Il serait infiniment désirable que la masse du genre humain s’élevât à l’intelligence de la science ; mais il ne faut pas que la science s’abaisse pour se faire comprendre. […] En effet, du moment que la fortune devient le but principal de la vie humaine, ou du moins la condition nécessaire de toutes les autres ambitions, voyons quelle direction vont prendre les intelligences. […] Les facultés qu’il doit cultiver sont celles qui servent à la richesse, l’esprit industriel, l’intelligence pratique. […] La ploutocratie est donc peu favorable au légitime développement de l’intelligence. L’Angleterre, le pays de la richesse, est de tous les pays civilisés le plus nul pour le développement philosophique de l’intelligence.
Toute interprétation de l’image visuelle était exclue de l’acte de vision : l’intelligence était maintenue sur le plan des images visuelles. […] Une intelligence qui irait sans cesse du mot à l’idée serait constamment embarrassée et, pour ainsi dire, errante. […] On conçoit que cette indécision de l’intelligence se continue en une inquiétude du corps. […] C’est pourquoi nous avons cru pouvoir expliquer l’effort de l’intelligence sans sortir de l’intelligence même, par une certaine composition ou une certaine interférence des éléments intellectuels entre eux. […] TAINE, De l’intelligence, Paris, 1870, t.
Parfois, quand on est jeune, on se pique d’originalité et l’on prétend penser des choses qu’aucune intelligence humaine n’ait encore pensées. […] Elle entre dans la mémoire, non dans l’intelligence. […] Il ne vient pas d’infirmité d’intelligence, ni de paresse. […] Comment la fera-t-on vraiment passer dans son intelligence ? […] Ils ont si peu cherché, si constamment fui tout ce qui est singularité ou exception, que, dès le jeune âge, on peut les goûter sans idolâtrie, autrement que sur parole, par une claire intelligence de leur profonde vérité.
Des idées dans l’intelligence humaine. — Des idées dans l’intelligence divine. — Du vrai caractère de l’intelligence. — Réponse à quelques objections. — Passage de Dieu à l’univers. […] À quelle condition y a-t-il intelligence pour nous ? […] Transportez ceci de l’intelligence humaine à l’intelligence absolue, c’est-à-dire rapportez les idées, j’entends les idées au sens de Platon et de Leibnitz, à la seule intelligence à laquelle elles puissent essentiellement appartenir, vous avez, si je puis m’exprimer ainsi, la vie de l’intelligence divine, vous avez cette intelligence avec les éléments divers et harmonieux qui lui sont nécessaires pour être une vraie intelligence. […] L’intelligence divine elle-même. […] Ici surtout l’intelligence historique est en raison directe de l’intelligence scientifique.
Au plus bas degré, le cerveau peut lier des impressions indépendamment de l’intelligence, sinon indépendamment d’une sourde sensibilité et appétition diffuse. […] En second lieu, l’intelligence finit par prendre intérêt aux ressemblances et différences pour elles-mêmes, parce que le discernement des ressemblances et différences est sa loi propre, conséquemment sa tendance normale. Cette loi est pour l’intelligence la loi même de conservation et de progrès. […] Les idées de l’intelligence, les sentiments et surtout les appétitions entrent comme facteurs dans cet ensemble de « circonstances » qui dissolvent les associations primitives et en composent de nouvelles. […] L’intelligence n’est pas à part, reliant par une action exclusivement spirituelle des idées qui ne trouveraient pas en même temps une liaison mécanique et cérébrale.
Celle que nous avons citée nous paraît la plus française, la plus conforme à l’initiative, à la clarté, à l’intelligence qui sont caractéristiques de la race. […] Ainsi, l’aristocratie de l’intelligence sera sauvegardée et c’est la vraie tâche du critique et non pas d’enrichir les écrivains. […] Il avait donc le droit de s’inquiéter de l’avenir, de l’intelligence. Mais l’intelligence aujourd’hui n’est plus libre. […] Devenue le génie sauveur de la cité, l’intelligence se sera sauvée elle-même de l’abîme où descend notre art déconsidéré.
Tel est l’heureux privilège des principes théologiques, sans lesquels on doit assurer que notre intelligence ne pouvait jamais sortir de sa torpeur initiale, et qui seuls ont pu permettre, en dirigeant son activité spéculative, de préparer graduellement un meilleur régime logique. […] Mais tous les essais accomplis pendant les deux derniers siècles pour obtenir une explication universelle de la nature n’ont abouti qu’à discréditer radicalement une telle entreprise, désormais abandonnée aux intelligences mal cultivées. […] Néanmoins, il faut franchement reconnaître cette impossibilité directe de tout ramener à une seule loi positive comme une grave imperfection, suite inévitable de la condition humaine, qui nous force d’appliquer une très faible intelligence à un univers très compliqué. […] En faisant de plus en plus prévaloir la vie industrielle, la sociabilité moderne doit donc puissamment seconder la grande révolution mentale qui aujourd’hui élève définitivement notre intelligence du régime théologique au régime positif. […] Si l’idée de société semble encore une abstraction de notre intelligence, c’est surtout en vertu de l’ancien régime philosophique ; car, à vrai dire, c’est à l’idée d’individu qu’appartient un tel caractère, du moins chez notre espèce.
Victime d’une fausse conception de sa sensibilité, il l’est aussi d’une fausse conception de son intelligence. […] L’homme peut en effet tour à tour prendre le change sur la nature et le degré de sensibilité, de son intelligence ou de sa volonté. […] Mais le pouvoir créateur et la capacité de son intelligence ne se sont pas accrus dans les mêmes proportions qu’augmentait la masse des notions accumulées par tes ancêtres et recueillies par héritage et voici un équilibre rompu. […] L’intelligence humaine, la faculté de comprendre elle-même, devient le thème de la représentation et nous apparaît atteinte du même mal dont nous avons vu quelques esprits frappés. […] L’intelligence est dupe ici de ses procédés : elle prend pour une route tracée vers un but fixe auquel elle aboutirait, ce sens de la causalité qui n’est que le moyen de ses constructions.
L’idée de liberté implique nécessairement, outre l’élément d’activité, un élément d’intelligence ; elle implique une causalité d’ordre intellectuel ; là où cesse l’intelligence, c’est l’abîme, c’est la nuit, l’insondable et l’innommable, c’est x. […] Le rapport du sujet aux objets dans l’intelligence est une nouvelle explication de l’idée de liberté. […] La résolution finale sera donc déterminée en raison composée de toutes les causes internes et externes saisies par l’intelligence, plus les mobiles subconscients et inconscients. […] C’est donc abusivement qu’on oppose la liberté à l’intelligence, alors qu’elle est l’intelligence exerçant son action sous l’idée de sa propre causalité. […] On n’est pas libre par l’affranchissement des lois de l’intelligence, mais, tout au contraire, par leur entier accomplissement.
Estimer, apprécier un Démosthènes ou un Cicéron ne suffit pas au large développement de l’intelligence. […] Admirer en présence des orateurs et des poètes qui ont enveloppé Athènes de séduction et Rome de grandeur, c’est se donner tout entier à ces maîtres incomparables, leur livrer ses plus fraîches et ses plus naïves émotions et témoigner à ces pères de l’intelligence autant d’amour filial que de respectueuse fidélité. […] le premier degré où doit viser la connaissance humaine, un échelon tout au plus au-dessus duquel il faut gravir pour vous conformer à ces lois éternelles entrevues par Platon, fixées par une théodicée plus sublime, et qui sollicitent l’essor de notre intelligence vers un idéal qui n’est pas de ce monde. […] Fondez en vous-mêmes une foi inattaquable par la pratique quotidienne de l’admiration ; alors seulement vous entrerez dans le monde avec une intelligence accessible aux conceptions les plus hautes, avec un cœur incliné vers les plus pures émotions. […] Cette abnégation si favorable à l’intelligence, croyez-vous qu’elle soit stérile pour le cœur ?
L’exaltation de l’intelligence rationnelle est brandie contre les avant-gardes : même Rivière dans ses articles — et il faut se souvenir qu’en 1920, il est en dialogue dans La NRF avec Breton, avec Artaud sur cette question de la préséance de l’intelligence logique et de la raison— défend l’idée d’une union sacrée des militants de l’Intelligence. […] Mais qui mieux que Monsieur Teste pouvait incarner les prestiges de l’intelligence pure ? […] Adjudant de l’intelligence, ses attributions l’empêchent de voir large, d’aller à l’essentiel, mais parce qu’il est trop facile de s’absorber dans des détails, la lutte injuste entre elle et l’esprit ne cesse de se poursuivre. […] Valéry convoque des exemples empruntés à la culture gréco-latine pour peindre la longue domination de la civilisation européenne, désormais caduque, et la prééminence de l’intelligence. […] Breton dans la version abrégée de Littérature n°20, en août 1921, emploie, lui, le terme d’intelligence.
Ainsi sont liés, dans la pensée de l’homme, dans son intelligence, dans ses affections, le présent, le passé, le futur, le monde idéal et le monde positif, le fini et l’infini, le temps et l’éternité. […] Ainsi se concilient le système des idées innées et la doctrine qui ne permet à l’homme d’enrichir son intelligence, d’orner son esprit, de perfectionner son âme que par la voie des sens. […] Les bornes des sens de l’homme, pour voir l’univers ; de son intelligence, pour en connaître les lois ; de ses facultés, pour en juger l’ensemble : telles sont les limites de la parole, considérée comme expression de l’intelligence ou de la pensée. […] Elle est l’histoire de l’homme, le tableau de ses rapports avec Dieu, avec les intelligences supérieures, avec ses semblables, dans le passé, dans le présent, dans l’avenir, dans le temps et hors du temps. […] Positive, elle est plus utile à l’intelligence qu’à l’imagination ; élégante, elle reconnaît pour législateur le goût plus que le génie ; noble, mais dédaigneuse, si elle sait rendre l’expression des sentiments généreux et élevés, elle se refuse peut-être à la naïveté sublime.
Ces dispositions sensuelles de l’intelligence auront ailleurs pour effet, d’accroître énormément les facultés d’expression de la couleur et, par suite, de ne faire concevoir les objets que représentés se fondant en certaines formes verbales, en un certain style de peinture. […] Leur art, à l’exemple de la nature muette, s’adresse aux sens et à l’intelligence, pour provoquer par elle l’émotion que les artistes passionnés cherchent à produire directement, sachant que l’on s’émeut de voir un semblable ému. […] On dira : ces faits mentaux, déduits de faits esthétiques, émanent d’une intelligence inconnue, dont ils déterminent la nature ; il reste à préciser quelle doit être cette intelligence pour réaliser à la fois les lois de la psychologie générale et causer les manifestations particulières du cas étudié. […] Taine, Intelligence, IV, 3. […] Cette théorie discontinuiste et anti-métaphysique du Moi pluralisé, et non plus substantiel ni unitaire, a été, comme l’indique la note d’Émile Hennequin, surtout développée en France par Taine en 1870 avec De l’Intelligence.
Le séjour de Londres, de 1801 à 1803, durant lequel il fréquenta des hommes de pensée élevée et de civilisation, contribua sans doute aussi à agrandir ses vues et à mûrir son intelligence politique. […] Sa volonté dominait son intelligence et sa manière de sentir : « Pourquoi voulez-vous m’ôter mon calme ? […] Les intelligences qui s’élargissent passivement en tous sens et font de l’âme une surface glacée qui réfléchit habituellement chaque objet et chaque nuage, ces intelligences, belles peut-être comme miroirs, n’ont jamais le tranchant ni le fil du glaive. […] L’intelligence des grands hommes d’action est subordonnée à leur vouloir : dès qu’il y a urgence sur un point, elle s’y porte et y fond comme l’éclair : elle se garde d’ailleurs de distraire l’énergie par des perspectives de côté, réelles peut-être, mais intempestives. […] Son intelligence, sa sensibilité, étaient comme une algèbre exacte et pressante dont sa volonté souveraine dénombrait à l’avance les éléments.
Tourguénef en dit le moins possible ; il compte sur ce qu’ajouteront d’attentives intelligences aux brèves indications qu’il donne, et il a raison et le lecteur lui sait gré de tout ce qu’il lui laisse à préciser de tentant et de vague. […] Ici l’abondance de ses points de vue le perd ; la désarticulation que son intelligence a subie dans son commerce avec la dialectique allemande, a débilité toute la charpente de son être. […] Mais son intelligence lui démontre sans cesse la beauté du parti qu’il a pris. […] Si son intelligence lui dit les causes nécessaires de tout le mal, elle instruit sa sensibilité à n’en pas souffrir. […] Son intelligence savait qu’il y a un problème de l’existence, pénétrait même par ouï-dire les idées générales qui pouvaient aider à le résoudre.
On me dit : Vous paraissez craindre que si certains rapports précis et certains étaient trouvés entre l’intelligence et le cerveau, la doctrine spiritualiste fût par là compromise et l’existence de l’âme mise en péril. […] Oui, ces raisons subsisteraient encore dans toute leur force, lors même que la physiologie viendrait à bout d’établir avec précision et d’une manière infaillible certaines relations rigoureuses entre l’intelligence et le cerveau. […] Peut-on affirmer que l’on a démontré la dépendance absolue de l’âme à l’égard du corps tant qu’on n’a pas pu signaler avec rigueur et précision la circonstance décisive qui serait la cause directe et unique de l’intelligence ? […] Pour nous, il ne ressort pas des faits actuellement connus qu’il n’y a rien dans l’intelligence qui ne soit le résultat d’un certain mode du cerveau. […] On nous dit encore : Est-il bien vrai que la science n’ait rien établi jusqu’ici sur les rapports du cerveau et de l’intelligence ?
Ainsi nous ne pouvons pas éviter d’en venir à examiner ce grand problème de l’intelligence humaine, ou plutôt la nature de l’instrument qui nous a été donné pour la production et la manifestation des actes de notre intelligence. […] Dans le premier cas, l’invention du langage serait un résultat nécessaire de la forme même, si l’on peut parler ainsi, de notre intelligence : les langues seraient alors comme un ensemble de signes convenus, devenu graduellement plus ou moins complet, graduellement perfectionné, à mesure que de nouveaux besoins se seraient fait sentir. […] Il me reste donc à établir que notre intelligence, successivement affermie, a pu s’avancer vers un ordre de choses où elle a moins besoin d’un appui, mais que cet appui lui fut très nécessaire. […] Je dirais donc volontiers aux néophiles : « Ceux contre lesquels vous vous élevez avec tant de violence n’ont d’autre tort que celui d’être restés fidèles au code des idées anciennes, et ils n’y sont restés fidèles que parce que c’était dans la forme même de leur intelligence, dans la manière dont s’opère en eux le phénomène de la pensée. » Je dirais aux archéophiles : « Vous craignez de retomber dans le chaos, parce qu’il vous semble que le principe générateur des sociétés humaines cesse d’agir. […] Ceux-là sont venus à comprendre qu’il s’est opéré un grand changement dans l’intelligence humaine, et que ce changement a pénétré dans le sanctuaire même de la pensée.
Naturaliste avant tout, M. de Humboldt n’a pas l’intelligence de ce qui dépasse les limites ordinaires de la nature humaine, et Christophe Colomb les dépassait. […] Il va continuer et s’accroître si on ne s’en repent déjà, et si on ne lui préfère, avec l’intelligence de la haine, l’étouffement lâche du silence. […] Il s’agit, dans l’histoire de ce grand Colomb, bien moins de supériorité d’intelligence que de vertu et bien moins de génie que de sainteté. […] — une intelligence grêle, un esprit efflanqué qui a parfois de la grâce… pour un Yankee. […] Il a le respect des faits, et il en a l’intelligence.
Dans son Avenir de l’intelligence, M. […] Tant vaut l’Intelligence d’une société, tant vaut cette société. […] Il l’est, mais d’une intelligence qui n’a rien d’intellectuel. […] Derrière ce regard, il y a une intelligence, une sensibilité. […] Aucune intelligence n’a vraiment pensé cette formule extravagante.
Celle-ci est, selon nous, un élargissement, une sorte de résonance de la sensation dans notre conscience tout entière, surtout dans notre intelligence et dans notre volonté16. […] On le voit,, le beau est un agréable plus complexe et plus conscient, plus intellectuel et plus volontaire ; le sentiment du beau, c’est la jouissance immédiate d’une vie plus intense et plus harmonieuse, dont la volonté saisit immédiatement l’intensité et dont l’intelligence perçoit immédiatement l’harmonie. […] Donc, pas d’émotion esthétique en dehors d’un acte de l’intelligence par lequel on anthropomorphise plus ou moins les choses en faisant de ces choses des êtres animés, et les êtres animés en les concevant sur le type humain. […] Ce que nous y admirerons, ce ne sera pas une intelligence purement dépouillée et nue, mais une intelligence suivant une direction, se proposant un but, faisant effort pour y arriver, écartant les obstacles, une volonté enfin et, qui plus est, une volonté humaine, avec laquelle nous sympathisons, dont nous aimons la lutte, les efforts, le triomphe. […] Un exercice purement abstrait de l’intelligence, sans un éveil correspondant du désir et de toutes les forces de l’être, n’eût pu aussi bien faire oublier à Pascal un mal de dents.
Si on prend pour base la division de l’esprit généralement reçue en sensibilité, intelligence et volonté, on peut se demander si ce qui est gagné par l’une de ces grandes subdivisions n’est pas perdu par les deux autres ou l’une des deux autres. […] Une vie consacrée tout entière à la culture de l’intelligence doit être accompagnée d’un affaiblissement général des autres facultés, aussi bien que des fonctions purement physiques. […] Une grande intelligence universelle n’est pas souvent unie à une riche sensibilité naturelle. […] Il propose donc, comme base de l’étude des caractères, la triple division de l’esprit en volition, émotion, intelligence. […] On en peut citer comme exemples les races celtiques et, parmi les individus, Fox, Mirabeau, Alfieri, etc, 3° Un troisième type est celui où l’intelligence prédomine.
Mais nous ne les mettrons plus aux prises, et leur bonne intelligence sera peut-être le prélude d’une amitié solide entre Shakespeare, Aristophane et Molière. […] Il est dépendant, au contraire, et de la manière la plus complète, dépendant non de telle ou de telle notion particulière, mais de l’intelligence même d’Uranie, de son intelligence tout entière, avec sa richesse de connaissances et sa largeur de vues, mais aussi avec ses préjugés, son ignorance, sa faiblesse, son humanité enfin et ses sottises. […] Mais il y a des intelligences qui comprennent diversement la poésie, le comique, le beau : la dispute est donc nécessaire, et la dispute est interminable. […] Si leur intelligence est capable de s’agrandir et de se compléter, pourquoi Uranie ne contribuerait-elle pas à ce progrès par la richesse de sa conversation ? […] Votre intelligence est embarrassée de formules, de définitions et de théories.
Cette intelligence est faite pour aller à la vérité. […] Sens et Intelligence. […] L’acte propre de L’intelligence est l’idée. […] Notre volonté peut agir sur notre intelligence. […] De plus, nous avons une intelligence.
Rien n’échappait à sa curiosité d’intelligence ; et une fois qu’il avait conçu, rien ne sortait plus de sa mémoire. […] Si son caractère intimidé se déconcertait et faisait faute, son intelligence gardait son audace. […] Quoi qu’il en soit, en s’efforçant constamment de classer les faits de l’intelligence selon l’ordre naturel, M. […] Ampère, dans toute la force et le zèle de l’intelligence, eût usé un corps trop faible. […] Ainsi ce début qu’on trouve à un Plan d’une histoire de l’intelligence humaine : « L’homme, sous le point de vue intellectuel, a la faculté d’acquérir et celle de conserver.
Sa seconde pensée est de le concevoir, de l’imaginer et de le définir dans les termes les plus sublimes que la force de son désir et la faiblesse de son intelligence, comparées à l’infini, puissent prêter à l’homme pour se représenter son Créateur. […] « Poèmes épiques, continue le savant traducteur, systèmes de philosophes, théâtres, mathématiques, grammaire, droit, le génie indien a tenté toutes les grandes directions de l’intelligence. […] etc., etc. » On voit qu’en sens inverse du matérialisme moderne, qui fait naître l’intelligence des sensations brutales de la matière douée d’organes, le spiritualisme déjà raffiné des sages de l’Inde fait naître les phénomènes matériels de l’intelligence. […] J’admirai, j’adorai cette parenté universelle des êtres, cette fraternité de la vie entre tout ce qui respire, entre tout ce qui sent, entre tout ce qui aime ici-bas dans la mesure de son intelligence et de sa destinée. […] « On admire vos organes matériels, mais l’âme est bien plus admirable : l’âme est au-dessus de l’intelligence ; mais qui est au-dessus de l’âme ?
Mais dans cette nuit sombre dont est couverte à nos yeux l’antiquité la plus reculée, apparaît une lumière qui ne peut nous égarer ; je parle de cette vérité incontestable : le monde social est certainement l’ouvrage des hommes ; d’où il résulte que l’on en peut, que l’on en doit trouver les principes dans les modifications mêmes de l’intelligence humaine. […] Cette erreur est venue de l’infirmité de l’intelligence humaine : plongée et comme ensevelie dans le corps, elle est portée naturellement à percevoir les choses corporelles, et a besoin d’un grand travail, d’un grand effort pour se comprendre elle-même ; ainsi l’œil voit tous les objets extérieurs, et ne peut se voir lui-même que dans un miroir. […] Aucune nation n’a cru à l’existence d’un Dieu tout matériel, ni d’un Dieu tout intelligence sans liberté. Aussi les Épicuriens qui ne voient dans le monde que matière et hasard, les Stoïciens qui, semblables en ceci aux Spinosistes, reconnaissent pour Divinité une intelligence infinie animant une matière infinie et soumise au destin, ne pourront raisonner de législation ni de politique.
Le génie et la tâche de ce siècle sont de retrouver et de réunir les titres de famille de l’intelligence humaine. […] C’est alors seulement que l’idée de la beauté reparaît dans l’intelligence et l’idée du droit dans l’ordre politique. […] La poésie est trois fois générée : par l’intelligence, par la passion, par la rêverie. […] Ni ses yeux, ni ses oreilles, ni son intelligence, ne percevront jamais le monde divin du Beau. […] Si la nature obéit aux lois inviolables qui la régissent, l’intelligence a aussi les siennes qui l’ordonnent et la dirigent.
