D’ailleurs les rédacteurs de ses statuts avaient conçu à ce sujet, pour ne rien dire de plus, une étrange idée : non seulement ils voulaient (ce qui était raisonnable) marier, pour ainsi dire, chaque art mécanique à la science dont cet art peut tirer des lumières, comme l’horlogerie à l’astronomie, la fabrique des lunettes à l’optique ; mais ils prétendaient encore, qu’on nous passe cette expression, accoler chacun de ces arts à la partie des belles-lettres qu’ils s’imaginaient y avoir plus de rapport : par exemple, disaient-ils, le brodeur à l’historien, le teinturier au poëte, et ainsi des autres. […] raillé pour sa nomination à l’Académie française dans une épigramme du poëte Roy, il eut le malheur encore de trouver parmi ses gens un serviteur trop prompt, qui se chargea de le venger moyennant bastonnade sur le dos du satirique : et qu’on n’aille point ici alléguer pour excuse l’indignité de l’homme châtié ; car ce qu’on inflige à Roy aujourd’hui, on le faisait hier à Voltaire, on en a menacé Racine et Boileau. […] Le poète eut occasion de le solliciter pour faire jouer une de ses pièces, et il s’en loua vivement ; il fut enchanté de son accueil : « Mais comment, Madame ?
Un poëte a dit : La Charité fervente est une mère pure (Raphaël quelque part sous ses traits la figure) ; Son œil regarde au loin, et les enfants venus Contre elle de tous points se serrent froids et nus. […] Ce n’est presque pas sortir de ce sujet que d’y joindre quelques mots sur un livre extraordinaire, publié en Allemagne par un poëte catholique, M. […] Un poëte connu, M.
Hugo eut vu de ses yeux de poète la terre, non échauffée par le soleil, mais se chauffant au soleil, elle lui parut naturellement frileuse plutôt que froide, et ce dernier mot précisant l’image, la poussa à s’assimiler encore les idées prochaines : Frileuse, elle se chauffe au soleil éternel, Rit, et fait cercle avec les planètes du ciel, Comme des sœurs autour de l’âtre. […] Ce n’est pas à dire qu’on ne puisse renouveler ces mêmes images ; si ce n’était trop long, il me serait aisé de les signaler presque toutes dans les plus beaux vers de nos poètes contemporains. […] Et les Femmes savantes avec leur poète : PHILAMINTE Servez-nous promptement votre aimable repas.
Il n’était pas bourgeois835 ; il était peuple et poète. […] Puis les défauts, l’injustice, la folie iront en s’accusant837, jusqu’à ce que Michelet regagne la Révolution : çà et là, le penseur et le poète, l’historien de génie se retrouvent. […] Là, son âme de poète, plus tendre, plus enthousiaste, plus juvénile que jamais, s’ouvre à la grande et divine nature, qui toujours, du reste, avait été la religion de son intelligence, la joie de ses sens.
Tout à l’heure, le poète rapetissait la presse politique au format chétif d’un libelle, maintenant il va investir cette vile paperasse d’une toute-puissance fabuleuse. […] On croit d’abord que le poète a voulu personnifier la tartuferie juvénile, et on se dit que ce dadais joue trop bien son rôle. […] Giboyer, qui faisait peur, fait pitié ; cette âme difforme devient presque belle ; on sait gré au poète d’avoir jeté un sentiment pur dans ce tas de boue.
J’aime les peintres et les poètes, et ce n’est pas moi, certes, qui voudrais les amoindrir ; mais je ne puis m’empêcher de noter les différences. Un grand peintre, un grand poète descriptif, Chateaubriand, voyage, quelques années après, en Orient, pour y chercher des couleurs. […] « L’Égypte, dit Eudore dans Les Martyrs, toute brillante d’une inondation nouvelle, se montre à nos yeux comme une génisse féconde qui vient de se baigner dans les flots du Nil. » Voilà l’image que le poète pittoresque est allé chercher ; il l’a trouvée, il remporte avec lui.
Aussi les grands artistes, les poètes, n’attendent-ils ni les commandes, ni les chalands ; ils enfantent aujourd’hui, demain, toujours. […] On ne peut pas dire pour lui que ce fut là un rêve ; car ce qui sembla longtemps le rêve et l’illusion du poète, une femme dévouée, une de celles qu’il avait divinisées au passage, l’avait réalisé pour lui en bonheur. […] On sent d’abord le besoin d’aller s’y retremper, d’aller se jeter dans quelque lecture limpide et saine au sortir des Parents pauvres, — de se plonger dans quelque chant de Milton, in lucid streams , dans les purs et lucides courants , comme dit le poète.
Montesquieu a dit dans une exclamation mémorable : « Les quatre grands poètes, Platon, Malebranche, Shaftesbury, Montaigne ! […] Nul écrivain en français, y compris les poètes proprement dits, n’a eu de la poésie une aussi haute idée que lui. « Dès ma première enfance, disait-il, la poésie a eu cela de me transpercer et transporter. » Il estime avec un sentiment pénétrant que « nous avons bien plus de poètes que de juges et interprètes de poésie, et qu’il est plus aisé de la faire que de la connoître. » En elle-même et dans sa pure beauté, elle échappe à la définition ; et celui qui la veut discerner du regard et considérer en ce qu’elle est véritablement, il ne la voit pas plus que la « splendeur d’un éclair ».
De même en littérature, le poète qu’il aime par-dessus tout est l’Arioste : L’Arioste fait mes délices perpétuelles ; je ne puis le quitter depuis que je suis en état de l’entendre. Quel poète est plus poète que celui-ci ?
Aubryet, qui n’est pas encore le critique qu’il sera, est déjà le poète qui doit le doubler ; mais pour un critique futur, c’est dangereux d’être actuellement un tel poète. En effet, si jamais le critique n’aboutissait pas en Aubryet, comme après ses Jugements nouveaux nous avons le droit de nous y attendre, c’est que le poète l’aurait étouffé.
C’est le célèbre Ronsard, le plus fameux poète de son siècle, et qui fut aimé tour à tour et protégé de quatre rois, loué après sa mort par l’abbé Duperron, depuis cardinal. […] Ces puérilités s’appelaient alors de l’éloquence ; et Duperron comme orateur, et Ronsard comme poète, sont aujourd’hui également inconnus. […] Il ne faut donc pas s’étonner si, pendant sa vie ou après sa mort, il fut célébré par plus de cinq cents panégyristes, tant poètes qu’orateurs ; il ne faut pas s’étonner si, malgré l’éloquence brute et sauvage de son siècle, on ne trouve presque aucune des oraisons funèbres de ce prince, où il n’y ait quelque mouvement éloquent sur sa mort.
Le vers libre est un charmant non-sens, un bégayement délicieux et baroque convenant merveilleusement aux femmes poètes dont la paresse instinctive est souvent synonyme de génie.
La Lyre intime vaut la Flûte de Pan, si même elle ne lui est supérieure, et les cordes répondent aussi bien aux doigts du poète que les roseaux joints avec de la cire résonnaient harmonieusement sous ses lèvres.
Edward Sansot-Orland Les Pourpres mystiques sont d’un mysticisme essentiellement païen, et toute l’ardeur des vingt ans y flamboie dans un déchaînement superbe qui nous emporte avec le poète parmi les luxures indéfiniment renaissantes — jusqu’à la mort, car la mort se dresse au chevet des couches affaissées par les ruts.
Le poète s’est émerveillé de vivre en mots qui le confessent délicat et doux, ayant la pudeur de sa joie, la reconnaissance d’aimer ; ce livre est une parole basse, dite pour une seule et dont le hasard d’une surprise involontaire nous a fait le confident indulgent.
[L’Année des poètes (1896).]
— Almanach des poètes (1896-1897 et 1898), sous la direction de Robert de Souza. — Sources vers le fleuve (1897). — La Poésie populaire et le Lyrisme sentimental (1899).
Ils sont d’un vrai poète.
Sans cesse le Livre à la main, Moins François que Grec & Romain, J’étois plus sérieux que triste ; Antiquaire, Archimédailliste ; J’étois Poëte, Historien, Et maintenant je ne suis rien.
C’est plus qu’il n’en faut pour nous mettre en droit de dire, qu’il étoit donc meilleur Comédien que bon Poëte dramatique.
Avant Corneille, il avoit la réputation du meilleur Poëte tragique ; il pouvoit la mériter alors.
Poëte dont nous avons peu de Poésies, encore sont-elles toutes médiocres, excepté néanmoins son Eglogue du Rendez-vous, où il s’est montré supérieur à tout ce que MM. de Fontenelle & la Mothe ont fait de meilleur en ce genre.
En qualité de Poëte tragique, rien de plus mince que ses talens.
Le style de ce Poëte seroit plus constamment agréable, si la frivolité actuelle ne s’y faisoit trop sentir.
Poëte Grec, Latin, & même Hébreu, Astronome, Géographe, Chronologiste, Historien, Commentateur, Philosophe, Théologien, il étoit tout, & même supérieur dans presque toutes les parties.
Evremont, le Duc de Nevers, &c. ont fait tort à leur réputation, en s’efforçant d’élever ce Poëte médiocre au dessus de ce qu’il valoit.
Le Poëte dont nous parlons a cependant entrepris de le célébrer.
C’était peu du réalisme, nous aurons en littérature la médecine et la dissection ; le scalpel passe aux mains de nos romanciers et de nos poètes. […] Elle a tort s’il y a des pauvres, des misérables, des poètes méconnus… Et ceux qui pâtissent de ses torts ont le droit de se venger d’elle en la frappant. […] Ce qu’il avait dit pour un cas particulier, d’autres l’ont dit dans des termes absolus ; ce qu’il avait demandé pour les poètes, d’autres l’ont exigé pour tous. […] Ce sentiment de malaise, de douloureuse anxiété, trouva, chez quelques poètes, une éloquente expression. […] Un poète a exprimé cette idée dans de beaux vers : « Je ne crois pas, ô Christ, à ta parole sainte !
— C’est un poète, peut-être, me disais-je, un artiste ; il est bon, puisqu’il s’attendrit. […] Jean Rameau, un véritable poète, vient de publier chez E. […] Jean Rameau n’a rien des écadents, rien non plus des poètes prud’hommesques qui sont également redoutables. […] J’ai cité, je le répète, au hasard, mais le livre contient, dans ses trois cents pages, de quoi faire la réputation d’un poète. […] L’effet de toute la séance n’a été qu’un long triomphe pour le grand poète et ses interprètes.
Jules Janin Tel jeune homme, à lire les Odes et Ballades, se trouvait poète et s’écriait : Et moi aussi !
Dans le recueil que nous donne aujourd’hui le nouveau poète que j’ai le plaisir de vous présenter, vous trouverez l’émotion, la belle candeur, tour à tour forte et charmante de la jeunesse — la jeunesse !
Philarète Chasles Souvent remarqué par les critiques et apprécié de la partie saine du public, ce poète, dont les premiers pas avaient été contrariés par la Révolution, eut à subir en outre les conséquences non moins fatales pour son talent d’un changement de mode littéraire.
André Lebey d’être un poète ennuyeux.
Je voudrais pouvoir citer plusieurs de ces pages exquises qu’il faut lire et aimer et dans lesquelles nous retrouvons tous un peu de nous-mêmes, car elles sont, fixées par un Véritable poète, les minutes fugitives d’amour, de souffrances et de joies de nos enfances et de nos vingt ans, aujourd’hui déjà devenus de lointains passés.
