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1001. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

Il lui offre des fleurs et des couronnes, et lui adresse des prières qui rappellent de très près les cantiques qu’on chante dans les catéchismes de persévérance. […] « Tu songes à quelque chose, dit la voix de Palomides. — Ce n’étaient pas des pierreries, là-bas, dans la grotte, dit la voix d’Alladine. — Et les fleurs n’étaient pas réelles […] Elle promet d’être à celui des deux qui lui rapportera la fleur qu’elle aime. […] Certes je consentirais à être « fauché dans ma fleur », — pour ce que j’en fais ! […] Déjà, il y a quarante ans, la dame aux camélias portait tranquillement à son corsage des fleurs qui étaient une enseigne, — et un renseignement.

1002. (1908) Jean Racine pp. 1-325

Hamon, qui, comme j’ai dit, avait l’imagination riante, et qui mettait dans ses méditations spirituelles, pour en tirer de subtiles comparaisons à la manière de saint François de Sales, beaucoup de fleurs, d’arbres et d’animaux. […] Acante ne manqua pas, selon sa coutume, de proposer une promenade en quelque lieu hors de la ville… Il aimait extrêmement les jardins, les fleurs et les ombrages. […] Que de vers qui semblent éclos sans effort, comme de grandes fleurs merveilleuses, comme des lis ! […] Sur leur entablement régnait une balustrade où étaient arrangés des vases de porcelaine pleins de fleurs ; les bassins des fontaines étaient de marbre blanc, soutenus par des tritons dorés ; et dans ces bassins on en voyait d’autres pins élevés qui portaient de grandes statues d’or. […] Il lui offre des fleurs et des couronnes, et lui adresse des prières qui rappellent de très près les cantiques qu’on chante dans les catéchismes de persévérance.

1003. (1894) Études littéraires : seizième siècle

Comme La Fontaine, il n’est que poète, parfaitement dénué de sens pratique et d’esprit de conduite, incertain et vagabond, ne se fixant guère que dans la compagnie et au service d’une femme supérieure qu’il aime, qui le séduit, qui le retient et qui lui impose ; comme La Fontaine, il est grand liseur de toutes sortes de choses, très divers et « volant à tous les vents » de la lecture capricieuse, et faisant son miel de toutes fleurs ; comme La Fontaine, avec de la tendresse, de la délicatesse et de l’esprit, il n’a d’élévation en sentiments et en pensées, à la rencontre, que ce qu’en donnent le goût du beau, l’éducation littéraire et le tour d’esprit poétique, ce qui est quelque chose, et ce qui n’est pas assez ; comme La Fontaine, il est surtout homme de style, fin et savant et passionné ouvrier de lettres, artiste en tours de phrases, en choix de mots et en rythmes, orfèvre en langue française. […] Mais que les jeunes poètes « cueillent ses sentences comme belles fleurs », qu’ils « contemplent l’esprit qu’il avait », que « de lui ils apprennent àproprement décrire » et qu’ils contrefassent sa veine, « mêmement celle dont il use dans ses ballades, qui est vraiment belle et héroïque. […] Ces excès touchants et charmants, dangereux, je le reconnais et contraires aux nécessités sociales, ces excès de la doctrine, ou bien plutôt du sentiment évangélique, que l’on trouve si souvent dans les paroles de Jésus, et qui sont comme la fleur exquise et trop enivrante du christianisme : « Point de procès, point de serments, tu ne tueras pas, donnez encore votre manteau, tendez l’autre joue », étonnent Calvin, ce que j’admets, et l’étonnent trop, ce qui me déplaît.

1004. (1930) Les livres du Temps. Troisième série pp. 1-288

… D’un point de vue plus haut, la fleur est une fin en soi. […] René Benjamin : Sous l’œil en fleur de madame de Noailles. « Anna est exaspérée », disait l’une. « Désespérée », répondait l’autre. […] La fleur et le miel sont cependant la meilleure part. […] Le malheur est que les plus ravissantes fleurs de serre ne durent pas. […] Charmante jeune fille en fleur, mais avec un cœur d’artichaut, si j’ose m’exprimer ainsi.

