque chose pouvoit justifier M. l’Abbé Prévot, de s’être abaissé à des Ouvrages, qui, pour le plus grand nombre, captivent l’imagination pour l’égarer, parlent à l’esprit sans le rendre plus éclairé, agirent le cœur sans le corriger & le former ; ce seroient l’art singulier, l’imagination vive & féconde, le sentiment tendre & profond, la touche mâle & vigoureuse, qui dominent avec tant de richesse dans tout ce qu’il a écrit.

1037. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre septième »

Elle était digne de Bossuet, et j’admire qu’avec une science si profonde des cœurs, quand il pouvait les ouvrir, pour ainsi parler, et les étaler tout vifs sur la chaire, il aime mieux poursuivre et harceler son auditoire d’austères explications du dogme, et songe plutôt à lui faire peur de ne pas croire qu’à l’intéresser par l’imagination à bien agir. […] Il sort de tout cela une première morale, plus forte et plus efficace peut-être que toutes les prescriptions particulières : c’est un sentiment profond de la misère de l’homme et de l’impossibilité pour nous de n’en pas chercher le remède. […] Sa foi, plus douce que profonde, était facilement satisfaite, et sa vertu le menait au dogme par la morale. […] La principale, c’était Fontenelle auquel il a grand’peine à pardonner la préférence ouverte ou secrète que tant de gens donnaient à son esprit sur « le sublime de M. de Meaux. » C’étaient ensuite les Lettres persanes dont « l’imagination » passait, dans le goût public, avant « la perfection » des Lettres provinciales, « où l’on est étonné », dit-il, « de voir ce que l’art a de plus profond avec toute la véhémence et toute la naïveté de la nature. » Toute la critique de Vauvenargues se résume en ceci : justice un peu froide pour son temps ; préférence de sentiment et de goût pour le dix-septième siècle. […] « Un charme d’élocution continuel, une harmonie enchanteresse, un choix de mots qui vont tous au cœur, un pathétique entraînant, douceur, dignité, grâce, sévérité, onction, surprenante richesse de développements ; art de pénétrer dans les plus profonds replis du cœur humain ; le Racine de la chaire et le Cicéron de la France. » 72.

1038. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VII »

Ce sont de vieux mythes réchauffés, des aperçus théoriques de pure fantaisie, des analyses de drames cent fois refaites et toujours inutiles puisque la nature même du drame reste incomprise, et toujours les mêmes psychologies profondes sur la distinction entre l’homme et l’artiste, et autres inepties ! […] Nous voulons qu’ils étudient les écrits de Wagner ; qu’ils apprennent à voir en lui plus qu’un simple musicien, un profond penseur ; qu’ils subissent ainsi l’influence de cet homme dont l’effort principal (quoique peu connu) a été de montrer que l’art est la chose la plus sainte, et le théâtre un lieu où peuvent vivre de la vie intense de l’art les plus profondes passions et les émotions les plus cachées, Y a-t-il au monde quoi que ce soit qui puisse influencer plus salutairement un artiste que le spectacle de cette vie virile tout entière vouée à un idéal, et de ce prodigieux effort vers la réalisation de cet idéal ? […]   Du silence et de l’obscurité profonde s’élève très lentement, comme un grave énoncé symbolique, la mélodie fondamentale du drame. — Les notes se succèdent simplement sans commentaire harmonique ; la phrase semble parfaite et inaltérable dans sa forme comme dans sa signification ; le silence qui la précédait peut revenir après elle. […] Rien d’objectif ; seulement, de l’obscurité et du silence qui précédaient et nous donnaient le besoin devoir et d’entendre avec avidité, est sortie une impression subjective destinée à orienter d’avance notre compréhension et à familiariser notre entendement avec la révélation mystiquement réalisée du drame dont nous sentons déjà le caractère si profond qu’on l’a cru religieux.

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