/ 2639
684. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Madame Sand et Paul de Musset » pp. 63-77

Elle oublie que son héroïque Thérèse devrait, pour l’honneur de son honneur, un peu plus combattre contre les tentations de sa pitié ; que si Laurent est un fou, c’est au moins un fou incendié par la tête et qui a des éclairs lucides, tandis qu’elle, c’est bien pis qu’une folle, c’est un esprit faux et un cœur débile, toujours prêt à faire, sans aucun enthousiasme, l’exercice de la compassion en douze temps ! […] L’auteur d’Elle et Lui n’est qu’une femme, et elle n’a rien de plus dantesque que Caroline Lamb (maintenant oubliée) quand elle publia son petit roman contre lord Byron.

685. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Deux romans scandaleux » pp. 239-251

Elle oublie que son héroïque Thérèse devrait, pour l’honneur de son honneur, un peu plus combattre contre les tentations de sa pitié ; que si Laurent est un fou, c’est du moins un fou incendié par la tête et qui a des éclairs lucides ; tandis qu’elle c’est bien pis qu’une folle, c’est un esprit faux et un cœur débile, toujours prêt à faire, sans aucun enthousiasme, l’exercice de la compassion en douze temps ! […] L’auteur d’Elle et Lui n’est qu’une femme, et elle n’a rien de plus dantesque que Caroline Lamb (maintenant oubliée), quand elle publia son petit roman contre Lord Byron.

686. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Malot et M. Erckmann-Chatrian » pp. 253-266

Malot, — et son roman doit être, à son titre, quelque chose comme une trilogie, quoiqu’il ait oublié de nous en avertir, ce qui n’est pas un oubli de préface, mais un oubli de composition : — il s’agit donc d’amour ; mais est-ce un côté inexploré de ce sentiment, qui est l’infini dans nos âmes, que M.  […] La préoccupation de ce malheureux livre, où il y a de l’étude et parfois du style, mais rien de sincère, de franc et de naïvement emporté, la préoccupation se trouve partout, c’est la manie de faire de l’école hollandaise, de cette école hollandaise transportée dans la littérature, et qui les perdra tous, ces romanciers sans idée, qui veulent tout écrire et ne rien oublier, parce qu’il est plus aisé de peindre les bretelles tombant sur les hanches des hommes qui jouaient au bouchon (v. p. 68), que d’avoir un aperçu quelconque ou de trouver une nuance nouvelle dans un sentiment.

687. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Ch. Bataille et M. E. Rasetti » pp. 281-294

L’un et l’autre, pour être plus réels (croient-ils), ils oublient la réalité la plus profonde, celle de la poésie, ancrée dans le fond du cœur de toute chose. […] Mais, oublié un moment, son tempérament se retrouve.

688. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Ernest Feydeau »

C’est, en effet, cette exactitude, pour laquelle on oublie trop la manière dépeindre, que je trouve, dans les nouveaux romans de Feydeau, mise à la place de la peinture. […] Le style (nous ne voulons rien oublier), le style dans lequel tout cela est écrit s’est desséché comme la tête de l’auteur sous sa théorie de l’exactitude.

689. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Introduction »

Préoccupés de l’action, et attendant de telles ou telles institutions certains effets exigés par une certaine fin, nous avons plus de chances d’oublier ou de négliger les effets non demandés, ceux justement qu’il serait le plus important d’apercevoir. […] Les conditions matérielles ou morales de toutes sortes, la configuration du sol qui porte les hommes, la nature des instruments qui sont à leur disposition, les caractères anatomiques de leur race, leurs besoins, leurs croyances, leurs sentiments, les qualités différentes des choses ou des personnes peuvent exercer une influence, directe ou indirecte, médiate ou immédiate, sur le succès social de l’idée de l’égalité : pour être sûr de n’oublier aucun de ses antécédents, il faudrait passer en revue toutes ces espèces de phénomènes, et peser l’efficacité propre à chacune d’elles.

690. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXIV. Des panégyriques depuis la fin du règne de Louis XIV jusqu’en 1748 ; d’un éloge funèbre des officiers morts dans la guerre de 1741. »

On prononça avec pompe des discours éloquents, ou qui devaient l’être ; chaque jour voyait naître et mourir des éloges nouveaux, en prose, en vers, gais, sérieux, harmonieux et brillants, ou durs et sans couleur, tous sûrs d’être lus un jour, et malheureusement la plupart presque aussi sûrs d’être oubliés le lendemain. […] On immortaliserait des prodiges de valeur que souvent la jalousie étouffe, et que bientôt l’ingratitude oublie.

691. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Quelques « billets du matin. » »

ma chère cousine, j’allais l’oublier : voilà déjà cinq jours qu’on a célébré dans notre bonne ville d’Orléans la fête de la Pucelle. […] Je veux m’enfuir au sein des choses Pour oublier mon noir tourment. […] Tout ce qui m’agite tant à Paris, je l’avais oublié. […] N’oublions pas, messieurs, que l’Académie est un salon ! […] comme tout cela est oublié !