Mais là Aurier pécha moins par omission que par jeunesse, et s’il montra un talent moins sûr que son intelligence, c’est que toutes les facultés de l’âme n’atteignent pas à la même heure leur complet développement ; chez lui, l’intelligence avait fleuri la première et attiré à soi la meilleure partie de la sève. L’intelligence et le talent, voilà, je crois, une distinction qui n’a guère jamais été faite en critique littéraire ; elle est pourtant capitale… Aurier manqua de quelques années pour s’harmoniser définitivement… Presque rien de ce que nous connaissons de lui, en fait de vers, n’avait reçu la septième correction.
Elle a gagné des intelligences dignes de la vérité et qu’elle fausse. […] s’il y a une intelligence digne de présider aux plus nobles transactions entre les hommes, c’est celle de ce prince, aussi libéral envers le catholicisme que son prédécesseur l’était peu. […] Esprit étendu, cœur sincère, il pratiquait la justice comme il aimait la science, en vertu des plus naturels, des plus harmonieux instincts de l’intelligence et du caractère. […] Ni préoccupation d’historien séduit par les qualités très réelles d’Innocent, ni sophisme de parti pris, ni même intelligence plus profonde des nécessités de ce temps n’y feront rien. […] S’il avait été ce colosse d’intelligence que l’école ultramontaine veut qu’il soit, il n’eût pas fléchi sur un point qui aurait dû le trouver inflexible.
Renan est de cette race des hautes intelligences ; c’est une intelligence aristocratique, royale au sens de Platon, et même qui est restée un peu sacerdotale et sacrée de tour et d’intention jusque dans son entière émancipation philosophique. […] en lisant son article, je lui donnais raison presque à chaque phrase, et pourtant je résistais dans l’ensemble ; je ne suis certes qu’un demi-gaulois, mais ce demi-gaulois trouvait de quoi répondre, même à cette intelligence d’une élévation constante et qui sait y allier tant de sagacité et de finesse. […] Le mot Dieu est toujours pour lui le signe représentatif de toutes les belles et suprêmes idées que l’humanité conçoit, pour lesquelles elle s’exalte et qu’elle adore ; mais il semble que ce soit quelque chose de plus encore à ses yeux qu’une expression ; il semble prêter décidément à l’intelligence, à la justice indéfectible et sans bornes, une existence indéfinissable, inconnue, mais réelle. […] Renan, qui a le sentiment de toutes les époques a une intelligence très-profonde et très-vive du Moyen-Âge entre autres. […] Ces deux talents, ces deux intelligences diversement aristocratiques, d’une hauteur à l’autre, se sont saluées.
Non, Dieu lui-même ne peut rien connaître qu’en le sachant, avec son intelligence et avec la conscience de cette intelligence. […] La vérité est placée entre l’intelligence humaine et la suprême intelligence, comme une sorte de médiatrice. […] Il semble que l’intelligence ait aussi son organe intime, qui souffre ou jouit, selon l’état de l’intelligence. […] La volonté dirige aussi l’intelligence, bien qu’elle ne soit pas l’intelligence. […] Cependant la volonté peut beaucoup sur l’intelligence.
Son intelligence s’est élargie, sa science s’est accrue ; il a étudié, appris, compris beaucoup de choses et de beaucoup de façons ; mais il n’a plus osé ni pu ni voulu vouloir. Parmi les hommes qui se consacrent aux travaux de la pensée et dont les sciences morales et philosophiques sont le domaine, rien de plus difficile à rencontrer aujourd’hui qu’une volonté au sein d’une intelligence, une conviction, une foi. […] Elle l’abolit dans le sein même de l’intelligence qui se glace en s’éclaircissant, qui s’efface, s’étale au delà des justes bornes, et n’a plus ainsi de centre lumineux, de puissance fixe et rayonnante. […] de vastes et hautes intelligences se souiller : l’amour des places, de l’or, de la table, des sens, les saisit ou se prolonge en elles. […] Grands hommes à tant d’égards, ils ne sont plus des hommes dans le sens intime de l’antique sagesse ; ils ne nous offrent plus des intelligences servies par des organes, mais des intelligences qui mentent à des organes qui les trahissent.
Seulement nous avons dit strictement ce qu’il était nécessaire de dire pour l’intelligence de notre sujet. […] La nation initiatrice était devenue une maîtresse d’égarements philosophiques ; la reine des intelligences avait corrompu les intelligences. […] Tout se passe entre une intelligence que Dieu a créée capable de recevoir et de former les idées, surtout par la parole, et les intelligences qui la lui transmettent comme elles l’ont elles-mêmes reçue. […] Royer-Collard adoptait et motivait la belle variante que Leibnitz avait ajoutée au système de Locke, et qui renversait ce système : Non, tout ce qui est dans l’intelligence ne vient pas des sens, car l’intelligence n’en vient pas. […] Bédoch, c’était la prose de l’intelligence ; M.
Si l’on est le produit de son époque, — et cela n’est vrai que dans une certaine mesure, — l’on reçoit avec l’intelligence des virtualités de sentir et de mûrir qui ne permettent que relativement de s’identifier avec ce que, dans l’atmosphère ambiante, intellectuelle et morale, il y a de formes éparses constitutives. […] Et cela ne veut nullement dire qu’il n’ait été très loin du premier coup, puisque c’est à l’ampleur du saut qu’il doit d’avoir été remarqué, ni qu’observateur né, s’il en fut, et sachant tirer des choses tout ce qu’elles peuvent en apprendre à qui est spécialement conformé pour en condenser le sens, dans son esprit, en formules d’une généralisation savante, il n’ait révélé une intelligence extraordinairement précoce, et ouverte à un degré d’universalité, si tant est que, comme il arrive fatalement aux natures compliquées, cette intelligence est restée passive, en ce qu’elle a reçu et démêlé, sans que, par spécialisation de génie, elle ait réussi à créer par là-dessus. […] Mais nous ne l’avons pas, au contraire, appelé charmeur, exprimant ainsi cette impression ineffable de prédilection qu’ont éprouvée, pour tout ce qui est sorti de cette plume experte, ceux qui l’ont pu suivre, sans songer à ce que ses sujets offrent de vitalité intense, au souci qu’ils accusent du cas compliqué et à l’intelligence qu’ils révèlent de la difficulté sentimentale. […] Que nulle gloire n’en soit néanmoins revenue aux passionnés militants d’intelligence, ce serait évidemment trop prétendre. […] France est né pédagogue, ou du moins avec le goût de la profession, et dès lors aussi avec son intelligence.
L’intelligence et la nutrition sont-elles soumises à une seule et même puissance ? […] L’intelligence même ne pense, ne sent, n’aime, ne se souvient, qu’en compagnie du corps. […] Elle la lui donne par quatre facultés diverses : la nutrition, la sensibilité, l’intelligence, la locomotion. […] Enfin, l’intelligence implique toutes les facultés inférieures. […] Mais c’est bien mal comprendre la loi qui préside au développement de l’intelligence humaine.
Barrès a certainement dégrossi bien des intelligences. […] Ensuite, il en est des intelligences personnelles comme de ces intelligences collectives qu’on appelle des civilisations : après un long labeur vers la complexité, elles se couchent dans la sérénité de la paix conquise. […] L’intelligence n’est libre que dans les limites des lois dynamiques. […] Il sait pourquoi l’orgueil engendre les ténèbres : l’orgueil est un écran entre l’intelligence humaine et l’intelligence divine ; l’orgueil se contemple lui-même et se contemple seul, car il se croit seul. […] Il accepte l’absurde avec ostentation ; il déprécie son intelligence avec fierté.
C’est que l’« esprit », je le répète, est parfois le contraire de l’intelligence. […] L’opération devrait être tentée par l’intelligence, l’intelligence pure et simple. Une intelligence toute-puissante, celle d’un homme ou d’un comité, peu importe : mais elle exigerait une sorte de dictature de l’intelligence. […] Elle nécessiterait de l’intelligence et de l’énergie plutôt que de la poudre et des hurlements. […] Il n’a pas assez d’intelligence ni de volonté pour cela.
. — Incapables de se créer par l’intelligence des formes abstraites, ils en imaginèrent de corporelles, et les supposèrent animées d’après leur propre nature. […] Lorsque vinrent les âges de civilisation avec les gouvernements populaires, l’intelligence s’éveilla dans ces grandes assemblées112. […] L’intelligence consiste ici à comprendre l’intention que le législateur a exprimée dans la loi, intention que désigne le mot jus. […] Premièrement les droits étant éternels dans l’intelligence, autrement dit dans leur idéal, et les hommes existant dans le temps, les droits ne peuvent venir aux hommes que de Dieu. […] Concluons : l’homme n’étant proprement qu’intelligence, corps et langage, et le langage étant comme l’intermédiaire des deux substances qui constituent sa nature, le certain en matière de justice fut déterminé par des actes du corps dans les temps qui précédèrent l’invention du langage articulé.
Jeunes gens et jeunes filles ne peuvent expliquer les mots les plus usuels : la lecture d’une page de français leur laisse une vague et indécise idée dans l’esprit, et s’ils n’en gardent pas un souvenir précis, s’ils ne peuvent à l’instant même la résumer en substance, c’est moins faiblesse de réflexion, légèreté d’attention, gaucherie d’intelligence, l’ignorance du sens des mots qu’ils ont lus. […] Enfermée dans un cercle étroit de mots, l’intelligence est à la gêne, ne peut pas développer ses pensées, et se trouve réduite à de vagues appréhensions, d’indécises tendances, qui ne se précisent pas faute de mots, et qui s’accrochent au hasard aux premières formules que la mémoire fournit. […] Et il faut diriger les études de telle sorte que le vocabulaire dont on disposera le jour où l’on aura besoin d’exprimer sa pensée soit aussi ample, aussi riche que possible : l’intelligence même y trouvera son compte. […] Il faut posséder assez bien sa langue, avoir dans le cerveau un dictionnaire assez complet, pour que l’intelligence puisse concevoir toutes les idées et profiter de l’expérience des siècles, accumulée et déposée dans les mots, sans être obligée de refaire pour son compte l’œuvre des sociétés primitives, où chaque pensée, lentement, péniblement conçue, aboutissait à créer son expression.
L’intelligence de l’homme, pour nous restreindre, l’intelligence du savant n’est-elle pas susceptible d’une infinie variété ? […] Cette harmonie que l’intelligence humaine croit découvrir dans la nature, existe-t-elle en dehors de cette intelligence ?
Le Romantisme, qui n’eut jamais de gens d’esprit à son service (il n’eut que des gens de talent), le Réalisme, qui n’a ni les uns ni les autres, le Réalisme qui est le Romantisme du ruisseau lorsque le ruisseau n’est pas pur, sont deux faits d’ordre littéraire également mortels à plus d’une faculté de l’intelligence, et qui doivent, dans un temps donné, ruiner l’intelligence tout entière. Mais que nous le disions, nous, ici, que nous disions tristement, car c’est une chose fort triste, que l’intelligence de tout un pays est en danger de s’atrophier sous les sensations dont on l’enivre depuis trente années, et que déjà ce qu’il y avait dans cette intelligence de plus charmant, de plus fin et de plus sonore, — l’esprit, ce chant et ce coup de bec du colibri !
C’est ce qu’oublient également les idéalistes, préoccupés des formes préétablies dans l’intelligence, et que l’intelligence, selon eux, imposerait ensuite à la nature. […] Nous rattachons ainsi la première loi de l’intelligence à la nature radicale de la volonté, ou plutôt à son action radicale et à son développement spontané. […] Par une analyse et une critique approfondies des lois ou conditions de l’intelligence, on en devait venir à se poser ce problème : tout le réel est-il vraiment intelligible ? […] Mais comme ce fond, ainsi conçu, échappe par définition même à notre intelligence, nous n’avons pas besoin de nous en occuper au point de vue intellectuel. […] De plus, répétons que la raison suffisante n’est pas seulement une loi d’expérience, mais une loi de l’expérience, c’est-à-dire une loi de l’intelligence ou, plus profondément encore, de la volonté.
Cessant graduellement d’être comme le voyant, le miroir, l’intelligence de toutes les formes de l’âme humaine, se réduisant à n’en concevoir qu’une, la sienne propre, comme exemplaire, manifestant ce prosélytisme par des indications, des insistances, des exclusions arbitraires, puis par des opinions expresses. […] La contrainte de connaître et l’impuissance d’aimer ce qui leur répugne, le désir graduel et l’incapacité de supprimer ces causes d’aversion ou d’en dériver l’esprit, cette alternative de se soumettre, de se renier ou de souffrir sans recours, conduit chez des esprits de cette sorte à une âpre lutte des deux ordres de facultés inversement froissées ; chez Tolstoï, le sentiment triompha de l’intelligence. […] De ce désaccord intime entre les penchants de l’écrivain et le spectacle que son intelligence était forcée à contempler, sans pouvoir l’aimer ou le comprendre, ce fut un sentiment de tristesse, de répulsion, de détachement, de volontaire irréflexion qui résulta. […] Tolstoï ne pouvait hausser son intelligence à la joie ou à l’illusion des explications métaphysiques. […] Encore une fois, et pour un des grands hommes de ce temps, la sensibilité, cette forme primaire de la relation entre les choses et nous, l’avait emporté sur la forme seconde de la connaissance, l’intelligence, et en avait suspendu l’exercice.
C’est en exerçant notre goût que nous développons notre intelligence. […] C’est le lit de Procuste appliqué à l’intelligence. […] Sans doute, il est des beautés si universelles, si éternelles, que toutes les intelligences peuvent les comprendre et les admirer. […] Par malheur, cette intelligence n’est pas toujours juste, cette volonté n’est pas toujours ferme. […] La lecture à haute voix, qui n’a pour se guider que l’intelligence du lecteur, offre donc encore plus de difficultés.
Le mouvement et le courant de son esprit empêchèrent l’ennui de germer dans les eaux vives de l’intelligence française. […] C’est ce que l’on voit clairement dans la conduite des choses humaines : le niveau de l’intelligence s’y abaisse en proportion exacte du nombre des délibérants. […] S’il fallait tout dire, je croirais plutôt que les académies nuisent à la formation de ces phénomènes toujours isolés d’intelligence qui deviennent les lustres des peuples sur la nuit des temps. […] L’abandon dans lequel la nation laisse les ouvriers de son intelligence et de sa gloire est un opprobre pour le pays des lettres. […] Diderot, Helvétius et leurs amis infectèrent d’athéisme, déraison suprême, le livre par lequel la raison humaine devait élever par tous les degrés son temple à la souveraine intelligence.
Intelligence cosmopolite. […] Les Suisses, en contact avec la France, avec l’Italie, avec l’Allemagne, qui les conduit à l’Angleterre, semblent avoir des facilités et des aptitudes particulières pour comprendre les formes d’esprit de ces quatre nations : ils ont l’intelligence naturellement cosmopolite. […] Sa souple intelligence est comme paralysée par ses sympathies et ses ambitions : elle qui comprenait si bien et si vite tous les peuples, elle ne comprend pas la France révolutionnaire. […] Avec sa lucide intelligence, elle parle des Anglais et des Allemands comme personne encore n’en avait parlé chez nous ; elle laisse à leurs œuvres la coupe et l’aspect étrangers. […] Elle entend, elle aime surtout ce qui est complexe, ce qui alimente la pensée, exerce l’intelligence en émouvant l’âme : le sentiment imprégné de philosophie.
Nouvel exemple du rôle joué par la sensibilité dans le développement de l’intelligence. […] Nous assistons alors à l’apparition de l’intelligence proprement dite, qui semble coïncider d’une manière générale, pour le physiologiste, avec la formation des fibres nerveuses. […] En somme, c’est toujours l’émotion résultant de l’appétit qui est le premier ressort, le primum movens ; l’intelligence en est le substitut progressif et l’abréviation. […] Quant à l’habitude et à l’instinct, ils sont un automatisme façonné peu à peu par la sensibilité même, par l’intelligence, par la volonté, pour les suppléer et accomplir sans effort ou faire accomplir par d’autres le même travail qui avait exigé un effort propre. […] Étant donnés les éléments d’un problème, l’intelligence le résoudrait avec autant de précision que les cellules contenues dans l’intérieur d’un œuf en mettent à se réunir pour former les diverses parties de l’animal, « opération bien autrement compliquée que le plus difficile de tous les problèmes que l’intelligence peut résoudre »87.
Ce qu’il y a de positif, et en même temps d’utilitaire, dans l’intelligence de M. […] Intelligence, information, verve, rien ne lui manquait pour réussir dans cette campagne. […] Rare succès de l’intelligence et que vient achever un art supérieur. […] Maurice Barrès a analysé cette âme de nihiliste avec une fraternelle intelligence. […] La mort de l’intelligence est à la fin de ces excitations.
Nous ne croyons que ce qui se prouve, nous ne sentons que ce qui se touche ; la poésie est morte avec le spiritualisme dont elle était née ; et ils disaient vrai ; elle était morte dans leurs âmes, morte dans leurs intelligences, morte en eux et autour d’eux. […] — Deux grands génies, que la tyrannie surveillait d’un œil inquiet, protestaient seuls contre cet arrêt de mort de l’âme, de l’intelligence et de la poésie, Mme de Staël et M. de Châteaubriand. […] Il remuait toutes les fibres généreuses de la poitrine, il ennoblissait la pensée, il ressuscitait l’âme ; c’était assez pour tourmenter le sommeil des geôliers de notre intelligence. […] La presse commence à pressentir cette œuvre, œuvre immense et puissante qui, en portant sans cesse à tous la pensée de tous, abaissera les montagnes, élèvera les vallées, nivellera les inégalités des intelligences, et ne laissera bientôt plus d’autre puissance sur la terre que celle de la raison universelle qui aura multiplié sa force par la force de tous. […] Je ne pense pas qu’aucun poète romain ait reçu plus de marques de sympathie, plus de signes d’intelligence et d’amitié de la jeunesse de son temps que je n’en ai reçu moi-même ; moi si incomplet, si inégal, si peu digne de ce nom de poète ; ce sont des espérances et non des réalités que l’on a saluées et caressées en moi.
En exerçant son intelligence sur un plus petit nombre d’objets, il est arrivé à les connaître plus profondément. […] L’oisiveté agit sur son intelligence comme le dérèglement sur son cœur. […] Notre intelligence est ainsi faite, nous ne comprenons pas la variété sans la précision. […] Or, cette condition si impérieuse semble avoir échappé à l’intelligence de M. de Lamartine. […] Son intelligence n’est plus qu’un chaos ténébreux, où s’agitent pêle-mêle des mots dont il a oublié la valeur.
Flourens est d’autant moins fondée de sa part que lui-même admet certaines localisations ; il distingue l’organe de l’intelligence ou le cerveau de l’organe de la sensibilité, qui est la moelle épinière, de l’organe coordinateur des mouvements, qui est le cervelet. Que ces localisations soient plus ou moins générales, cela importe peu ; toujours est-il que l’âme manifeste son activité par plusieurs organes différents, car on ne peut nier que la sensibilité et la coordination des mouvements n’appartiennent à l’âme aussi bien que l’Intelligence. […] D’ailleurs la localisation de l’intelligence dans les lobes antérieurs soulève de graves objections. […] Flourens, et il y trouve la preuve physiologique de l’unité de l’intelligence. […] De plus, il admet dans le cerveau des départements distincts, non pour l’Intelligence, mais pour les sensations, les nerfs olfactifs, gustatifs, optiques aboutissant à des parties différentes du cerveau.
Gerdil4 et Malebranche sur la voie du platonisme en ce qui concerne la nature de l’intelligence. […] Il amende lui-même ses premières formules : « Notre intelligence, dit-il, tant que le mot propre ne fixe pas l’objet avec précision, n’a que des aperçus vagues, confus, incomplets, de ses propres pensées. […] Fournié : Le langage est nécessaire pour que l’activité de l’intelligence soit aisée, régulière et progressive ; à cela se réduit, à notre sens, la part de vérité contenue dans les thèses nominalistes et condillaciennes. […] Les sens et l’intelligence (trad. […] Dans la première partie de L’intelligence [Hippolyte Taine (1828-1893), De L’Intelligence, Paris, Hachette, 1870.], livres I et II, la parole intérieure est toujours confondue avec les autres images ; son importance toute spéciale est méconnue.
Mais Chamfort, volé de l’idée sociale à son berceau, Chamfort, dont l’orgueil ignorait qu’il était un avorton aux yeux des hommes, le fut aussi jusque dans son intelligence. […] Fait, comme tout homme qui vient en ce monde, de mémoire, d’intelligence et de volonté, le bâtard, si loin qu’il recule en lui, trouve dans sa mémoire l’événement qui lui a retranché toute légitimité naturelle et sociale ; car le séducteur dont il est sorti n’est pas père. […] Qui sait exactement la distance entre la volonté et l’intelligence, entre la théorie et l’action ; avec quelle violence la volonté entre en exercice pour abolir un état de choses qui la révolte ; avec quelle fureur elle allume le foyer des sociétés secrètes, des commandites saint-simoniennes, de toutes les prétendances en haut et en bas ? […] V Vignette fatale dans la mémoire, coup de sifflet dans l’intelligence, corruption dans la volonté fourvoyée, le bâtard est la parabole de la chute, la contrefaçon du dogme qu’il repousse, et un argument vivant, dans sa propre existence, contre sa propre incrédulité ! […] La plupart des lettres que nous avons reçues devaient donc surtout attester, dans cette dépravation de toute intelligence, cet orgueil qui se vante quand il n’y a pas de quoi, l’orgueil à l’envers de la fierté vraie !
Il arpente son terrain d’un pied sûr et le fouille avec intelligence. […] Mais on ne sent pas quand on le lit ce que nous recherchons, même en histoire : le voisinage d’une âme qui chauffe la nôtre, ou bien cette âpre froideur de l’intelligence qui finit, comme la neige, par brûler autant que le feu, et que possèdent seuls les grands historiens, les grands observateurs de la nature humaine dont la pensée est toutes les passions. […] Comme l’histoire ne s’improvise pas et qu’elle appartient à tout le monde, autant que l’eau et la lumière, l’honneur de l’historien est de puiser à des sources pures, et son mérite, de se servir, avec intelligence, de tout ce qu’il y a puisé. […] Alors on sent profondément ce que sont les Mémoires, même les plus passionnés, même les plus suspects, pour la complète intelligence de la réalité historique, et on conçoit nettement tout ce qui manquerait si on ne les avait pas. […] Nulle appréciation plus profonde n’en jaillit pour l’intelligence et ne l’arrache au joug doux et léger des jugements superficiels.