1005. (1881) Études sur la littérature française moderne et contemporaine

Derrière les faucheurs, qu’on croirait fils du Temps, Les fleurs jonchent le sol de débris palpitants. […] Ses vers ne sont pas les fleurs exotiques aux couleurs éblouissantes que l’œil admire dans les serres chaudes de M.  […] Et l’on joue à cueillir des fleurs, on rit, on jase. […] Une casquette d’étudiant, couronnée de fleurs printanières, ceignait son front candide. […] L’action la plus religieuse était d’exposer des formes pures… On immolait des victimes avec des fleurs autour des doigts.

1006. (1895) Le mal d’écrire et le roman contemporain

Xavier Marmier, un prosateur de l’ancienne école, qui a fait à peu près les mêmes œuvres que l’auteur des Fleurs d’ennui. […] Tous deux ont le donde l’émotion : chez Feuillet elle est à fleur d’âme, à fleur de phrases, dans une situation extrême et tendue ; chez Loti elle pénètre tout le récit et vous rend malade de pitié. […] Au moment où on y songe le moins, la fleur de ce talent s’épanouit et vous enivre de tout son parfum. […] Son interprétation de la nature est essentiellement choisie et à fleur d’âme. […] Heureux celui dont la vie est tombée en fleurs !

1007. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre IV. Que la critique doit être écrite avec zèle, et par des hommes de talent » pp. 136-215

À tout prendre, et malgré les fleurs, — malgré les fortunes dont elle est semée, la route que parcourt Don Juan est aussi triste que la route que parcourt Hamlet, encombrée de frimas et de neiges : c’est que, dans l’une et l’autre route, est semé le doute, cette épine amère, cette ronce fatale que nulle main ne peut arracher. […] Au contraire, c’est la fine fleur des grands seigneurs pour l’esprit, pour le tact, pour l’éloquence, pour la grâce, le courage et le bon goût […] chantaient de leurs voix fraîches et d’un bel accent : Toute la gloire et la fleur du hameau. […] C’est par ce qu’elle était à cette œuvre, que le nom de La Vallière est resté, en nos souvenirs et dans nos respects, le mot d’ordre de tant de grandes choses dont se compose le grand siècle. — Elle a entendu les premiers bruits du Versailles naissant ; elle a vu fleurir les premières fleurs de ce jardin des Hespérides ; elle a vu s’élancer dans les airs rafraîchis, les premières eaux de ces bassins amenées de si loin, par la volonté d’un seul, pour le plaisir de tous. […] Au dernier acte, Mademoiselle de La Vallière arrive aux sons de la musique, pour prononcer ses vœux ; au pied de la croix, le roi l’arrête, en s’écriant : — « Tu es rendue à l’amour. — Ne m’appelle pas sire ; reviens à ces heures délicieuses où je n’étais que ton amant. — Où tu étais mon oiseau, ma belle fleur, ma violette !

1008. (1898) La poésie lyrique en France au XIXe siècle

Cette maison, voici comment, plus tard, le vieux Lamartine s’en souvient et la décrit : il se rappelle le temps où La maison vibrait comme un grand cœur de pierre, De tous ces cœurs joyeux qui battaient sous ses toits, À l’heure où la rosée au soleil s’évapore, Où ses volets fermés s’ouvraient à la chaleur, Pour y laisser entrer, avec la tiède aurore, Les nocturnes parfums de nos vignes en fleur. […] Victor Hugo va les trouver dans ce jardin des Feuillantines, un jardin de couvent abandonné, où s’était établie la famille Hugo ; jardin plein de vieux arbres, de jeunes fleurs, auxquels le poète est resté plus tard toujours reconnaissant, et auxquels l’enfant était d’autant plus attaché qu’il craignait sans cesse qu’on vînt l’arracher à ce jardin. Le jardin était grand, profond, mystérieux, Fermé par de hauts murs aux regards curieux, Semé de fleurs s’ouvrant ainsi que les paupières, Et d’insectes vermeils qui couraient sur les pierres, Plein de bourdonnements et de confuses voix ; Au milieu, presque un champ ; dans le fond, presque un bois. […] Le front mâle et fier, la joue en fleur et qui gardait encore les roses de l’enfance, la narine enflée du souffle du désir, il avançait le talon sonnant et l’œil au ciel, comme assuré de sa conquête et tout plein de l’orgueil de la vie. » Et lui-même, Alfred de Musset, un peu plus tard, fatigué, lassé de beaucoup de choses, se revoit dans le passé tel qu’il était alors : Il était gai, jeune et hardi, Il se jetait en étourdi          À l’aventure. […] Si je pouvais être ce monsieur qui passe… Ce monsieur qui passe est charmant ; regarde : quelle belle culotte de soie, quelles belles fleurs rouges sur son gilet ; ses breloques de montre battent sur sa panse en opposition avec les basques de son habit qui voltigent sur ses mollets.