Bibliographie : Musiciens, poètes et philosophes (Camille Benoit) ; Richard Wagner (Alfred Ernst) Mois wagnérien de Paris Correspondances V — Juin 1887 Question wagnérienne et question personnelle (E.
Boissi, [Louis de] de l’Académie Françoise, né à Vic en Auvergne en 1694, mort à Paris en 1758 ; Poëte comique, dont un grand nombre de Pieces sont restées au Théatre.
Avec une versification, en général, noble, forte & élégante, ce Poëte auroit dû s’attacher à y répandre un peu plus de cette douceur, de ce moëlleux, qui, sans nuire à l’énergie, donne, si l’on peut s’exprimer ainsi, de l’embonpoint aux Vers, & les fait paroître faciles.
Nous voudrions bien pouvoir également, en faveur de cette Lettre, réformer ce que nous avons déjà dit de ses Poésies, & nous joindre aux six Journalistes qui ont honoré ce Poëte d’éloges fort au dessus de ses espérances, comme il nous en assure ; mais les raisons de M.
Ce n’est pas tant l’estime des Princes de son temps [estime qui le faisoit appeler alors le Poëte des Princes & le Prince des Poëtes] que l’approbation de Lafontaine, de Despréaux, de J.
Poëte, Orateur, Romancier, Dissertateur, Philosophe, Faiseur de Drames, sous quelque rapport qu’on l’envisage, il seroit difficile de le placer au dessus de la médiocrité, même dans ce qu’il a fait de mieux.
Non seulement ce Poëte, aussi élégant que lumineux, détruit, par des raisonnemens simples & convaincans, le systême du Partisan d’Epicure, en se servant de tout ce que la Physique, la Morale & la Métaphysique ont de plus positif & de moins contesté ; mais encore sa touche, également vive, pénétrante, ingénieuse, & fleurie, ajoute à ses raisons un charme secret, qui porte dans les ames raisonnables le plaisir avec la conviction.
Michel, de l’Académie des Inscriptions, né à Paris en 1683, mort en 1763 ; Poëte de nos jours qui a eu du succès à l'Opéra, ce qui suppose dans lui un certain degré de talent.
Ce jeune Poëte travailloit à une seconde Tragédie, lorsqu'une mort imprévue l'enleva au Théatre, où sa carriere auroit pu devenir plus glorieuse que celle de ses rivaux, pour peu qu'il eût eu le temps de perfectionner son génie.
Dumas tient l’auteur du Retour du Christ pour « un poëte, un peintre, et peut-être un prophète ». […] Dumas, ce fier et malhonnête contempteur de la matrice humaine, se met à en glorifier une, qui, si elle ne renferme pas l’infini, renferme la toute-puissante triplicité du peintre, du poëte et du prophète ; des choses si grandes que les hommes les ont appelées divines !
Et quant à Lamartine, cet idéal du Citoyen, placé en contraste des trois autres dans toute la perfection de son personnage à la fin du livre de Pelletan, Lamartine, dont Pelletan est sorti comme les Méditations, — mais j’aime mieux les Méditations, — Pelletan s’en regarde trop comme la géniture pour ne pas se croire parricide s’il convenait d’une seule des erreurs de ce grand génie de poète égaré. […] Et pourquoi n’avouerions-nous pas avec calme que, pour une nature comme la sienne, plus apostolique que narquoise, pour un disciple de Lamartine, qui n’aimait pas non plus de Maistre, dont le génie positif était désagréable au « dadais » que le cruel Chateaubriand disait exister au fond du poète des Méditations, Pelletan s’est mieux tiré qu’on n’aurait cru de sa besogne de journaliste irrévérent et pittoresquement gouailleur.
Le violent, l’intempérant, l’extravagant (pour les bourgeois), l’indécent Richepin, l’impie Richepin, ce Capanée qui fourbit actuellement et damasquine ses Blasphèmes, se resserre tout à coup, se ramasse, se froidit, se simplifie, se métamorphose, et produit un roman d’analyse impartiale et patiente, — patiente… à impatienter le journal dans lequel il l’avait publié d’abord en feuilleton, et qui, lui, l’a raccourci, haché et châtré, ne voulant pas en perdre tout, puisqu’il l’avait payé à l’avance, et disant comme ce grand poète, qui n’est pas le Père prodigue, à son fils qui n’avait plus faim : « Mange donc cette côtelette encore, puisqu’elle est payée. » Le public, moins despotisé, n’a mangé qu’une partie de la côtelette de M. […] s’il y a quelque part une personnalité retentissante qui semblait, comme dans les vrais poètes, devoir se reproduire et se chanter elle-même dans toutes ses créations, ou du moins dans les types favoris de sa pensée, c’était bien Richepin, la personnalité de ce mâle Richepin, si fier d’être un mâle, et dont le héros dans Madame André est une femelle pour la faiblesse, un lâche… idéal de lâcheté !
Chez les Arabes on fut fanatique et conquérant pendant trois siècles ; pendant les autres, on cultiva les arts, mais ce peuple ingénieux et brave eut des médecins, des astronomes, des géomètres, des chimistes, des poètes même ; tout, excepté des orateurs. […] Chez un peuple barbare ou qui cesse de l’être, et où l’on commence à écrire, les orateurs et les poètes sont avertis de leurs talents par leurs passions, et par les secousses que des objets extraordinaires donnent à leur âme.
Mais si le peintre, le poète ou l’orateur, se fait une habitude de cette manière, la nature disparaît, l’illusion est détruite, et l’on ne voit plus que l’effort de l’art, qui, dans tous les genres, pour produire son effet, a besoin de se cacher. […] En général, l’éloquence de Fléchier paraît être formée de l’harmonie et de l’art d’Isocrate, de la tournure ingénieuse de Pline, de la brillante imagination d’un poète, et d’une certaine lenteur imposante qui ne messied peut-être pas à la gravité de la chaire, et qui était assortie à l’organe de l’orateur.
sera-ce à l’extrémité du nouveau monde, dans l’idiome sonore d’Ercilla et de ce poëte errant de nos jours, de ce proscrit de Cuba dont nous avons redit quelques vers ? […] Religion, liberté, patriotisme, culte des lois, amour des arts, où que vous soyez, il peut toujours, quand vous êtes, s’élever un poëte lyrique !
Mais, au milieu de toutes ces richesses, sur un seul point, si l’on consulte l’histoire littéraire de Genève, il y a presque disette, et dans les listes de Senebier, et dans les souvenirs qui les complètent, on ne rencontre pas, Jean-Jacques à part, un seul romancier célèbre, pas un seul poëte illustre. […] Le grand historien helvétique, un des plus grands historiens modernes, le vrai peintre et comme le poëte épique des vieux âges, Jean de Muller, est de cette autre Suisse qui n’a point, entre l’Allemagne et elle, les mêmes barrières de croyances et de purisme que la Suisse française se sent à l’égard de la France. […] Et je me rappelais ces vers sentis qu’une muse du Léman adressait au noble poëte Mickiewicz, lorsque, hier, la France le disputait à l’humble canton qui n’avait pas désespéré de le garder : Dans nos vergers, tout devient rêverie, Vague bonheur que l’on garde à genoux, Frais souvenir, souci de bergerie, Clos d’une haie ainsi que la prairie ; Plaisirs du cœur que le cœur seul varie ; … Consolez-vous ! […] du grand poëte de ce nom et fille elle-même de l’aimable poëte Browles, une toute petite pièce qui me paraît compléter la pensée de M.
Comment M. de Humboldt a-t-il été amené à écrire son Cosmos en dehors de Dieu, et à décrire le plus magnifique des poèmes sans crier hosanna à son divin poète ? […] La chaleur brûlante des tropiques et la couleur noire du teint semblèrent inséparables. « Les Éthiopiens », chantait l’ancien poète tragique Théodecte de Phasélis, “doivent au dieu du soleil, qui s’approche d’eux dans sa course, le sombre éclat de la suie dont il colore leurs corps”. […] Comme compensation, et sans compter les descriptions, peut-être même un peu trop fréquentes, de grottes, de sources et de clairs de lune, ce poète, qui possédait à un si haut degré le talent de peindre, nous a laissé un récit singulièrement exact et intéressant, même pour la géologie, d’une éruption volcanique près de Méthone, entre Épidaure et Trézène. […] Freitag, de Bonn, que l’objet principal des poètes arabes est le récit des faits d’armes, l’éloge de l’hospitalité et la fidélité dans l’amour. […] Le même soin des détails, sans que l’impression de l’ensemble en soit jamais troublée, sans que jamais la libre imagination du poète se lasse d’animer la matière qu’il met en œuvre, caractérise l’auteur d’Atala, de René, des Martyrs et des Voyages en Grèce et en Palestine.
Vous me direz : Il n’est pas moins grand poète pour cela. […] Un poète n’est pas forcé de savoir l’histoire de la littérature, au contraire, ni même l’histoire des lettres. — Vouére. Enfin il faudrait savoir. — Un grand poète n’est pas forcé d’avoir des références. — J’y entends, mais alors il n’est point forcé d’en mettre. […] Un poète aussi, un poète dedans, un poète inclus peut être dessaisi par sa politique, par une ou plusieurs politiques. […] Lui aussi quel poète chrétien il eût été, mais s’il eût été chrétien.
Elles ne seraient vraies que s’il nous avait démontré que, homme pour homme et poète pour poète, Voltaire valait Racine. […] Voulez-vous un poète, et un vrai poète vraiment « galant », et vraiment « tendre », qui plus naturellement et plus aveuglément qu’aucun autre, à en juger par les œuvres, ait cru que la beauté consistait dans le vague et dans l’indétermination ? […] Il n’en est que plus curieux que l’œuvre du conteur français et celle du poète espagnol aient éprouvé les mêmes destinées historiques. […] La Vieille Coquette, le Vieux Galant, le Musicien, le Poète tragique, le Greffier… — Ch. […] Sans y mettre aucune affectation de pruderie, on se demande comment des hommes de cour, un poète, un vrai poète, comme Quevedo, un historien, un diplomate, un représentant de Charles-Quint dans les conciles, tel que Mendoza, peuvent s’attarder aux scènes qu’ils nous retracent, et demeurer insensibles à ce qu’elles provoquent de dégoûts, de haut-le-cœur et de nausées.
Elle nous dit la malheureuse passion qui dévora sa vie et, par ses insatiables exigences, fit continuellement échec à ce que le poète aurait pu mériter d’honorabilité et de gloire.
Et ce n’est pas seulement l’âme qui a gagné en largeur et en élévation, c’est la technique même, la prosodie du poète qui sont parvenues à leur parfait développement, à ce point où, entre la pensée et l’expression, il y a fusion absolue.
Chapelain, [Jean] de l’Académie Françoise, né à Paris en 1595, mort dans la même ville en 1674 ; Poëte justement estimé, tant qu’il se borna au genre qui lui convenoit.
Il est fâcheux, pour la gloire de ce Poëte ingénieux, que la Jeunesse ne puisse lire ses Ouvrages sans danger, & les gens sages sans indignation.
Il fut Peintre & Poëte ; mais son Poëme de Arte Graphicâ est moins estimé que ses tableaux, qui, dit-on, approchent de ceux du Titien par le coloris, & de ceux de Carrache par le dessin.