Ce sens ne me nuit point par son illusion ; Mon âme en toute occasion Développe le vrai caché sous l’apparence ; Je ne suis point d’intelligence Avecque mes regards peut-être un peu trop prompts, Ni mon oreille, lente à m’apporter les sons. […] A cette conclusion qu’il y a des intelligences supérieures à nous, et que, de ces intelligences sublimes à l’animal le plus bas dans l’échelle de l’animalité, il y a une hiérarchie, il y a une gradation, il y a une échelle. Tout en haut, il y a des intelligences qui nous dépassent même infiniment ; ici, où nous sommes, il y a nos intelligences ; un peu plus bas, il y a des intelligences rudimentaires qui sont celles des hommes qui n’ont pas de culture et qui ne sont pas capables d’en recevoir ; il y a l’intelligence du sauvage, il y a l’intelligence du primitif ; plus bas, il y a l’intelligence des animaux supérieurs ; plus bas encore, il y a les intelligences des animaux placés tout à fait au dernier degré de l’animalité. […] Il y a là cependant, chez cet homme qui était un homme d’esprit, ironique, sarcastique, il y a là une petite merveille d’intelligence poétique, et Dieu sait si je voudrais que tous nos écrivains célèbres eussent tous, pour commentateur, un homme comme Chamfort.
Le péché n’est ni une faiblesse de l’intelligence, ni un instinct de la chair, mais un mal de la volonté. […] Et l’effort d’intelligence chez Fromentin marche de pair avec l’effort du jugement. […] Le roman la saisit au moment où elle est close, où elle appartient à un passé étendu en tableau pour une intelligence. […] Et puis l’intelligence n’est qu’une moitié de la critique. […] Bergeret, comme les hommes de l’intelligence, il se contenterait d’être éternel.
Il confirme de visu son intuition première, qu’il n’y avait là, dans ce lieu de prétendus miracles, qu’amour du lucre et que charlatanisme ; sans que cette confirmation puisse étouffer en lui le désir, qu’il ne peut arracher de son être, de « tuer le vieil homme en lui », de s’anéantir « avec sa volonté et son intelligence », de ne plus rester « ainsi tout seul, dans le désert glacé de son intelligence, à regretter l’illusion, le mensonge, le divin amour des simples d’esprits, dont son cœur n’était plus capable. » Mais le courant qui mène de la foi à l’incroyance ne peut être remonté, si amers que soient ses flots. […] L’expérience suprême était faite, un monde en lui avait croulé » Et il s’empresse « de quitter cette ville de désastre, où il devait laisser, le dernier lambeau de sa foi » n’ayant sauvé du naufrage que sa douloureuse intelligence. […] Le soin de son ministère, pas plus que « tous les exercices de piété qui enserrent le prêtre comme dans un réseau où son intelligence, sa volonté, toute son âme est prise », ne peuvent étouffer les voix impérieuses de sa conscience. […] Ni l’intelligence ni l’instinct ne vivent plus en lui d’une vie assez accusée pour qu’on ait dans l’ordinaire à en redouter quelque éclat. […] Atrophié dès le début par le séminaire, obscurci à l’âge viril par la chasteté, tenu perpétuellement en laisse par l’Église, malade de corps, de cœur et d’intelligence, le prêtre nous apparaît donc, parmi l’espèce humaine, l’être le moins apte à remplir le rôle qui lui est destiné, celui d’apôtre, d’éclaireur et de guide.
Les grandes actions ont leur répercussion jusque dans les intelligences ; et quoi d’étonnant à ce que des événements qui ont bouleversé les destinées nationales modifient également la sensibilité des particuliers ? […] Ainsi nous avons acquis intuitivement l’intelligence des Races et de la Cité. […] Il ne faut pas que les idées restent ensevelies dans les gris traités des théoriciens, vivifions-les d’un souffle créateur et lyrique, et que, guidées par les poètes, au son des lyres, elles s’avancent vers les intelligences, qu’elles y pénètrent par la puissance du Verbe ! […] Un changement dans le langage ne peut avoir lieu sans une révolution préalable dans les mœurs, les intelligences et la sensibilité.
Leuret et Gratiolet, intitulé : Anatomie comparée du système nerveux chez les animaux et chez l’homme dans ses rapports avec le développement de l’intelligence. […] Quoi qu’il en soit, allons au fait, et cherchons à résumer, je ne dirai pas notre science, mais notre ignorance sur le siège et les conditions organiques de l’intelligence humaine. […] Flourens a publié sous forme populaire plusieurs ouvrages qui se rapportent à notre sujet : De la vie et de l’intelligence, De l’instinct et de l’intelligence des animaux, De la phrénologie et études vraies sur le cerveau.
Les difficultés que présente la satire lyrique s’effacent devant une intelligence où se trouvent réunies l’imagination et la sagacité. […] Hormis l’Intelligence divine, nulle intelligence ne peut savoir et enseigner qu’à la condition d’ignorer et de taire les vérités qui n’appartiennent pas directement au sujet de l’étude et de la leçon. […] Scribe doit à l’intelligence parfaite de cette vérité la meilleure partie de ses succès, et nous devons avouer qu’il a usé largement de la recette. […] Leur amitié repose sur un mutuel respect, c’est-à-dire sur la mutuelle intelligence des services qu’ils ont reçus et rendus. […] C’est pour avoir annoncé sa venue qu’ils méritent d’être nommés dans les annales de l’intelligence humaine.
Ils se réduisent à l’intelligence, comme si l’homme n’était que cela ; ils appellent conscience le sentiment que le principe intelligent a de lui-même, comme si c’était là tout le sentiment dans l’homme ; les phénomènes qui se passent hors de la portée de la conscience ainsi définie sont déclarés extérieurs au moi véritable, étrangers à l’homme réel. […] Or notre vie est une, nous le sentons ; qu’elle nous soit révélée par l’intelligence ou par la force, par la pensée ou par l’acte ; qu’elle se rencontre dans la fonction ou dans l’organe, sous l’aspect de l’esprit ou sous celui de la matière, elle est toujours une, comme le sentiment que nous en avons. […] Nous, nous disons : Il n’y a qu’une cause que nous connaissons directement, c’est celle que nous sentons penser et agir, comprendre et pouvoir en nous, sentir, aimer, vivre en un mot ; vivre de la vie complète, profonde et intime, non-seulement de la vie nette et claire de la conscience réfléchie et de l’acte voulu, mais de la vie multiple et convergente qui nous afflue de tous les points de notre être ; que nous sentons parfois de la sensation la plus irrécusable, couler dans notre sang, frissonner dans notre moelle, frémir dans notre chair, se dresser dans nos cheveux, gémir en nos entrailles, sourdre et murmurer au sein des tissus ; de la vie une, insécable, qui dans sa réalité physiologique embrasse en nous depuis le mouvement le plus obscur jusqu’à la volonté la mieux déclarée, qui tient tout l’homme et l’étreint, fonctions et organes, dans le réseau d’une irradiation sympathique ; qui, dans les organes les plus élémentaires et les plus simples, ne peut se concevoir sans esprit, pas plus que, dans les fonctions les plus hautes et les plus perfectionnées, elle ne peut se concevoir sans matière ; de la vie qui ne conçoit et ne connaît qu’elle, mais qui ne se contient pas en elle et qui aspire sans cesse, et par la connaissance et par l’action, par l’amour en un mot ou le désir, à se lier à la vie du non-moi, à la vie de l’humanité et de la nature, et en définitive, à la vie universelle, à Dieu, dont elle se sent faire partie ; car à ce point de vue elle ne conçoit Dieu que comme elle-même élevée aux proportions de l’infini ; elle ne se sent elle-même que comme Dieu fini et localisé en l’homme, et elle tend perpétuellement sous le triple aspect de l’intelligence, de l’activité et de l’amour, à s’éclairer, à produire, à grandir en Dieu par un côté ou par un autre, et à monter du fini à l’infini dans un progrès infatigable et éternel. […] Ils lui accordent bien d’entrer en rapport avec le non-moi par la pensée et l’intelligence ; d’en connaître et d’en réfléchir les lois, d’en posséder la science, quoique encore cela soit impossible, sans que l’activité matérielle s’en môle à un certain degré ; mais dès que le moi désire modifier activement, transformer, embellir ce monde extérieur, ils l’arrêtent, ils l’avertissent comme s’ils n’en avaient que fort précairement le droit et le pouvoir ; de même en effet qu’ils nient la continuité entre le moi et la vie dite de nutrition, de même aussi ils nient la continuité essentielle du moi avec la vie dite de relation ; entre la pensée et l’acte, entre la volonté et l’acte, il y a pour eux un abîme, de même qu’il y en avait un entre la sensation et la pensée. […] Ainsi seulement tout s’explique ; ainsi l’activité matérielle devient sainte au même titre que la pensée, et comme participant au même Dieu sous un aspect différent ; ainsi l’accord règne entre le monde et nous, et dans notre propre individu entre notre intelligence et notre puissance.
Nous allons retrouver à propos de ces questions les deux tendances opposées que nous avons déjà rencontrées en étudiant l’intelligence. […] Ou a déjà vu que la culture intellectuelle est impuissante à uniformiser les intelligences. […] Les intellectualistes conçoivent tout autrement que les physiologistes la nature de la sensibilité et son rapport à l’intelligence. Ils regardent la sensibilité comme une forme inférieure de l’intelligence : comme une raison confuse et enveloppée (Leibnitz, Herbert). […] Ils oublient encore que la sensibilité déborde les limites de l’intelligence ; qu’il y a une logique des sentiments indépendante de la logique du raisonnement et combien plus puissante !
Un ébranlement dans les intelligences prépare un bouleversement dans les faits ; c’est le dix-huitième siècle. […] Ce mot, romantisme, a, comme tous les mots de combat, l’avantage de résumer vivement un groupe d’idées ; il va vite, ce qui plaît dans la mêlée ; mais il a, selon nous, par sa signification militante, l’inconvénient de paraître borner le mouvement qu’il représente à un fait de guerre ; or ce mouvement est un fait d’intelligence, un fait de civilisation, un fait d’âme ; et c’est pourquoi celui qui écrit ces lignes n’a jamais employé les mots romantisme ou romantique. […] Ils ont tous sucé cette grande mamelle ; ils ont tous de ce lait dans les entrailles, de cette moelle dans les os, de cette sève dans la volonté, de cette révolte dans la raison, de cette flamme dans l’intelligence. […] Le libre esprit qui s’envole, oiseau appelé par l’aurore, est désagréable aux intelligences saturées d’ignorance et aux fœtus conservés dans l’esprit-de-vin. […] Ouvrons les intelligences toutes grandes.
Les lois, qui furent traditionnelles avant d’être écrites ; les préceptes religieux ou moraux, les connaissances primitives, sources des traditions ; les formes de l’intelligence humaine, l’intuition des vérités nécessaires, la faculté de pénétrer l’essence des êtres et des choses, pour imposer les noms, l’insufflation divine pour imprimer mouvement à la sensation et à la pensée : c’est dans tout cela que j’avais cherché les éléments de la parole ; c’est cet ensemble que j’avais signalé comme étant la révélation du langage. […] Mon ancien contradicteur, esprit très distingué, croyait que la lacune dans l’investigation de tant de faits importants consistait en ce que les langues avaient été considérées comme peintures, comme expressions de nos idées et de nos rapports perçus ; et qu’elles n’avaient point été considérées comme résultats, pour remonter de là aux puissances de l’intelligence. […] Par tout ce qui a été dit plus haut, il est facile de comprendre que l’infini, ou le spontané, ou l’intuition, ou la forme primitive de l’intelligence humaine, ou la parole, sont ce que j’appelais la révélation. […] « Tant que l’on conserve, comme cela a lieu dans les langues primitives, la double intelligence du sens physique et de son analogie avec le sens intellectuel, les mots restent des peintures à double fonction ; les langues sont figurées et poétiques. […] comme si l’intelligence humaine n’était pas tout d’une pièce !
Hormis ces deux intelligences, qui auraient pu laisser un système, vous avez des métaphysiciens d’aptitude, vous n’en avez pas de forte puissance. […] Il devait sortir des mortes données de l’abstraction pour entrer dans la vie, et il y est entré dans ce traité de la Connaissance de Dieu, où se cachent sous les plus éclatantes questions d’une théodicée, les arêtes d’une méthode profonde ; il y est entré en observateur qui ne scinde pas l’homme et son esprit pour mieux le connaître, qui ne le mutile pas pour l’étudier : « Je ne puis m’empêcher d’affirmer — dit-il à la page 122 de son second volume : — que l’idée d’être bien déployée, si l’on sait mettre de côté l’habitude que nous avons de tout restreindre, de tout abstraire, de placer, même dans l’être, la négation, qui n’est faite que pour le néant, et de n’oser jamais pleinement soutenir l’universelle affirmation, l’idée d’être est identique à celle de force, d’intelligence, de volonté, de liberté, d’amour. […] Il n’en restera pas moins acquis comme un enseignement qui vient à temps, que cette faiseuse de découvertes, la métaphysique du xixe siècle, représentée par une intelligence très digne d’elle, est arrivée à confesser tout simplement au nom de la science ce que la philosophie moderne regardait de fort haut, c’est-à-dire la vieille induction tirée des facultés de l’homme aux attributs de Dieu, et le grand raisonnement, mêlé de raison et de foi, des causes finales. […] Cette méthode tient toute, il est vrai, dans le vieux procédé de l’induction, le vis-à-vis du syllogisme dans le raisonnement, et ceci menace d’être fâcheux pour les novateurs, qui s’imaginent que l’esprit humain doit procéder comme un joujou à surprise ; mais pour nous, qui savons quelle mince chose c’est, au regard de Dieu, que l’invention permise aux hommes, nous ne nous étonnerons pas de la reprise en sous-œuvre d’un procédé qu’une intelligence véritablement philosophique a su presque métamorphoser, en le grandissant… L’induction, telle que l’entend l’abbé Gratry, n’est plus le simple procédé de la raison décrit dans tous les livres de psychologie par les anatomistes de la pensée, c’est, sous sa plume, une méthode souveraine et d’un emploi sûr, dont on n’a pas jusqu’ici soupçonné la force parce que la rapidité foudroyante de ce procédé naturel a empêché de l’observer et de le fixer par l’analyse. […] Une chose qui nous paraît, du reste, encore plus considérable et plus nouvelle que la méthode inductive elle-même, que ce passage du fini à l’infini dont l’abbé Gratry décrit le mouvement dans l’intelligence avec une si rare précision, c’est la disposition morale de la volonté exigée pour que le mouvement de l’esprit s’opère aisément et s’accomplisse : « Le mouvement intellectuel vers l’infini, c’est-à-dire vers Dieu, est toujours vrai, — a dit l’auteur de la Connaissance de Dieu ; — il est toujours possible, dès que l’homme est doué de raison ; mais il ne s’exécute pas dans l’âme sans un mouvement de cœur correspondant. » Et c’est ainsi que l’abîme entre l’homme moral et l’homme intellectuel est comblé, cet abîme que n’avait pas franchi l’audacieuse pensée de Kant !
Au point de vue de l’intelligence, le discernement peut être implicite, quand un terme seulement est présent à l’esprit, sans comparaison avec un autre. […] Nous trouvons que la douleur est une véritable explication et de la volonté d’écarter la douleur et de l’aide apportée à la volonté par l’intelligence. […] Intellectuellement, objet ne se comprend que par le sujet, et le sujet ne se saisit que dans son rapport à un objet ; donc l’intelligence arrive elle-même à poser la dualité sujet-objet, et, ceci fait, elle n’a plus rien à se représenter : l’intelligence proprement dite a atteint sa limite. […] Ce n’est plus de l’intelligence, ce n’est plus de la sensibilité pure, constatant qu’elle jouit ou souffre ; mais c’est encore de la conscience. […] Or, c’est ce pouvoir, encore une fois, qui caractérise l’acte d’appétition et d’intelligence, par opposition à un mouvement de pure machine.
Au contraire, une véritable intelligence analytique est déplaisante, puisqu’elle est un outil de destruction. […] Son mépris pour l’entassement fou et ignoble qui forme une intelligence obéissante est moins odieux encore que son amour pour l’harmonie nouvelle qu’est tout esprit libre. […] Il sait que tout mouvement libre offense les critiques, prêtres de l’immobilité ou porteurs du manipule de foin que suivent toujours, salive à la bouche, les légions, les centuries et les décuries littéraires : « Jadis un homme se levait, bouclier de la foi, contre les nouveautés, contre les hérésies, le Jésuite ; aujourd’hui, champion de la règle, trop souvent se dresse le Professeur. » Mais « la diabolique intelligence rit des exorcismes, et l’eau bénite de l’Université n’a jamais pu la stériliser, non plus que celle de l’Église ». […] J’étudierais Remy de Gourmont idéaliste, puis — comme par la clarté cette intelligence est allée à la « noblesse dédaigneuse » — je dresserais Remy de Gourmont stoïcien. […] Elle « peut être considérée comme une fonction première de notre intelligence et signifie, en quelque sorte, notre effort même vers la généralisation abstraite, qui est le moyen et l’objet de tout savoir ».
Sa sensibilité morale et physique ; son intelligence. […] Sully Prudhomme : poésie scientifique ; généralisation de l’émotion personnelle par l’intelligence philosophique. […] Mais quelle intelligence a-t-il ? […] Vers 1850, la poésie est devenue moins personnelle, elle s’est imprégnée d’esprit scientifique ; elle veut rendre les conceptions générales de l’intelligence, plutôt que les accidents sentimentaux de la vie individuelle. […] L’intelligence est plus forte, médiocre encore : sauf une exception.
Le bonheur de Laure ne peut être compris par l’intelligence humaine, et pourtant Laure attend son amant dans le ciel. […] Naissance, richesse, beauté, grâce, majesté, intelligence, savoir, rien ne manque à l’idéale perfection de Florence Lascelles. […] Il traite le lecteur avec un dédain superbe, et s’adresse à l’intelligence sans jamais essayer de séduire l’imagination. […] Ces leçons nous offrent l’intelligence de M. […] Le récit proprement dit, simple, austère ou paré de couleurs poétiques, le récit en lui-même semble répugner à son intelligence.
Il n’y représente aucune valeur d’existence, mais la valeur d’intelligence. […] Mais alors il ne s’agira plus de la vie ni des drames de l’intelligence ; il s’agira d’une vie et de drames qui se passent hors de l’intelligence. […] L’intérêt de l’ouvrage consistera évidemment pour l’auteur à colorer l’amour des reflets de l’intelligence et du génie, à donner à l’amour l’équation personnelle de l’intelligence et du génie. […] Mais généralement l’intelligence et l’amour mènent leur train séparé. […] La place que tient l’amour dans un homme d’intelligence n’intéresse guère son intelligence.
Les ténèbres se répandirent sur l’intelligence pendant qu’une nouvelle morale et une nouvelle théologie s’emparaient des opinions et des cœurs. […] La passion de Dieu et de l’intelligence des choses divines, qui précipitait alors tant d’âmes dans la solitude, l’arracha, dans la fleur de son adolescence, au monde. […] Je croyais m’être approché autant qu’il était en moi du foyer de la vérité ; je n’en entrevoyais pas seulement la lueur, qui m’éblouissait, j’en sentais la chaleur, qui me descendait de l’esprit au cœur, du cœur aux sens ; j’étais ivre d’intelligence, s’il est permis d’associer ces deux mots. […] Je l’ai beaucoup connu dans ma jeunesse ; j’ai été son disciple en diplomatie italienne et en intelligence des poètes de cette terre de toute poésie. […] Ce chef-d’œuvre de vigueur et d’adresse dans le jeune écrivain est tout à la fois un chef-d’œuvre d’intelligence de son modèle.
Cette même expérience peut également réussir chez des animaux supérieurs tels que les oiseaux, chez lesquels l’intelligence est beaucoup plus développée. […] Il en est de même quand les lésions pathologiques guérissent, les troubles de l’intelligence cessent et la raison revient. […] Les uns ne veulent pas admettre que le cerveau soit l’organe de l’intelligence, parce qu’ils craignent d’être engagés par cette concession dans des doctrines matérialistes, les autres au contraire se hâtent de placer arbitrairement l’intelligence dans une cellule nerveuse ronde ou fusiforme pour qu’on ne les taxe pas de spiritualisme. […] Les atomistes ne reconnaissent pas d’intelligence motrice, le monde se meut par lui-même éternellement. […] Cette force vitale, dit-il, qui sans cesse lutte contre les forces physiques, agit avec intelligence, dans un dessein calculé, pour la conservation de l’organisme.
Si cela n’était pas ainsi, les trois grands témoins de Dieu : l’intelligence, la conscience, l’évidence intérieure, auraient menti en nous, c’est-à-dire que ces trois grands témoins, subornés par la vérité suprême, Dieu, auraient été chargés par Dieu de se jouer en son nom de l’intelligence, de l’évidence, de la conscience, de la vérité, de la foi, de l’espérance de l’homme ! […] Quant à moi, j’y crois mille fois plus fermement qu’à ce monde visible ; car je crois à l’œil de l’intelligence mille fois plus qu’à l’œil de chair ! […] Dans tous ces pays on peut s’attendre à des prodiges prochains d’intelligence appliquée aux lettres. […] Est-il vrai que ces détracteurs rétrospectifs de l’intelligence française soient fondés à nous convaincre d’une prétendue décadence qui n’existe que dans leurs courtes pensées ? […] Chacun est du climat de son intelligence ; Je suis concitoyen de toute âme qui pense : La vérité, c’est mon pays !
Pour les figurer, celui-ci ne dut consulter que les besoins de son récit, et puiser dans l’intuition de sa propre âme, bouleversée, déchirée, affolée et déchue, dont son intelligence lucidement froide constatait les convulsions. […] Il admire l’étrange domination de ces contes inhumains, subjuguant son intelligence intacte. […] Et au-delà de ces contes où l’angoisse paraît exaltée hors de mesure, de névrose eu névrose, viennent des êtres plus mystérieusement désorganisés, puissants d’intelligence, atteints des maladies profondes de la volonté, monstrueux et fêlés par l’énorme développement de quelque groupe cérébral normalement infime. […] Si la faculté de voir et de retenir des images horribles n’eût été contenue par l’intelligence, Poe aurait ressenti la terreur et perçu les hallucinations qui empêchaient Hoffmann d’écrire seul la nuit. […] Sur ces deux points la biographie de Poe est négative, tandis que sa psychologie où il s’analyse calmement en ses vices et ses misères, montre quel était l’empire de son intelligence sur sa sensibilité.
