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1264. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur de Latouche. » pp. 474-502

Les messieurs Thabaud étant plusieurs frères, chacun d’eux avait pris, selon l’usage de l’Ancien Régime, un surnom de forme nobiliaire pour se distinguer des autres ; le père d’Hyacinthe avait surnom de Latouche. […] Maintenant, comment s’y est-il pris dans les détails de la publication ? […] Ce trait, du reste, était pris d’une épigramme de Millevoye49, qui l’avait pris lui-même je ne sais où. […] Plus d’un lecteur y fut pris et se dit avec étonnement : « Mais est-il possible qu’une personne comme Mme de Duras, qu’une femme du monde et qu’une femme, soit allée choisir une pareille donnée ? […] Lorsqu’il vit, vers 1829, de nouvelles générations arriver et prendre rang dans le camp des novateurs, à des postes plus avancés que n’était le sien, son impatience redoubla et ses colères devinrent plus fréquentes.

1265. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1877 » pp. 308-348

C’est un vieux chien qu’on purge très souvent, et sa figure de chien prend un aspect navré, quand il aperçoit la préparation de la médecine. […] l’ironie des bonnes et des mauvaises fortunes de la vie… Puis, dans ce restaurant, où, en face de moi, a été si souvent assis mon frère, la chaise vide de l’autre côté de ma table me fait penser à lui, et une grande tristesse me prend, en songeant, que le pauvre enfant n’a eu que le crucifiement de la vie des lettres. […] Puis aussitôt qu’on est parti, le trac me prend. […] Et tous deux se plongent, avant de manger, dans la lecture d’imprimés immenses, où les raccourcis de la face pâle de la femme, où les raccourcis de la tête de bossu méchant du jeune homme, prennent, sous le gaz, l’aspect effrayant d’un ménage de larves, vivant de correspondances étrangères. […] Là-dessus, on va prendre, pour une promenade dans la forêt, un ami qui demeure dans la maison de Delacroix.

1266. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Μ. Ε. Renan » pp. 109-147

… Le dégoût l’avait-il pris de la scandaleuse gloire qui se fit un jour autour de son nom, et qui s’en est allée de plus en plus s’éteignant à chacun de ses livres qui suivirent le premier ? […] Il avait pris les pantoufles de ce pied-plat de Strauss, et il marcha là-dedans, comme si lui-même les avait cousues. […] Il aura beau faire l’athée, la démocratie ne se prendra point aux coquetteries athées que lui fait M.  […] Renan, prit le reste de son histoire. […] Aussi, quand il voulut se mettre sur la sienne, prit-il l’espace d’un livre et fit-il la Vie de Jésus.

1267. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre II. L’âme et le corps »

Donnez-la pour ce qu’elle est, et n’allez pas faire passer pour un résultat de la science, pour une théorie modelée sur les faits et capable de se remodeler sur eux, une doctrine qui a pu prendre, avant même l’éclosion de notre physiologie et de notre psychologie, la forme parfaite et définitive à laquelle se reconnaît une construction métaphysique. […] Mais, de même qu’il suffit d’un très faible relâchement de l’amarre pour que le bateau se mette à danser sur la vague, ainsi une modification même légère de la substance cérébrale tout entière pourra faire que l’esprit, perdant contact avec l’ensemble des choses matérielles auxquelles il est ordinairement appuyé, sente la réalité se dérober sous lui, titube, et soit pris de vertige. […] Je ne vois qu’un moyen de sortir d’embarras : c’est de prendre, parmi tous les faits connus, ceux qui semblent le plus favorables à la thèse du parallélisme — les seuls, à vrai dire, où la thèse ait paru trouver un commencement de vérification —, les faits de mémoire. […] Quand nous avons oublié un nom propre, comment nous y prenons-nous pour le rappeler ? […] Oui, mais la maladie peut tenir aux causes les plus diverses, prendre les formes les plus variées, débuter en un point quelconque de la région cérébrale intéressée et progresser dans n’importe quelle direction : l’ordre de disparition des souvenirs reste le même.