1009. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite et fin). »

il n’y a point de fruit qui n’ait son ver, point de fleur qui n’ait sa chenille, point de plaisir qui n’ait sa douleur : notre bonheur n’est qu’un malheur plus ou moins consolé. […] Après une promenade en Sologne : « J’ai fait une lieue ce matin dans des plaines de bruyères, et quelquefois entre des buissons qui sont couverts de fleurs, et qui chantent. » S’il fait une épître (et il en fit en ce temps-là de délicieuses pour la cordialité), et si la veine découle aisément : « Je travaille innocemment et avec plaisir comme un bûcheron qui chante dans ses bois en faisant ses fagots. » « Il y a dans mon clavecin poétique des jeux de flûte et de tonnerre ; comment cela va-t-il ensemble ?

1010. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vaugelas. Discours de M. Maurel, Premier avocat général, à l’audience solennelle de la Cour impériale de Chambéry. (Suite et fin.) »

Pourquoi celui-ci qui semblait né pour vivre et qui était comme formé à souhait n’a-t-il duré qu’une saison et s’est-il vu moissonné dans sa fleur ? […] L’orateur Calvus, chez les anciens, nous est représenté comme atteint de cette superstition qui le faisait ressembler à un malade imaginaire : pour trop craindre d’amasser du mauvais sang, on se tire des veines le plus pur et le meilleur. — Il compare encore ces écrivains uniquement élégants, qui prennent tant de peine aux mots, aux nombres, et si peu à la pensée, à ceux « qui s’amusent à cribler de la terre avec un grand soin pour n’y mettre ensuite que des tulipes et des anémones » ; belles fleurs, il est vrai, agréables à la vue, mais de peu de durée et de nul rapport.

1011. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DES MÉMOIRES DE MIRABEAU ET DE L’ÉTUDE DE M. VICTOR HUGO a ce sujet. » pp. 273-306

Parmi les guerriers, on n’en voyait pas de plus enviables et de plus grandement famés que les Turenne ou les Catinat ; et dans l’ordre des productions de l’esprit, la supériorité admise et admirée ne dépassait jamais le cercle des facultés humaines ; c’en était le couronnement et la fleur, flos et honos, l’enchantement, la décoration et la grâce. […] Au nom de cette classe intermédiaire, de plus en plus nombreuse, qui flotte entre les admirateurs aveugles et les admirés déifiés, qui n’est plus le vulgaire idolâtre et qui ne prétendra jamais au rang des demi-dieux, qui devra pourtant accorder sa juste estime et son admiration à qui méritera de la ravir, on est tenté de redemander quelques-uns de ces beaux et purs grands hommes dont les actes ou les œuvres sont comme la fleur du sommet de l’arbre humain, comme l’ombre bienfaisante qui s’en épanche, comme le sue mûri qui en découle.

1012. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mendès, Catulle (1841-1909) »

Poète en ses drames que gonfle un souffle énorme (l’épopée ; poète en ses études de critique, où il dit l’âme et le prodigieux génie de Wagner ; poète en ses fantaisies légères d’au jour le jour, harmonieuses et composées ainsi que des sonnets, en ses contes galants où, sous les fleurs de perversité et les voluptés féeriques et précieuses des boudoirs, percent parfois le piquant d’une ironie et l’amer d’un désenchantement ; poète en ses romans, surtout avec Zohar, aux baisers maudits ; même avec la Première maîtresse, et qui ne craint pas de descendre jusque dans le sombre enfer contemporain de nos avilissements d’amour, tout arrive à son cerveau en sensations, en visions de poète ; tout, sous sa plume ; se transforme en images de poète, exorbitées et glorieuses, la nature, l’homme, aussi bien que la légende et que le rêve. […] L’originalité de Catulle Mendès, c’est d’être un poète à la fois doux et brutal, tendre et cruel, naïf et pervers ; toute son œuvre, romans, vers, drames et comédies, atteste ce contraste : il aime les fleurs et les oiseaux, l’air pur, le ciel bleu, la nature claire des contes de fées, mais il se complaît aussi à la vue des Parisiennes en pantalon de dentelles et dont les jupons frissonnent de blancheur.