Mais il leur resta l’intelligence ; une intelligence sans passion, il est vrai, mais qui semblait se conserver dans sa propre glace quand tout se putréfiait en eux. […] Enfin, pour citer Balzac lui-même à Balzac, les têtes les plus étonnantes de sa Comédie humaine, celles dans lesquelles il a versé le plus d’intelligence, sont des têtes de dandys. […] Que de fois elle a eu la charité de l’intelligence pour des chefs-d’œuvre qu’une mère moins forte aurait effacés ! […] Elle les a quelquefois notées, en passant, comme deux causes de jouissance pour l’esprit, deux dons heureux, mais elle n’a pas assez rendu compte de tout ce qu’elles donnent de supériorité à l’intelligence et à ses œuvres. […] Ses œuvres, à mesure qu’on les considérera, doivent montrer plus profondément sa toute-puissante individualité, et d’ici longtemps, à mesure qu’on les rééditera, si ses éditeurs ont plus qu’une intelligence de marchands, elles devront apporter sur ce grand esprit des lumières nouvelles.
Pascal a distingué trois ordres divers, et, dans chaque ordre, des princes : il y a, selon lui, l’ordre de la politique et des conquêtes, des grandeurs et des puissances terrestres ; il y a celui de l’intelligence pure et de l’esprit ; il y a enfin l’ordre de la beauté morale et de la charité. […] Sans entrer dans aucune discussion sur la prééminence des talents et sur la préséance des genres, il m’a toujours paru en effet que le premier rang dans l’ordre de l’intelligence pure était dû à ces hommes qu’on appelle Archimède, ou Newton, ou Lagrange. […] Plein d’idées, capable d’invention, doué d’une promptitude ingénieuse et fine, tira-t-il de sa belle et puissante intelligence et de cette organisation si riche en semences secondes tout le parti qu’il aurait pu ? […] Arago, caractérisa heureusement l’intelligence à la fois forte et subtile de son ami, quand il la compara à la trompe, si merveilleusement organisée, dont l’éléphant se sert avec une égale facilité pour saisir une paille et pour déraciner un chêne. » Cela n’est pas tout à fait exact : Jeffrey n’a pas dit une telle chose ; c’est en parlant de la machine à vapeur et de ses merveilleux effets, et non de l’intelligence de Watt, qu’il a dit : « La trompe d’un éléphant qui peut ramasser une épingle ou déraciner un chêne n’est rien en comparaison. » Parlant de l’esprit de Watt, Jeffrey le peint plus délicatement : Il avait, dit-il, une promptitude infinie à tout saisir, une mémoire prodigieuse et une faculté méthodique et rectifiante pour tirer, comme par une chimie naturelle, quelque chose de précieux de tout ce qui s’offrait à lui, soit dans la conversation, soit dans la lecture. […] Je le répète, au milieu des défauts qui sont saillants, il y a dans ses meilleurs éloges, tels que ceux de Fresnel, de Fourier, de Volta, d’Young, de Watt, des parties d’exposition solide où se marque distinctement l’intelligence supérieure et le maître.
Or, 1º il y a de par le monde, spécialement à Paris, quelques milliers d’intelligences cultivées auxquelles on a appris le goût du travail, de la charité, de la fraternité ; on leur a confié des anecdotes slaves émouvantes, et ils ont entendu ce vers de Voltaire : « J’ai fait un peu de bien, c’est mon meilleur ouvrage. » Voilà l’éducation de cette élite. […] Elle n’admet pas le dilettantisme d’une morale et d’une intelligence opposées. […] Dans sa préface, la rengaine a priori (du désenchantement par l’intelligence et de la vie dorée par l’Effort) est fortifiée par des considérants philosophiques. […] La foule n’y perdra rien, à tout bien considérer, puisqu’elle sera attirée et ennoblie par le voisinage de l’Élite, où chacun aura l’ambition de pénétrer, car la sélection ne sera pas selon le sang, mais selon l’intelligence. […] Il est excellent et je me félicite de constater qu’un volume de ce genre abstrait peut témoigner autant d’imagination et davantage d’intelligence que les légendes les plus forcenées.
Effrayé de la peur de la vie et souffrant misérablement de son horreur, pénétrant l’homme dans ses dessous farouches et douloureux, pris du triste amour de sa chair souffreteuse, ne voyant en toute transgression que le commencement du châtiment, inquiet, éperdu et aimant, obstinément attaché à débattre et à retourner le problème du mal, du péché et de la peine, interrogeant la science et violenté, dans son âme obscure et slave, par la hautaine impiété de la philosophie évolutionniste, par ces doctrines qui, extraites et résumées du cours des astres, du choc des atomes, du sourd essor de la substance organique, puisent dans leur origine matérielle une inhumaine dureté et font au ciel qu’elles mesurent et dans l’âme qu’elles analysent un épouvantable et clair vide, frémissant du tranquille déni qu’elles opposent au problème final de toute méditation irréaliste — le but et le sens de la vie, — et finalement repoussé par les sèches raisons dont elles interdisent la pitié, l’aide aux faibles, aux malades, aux méchants, par la nécessité de ne point intervenir dans la lutte de tous contre fous, qui est à la fois la loi du monde vivant et la source même de ce qui nous pousse à la violer, — Dostoïewski s’est violemment rejeté en arrière ; sortant de toute église comme de tout enseignement, maudissant toute intelligence, se contraignant à croire ce qui console non sans trembler de la peur tacite d’être déçu, il a rivé ses yeux sur l’Évangile, il s’est prosterné pleurant sur la face pleurante d’un Christ populaire, en une agonie de pitié, de douleur, d’angoisse, d’effroi, de fou désespoir et de tremblante supplication aussi tragique en sa clameur que les affres contenues de Pascal. […] De même encore, une intelligence peu développée en tant qu’intelligence, à qui les sens portent sans cesse des impressions discontinues, sera en peine d’imaginer l’idée de développement, soit dans un récit, soit dans un caractère, et concevra de préférence le suspens d’une histoire et la stabilité d’une âme. […] Son intelligence n’était de force ni à obtenir cette victoire, ni à faire contrepoids en un équilibre indécis, à la violence de ses sentiments. […] Dans cette vie obscure et dans cette ville neigeuse ou torride, l’intelligence vacillante et la sensibilité malade de Dostoïewski se sont émues et déployées. […] Et si l’on considère l’étendue et la pénétration de leur enquête, la façon neuve dont ils parlent de l’homme et à l’homme, leur art sincère et haut, la sérieuse ferveur de l’évangile de pitié qu’ils proposent, le plus déterminé partisan de l’art pour l’art peut se sentir hésiter et réfléchir, jusqu’à ce qu’il recomprenne que le problème de la société, de la vie de l’homme ne peut être résolu par le cri de passion des détracteurs d’intelligence, que l’évangile que prêchent les romanciers slaves a précédé de dix-huit cents ans les maux qu’ils dénomment, que l’enseignement fut la marque même de sa fausseté dans son emportement, que la vérité est paisible, persuade en paraissant et n’a nul besoin d’apôtres, que l’erreur seule parle violemment, que les œuvres d’art ne doivent pas tenter de tromper, qu’il leur suffit de contenir les préceptes latents et obéis, ceux-là du monde dont elles sont la lumineuse image.
L’intelligence, dans l’homme, continue de se perfectionner lorsque son être physique commence à perdre de ses forces et de ses facultés : il en est de même du genre humain. […] Ainsi les premiers pas de l’intelligence humaine, ainsi l’organisation des premières sociétés, méritent toute notre attention. […] Que faut-il surtout à l’intelligence ? […] Cette idée, qui consistait à faire de Dieu même le type de l’homme et de ses facultés, fut étendue, dans les doctrines platoniciennes, de l’intelligence aux sentiments. […] Le génie éminemment allégorique de l’antiquité n’a point échappé à la vaste intelligence de Bacon, mais il n’en a développé qu’une partie.
Si « le sujet de la vérité est la raison universelle et absolue », si les vérités nécessaires ne sont pas dans les choses47, si elles sont des pensées de l’intelligence divine, j’aperçois des pensées de l’intelligence divine lorsque je les aperçois. Quand je remarque que quatre est le double de deux, ce n’est pas un rapport que je vois, c’est une idée, une idée d’autrui, une idée de Dieu ; c’est Dieu lui-même, car on ne voit pas une idée sans voir l’intelligence qui la produit. […] Ce gros mathématicien, mon voisin, qui, la craie en main, s’amuse à chiffrer en fumant, l’air gai et l’esprit tranquille, contemple en ce moment cette intelligence immense qu’on ne peut concevoir sans stupeur. […] La pierre, l’homme, le moi, voilà des substances ; la blancheur, la dureté, la laideur, la méchanceté, l’intelligence, voilà des qualités. […] — De sorte que vous n’avez contemplé ni un être infini, ni une intelligence infinie, mais simplement des quantités exprimées par des chiffres, et leurs propriétés isolées, par abstraction ?
Dans son livre sur L’habitude et l’intelligence 287, il admet « la loi d’association comme loi dernière, mais pour la psychologie seulement. […] D’ailleurs si ces idées sont primitives et toutes faites dans l’intelligence, pourquoi se produisent-elles si tard, au lieu d’être les premières dans l’ordre chronologique ? […] Les deux rapports les plus généraux que conçoive l’intelligence humaine sont ceux de succession et de simultanéité. […] Le caractère d’infini, propre à ces deux idées de temps et d’espace, c’est-à-dire l’impossibilité pour notre intelligence de leur concevoir des bornes, s’explique par la loi d’association. […] Habit and Intelligence in their connexion with the laws of matter and force, 2 vol. 1869.
La question touchant le plaisir ou le déplaisir que causait ou méritait de causer telle œuvre, demeurait posée ; mais on s’astreignait à savoir, en outre, quelle était la personne c’est-à-dire l’intelligence qui l’avait produite, et encore quel était l’ensemble des circonstances historiques c’est-à-dire sociales, dont sa production avait été entourée ; pour ces deux sortes de renseignements le critique avait à se doubler d’un historien ou d’un biographe et devait pénétrer dans le domaine des sciences morales. […] C’est dire que l’esthopsychologie est une science qui permet de remonter de certaines manifestations particulières des intelligences à ces intelligences mêmes et au groupe d’intelligences qu’elles représentent. […] D’autre part, ayant à déterminer d’une façon précise et individuelle, la nature de l’esprit d’artiste qu’elle veut connaître, elle est obligée de recourir aux notions générales sur l’intelligence humaine que donne la psychologie ; et s’appliquant à démêler les groupes naturels d’hommes auxquels un artiste peut servir de type, elle est contrainte de s’adresser à la sociologie et à l’ethnologie.
La suprême intelligence, qui est ici-bas le grand homme, quelle est la force qui l’évoque, l’incorpore et la réduit à la condition humaine ? […] De toutes ces questions, celle entre toutes qui nous obsède l’intelligence, celle entre toutes qui nous serre le cœur, c’est la question de l’âme. […] Les esprits chefs, les intelligences guides, qui les envoie ? […] L’intelligence humaine se fait rayonnement, et, de proche en proche, gagne, conquiert et humanise la matière. […] Comment toutes les puissances viennent-elles converger et se nouer en unité indivisible dans cette intelligence souveraine ?
Du moment où Dieu lui avait révélé divinement la parole et l’intelligence de la parole, il lui avait donné par là l’instrument nécessaire et facile de toute convention et de tout progrès. […] « Examinons, disions-nous encore, ce que c’est que l’homme ; oublions que nous sommes nous-même une de ces misérables et sublimes créatures appelées de ce triste et beau nom dans la création universelle ; échappons, par un élan prodigieusement élastique de notre âme immatérielle et infinie, à ce petit réseau de matière organisée de chair, d’os, de muscles, de nerfs, dans lequel cette âme est mystérieusement emprisonnée ; supposons que nous sommes une pure et toute-puissante intelligence capable d’embrasser et de comprendre l’univers, et demandons-nous : Qu’est-ce que l’homme ? […] Considérez sa structure, vous reconnaîtrez que chacun de ses organes corporels, autrement dit ses sens, n’a pas d’autre objet que de mettre son intelligence ou son âme en communication avec le monde extérieur qui l’enveloppe, de lui donner une sensation, de produire en lui une idée, de lui faire comparer en lui-même ces sensations et ces idées, et enfin de les exprimer pour lui-même ou pour les autres, ou, ce qui est plus beau, pour Dieu par la parole ; la parole qui dit Je vis, la parole qui dit Je pense, la parole qui dit J’adore, mot sublime et final où se résume toute la création. […] Nous prendrons en main tour à tour une de ces œuvres, nous en traduirons les principaux textes, en faisant goûter les beautés et en indiquant les imperfections, et nous nous rendrons compte ainsi des trésors d’intelligence, de sagesse et de génie que possède l’homme intellectuel au temps où nous vivons.
Lorsque par la suite des temps, l’intelligence des plébéiens se développa, ils revinrent de l’opinion qu’ils s’étaient formée de l’héroïsme et de la noblesse, et comprirent qu’ils étaient hommes aussi bien que les nobles. […] Sans doute les hommes ont fait eux-mêmes le monde social, c’est le principe incontestable de la science nouvelle ; mais ce monde n’en est pas moins sorti d’une intelligence qui souvent s’écarte des fins particulières que les hommes s’étaient proposées, qui leur est quelquefois contraire et toujours supérieure. […] ce fut sans doute l’esprit, puisque les hommes le firent avec intelligence. […] La première nous porte par la grâce aux actions vertueuses pour atteindre un bien infini et éternel, qui ne peut tomber sous les sens ; c’est ici l’intelligence qui commande aux sens des actions vertueuses.
Mais encore ici l’intelligence l’a emporté. […] Il n’en reste pas moins pour nous un des plus beaux exemplaires d’une intelligence d’ordre, — autant dire tout bonnement de l’intelligence. […] Tout dans sa personne, regard, gestes, parole, disait la supériorité de l’intelligence. […] Comme le muscle de cette intelligence reste vigoureux, comme il reste agile ! […] Son intelligence, le plus souvent, restait strictement professionnelle.
Cette maladie pourrit jusqu’au fond la sensibilité, la volonté et l’intelligence de Jean-Jacques Rousseau. […] Nul fait ne nous est intelligible que par les principes de l’intelligence. […] A l’instant même où elle se met en face du problème des problèmes, l’intelligence se vide, pour ainsi parler. […] La chimère de l’intelligence, c’est donc toujours la chimère du cœur. […] C’est, imprégnant des intelligences d’homme, qu’une philosophie féminine est un poison.
Ils ne savent pas quelle est leur destinée, ils n’ont pas d’intelligence. L’animal jouit et souffre ; il compare des objets différents, et se dirige vers celui qui peut le mieux satisfaire ses appétits ; il est intelligent ; mais ce sentiment et cette intelligence sont bornés : ils ne vont pas au-delà de la satisfaction présente des besoins les plus grossiers. […] Voici encore, en Afrique, une race d’hommes qui ont le crâne, la peau, l’intelligence, faits d’une autre manière. […] La plus grande anarchie règne dans la société, dans les intelligences, mais cette anarchie n’existe que dans les classes supérieures.
Goujet, un riche trésor où l’on trouve presque tout ce que l’on peut désirer pour l’intelligence de notre langue. […] Mais, à cet inconvénient près, les étymologies peuvent servir beaucoup pour l’intelligence de notre langue. […] On peut donc les lire à son exemple, & c’est pour en faciliter l’intelligence que M. […] ouvrage utile aux Légistes, Notaires, Archivistes, Généalogistes, &c. propre à donner une idée du génie, des mœurs & de la tournure d’esprit des auteurs de chaque siécle ; & absolument nécessaire pour l’intelligence des loix d’Angleterre, publiées en françois depuis Guillaume le conquérant jusqu’à Edouard III. […] Un défaut d’ailleurs remarquable dans le Dictionnaire de le Roux, & dans les autres où l’on rapporte nos proverbes, c’est qu’on s’arrête à expliquer certaines façons de parler, certains proverbes si intelligibles, qu’ils s’entendent d’eux-mêmes ; & qu’on en abandonne à la pénétration du lecteur, d’autres dont l’intelligence est beaucoup plus difficile.
Tout gouvernement est une intelligence en travail et une morale en action. […] Vous vous répondrez : C’est le gouvernement de l’intelligence, c’est-à-dire celui qui donne la supériorité aux plus capables. […] » Les Chinois comprenaient déjà alors la royauté de l’intelligence et la souveraineté de la raison. […] Le père, né le premier, avait la priorité de l’intelligence ; il savait ce que les fils ignoraient. […] L’intelligence cultivée (les lettrés) est le seul titre aux fonctions publiques.
On ne rencontre pas souvent ici-bas un cœur si bon et une intelligence si vaste. […] Mais le trait dominant du visage, plus même que l’intelligence, était la bonté communicative. […] Il cherchait dans la masse corporelle le symptôme et l’indice de l’intelligence. […] cette intelligence se trahissait à ses premiers mots et jusque dans ses gestes ! […] Oui, tu as raison, je ne m’arrêterai pas, j’avancerai, j’atteindrai le but, et tu me verras un jour compté parmi les grandes intelligences de mon pays !
On peut ainsi mesurer combien les sentiments influent sur la conduite et combien par contre celle-ci est indépendante du raisonnement, de l’intelligence, de la science, de l’instruction. […] Chez Henri Heine l’intelligence et la sensibilité se balançaient presque et ce qui se remarque dans son œuvre, c’est la condition particulière d’instabilité de ses sentiments. […] Chez Tourguénef, c’était évidemment sa sensibilité de Slave, sa bonté, sa douceur, qui était gênée dans son expansion par son intelligence d’Occidental. […] Dans une intelligence aussi magnifiquement constituée, à un développement excessif de la sensibilité correspond une formidable énergie de la volonté qui en respecte la délicatesse et eu neutralise les souffrances. […] Que ce soit là la doctrine finale des très hautes intelligences littéraires, comme des très grands philosophes — Spinoza, Hegel, H.
N’est-il pas permis à ceux autour desquels s’amassent incessamment calomnies, injures, haines, jalousies, sourdes menées, basses trahisons ; hommes loyaux auxquels on fait une guerre déloyale ; hommes dévoués qui ne voudraient enfin que doter le pays d’une liberté de plus, celle de l’art, celle de l’intelligence ; hommes laborieux qui poursuivent paisiblement leur œuvre de conscience, en proie d’un côté à de viles machinations de censure et de police, en butte de l’autre, trop souvent, à l’ingratitude des esprits mêmes pour lesquels ils travaillent ; ne leur est-il pas permis de retourner quelquefois la tête avec envie vers ceux qui sont tombés derrière eux, et qui dorment dans le tombeau ? […] La liberté dans l’art, la liberté dans la société, voilà le double but auquel doivent tendre d’un même pas tous les esprits conséquents et logiques ; voilà la double bannière qui rallie, à bien peu d’intelligences près (lesquelles s’éclaireront), toute la jeunesse si forte et si patiente d’aujourd’hui ; puis, avec la jeunesse et à sa tête, l’élite de la génération qui nous a précédés, tous ces sages vieillards qui, après le premier moment de défiance et d’examen, ont reconnu que ce que font leurs fils est une conséquence de ce qu’ils ont fait eux-mêmes, et que la liberté littéraire est fille de la liberté politique. […] Les ultras de tout genre, classiques ou monarchiques, auront beau se prêter secours pour refaire l’ancien régime de toutes pièces, société et littérature ; chaque progrès du pays, chaque développement des intelligences, chaque pas de la liberté fera crouler tout ce qu’ils auront échafaudé.
Je voudrais raconter nettement, et sans trop de conjectures, l’histoire de cette intelligence élevée qui tranche avec celle de nos autres contemporains, et qui doit une partie de son caractère et de son originalité à ses origines mêmes. […] Sa gravité, sa dignité, et, si je puis dire, sa démarche d’intelligence n’eurent en rien à souffrir ni à se déranger d’un changement sincère, naturel, produit en la saison voulue, selon le cours des choses, en vertu d’une crise nécessaire et généreuse, et avant que rien de contraire ni d’irrévocable eût sonné. […] Car que peut désirer de plus beau une grande âme, une haute intelligence, si par malheur la vie et la conscience individuelle ne persistent pas à tout jamais et s’évanouissent après cette vie mortelle ? […] Renan porte un bien grand respect et une bien haute révérence à sa majesté l’esprit humain, Mais dans un pays comme la France, il importe qu’il vienne de temps en temps des intelligences élevées et sérieuses qui fassent contrepoids à l’esprit malin, moqueur, sceptique, incrédule, du fonds de la race ; et M. Renan est une de ces intelligences, s’il en fut.
À vrai dire, il y aura toujours des textes qu’on n’épuisera pas : mais on descendra plus ou moins profondément dans leur intelligence, on en explorera plus ou moins complètement l’étendue ; et il s’agit de s’habituer, dans ces deux sens, à aller le plus loin qu’on peut. […] En un mot, lire avec réflexion, lire pour comprendre et de façon à comprendre, lire pour se donner non seulement des impressions fortes, ou des impressions multiples, mais pour acquérir une intelligence claire, précise et distincte des textes, c’est une chose qui ne se fait pas toute seule — si vous exceptez quelques individus qui seront toujours, en tout, au-dessus de toutes les règles et de toutes les pédagogies, et qui, tout de même, auront profit à ne pas les ignorer ; c’est une chose qui s’apprend ; et c’est la chose qu’on apprend par l’exercice de l’explication de textes. […] L’intelligence exacte du vocabulaire et de la syntaxe de l’auteur, dans la page qu’on a choisie, n’est pas nécessaire seulement pour fixer le sens littéral, mais elle prépare la connaissance fine des nuances de l’idée ou de la forme. […] Nous sommes un public pour ces écrivains immortels au même titre que les gens de 1580 ou de 1670 ; et nous avons le même droit d’essayer sur nos consciences, nos sensibilités et nos intelligences, la vertu de leurs œuvres, de les obliger à révéler par les réactions de nos esprits des propriétés nouvelles, que les générations des siècles disparus n’ont pas ou n’ont qu’à peine soupçonnées4. […] Ils n’eurent qu’à interroger leurs élèves ; et ils constatèrent que le don de réfléchir sur les impressions d’une lecture, d’aller au-delà du sens littéral pour jouir de toute la force d’une pensée ou de toute la beauté d’une forme, n’était pas un don inné chez la plupart, que, dans la lecture, comme en tout, la nature humaine fuyait la peine, et qu’il fallait exercer les enfants et les jeunes gens à user de toute leur intelligence.
