Dès que vous avez atteint l’âge mur, vous entendez déjà de toutes parts parler de votre mort. […] Les devoirs de la paternité consistent dans un dévouement continuel, et dès que les enfants ont atteint l’âge de raison, presque toutes les jouissances qu’ils donnent sont fondées sur les sacrifices qu’on leur fait. […] C’est ainsi que dans la force de l’âge même, souvent la destinée nous donne le signal de ce détachement de l’existence que le temps nous commandera tôt ou tard. […] Elle n’avait que dix-huit ans quand elle périt, et déjà son nom était célèbre par sa profonde connaissance des langues anciennes et modernes ; on a des lettres d’elle en Latin et en Grec qui supposent des facultés bien rares à son âge.
Je ne savais du grec classique que ce que l’enfance en apprend dans les premières études, et ce que l’âge mûr en fait oublier. […] VI À l’âge de dix-sept ans Aristote quitta la Macédoine pour venir à Athènes, capitale alors du génie humain, étudier sous les plus grands maîtres en tous genres de vertus, de sciences et d’arts, non-seulement la médecine, qu’il cultiva toujours comme Hippocrate, mais la philosophie sous Socrate, la poésie sous les commentateurs d’Homère, la métaphysique sous Platon, l’éloquence sous Démosthène, la politique sous Périclès, l’architecture et la sculpture sous Phidias, le drame sous Sophocle, Eschyle et même Euripide, toute la civilisation enfin sous le peuple athénien. […] Philippe, dont le fils Alexandre touchait à l’âge des études sérieuses, rappela Aristote à sa cour pour lui confier la dernière éducation de son fils. […] Une autorité conférée par l’âge ne peut irriter la jalousie, ni enfler la vanité de personne, surtout lorsque chacun est assuré d’obtenir avec les années la même prérogative.
Maur, où il fit profession à l’âge de dix-neuf ans dans l’Abbaye de Jumieges, en 1670. […] Jusqu’où n’auroient point été les hommes capables de traiter ainsi de pareilles matieres, si leurs Philosophes sécouant le joug des opinions qui dans tous les âges ont subjugué le génie, s’étoient plus occupés du soin d’étendre & de perfectionner leurs propres lumieres, que des revêries de leurs prédécesseurs ? […] Cet ouvrage, qui parut en 1680., est plûtôt un Roman qu’une histoire, c’est un fruit de la jeunesse de l’auteur ; mais qu’il n’a pas cru indigne-d’être avoué dans un âge plus avancé. […] C’est encore un ouvrage de sa jeunesse, pour lequel il lui revint, dans un âge mûr, un retour de complaisance, qui l’engagea à le reproduire au grand jour en 1746.
Lavallée a eu soin de placer aussi un portrait de l’illustre fondatrice, où revit cette grâce si réelle, si sobre, si indéfinissable, et qui, sujette à disparaître de loin, ne doit jamais s’oublier quand par moments la figure nous paraît un peu sèche ; il l’emprunte aux Dames de Saint-Cyr dont la plume, par sa vivacité et ses couleurs, est digne cette fois d’une Caylus ou d’une Sévigné : Elle avait (vers l’âge de cinquante ans), disent ces Dames, le son de voix le plus agréable, un ton affectueux, un front ouvert et riant, le geste naturel de la plus belle main, des yeux de feu, les mouvements d’une taille libre si affectueuse et si régulière qu’elle effaçait les plus belles de la Cour… Le premier coup d’œil était imposant et comme voilé de sévérité : le sourire et la voix ouvraient le nuage… Saint-Cyr, dans son idée complète, ne fut pas seulement un pensionnat, puis un couvent de filles nobles, une bonne œuvre en même temps qu’un délassement de Mme de Maintenon : ce fut quelque chose de plus hautement conçu, une fondation digne en tout de Louis XIV et de son siècle. […] — Ces temps heureux, cet âge d’or, ce sont comme toujours les débuts, les commencements, l’époque où tout n’est pas rédigé encore, et où une certaine liberté d’inexpérience se mêle à la fraîcheur première des vertus.
Dans l’intervalle, et pendant le séjour qu’il fit en Lombardie, à Milan, à Brescia, à Bergame, à cet âge de moins de vingt ans ; au milieu de ces émotions de la gloire et de la jeunesse, de ces enchantements du climat, du plaisir et de la beauté, il acheva son éducation véritable, et il prit la forme intérieure qu’il ne fera plus que développer et mûrir depuis : il eut son idéal de beaux-arts, de nature, il eut sa patrie d’élection. […] Il regrette surtout l’âge d’or de l’Italie, celui des Laurent le Magnifique et des Léon X, les jeunes et beaux cardinaux de dix-sept ans, et le catholicisme d’avant Luther, si splendide, si à l’aise chez soi, si favorable à l’épanouissement des beaux-arts ; il a le culte du beau et l’adoration de cette contrée où, à la vue de tout ce qui en est digne, on prononce avec un accent qui ne s’entend point ailleurs : « O Dio !