Il y a seulement entre eux cette différence, que les Vers de M. de Lafare sont souvent trop négligés, & n’ont pas cette vivacité, cette aisance soutenue, cette variété de tours & d’expressions qui font de Chaulieu un Poëte inimitable.
Sans rien décider sur ce fait, il est du moins certain que la Venise sauvée. du Poëte Anglois n’a paru que huit ans après.
mettez à la fin de l’article de Térence, que la traduction de ce Poëte, par M. l’Abbé le Monnier, a paru & qu’on en est généralement content.
Il vit L’Europe savante de Bachelier, son Pacte de famille, ses Alliances de la France, sa Mort d’Abel, tirée du poème de Gesner, et il dit : Voilà un poète de mes amis qui fait faire de bien mauvais tableaux !
Nous n’avons jamais dit que le fils d’un écrivain, d’un poète célèbre, s’il a lui-même du mérite et du talent, ne pût légitimement hériter et profiler de la part d’honneur et de faveur acquise par un illustre père ; et il est surtout très bien à lui de soutenir le nom en sachant varier le mérite.
Jules Janin Le prêtre, le cloitre, la chapelle, la première communion, le refuge, la semaine sainte, émotions du moment mêlées d’une façon intime aux émotions toutes personnelles, vous les retrouvez à peu près les mêmes dans tous les recueils de cette époque, mais jamais elles n’ont été plus vraies que dans les vers d’Alexandre Guiraud… À tout prendre, la vie de ce poète, si calme dans son travail, si recueilli dans son succès, si modeste dans son triomphe, fut une vie heureuse, facile, abondante, entourée d’estime, de bienveillance, d’amitié.
Il lui fallait les larges plans, les vastes horizons d’une grande composition dessinée par elle-même comme poète et compositeur tous ensemble… Mlle Holmès a montré de très bonne heure les plus grandes dispositions poétiques et musicales.
Comme eux, il a le trait ; comme eux, il est Français, éloquent, homme d’esprit, patriote et poète.
Baif, [Jean-Antoine de] Secrétaire de la Chambre du Roi, mort en 1592, âgé de 60 ans, Poëte Grec, Latin & François, plus supportable dans les deux premieres langues que dans la sienne.
Campistron, [Jean Galbert de] Secrétaire des Commandemens de M. le Duc de Vendôme, de l’Académie Françoise & de celle des Jeux Floraux, né à Toulouse en 1656, mort dans la même ville en 1723 ; Poëte tragique, inférieur à ceux qui tiennent le premier rang parmi nous, mais supérieur à beaucoup d’autres qui prétendent en occuper un sur notre Théatre.
Gacon, [François] Prieur de Baillon, né à Lyon en 1666, mort en 1755, Versificateur satirique, qu’on surnomma le Poëte Sans fard, & qui auroit eu besoin d’en employer pour relever la platitude de ses Satires.
Aujourd’hui ses Poésies sont oubliées, & ne le méritent pas, à en juger par celles qui sont contenues dans un Recueil imprimé en 1660 chez Charles de Sercy, & dont le cinquieme volume commence par une Ballade de ce Poëte, qui feroit honneur à nos Anacréons modernes.
Au lieu d’envier le sort et de flatter par ses désirs la molle existence des oisifs, ne serait-il pas temps pour le poète de tourner la tête vers l’avenir, et de regarder, au sein de l’ardeur et des mouvements du siècle, l’enfantement merveilleux de ce qui va devenir l’espérance, la foi et l’amour du monde ?
Coppée, ce poète en herbe trouvé délicieux par des admirateurs qui le broutent et se lèchent les naseaux de jouissances, après l’avoir brouté.
Pierre Quillard Le Songe de l’Amour : Ce sont ici des vers de l’amour, de plusieurs amours qui n’en sont qu’un, à cause du poète qui en ressentit la joie inquiète, réticente et farouche, se donnant et se reprenant avec une égale bonne foi et une égale fierté d’indépendance ; s’il a souffert, il n’a pas fait souffrir ; et, sans être dupe outre mesure du songe qu’il s’était créé, il a voulu en perpétuer l’illusion, parce qu’elle était noble, cruelle et douce.
Nous avons de Brebeuf d’autres Poésies qui ne sont point à dédaigner, tels que ses Entretiens solitaires, où la piété, la morale profonde, la poésie, les pensées énergiques, font éprouver au Lecteur des sentimens aussi favorables à l’esprit du Poëte, qu’à ses bonnes mœurs & à sa Religion.
Guérin, Minime, qui, déclamant en Chaire contre le Poëte Théophile, s’exprimoit ainsi : « Maudit sois-tu, Théophile ; maudit soit l’esprit qui t’a dicté tes pensées, maudite soit la main qui les a écrites ; malheureux le Libraire qui les a imprimées ; malheureux ceux qui les ont lues ; malheureux ceux qui t’ont jamais connu !
Corneille ne crut pas s’abaisser en traduisant en Vers François son Poëme de Louis XIV, & fit l’éloge du jeune Poëte, lorsqu’il présenta sa Traduction au Roi.
MONTREUL ou MONTEREUL, [Mathieu de] Abbé, né à Paris en 1620, mort à Aix en Provence en 1692 ; Poëte assez agréable, qu’il ne faut pas confondre avec Jean Montereul, son frere, qui n’a rien fait imprimer, quoiqu’il fût de l’Académie Françoise.
Ce Casanove est dès à présent un homme à imagination, un grand coloriste ; une tête chaude et hardie ; un bon poète ; un grand peintre.
Histoire raisonnée des poètes dramatiques et lyriques.
Charles IX les honoroit jusqu’à leur sacrifier lui-même, pour ainsi dire, et les vers qu’il composa pour Ronsard, valent bien les meilleurs qu’ait fait ce poëte illustre. […] Un poëte diroit que chaque nouvel ouvrage de Raphaël faisoit un peintre. […] Despreaux avant que de mourir, vit prendre l’essort à un poëte lyrique né avec les talens de ces anciens poëtes, à qui Virgile donne une place honorable dans les champs élisées, pour avoir enseigné les premiers la morale aux hommes encore féroces. […] Lucain le seul homme de lettres distingué qui ait été mis à mort dans ces temps-là, fut condamné comme conspirateur et non pas comme poëte. […] Lucien peut passer pour le seul poëte qu’aïent produit les temps suivans, quoiqu’il n’ait écrit qu’en prose.
Il faut bien le dire, il a diminué la notion du roman, de cette chose complexe et toute-puissante, égale au drame par l’action et par la passion, mais supérieure par la description et par l’analyse ; car le romancier crée son décor et descend, pour l’éclairer, dans la conscience de ses personnages, ce que le poète dramatique ne fait pas et ne peut pas faire. […] Paul Féval, l’ancien romancier, — et le romancier est bien près d’être un poète, — Paul Féval, devenu chrétien, c’est-à-dire un poète de plus, doit croire à la merveille de tout. Ici, ce n’est ni le romancier ni le poète qui ont éveillé l’historien qui dormait dans le romancier : c’est le chrétien : « J’appartiens à saint Michel, — dit-il dans cette langue que sa foi lui a donnée. — Je suis né le jour de sa fête. […] Quand Werner, l’auteur d’Attila, de Luther, du Vingt-quatre Février, fut percé à Rome du rayon divin, le poète se tut en lui tout à coup. […] et que la conversion n’a pas fait taire comme le poète Werner, dont elle silença le génie, — l’ancien romancier, toujours vivant et vivace, trouvait son compte encore dans cette histoire du Mont Saint-Michel, qui semble un roman, tant elle est belle, aux yeux vulgaires sans Dieu et sans Archange pour l’expliquer.
Dans sa belle et récente biographie de Byron, il a évité de sonder chez le poëte la corruption du cœur et s’est rejeté vite sur la licence d’imagination, quand cette corruption trop certaine, plus approfondie, eût mieux donné à connaître, ce semble, l’abîme mystérieux du génie et les alliances contradictoires de la nature humaine. […] Villemain n’est pas poëte ; il a probablement fait autrefois de jolis vers latins. […] Mais comme tous les grands critiques, il a son poëte, et ce poëte c’est M. de Chateaubriand.
XXXVII Quelle tragédie feinte de poète est comparable à ce quatorzième livre des Annales où Néron, en proie aux trois plus fortes passions de l’homme, l’amour, l’ambition de régner et la peur d’être prévenu dans le crime, se précipite, les yeux fermés, dans le parricide pour y trouver à la fois sa maîtresse, le trône et la vie ? […] Contentons-nous donc d’un seul : il tient lieu de mille, et replaçons son livre à sa place, à côté d’Homère ; car ces deux hommes sont les deux plus grands poètes du monde écoulé : Homère, le poète de l’imagination ; Tacite, le poète de la vérité.
Le poète et le musicien comptent presque pour rien. […] Il y a en lui un poète très fier et un musicien très grand ; mais il y a, par dessus tout, un logicien de théâtre d’une surprenante fermeté. […] Il semble aujourd’hui bien prouvé, dit M. de la Villemarqué dans sa célèbre étude sur les Romans de la Table ronde2, que les troubadours provençaux chantaient ses aventures dès l’année 1150 ; malheureusement leurs poèmes sont perdus ; quelques parties de ceux des trouvères ont survécu : l’un des trois plus anciens doit avoir été rédigé par un certain Bérox dans les dernières années du règne de Henri II, roi d’Angleterre ; le second est l’œuvre d’un poète nommé Thomas, postérieur au moins d’un quart de siècle au premier ; le troisième est généralement attribué à Chrestien de Troyes, déjà mort au commencement du treizième siècle. […] Au bout de quelque temps d’une vie sauvage adoucie seulement par l’amour et la harpe de Tristan, qui est poète et musicien, Iseult est rappelée par son mari qui s’ennuie d’être veuf : la bonté de Marc’h ne va cependant pas jusqu’à rappeler son coupable neveu, et il reçoit ordre de ne plus se montrer à la cour.
Samedi 21 avril Le poète anglais Wilde me disait, ce soir, que le seul Anglais qui avait lu Balzac, à l’heure actuelle, était Swinburne. […] Samedi 5 mai Dîner avec le poète Oscar Wilde. Ce poète, aux récits invraisemblables, nous fait un tableau amusant d’une ville du Texas, avec sa population de convicts, ses mœurs au revolver, ses lieux de plaisir, où on lit sur une pancarte : Prière de ne pas tirer sur le pianiste qui fait de son mieux. […] Je ne sais pas quelle est sa valeur près des musiciens, mais ce que je sais, c’est que c’est de la musique de poète, et de la musique, parlant aux hommes de lettres.
Romain Coolus qui fut au théâtre le subtil et pénétrant auteur de Raphaël , de Lysiane et de l’Enfant malade, s’essaie en un genre nouveau : il se révèle poète funambulesque dans le Marquis de Carabas renouvelé, avec esprit, du conte classique de Perrault ; le charme et l’imprévu de la fantaisie de M.
[Anthologie des poètes français du xixe siècle (1887-1888).]
M. le Marquis de Sablé sortant d’un long repas où il avoit amplement bu, alla voir la représentation de l’Opéra de village, Piece nouvelle de Dancourt ; & comme il y a un endroit où l’on chante, les vignes & les prés seront sablés, le Marquis s’imagina qu’on le nommoit, & donna un soufflet en plein Théatre au Poëte Comédien, qui se seroit bien passé de toucher cette rétribution.
