Sitôt que j’ai eu mis le premier sapin devant moi, il m’a pris comme un mouvement de joie, de gaieté même, de voir la mine embarrassée de mon voleur. […] Suard en jugeait comme Napoléon, et La Harpe écrivait : « Il est facile de concevoir les jouissances et les joies d’un public charmé de s’amuser aux dépens de l’autorité, qui consent elle-même à être bernée sur les planches. » Mais, où le rire général se mêle et où l’ivresse éclate, que peuvent les prévisions et les réserves de quelques esprits ? […] monsieur, les hommes n’ayant guère à choisir qu’entre la sottise et la folie, où je ne vois point de profit je veux au moins du plaisir ; et vive la joie !
Si elle nous enlève les joies, les croyances juvéniles de l’amant, du rêveur et du poëte, qu’elle nous apporte au moins l’impartialité du juge ! […] De temps à autre, on sent circuler dans la pièce un souffle vivifiant et doux, un parfum des joies de la famille, que nous retrouverons plus tard dans Agnès de Méranie. […] Dans ce cœur attristé et non desséché par le célibat, il y avait peut-être des trésors de dévouement et de tendresse, tout le bonheur, toute la joie, tout l’orgueil d’un honnête homme : hélas ! […] Mais alors, demanderai-je en toute humilité, d’où vient ce sentiment de joie sincère et profonde que j’éprouve lorsqu’il me tombe par hasard sous la main un livre excellent ? […] quelle joie et quel orgueil de pouvoir ajouter : ma guenille est Dieu !
Ne nous ont-ils pas prêté leurs chants pour nos amours, pour nos joies ? […] Maudit-il son âpre destinée, qui lui avait interdit les joies concédées à toutes les autres ? […] que d’amertumes effroyables mêlées à ces tristes et courtes joies ! […] « Avec quelle joie j’entendais proclamer les victoires de la République ! […] Elle grandit dans les innocentes joies d’une vie patriarcale.
Alors, ami blessé, ton cœur serait guéri ; Chaque vivant objet, que la trame déploie, Te rendrait un écho d’harmonie et de joie ; Et soumis, adorant, tu sentirais partout Dieu présent et visible, et tout entier dans tout !
Il comprend cent soixante-dix sonnets développant tout un roman d’amour qui commence par la floraison des aveux et des premières tendresses, se continue au bord des flots bleus, dans les monts, s’attriste d’une querelle, se poursuit en rêveries, devant la mélancolie des vagues grises, se termine enfin par le sacrifice, le deuil et l’acceptation virile qui n’est pas l’oubli… C’est bien l’histoire commune et éternelle des cœurs… C’est un véritable écrin que l’Amie perdue, un écrin plein de colliers et de bracelets pour l’adorée, et aussi de pleurs s’égrenant en rosaire harmonieux… C’est un des plus nobles livres d’amour que j’aie lus, parce qu’il est plein d’adorations et exempt de bassesses, parce que la joie et la douleur y sont chantées sur un mode toujours élevé, entre ciel et terre, comme le vol des cygnes qui ne s’abaisse pas même quand leur aile s’ensanglante d’une blessure… Je vous assure qu’il est là tel sonnet que les amants de tous les âges à venir, même le plus lointains, aimeront à relire, où ils retrouveront leur propre pensée et leur propre rêve, comme le doux André Chénier souhaitait qu’il en fût de ses vers d’amour… [Le Journal (26 juillet 1896).]
Lo poète nous les montra dans leurs occupations quotidiennes, dans leurs ordinaires joies, dans leurs naturelles douleurs.
De clairs paysages de nature jeune, un crépuscule sur un bois d’avril, des plaintes d’oiseaux parmi les branches, une forêt effeuillée par la brise, des processions pieuses de jeunes filles dans un lointain discret, et puis les sanglots et les joies d’une âme fraîche et calme, voilà tous les aspects qu’a présentés, à notre vue, le poète du Lis dans son récent ouvrage.
Il n’y a peut-être rien de plus favorable aux Muses, que ce lieu de purification, placé sur les confins de la douleur et de la joie, où viennent se réunir les sentiments confus du bonheur et de l’infortune.
Les yeux du voyageur viennent d’abord s’attacher sur cette flèche religieuse, dont l’aspect réveille une foule de sentiments et de souvenirs : c’est la pyramide funèbre autour de laquelle dorment les aïeux ; c’est le monument de joie où l’airain sacré annonce la vie du fidèle ; c’est là que les époux s’unissent ; c’est là que les chrétiens se prosternent au pied des autels, le faible pour prier le Dieu de force, le coupable pour implorer le Dieu de miséricorde, l’innocent pour chanter le Dieu de bonté.