692. (1921) Esquisses critiques. Première série

Mais, nous l’avons dit, on se plaisait alors à les oublier au bénéfice de ses attraits. […] Mais ce qui est naturel ne se réalise pas nécessairement, et les écrivains se trouvent en outre assez enclins à oublier qu’écrire est un art et qu’en conséquence ils sont des artistes. […] Qui pourrait, par exemple, oublier Viviane aux yeux verts, debout sous un frêne dont mille rayons perçaient le feuillage — et tant d’autres visions encore. […] Ce ne sont qu’objets oubliés que l’on vient chercher dans la pièce où se déroule l’action, que lettres que l’on s’en va écrire dans la chambre voisine pour laisser le champ libre aux personnages qui vont avoir à filer leurs couplets. […] Peut-on d’ailleurs oublier que l’école symboliste donnait sa première floraison au moment où entrait dans la célébrité l’auteur de Bérénice, si fort impressionné lui-même par l’impérieuse influence de Mallarmé.

693. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « PARNY. » pp. 423-470

J’ai autrefois parlé de Millevoye, et il m’est arrivé même d’écrire sur Léonard ; oublier après eux, ou bien omettre tout exprès Parny, c’est-à-dire le maître, ce serait dureté et injustice. […] Dans la Journée champêtre, l’un des premiers poëmes qu’il ait ajoutés à ses élégies, Parny n’a fait probablement que traduire sous un léger voile une des journées réelles, une des formes de passe-temps familiers en ces délicieux réduits : les couples heureux se remettaient à pratiquer l’âge d’or à leur manière et sans trop oublier qu’ils étaient des mondains168. […] Parny lui-même autrefois, dans un joli dialogue qu’il avait trop oublié, et qui eût été ici bien plus à propos, avait pu dire : Quel est ton nom, bizarre enfant ?  […] Ici, n’oublions pas que nous sommes dans les temps modernes, et tout de bon (n’en déplaise à Théocrite) dans le siècle de fer de la prose ; l’Hiéron ou le Mécène est un directeur général des droits réunis. […] Il est à croire que, si l’on avait conservé quelques-unes de ces élégies toutes premières de Lamartine qui ont été jetées au feu, on aurait le lien par lequel ce successeur, trop grand pour être nommé un rival, se serait rattaché un moment à Parny. — Voilà tout ce qu’il m’a été possible de ramasser et de combiner ici sur le gracieux poëte, trop longtemps oublié de nous ; et je n’ai voulu autre chose, en produisant ces divers souvenirs et ces jugements, que lui apporter en définitive un hommage, de la part de ceux-là même qui eussent le moins trouvé grâce devant lui.

694. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Théâtre » pp. 83-168

Le travail et l’émotion d’écrire Germinie Lacerteux nous faisaient complètement oublier notre pièce, quand, un soir du printemps de 1865, un de nos amis ayant une soirée à passer avec nous, et ne sachant comment la perdre, nous demanda de lui lire notre Henriette. […] Maintenant, attaqués à droite et à gauche, attaqués en même temps par le Siècle et par l’Union, par l’Avenir national et par la Gazette de France, sans oublier le Monde ; fusillés par un premier Paris de la France, arrêtés par l’administration, — que nous reste-t-il à faire pour une pièce à laquelle les sympathies de la grande critique, les feuilletons de Jules Janin, de Théophile Gautier, de Nestor Roqueplan, de Paul de Saint-Victor, de Louis Ulbach, de Francisque Sarcey, la presse et le public, des recettes de quatre mille francs, une location de huit jours à l’avance, devaient assurer, semblait-il, le droit de vivre ? […] Et c’étaient presque aussitôt des tentatives nouvelles, des inventions et des compositions de pièces dont j’ai oublié le titre et dont je ne soupçonne plus guère l’existence que par la lettre de refus d’un directeur de théâtre. […] Voici la route de Bellevue, et, sur cette route, nous rencontrons tenant par la main un joli enfant, la jeune fille, jeune femme aujourd’hui, que l’un de nous a eu, au moins pendant huit jours, la très sérieuse pensée d’épouser… et qui nous rappelle du vieux passé… Il y a des années qu’on ne s’est vu… On s’apprend les morts et les mariages… et l’on nous gronde doucement d’avoir oublié d’anciens amis… Puis nous voilà dans la maison de santé du docteur Fleuri, causant avec Banville, et croisant dans notre promenade, le vieux dieu du drame, le vieux Frédérick Lemaître… « … Dans tout cela, par tous ces chemins, en toutes ces rencontres, au milieu de toute notre vie morte que le hasard ramène autour de nous et qui semble nous mener à une vie nouvelle, nous roulons, les oreilles et les yeux aux bruits et aux choses comme à des présages bons ou mauvais, et prêtant à la nature le sentiment de notre fièvre… En rentrant : rien. » Une semaine après, nous apprenions que notre pièce n’était ni reçue ni refusée, que Beaufort voyait un danger dans la mise à la scène de la petite presse… qu’il attendait. […] Jules Janin, Théophile Gautier, Nestor Roqueplan, Paul de Saint-Victor, Ernest Feydeau, Jules Vallès, Xavier Aubryet, Louis Ulbach, Francisque Sarcey, Jouvin, Jules Richard, Jules Claretie, Camille Guinbut, Henri de Bornier, et tous ceux que nous oublions.