1013. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre cinquième »

On le voit aider des fruits de ses épargnes … La triste veuve à qui l’heur d’être mère Étoit sujet de plainte et surcroît de misère ; Racheter des, captifs ; doter la chasteté De la vierge nubile, à qui la pauvreté Refusoit un mari, fanissant en tristesse La misérable fleur de sa verte jeunesse. […] Ailleurs, parlant du plaisir pieux que trouvait saint Louis à lire les Écritures, et comparant son respect pour les livres sacrés au respect d’Alexandre pour les poèmes d’Homère, il dit : Il les tenoit enclos comme un riche trésor Dans un coffre odorant de cèdre et de fin or : Il les vouloit nommer la fleur de ses délices L’aiguillon des vertus et la bride des vices.

1014. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre troisième. La reconnaissance des souvenirs. Son rapport à l’appétit et au mouvement. »

De même, Goethe pouvait évoquer à volonté l’image d’une fleur et lui faire subir devant son esprit une série de transformations ; là encore le volontaire se distinguait de l’involontaire. […] Les deux aspects, l’un mécanique, l’autre mental, sont également nécessaires et toujours inséparables : le second est présent dès le début sous une forme quelconque, et ne survient pas à la fin comme un « accessoire » ; la fleur éclatante de la conscience est déjà en germe dans les racines que cache le sol, parce que la vie est déjà dans ces racines, et avec la vie une sensibilité plus ou moins sourde, qui n’a besoin que d’être concentrée et multipliée pour mériter le nom de conscience.

1015. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Michelet » pp. 167-205

Michelet est un déiste, qui croit que les fleurs, l’histoire naturelle et le déisme, cette religion cul-de-jatte, sont les meilleures garanties de la vertu et du bonheur des femmes. […] Mais, outre que cette découverte est une de ces petites fleurs de vérité qui viennent aux pieds de l’esprit de tout le monde et que le premier qui passe peut ramasser, cela n’influe d’aucune sorte sur le train de sa pensée en la surprenant par une goutte de lumière, et le derviche pâmé tourne toujours !

1016. (1898) Les personnages de roman pp. 39-76

On ne sacrifie pas, pour un entraînement d’imagination, sa jeunesse, sa beauté, sa joie et sa vie ; on ne s’enferme pas dans un couvent avec les rebuts de la rue ; on ne vit pas quarante ans chaste, pauvre, sans autre volonté que celle d’obéir, parce qu’on a le goût du blanc, des fleurs artificielles et du silence, parce qu’on aime à respirer l’odeur d’un grain d’encens. […] Je fais des péchés de sensualité à écouter la pluie tomber, un autre en buvant de l’eau fraîche, un autre à respirer les fleurs que j’aime tant ! 

1017. (1773) Discours sur l’origine, les progrès et le genre des romans pp. -

Les fleurs dont il étoit couvert suppléoient, sans doute, aux coquilles. […] Un Roman est le verger d’Idalie où les fruits se confondent avec les fleurs, où l’on doit cueillir sans effort les uns & les autres, où tout se trouve prêt, sans que rien semble avoir été préparé.

1018. (1874) Premiers lundis. Tome I « Espoir et vœu du mouvement littéraire et poétique après la Révolution de 1830. »

L’esprit et ce qu’on appelait le goût survivaient toujours et foisonnaient à l’envi ; mais c’étaient comme les fleurs légères jetées sur des armes, comme des paillettes au fourreau de soie des épées.

1019. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre VII » pp. 56-69

Auguste fut la fin du bon temps, Scipion en fut la fleur.

1020. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXIII » pp. 237-250

        La bagatelle, la science, Les chimères, le rien, tout est bon ; je soutiens         Qu’il faut de tout aux entretiens : C’est du parterre où Flore épand ses biens ; Sur différentes fleurs l’abeille s’y repose,         Et fait du miel de toute chose.

1021. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre II. Mme Le Normand »

Quand Mme Le Normand publia les Souvenirs de Madame Récamier, nous nous jetâmes tous, comme des enragés, sur son livre, attirés que nous étions par la touffe de fleurs de ce nom !

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