Telle est l’idée qu’on s’en forme à la lecture de son Epître à Madame de Marville : le Poëte y fait un aveu de ce qu’il a été, de ce qu’il étoit, & de ce qu’il désiroit être.
On peut en juger par une petite Brochure de sa composition, intitulée Rousseau vengé, où il défend ce grand Poëte contre un petit Auteur parvenu de chute en chute au Fauteuil académique.
De la vivacité dans le génie, de la facilité dans l'expression, de la hardiesse dans les pensées, mais très-souvent un défaut de goût & d'exactitude dans le style ; voilà le caractere de ce Poëte, que ses aventures fâcheuses ont rendu aussi célebre que ses Ouvrages.
Watelet est, tout à la fois, Peintre & Poëte ; ses préceptes sont aussi solides, que ses descriptions sont justes & naturelles.
Voilà donc un avantage incalculable, que les poètes auraient dû remarquer dans la religion chrétienne, au lieu de s’obstiner à la décrier.
Griot : bouffon, poète et chanteur domestique.
Les poètes italiens étaient lus dans la famille, et il aimait même à croire que cette famille de son grand-père était originaire d’Italie. […] Il pensait tout à fait comme ce poète grec, « que bien insensé est l’homme qui pleure la perte de la vie, et qui ne pleure point la perte de la jeunesse75 ». […] Il a jeté des citations familières de ces poètes divins de l’Italie qu’on est honteux de ne point savoir par cœur ; il avait cette jolie érudition que voulait le prince de Ligne, et qui sait les bons endroits.
Il y a quelquefois des étrangers qui passent et qui sortent du commun, mais c’est encore bien rare, et je puis vous assurer que les soirées que je passe seule avec le poète me paraissent bien plus courtes. […] L’appartement du poète, à l’étage supérieur de la maison, resta toujours fermé et comme sacré ; il y avait de même une place au moral que personne n’occupa97. […] « Elle recevait avec dignité et politesse. » Heureusement un autre poète, qui fut présenté à la comtesse en 1810 ou environ, et qui l’a revue plus tard, nous a donné d’elle un portrait plus vrai, et qui répare l’injustice du précédent : « Rien, nous dit M. de Lamartine en son VIIe Entretien, rien ne rappelait en elle, a cette époque déjà un peu avancée de sa vie, ni la reine d’un empire, ni la reine d’un cœur.
Bonhomme : il n’est pas commode de parler à fond de ce poète-là dans un journal ; je compte y revenir ailleurs ; mais sur Collé, nous avons et allons avoir tous les moyens d’en juger. […] Or Béranger a eu de cette élévation, due en partie à son temps et aussi à une disposition supérieure du poète. […] Denis, s’il avait été poète, eût consulté peut-être Mme Denis.
Tandis que, sous la Restauration, on aimait surtout dans Talma finissant et grandissant un novateur, une espèce d’auteur et de poëte dramatique (et non, certes, le moindre), qui rendait ou prêtait aux rôles un peu conventionnels et refroidis de la scène française une vie historique, une réalité à demi shakspearienne, — il arrive que ce qu’on a surtout aimé dans notre jeune et grande actrice, ç’a été un retour à l’antique, à la pose majestueuse, à la diction pure, à la passion décente et à la nature ennoblie, à ce genre de beauté enfin qui rappelle les lignes de la statuaire. […] Et quasi cursores vitaï lampada tradunt, a dit l’antique poëte dans une magnifique image : c’est comme un flambeau qu’il faut recevoir et saisir, en entrant, — l’héritage de la vie ; quelques-uns l’ont pris comme un cierge, et beaucoup comme un cigare. […] Des Préaux s’y connaît en vers mieux que moi. » Aujourd’hui que ce genre de déférence et de patronage va peu à nos idées, que dans les conditions actuelles il courrait risque d’être peu accepté des hommes de talent, que tout poëte dirait volontiers tout d’abord au maître, s’il y en avait un : « Je m’y connais en matière d’État mieux que toi ; » et que, de leur côté, des gouvernants illustres, et en général capables sur tout sujet, vaquent à beaucoup de choses qu’ils croient plus essentielles que le soin des phrases, lesquelles ils manient eux-mêmes à merveille, qu’arrive-t-il et que voit-on ?
Que de tact et de goût il a fallu au poète pour faire accepter du public cette figure d’une si ingrate ressemblance ! […] La scène est neuve, hardie, d’une hardiesse qui a dû faire trembler la main du poète. […] Le poète voulait guérir subitement son malade ; aussi ne lui a-t-il donné qu’une migraine morale, que l’air de la campagne suffit à dissiper.
Tout grand poète, tout grand romancier a son cortège d’admirateurs, et surtout de femmes, qui l’exaltent, qui l’entourent, qui le chérissent, qui se sacrifieraient de grand cœur à lui, et (je leur en demande bien pardon) qui, si on les laissait faire, l’auraient, sans le vouloir, bientôt mis en pièces comme Orphée. […] Le poète, le romancier, ne voulait que réaliser le fantôme de ses rêves, et voilà qu’il a trouvé la forme qu’attendaient, que chérissaient vaguement d’avance les imaginations du moment, et qu’elles ne pouvaient définir et démêler sans lui. […] Elle justifie ce qu’a remarqué si bien Byron : l’amour de Rousseau n’était pour aucune femme vivante, ni pour une de ces beautés d’autrefois, que ressuscitent les rêves du poète.
En un endroit du récit, on trouve un chapitre intitulé « Les Poètes » : c’est un dîner supposé entre gens de lettres et beaux esprits du temps de Louis XIII ; le fameux poète Théophile y préside. […] À ce morceau sur Bussy il faut joindre ce qu’il a écrit sur Molière dans la Revue des deux mondes : il y détruit quelques erreurs traditionnelles répétées par tous les biographes ; il rectifie des dates et ajoute aux faits connus sur les origines du grand poète quelques faits nouveaux.
L’abbé Arnaud disait à Diderot : « Vous avez l’inverse du talent dramatique ; il doit se transformer dans tous les personnages, et vous les transformez tous en vous. » Mais si Diderot n’était rien moins qu’un poète dramatique, s’il n’était nullement suffisant à ce genre de création souveraine et de transformation tout à fait impersonnelle, il avait en revanche au plus haut degré cette faculté de demi-métamorphose, qui est le jeu et le triomphe de la critique, et qui consiste à se mettre à la place de l’auteur et au point de vue du sujet qu’on examine, à lire tout écrit selon l’esprit qui l’a dicté. […] Diderot est le roi et le dieu de ces demi-poètes qui deviennent et paraissent tout entiers poètes dans la critique : ils n’ont besoin pour cela que d’un point d’appui extérieur et d’une excitation. […] La plume du poète, le crayon du dessinateur habile, ont l’air de courir et de se jouer.
Le sujet était un jeune poète lisant sa première élégie à une femme de lettres. […] » Le poète, quelque part, appelle heureux à bon droit celui qui, sachant occuper et charmer son loisir, Ainsi que de talents a jadis hérité D’un bien modique et sûr qui fait la liberté. Ce bien modique que souhaitait André Chénier, ce bien qui vient de famille et qu’on n’a pas eu à gagner à la sueur de son front, res non parta labore, sed relicta, est aussi l’un des vœux du poète Martial.
Un poète italien moderne, Leopardi, enviant la gloire de ces opportuns et heureux traducteurs italiens qui se sont enchaînés à quelque illustre classique des anciens pour n’en plus être séparés, s’écrie : « Qui ne sait que Caro vivra autant que Virgile, Monti autant qu’Homère, Bellotti autant que Sophocle ? […] Sans prendre à la lettre les imprécations de d’Aubigné sur le roi qui eut le malheur d’attacher son nom à cette nuit funeste, on conviendra qu’il y avait au moins de l’illusion de précepteur et de père nourricier dans Amyot. — Quant au petit roi, il jugeait son bon maître tout en le comblant : on rapporte qu’il le raillait parfois sur son avarice et sa parcimonie, et enfin, lui qui se connaissait en vers et qui en faisait même d’assez bons, il se permettait de trouver durs ceux qu’Amyot mêlait à ses traductions : Amyot, très peu poète en cela, ne l’en trouvait pas moins aimable. […] Avec un génie qui, certes, était inférieur à bien des égards à celui de Ronsard, il a fait tout autrement que lui, il s’est proposé tout le contraire, et, prosateur de plus en plus accueilli, il a mérité de la postérité toute la faveur qu’elle retirait au malencontreux poète.
« Il y avait, disait Geoffroy, un sort jeté depuis cinq ans sur les tragédies et les poètes tragiques : M. […] Supposant un concours solennel entre les poètes de toutes les nations, chaque nation n’ayant droit qu’à nommer un seul représentant : Les Grecs, s’écrie Raynouard, nommeraient Homère ; les Latins, Virgile ; les Italiens, le Tasse ou l’Arioste (il serait, je crois, plus juste de mettre Dante) ; les Anglais, Milton (lisez plutôt Shakespeare) ; et nous tous, — oui, vous-mêmes qui savez admirer Racine… ah ! […] Parlant de ce qu’aurait pu faire le poète Le Brun, son prédécesseur, s’il avait assez vécu pour tenter en vers l’apothéose de Napoléon, Raynouard ajoutait : Le chantre de Napoléon l’aurait représenté d’après l’histoire, grand au-dessus des rois, tel qu’Homère, d’après la fable, a représenté Jupiter grand au-dessus des dieux ; gouvernant l’univers par l’autorité de sa pensée, toujours prêt à saisir de sa main toute-puissante l’une des extrémités de la chaîne des destins, si tous ses ennemis ensemble osaient s’attacher à l’autre, et toujours certain de les entraîner tous.
Si jamais cette indulgence pour les poètes, les peintres, les musiciens, devient générale dans le public, c’est une marque que le goût est absolument perdu… Les gens qui admirent si aisément les mauvaises choses ne sont pas en état de sentir les belles. […] Il remarque que, quoiqu’il y ait dans les Essais une infinité de faits, d’anecdotes et de citations, Montaigne n’était point à proprement parler savant : « Il n’avait guère lu que quelques poètes latins, quelques livres de voyages, et son Sénèque, et son Plutarque » ; ce dernier surtout, Plutarque, « c’est vraiment l’Encyclopédie des anciens ; Montaigne nous en a donné la fleur, et il y a ajouté les réflexions les plus fines, et surtout les résultats les plus secrets de sa propre expérience. » Les huit pages que Grimm a consacrées aux Essais de Montaigne sont peut-être ce que la critique française a produit là-dessus de plus juste, de mieux pensé et de mieux dit. […] En France, il salue donc comme incomparable le siècle de Louis XIV ; et, au xviiie siècle, il ne trouve qu’une classe d’hommes supérieurs et d’une espèce particulière, la seule qui manquât au grand siècle : « Je les appellerai volontiers philosophes de génie : tels sont M. de Montesquieu, M. de Buffon, etc. » Voltaire est le seul des littérateurs purs et des poètes qui soutienne le vrai goût par ses grâces., son imagination et sa fertilité naturelle : mais, selon Grimm il ne fait que soutenir ce qui fléchissait déjà.