1268. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

Il prit des notes à Londres comme dans la campagne normande. […] La pièce, à tout prendre, est-elle trop française ? […] me répondit en riant le Chevalier, je vous y prends, monsieur Lysidas ! […] Molière a pris la massue d’Hercule pour écraser un insecte. […] Bien lui prend de n’être pas de verre.

1269. (1898) La cité antique

C’est dans la famille qu’il a pris naissance. […] De ces deux religions, la première prenait ses dieux dans l’âme humaine ; la seconde prit les siens dans la nature physique. […] Tous ces dieux prenaient souvent la forme humaine et se montraient aux mortels. […] Les prêtres en prirent aussitôt copie et l’inscrivirent dans leurs livres. […] Maître de la ville, il prend la statue, bien persuadé qu’il prend en même temps une déesse, et il la transporte dévotement à Rome.

1270. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Troisième série

Ces choses prennent de nombreuses pages en raison de leur importance. […] le peu que j’en ai pris me dégoûte. […] Il a pris la manière d’Hegel. […] L’aventure lui est arrivée toutes les fois qu’il a pris la plume. […] Il prend l’idéal pour l’absolu.

1271. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

L’homme s’en prendra-t-il à Dieu de sa propre folie ? […] dit Julie ; j’avais pris ça pour des couplets. […] … son âme a pris congé de la terre, pour aller où ? […] Prenons donc patience. […] Il prend, quitte et reprend chaque sujet et chaque rôle.

1272. (1859) Moralistes des seizième et dix-septième siècles

La peine que prennent ceux-ci est vaine le plus souvent. […] Montaigne n’en a pris qu’une, en effet ; mais, par malheur, elle était mauvaise. […] Ils prirent de l’amitié l’un pour l’autre et s’en donnèrent des marques mutuelles. […] Lui prendrons-nous ses ordonnances cérémonielles ? […] Prenons un des services les plus vantés, les bons conseils.

1273. (1905) Propos littéraires. Troisième série

Il habitue à prendre la littérature au sérieux. […] Le public prit un peu le goût du recueillement pour lire des vers à partir de la Pléiade. […] C’est Marguerite qui prend le premier rôle. […] Il la prenait comme à rebours. […] Personne n’était dupe du soin que prenait M. 

1274. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE LONGUEVILLE » pp. 322-357

Mme la Princesse sa mère ne le souffrit pas, et prit la chose du ton d’une personne toute fière d’être entrée dans la maison de Bourbon ; elle exigea des réparations solennelles. […] Quand on examine sa conduite sur les principes de l’Évangile, on y trouve des vides effroyables. » Mais le médecin éclairé, et qui sût prendre en main cette âme oscillante et endolorie, tardait toujours. […] Elle voit certaines gens, elle prend des bouillons, parce que Dieu le veut ; elle n’a aucun repos ; sa santé, déjà très-mauvaise, est visiblement altérée. […] et où l’on ne dira que juste par cette expression de pitié, qui sera encore, à bien prendre, une générosité d’âme. […] Pour juger de deux femmes, il ne serait pas tout à fait équitable d’aller prendre la plus sérieuse un soir de bal, et la plus légère un jour de vendredi saint.

1275. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (3e partie) » pp. 81-152

Les marais de Venise ne sont pas sans inconvénients, mais il faut bien prendre son parti. […] Il a pris la servilité pour le caractère de la religion, parce qu’il a appris cette religion au lieu de la sentir. […] À la vivacité des répliques de Sismondi, on voit que la discussion avait pris un caractère passionné. […] Et ce débarquement, à qui s’en prendre ? […] Son amie lui survit et prend un autre serviteur.

