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755. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre II. Vérification de la loi par l’examen de la littérature française » pp. 34-154

Comme nous touchons ici, bien certainement, à la plus grosse difficulté de ma méthode, je renonce forcément à la brièveté habituelle de mon exposé. […] Dans la période qui nous occupe, le genre dramatique présente donc trois cas particuliers, trois grandes individualités, dont chacune offre un problème à reprendre avec une méthode nouvelle. […] Les personnalités sont nombreuses et ma méthode en souligne précisément l’importance, en faisant de chacune d’elles un problème nouveau, à résoudre non par une formule, mais par une compréhension faite d’amour et de goût autant que de savoir ; ce ne sont pas des contradictions à la loi, ce sont des combinaisons infiniment variées de forces diverses : tradition, conditions de la réalité présente, individualité. […] Remarquons dès à présent que la primauté intellectuelle de la France, indiscutable pendant les deux premières ères, nous apparaît beaucoup moins nette au cours de la troisième ; pour diverses raisons : cette époque est trop près de nous pour que nous puissions en voir l’essentiel ; la science des faits les plus minimes nous cache le mouvement des idées ; enfin, le développement d’autres nationalités (et surtout de la nation allemande) a créé une littérature européenne où la France ne règne plus en maîtresse absolue ; mais son rôle au xxe  siècle n’en demeure pas moins très particulier, même là où elle ne fait que reprendre des méthodes ou des idées allemandes. — On peut dire de la France qu’elle n’est pas mystique, ni passionnée, ni artiste par intuition ; elle n’est pas créatrice, mais elle est l’éducatrice ; logique, elle dégage des idées latentes ce qui est essentiel, et le met en lumière pour tous ; pratique, elle le réalise ; puis, éprise de justice et de vérité jusqu’au fanatisme, elle constate la première l’insuffisance des réalités présentes, et dans son généreux enthousiasme elle semble se déchirer elle-même, en formulant l’angoisse générale, comme elle avait trouvé hier la formule de l’ordre et de la discipline.

756. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — [Introduction] » pp. 132-142

Un grand génie, Descartes, est venu proclamer hardiment qu’il y avait des matières où l’érudition n’était qu’un embarras, et que l’esprit humain, pour procéder avec sûreté, n’avait qu’à s’armer de méthodes propres à lui, exactes et nouvelles.

757. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XX. Du dix-huitième siècle, jusqu’en 1789 » pp. 389-405

La pureté du style, l’élégance des expressions n’ont pu faire des progrès après Racine et Fénelon ; mais la méthode analytique donnant plus d’indépendance à l’esprit, a porté la réflexion sur une foule d’objets nouveaux.

758. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre VII. Narrations. — Dialogues. — Dissertations. »

À l’ordinaire, les deux méthodes peuvent se combiner.

759. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre IV. La langue française au xviie  »

C’est un recueil de décisions particulières, précédées d’une préface où l’auteur explique ses principes et sa méthode.

760. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Stendhal, son journal, 1801-1814, publié par MM. Casimir Stryienski et François de Nion. »

Il procède en poésie, comme il a fait en amour, avec suite et méthode, tout un luxe de réflexions, de préparations et de préméditations.

761. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 272-292

Ses Œuvres philosophiques auront toujours le mérite de réunir la précision & la netteté à la méthode & à l’élégance.

762. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — Les traductions. » pp. 125-144

Le critique accompagne néanmoins ses observations de ménagement & de beaucoup de politesses ; mais il mit, dans la suite, plus de chaleur & de méthode dans un discours, sur la traduction des poëtes, placé à la tête de celle de Virgile.

763. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre III : Le problème religieux »

La philosophie considérée à un certain point de vue, est une science qui, comme toute science, procède par analyse, raisonnement, démonstration, dont les conclusions sont toujours subordonnées à la solidité de la méthode qui nous les fournit, qui est obligée de donner beaucoup à la dialectique, c’est-à-dire à la discussion du pour ou du contre, qui est en un mot essentiellement rationnelle.

764. (1757) Réflexions sur le goût

Faute de suivre cette méthode, l’imagination échauffée par quelques beautés du premier ordre dans un ouvrage, monstrueux d’ailleurs, fermera bientôt les yeux sur les endroits faibles, transformera les défauts même en beautés, et nous conduira par degrés à cet enthousiasme froid et stupide qui ne sent rien à force d’admirer tout ; espèce de paralysie de l’esprit, qui nous rend indignes et incapables de goûter les beautés réelles.

765. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Eugène Pelletan » pp. 203-217

Tout pour la phrase et par la phrase, voilà la méthode en action de l’auteur des Uns et des Autres, pourvu que cette phrase soit trempée pourtant dans le vermillon de la République ou de la libre-pensée.

766. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Athanase Renard. Les Philosophes et la Philosophie » pp. 431-446

Il n’est point pédant comme les philosophes qu’il combat, et dont quelquefois il se moque avec une bonhomie meurtrière… Du fond de sa province, où il est peut-être resté toute sa vie, — comme Rocaché, le grand médecin des Landes, cet immense praticien, plus haut que la fortune et que la gloire, inconnu à Paris, mais regardé comme un dieu de Bordeaux à Barcelone, où il régna cinquante ans sur la santé et sur la maladie, — le Dr Athanase Renard, dont j’ignore la valeur comme médecin, apparaît dans son livre comme un robuste penseur solitaire, et ce qui étonne davantage, comme un homme de la compétence la plus éclairée sur toutes les questions d’enseignement, de méthodes et de classifications de ce temps, et comme s’il avait vécu dans le milieu philosophique où ces questions s’agitent le plus… Par ce côté, il ressemble encore à Saint-Bonnet, le grand esprit métaphysique dont le rayonnement finira un jour par tout percer, et qui aussi vivait au loin de ce que les flatteurs ou les fats de Paris appellent insolemment la Ville-lumière.

767. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Maynard »

II Et je me permets d’insister sur cette mâle conduite, sur l’excellence d’une méthode qui a peut-être beaucoup coûté à l’enthousiasme du nouvel historien de saint Vincent de Paul, mais dont il ne s’est jamais départi dans les quatre immenses volumes qu’il a publiés.

768. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Le Marquis Eudes de M*** »

Car voilà le côté par lequel, à cette époque de discussion et d’analyse, le livre des Esprits s’imposera à ceux-mêmes qui, d’instinct ou de philosophie, seraient les plus disposés à le rejeter : la science, et, ajoutons-y encore, la loyauté dans la méthode.

769. (1884) L’art de la mise en scène. Essai d’esthétique théâtrale

Quant à la méthode de travail qui a présidé à l’élaboration de cette étude, je crois devoir en dire ici quelques mots. […] Cette méthode implique l’indication de tous les emprunts qu’on a pu faire, et la citation de tous les auteurs dont on reproduit intégralement les idées. […] Il a été écrit en effet d’un bout à l’autre sans le secours d’aucune note et d’aucun livre, par la simple méthode spéculative. Chacune des deux méthodes que j’oppose l’une à l’autre a ses vertus et ses défauts : ce n’est pas ici le lieu de les comparer entre elles. […] Mais il me paraît nécessaire de les rattacher à un point fixe et de chercher, en dehors du théâtre, une méthode de démonstration.

770. (1913) Les livres du Temps. Première série pp. -406

Il n’est pas de période dans la vie de l’empereur qui s’accommode mieux de la méthode et des procédés de M.  […] Bergson, la méthode intuitive. […] La méthode est différente : psychologiquement et esthétiquement, c’est du même ordre. […] Paul Fort d’adopter dans son œuvre la méthode, ou l’absence de méthode, que la nature applique à la sienne. […] Logiquement, rien ne vous empêchera de reconnaître l’étendue de son érudition et l’excellence de sa méthode.

771. (1889) Ægri somnia : pensées et caractères

Je ne veux montrer, dans ces quelques pages sur Pasteur, que ce que j’ai vu de sa méthode de travail, et ce que je lui ai d’obligation personnelle comme écrivain. […] Une même méthode, servie par les mêmes moyens de vérification, produit partout les mêmes résultats. […] Aujourd’hui l’historien, le moraliste, l’érudit, tout écrivain, prosateur ou poète, sont hantés vaguement par des souvenirs de leurs méthodes. […] Il n’est aucun de nos entretiens, d’où je ne sois revenu pénétré de ce que sa méthode avait d’efficacité comme méthode générale, et plus résolu à redoubler d’attention à mes pensées, de défiance des premières vues, d’amour pour la vérité, de dédain de l’effet. […] Il faut faire cela avec régularité et méthode, mettre du sang-froid dans le dévouement, de la discipline dans le sacrifice, ne pas mourir en tumulte.

772. (1922) Le stupide XIXe siècle, exposé des insanités meurtrières qui se sont abattues sur la France depuis 130 ans, 1789-1919

Mais qu’est-ce que Comte à côté de Descartes, du solide Descartes du Discours de la méthode et du poète si original des tourbillons ! […] C’est la coutume issue des travaux des champs, de leur ordre et de leur méthode. […] Ces hystériques si nombreux, si démonstratifs, si typiques, c’est nous médecins, qui par nos méthodes imprudentes d’examen, en faisions la culture artificielle et intensive. […] Cependant (m’objecterez-vous) il y a l’expérience, la méthode expérimentale, qui donne des résultats positifs. […] Quiconque lit attentivement le Discours de la Méthode de Descartes découvre cette préoccupation derrière ses formules d’aspect bon enfant.

773. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome I pp. 5-537

Comment eussions-nous étudié la nature sans user d’une semblable méthode ? […] On sent que, par cette méthode, il ne me sera pas permis de discourir au hasard sur des points indéterminés. […] Cette méthode veut qu’on passe du genre simple au composé, de celui-ci au plus composé encore, et qu’on arrive graduellement ainsi au terme des complications pas à pas éclaircies. […] Peut-être les savants, trop sévères aux écrivains, frappés de la méthode analytique des principes de l’art d’écrire, mis en rapport avec les méthodes à leur usage, n’appelleront plus ironiquement les gens de lettres, des hommes à imagination. […] Ce malheur est celui de quelques hellénistes plus érudits que je ne le suis, mais moins méditatifs sur les méthodes des praticiens.

774. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Joseph de Maistre »

Cet ordre de considérations anodines ne fait rien à l’affaire, à la vérité, qui est de savoir si Bacon a inventé ou non une méthode, et dans quelle vue il la voulait, et où cela menait. […] Je n’ai pas assez lu ni étudié Bacon pour avoir droit d’exprimer sur son compte une idée complète ; mais toutes les fois que dans ma jeunesse curieuse, provoqué, harcelé par les éloges en quelque sorte fanatiques que je voyais décerner invariablement à Bacon en tête de chaque préface, dans tout livre de physique, de physiologie et de philosophie, j’essayai de l’aborder, je fus assez surpris d’y trouver un tout autre homme que celui de la méthode expérimentale stricte et simple qu’on préconisait213 ; j’y trouvai un heureux, abondant et un peu confus écrivain, plein d’idées et de vues dont quelques-unes hasardées et même superstitieuses, mais surtout riche de projets ingénieux, d’aperçus attrayants (hints, impetus), d’observations morales revêtues d’une belle forme, dorées d’une belle veine, et capables de faire axiome avec éclat. […] Il insiste encore sur ce qu’il ne s’agit pas seulement de compiler, de prendre chez les historiens et les critiques une matière toute digérée, mais de saisir par ordre les livres essentiels, les monuments principaux, chacun dans son moment, et alors, non pas en les lisant jusqu’au bout et tout entiers, mais en les dégustant, en sachant en saisir l’objet, le style, la méthode, d’évoquer par une sorte d’enchantement magique le génie littéraire d’un temps. — Et cela, il le conseille, non point pour la pure gloire des lettres, non pour le pur amour ardent qu’il leur porte (bien qu’il en soit dévoré), non par pure curiosité poussée à l’extrême (avis à nous autres, amateurs trop minutieux !), mais dans un but plus sérieux et plus grave, pour suggérer aux doctes dans l’usage et l’administration de leur science un meilleur régime, de meilleures méthodes, une prudence et une sagacité plus éclairées. « Il y a lieu, ajoute-t-il en concluant, de se donner le spectacle des mouvements et des perturbations, des bonnes et des mauvaises veines, dans l’ordre intellectuel comme dans l’ordre civil, et d’en profiter. »  — Ainsi s’exprime Bacon en termes formels, et ce n’est que de nos jours, et depuis très-peu d’années, qu’en France une telle histoire est ébauchée à grand’-peine ! […] « M. de Maistre pourtant (et l’éloquent novateur s’en plaignait) ne comprenait pas son second volume de l’Indifférence », ce qui signifie qu’il lui faisait des objections et n’entrait pas volontiers dans cette méthode un peu trop scolastique et logique avec son esprit platonicien.

775. (1856) Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres pp. 5-62

La spirituelle Argumentation contre l’abolition du christianisme est écrite par Swift dans ce ton d’imperturbable plaisanterie où il excelle ; mais sous cette plaisanterie même, son opinion et surtout sa méthode en matière de polémique religieuse se reconnaissent aisément. […] « Les sages de tous les temps (5 juillet 1721) ont pensé que la meilleure méthode est de prendre les minutes comme elles volent, et de faire un plaisir de toute action innocente… Écrivez-moi gaîment, sans plaintes et sans prières ; autrement Cadenus le saura et vous punira. » Un an plus tard (13 juillet 1722), il écrivait : « Montez à cheval, faites-vous suivre de deux domestiques, et allez voir vos voisins, les plus petits de préférence ; il y a du plaisir à être respecté, et vous le pouvez toujours par votre esprit et votre fortune. La meilleure méthode que je connaisse en cette vie, est de prendre son café quand on peut, et de s’en passer gaîment quand on ne le peut pas ; tant que vous aurez le spleen, vous pouvez être sûre que je vous prêcherai. » Il n’eut pas à lui faire longtemps ces injustes et inutiles reproches.

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