695. (1914) Boulevard et coulisses

Aussi, à vingt-cinq ans de distance, m’est-il impossible d’oublier ma première entrevue avec Arthur Meyer et l’impression qu’elle me fit. […] J’en ai oublié les détails, bien entendu. […] On ne peut pas oublier ce grouillement quand on l’a vu, ce besoin ardent de jouissance immédiate, ces frémissements de plaisir et cette insouciance du lendemain. […] C’est comme si, d’une douce insistance, vous l’aviez forcé à boire un verre de la vieille liqueur d’illusion ; et il en arrive presque à oublier que ce ne sont point les compagnons de sa jeunesse qu’il a devant lui, mais déjà leurs fils. […] C’est donc une sensation rare et imprévue que je vous dois, et que je n’oublierai pas, même lorsqu’en vous quittant j’aurai repris ma lucidité.

696. (1896) Impressions de théâtre. Neuvième série

— J’étais si content que j’ai oublié de le lui demander. […] C’est qu’il a oublié, et que le monde est neuf pour lui. […] « Je ne puis contraindre ma pensée à oublier Çakountala. […] j’oubliais mon plan. […] Tout cela a été bien oublié.

697. (1898) Impressions de théâtre. Dixième série

Ici, et dans quelques autres endroits, l’auteur, tout à sa démonstration, a oublié de regarder la vie. […] Elle a totalement oublié que Marguerite Gautier est, après tout, une fille, et une fille de luxe. […] Mais au reste, on oublie de faire deux distinctions bien nécessaires. […] Et il ne faut pas oublier que les neuf dixièmes des spectateurs ne sont que des locataires. […] Sans compter tout ce que j’oublie.

698. (1887) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Troisième série pp. 1-326

Dans ce genre, pour tâcher de ne rien oublier de récent, je signalerai les pages curieuses que M.  […] Car le grotesque ou le caricatural, et on l’oublie trop souvent, n’est pas moins éloigné de la vie commune que l’héroïque même. […] Elles se gravaient profondément, si profondément qu’on les en oubliait. […] pardonnons-lui la bizarrerie ; que de traits inoubliables dans ces romans justement oubliés ! […] On avait peut-être trop négligé l’œuvre et peut-être trop oublié l’homme.

699. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 490-491

Au contraire, elle l’étend, le préconise, & ne craint pas de sacrifier ainsi sa gloire à l’envie de se procurer des partisans, qui oublient ce qui leur en coute pour figurer dans la société des ames foibles & des esprits forts.

700. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 230-231

Ceux qui ont suivi depuis la même carriere, & qui se font un point d’honneur de le mépriser, ont oublié, sans doute, que les premiers pas, en tout genre, sont ceux qui coutent le plus, & qu’une route non frayée rend toujours les progrès plus difficiles.

701. (1913) Le bovarysme « Avertissement »

Il semble que si telle décision était prise, que si telle mesure était exécutée, que si l’on voulait telle et telle chose, toute la suite des événements serait modifiée, et on oublie que les choses sont telles précisément parce que telle résolution ne peut plus être adoptée, parce que tel vouloir n’est plus possible.

702. (1874) Portraits contemporains : littérateurs, peintres, sculpteurs, artistes dramatiques

Elle oubliait très-facilement ses ouvrages, dont elle eût pu être fière à plus d’un titre. […] La conformité morale était si forte, qu’elle faisait oublier les dissemblances physiques. […] Et la pièce oubliée ? […] Il avait une de ces figures qu’on n’oublie pas. […] Je n’oublie vite que les sols et les méchants.

703. (1848) Études critiques (1844-1848) pp. 8-146

Alfred de Musset nous paraît compter parmi les écrivains d’élite et s’il s’égare souvent, ses erreurs ne nous font pas oublier qu’il ne se trompe qu’en cherchant les bons endroits. […] Par une belle soirée le poète se dirigea vers ce lieu de délices avec Campe, son éditeur ; tous deux avaient le projet d’oublier les peines de la vie dans un repas confortable. […] C’est grâce à lui que Ronsard, presqu’aussi oublié des derniers temps que l’Inconnu Caloandre, était devenu, pour ainsi dire, l’Homère des Romantiques, et qu’on lui prêtait des mérites et des grâces auxquels il fut toujours bien étranger. […] Sainte-Beuve entreprit la réhabilitation des écrivains oubliés sur une très vaste échelle. […] Je ne serais pas surpris que sa longue chasse aux grands hommes oubliés ait été la première cause du rare développement de si précieuses qualités.

704. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXII » pp. 242-243

Gonod, bibliothécaire de la ville de Clermont, à qui l’on doit déjà un bon travail sur l’Art poétique d’Horace, qui a procuré cette publication d’un manuscrit oublié.

/ 2639