Le dégoût qu’inspiraient certains excès dramatiques récents fut pour beaucoup dans la joie et la vivacité de cette reprise. […] » — « C’est moi, monsieur, répliqua-t-elle en se retournant brusquement dans le couloir, son petit cabas à la main, c’est moi-même ; mais donnez-moi donc deux sous pour m’acheter de la galette, s’il vous plaît. » Et voilà pourquoi, entre autres motifs à l’appui, elle eut toute raison, l’autre soir, de reparaître dans le personnage de l’illustre infortunée à qui elle avait dû une joie d’enfance ; voilà pourquoi elle eut raison de vouloir dire, aux applaudissements de tous, ce mot de fierté qu’elle relève si bien : Si le Ciel était juste, indigne souveraine, Vous seriez à mes pieds, et je suis votre reine. […] quelle joie De tenir dans mes mains et leur vie et ma proie De les voir, reculant à l’aspect de leur roi, Fuir sans trouver d’asile où se sauver de moi, Et, pâles de leur crainte et de la mort future, Implorer vainement, même la sépulture ! […] J’ai sous les yeux la plupart des journaux du temps ; le Journal des Débats, le seul qui, dès ce temps-là, voulut être sévère constate lui-même l’entier triomphe : « La joie est dans le camp des romantiques, s’écrie Étienne Becquet en commençant88 ; le succès de M.
Au chant xiii de l’Odyssée, Ulysse, trop longtemps retenu à son gré chez les Phéaciens, a obtenu un vaisseau ; il doit partir le soir même, il assiste au dernier festin que lui donnent ses hôtes ; mais, impatient qu’il est de s’embarquer pour son Ithaque, il n’entend qu’avec distraction, cette fois, le chantre divin Demodocus, et il tourne souvent la tête vers le soleil comme pour le presser de se coucher : « Comme lorsque le besoin du repas se fait sentir à l’homme qui, tout le jour, a conduit à travers son champ les bœufs noirs tirant l’épaisse charrue : il voit joyeusement se coucher la lumière du soleil pressé qu’il est d’aller prendre son souper, et les genoux lui font mal en marchant ; c’est avec une pareille joie qu’Ulysse vit se coucher la lumière du soleil. » La passion de l’exilé sur le point de revoir sa patrie, comparée à celle du pauvre journalier pour son souper et son gîte à la dernière heure d’une journée laborieuse, ne se trouve point rabaissée en cela ; elle n’en paraît que plongeant plus à fond, enracinée plus avant dans la nature humaine ; mais rien n’est compris si cette circonstance naïve des genoux qui font mal en marchant est atténuée ou dissimulée ; car c’est justement cette peine qui est expressive, et qui aide à mesurer l’impatience même, la joie de ce simple cœur. […] L’enfant est plus belle que toutes vos couronnes. » Si, dans un festin, la coupe a touché les lèvres de Zénophila, il s’écrie : « Le calice a souri de joie, il dit qu’il a touché la lèvre éloquente de l’aimable Zénophila : bienheureux ! […] Mais de tels vœux et de telles plaintes, qui supposent si aisément l’infidélité de l’amante, sont trop ordinaires à tous les élégiaques antiques ; ce qui nous peut indiquer que l’amour de Méléagre pour Héliodora s’est élevé à quelque chose de plus particulier et de plus senti dans l’ordre du cœur, ce sont des accents comme ceux-ci ; il est à table avec ses amis, les coupes circulent, la joie déborde ; lui, il regrette celle qui, la veille, était à ses côtés : « Verse, et dis encore, encore, encore, A Héliodora !
Quelque difficulté et quelque péril qui me parussent dans un tel projet, je puis dire qu’il me donna plus de joie que je n’en avois eu de ma vie. […] « On a bien de la peine à rompre, quand on ne s’aime plus. » On en était à ce point de difficulté : M. de Nemours le trancha, et M. de La Rochefoucauld saisit avec joie une occasion d’être libre, en faisant l’offensé : « Quand nous sommes las d’aimer, nous sommes bien aises qu’on nous devienne infidèle pour nous dégager de notre fidélité. » Il fut donc bien aise, mais non pas sans mélange ni sans des retours amers : « La jalousie, il l’a dit, naît avec l’amour ; mais elle ne meurt pas toujours avec lui. » Le châtiment de ces sortes de liaisons, c’est qu’on souffre également de les porter et de les rompre. […] Les joies, les peines de famille le trouvaient incomparable. […] c’est leur jeunesse d’âme prolongée, c’est leur belle humeur heureuse et leur vive source de joie naturelle qu’ils continuent d’aimer autour d’eux.