L’étude du contenu se réduira à l’analyse de la teneur habituelle des images, et, plus nettement, des sujets, des visions, de la région intellectuelle dans laquelle le poète se sera complu. — Il est inutile de poursuivre ces considérations. […] La définition de l’œuvre d’art comprend au même titre le roman feuilleton et le roman d’analyse, les genres supérieurs et bas ; elle s’applique aussi bien à l’émotion d’un charretier écoulant une chanson de café-concert, qu’à celle d’un poète charmé par un lied de Schumann, d’un philosophe admirant les démonstrations de Malebranche, ou d’un ingénieur suivant le jeu d’une locomotive. […] Si Iago émeut une personne du commun, ce n’est pas que celle-ci sente et puisse même comprendre l’art et l’audace que le poète a mis à dresser ce personnage ; cet art et cette audace, on ne les reconnaît qu’après coup, par un examen critique, minutieux et difficile.
peut-être aurait-elle ramené à Dieu le grand poëte. […] D’autant plus grande, cette poëte qui s’ignore, abîmée dans l’humilité et le flamboiement de sa foi, qu’elle ne veut pas l’être, — qu’elle ne pense pas une minute à l’être, pas plus qu’elle ne pense à la science, à la sûreté de sa divination, vraie pour elle, mais qu’elle ne donne pas comme l’éclair fixé de la certitude. Le grand cœur qui seul est évident ici, le grand cœur à, qui la douleur de la vie mortelle a expliqué la vie d’après la mort, n’a pas plus voulu être poëte que la tête qui a déduit de telles espérances des faits et des paroles de l’Évangile ne veut être théologienne.
Les erreurs de cet esprit si juste sont des jugements intéressés, où il a pris sa commodité pour règle… Et comparant cette correspondance de Voltaire avec les lettres de Cicéron, cet autre esprit universel et le grand épistolaire de l’Antiquité, il dira : L’amour de la gloire est l’âme de ces deux recueils, et ce que Voltaire fait dire au Cicéron de sa Rome sauvée : Romains, j’aime la gloire et ne veux pas m’en taire, est aussi vrai du poète que de son héros. […] C’est à cause de cette rigoureuse recherche d’exactitude que je me permettrai de remarquer qu’en appréciant si bien André Chénier et en rendant à ce jeune et nouveau classique la part entière qui lui est due, il l’a un peu trop appareillé, en tout, et même pour la destinée, avec cet autre charmant poète de nos jours, Alfred de Musset.
Laissez-vous faire, ne craignez pas tant de sentir comme les autres, n’ayez jamais peur d’être trop commun ; vous aurez toujours assez dans votre finesse d’expression de quoi vous distinguer. » Mais je n’aurais pas affecté non plus de paraître plus prude que je ne le suis et qu’il ne convient de l’être à ceux qui ont commis, eux aussi, leurs poésies de jeunesse et qui ont lu les poètes de tous les temps ; j’aurais ajouté de grand cœur : « J’aime plus d’une pièce de votre volume ; les Tristesses de la lune, par exemple, joli sonnet qui semble de quelque poète anglais, contemporain de la jeunesse de Shakespeare.
» Il y a dans ce chant, et dans celui de l’Exilé qui vient après, un retentissement profond des Pèlerins polonais, par le poëte Mickiewicz ; mais ce qui, chez Mickiewicz, était demeuré restreint à une acception trop nationale et trop exclusive, se trouve généralisé selon un esprit plus évangélique par M. de La Mennais, et rapporté à la vraie patrie, à la patrie universelle. Littérairement, par cette œuvre, M. de La Mennais conquiert, à bon droit, le titre de poëte.
Sans remonter si haut, si de nos jours le vénérable Goethe, dérogeant une fois à cet esprit de sagesse et d’à-propos qu’il sait porter en toutes choses, s’avisait sur la fin de sa carrière d’un effort malencontreux, qui de nous aurait le courage ou plutôt la lâcheté de relever sans pitié l’illusion du grand poëte, et de rompre par de rudes et inutiles vérités le calme religieux dans lequel il jouit de sa gloire ? […] « Les patriciens lisaient ces écrits, et leur accordaient volontiers ce sourire de compassion qu’ils eussent donné aux rêveries d’un poète en délire. » L’heureux temps pour les gens de lettres !
Il croit par là embarrasser beaucoup ses adversaires ; mais il oublie trop que nous-mêmes n’avons jamais préconisé les théâtres étrangers actuels, et que, si nous avons proposé Shakspeare Gœthe et Schiller, non pas à l’imitation, mais à l’admiration, à la méditation de nos poètes, nous avons les premiers signalé, à l’occasion du théâtre anglais, cette manie d’importations exotiques, de vaudevilles lourdement travestis, dont l’académicien voyageur semble tirer un sujet de triomphe. […] Cette œuvre du loisir et du recueillement, où viendront sans doute contraster et se confondre en mille effets charmants ou sublimes la vérité et l’idéal, la raison et la fantaisie, l’observation des hommes et le rêve du poète, arrivée dans le monde réel, exposée aux regards de tous, enchantera les âmes et ravira les suffrages ; les esprits les plus graves, philosophes, érudits, historiens, se délasseront à la contempler, car l’impression d’une belle œuvre n’est jamais une fatigue ; les politiques surtout, en n’y cherchant que du plaisir, y puiseront plus d’une émotion intime, plus d’une révélation lumineuse, qui, transportée ailleurs et transformée à leur insu, ne restera stérile ni pour l’intelligence de l’histoire, ni pour les mouvements de l’éloquence ; la tribune et la scène, en un mot, rivales et non pas ennemies, pourront retentir ensemble et quelquefois se répondre.
Troplong s’attache avec une grande rigueur d’étude à présenter les faits dans un jour plus vrai pour l’homme d’État que conforme à la prévention littéraire : il montre d’une manière piquante la mode du pompéianisme survivant de beaucoup à Pompée et formant toute une école, dont Lucain est le poëte et dont les prosateurs sont un peu partout depuis Cicéron. […] Il fait voir la contradiction révoltante qu’il y avait à mettre sous la protection de Néron un poëme soi-disant écrit pour restaurer l’idée de République et de liberté : « Que si les Destins n’ont pas trouvé d’autre chemin pour frayer la route à Néron, s’écrie en commençant le poëte, si les règnes immortels et divins s’achètent toujours cher, et si pour assurer l’empire du Ciel à Jupiter, il fallait les horribles batailles des géants, alors, ô Dieux !
Albert Wolff et Émile Blavet On vient de rendre un tardif hommage au plus grand poète de ce siècle : c’est Lamartine que je veux dire. […] Il y a, a la première page, une vignette qui représente un long poète en redingote sur un promontoire, les cheveux dans la tempête, ou un ange en robe blanche qui porte une harpe.
Car, comprendre sans affectation, sourire sans faire mal, aussi, bien que ce soit de moindre prix, lire les poètes latins et italiens, voilà des mérites, assurez-vous-en, qui n’ornent pas seulement l’évêque d’Assise. […] D’autres noms viennent : des grands poètes anglais du temps d’Élisabeth : Webster, Ben Jonson, Ford, Beaumont et Fletcher.
L’élément agressif et destructif dans l’amour a inspiré nombre de poètes, de romanciers et d’auteurs dramatiques (Mérimée dans Carmen et La Vénus d’Isle, Strindberg dans Père et dans Mademoiselle Julie). […] L’individualisme stirnérien est une revendication en faveur de la « différence » affective, de l’originalité sentimentale quelle qu’elle soit. — C’est aussi bien l’individualisme de l’impulsif, du maniaque, de l’excentrique, du névrosé en quête de sensations bizarres et compliquées (tel un Des Esseintes), que l’individualisme du grand poète, du grand artiste qui exprime des manières de sentir délicates, puissantes on profondes, vraiment neuves et intéressantes, vraiment capables d’éveiller un écho dans l’âme des autres hommes.
Genus irritabile, a-t-on dit des poètes. Passe pour un poète de se fâcher !
Est-ce que le poëte Sténio n’était pas Alfred de Musset peint avec une cruauté passionnée ? […] … On compte dix-huit espèces de jaunes différents, dit Haller le naturaliste poëte.)
Elle était dans son esprit au même degré, et c’est là ce qui l’empêcha, quand il crut l’être, d’être poète. Montesquieu, tout majestueux président qu’il pensait rester, était d’une époque où l’amour des sens, ce diable déchaîné, secouait les plus graves, et il eut comme les autres ses aventures de boudoir ; mais, de l’imagination, comme les poètes qui aiment, il montra le peu qu’il en avait dans des madrigaux absolument et détestable ment médiocres, et dans ce poème en prose du Temple de Gnide que la marquise du Deffand appelait : « l’Apocalypse de la galanterie », parce que la pauvre diablesse aveugle ne comprenait rien à celui de Saint Jean !
René d’Anjou n’est pas Childebrand, et Lecoy de la Marche n’est pas ignorant comme le poète dont Boileau se moque ; mais, franchement, on ne voit pas très bien pourquoi, si on n’écrit pas une histoire générale de France où le roi René tient naturellement sa place, on a détaché de cette histoire et pris à part, comme un homme assez grand pour se présenter seul, ce roi qui se fond dans les événements de son siècle, — qui n’a pas dévoré son règne d’un moment, comme dit Corneille, mais que son règne d’un moment, si cela peut s’appeler un règne, a dévoré ! […] Seulement, le Roi René est trop exclusivement pour elle un bon vieux poète baguenaudant avec toutes les curiosités artistiques de son temps, s’endormant dans le radotage d’une petite Capoue littéraire.
Quoiqu’il ait écrit des Poésies, ce n’est pas un poète cependant, dans le sens absolu de ce grand nom qui suffit à la gloire d’un homme quand il le mérite ; il n’est point un poète dans sa plus haute signifiance, mais il a de l’imagination poétique, et le livre que voici en est la preuve la plus incontestable.
la véritable et la seule originalité de Gœthe, de cet Allemand qui, comme les autres Allemands, était idéaliste et poète, c’est d’avoir, Ixion infidèle, quitté la nuée pour embrasser la terre ; c’est d’avoir fait de la vie un art, bien plus qu’il n’a fait de l’art une vie ; c’est de s’être préoccupé, jusqu’à nous en faire mal au cœur, de l’utilité et de la pratique ; de jouer, enfin, au petit Machiavel, même littéraire, en n’étant qu’un petit Jérémie Bentham. […] Enfin, parce qu’il était spinoziste et athée, — non pas comme Shelley, le poète, qui s’écrivait athée sur la cime du Mont-Blanc et voulait qu’on lui donnât ce titre sur l’adresse de ses lettres, mais discrètement, sans inconvénient, dans la pénombre, la main fermée, comme Fontenelle, sur la dangereuse vérité, — les athées Tartufes ont admiré ce gouvernement sur soi-même, cette domination sur sa pensée.
Il y ajoute Mameli, le soldat et le poète de la dernière révolution italienne. […] L’utopiste révolutionnaire, qui, dans son Histoire de la Révolution, a voulu décapiter l’Histoire de ses chefs, c’est-à-dire lui couper ses têtes au profit des masses sans têtes ; revient à cette rêverie… Il y revient, en poète qu’il est, au commencement de son livre ; et c’est même beau de forme à nous faire illusion !