Cowper aime tendrement la campagne, il l’aime pour y vivre, pour y habiter, pour ne s’en lasser à aucun âge ni à aucune saison. […] Pourtant je n’ai souci ni de la bise amère, Ni des lampes d’argent dans le blanc firmament, Ni de la feuille morte à l’affreux sifflement, Ni même du bon gîte où tu m’attends, mon frère ; Car je suis tout rempli de l’accueil de ce soir, Sous un modeste toit où je viens de m’asseoir, Devisant de Milton, l’aveugle au beau visage ; De son doux Lycidas par l’orage entraîné ; De Laure en robe verte, en l’avril de son âge.
Ceux qui ne l’ont connu que dans la dernière moitié de sa vie ne retrouvaient pas dans ce personnage grand, mince, un peu penché, dans cette figure fatiguée et dont la coloration elle-même était un indice de souffrance, ce qu’il avait pu avoir d’agréments et de grâce dans un âge plus favorisé. […] Après la jeunesse il voyait venir immédiatement la vieillesse sans avant-garde ni appareil protecteur, sans rien qui la lui ornât à l’avance et la lui déguisât : Me voilà déjà avancé en âge, disait-il, et je suis toujours incertain et mobile dans le chemin de la vérité.
Il est du même âge, de la même année qu’Alfred de Musset (1811). […] La pauvre enfant qui ne sait rien, qui ne voit que rarement cette mère capricieuse et inégale, pour laquelle, du plus loin qu’elle s’en souvienne, elle s’est pourtant autrefois prononcée dans le cabinet du magistrat, lorsqu’il lui fut demandé de choisir entre elle et son père, la pauvre Aurélie arrive à l’âge de dix-sept ans, sans s’être rendu compte des difficultés de sa destinée.
Collé aime le latin et en sème volontiers ses lettres : souvent il cite de l’Horace ; une fois il cite de l’Ovide ou plutôt il le parodie : c’est pour s’avertir soi-même qu’il est temps de finir et de ne pas pousser trop loin sa carrière d’auteur : « Crois-moi, vieillard : celui qui se tait fait bien, et chacun doit plutôt rester au-dessous que viser au-dessus de son âge : « Crede, senex : bene qui tacuit bene fecit, et infra Ætatem debet quisque manere suam. […] Collé mourut le 3 novembre 1783, à l’âge de soixante-quatorze ans, et de chagrin plus encore que de vieillesse.
. — Les premières lettres sont remplies de ces prescriptions qui tiennent au corps, à la santé, et qui ont des conséquences morales aussi pour les personnes en évidence et dont toute la vie se passe en public : « Je vous prie, ne vous laissez pas aller à la négligence ; à votre âge cela ne convient pas, à votre place encore moins ; cela attire après soi la malpropreté, la négligence et l’indifférence même dans tout le reste de vos actions, et cela ferait votre mal ; c’est la raison pourquoi je vous tourmente, et je ne saurais assez prévenir les moindres circonstances qui pourraient vous entraîner dans les défauts où toute la famille royale de France est tombée depuis longues années64 ; ils sont bons, vertueux pour eux-mêmes, mais nullement faits pour paraître, donner le ton, ou pour s’amuser honnêtement, ce qui a été la cause ordinaire des égarements de leurs chefs qui, ne trouvant aucune ressource chez eux, ont cru devoir en chercher au dehors et ailleurs. […] Là-dessus aucune négligence, et n’imitez personne ; suivez ce que vous avez vu et appris ici. » Elle ne cesse de conseiller à sa fille des lectures fortes, des lectures suivies ; elle attend tous les mois en vain la liste des livres sérieux que l’abbé de Vermond s’était chargé de procurer à la jeune princesse, et qui, on le sait aujourd’hui par les catalogues, étaient si absents de ses bibliothèques particulières : « Tâchez de tapisser un peu votre tête de bonnes lectures ; elles vous sont plus nécessaires qu’à une autre, … n’ayant aucun autre acquit, ni la musique, ni le dessin, ni la danse, peinture et autres sciences agréables. » Il est permis sans doute, surtout à son âge, de s’amuser, mais d’en faire son unique soin et de n’être occupée qu’à « tuer le temps entre promenades et visites », elle en reconnaîtra le vide et en sera un jour aux regrets.
Les correspondances de cette époque font défaut : ce n’est que vers le déclin de la vie et quand est venu l’âge du souvenir, que l’on songe à conserver les lettres. […] Joanny voulait jouer les rôles qui conviennent à présent à son âge, il pourrait ravoir la faveur du public ; mais il tient plus que jamais aux rôles des amours ; que veux-tu que j’y fasse ?
Aussi, nous qui regrettons personnellement, et regretterons jusqu’au bout, comme y ayant le plus gagné à cet âge de notre meilleure jeunesse, les commencements lyriques où un groupe uni de poëtes se fit jour dans le siècle étonné, — pour nous, qui de l’illusion exagérée de ces orages littéraires, à défaut d’orages plus dévorants, emportions alors au fond du cœur quelque impression presque grandiose et solennelle, comme le jeune Riouffe de sa nuit passée avec les Girondins (car les sentiments réels que l’âme recueille sont moins en raison des choses elles-mêmes qu’en proportion de l’enthousiasme qu’elle y a semé) ; nous donc, qui avons eu surtout à souffrir de l’isolement qui s’est fait en poésie, nous reconnaissons volontiers combien l’entière diffusion d’aujourd’hui est plus favorable au développement ultérieur de chacun, et combien, à certains égards, cette sorte d’anarchie assez pacifique, qui a succédé au groupe militant, exprime avec plus de vérité l’état poétique de l’époque. […] Il ne nous appartient pas de lui assigner une place parmi les talents de cet âge ; on aime mieux d’ailleurs la goûter en elle-même que la comparer.