Mais adieu ; trois de mes amis m’attendent ; nous devons discuter aujourd’hui la manière dont l’intelligence passe du moi au non-moi, et du subjectif à l’objectif. » Le pauvre disciple de Laromiguière, un peu confus et inquiet, monta à la bibliothèque de la Sorbonne, et pour se rassurer ouvrit le premier volume de son professeur. « Serait-il bien possible, disait-il, que la doctrine de mon cher maître renfermât de si étranges conséquences ? » Et il relut les passages suivants : L’harmonie admirable qui règne sur la terre et dans les cieux force la raison à reconnaître une intelligence suprême qui a tout disposé avec une souveraine sagesse. […] du sentiment de ce qu’il fait lui-même quand il dispose ses actions pour les conduire vers un but, à l’idée d’une intelligence infinie ? […] Ses gestes étaient rares, son ton doux et mesuré, et, pendant que ses yeux s’éclairaient de la lumière de l’intelligence, sa bouche, demi-souriante et parfois moqueuse, ajoutait les séductions de la grâce à l’ascendant de la vérité. […] Il raillait les métaphysiciens amateurs de métaphores, pour qui « l’entendement est le miroir qui réfléchit les idées », et qui définissent la volonté « une force aveugle guidée par l’entendement, éclairée par l’intelligence. » Mais au même instant il joignait l’exemple au précepte, et disait dans ce style choisi dont ses maîtres lui avaient donné le modèle : L’homme est porté à tout animer, à tout personnifier, à mettre quelque chose d’humain jusque dans les objets qui ont le moins de rapport à sa nature.
Sans doute les premières ont une forme stéréotypée, tandis que les autres varient ; celles-là obéissent à l’instinct, celles-ci à l’intelligence. […] Mais l’intelligence survient. […] Elle a doté l’homme d’une intelligence fabricatrice. […] La nature, en nous dotant d’une intelligence essentiellement fabricatrice, avait ainsi préparé pour nous un certain agrandissement. […] Un corps qui comportait l’intelligence fabricatrice avec, autour d’elle, une frange d’intuition, était ce que la nature avait pu faire de plus complet.
Une intelligence souple, à parité d’images et de souvenirs, s’en servira mieux. […] Dans le premier cas, le sentiment qui intervient dépend à peu près complètement de l’exercice de l’intelligence. […] Elle était trop faible pour subsister dans l’intelligence ou l’intelligence était trop faible pour la nourrir. […] L’invention exige un fonctionnement à la fois logique et illogique de l’intelligence. […] Citée dans l’Intelligence.
L’intelligence peut beaucoup. […] Mais il y a un mouvement secret des intelligences. […] Renan peut être considéré comme le type d’une classe d’intelligences absolument contraire à cette autre classe d’intelligences qui reconnaît son modèle dans Sainte-Beuve. […] Ce sont les deux termes entre lesquels oscille notre intelligence. […] Flaubert n’a pas échappé à cette loi essentielle de l’intelligence humaine.
Le littérateur se dépêchait, se hâtait, avec un entêtement obstiné de pressurer, sans en vouloir perdre une minute, les dernières heures d’une intelligence, d’un talent prêts à sombrer. […] Il ne possède plus les gradations de la politesse, selon l’échelle sociale des gens avec lesquels il se rencontre, il ne possède plus les gradations de l’intelligence, selon la compréhension des êtres avec lesquels il se trouve en contact. […] * * * Dans cette figure aimée, où il y avait l’intelligence, l’ironie, cette fine et joliment méchante mine de l’esprit, je vois se glisser, minute par minute, le masque hagard de l’imbécillité… Je souffre, je souffre, je crois, comme il n’a été donné à aucun être aimant de souffrir ! […] * * * Ce qu’il y a d’affreux dans ces abominables maladies de l’intelligence, c’est qu’elles ne touchent pas seulement à l’intelligence, mais qu’elles détruisent souterrainement, et à la longue, chez l’être aimant qu’elles frappent, la sensibilité, la tendresse, l’attachement, c’est qu’elles suppriment le cœur… Cette douce amitié qui était le gros lot de notre vie, de mon bonheur, je ne la trouve plus, je ne la rencontre plus… Non, je ne me sens plus aimé par lui, et c’est le plus grand supplice que je puisse éprouver, et que tout ce que je peux me dire, n’adoucit en rien. […] Je n’aurai plus son intelligence jumelle, pour dire avant moi ce que j’allais dire ou pour répéter ce que j’étais en train de dire.
Enfin La Fontaine a soutenu, comme vous le savez, et avec énergie, l’intelligence des bêtes. […] En tout cas, ce qu’il y a de certain, c’est que La Fontaine a défendu l’intelligence des animaux par tous les arguments possibles et par des arguments très solides et très clairs. Remarquez qu’autour de lui il y avait des gens qui croyaient à l’âme des bêtes, mais ils croyaient à leur âme plus qu’à leur esprit, plus qu’à leur intelligence. […] Il sait très bien, et il l’a assez montré et voulu le montrer, que l’animal est une âme, mais il veut, de plus, qu’il soit une intelligence. […] Donc, il ne faut pas être sûr que les animaux ont plus d’intelligence que nous, mais il faut être sûr qu’ils en ont.
L’intelligence capable de tels efforts est, plus ou moins, selon le degré, et selon l’abondance et la variété de ses autres dons, une intelligence créatrice. […] Puisque tout dans l’homme se ramène à l’intelligence, tout dans l’histoire doit se ramener à la psychologie. […] L’idée d’art n’aura peut-être été dissociée que pendant un petit nombre d’années et pour un petit nombre d’intelligences. […] Mais vers ces années-là un livre parut qui soudain éclaira les intelligences. […] Il faut sans doute tenir compte, dans l’examen de ces faits contradictoires, soit de l’intelligence, soit du caractère du vainqueur.
Il acheva d’éveiller dans ces légères intelligences des salons le besoin de tout comprendre, la conviction que l’inexplicable n’est que de l’inexpliqué. […] Mais il était intelligent, et à force d’intelligence il évita la petitesse de l’égoïsme. Il suivait en tout la vérité ; il était juste, il était bienfaisant par intelligence. […] Il estimait que la masse des esprits, peuple ou grands, n’est pas apte à recevoir la vérité, qu’elle est faite pour un petit nombre d’intelligences, où elle ne se déforme pas, et ne porte pas de mauvais fruits.
C’est que cette tristesse vaine, et pourtant sincère, je l’ai souvent sentie en moi, et que j’en rougis ; c’est que j’ai peur d’y découvrir un mélange affreux de vanité, d’égoïsme, de « gendelettrerie », de complaisance pour la beauté et la distinction de ma propre intelligence ; et que, de souffrir uniquement par la pensée (oh ! […] … Sans réflexion, sans calcul, poussé par sa nature et par l’esprit du temps, il s’est livré à ses séductions, dont il n’a pas vu le danger : c’est si facile, si doux, si distingué, de jouer avec les idées, de s’en caresser l’intelligence, d’en extraire l’essence, et, comme un riche répand sur ses mouchoirs un parfum dont le prix nourrirait des familles, d’en saupoudrer élégamment sa vie… Cependant, ces plaisirs s’émoussent comme toutes les ivresses : le Pharisien se fatigue à la fin des arcs-en-ciel qu’allument sur toutes choses les prismes de son esprit. […] Alors son orgueil s’écroule enfin, il sent peser sur lui comme un poids matériel le vide dont il s’est entouré et qui l’absorbe ; il se révolte contre la tyrannie de son intelligence dont il a fait une inexpugnable forteresse… En vain … et pour s’être complu en lui-même, il est éternellement isolé en lui seul. » Cela est fort bien dit, et c’est cette misère qui a inspiré à M. […] Cet idéal, dont l’accomplissement est la raison d’être de l’univers, je ne sais s’il réside dans l’intelligence d’un Dieu, ou s’il se forme peu à peu dans le cerveau des êtres supérieurs.
Tessier est, au contraire, une intelligence philosophique. […] En supposant que l’intelligence humaine soit un jour nettoyée de cette doctrine immonde, les médecins seront les derniers à en essuyer leur pensée. […] Or, si Broussais s’humiliait ainsi, Broussais, le plus superbe esprit qui se soit jamais posé sur des griffes entrecroisées à la guisa di leone , comme dit le poëte, on se demande ce que durent faire les hommes qui vinrent après lui et dont l’audace n’était pas comme la sienne mesurée à la grandeur de l’intelligence. […] Tessier est une de ces intelligences qui travaillent à renouer la chaîne des enseignements scientifiques, et jamais il ne nous a paru plus heureux dans son effort qu’en posant (pourquoi n’est-ce que de profil ?)
On citera des traits surprenants, des inventions ingénieuses d’enfants, de pauvres d’esprit, d’idiots même, dont un grand amour a peu à peu éclairé, parfois illuminé soudainement l’obscure intelligence. Il arrive qu’un sentiment violent, agitant toute l’âme, ébranlant à la fois tous les ressorts de l’intelligence et du cœur, arrache à un homme un cri sublime, qui fait l’admiration des âges et justifie le célèbre dicton. […] Surtout quand on veut séparer l’esprit du cœur et ne pas faire appel à son intelligence pour traduire ses sentiments, on est vite à court, et très embarrassé de parler ou d’écrire.
La coordination, l’organisation des mouvements est ce qui leur donne un sens pour l’intelligence en ajoutant l’harmonie à la force déployée. […] Seulement, disons-le vite, il n’est pas de plaisir si exclusif, surtout parmi les plaisirs supérieurs, comme ceux de l’intelligence. […] Ce n’est donc pas le progrès de la raison et de l’intelligence qui peut le faire disparaître. […] Cette intime pénétration de la sensibilité par l’intelligence est l’une des causes principales du progrès moral et esthétique. […] On a vu des poètes qui n’étaient pour ainsi dire que des êtres sentants ; on a vu des savants à l’intelligence tout abstraite.
Devant le portrait de sa grand’mère, moins ressemblant, aucun geste semblable, aucun signe d’intelligence. — Depuis un mois (onze mois), quand on lui demande : « Où est maman ? » elle se tourne vers sa mère, — de même pour son père. — Je n’oserais affirmer que ces trois actions dépassent l’intelligence animale. […] Il n’a pas encore dépassé ni même atteint les limites de l’intelligence animale. […] « Comment s’exécute cette œuvre spéciale de l’intelligence humaine, je veux dire la formation et le maniement des concepts ? […] Les animaux (pasu, pecus) « sont ceux qui nourrissent ». — « Voilà comment nos concepts et nos noms, notre intelligence et notre langage se formèrent ensemble.
Un Aristote, un Pline, un Buffon, naîtront et feront l’histoire naturelle des animaux par l’intelligence au lieu de la faire par la forme. […] Fournet (c’est le nom du jeune médecin français qui a écrit ces belles lignes) éclaire plus le Cosmos du savant prussien que l’intelligence n’éclaire la matière inerte des époques. […] Dieu leur a donné à tous un atome ou un monde de matière, et une parcelle ou un monde d’intelligence, selon les desseins qu’il a sur eux. […] Nier le mystère, c’est plus que nier la matière et l’intelligence ; c’est presque nier l’existence et l’autorité de Dieu. […] Tous ont un corps, parcelle de matière ; tous ont une âme, parcelle d’intelligence.
Rien de plus humiliant pour l’esprit, et j’avoue que lorsqu’on se voit d’une telle infériorité (fût-on Voltaire ou Gœthe, car il n’y a guère ici de degrés), devant les maîtres de l’analyse, on est tenté de désirer que cette langue des nombres soit une de celles dont l’enseignement devienne obligatoire de bonne heure à toute intelligence digne et capable d’y atteindre. […] L’état mental de la majorité du monde sur ces questions et ces phénomènes est d’accord avec les vraies solutions, bien que tel ou tel individu puisse en être très éloigné pour la complète intelligence ; mais on n’a pas à revenir du tout au tout ; on n’a pas à dissiper des monstres, des chimères, des dragons armés, des préventions ennemies. […] Pour lui, il n’hésite pas à le proclamer, « l’ordre préside au cosmos des intelligences et au cosmos des corps ; le monde intellectuel et le monde physique forment une unité absolue ; l’ensemble des humanités sidérales forme une série progressive d’êtres pensants, depuis les intelligences d’en bas, à peine sorties des langes de la matière, jusqu’aux divines puissances qui peuvent contempler Dieu dans sa gloire et comprendre ses œuvres les plus sublimes. » C’est ainsi que tout s’explique en s’harmonisant. […] Pour moi, quand je suis seul à contempler ces millions de mondes, cette ordonnance merveilleuse, connue dans de certaines limites et pressentie par-delà ou ignorée, il me semble que je n’ai pas besoin d’amasser tant d’autorités, tant de noms propres ou d’idées accessoires au service de mes rêves ; et tout en concevant qu’il y a autant de manières de sentir, d’être affecté et d’adorer, qu’il y a d’intelligences et de regards, je crois qu’il en est une non moins légitime, et je ne la cherche que dans cette contemplation même et dans ce qu’elle a d’auguste. […] La Place concluait par ces mémorables paroles en quelque sorte définitives : « L’astronomie, par la dignité de son objet et la perfection de ses théories, est le plus beau monument de l’esprit humain, le titre le plus noble do son intelligence.
M. de Montgaillard n’a jamais eu l’intelligence des grands mouvements politiques qu’il enregistre et qu’il narre dans son journal ; il n’a été dirigé, en écrivant, par aucun système de principes, auquel il soit resté conséquent et fidèle ; les variations de son humeur se retrouvent dans ses opinions sur les partis et sur les hommes ; il réduit tout en personnalités, et, à propos d’un même personnage, il n’est pas rare qu’il passe, à quelques pages de distance, de l’éloge à l’injure. […] Laurent essaie de les faire servir à interpréter notre Révolution, comme on a cherché à les faire servir à l’interprétation des sociétés anciennes et du moyen âge, à l’intelligence de la féodalité et de la théocratie romaine. […] Sans méconnaître le côté sinistre et livide de ce caractère jaloux, sans contester non plus la médiocrité littéraire du rhéteur, l’historien croit découvrir sous son jargon sentimental une logique puissamment systématique, et l’intelligence des plus hautes vérités, des principes les plus fondamentaux qui doivent présider à toute renaissance sociale.
Quatre périodes historiques y sont plus particulièrement traitées : 1° La période de la philosophie orientale, dans laquelle les spéculations de la philosophie brahminique et chinoise sont exposées par une plume très au courant des plus récentes connaissances ; 2° la période de philosophie grecque, fort complète aussi, et embrassée avec une sérieuse intelligence des grands systèmes ; 3° la période chrétienne qui comprend les Pères des cinq premiers siècles ; 4° le moyen âge dans ses philosophes contemplatifs ou scolastiques. […] En général, toute cette école de Lérins cherchait à concilier le plus d’intelligence et de liberté avec la grâce et la foi : Vincent de Lérins en est un des plus éloquents organes. […] Mais ici, le philosophe, par une psychologie moins abstraite et moins exclusivement rationnelle, aborde l’homme du côté des penchants actifs, des passions et instincts qui sont les mobiles réels des facultés de l’intelligence ; il marche davantage sur les traces d’Adam Smith, et nous donne sa théorie des sentiments moraux.
Jusqu’à ce que leur intelligence ait acquis un peu de force et de fécondité, permettons-leur les écarts et l’irrégularité, ou plutôt redressons les fautes quand elles se produisent, aux occasions particulières ; n’essayons pas de les prévenir par un règlement universel qui paralyserait les esprits et les empêcherait de remuer. […] Beaucoup de jeunes gens ont trop de pente à laisser leur mémoire faire la tâche de leur intelligence, pour qu’on leur offre encore ici cette tentation. […] Elles ne contiennent pas des secours immédiats pour les intelligences nécessiteuses et pour les bonnes volontés chancelantes.
Quand travaille l’intelligence, la sensibilité se repose, et l’esprit s’endort dès que le cœur s’éveille. […] Nous avons fixé les moments et les œuvres où il faut appeler l’intelligence ; le reste du temps, dans nos autres occupations, nous n’en usons point ; il nous semble naturel de ne rien lui demander : c’est comme un outil que l’on serre après le travail pour lequel il a été fait. […] Doudan a spirituellement raillé dans une de ses lettres ce commerce de banalités qui se fait dans le monde : Nous avons fait, M. d’Haussonville et moi, le complot d’accueillir Mlle de Pomaret par une suite de lieux communs débités d’un air tranquille et consciencieux, à l’effet de voir si elle s’apercevrait que nous avions baissé d’intelligence.
son intelligence, sa faculté de saisir les lois de l’univers ! […] Elles ne naissent pas de notre intelligence. […] Taine, qui croyait que par un effort de l’intelligence individuelle on saisit les lois des choses, n’a fait que raisonner et organiser des sensations qui, des cénacles romantiques jusqu’aux brasseries de Montmartre, ont été éprouvées et exprimées par tous les artistes, par les plus minables et par les plus hauts, par les rapins de Murger et par le jeune Ernest Renan.
Il est hors de doute que tous les mammifères ont une intelligence analogue à la nôtre, quoique plus bornée. […] Leur intelligence est originale et ne doit rien qu’à elle-même et à l’hérédité. […] L’intelligence du corbeau est remarquable et celle du perroquet a quelque chose de malicieux, d’ironique, qui surprend. […] Son intelligence, sa grâce, son éloquence ne lui servirent de rien, et il fut très malheureux. […] Un hasard a donné à l’homme l’intelligence.
Seulement, pour introduire hardiment et heureusement le surnaturel dans une littérature, il faut des hommes sains, des intelligences bien portantes, des poitrines accoutumées à respirer l’éther, et Hoffmann n’était pas dans ces conditions d’organisation supérieure. C’était un Allemand, — un musicien chez qui la musique a toujours bourdonné autour de la pensée, — un peintre qui confondait, comme beaucoup d’autres venus après lui et qui ont élargi son erreur, les procédés de la peinture avec les procédés littéraires, — c’était, enfin, une sensibilité d’artiste soumise à toutes les variations du baromètre, bien plus qu’une intelligence d’inventeur… L’à-propos de l’heure fit sa fortune. […] La littérature tombant dans le logogriphe est-elle dans les conditions vraies et normales de toute littérature, dont les premières conditions, les conditions élémentaires, sont la logique, — car l’imagination a sa logique comme l’intelligence, — le sens humain et la clarté ? […] Les Suites d’une queue de cochon (on n’est pas responsable du titre qu’on est obligé de citer), les Suites d’une queue de cochon, à part le décousu d’intelligence et le délire sans gaieté de ce cauchemar qui veut être gai, et la Fenêtre du coin de mon cousin, sont des exemples de cette manière de peindre détaillée, sans finesse et sans choix, et qui, par la vulgarité du dessin et de la couleur, arrive souvent jusqu’à la platitude.
Ne devrait-elle plus attendre qu’une de ces époques déjà signalées dans le monde, où la science des choses matérielles avait détruit le sentiment de l’idéal, où la force et le travail tenaient enchaînées dans un vulgaire bien-être des millions d’intelligences éteintes à l’amour de la liberté civile et des arts ? […] À part les révolutions de palais qui interrompaient le cours régulier de cet ordre de choses et en changeaient les principaux personnages, en dehors de ces accidents naturels et de ces sinistres compensations du pouvoir absolu, il y avait, durant toute cette époque dont votre théorie préconise la salutaire immobilité, il y avait alors sans cesse la plus active rébellion du sentiment moral, le plus ardent foyer pour les intelligences et les cœurs. […] Seraient-elles une punition que doit encourir notre intelligence trop attentive à cet intérêt seul, et par là trop semblable à cet ange cupide que Milton nous représente, dans les cieux mêmes, devenant épris des splendeurs de l’or foulé sous ses pas, et dès lors infidèle à Dieu et déchu de sa lumière ? […] Quand un idiome a vieilli sur son sol natal, ou que, défiguré dans son passage sous un ciel nouveau, il a perdu l’instinct délicat de sa forme première, sa grâce ou son énergie ; qu’il n’est plus en rapport avec le monde troublé et nouveau dont il est entouré, il n’importe : l’éclair de l’esprit, l’émotion de l’âme se fait jour par toute voie laissée à l’intelligence ; et le génie de l’architecte brille encore dans l’imperfection des matériaux mutilés ou à peine dégrossis qu’il emploie.
Jusque vers la dernière heure, son intelligence resta nette, ses dernières pensées se reportèrent avec lucidité vers ce roi éloigné de lui, ce roi malade aussi et qui l’avait tant aimé. […] « Al. de Humboldt. » Ainsi l’instinct de l’amitié se fait sentir dans ceux-là même qui n’en ont pas l’intelligence. […] Ce qui leur donne cette importance, c’est que la communauté de leur origine est un fil conducteur, au moyen duquel on pénètre dans le mystérieux labyrinthe, où l’union des dispositions physiques du corps avec les pouvoirs de l’intelligence se manifeste sous mille formes diverses. […] Un tableau physique de la nature s’arrête à la limite où commence la sphère de l’intelligence, où le regard plonge dans un monde différent. […] Nulle part on ne remarque que l’auteur se soit attaché à décrire des lieux déterminés ; mais les couleurs harmonieuses de ses tableaux révèlent une profonde intelligence de la nature.
Tout cela est fait avec une conscience et une intelligence très grandes, mais sans pouvoir malgré tout suffire à l’énorme analyse qu’il faudrait. […] Émile Faguet, qui est évidemment le plus sérieusement intellectuel et la plus solide personne morale de tous nos critiques, s’est tiré de ce mauvais pas par la large franchise de son intelligence, qu’illumine la clarté d’un beau caractère dédaigneux des intrigues et des mesquineries de l’arrivisme. […] En réalité, il y a toute une classe d’intelligences élevées qui sont peu armées pour inventer, mais qui ont l’esprit d’analyse, l’esprit de synthèse, et le tact d’appréciation à un haut degré. […] Si, lors du mouvement symboliste, à peine terminé depuis trois ans après avoir occupé douze années, lors de cette confuse aspiration de la jeunesse française vers une réunion de tous les arts sous l’influence de Wagner et de l’internationalisme, un critique de haut sens moral s’était levé pour arrêter les polémiques inutiles et substituer la logique aux dédains des critiques et aux saillies des nouveaux venus, il aurait précisé l’un des plus curieux mouvements intellectuels du siècle, et peut-être développé deux ou trois conséquences fécondes de cette crise pleine d’intentions et de promesses ; il y avait là un rôle considérable et bienfaisant à remplir, le rôle de Heine dans le second romantisme allemand, après Schlegel et Tieck, le rôle de Baudelaire, de Gautier et de Nerval, en 1840, le rôle de Taine dans les débuts du rationalisme, le rôle de William Morris dans les tentatives de socialisation d’art qui suivirent le préraphaélisme, le rôle professoral de César Franck dans l’école symphonique après Wagner ; ce rôle, personne ne se présenta pour le tenir, et si le symbolisme a avorté, s’est restreint à un dilettantisme de chapelle alors qu’il était parti pour une bien plus grande tentative, c’est à cause des obstinées plaisanteries des critiques superficiels, à cause du manque d’intelligence logique dans l’école, autant et plus qu’à cause des défauts eux-mêmes des symbolistes. […] Paul Adam, outre l’abondante et luxuriante fresque de ses romans byzantins ou modernes, donne depuis quelques années aux journaux une Critique des mœurs et des articles de politique générale autant que l’idéologie pure, qui témoignent d’un esprit supérieurement armé pour l’essai critique ; sa lumineuse intelligence touche à toutes choses, c’est un incomparable associateur d’analogies, une conscience pour la critique comparée.