La réussite, la fortune, le million, dont il est le poète et l’apôtre, lui ont persuadé, avec cette facilité d’illusion qui est particulière aux gens heureux, qu’une comédie pouvait s’improviser, en deux temps, sous le ciel de Naples, « lorsqu’on n’avait pas de journaux à lire et qu’il faisait trop chaud pour sortir ». […] De Girardin s’est posé en poète, en faiseur de fiction, en peintre dramatique.
C’est avoir profité que de savoir s’y plaire, a dit un poëte de la lecture d’un autre poëte : mais c’est bien plus vrai de la lecture de Sainte Térèse.
Son plus grand poète, Goethe, est ennuyeux à faire périr d’étisie les gens obèses. — L’aigle noir de Russie a deux têtes. […] Il resta plusieurs années en Italie, où, paraît-il, il ne caressa pas que des abstractions… Cependant, malgré une jeunesse qui ressembla plus par les mœurs à celle d’un poète comme Byron qu’à celle d’un philosophe qui devait proclamer un jour la beauté de la continence et la nécessité de l’ascétisme, la métaphysique le tenait.
c’est un sceptique de ce temps ; un sceptique, du moins, heureusement tempéré par un poète, et la corde religieuse dort toujours, dans les poètes, quand elle n’y vibre pas.
Il n’y en avait pas dans ce livre où plus d’une page semblait l’écho de celle théologie de cabaret qui inspira Le Dieu des bonnes gens au poëte le plus sottement vanté de cette époque. […] Brucker alluma dans sa tête ce système, asphyxiant pour les imaginations vives, le Fouriérisme, et c’est ainsi que le suicide de sa vie, il ne l’accomplit que sur sa raison… C’est dans cette orageuse période de sa jeunesse qu’il écrivit avec un talent haletant et convulsé le livre intitulé Mensonge, où la Critique put remarquer un effrayant chapitre intitulé Le Fond des âmes, enlevé dans l’amère et ironique manière d’Henri Heine, un des plus grands poètes qui aient paru depuis Byron, mais une fleur de poésie mortelle aux âmes qu’elle touche, comme le laurier-rose, dont elle a les suavités de teinte et les poisons.
Deux orateurs célèbres, Fléchier et Bossuet le fixèrent, comme deux grands poètes avaient fixé l’art bien plus difficile de la tragédie. […] Il est dans la classe des hommes éloquents, ce qu’est Homère et Milton dans celle des poètes.
Il n’y a pas quatre poètes comiques français qui en aient une aussi longue. […] Alexandre Dumas fils fut un créateur d’hommes et un excitateur d’idées, un poète et un penseur. […] C’étaient les faux grands hommes, ceux d’un jour, « ceux qui vivent un temps », comme a dit le poète. […] Généralement le poète dramatique prend son public pour complice. […] Avec une délicatesse touchante, la veuve du pauvre poète a dédié la pièce imprimée à M.
Les seuls petits événements, ridicules pour les salons, mais qui ont de la portée au dehors, au moins comme symptômes, ce sont les brochures qui éclosent autour de M. de Lamartine : il a ses publicistes à lui, qui le démontrent à la foule (comme nous-même l’avons démontré poëte il y a quinze ans) ; on le démontre réformateur et politique, philosophe, — révélateur.
madame Mélingue, présent de notre plus grand poëte dans un jour de magnifique générosité pour la Comédie française ; cadeau de souverain à souverain 33.
Un Dieu moissonne les adolescents de génie et les belles jeunes filles, afin que ses élus soient un jour réjouis par leur beauté et par leurs chants ; et le printemps éternel sera fait de ces printemps humains brusquement interrompus… Je livre cette idée consolante et déraisonnable à quelque poète spiritualiste.
[Les Poètes français, recueil publié par Eug.
[Anthologie des poètes français du xixe siècle (1887).]
Fernand Gregh L’Aube juvénile est le titre de la dernière pièce, qui est aussi la plus longue : dialogue symbolique entre l’Enfant en robe grise, représentant la jeunesse rêveuse et triste du poète, et l’Enfant en robe de pourpre, qui incarne son invincible espoir.
Philippe Gille C’est le livre d’un esprit élevé, d’un poète sincère, que celui que M.
Vielé-Griffin M. de Régnier Invention Talent Instinct, spontanéité Sens de l’équilibre Poète Artiste Naïveté (Artificialité) Fluidité Rigidité Inconsistance Fermeté plastique Variété Homotonie Mouvement Stabilité Manière Impersonnalité (Flaubert) Un style Le style Subjectivité Objectivité (Temps) (Espace) Et encore cette petite table d’analogies : MUSIQUE PLASTIQUE Rythme (mouvement) Harmonie (son) Forme (lignes) Lumière Les rythmes Mesures Timbres L’harmonie Geste (trait) Attitude Coloris Valeurss TEMPS ESPACE On remarque que chaque ordre dans la musique correspond à l’ordre de même rang et de même position dans la plastique ; ainsi Rythme à forme, Harmonie à lumière, valeurs à harmonie, rythmes libres à gestes, etc.
Pour avoir eu, pendant sa vie, une réputation au dessus de son mérite, ce Poëte est aujourd’hui beaucoup moins estimé qu’il ne vaut.
Boileau lui dit, au sujet de sa Traduction d’Anacréon, que personne ne devoit entreprendre de traduire ce Poëte après elle, même en Vers.
Le ressentiment de ce Poëte a été trop loin ; il n’étoit pas nécessaire de composer cent & une Epigrammes contre ce Journaliste, comme il en avoit le projet.
La philosophie de ce Poëte triompha de son ressentiment.
Ce Poëte a de plus le mérite très-estimable d'avoir dédaigné dans ses Ouvrages le vernis philosophique, & de s'être élevé contre les Philosophes, dont les « Ouvrages, dit-il, ne peuvent servir que de trophée à l'extravagance humaine.
M. de Voltaire & M. d'Alembert qui pensent trop souvent d'après ce Poëte, ont beau dire qu'on doit s'attacher à sa Langue, & renoncer aux Langues mortes, dans lesquelles, selon eux, il est impossible de bien écrire, ils ont oublié, sans doute, que c'est en étudiant la Langue de Virgile, d'Horace, de Cicéron & de Tacite, celle d'Homere, de Sophocle, de Démosthenes, & de Thucydide, qu'on peut se former le goût pour bien écrire dans la sienne.
Ici, ce sont trois vieillards qui discourent en allant de Gnosse à l’antre de Jupiter, et qui se reposent sous des cyprès, et dans de riantes prairies ; là, c’est le meurtrier involontaire, qui, un pied dans la mer, fait des libations à Neptune : plus loin, un poète étranger est reçu avec des chants et des parfums : on l’appelle un homme divin, on le couronne de lauriers, et on le conduit, chargé d’honneurs, hors du territoire de la République.
Leur individualité, s’ils en ont une, est toute arbitraire et personnelle à la pensée du poète ; elle n’est pas, si je puis m’exprimer ainsi, une individualité humaine. […] Des poètes, des musiciens, des philosophes, des amoureux, s’occupent chacun a sa manière pendant le travail de l’artiste. […] Peintre, observateur et poète, il faut ces trois petites choses-là pour faire un réaliste. […] Champfleury regarderait, j’en suis sûr, comme une injure la qualification de poète ; en tout cas, ce n’est pas moi qui la lui jetterai à la tête. […] mais une âme, une âme ambulante, une âme de tant de pieds et tant de pouces. — En marchant à côté de cet homme, dit le poète, on sentait qu’on marchait à côté d’une âme
Jeudi dernier, 27, l’Académie française a donné le prix de poésie dont le sujet était l’Éloge ou le monument de Molière à un numéro 34 qui est connu d’avance pour être de madame Louise Colet, poëte déjà une fois lauréat.
[Anthologie des poètes français du xixe siècle (1887-1888).]
Sainte-Beuve Emmanuel des Essarts, que, son nom oblige, fils de poète, un de mes élèves à l’École normale, et qui sait allier la religion de l’antiquité aux plus modernes ardeurs.
Dès ce moment, Soulié fut connu ; il se mit en rapport avec quelques renommées déjà établies, en même temps qu’il se lia d’intimité avec de jeunes poètes comme lui.
C’est là qu’il est mort sans bruit, comme il avait vécu, sans une mention dernière dans les feuilles publiques, et le jour même où le convoi entrait sous les voûtes de Notre-Dame du Bon Voyage, l’Académie décernait des couronnes et jetait, comme une suprême ironie, sur le cercueil de ce poète mort pauvre, un bruit inutile de pièces d’or.
COLLETET, [Guillaume] Avocat au Conseil & au Parlement, de l’Académie Françoise, né à Paris en 1598, mort dans la même ville en 1659 ; Poëte sans imagination, sans goût, sans élocution, & cependant un de ceux que le Cardinal de Richelieu faisoit travailler pour le Théatre.
IVETEAUX, [Nicolas Vauquelin des] Abbé, fils du Poëte la Fresnaye, né dans un Château près de Falaise, mort en 1649 ; est plus connu par son goût pour les plaisirs, que par ses Ouvrages, quoiqu’il écrivît dit-on, purement en Latin, en Italien & en François, soit en Prose, soit en Vers.
Après avoir analysé le génie du Poëte d’Auguste, M. le Duc de Niv** prend sa lyre, & en tire des sons qu’Horace lui-même n’eût point désavoués ; on ne s’apperçoit pas que cet instrument ait changé de main, en passant dans les siennes.
PETIT, [Louis] ancien Receveur général des Domaines & Bois du Roi, mort à Rouen, sa patrie, en 1693, âgé d’environ 79 ans ; Poëte François, très-différent du précédent, & que M.
puisqu'il a encore ajouté en prose, dans une note, que le même Poëte est supérieur, dans la Tragédie, à Corneille & à Racine ; que Racine n'a su peindre que des Juifs, tandis que Phédre, Monime, Néron, Burrhus, Mithridate, Bajazet, Acomat, sont nés si loin de la Judée !
En général, ce Poëte est diffus, languissant, prosaïque ; principe assez naturel d’une chute inévitable.
Pourquoi de si grands poètes ?
Un peintre, et encore plus un poëte, qui tient toujours une grande place dans son imagination, et qui lui-même est encore souvent un homme de ce caractere d’esprit violent, pour lequel il n’est point de personnes indifferentes, se figure qu’une grande ville, qu’un roïaume entier n’est peuplé que d’envieux ou d’adorateurs de son mérite.
Et la différence artistique est non moins marquée : En ses opéras, Wagner reste librettiste d’opéra, content avec une esquisse de poème au lieu d’un poème développé, avec une ébauche littéraire, hâtée, confuse, incorrecte, un récit de fait-divers, au lieu de la précise et complète analyse du roman ; le spectacle est celui de l’opéra, dialogues d’interlocuteurs qui ne se regardent point, brillants défilés ; enfin, musicien d’opéra, Wagner emploie, — génialement, — une forme étriquée, et, — mélancoliquement, — il renonce aux richesses symphoniques de l’étude passionnelle… Mais, en ses drames, il est poète, avec les subtilités, les grandeurs, et les affinements des purement poètes ; son drame existe, littérairement, comme un roman dialogué ; — et il est le musicien révélateur de l’essence musicale, et son orchestre a appris à exprimer, — clairement (pour la première fois), — les ineffables intimités des âmes. […] — Le Moi créateur est le moi réel, individuel, non l’Absolu Noumêne du grand poète Kantien. — Non Fichte, mais Platon, identifiant le νοῦς à l’Idée créatrice. […] Mais quel poète, en une telle tâche, eut pu lui donner aide ? […] Mais nous savons que jamais les vers d’un poète, pas même de Schiller et de Goethe, ne pourraient donner à la musique cette précision qu’elle demande ; seul peut la donner le Drame, et non point, certes, le poème dramatique, mais le Drame se mouvant réellement devant nos yeux, l’image devenue visible, de la Musique, où les mots et les discours appartiennent, seulement, à l’Action, non point à la Pensée poétique.