1276. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre deuxième »

Cette solitude et cette contention opiniâtre le fatiguèrent tellement, que, s’il faut en croire son biographe Baillet, le feu lui prit au cerveau et qu’il fut troublé par des songes et des visions. […] C’est l’éloge qu’il en fait à Balzac, en l’invitant à s’y venir fixer ; peut-être parce qu’il n’a pas peur d’être pris au mot. […] Comment prendrait-il de la peine pour convaincre ses lecteurs de son doute ? […] Mais il ne prit de ce grand modèle qu’un certain appareil de harangue disproportionné à des spéculations de cabinet. […] Il était disciple de Gassendi ; et comment douter que Gassendi ne prît ses disciples à témoin de ses débats avec Descartes, et, d’après ce qu’on sait de son caractère, qu’il ne leur donnât à lire les écrits de son rival ?

1277. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1876 » pp. 252-303

La satisfaction de Flaubert éclate dans des violences de paroles, sous lesquelles la gentille Mme Daudet paraît peureusement rapetisser, la satisfaction de Zola s’expansionne dans le bonheur, bien naturel, de voir la fortune et l’argent prendre le chemin de son intérieur. […] Tous deux ont une voix douce et musicale, des pieds d’une petitesse exquise, des mains douées pour prendre les choses, de la préhension délicatement tâtonnante des singes. […] Hugo cause de la séduction de l’éloquence de Thiers, faite, dit-il, avec des choses qu’on sait mieux que lui, et d’une foule de fautes de français, et tout cela débité avec une très vilaine voix, — et qui cependant, au bout d’une demi-heure, vous prend, vous intéresse, s’impose à vous. […] * * * — Le vieux Giraud confessait qu’il prenait en grippe ceux qui lui écrivaient de trop longues lettres. […] On ne sait jamais, même à l’heure qu’il est, le train qu’il prend, pas plus que celui par lequel il arrive.

1278. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Victor Hugo. Les Contemplations. — La Légende des siècles. »

La faute ou le crime littéraire, voilà ce que nous voulons prendre exclusivement à partie dans l’auteur des Contemplations. […] Nous avions pris la fleur du panier ; maintenant nous allons prendre partout. […] Hugo et l’exil, on prendrait ce livre pour un chef-d’œuvre, une divine Comédie, si la Critique n’avait pas le courage de crier haro ! […] prend la lune pour N. […] Il en sort abondant, pressé, nombreux, accablant, sous toutes les formes, dépliées ou repliées, tendues ou rompues, que peut prendre le vers.

1279. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Victor Hugo »

La dissertation, déjà insupportablement fréquente dans les Travailleurs de la Mer, a pris de bien autres proportions dans le volume actuel. […] Nous avons cru à quelque philosophe ou à quelque bouffon de génie fouaillant le monde avec son rire, et nous nous disions : Comment s’y prendra-t-il pour être gai, cet homme le moins gai de France ? […] Il y a un oiseau qui s’appelle l’engoulevent, qui vole le bec ouvert et avale le vent, symbole des badauds, et que Victor Hugo pourrait prendre pour ses armes. […] La Vérité a pris le poète par les cheveux et l’a violenté. […] Mais la Fléchard, qu’il fait aboyer comme Hécube, qui était une païenne et qui aboya, au dire d’Homère, n’est, à tout prendre, qu’une chienne de maternité.

1280. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VII »

» (113)… Il est inutile de continuer, on n’a qu’à prendre presque chaque phrase. […] Prenons la version de M.  […] Enfin le vrai sens du motif est dans le chœur : «  Prenez mon sang, prenez mon corps, pour la grâce de l’amour.  […] Il prit aussi une part importante à l’affaire de Tannhæuser à Paris. […] Maintenant, Seigneur, prends mon âme !).

1281. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VIII »

C’est précisément à cette époque que Wagner fut pris d’une passion violente pour une femme, jeune et d’une grande beauté. […] Mais j’ai tenu à faire remarquer quel soin le maître a pris d’établir le lieu dramatique et de le rappeler sans cesse ; parce que ce souci prouve l’intention exclusivement poétique. […] Dans les parties itères et pleines de reproches, elle ressemble à celle de Wotan au second acte de la Walküre ; lorsque la douleur l’accable, l’allitération disparaît et la rime prend sa place, une rime riche et très sonore. […] Mais ce que je tiens surtout à faire ressortir ici, c’est la part notable qu’elle prend à l’atténuation du sens logique des phrases. […] Certes, si on prend l’œuvre dans son ensemble, la musique prédomine dans une très large mesure ; mais c’est le sujet qui le commandait, et j’ai démontré que cela n’est nullement la négation d’une unité vivante et organique.