Comment cette idée devient un centre pour la volonté, pour l’intelligence, pour la sensibilité. […] Aussi a-t-elle une triple action : elle devient un centre pour la volonté, pour l’intelligence, pour la sensibilité ; elle se manifeste par la volonté de soi, par l’affirmation de soi, par la satisfaction de soi. […] Ainsi on peut poser cette loi importante : le moi, le sujet, dès qu’il devient par l’idée un objet de conscience distincte, devient du même coup un motif, et tend à se réaliser par la volonté, par l’intelligence, par la sensibilité. […] L’intelligence aura aussi le sentiment que, dans la dispersion et le désordre, elle s’évanouit, s’échappe à elle-même, par une syncope de conscience. […] Vouloir vivre, pour l’intelligence, c’est vouloir appréhender, unir.
Pourquoi se dire avec tant d’amertume que dans le monde constitué comme il est, il n’y a pas d’air pour toutes les poitrines, pas d’emploi pour toutes les intelligences ? […] Le scepticisme s’échelonne ainsi aux divers degrés de l’intelligence humaine, alternant avec le dogmatisme selon le développement plus ou moins grand des facultés intellectuelles. […] C’est une erreur ; cela prouve un affaiblissement de l’esprit philosophique, de la spéculation, de la littérature ; cela prouve que l’on ne comprend plus la valeur et la dignité de l’intelligence, puisqu’elle ne suffit plus à occuper les esprits distingués ; cela prouve enfin que le règne a passé de l’esprit et de la doctrine à l’intrigue et à la petite activité. […] Notre Journal des Débats eût fait gorge chaude de ces gens-là, et cependant ils ont vaincu, et, quatre siècles après, les plus beaux génies se sont fait gloire d’être leurs disciples et, au XIXe siècle encore, des intelligences distinguées les tiennent pour des inspirés. […] Faites le tableau des hommes d’intelligence qui ont puissamment poussé à la roue, vous aurez des penseurs et des écrivains, comme Luther, Voltaire, Rousseau, Chateaubriand, Lamartine, mais très peu de savants ou de philosophes techniques.
Sa littérature façonnée est l’écrin de l’intelligence humaine. […] C’est là que le génie français règne par le goût, qu’il maintient sa royauté par l’esprit, cette monnaie du génie à l’usage d’un plus grand nombre d’intelligences que le génie lui-même. […] On voit par cette définition que l’esprit ainsi entendu ne vient pas seulement de l’intelligence, mais qu’il vient aussi du caractère. Une intelligence juste, vive et fine, un cœur ouvert, large et bienveillant sont les deux conditions nécessaires à un peuple ou à un homme pour avoir ce qu’on appelle de l’esprit. […] Ces monstruosités n’offenseraient pas moins la vérité éternelle que l’intelligence saine ou que les sens justes de l’homme.
C’est une magnifique intelligence qui manque de synthèse. […] Une belle forme dans l’art est encore un bienfait pour nos intelligences. […] Les richesses intellectuelles doivent-elles appauvrir l’intelligence qui s’en nourrit ? […] peuple dans toutes les conditions, infériorité dans toutes les sphères de l’intelligence ! […] Les armées du czar ne sont que des machines de guerre ; qu’un rayon d’intelligence y pénètre, et ces machines obéiront à l’intelligence et fonctionneront pour elle, comme le fer et le feu pour les besoins de l’industrie humaine.
Taine ou l’Intelligence moderne (1870 — … ?) […] Mais combien plus étonnante est l’histoire de cette intelligence qui n’a plus de sens, de ce professeur qui veut juger la littérature, l’art des peuples et qui ne les voit pas ! […] Taine est un exemple redoutable de ce que produit une intelligence orgueilleuse lorsqu’on l’abandonne à ses fantaisies, lorsqu’elle prétend sortir du petit royaume humain d’idées et de faits où il lui est permis de voyager. […] Il semble que les impressions du nerf optique n’atteignent pas la sensibilité générale et ne vont pas à l’intelligence. […] On ne veut plus de généraux dans les armées, ni de roi à la tête des peuples ; de même l’intelligence groupant les sensations est inutile à nos modernes.
Il la trouva traitée sans aucune intelligence du sujet. […] De hautes intelligences devront ainsi, en vue du bien de l’avenir, se condamner à l’ergastulum, pour accumuler dans de savantes pages des matériaux qu’un bien petit nombre pourra lire. […] Dans l’état actuel de la science, on peut trouver regrettable que des intelligences distinguées consacrent leurs travaux à des objets en apparence si peu dignes de les occuper. […] N’est-ce pas le progrès de la grammaire qui a perfectionné l’interprétation des textes et par là l’intelligence du monde antique ? […] Les esprits superficiels seraient tentés de croire qu’une intelligence élevée ferait œuvre plus méritoire et plus honorable en écrivant une histoire littéraire de l’Inde, par exemple, qu’en se livrant au labeur ingrat de l’édition des textes et de la traduction.
Certes, Virginie est une grande intelligence ; mais peu d’images et peu de souvenirs lui suffisent, comme au Sage peu de livres. […] Mais, pour le moment, nous, analyste et critique, qui n’oserions certes pas affirmer que notre intelligence est supérieure à celle de Virginie, constatons la crainte et la souffrance de l’ange immaculé devant la caricature. […] Signe de supériorité relativement aux bêtes, et je comprends sous cette dénomination les parias nombreux de l’intelligence, le rire est signe d’infériorité relativement aux sages, qui par l’innocence contemplative de leur esprit se rapprochent de l’enfance. Comparant, ainsi que nous en avons le droit, l’humanité à l’homme, nous voyons que les nations primitives, ainsi que Virginie, ne conçoivent pas la caricature et n’ont pas de comédies (les livres sacrés, à quelques nations qu’ils appartiennent, ne rient jamais), et que, s’avançant peu à peu vers les pics nébuleux de l’intelligence, ou se penchant sur les fournaises ténébreuses de la métaphysique, les nations se mettent à rire diaboliquement du rire de Melmoth ; et, enfin, que si dans ces mêmes nations ultra-civilisées, une intelligence, poussée par une ambition supérieure, veut franchir les limites de l’orgueil mondain et s’élancer hardiment vers la poésie pure, dans cette poésie, limpide et profonde comme la nature, le rire fera défaut comme dans l’âme du Sage. […] L’humanité s’élève, et elle gagne pour le mal et l’intelligence du mal une force proportionnelle à celle qu’elle a gagnée pour le bien.
« Les innombrables pensées diverses, qui se croisent et se mêlent à l’horizon du monde spirituel, sont le signe qui annonce le lever du soleil des intelligences. […] « Et les savants se troubleront dans leur science, elle leur apparaîtra comme un petit point noir quand se lèvera le soleil des intelligences. […] La liberté n’y revient pas comme un mot sonore et creux ; il y a une intelligence précise des misères du pauvre et des iniquités qu’il subit. […] Quand le Saint-Simonisme, dans sa brusque apparition, n’aurait eu d’autre effet que d’inspirer à des intelligences chrétiennes cette émulation d’inquiétude et de recherche à l’article des souffrances profondes, nées de l’excès industriel, il n’aurait point passé sans fruit pour le monde.
En vertu de son genre d’intelligence, la notion théologique n’a donc pas été abolie en lui, mais seulement obscurcie et faussée. […] Cette double notion de la terre et du ciel, la seule que puissent admettre également l’intelligence des penseurs et l’imagination des poëtes, M. […] Ne comprenant jamais l’action divine que comme il comprend l’action humaine, l’auteur de Terre et Ciel se croit fondé à tirer une impertinente induction de nous à Dieu, et cet abus de raisonnement, qui revient dans son livre comme un tic de son intelligence, produit pour conséquence de ces énormités qui coupent court à toute discussion. […] Jean Reynaud n’occupera une place élevée dans la hiérarchie des intelligences de son temps.
Et voilà la raison, sans doute, pourquoi il n’est pas d’homme ou de livre, si infime qu’il soit par l’intelligence, qui ne puisse être dangereux. […] Cet élégant nourrisson de madame de Staël qui n’a point épuisé sa nourrice, trop jeune du temps du Globe pour s’asseoir sur le canapé doctrinaire, mais qui s’est tenu sur le tabouret d’à côté, est un de ces esprits non sans mérite, à coup sûr, mais qui manquent de l’espèce d’énergie, nécessaire pour donner un démenti à leur vie et renverser dans leur intelligence des convictions fausses, même quand elles y manquent de profondeur. […] À l’époque, lointaine déjà, où M. de Rémusat écrivait son Essai de philosophie, il y avait en lui ce pétillement d’idées qui ferait croire à la force d’individualité d’une intelligence, mais ce n’était là qu’une illusion, due probablement à sa jeunesse. […] Au fond l’intelligence profonde de la double grandeur du temps et de l’homme lui échappe.
… Les idées d’un siècle épris de liberté jusqu’à la folie avaient été respirées par l’âme trop généreusement ouverte de l’éloquent dominicain, et elles étaient montées comme une vapeur à son intelligence. […] Quand il a un certain génie, cet homme-là s’appelle Shakespeare ou Molière ; quand il en a un certain autre, La Rochefoucauld, La Bruyère, Vauvenargues ; mais, quand il est prêtre et qu’il a quelque intelligence, il en sait plus sur la nature humaine que les hommes d’un génie supérieur au sien. […] Lacordaire, dont l’intelligence et la foi touchent parfois à la mysticité, est un de ces moralistes grandis par le prêtre. […] Cela serait-il vrai dans l’ordre de l’intelligence, comme dans l’ordre purement moral ?
Pour le spectateur, j’allais, je crois, dire pour le lecteur, il arrive quelquefois, au rebours de son désir, qu’elles retardent l’intelligence et l’embrouillent. […] Le mérite spécial de George Cruikshank (je fais abstraction de tous ses autres mérites, finesse d’expression, intelligence du fantastique, etc.) est une abondance inépuisable dans le grotesque. […] Pourtant il a, même à cette époque, fait de grandes lithographies très-importantes, entre autres des courses de taureaux pleines de foule et de fourmillement, planches admirables, vastes tableaux en miniature, — preuves nouvelles à l’appui de cette loi singulière qui préside à la destinée des grands artistes, et qui veut que, la vie se gouvernant à l’inverse de l’intelligence, ils gagnent d’un côté ce qu’ils perdent de l’autre, et qu’ils aillent ainsi, suivant une jeunesse progressive, se renforçant, se ragaillardissant, et croissant en audace jusqu’au bord de la tombe. […] Comment une intelligence humaine a-t-elle pu contenir tant de diableries et de merveilles, engendrer et décrire tant d’effrayantes absurdités ?
Ces passions violentes et fatales, même dans leur générosité ; ces utopies politiques et sociales, filles du xviiie siècle, et qui étaient devenues le rêve des plus chauds et des plus nobles cœurs ; ce prestige républicain, attaché à certaines maximes, à certaines formes de gouvernement ; cette éducation de collège et de livres, toute romaine : et Spartiate, sans l’intelligence de ce qui diffère dans les temps modernes ; enfin la guerre au dehors qui excitait et commandait l’énergie en toutes choses : voilà les causes réelles qui renversèrent la Constitution de 91 : et qui eussent renversé toute autre eu sa place ; voilà, en y ajoutant les faits et les mille incidents qui survinrent, ce qui amena le 10 août, la Convention » et la Montagne. […] Que dans un état de société si calme et sensé, au milieu d’une modération si profonde et d’une intelligence si impartiale, on vienne maintenant conseiller à ceux qui demandent haut les conséquences politiques des événements de juillet, de ne pas pousser à l’anarchie ; qu’on leur vienne parler à l’oreille du 10 août et des excès républicains ; que, s’ils persistent, on signale leurs doctrines comme imprudentes et pernicieuses : c’est presque une moquerie ; c’est faire une étrange confusion des choses et des temps. […] Ce qui nous fâche et nous étonne, c’est que des jeunes hommes qui semblaient pleins d’âme et d’avenir, d’une intelligence étendue et exercée, plus propre sans doute à spéculer qu’à agir, s’étant imaginé de tout temps qu’ils auraient, dans une révolution, à jouer le rôle de Girondins, se figurent probablement que l’heure est venue, et, par une étrange illusion, s’arrêtent, non pas devant des échafauds à dresser (nous n’en sommes pas là encore, et on abolira peut-être la peine de mort en attendant), mais devant les conséquences à tirer de leurs idées politiques.
En effet, si l’on sent vivement, la conception peut être en retard sur l’émotion ; l’intelligence n’arrive pas à se mettre au même pas que la sensibilité et l’imagination : alors la figure qui traduira le désir ou la passion sera vague et n’offrira point une idée claire à l’esprit. Même en fournissant à la pensée une expression telle quelle, elle s’opposera à la précision et à la clarté : on sera dupe soi-même de ses métaphores, et l’on ne se rendra point compte qu’on n’a exprimé que des impressions insaisissables à l’intelligence, intraduisibles dans le langage des idées pures, qu’on n’a rien dit en un mot de raisonnable, de scientifique, ou de pratique. […] Mais lorsqu’il s’agit de parler à l’intelligence, de lui découvrir une vérité théorique ou pratique, il faut se défier de ce langage figuré, qu’une certaine chaleur de sentiment, uni à une certaine paresse d’esprit, produit.
Il trouve sans doute sa rémunération dans cette satisfaction d’orgueil qu’il éprouve à voir que tous, même les plus forts, sont contraints d’avoir recours à son intelligence. […] Pourquoi se donnerait-il de la peine puisqu’avec un petit effort d’intelligence il arrive aisément à faire son profit de ce que les autres ont créé pour eux-mêmes ? […] Celle-ci mériterait la royauté par sa rouerie et son intelligence, si on en croit les Agni.
Trois espèces de raisons La première est la raison divine, dont Dieu seul a le secret, et dont les hommes ne savent que ce qui en a été révélé aux Hébreux et aux Chrétiens, soit au moyen d’un langage intérieur adressé à l’intelligence par celui qui est lui-même tout intelligence, soit par le langage extérieur des prophètes, langage que le Sauveur a parlé aux apôtres, qui ont ensuite transmis à l’église ses enseignements. […] Ces esprits grossiers encore croyaient de telles cérémonies indispensables, pour s’assurer de la volonté des autres, dans les rapports d’intérêt, tandis qu’aujourd’hui que l’intelligence des hommes est plus ouverte, il suffit de simples paroles et même de signes.
Leur principe, excellent et fécond, était que toutes les connaissances où consiste la matière de l’instruction ne sont pas à elles-mêmes leur but, mais sont seulement des moyens d’élever, de fortifier l’intelligence. […] Une grande question semble avoir dès lors fortement préoccupé son intelligence : il cherchait une certitude, et si vraiment, comme le disaient les théologiens, il n’y en avait pas hors de la vérité revélée. […] Cette fois il avait, non pas exécuté définitivement l’abdication de son intelligence, mais trouvé la vérité supérieure qui pouvait mettre l’unité dans sa vie intellectuelle et morale, la vérité où étaient compris toute certitude et tout bonheur. […] Il est curieux de remarquer combien Pascal, sur les sujets de morale individuelle ou générale, a l’intelligence et l’imagination obsédées par les Essais. […] Mais par là se découvre à nous une vérité qu’on s’est d’ordinaire refusé à voir : l’ascétisme janséniste de Pascal et les Pensées ne sont pas en contradiction avec le développement antérieur de son intelligence.
Je voudrais que l’historien, quand il n’est pas tout spécial et militaire, n’entrât dans cette voie de considérations qu’à son corps défendant, et qu’en tant que cela est strictement indispensable pour l’intelligence du fait tel qu’il paraît s’être passé. […] Il veut savoir, il veut s’expliquer le mouvement des choses humaines, mais se l’expliquer d’une manière si particulière, si précise, si appropriée à chaque ordre de faits et à chaque branche d’affaires, que cette seule connaissance, pourvu qu’on y atteigne, lui paraît constituer la condition fondamentale, l’essence même de l’histoire ; il appelle cela l’intelligence. Prenez les historiens les plus divers de ton et de caractère, « Thucydide, Xénophon, Polybe, Tive-Live, Salluste, César, Tacite, Commynes, Guichardin, Machiavel, Saint-Simon, Frédéric le Grand, Napoléon » ; ces hommes si diversement supérieurs et si grands historiens chacun dans son genre, ont tous en commun une qualité principale et la plus sûre de toutes, et cette qualité, c’est l’intelligence. Avec l’intelligence, et presque sans art d’ailleurs, on arrive, selon lui, à des narrations, non seulement suffisantes, mais à des chefs-d’œuvre, et il en cite pour preuve les histoires de Frédéric le Grand et de Guichardin. […] Enfin, et dans tous les cas, il fallait beaucoup plus que de l’intelligence, même en regardant et en comprenant très bien de son vivant la figure de Léon X, pour la retracer par le pinceau.
Un grand nombre de romanciers ont eu l’intelligence de cette obligation première et s’y sont conformés. […] Et j’oserai avancer que la perfection de cette forme littéraire exige tant de conditions et de si subtiles, qu’il faut, pour la comprendre et pour la goûter complètement, pour en tirer un autre profit que celui, très banal souvent, d’une anecdote, une intelligence déjà mûre et ornée. […] Les principes, tout au moins, apparaissent aux intelligences les plus simples, les moins préoccupées de littérature, et se formulent tout naïvement. […] Sans doute, le rêve d’un écrivain sera d’être compris, jusqu’aux nuances les plus secrètes de sa pensée, par une intelligence sœur de la sienne ; mais ce rêve n’est point incompatible avec celui d’être lu par la foule, de parler à l’âme d’un pays, ne fût-ce que par une page, par une phrase reproduite dans les journaux, citée dans des discours, traduite dans une chanson, et possédée et gardée ensuite par des milliers d’êtres humains dans le trésor des vérités acquises. […] Le secret de l’intelligence des livres est sûrement là.
Charles que de l’original lui-même, auquel une intelligence amie a bien voulu m’ouvrir un entier et facile accès. […] Eckermann n’avait en lui rien de supérieur ; c’était ce que j’ai appelé ailleurs une de ces natures secondes, un de ces esprits nés disciples et acolytes, et tout préparés, par un fonds d’intelligence et de dévouement, par une première piété admirative, à être les secrétaires des hommes supérieurs. […] sa présence enivrait, et chacune de ses paroles semblait élargir le cœur48. » C’est bien là l’effet que produisent en général la lecture et le commerce de Gœthe : étendre les vues ; élargir l’intelligence ; — Eckermann, qui l’a aimé, ajoute : élargir le cœur. […] Cousin, de « rester toujours à la maison. » Gœthe avait donc organisé sa vie avec ensemble, avec une suprême ordonnance, et dans l’intérêt de cette universalité de goûts qui était le caractère éminent de sa vaste intelligence. […] Une préface excellente est en tête de cette traduction et, je dois le dire, elle laisse de bien loin en arrière nos préface et avertissement pour l’intelligence élevée au sujet et pour la justesse des appréciations.
Il tient les hommes de son temps par le charme de son esprit, par la surprise aussi ; il tient leur intelligence, leur curiosité toujours en éveil, toujours dans l’attente, de ce qui peut venir du côté de Ferney. […] C’est un charme de l’entendre causer librement, avec son infatigable curiosité, son universelle intelligence, avec son esprit pétillant, ce don étonnant qu’il a de saisir des rapports inattendus, ingénieux ou cocasses, avec ses passions aussi toujours bouillonnantes et débordantes, qui ne laissent pas un instant refroidir les choses sous sa plume. […] Mais il a eu pourtant l’intelligence la plus alerte, la plus curieuse : une intelligence toujours en éveil, débrouillarde, lucide, merveilleux filtre d’idées ; personne n’a possédé plus que cet homme-là le don de réduire un gros système à une courte phrase, et de choisir le petit échantillon sur lequel on peut juger d’une vaste doctrine. […] Son style est exactement à la mesure de son intelligence, un style analytique, précis, limpide, qui résout ou fond toutes les difficultés, tout en lumière avec très peu de chaleur, merveilleusement adapté à l’expression des idées, c’est-à-dire de la nature dépouillée de ses formes concrètes et rendue intelligible par l’abstraction. […] Toujours son intelligence se révèle curieuse avant tout du vrai, du vrai rationnel : il juge toutes les actions de ses personnages ; il ne les a prises même que pour les juger, comme exemplaires de tous les préjugés ou sottises qu’il combat.
Le Roy, l’intelligence déforme tout ce qu’elle touche, et cela est plus vrai encore de son instrument nécessaire « le discours ». […] Certes il y a dans l’homme d’autres forces que son intelligence, personne n’a jamais été assez fou pour le nier. […] sinon avec son intelligence ? […] Que le cœur soit l’ouvrier et que l’intelligence ne soit que l’instrument, on peut y consentir. […] Peut-être devrons-nous conclure au « primat » de l’action ; toujours est-il que c’est notre intelligence qui conclura ainsi ; en cédant le pas à l’action, elle gardera de la sorte la supériorité du roseau pensant.
Chapitre VIII La mécanique cérébrale Jusqu’ici, nous ne nous sommes occupé que des rapports extrinsèques de la pensée et du cerveau, En effet, que la masse, le poids absolu ou relatif, les lésions matérielles, les développements anormaux, puissent correspondre à un certain degré d’intelligence, ce sont là des relations tout empiriques qui ne disent rien à l’esprit, de simples rapports de coïncidence et de juxtaposition qui laissent parfaitement obscure la question des vrais rapports, des rapports intrinsèques et essentiels du cerveau et de la pensée. […] Au reste, lors même qu’on croirait expliqué physiologiquement le phénomène de la mémoire, on n’aurait pas encore atteint jusqu’à l’intelligence elle-même. Car qui ne sait la différence qu’il y a entre l’intelligence et la mémoire ?
L’intelligence s’est fortifiée, ou, seulement enrichie, et dans Ergaste la clef a été trouvée qui nous ouvre Clitandre. […] C’est ainsi qu’à relire, on se compare à soi-même, on note les hausses et les décadences — plus souvent celles-ci — de sa sensibilité ; les pertes et les gains — plus souvent ceux-ci — de notre intelligence générale et de notre intelligence critique, et l’on trace ainsi les courbes de sa vie intellectuelle et morale.