L’Italie est en deuil des religions et des empires, le bruit et la joie attristent dans cette maison de douleur. […] La joie et la tristesse se fondaient dans son accent ; le site élevé, la touffe de verdure, le son de la clochette, la lueur sereine du soleil sur ce groupe de murailles, attirèrent machinalement mes pas vers le couvent. […] Ceux dont l’enfance fut triste ne renaissent jamais complètement à la joie, dit Sénèque, dans des vers qui semblent d’hier : Pectora longis habitata malis Non sollicitas ponunt curas ; Proprium hoc miseros sequitur vitium, Nunquam rebus credere lætis, Redeat felix fortuna licet. […] L’infortuné Bernardo, consolé au moins par la présence de son fils, n’avait témoigné à sa dernière heure que la joie d’aller rejoindre, dans le sein de Dieu, cette Porcia qu’il avait tant aimée, et de laisser sur la terre, pour perpétuer son nom, un fils dont la tendresse et la gloire naissante le récompensaient de ses longues adversités.
Les derniers sons de la cloche d’argent des ermites résonnaient encore, comme une gaieté des anges, à travers les branches du châtaignier ; le soleil d’automne éblouissait dans les feuilles jaunes ; les châtaignes, presque mûres, tombaient une à une, avec les feuilles d’or, sur l’herbe court tondue par les brebis ; on entendait la cascade pleuvoir allègrement dans le bassin, et les merles siffler de joie en se frôlant les ailes et en se rappelant dans les lauriers. Il semblait qu’une joie sortait du ciel, de l’eau, de l’arbre, de la terre, avec les rayons, et disait, dans le cœur, aux oiseaux, aux animaux, aux jeunes gens et aux jeunes filles : « Enivrez-vous, voilà la coupe de la vie toute pleine. » Dans ces moments-là, monsieur, on se sentait, de mon temps, soulevé pour ainsi dire de terre, comme par un ressort élastique sous les pieds. […] Ils dansaient ainsi de joie, pour danser, sans se douter seulement que le malheur les épiait sous la figure de ce capitaine des sbires et de ses amis, en habits noirs, derrière les arbres. […] Ces belles larges feuilles qui étaient bien à nous, puisque leurs pampres nous avaient cherchés de si loin pour s’accrocher à nos tuiles sur le toit et à nos piliers de pierre devant la porte, et jusqu’aux lucarnes de la chambre haute de Fior d’Aliza, où elles se glissaient par les fentes du volet ; ces beaux sarments serpentant qui faisaient notre ombre l’été, notre gaieté l’automne, notre joie sur la table l’hiver, nous caressaient pour la dernière fois comme un chien qui meurt en vous léchant les pieds ; morts non pas pour tout le monde, monsieur, mais morts pour nous.
» l’emportaient sur tout, prison, grilles, chaînes, échafaud même ; la zampogne semblait plutôt délirer que jouer sous mes doigts, et les notes qui s’échappaient criaient de joie, insensées, comme les eaux de la grotte, amassées dans le bassin et longtemps retenues, quand nous ouvrons les rigoles, s’élancent en cascades en se précipitant en écume et en bondissant au lieu de couler, et je me disais : « Il m’entend, et ce délire est un langage à son oreille qui lui apprend ce que ma bouche n’a pas achevé de lui confesser. » Les prisonniers se pressaient aux lucarnes et croyaient peut-être que j’étais tombée en folie. […] Mais il n’y avait que Hyeronimo qui comprît ma pensée et la sienne dans les joies ou dans les tristesses de la zampogne : nos deux âmes s’unissaient dans le même son ! […] Qu’est-ce qu’il me disait, qu’est-ce que je lui disais, je n’en sais plus rien ; pas beaucoup de mots peut-être, rien que des soupirs, mais dans ces silences, dans ce peu de mots, il y avait d’abord la joie de savoir que nous nous étions trompés et bien trompés, monsieur, en croyant depuis six mois que nous avions de l’aversion l’un pour l’autre, tandis que c’était par je ne sais quoi que nous nous fuyions comme deux chevreaux qui se cherchent, qui se regardent, qui se font peur et qui reviennent pour se fuir et se chercher de nouveau, sans savoir pourquoi. […] Premièrement, le petit chien Zampogna fut tout à fait guéri de sa jambe coupée et commença à japper un peu de joie autour de nous en gambadant sur ses trois pattes, devant la porte, comme pour me dire : Maître, sortons donc et allons chercher ceux qui manquent à la maison ; je puis à présent te servir et te conduire comme autrefois ; fie-toi à moi de choisir les bons sentiers et d’éviter les mauvais pas ; et il s’élançait sur le chemin qui descend vers Lucques comme s’il eût compris que ses deux amis étaient là-bas ; puis il revenait pour s’y élancer encore.