1282. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Le Comte Léon Tolstoï »

Même, pour ce tableau le plus antique, le retour du printemps, que l’on prenne, dans Anna Karénine, la sortie du propriétaire Lévine, allant, par la première journée douce de renouveau, inspecter les champs aux molles noires, les enclos où meuglent les bestiaux étourdis et ivres de leur sortie au grand air, puis sa course à cheval par ses bois, dans la brise molle et crue cependant de la fonte des neiges, dont l’eau claire court, à peine salie sur le sol gelé ; les faits familiers mais précisés, les sensations vives fraîchement remémorées d’une observation plus attentive et plus charmée, plus immédiatement vraie que dans la plupart des romans réalistes, s’y pressent comme pris à même avec de grosses et bonnes mains, sans qu’il y ait cependant à vrai dire de passages descriptifs, sans qu’on puisse séparer la série de traits formant tableau de la série des pensées du personnage dont la présence dans cette scène en cause le narré. […] Ainsi se marquent les grandes scènes guerrières des Souvenirs de Sébastopol et de la Guerre et la Paix, dont l’exactitude prodigieusement nouvelle, le singulier et menu relief prennent l’attention, sans que rien d’oratoire, de stylé, les recommande, sans qu’ils importent par autre chose qu’une observation, une imagination, une expression aussi proche de la vérité qu’on peut la concevoir. […] Les vieux aspects des cieux et des horizons, les grandes et antiques scènes des champs, de la route, de la guerre, de la ville, toutes les mille cérémonies de la vie sociale dont il s’est détourné avec indifférence, lui apparaissent à nouveau définis et retracés avec la vision obstinément exacte et clignante d’un prestigieux dessinateur, dont les claires pupilles savent prendre aux choses les vrais reflets. […] Dans les villes prises, dans les orgies, dans les intimités conjugales, dans les accoudements et dans les repos des grands corps abandonnés aux lits et aux fauteuils, Tolstoï sait faire sentir sans cesse la personne physique de ses héros, dépeinte ensuite et fixée, mais connue d’abord comme par un attouchement dans l’ombre, perçue, tiède, velue, molle et toute semblable à celle qui est la vie même de chacun. […] Son œuvre donne au monde une large représentation et saisit par ce vaste déploiement, par un art qui tend à égaler la grandeur, l’illogisme, l’existence autonome du réel, mis face à face avec lui en une contemplation si proche qu’elle paraît neuve et personnelle, le lecteur, pris d’impérieux attraits, pénètre dans les romans de Tolstoï comme en un monde dont il est, s’émeut de la bonté dont ses personnages sont pleins, s’affole des angoisses dont les attristent les problèmes de la mort et du sens de la vie, et plonge dans l’atmosphère grise de ces livres comme on se perd hors de soi dans un rêve.

1283. (1864) Corneille, Shakespeare et Goethe : étude sur l’influence anglo-germanique en France au XIXe siècle pp. -311

Il débuta par étudier à Heidelberg, où il prit ses grades. […] On prendrait ensuite l’œuvre entière de Byron, et le type en question reparaîtrait. […] S’ils te prenaient, quelle gloire ! […] On prend trop en France Henri Heine pour un railleur paradoxal ou un poète fantaisiste. […] Voilà à quelle dose le public d’aujourd’hui prend de l’émotion dramatique !

1284. (1887) Études littéraires : dix-neuvième siècle

Le pli était pris. […] D’autres ont pris et quitté et repris la plume. […] Il ne la prend pas. […] Le pli est pris. […]prend mon esprit toutes ces gentillesses ? 

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