Les beaux vers, ces perles du collier des nations jeunes, qu’elles ne mettent plus dans leur vieillesse, les beaux vers deviennent de plus en plus rares ; les âmes tarissent, les imaginations se décolorent, et ce douloureux et magnifique oiseau, au bec lumineux, à la gorge teinte de la pourpre éclatante de son cœur : la Poésie, meurt, étouffé sous le large pouce de ces intérêts matériels dont la main brutalise à cette heure les plus pures et les plus fortes intelligences… Seulement, s’il y avait à faire une exception en faveur des poésies sur lesquelles les reflets d’un enthousiasme sincère se voyaient encore, n’était-ce pas en faveur de celles qui s’étoilent d’un nom glorieux et s’appellent Poésies de l’Empire 57? […] pour peu que, libre de ces préoccupations de parti qui bandent les yeux aux intelligences avant de les tuer, comme on fait aux hommes qu’on fusille, on ouvre l’Histoire d’une main impartiale, on ne trouve nulle part, depuis que le monde romain a sombré, de chose humaine qui ait plus que l’Empire de Napoléon ce caractère grandiose, monumental et merveilleux, qui fait penser à l’Épopée. […] la Critique, qui reconnaît en lui de pareils dons et qui voudrait que l’homme qui les a en tirât parti davantage, comme une femme tire parti de sa beauté quand elle en a l’intelligence, la Critique, sympathique et pourtant sincère, n’a-t-elle pas le droit de regretter que l’incohérence des images, trop habituelle, vienne si souvent jeter son ombre heurtée sur des qualités faites pour être vues dans la lumière, et qui produiraient certainement l’effet imposant qu’on devrait en attendre si le poète savait les y placer et les y retenir ?
Nous n’admettons pas que tant de sensibilités, d’intelligences et d’expériences diverses, réunies sans concert préalable dans une commune impression, ne soient pas de plus sûrs garants du possible et du réel que le génie particulier d’un homme. […] L’artiste qui parle à notre intelligence, qui nous démontre scientifiquement, exactement, froidement, le mécanisme de l’âme humaine ne nous satisfait pas : le théâtre n’est pas une école pratique de psychologie. […] La science des artistes s’est étendue, l’intelligence du public s’est raffinée ; les uns cherchent à susciter, l’autre aime à ressentir des impressions plus complexes, qui doivent se fondre sans se confondre, et laisser subsister l’unité esthétique de l’œuvre. […] Au temps de Boileau, surtout, il n’en pouvait donner de plus nécessaires ; il n’en a point donné de plus efficaces ; et pour bien des intelligences même, c’étaient là des vérités neuves. […] Alors l’ouvrage n’est plus élégant, il n’est plus noble, qualités qui dirigent notre gratitude vers une intelligence : il est sublime, et nous emplit tout entiers de son objet.
Il doit donc y avoir, au fond des choses, sinon une intelligence semblable à l’intelligence humaine, du moins des propriétés, des dispositions qui aient quelque analogie avec cette intelligence. […] L’intelligence est la règle de l’activité ; mais nous ne pouvons dire a priori dans quelle mesure l’activité réalise l’intelligence. […] Chez Kant, au sein même de l’intelligence apparaît le jugement synthétique a priori que l’intelligence est obligée d’accepter comme une sorte de fait métaphysique, sans le comprendre véritablement. […] Dans l’élevage, l’homme parvient, par l’art et l’intelligence, à modifier les formes animales. […] La concurrence vitale est dans la nature le substitut de l’intelligence.
Mais si l’on considère de l’humanité son âme, son intelligence, sa moralité, sa destinée évidemment supérieure à cette vie et à cette mort entre lesquelles elle s’agite, sa connaissance de Dieu, l’hommage qu’elle rend à ce maître suprême de ses destinées individuelles ou collectives, la transition entre le fini et l’infini dont elle paraît être le nœud par sa double nature de corps et de pensée, sa conscience, faculté involontaire, révélation, non de la vérité, mais de la justice, son instinct évidemment religieux, son inquiétude sacrée qui lui fait chercher son Dieu, avant tout créature sacerdotale, chargée spécialement par l’Auteur des êtres de lui rapporter en holocauste les prémices de ce globe, la dîme de l’intelligence, la gerbe de l’autel, l’encens des choses créées, la foi, l’amour, l’hymne des créations muettes, la parole qui révèle, le cri qui implore, l’obéissance qui anéantit le néant devant l’Être unique, le chant intérieur qui célèbre l’enthousiasme, qui soulève comme une aile divine l’humanité alourdie par le poids de la matière, et qui la précipite dans le foyer de sa spiritualité pour y déposer son principe de mort et pour y revêtir d’échelons en échelons sa vraie vie, son immortalité dans son union à son principe immortel ! […] Vous voyez que la géographie, bien comprise, est aussi un cours d’intelligence et de théologie. Les mondes ne sont-ils pas les caractères de l’imprimerie divine avec lesquels l’Infini écrit ses leçons à l’intelligence de ses créatures, le catéchisme de l’infini ?
Et cependant trente ans encore s’écouleront après Paul et Virginie (1787) ; une grande intelligence et un génie supérieur, Mme de Staël et Chateaubriand, se dépenseront sans que l’on aperçoive encore le port où l’on paraissait toucher. […] Mais le monde dont l’inquiète analyse est excitée par la vaine peur de paraître dupe, qui dissout par jeu la foi, l’autorité, la tradition, et ne tend qu’à mouvoir son intelligence, sans poursuivre de solides ou bienfaisants résultats, le monde s’épuise dans la continuité de l’action intellectuelle, sans but et sans passion. […] Profondément indifférente à toutes ces œuvres de l’esprit français qui ne parlaient qu’à son esprit, secouée par instants et réveillée au contact de Shakespeare, elle a le goût incurable cependant : son intelligence n’est ouverte qu’à Voltaire. […] Mme du Deffand n’a jamais pu se défaire de sa lucidité cruelle, de son spirituel sang-froid d’intelligence, de son sec, conscient et critique langage.
Ce fut un superbe pamphlétaire, dont l’absolu désintéressement, l’humilité profonde, mirent à l’aise le tempérament ; écrivain puissant, nourri des grands maîtres, au commerce desquels il a développé son originalité, ayant une rare intelligence littéraire, il a écrit des pages qui vivront, par la vivacité mordante de l’esprit ou par l’éclat violent de la passion. […] Un autre normalien, tout voltairien d’esprit et de style, conteur exquis et charmant causeur, d’intelligence plus agile que forte, et plus en surface qu’en profondeur, impertinent, tapageur et gamin, Edmond About843, fut un indépendant agréable à l’empire, qui le protégea, le décora : il y avait un point pourtant sur lequel About ne transigeait pas, c’était la question religieuse ; il représentait l’opinion anticléricale dans le parti bonapartiste, et il combattit toujours vivement le gouvernement lorsqu’il voulut se servir de l’Église ou parut la servir. […] Il saisit de toute son intelligence, de tout son cœur le rôle qui lui était présenté ; et tout en lui, défauts et qualités, y servit. […] Ce qui maintient et produit la grande, la retentissante éloquence, ce sont les luttes de principes, les questions universelles : à mesure que les intérêts deviennent plus nombreux et plus pressants, l’orateur est sollicité à devenir un homme d’affaires, capable surtout d’exposer clairement, de discuter précisément, sans bruyants éclats, sans gestes violents, qui troublent l’intelligence et distraient l’attention.
Tout comme l’affectivité et l’intelligence, la volonté est diverse et inégale chez les différents individus humains. […] La société veut s’assujettir les volontés comme les sensibilités et les intelligences. […] Nous pouvons distinguer ici, comme nous l’avons fait précédemment, à propos de l’intelligence et de la sensibilité, deux espèces d’individualisme. […] * * * Nous arrivons au terme de l’analyse à laquelle nous nous sommes proposé de soumettre l’intelligence, la sensibilité et la volonté, en vue d’y relever les conflits entre le moi et le nous, entre la personnalité et la sociabilité.
Maintenant, debout tous, à l’œuvre, au travail, à la fatigue, au devoir, intelligences ! […] Que ces philosophes involontaires d’un despotisme possible y songent, endoctriner les masses contre la liberté, entasser dans les intelligences l’appétit et le fatalisme, une situation étant donnée, la saturer de matérialisme, et s’exposer à la construction qui en sortirait, ce serait comprendre le progrès à la façon de ce brave homme qui acclamait un nouveau gibet, et qui s’écriait : À la bonne heure ! […] Montrer à l’homme le but humain, améliorer l’intelligence d’abord, l’animal ensuite, dédaigner la chair tant qu’on méprisera la pensée, et donner sur sa propre chair l’exemple, tel est le devoir actuel, immédiat, urgent, des écrivains. […] Versez tous les esprits depuis Ésope jusqu’à Molière, toutes les intelligences depuis Platon jusqu’à Newton, toutes les encyclopédies depuis Aristote jusqu’à Voltaire.
Tous, à quelque pâturage d’opinion qu’ils appartiennent, ont senti l’importance de ce document qui leur tombait presque du ciel — car c’était de la main d’un pieux missionnaire — et qui brillait des deux qualités distinctives de tout document imposant : la probité et l’intelligence. […] Il ne sera dépassé et mis en oubli que par un livre d’égale force d’intelligence, lequel, représentant, comme celui-ci, dix ans de travaux, d’efforts, de patience inouïe, prendra les notions sur la Chine là où Huc les a prises, et nous en donnera l’équivalent en les avançant autant que l’ouvrage du courageux missionnaire les a avancées. […] Si les philosophes du salon de madame Necker reconnaissaient, un soir, « qu’un caractère est toujours simple quand une seule chose l’intéresse », comment un missionnaire, qui n’a que l’idée fixe de sa foi à propager, pourrait-il manquer, quoi qu’il fasse, de cette simplicité qui est la plus haute expression humaine dans l’ordre de l’intelligence ou de la vie ? […] Le peuple, musqué jusqu’à l’intelligence, chez lequel il s’écrit de telles choses, sans nom d’auteur, est certainement, en masse, fort au-dessus de tous ses mandarins « à globule rouge » ou « à globule bleue », mais ce n’est qu’un malheur de plus, car il périra faute de chefs.
Et il le sent si bien, cet esprit positif au fond, qui arrache un si riche lambeau de bon sens à la philosophie contemporaine dont il est féru, que, malgré sa tendance à généraliser, malgré les catégories qu’il dresse des différentes formes de la main correspondant aux différentes spécialités de l’intelligence, il n’ose pas donner à son livre un autre nom que celui d’aperçu, et qu’il dit dans l’introduction, avec une modestie antiphilosophique : « Qui n’a lu Gail et ses adeptes enthousiastes, les phrénologistes ? […] Or, les signes indicateurs de nos entraînements et de nos instincts, que Gall a vus dans les protubérances du crâne et Lavater dans les traits de la physionomie, je crois les avoir trouvés — non pas tous, mais ceux qui ont trait à l’intelligence, — dans les formes de la main… » Posé et annoncé dans de tels termes, le livre de d’Arpentigny est certainement acceptable, et il n’est pas nécessaire de recommencer, contre des prétentions qui n’existent pas, le travail terrible que le philosophe Hamilton fit un jour, dans l’Edinburgh-Review, contre Gail. […] Ce désaccord profond entre le tempérament, ou la seconde nature d’une longue habitude, et la métaphysique qu’on s’est arrangée dans l’intelligence, établit un contraste choquant entre l’esprit qui a pensé la Science de la main et le talent qui l’a écrite. […] Il y a, en d’Arpentigny, les impatientants contrastes que nous ayons déjà signalés dans un esprit, parent du sien du reste, qui croyait comme lui à la physiologie, qui a voulu expliquer l’amour par elle comme lui a voulu expliquer l’intelligence, et qui, comme lui, avait vécu de cette vie militaire dont l’influence est un bénéfice pour tous les ordres d’esprits.
Au lieu de se suicider, il passa en Algérie, où il montra une intelligence profonde de la colonisation et où il se fût créé une haute position et une vaste fortune si la révolution de 1848 n’avait renversé tous ses plans. […] C’était cette vieille idée de la conquête, qui fait qu’un homme, à la tête de quelques hommes comme lui, s’empare d’un pays mal gouverné, malheureux, exploité par des corrupteurs imbéciles, et le pousse dans des voies de prospérité, d’intelligence et de gouvernement. […] … Si le coup d’œil, le courage, le dévouement, le bon droit, le droit de l’intelligence et du juste (car l’aventurier n’avait rien du flibustier en lui, quoiqu’on l’ait tué comme un pirate), oui ! […] Raousset, dans la conduite de ses plans, n’a commis ni faute d’attention, ni faute d’intelligence, ni faute de justice.
Or, cette histoire mal connue encore, malgré des travaux honorables dans lesquels déjà l’intelligence et la justice ont introduit leur pointe de lumière, cette histoire reprise aujourd’hui par M. de Chalambert, fera-t-elle cette fois le jour, — le grand et pur jour ? […] Et de fait, quand on s’attaque à cette race molle et têtue d’intelligences qui ont la patience de la répétition sous le démenti et qui se recouchent éternellement dans l’ornière d’où on les a chassés, besoin est, pour innocenter la Ligue, cette grande audacieuse, qui paraît presqu’une grande coupable aux honnêtes esprits que l’audace a toujours troublés, oui, besoin est de quelque chose de plus que de cette phrase dont la vérité trop banale ne saurait entamer la carapace de préjugés sous laquelle l’opinion traîne sa vie. […] Elle était bien, comme on le dit avec plus ou moins de force et comme le répète aujourd’hui son nouvel historien avec une tranquillité d’intelligence et d’expression qui croit n’avoir pas besoin d’insister, elle était bien, cette raison supérieure, dans le catholicisme du pays et dans sa conscience religieuse. Mais pour les hommes chez qui la conscience religieuse n’est pas très développée, pour les hommes que le catholicisme trouve hostiles ou seulement indifférents, il aurait été bon de sortir de ces termes devenus trop amples et trop flottants de conscience religieuse et de catholicisme, et, puisqu’on différait de principes, de pensée ou de sensation, de montrer à l’intelligence politique des faiseurs d’histoires, ce que c’était, conscience à part et vérité divine à part, que le catholicisme en France, quand la Ligue se leva pour le défendre.
Il ne comprend réellement pas le mensonge : cela dépasse son intelligence et le frappe littéralement de stupidité. […] Les autres acteurs du livre n’ont pas d’oreilles ou d’intelligence pour eux. […] Il était né avec un cœur riche, chaud, facile à séduire, mais aussi avec une intelligence ferme, sage et grave. C’est dans cette intelligence qu’il trouva son salut. […] Quel congé amer le cœur lassé et malade donne à l’intelligence, et avec quelle inexorable sévérité l’intelligence, ainsi congédiée, refuse de reconnaître la légitimité de cette révolte du cœur !
L’intelligence large accepte, étudie le monde entier et jouit d’assister à son mouvement. […] La loi de l’intelligence humaine est le progrès indéfini. […] J’ai pensé qu’il y avait un grand pédantisme et un grand manque d’intelligence dans tout cela. […] La peinture deviendrait sociale et utile, elle servirait à la marche de l’intelligence générale. […] Et voilà leur bon sens, leur intelligence !
On peut même dire qu’il y a un drame immanent à l’intelligence de Proust et que c’est celui-là. […] Oui, mais chez Proust, il ne disparaît jamais, et malgré le renforcement qu’il peut recevoir de ses affections, il reste essentiellement un besoin de l’intelligence, la forme même de son intelligence. […] C’est un effort de l’esprit, de l’intelligence sur l’informe qui s’agite en nous et c’est une victoire de cet esprit, une victoire de cette intelligence. […] Dès son enfance éprouver lui prend toutes ses forces, sauf une : l’intelligence. […] De cette tempête sentimentale, son intelligence arrive à fixer les moindres contours.
Malgré ces commencements difficiles, Audin la fonda, cette maison, et la rendit bientôt florissante, à force d’intelligence spéciale, d’activité et de bonne foi. […] En fait de talent et d’intelligence, ce n’est pas comme en fait d’hommes. […] Dans une lettre rendue publique, il s’est confessé de cette histoire avec l’humilité d’une intelligence chrétienne qui ne recule ni devant les aveux ni devant les réparations. […] Audin avait l’instinct de ces choses ; mais, chrétien de cœur comme il l’était d’intelligence, il avait aussi l’humilité qui s’efface et l’abnégation qui se sacrifie. […] Aussi vous rencontrez des littérateurs au courant de l’intelligence contemporaine qui demandent naïvement « ce que c’est qu’Audin ».
Il est très difficile de marquer aujourd’hui où s’arrête la littérature : l’intelligence est diffuse, la curiosité vaste ; hors des genres définis qui promettent des impressions d’art, jamais, je crois, plus d’ouvrages spéciaux n’ont pris place dans la littérature. […] Il a réduit au minimum la subjectivité, impossible à éliminer absolument de tous les travaux où l’intelligence ne peut se substituer l’automatisme des instruments. […] Renan941 a le charme, la grâce, l’imagination, l’ironie, la souplesse délicieuse de l’intelligence, la richesse éblouissante des idées : peintre exquis de paysages, pénétrant analyseur d’âmes, penseur profond ; ce sont qualités et séductions que nul ne conteste à son œuvre. […] Mais il a agi sur quelques intelligences, quelques âmes d’élite, et par elles passe, par elles surtout passera dans le domaine commun de la pensée le meilleur de l’œuvre du maître. […] L’idéalisme philosophique n’est pas à l’usage de-toutes les intelligences : l’idéalisme religieux est accessible aux plus humbles esprits.
Le commentaire est dans le ton sans doute, mais pourquoi ne serait-il pas aussi dans une parenthèse rapide, jetée en courant, qui n’interrompt rien et qui accélère l’intelligence ? […] Dans le cas présent, on a affaire à des intelligences neuves, non pas molles et tendres comme celles des enfants, à des intelligences en général droites, saines, bien qu’en partie atteintes déjà par les courants déclamatoires qui sont dans l’air du siècle, à des intelligences mâles et un peu rudes, peu maniables de prime-abord, et qui deviendraient aisément méfiantes, ombrageuses, qui se cabreraient certainement si on voulait leur imposer. […] Tout cela dit, et cette noble inspiration agissant, il restera toujours dans la pratique une difficulté très grande, celle d’aborder ainsi sur une foule de sujets, et sans avoir l’air de professer, des intelligences peu préparées et qui n’ont pas reçu une première couche régulière de connaissances.
Ces divisions infinies annonçaient, par leurs précautions multipliées, une intelligence avertie de l’étroitesse de la route et du débordement d’erreurs qui l’entoure, décidée à ne pas faire un pas avant d’avoir exploré ou assuré le terrain qu’elle allait fouler. […] Bien que mon intelligence ne considérât pas sans quelque orgueil son ouvrage, mon âme ne pouvait s’accommoder à un état si peu fait pour la faiblesse humaine ; par des retours violents elle cherchait à regagner les rivages qu’elle avait perdus ; elle retrouvait dans la cendre de ses croyances passées des étincelles qui semblaient par intervalles rallumer sa foi. […] « Je ne comprends pas que, prenant le scepticisme corps à corps, on prétende démontrer que l’intelligence humaine voit réellement les choses telles qu’elles sont. Comment ne s’aperçoit-on pas que cette prétention n’est autre chose que celle de démontrer, l’intelligence humaine par l’intelligence humaine ?
L’intelligence, pourrait-on dire, est faite d’ignorance en même temps que de connaissance, de lacunes en même temps que de plénitude : les lacunes aident à la discrimination ou séparation, puis à la classification, en un mot au jugement. […] Il est donc bien vrai que la démarche primitive et essentielle de l’intelligence est le jugement. […] C’est ce côté actif qui, réfléchi dans l’intelligence et y prenant conscience de soi, constitue proprement l’affirmation. […] La réaction de l’intelligence et de la volonté même est absolument déterminée par la passion antécédente, qui caractérise la sensation ou la représentation. […] On peut, par le langage, mal traduire l’état réel de son intelligence, mais la croyance interne et vraie est toujours une traduction exacte de la contrainte subie par nos facultés sensitives et représentatives.
Sa sensibilité parle, plutôt que son intelligence. […] Il n’y a rien dans l’intelligence, qui n’ait d’abord été dans les sens. […] C’est que le monde se reflète en eux bien plus nettement que dans les intelligences ordinaires. […] L’intelligence est le luxe de la vie, luxe dangereux pour la vie qu’elle contemple avec des yeux de méduse et de basilic ; la science est la nourriture de l’intelligence. […] Peut-être à rien qu’à fausser les intelligences.
Les tons en littérature sont d’autant plus beaux qu’ils sont plus vrais et plus purs ; à l’érudit, au critique appartiennent l’universalité et l’intelligence des formes les plus diverses ; au contraire, une note étrangère ne pourra qu’inquiéter et troubler le poète original et créateur. […] Or, les procédés par lesquels la langue vulgaire s’est élevée à la dignité de langue littéraire sont ceux-là mêmes par lesquels on peut en acquérir la parfaite intelligence. […] L’éducation philologique ne saurait consister à apprendre la langue moderne, l’éducation morale et politique, à se nourrir exclusivement des idées et des institutions actuelles ; il faut remonter à la source et se mettre d’abord sur la voie du passé, pour arriver par la même route que l’humanité à la pleine intelligence du présent.
Obstacles qui l’arrêtent : Le snobisme et l’intelligence. […] De même la fortune ne se fait qu’avec des ruines, l’intelligence n’acquiert qu’en détruisant. […] L’intelligence est négative ! […] Et ce n’est pas avec son intelligence qu’il jugeait les écrits, c’est avec son caractère. […] Son intelligence s’est développée aux dépens de son caractère, c’est vrai ; mais elle lui enseignera bientôt que le caractère est aussi indispensable que l’intelligence, et il s’en fera un dont seul il connaîtra l’artificialité.
L’auteur est ainsi amené à développer ses idées et ses réflexions sur l’âme, sur l’intelligence, sur les vérités senties et les vérités démontrables, sur la certitude. Il différencie radicalement les facultés de ce qu’il appelle l’intelligence d’avec les facultés de l’âme ; il fait de la première la science purement terrestre, le résultat élaboré des organes ; il fait de la seconde une émanation de Dieu et un pur esprit ; et c’est en s’attachant aux facultés de cette partie immatérielle qu’il pense arriver avec évidence aux vérités sublimes et naturelles qui doivent diriger toute une vie.