Mais ce n’est que depuis moins de quinze ans, c’est-à-dire depuis la mise au jour d’André Chénier et l’apparition des premières Méditations poétiques, ces deux portes d’ivoire de l’enceinte nouvelle, que notre poésie, à proprement parler, a trouvé sa langue, sa couleur et sa mélodie, telles que les réclamait l’âge présent, et qu’elle a pu exprimer ses sentiments les plus divers sur son véritable organe. […] Il faut se répéter chaque matin, quand on ne vit pas dans un âge de barbarie, quand les rivaux abondent et que les rangs se pressent, ce que disait à Dante le peintre Oderic, puni d’orgueil au purgatoire : « Après moi, disait cette âme en rougissant, après moi, Francesco de Bologne qui déjà m’efface ; après Cimabué, le Giotto ; après le premier Guido, le second !
La Fontaine ajoute en bourgeois et en paysan, et dans le style amusant de la fable : Je voudrais qu’à cet âge On sortît de la vie ainsi que d’un banquet, Remerciant son hôte, et qu’on fît son paquet. […] Voyez les formules juridiques et les cérémonies religieuses des âges primitifs.
D’un autre côté, une morale rationaliste, non assise sur des dogmes, non défendue par des terreurs et des espérances précises d’outre-tombe, fondée sur le sentiment de l’utilité commune, sur l’instinct social, sur l’égoïsme de l’espèce qui est altruisme chez l’individu et s’y épure et s’y élargit en charité, enfin sur ce que j’appellerai la tradition de la vertu simplement humaine à travers les âges, une telle morale ne peut que très lentement établir son règne dans les multitudes : il lui faut du temps, beaucoup de temps, pour revêtir aux yeux de tous les hommes un caractère impératif. […] Il disait, dans l’avant-propos de celle-ci, quelques années avant sa mort : « Il y a plus d’un demi-siècle, élève de troisième année à l’École normale, j’avais, avec l’ambition ordinaire à cet âge, formé le projet de consacrer ma vie scientifique à écrire une Histoire de France en huit ou dix volumes.
La majesté froide et grandiose de la première représente bien la noblesse un peu figée de l’époque ; la gaieté, quelquefois grossière ou guindée de la seconde, rappelle les rieurs survivants de l’âge précédent, et les jeunes maniérés du jour. […] Le temps viendra où l’art sera une chose du passé, une création faite une fois pour toutes, création des âges non réfléchis, qu’on adorera, tout en reconnaissant qu’il n’y a plus à en faire. » C’est le cas de l’art du théâtre, comme il ressort du présent examen, poursuivi en toute bonne foi.
La majesté froide et grandiose de la première représente bien la noblesse un peu figée de l’époque ; la gaieté, quelquefois grossière ou guindée de la seconde, rappelle les rieurs survivants de l’âge précédent, et les jeunes maniérés du jour. […] Le temps viendra où l’art sera une chose du passé, une création faite une fois pour toutes, création des âges non réfléchis, qu’on adorera, tout en reconnaissant qu’il n’y a plus à en faire. » C’est le cas de l’art du théâtre, comme il ressort du présent examen, poursuivi en toute bonne foi.
J’avoue que le plus grand obstacle que j’aie rencontré en abordant les études indiennes a été l’absence d’un livre sommaire sur la littérature sanscrite, sa marche, ses époques principales, les âges divers de la langue, la place et le rang des divers ouvrages, quelque chose d’analogue en un mot à ce que Gesenius a fait pour la langue et la littérature des Hébreux. […] Il viendra, ce me semble, un âge où les études philologiques se recueilleront de tous ces travaux épars et où, les résultats étant acquis, les monographies devenues inutiles ne seront conservées que comme souvenirs.
La jeune fille, à cet âge de puberté et de transition, n’est pas justiciable encore de l’observateur. […] A ce degré d’enfantillage, l’innocence touche à l’insignifiance : ce n’est plus une personne, c’est un âge que nous avons sous les yeux.
Elle avait près de trente ans à l’époque où parut La Nouvelle Héloïse : c’est l’âge où les plus sages des femmes commencent à oser. […] Comme je suis modeste et frileuse, on voit moins de moi que d’aucune femme de mon âge.
Dans l’Antiquité, on a Sapho pour quelques accents et quelques soupirs de feu qui nous sont arrivés à travers les âges ; on a la Phèdre d’Euripide, la Magicienne de Théocrite, la Médée d’Apollonius de Rhodes, la Didon de Virgile, l’Ariane de Catulle. […] Mlle de Lespinasse expira le 23 mai 1776, à l’âge de quarante-trois ans et demi.