Courteline est un poète. […] Et le poète voyait juste. […] En face d’elles, le poète dresse les puissances blanches. […] Cette excellence l’a même fait poète dans une certaine mesure. […] C’est un gentil garçon, poète de son état : on est ce qu’on peut.
. — Le Congrès des poètes (1894). — Bêtes et gens de lettres (1895). — Avant la fin du jour, un acte (1895). — La Demande, un acte, en collaboration avec Jules Renard (1895). — Paris sur le Pont, revue tabarinique (1895). — Le Petit Champ, farce tabarinique en vers (1896). — Pantomime de poche, récit animé (1896). — Lucas s’en va-t-aux Indes, farce tabarinique en vers (1896). — Compliment de la Parisienne à François Coppée (1896). — Le Pont aux ânes, farce en un acte, en vers (1897). — Théâtre bref, en collaboration avec Émile Coden (1897-1898). — Paris sur la route, revue, en collaboration avec Lucien Métivet (1897). — On demande un jeune ménage, un acte, en collaboration avec Em.
Une connaissance sûre des mythes anciens, des idées, de l’enthousiasme, de l’éloquence : tels, je pense, les mérites de cette Vie mystique, œuvre d’un philosophe, sinon d’un poète.
Brun, [Laurent le] Jésuite, né à Nantes en 1607, mort à Paris en 1663 ; Poëte Latin qui a prétendu égaler les plus grands modeles, en n’imitant que les titres de leurs Ouvrages.
Au reste, le sujet du Tuteur dupé est tiré du Fanfaron de Plaute, & la meilleure scene du Mariage interrompu est une imitation des Bacchides du même Poëte Latin.
Si l’Auteur de Zaïre eût eu, à l’égard de ce Poëte, la même indulgence qu’il est dans le cas de réclamer pour ses Pieces, quelque bonnes qu’elles soient, il se seroit épargné le blâme d’une censure injuste, à l’égard d’un homme qu’il avoit si fort loué de son vivant.
L’auteur de ce recueil, en réfléchissant sur cet obstacle, a cru découvrir que cette froideur n’était point dans l’essence de l’Ode, mais seulement dans la forme que lui ont jusqu’ici donnée les poètes lyriques.
La crainte des flammes vengeresses et de l’éternité formidable de notre Enfer, perce à travers le rôle de cette femme criminelle39, et surtout dans la scène de la jalousie, qui, comme on le sait, est de l’invention du poète moderne.
Nos poètes eux-mêmes, « ces contempteurs superbes de la foule, qui planaient dans les hauteurs », voilà qu’ils redescendent aux exigences mesquines de la foule — et que « les aigles » se font une raison, comme on dit. — Savez-vous quel volume de poésies a, dans ces dernières années, remporté le prix de la faveur publique ?
Ses premières années d’émancipation se passèrent à vaguer dans les ateliers des artistes et à baguenauder à tort et à travers ; il voyait aussi quelques-uns des poètes dits du Cénacle, et il en tirait la plupart de ses jugements littéraires futurs. […] Vernet lorsque je ne trouverai plus dans ses œuvres les qualités qui le distinguent, et que je ne comprends pas qu’on puisse lui disputer ; mais tant que je verrai cette verve, cette adresse et cette vigueur, je ne chercherai pas les ombres de ces précieux rayons de lumière. » Touches heureuses de critique, qui sentent le poète, qui consolent et qui vengent du pédant10 ! […] Fussiez-vous un Virgile, le chantre pieux et sensible par excellence, il y en a qui vous diront un poète efféminé et trop doux.
Pour arriver à une œuvre qui enlève, qui passionne tout le public et fasse événement, il faut en venir au Cid représenté avec un applaudissement enthousiaste vers la fin de décembre 1636, et qui sacra Corneille grand poète. […] Le Cid, pour les Espagnols, était, depuis des siècles, un personnage épique : aussi le poète dramatique, Guillem de Castro, se sent à l’aise avec lui et y taille en pleine étoffe. En France il n’en était pas ainsi ; on ne savait pas un mot du Cid avant Corneille : le poète et le père de notre scène avait à nous le faire connaître et admirer du premier coup et vite, par les profils les plus nets et les plus tranchés, en raccourci.
Je n’en sais rien en ce moment ; mais je soutiens qu’il se trouve dans tous les mots employés par le vrai poëte, pour les yeux un certain phosphore, pour le goût un certain nectar, pour l’attention une ambroisie qui n’est point dans les autres mots. » « Les beaux vers sont ceux qui s’exhalent comme des sons ou des parfums. » « Il y a des vers qui, par leur caractère, semblent appartenir au règne minéral ; ils ont de la ductilité et de l’éclat. […] Rousseau remplit l’intervalle qui se trouve entre La Motte et le vrai poëte. » Quelle place immense, et d’autant plus petite ! […] Je ne dis rien non plus du vieil Eschyle : vous les connaissez amplement en leur qualité de poètes.
Deux tragédies545, le dur commentaire sur Corneille, un violent réquisitoire contre Shakespeare, voilà la part du poète. […] Anglais, Espagnols, Italiens, Suisses, Allemands, Russes, rois, impératrices, ministres, maréchaux, grands seigneurs, magistrats, poètes, mathématiciens, négociants, ministres protestants, prêtres catholiques, cardinaux, femmes du monde, comédiennes : quel est l’échantillon de l’humanité qui manque à la collection ? […] Mais on l’admirait, quand on voyait autour de lui tant de gens qui ne vivaient que par lui, et qui ne lui en étaient pas toujours reconnaissants ; il élevait Mlle Corneille, une arrière-petite-nièce du poète, la dotait avec le commentaire sur l’oncle, la mariait, se brouillait avec elle ; alors il prenait Mlle de Varicourt, à qui il trouvait aussi une dot et un mari.
À ce compte, un poète qui suera sang et eau pour faire de mauvais vers sera sacré grand poète de préférence à un poète heureusement doué, dont le génie et la facilité diminueront le mérite.
La théorie littéraire de Lesage se pourrait extraire au complet de plus d’un passage de Gil Blas, et particulièrement des entretiens de celui-ci avec son ami le poète Fabrice Nuñez. […] Les sonnets, les odes et les autres ouvrages qui veulent du sublime, ne s’accommodent pas du simple et du naturel ; c’est l’obscurité qui en fait tout le mérite ; il suffit que le poète croie s’entendre… Nous sommes cinq ou six novateurs hardis qui avons entrepris de changer la langue du blanc au noir ; et nous en viendrons à bout, s’il plaît à Dieu, en dépit de Lope de Vega, de Cervantes… Sachons bien qu’en écrivant ces choses, Lesage avait en vue Fontenelle, Montesquieu peut-être, certainement Voltaire, qu’il trouvait trop recherchés et visant à renchérir sur la langue de Racine, de Corneille, et des illustres devanciers. […] Si l’imagination de l’auteur anglais n’a pas embelli les lieux, Lesage avait trouvé dans son faubourg l’ermitage du poète et du philosophe.
Navarre, receveur des tailles à Soissons, était, nous dit un homme non amoureux (Grosley), la plus brillante partie de sa famille ; elle visait au grand, à l’extraordinaire, et se fit aimer du maréchal de Saxe : « La beauté, les grâces, les talents, un esprit délicat, un cœur tendre, l’appelaient à cette brillante conquête… Sa conversation était délicieuse70. » Marmontel nous la montre de plus imprévue, capricieuse, avec plus d’éclat encore que de beauté : « Vêtue en Polonaise, de la manière la plus galante, deux longues tresses flottaient sur ses épaules ; et sur sa tête des fleurs jonquille, mêlées parmi ses cheveux, relevaient merveilleusement l’éclat de ce beau teint de brune qu’animaient de leurs feux deux yeux étincelants. » C’est cette amazone, cette belle guerrière qui, sacrifiant l’illustre maréchal au jeune poète, enleva un matin Marmontel à ses sociétés de Paris et le transporta d’un coup de baguette dans sa solitude d’Avenay, où elle le garda plusieurs mois enfermé au milieu des vignes de Champagne comme dans une île de Calypso. […] En allant si souvent sur les brisées du maréchal, Marmontel finit pourtant par le mettre en colère : « Ce petit insolent de poète me prend toutes mes maîtresses », disait en grondant l’illustre guerrier. […] À part le poème posthume auquel je fais allusion73, Marmontel ne s’est nullement montré poète.
Dès ses débuts, bien qu’il semblât aspirer avant tout à la gloire du poète tragique, il avait quelque chose qui décelait le juge et l’arbitre, et qui excluait l’idée de camarade : cela déplaisait, et, même avant qu’il eût pris le sceptre ou la férule au Mercure et ailleurs, on le traita sans aucune indulgence et presque comme un ennemi commun. […] Jamais, par exemple, à son propos on n’oubliera ces vers de l’Apologie de Gilbert, lorsque ce poète de verve et d’avenir, se justifiant de nommer les masques par leur nom, s’écriait : Si j’évoque jamais du fond de son journal Des sophistes du temps l’adulateur banal ; Lorsque son nom suffit pour exciter le rire, Dois-je, au lieu de La Harpe, obscurément écrire : C’est ce petit rimeur de tant de prix enflé, Qui sifflé pour ses vers, pour sa prose sifflé, Tout meurtri des faux pas de sa muse tragique, Tomba de chute en chute au trône académique ? […] Le Brun était un vrai poète, et de la race des lyriques.
L’homme d’État, l’homme de guerre, le poète, le peintre, le grand homme de science ou de métier étaient montrés seulement en leur rôle, et comme en leur jour public, dans cette œuvre et cet effort dont hérite la postérité. Le xixe siècle demande l’homme qui était cet homme d’État, cet homme de guerre, ce poète, ce peintre, ce grand homme de science ou de métier. […] Il recourra aux romanciers, aux auteurs dramatiques, aux conteurs, aux poètes comiques.
Dans l’autre cas, au contraire, le paysage écrit n’est pas une description, mais une construction de logique élémentaire ; les mots échouent à prendre des postures nouvelles, qu’aucune réalité intérieure ne détermine ; ils se présentent nécessairement dans l’ordre familier où la mémoire les a reçus : ainsi depuis cinq siècles les poètes français inférieurs chantent, avec les mêmes phrases nulles, le printemps virgilien. […] Non que le révérend père fût prude ou timoré ; il note les épithètes de Voltaire et des poètes galants et la grossièreté même ne le rebuta pas, mais c’est précisément parce qu’il est bien de son temps qu’il est épouvantable. […] Les Epithètes françaises rangées sous leurs substantifs, ouvrage utile aux poètes, aux orateurs, etc., par le R.