. — Écrivant dans sa vieillesse un parallèle de Thémistocle et d’Aristide comme modèle pour perfectionner les Vies de Plutarque, il adresse ce petit écrit à Mme Dupin, femme du fermier général, l’une des quatre ou cinq jolies femmes de Paris qui s’étaient engouées de lui, et il lui dit dans sa lettre d’envoi : Voilà, madame, Aristide et Témistocle dont j’ai comancé la vie dans ce charmant séjour que vous habitez (à Chenonceaux) ; vous les trouverez écrites suivant ce nouveau plan que je vous propozai un jour sur les bords du Cher dans une de nos promenades filozofiques où vous trouviez tant de plézir… J’avoue que j’eus une grande joie de voir ainsi qu’à votre âge, et avec les charmes de la jeunesse, vous étiez capable d’estimer le sansé, lorsque tout ce qui vous anvironne n’estime que l’agréable présant, au lieu que l’utile ou le sansé ne regarde que l’agréable futur. […] Lui, il raisonne, il moralise et abonde à cœur joie en son sens unique.
Ni de vous je ne parlerai non plus, harmonieux poëte de la vie domestique et des joies du Foyer 29, Madame Auguste Penquer, qui avez depuis étendu votre vol et enhardi votre essor dans les Révélations poétiques 30 ; âme et lyre également bien douées, à la note large et pleine, aux cordes sensibles et nombreuses ; que rien de particulièrement breton ne distingue, si ce n’est l’amour du pays natal ; qui avez mérité d’être saluée comme une jeune sœur de ceux que vous nommez « le cygne de Mâcon » et « l’aigle de Guernesey », et qui n’avez qu’à vous garder d’un éblouissement trop lyrique en présence des demi-dieux. […] Félix Gaudin, auteur de Poésies chrétiennes 35, âme honnête, éprouvée, reconnaissante, que l’injustice a atteinte, que la foi a relevée et consolée, humble acolyte en poésie, et qui, dans le pieux cortège, me fait l’effet de psalmodier ses rimes à mi-voix, en tenant à la main le livre de l’Imitation d’où la joie et la paix lui sont revenues.
Au nord, l’Océan bat les falaises blanchâtres ou noie les terres plates ; les coups de ce bélier monotone qui heurte obstinément la grève, l’entassement de ces eaux stériles qui assiègent l’embouchure des fleuves, la joie des vagues indomptées qui s’entre-choquent follement sur la plaine sans limites, font descendre au fond du coeur des émotions tragiques ; la mer est un hôte disproportionné et sauvage dont le voisinage laisse toujours dans l’homme un fond d’inquiétude et d’accablement. — En avançant vers l’est, vous rencontrez la grasse Flandre, antique nourrice de la vie corporelle, ses plaines immenses toutes regorgeantes d’une abondance grossière, ses prairies peuplées de troupeaux couchés qui ruminent, ses larges fleuves qui tournoient paisiblement à pleins bords sous les bateaux chargés, ses nuages noirâtres tachés de blancheurs éclatantes qui abattent incessamment leurs averses sur la verdure, son ciel changeant, plein de violents contrastes, et qui répand une beauté poétique sur sa lourde fécondité. — Au sortir de ce grand potager, le Rhin apparaît, et l’on remonte vers la France. […] Ce plaisir ne ressemble en rien à la joie physique, qui est méprisable parce qu’elle est grossière ; au contraire, il aiguise l’intelligence et fait découvrir mainte idée fine ou scabreuse ; les fabliaux sont remplis de vérités sur l’homme et encore plus sur la femme, sur les basses conditions et encore plus sur les hautes ; c’est une manière de philosopher à la dérobée et hardiment, en dépit des conventions et contre les puissances.
La Grèce qu’il, aime, où il vit, c’est la Grèce aimable, légère, joyeuse de vivre, absorbant avidement de ses sens subtils tout ce que la nature a répandu de beautés et de plaisirs dans l’air, dans la lumière, dans les lignes des monts et la mobilité des îlots ; la Grèce des joies physiques et des passions naturelles, primitivement sensuelle ou voluptueuse avec raffinement, la Grèce homérique, alexandrine ou gréco-romaine, épique, idyllique, élégiaque. […] Il avait accueilli la Révolution avec joie, confiance, enthousiasme ; mais il ne tarda pas à s’inquiéter, à s’indigner : il était monarchiste constitutionnel, il avait Jacobins et Girondins en exécration.
Les tortures de la passion, les férocités et les lâchetés sociales, les âpres sanglots du désespoir, l’ironie et le dédain, tout se mêle avec force et harmonie dans ce cauchemar dantesque troué çà et là de lumineuses issues par où l’esprit s’envole vers la paix et la joie idéales. […] Sa Joie et sa Douleur le gardent, accroupies.
Il nous contait ses joies d’artiste, d’observateur ; ses impressions de flâneur et de noctambule. […] Je me souviens de la joie d’un jeune ouvrier maçon à peine échappé du service militaire, à qui Verlaine avait permis de copier des fragments de Sagesse.