Il faut être déjà poète en soi-même pour aimer la nature : les larmes des choses, les lacrymae, rerum, sont nos propres larmes. […] L’industrie, après avoir été ainsi l’art primitif des hommes, s’est subtilisée toujours davantage : elle a travaillé sur des matériaux de moins en moins grossiers, depuis le bois et le silex, façonnés par l’artisan des premiers âges, jusqu’aux couleurs mêlées de nos jours sur la palette du peintre ou aux phrases arrangées par le poète et l’écrivain. […] Le poète ou l’artiste ont pour tâche de stimuler la vie en la rapprochant d’une autre vie avec laquelle elle puisse sympathiser : c’est une stimulation indirecte, par induction.
Alors naquit le poète, le peintre, le statuaire, l’orateur. […] Ainsi, lorsque nous n’avions pas encore un véritable orateur, déjà le Poussin était au rang des premiers peintres de l’Europe ; déjà Lesueur avait irrité l’envie par ses chefs-d’œuvre ; Sarrazin avait perfectionné la sculpture et donné des monuments à l’Italie : enfin, nous avions eu des poètes qu’on pouvait lire longtemps avant que nous eussions des orateurs qu’on pût entendre. […] Ainsi les poètes, parmi nous, ont préparé les orateurs.
Tout fait espérer que le retard apporté à cette élection aura été favorable au poète dans l’esprit de plusieurs académiciens, auxquels il ne manquait que de laisser tomber d’anciennes préventions et de le mieux connaître.
Angellier, qui s’est tout particulièrement imprégné du génie de nos voisins, une fraîche et mouvante campagne britannique, une de celles qu’emplit le clair de lune du Songe d’une nuit d’été, une de celles qui chantent dans les poètes pénétrants et subtils dont la voix nous arrive d’outre-mer.
[Anthologie des poètes français du xixe siècle (1887-1888).]
En même temps qu’il s’est occupé avec un zèle de tous les instants des publications du poète de France, il n’a cessé de produire lui-même.
Moréas est un des bons poètes de ce temps, et celui qui dans ses Chants de la Pluie et du Soleil fait surgir si splendidement nue de la mer féconde Vénus Anadiomène, celui-là est plus apte que quiconque à comprendre cet Hellène et à saisir les nuances de celui qui — s’il fut archaïque — ne se ferma pas entièrement aux voix naturelles de la vie et aux chants très modestes des pâtres près des sources jonchées d’asphodèle.
Il développera parmi la prime jeunesse les vocations latentes de dramaturge et de poète genre chevalerie.
Racine a été, selon les moments, considéré comme un poète merveilleux de grâce et de pénétration ou comme un auteur de tragédies aussi ennuyeuses que régulières.
L’Abbé d’Aubignac eut même sujet de se plaindre de ce que ce Poëte ne fit aucune mention de lui, soit dans ses Préfaces, soit dans son Discours sur les trois Unités.
Loret dit dans sa Gazette, en assez mauvais langage, en parlant de ce jeune Poëte : Je crois, quand Apollon eût épousé Minerve, Qu’ils n’eussent pu tous deux faire un si bel Esprit.
Pour apprécier en deux mots les talens & les défauts dramatiques de M. de la Grange, qu’on réunisse, d’un côté, la fécondité de l’invention, la liaison dans l’intrigue, l’adresse dans l’enchaînement des Scenes, la justesse & l’intelligence dans le dialogue ; & de l’autre, les travers d’une imagination romanesque à la foiblesse du style, au manque de vigueur dans les caracteres, à trop de langueur dans le dialogue ; & l’on aura une juste idée du mérite de ce Poëte.
Rozoi, [N.ABCD] Correspondant de l'Académie des Sciences de Toulouse, né à Paris en 1745 ; Poëte qui, avec des talens au dessous du médiocre, n'a pas craint de s'attacher à ce qu'il y a de plus difficile.
Notre poète a si bien embelli cette idée, qu’il en a tiré vingt-huit vers, dont pas un seul n’est à retrancher. […] Molière se rappelle qu’un jeune poète lui a naguère communiqué une pièce intitulée, Théagène et Chariclée, mauvaise, à la vérité, mais annonçant les plus heureuses dispositions : il le fait chercher, lui donne le plan des Frères ennemis, de cette même tragédie, vraisemblablement, qu’il avait fait jouer sans succès à Bordeaux, si l’on en croit M. de Montesquieu ; il l’invite à lui en apporter un acte par semaine, lui reproche amicalement d’avoir dérobé quelques tirades à Rotrou, l’aide dans son travail, fait jouer la pièce avec grand soin, contribue de tout son pouvoir à sa réussite, et fait présent à l’auteur de cent louis. […] ce jeune poète est Racine. […] Le prologue. — Le poète latin fait annoncer par Mercure ce qui doit arriver dans le courant de la pièce, et par là en détruit l’intérêt ; nous n’avons pas à faire un pareil reproche à Molière, et cependant Boileau préférait, dit-on60, le prologue latin. […] Cette pièce donnée pour la première fois sur le théâtre du Palais-Royal, le 24 mai, a une origine des plus illustres ; elle est imitée du Phormion de Térence, on y reconnaît la manière de dialoguer du poète latin, ses détails les plus piquants, surtout le fond de sa fable ; et c’est d’abord avec le fond de cette fable qu’il nous importe de familiariser le lecteur ; le reste des imitations, ne venant pas toujours d’une source aussi pure, n’exige pas une analyse aussi scrupuleuse.
Le poëte, l’artiste, l’écrivain, n’est trop souvent que celui qui sait rendre : il ne garde rien. […] mais pensez comme Platon, du poëte. […] Ceux pour qui l’ennui est un charme sont amoureux ou poètes : la rêverie du poëte, c’est l’ennui enchanté.
Sans s’être classé dans aucun parti, et siégeant, comme il disait, au plafond, Lamartine s’était donné le rôle de jeter, au travers de la discussion des intérêts, toutes les nobles idées de justice, d’humanité, de générosité, sans esprit et sans ambition de parti, faisant simplement sa fonction de poète, tâchant d’élever les consciences, et versant sur les politiciens toute la noblesse de son âme en larges nappes oratoires. […] 1848 vint, et ce fut un moment unique, que celui où Lamartine, pendant des semaines, fut à lui seul tout le gouvernement, et gouverna par son éloquence de poète, calmant, maniant, purifiant les passions populaires, contenant la révolution qu’il avait faite, faisant acclamer le drapeau tricolore par l’émeute qui apportait le drapeau rouge. […] Edgar Quinet707, mêlant Herder à Chateaubriand, jugeant parfois très bien son temps et son parti, connaissant et pressentant l’Allemagne comme peu de Français ont fait, anticlérical et religieux, savant et poète, prophète par-dessus le tout et faiseur d’apocalypses, esprit large et intelligent, avec quelque chose d’incohérent et de nuageux, artiste insuffisant en dépit ou en raison des placages de sentiment ou de couleur par lesquels il croyait se donner un grand style, — Quinet n’a pas réussi à faire une œuvre : on peut lire ses Lettres. […] Vies des poètes français du siècle de Louis XIV, t.
Telle est cette Prudence, telles sont ces femmes que le jeune et implacable poète de la Dame aux Camélias vient d’incarner dans un type qu’on n’oubliera plus. […] Le jeune poète pleure comme il raille, avec la spontanéité, la fougue, la séduisante mobilité de la jeunesse. […] Que le jeune poète ne reste pas dans ce lazaret des mœurs délétères où il vient de faire une si intrépide visite. […] C’est un don du jeune poète de la Dame aux Camélias de savoir, tout d’abord, dessiner d’un trait et à la sanguine, pour ainsi dire, les dames galantes du dix-neuvième siècle.
Quisapit, in tacito gaudeat ille sinu a dit le poète élégiaque ; ce qui n’est pas moins vrai des félicités et des vertus domestiques que des amours mystérieuses. […] Rousseau, Bernardin de Saint-Pierre l’ont pu ; quelques poètes l’ont fait par un chant lyrique, par un hymne une fois exhalé.
Ces cailloux, qui prennent la parole, offrent de plus une sorte de personnification presque inconnue au poète de l’Ionie113. […] Dans les scènes dramatiques, lorsque les passions sont émues, et que tous les miracles doivent sortir de l’âme, l’intervention d’une divinité refroidit l’action, donne aux sentiments l’air de la fable, et décèle le mensonge du poète, où l’on ne pensait trouver que la vérité.
Albalat voit des intentions de poète, Bossuet n’avait que des intentions de théologien. » Il est très vrai que le souci d’exactitude théologique explique certaines ratures de Bossuet ; j’accorderais même, si l’on y tient, qu’aucune de mes citations n’est probante. […] De sorte que je pouvais presque me dispenser de citer des exemples : cette constatation eût suffi à me donner raison et à prouver que Bossuet corrigeait la plupart du temps, non en théologien, mais en écrivain et en poète.
Maintenant, je le sais, la poésie semble être exilée de la société : tôt ou tard elle rentrera dans son domaine, tôt ou tard nous redeviendrons attentifs aux sons échappés de la lyre des poètes. […] Laissez-vous entraîner aux digressions du poète, pour témoigner que vous vous êtes identifié avec les imaginations vives et mobiles des peuples de la Grèce.
… qu’un moment j’ai craint cette diablesse de femme d’esprit dont un poète a dit : Une femme d’esprit est un diable en intrigue. […] Ce qu’était Réa Delcroix avant de rencontrer l’homme qu’elle a éperdument aimé, nous ne le savons pas… mais certainement elle était quelqu’un par la tête, en attendant qu’elle fût plus que quelqu’un par le cœur… Et si, dans ses lettres embrasées du double feu de l’esprit et de l’amour, elle parle par hasard — comme elle y a parlé — de quelques poètes ou de quelques artistes contemporains avec une justesse qui est un éclair, allez !
Presque tous les écrivains d’un pays et d’un siècle, poètes, orateurs, philosophes même, sont entraînés et formés par ce qui les entoure. […] Tels, dans leur siècle et leur pays, ont été, parmi les historiens, Tacite ; parmi les moralistes, Montaigne ; parmi les philosophes, Bacon ; parmi les poètes, Corneille ; et, à la fin du règne de Louis XIV, ce Fontenelle, dont le genre d’esprit, qui n’était qu’à lui, a été si critiqué et si loué pendant quatre-vingts ans.
Poète, il eût choisi la rigueur concise du sonnet ; dramaturge, la pièce en un acte. […] Sainte-Beuve, dans une judicieuse étude des Premiers lundis, en a signalé quelques-uns : Amilcar, c’est le poète Sarazin. […] Tout naturellement, comme à nous autres écrivains, les beaux vers des poètes lui revenaient pour exprimer ses propres sentiments. […] Poète délicat, prosateur aigu, passionné de musique, passionné également de métaphysique, son rêve d’existence eût été de recréer la nature, en la repensant par le dedans. […] Il veut être poète.
C'est un vrai poëte qui se lève ; celui qui a fait ces cinq actes pourra bien des choses.
Le hasard du génie y pourvoira… Un bel âge littéraire complet, ou du moins une vraie gloire de poëte du premier ordre, serait un bonheur et un coup de fortune pour tous ceux de valeur qui l’auraient précédé.
— La fille du poëte Alexandre Soumet, madame d’Altenheim, vient de publier (il y a deux mois) un poëme de six mille vers, intitulé Berthe et Bertha.
Ce n’était pas la peine de se montrer si sévère tout à côté contre Anacréon et contre Horace, ainsi que le poëte n’a pas craint de le faire.