Si on a été attentif à regarder en soi comme au dehors, si on a essayé de noter ses émotions, d’en saisir les causes, les effets, les nuances, les degrés, la communication ira se resserrant chaque jour entre la sensibilité et l’intelligence ; les émotions multiplieront les idées, l’esprit affinera le cœur, et la subtilité du jugement s’augmentera avec la délicatesse du sentiment. […] Si elle écrit au courant de la plume une page qui est un chef-d’œuvre, c’est qu’elle avait au cours de toute sa vie lu, pensé, causé ; c’est que dans son intelligence toujours active les sentiments, les idées circulaient incessamment comme le sang dans son corps et entretenaient la vie ; que toute son âme était toujours debout, prête au service, et que chaque mot, chaque phrase était le produit et l’expression de toute son existence intellectuelle et morale.
Mais enfin si l’on cherche dans l’entretien d’autrui autre chose qu’une distraction sans effort, une occasion de sommeil pour l’intelligence accablée, autre chose que la satisfaction de bavarder, de manifester et d’assouvir une curiosité frivole ou une malignité irréfléchie, si l’on veut penser tout haut, et écouter penser les autres, il y a encore beaucoup à tirer de la conversation. […] La parole est ainsi la meilleure épreuve de l’idée, qu’elle fait sortir des régions vagues et obscures de l’intelligence : elle la crée autant qu’elle en est créée.
On voit ici la conception du grand dans son principe : le reste n’en est qu’une ombre, comme l’intelligence créée n’est qu’une faible émanation de l’intelligence créatrice ; comme la fiction, quand elle est belle, n’est encore que l’ombre de la vérité, et tire tout son mérite d’un fond de ressemblance. » 66.
Mais Cantu, dans son histoire, n’a pas même d’esprit de parti : il n’est d’aucune opinion, pas même de la sienne ; il va d’une idée à une autre, avec le mouvement animal d’une intelligence qui se prend à tout comme celle d’un enfant. […] Avec une rare impartialité d’intelligence et dans des notes qui clarifient le texte, le discutent ou l’infirment, il s’est opposé à des idées sans justesse et à des assertions sans valeur.
Ainsi va le monde de l’intelligence ; les esprits divers sont comme les glaces d’une longue galerie qui se répètent l’une l’autre sans fin, sans cesse. […] On comprit qu’en littérature, comme en physique, il faut aller du fait à la loi, et l’on se mit à étudier les productions de l’intelligence. […] Mais la doctrine platonicienne, plus large et moins positive que celle du Lycée, moins accessible à des intelligences à la fois étroites et subtiles, moins flexible aux exigences de la méthode et de l’enseignement scolaires, avait été presque entièrement délaissée, pendant le moyen âge, au profit de son heureuse rivale. […] Je les admire quand ils parcourent en quelques semaines le vaste champ de l’intelligence, passant de l’histoire à la poésie, de la métaphysique à l’économie sociale, toujours à l’aise dans chaque sujet nouveau, toujours en apparence sur leur propre domaine. […] — Non ; le mouvement social n’étouffe point le sens littéraire : tout ce qui éveille l’intelligence d’une nation est moins pour la poésie un obstacle qu’un moyen.
Recueillant précieusement les témoignages des historiens et des voyageurs, il en déduit que l’homme n’a en réalité que deux caractères qui le distinguent spécialement de l’animal, et il aboutit à cette définition : « L’homme est un animal moral et religieux. » Telles semblent être, en effet, à une première vue, les seules propriétés que l’homme n’ait point en partage avec les animaux, lesquels ont comme lui la sensibilité, l’intelligence, l’activité volontaire. […] C’est une sensation de crainte sans le moindre mélange de respect, d’adoration pour un être dont ils reconnaîtraient la supériorité de puissance, d’intelligence ou de bonté. […] Cette différence ne tiendrait-elle pas à une différence essentielle d’intelligence entre l’animal et l’homme ? […] Une preuve entre mille, c’est que chez l’homme le sens esthétique est en raison du développement de l’intelligence. […] La supériorité du langage humain sur le langage animal tient donc à la supériorité de l’intelligence de l’homme sur l’intelligence de la bête.
L’intelligence n’est point une machine ; elle n’est pas faite pour produire sans relâche : ses œuvres se pèsent et ne se mesurent pas. […] Quel magnifique spectacle que de voir cette patrie universelle des intelligences s’étendre sans limites dans l’espace et le temps, embrasser dans son sein l’ancien et le nouveau monde, établir partout le règne de l’opinion, adoucir les horreurs de la guerre et faire respecter même dans les combats les saintes lois de l’humanité3. […] Sans préjudice des cultes particuliers, que ses membres professent ou révèrent, elle a un culte général, commun à tous, comme son dogme, c’est d’établir le règne de Dieu sur la terre comme au ciel , de faire passer dans les faits l’action des lois que l’intelligence a découvertes dans le domaine des idées. […] La vie de l’intelligence est plus douce quand on la vit plusieurs ensemble. […] Vous distribuez des places, des faveurs de toutes sortes : réservez pour eux les emplois qui exigent de l’intelligence, mais qui laissent des loisirs.
Nous soutenons et nous allons démontrer que les positions respectives de la parole intérieure et de la pensée dans le temps, bien loin d’être déterminées par une loi unique, varient, d’une part selon le degré de l’effort personnel déployé par l’intelligence, et, d’autre part, suivant que cet effort est un effort d’invention pure ou un effort d’assimilation. […] Il est donc vraisemblable que, si aujourd’hui nous comprenons immédiatement et sans effort, c’est que nous profitons de nos efforts passés : le mot et l’idée ont été peu à peu rapprochés par l’habitude, et l’intervalle est devenu si faible qu’il est maintenant inappréciable à la conscience ; il reparaît seulement dans les cas exceptionnels où un effort d’intelligence est nécessaire pour interpréter ce que nous lisons ; mais nous sommes en droit d’induire qu’il n’est jamais absolument nul et que toujours l’idée succède au mot. […] Cette description contient plus d’une inexactitude, et surtout elle ne correspond qu’à l’état adulte de l’intelligence ; à l’âge où l’observation psychologique est devenue possible247, les choses se passent à peu près ainsi ; elles ne peuvent se passer de même chez les enfants. En somme, ni l’état primitif, ni l’état constant de l’intelligence ne sont bien représentés dans l’analyse qui précède. […] Egger résume et adapte à sa problématique : « noein phantasia tis esti, è mè aneu phantasias », c’est-à-dire « l’opération de l’intelligence (=intellection) est une sorte de représentation ou ne va pas sans représentation » (trad. d’après R.
Pourtant, dans une société où l’industrie, et les arts dont elle dispose, gagnaient de plus en plus et pénétraient la vie ; où les sciences physiques, dans leurs mille applications, se partageaient le monde ; où mille voies légitimes étaient offertes à l’activité et à l’intelligence humaine, il était difficile (chose singulière !) […] Avec une intelligence forte et un travail vigoureux, on pouvait sans doute tenir le grand chemin, parcourir la route entière des études classiques, et au plus vite, en toute hâte, se diriger encore à temps, si l’on en avait la volonté, vers les études spéciales, mathématiques et autres, qui ouvraient l’entrée des grandes écoles savantes ; mais la question alors était tout ou rien, et un faux pas au terme faisait échouer. […] Bien des jeunes gens s’en fussent accommodés encore ; les familles, elles, ne s’en accommodaient pas autant, et l’on maintenait jusqu’au bout, dans une voie d’études trop souvent suivies à contrecœur, des intelligences sans vocation qui s’y traînaient et n’y marchaient pas. […] Il faut, donc les épurer, les simplifier, les éclairer sous tous leurs aspects d’une lumière si vive, que, dans le jeune auditoire, aucune intelligence ne puisse rester rebelle au sentiment de ces grandes vérités. […] Car c’est dans la nature, bien plus que dans les livres, qu’il faut chercher des inspirations pour un enseignement qui doit demeurer élémentaire, pratique et toujours approprié aux intelligences moyennes… À mesure que l’enseignement se fortifie, on peut donner aux exercices un caractère plus profitable ; poser aux élèves des problèmes numériques et en faire contrôler la solution de temps en temps… Par quelques exercices de ce genre, les jeunes gens apprennent bientôt à calculer, à peser, à mesurer, et on leur inspire le goût de l’expérience avec la confiance dans ses enseignements.
Je m’inspirais de l’intelligence de Zadig qui, pour trouver la trace de je ne sais plus quel prince ou quelle princesse, — à cheval, je crois, — ne demandait rien aux gens et cherchait dans les choses. […] A force de remuer les choses dans la pensée, elles changent de valeur et on éprouve cette lassitude de l’intelligence qui ne la fait se reposer que dans le paradoxe ; et il arrive que parfois le distingué vous devient si commun, l’esprit vous paraît si bête, et qu’enfin tout ce qu’on préconise vous est si peu, qu’on irait volontiers boire au cabaret avec des charbonniers pour trouver quelque distinction, — et qu’on y va plus ou moins. » Tantôt il y met plus de tendresse et un accent ému, éloquent, qui élève et passionne le regret : « Oh ! […] que j’aurais aimé à souffler sur ton front, entre deux baisers, cette puissance de tout voir sans éblouissement ; j’aurais voulu te faire regarder tout en face ; j’aurais surtout aimé à te voir sourire dédaigneusement au nez de tous ces valets de l’intelligence qui vont, la livrée au cerveau, servant chacun quelque chose à tout le monde, — Pierre une philosophie, — Paul un scepticisme, — celui-ci une croyance, celui-là un blason ; un autre ne portant rien, ou seulement portant des gants jaunes… Je t’aurais montré : Ceci est un maçon, ceci est un marquis, mais ceci est un homme… * « Nous aurions eu ensemble l’esprit de tout prendre et de laisser tout, même l’esprit, quand il serait devenu de trop entre nous. […] ne vous souvenez-vous pas avec quelque joie au cœur de ce doux moment qui a commencé nos rapports, de cette soudaine et délicieuse intelligence… Mais les femmes ne veulent croire qu’à l’amour parlé ; il faut leur chanter les désirs, il faut prêcher quand le cœur bat. […] Car un des secrets de l’amour, il le lui dira au dernier moment, « c’est qu’il faut toujours qu’un homme domine une femme, — par la force, par l’intelligence, par l’orgueil, par la fierté, par tout ce qui est mâle en lui ; — et c’est pour cela, ajoute-t-il, qu’on n’aime jamais bien une femme qu’on ne comprend pas, qu’on craint de blesser en frappant autour d’elle des choses qu’on ne saisit pas bien… Que voulez-vous qu’un homme fasse de l’orgueil d’une femme ?
L’Égypte avait été le pont d’une seule arche qui avait uni intellectuellement la Chine et les Indes littéraires et religieuses à la Grèce ; mais ce pont s’est écroulé dans le Nil, et nous ne connaissons de cette intelligence disparue que ce qui en avait passé en Grèce ou à Rome. […] Il trouva Crithéis aussi modeste, aussi laborieuse et aussi habile qu’elle était belle ; il s’attacha à l’enfant, dont l’intelligence précoce faisait présager je ne sais quelle gloire à la maison où les dieux l’avaient conduit ; il proposa à Crithéis de l’épouser, et de donner ainsi un père à son fils. […] Homère, dont l’âme était ouverte aux leçons de Phémius par sa tendresse, et que la nature avait doué d’une intelligence qui comprenait et d’une mémoire qui reproduisait toutes choses, récompensait les soins du vieillard et réjouissait l’orgueil de Crithéis. […] Il lui apprend le patriotisme par le récit des exploits de ses héros, qui quittent leur royaume paternel, qui s’arrachent des bras de leurs mères et de leurs épouses pour aller sacrifier leur sang dans des expéditions nationales, comme la guerre de Troie, pour illustrer leur commune patrie ; il lui apprend les calamités de ces guerres dans les assauts et les incendies de Troie ; il lui apprend l’amitié dans Achille et Patrocle, la sagesse dans Mentor, la fidélité conjugale dans Andromaque ; la piété pour la vieillesse dans le vieux Priam, à qui Achille rend en pleurant le corps de son fils Hector ; l’horreur pour l’outrage des morts dans ce cadavre d’Hector traîné sept fois autour des murs de sa patrie ; la piété dans Astyanax, son fils, emmené en esclavage dans le sein de sa mère par les Grecs ; la vengeance des dieux dans la mort précoce d’Achille ; les suites de l’infidélité dans Hélène ; le mépris pour la trahison du foyer domestique dans Ménélas ; la sainteté des lois, l’utilité des métiers, l’invention et la beauté des arts ; partout, enfin, l’interprétation des images de la nature, contenant toutes un sens moral, révélé dans chacun de ses phénomènes sur la terre, sur la mer, dans le ciel ; sorte d’alphabet entre Dieu et l’homme, si complet, et si bien épelé dans les vers d’Homère, que le monde moral, le monde matériel, réfléchis l’un dans l’autre comme le firmament dans l’eau, semblent n’être plus qu’une seule pensée et ne parler qu’une seule et même langue à l’intelligence de l’aveugle divin ! Et cette langue encore cadencée par un tel rythme de la mesure est pleine d’une telle musique des mots que chaque pensée semble entrer dans l’âme par l’oreille, non seulement comme une intelligence, mais aussi comme une volupté !
V Il faut que l’historien soit homme d’État : car l’histoire est pleine de politique, et s’il n’a pas l’intelligence de la politique, cette bonne conduite de la vie appliquée en grand aux nations, aux sociétés, aux empires, il écrira au hasard des récits pleins d’ignorance, de contresens et de non-sens. […] Les intelligences lentes ou faibles doivent renoncer à le lire : il n’écrit que pour ses pairs. C’est le pain des forts, c’est l’historien des hommes d’État, des philosophes, des sages, des poètes ; il lui faut, comme à Bossuet, un auditoire de rois de l’intelligence : c’est sa gloire. […] « La maison des Jules César et des Claude étant éteinte, l’adoption découvrira avec intelligence le meilleur des Romains pour succéder à l’empire. […] C’est le résumé d’une longue vie publique dans une haute intelligence touchant aux limites de la vie, et jugeant le passé, le présent, l’avenir, avec le calme du soir et le sublime désintéressement du lendemain.
Il est tout occupé à son œuvre de résurrection, qu’il mène avec une rare intelligence : ses idées générales ne lui servent plus qu’à distinguer sûrement les détails aptes à figurer comme types. […] Son excuse, c’est tout ce qu’il a souffert : les impressions de son premier âge ont été le froid, la faim, la maladie, l’incertitude du lendemain ; dans sa douloureuse enfance de misère et de lutte, son caractère s’est aigri, sa sensibilité s’est surexcitée, son intelligence s’est aiguisée, son imagination s’est enfuie éperdument loin des réalités qui blessent. […] Il en tira parti avec une allégresse, une activité, une intelligence admirables. […] Là, son âme de poète, plus tendre, plus enthousiaste, plus juvénile que jamais, s’ouvre à la grande et divine nature, qui toujours, du reste, avait été la religion de son intelligence, la joie de ses sens. […] et quelle rare, large, vive intelligence avait ce romantique enragé !
Le diamètre du bien idéal et moral correspond toujours à l’ouverture des intelligences. […] Or, le besoin de lire étant une traînée de poudre, une fois allumé il ne s’arrêtera plus, et, ceci combiné avec la simplification du travail matériel par les machines et l’augmentation du loisir de l’homme, le corps moins fatigué laissant l’intelligence plus libre, de vastes appétits de pensée s’éveilleront dans tous les cerveaux ; l’insatiable soif de connaître et de méditer deviendra de plus en plus la préoccupation humaine ; les lieux bas seront désertés pour les lieux hauts, ascension naturelle de toute intelligence grandissante ; on quittera Faublas et on lira l’Orestie ; là on goûtera au grand, et, une fois qu’on y aura goûté, on ne s’en rassasiera plus ; on dévorera le beau, parce que la délicatesse des esprits augmente en proportion de leur force ; et un jour viendra où, le plein de la civilisation se faisant, ces sommets presque déserts pendant des siècles, et hantés seulement par l’élite, Lucrèce, Dante, Shakespeare, seront couverts d’âmes venant chercher leur nourriture sur les cimes. […] Le profond mot Nombre est à la base de la pensée de l’homme ; il est, pour notre intelligence, élément ; il signifie harmonie aussi bien que mathématique. […] Les intelligences superficielles, aisément esprits pédants, prennent pour renaissance ou décadence des effets de juxtaposition, des mirages d’optique, des événements de langues, des flux et reflux d’idées, tout le vaste mouvement de création et de pensée d’où résulte l’art universel.
Pour une raison d’intelligence, et peut-être de moralité, Saint-Simon a été le plus injuste historien d’un homme et d’un système qui représentent ce que nos individualités déchaînées haïssent naturellement le plus, — le despotisme individuel. […] Ce regard, qui jugeait plus vite que le compas et l’équerre de Le Nôtre que cette fameuse fenêtre de Trianon n’était pas droite, avait-il vu que Saint-Simon, l’ami du duc d’Orléans, — nos amitiés donnent la mesure de nos discernements, — n’était pas non plus parfaitement droit d’intelligence ? […] Dans le secret de cette royale intelligence qui, comme celle de Newton, pensa toujours à la même chose, et c’était la gloire et le bien-être de son État, Louis XIV avait pesé Saint-Simon, et il avait trouvé qu’il pesait peu. […] Il a failli comme homme dans son devoir moral, mais il a failli aussi dans sa fonction d’observateur comme intelligence. […] Il s’agit d’un serviteur de ce duc d’Orléans, qu’il aimait, — on ne sait pourquoi, — comme on aime, — mais qu’il n’estimait point, car on sait toujours pourquoi on estime, — et ce serviteur, devenu serviteur (de valet qu’il avait toujours été) et ayant enfin l’intelligence de son service, Saint-Simon n’a pas vu que c’était le plus capable de tous ceux qui gouvernaient, comme il écrivait, lui, Saint-Simon, à la diable, sous ce diable de duc d’Orléans !
Elle a senti les beautés et les laideurs des œuvres, ce qui n’est que le premier degré de l’intelligence, et, après les avoir senties, elle les a décrites et caractérisées, ce qui n’est encore que le second. […] Évidemment, on est sorti de l’air épais et chargé de la sensation et l’on est entré dans l’air plus pur, plus transparent et plus subtil, de l’intelligence. […] De l’idée générale il fallait aller jusqu’à l’absolu de l’idée, et mettre la main sur ce qui ferait le couronnement, la gloire et la force de toute critique : le critérium, que je cherche en vain dans tous les critiques, depuis Goethe jusqu’à Sainte-Beuve, qui le nient et le méprisent, et jusqu’à Aubryet, qui ne le méprise point, lui ; qui en a probablement un vague instinct, un désir confus, au fond de son intelligence éprise de l’idée ; mais qui, dans son livre des Jugements nouveaux, encore aujourd’hui ne l’a pas ! […] ces institutions dans l’esprit dont l’absence fait qu’un despote de génie dans l’ordre de l’intelligence n’est, comme dans l’ordre politique, rien de plus qu’un accident heureux, il a de la pensée et il n’a point l’anarchie de faire de l’image, qu’il a aussi, autre chose que ce qu’elle est : — la servante de la pensée. […] Au sommet de l’art et de l’intelligence, Michel-Ange, ce tortionnaire du Beau, ce glorieux damné de l’Idéal, est un précieux immense.
[I] Voilà tout à l’heure bien des années que ce livre de l’Infaillibilité a été lancé dans la publicité et même avec beaucoup d’activité et d’intelligence. […] Des esprits, militaires dans l’ordre des idées et pour le service de la vérité, ont, en effet, reproché à Saint-Bonnet la grosseur d’un volume qu’on ne diminuerait pourtant de physique qu’en le diminuant d’intelligence. […] Il la double, pour en faire le pain de notre intelligence, de la Parole divine, de la Révélation, de la Tradition catholique et de l’Histoire. […] À une époque où les dernières Philosophies sont des outrages insensés à l’intelligence humaine, si cette intelligence humaine n’était pas profondément et abjectement dégradée, — et dégradée au point d’admettre ces Philosophies ou au moins de les discuter, — Saint-Bonnet a grande chance, avec son livre de la Douleur autant qu’avec ses autres livres, de rester sans aucune influence sur le monde et de continuer autant que jamais, dans l’indifférence universelle, cette belle Harmonie de Lamartine : Le Génie dans l’obscurité.
Scherer nous offre, dans cette suite d’études premières, le spectacle d’une âme, d’une intelligence en travail, en marche continuelle, en évolution permanente : c’est une variante moins orageuse et sous forme toute scientifique, une variante qui a son intérêt pourtant, de la lutte et de la recherche que nous offre l’homme de Pascal dans les Pensées, avec cette différence qu’au lieu d’acquérir de la foi, il va la perdant, ce semble, de plus en plus, mais en s’obstinant à ne jamais la perdre tout à fait. […] Ces trente pages sont à la fois une réfutation solide et un portrait. — Et cependant (car je suis l’homme des doutes et des repentirs), tout en reconnaissant, surtout quand je considère certains disciples, que cette conception théocratique, telle que l’a présentée de Maistre, est en effet comme une armure du Moyen Âge qu’on va prendre à volonté, dans un vestiaire ou dans un musée et qu’on revêt extérieurement sans que cela modifie en rien le fond, je me demande, quand je considère d’autres disciples, s’il n’y avait pas un côté mystique en lui, plus intérieur, et répondant aux sources secrètes de l’intelligence et de l’âme. […] Lamennais, pour ceux qui l’ont le mieux connu, reste une énigme ; on s’explique difficilement qu’une si haute et si puissante intelligence, à côté de si vives lumières et de si profondes pénétrations, ait eu de telles éclipses, de tels aheurtements presque absurdes. […] Il semble, et ce n’est pas le seul des ouvrages de Lamennais qui fasse éprouver cette impression, il semble qu’il y ait eu dans cette vigoureuse intelligence quelque vice organique, une lacune secrète, je ne sais quel manque de netteté dans les conceptions et de rigueur dans la dialectique.
On y suit dans toutes ses phases la croissance du pouvoir volontaire, depuis le moment où il n’est encore qu’un germe obscur, un instinct presque physiologique, jusqu’à sa dernière période d’épanouissement, alors que, sous le nom de liberté, il suppose l’intelligence et fonde la moralité. […] On ne s’occupe ni du premier ni du troisième, parce qu’ils appartiennent, dit-on, soit à l’intelligence, soit à la physiologie ; et l’on se retranche dans le second exclusivement, pour en faire toute la volonté. […] L’homme idéal serait celui chez qui les émotions auraient une grande puissance, l’intelligence une force extraordinaire de reproduction et dont la volonté tiendrait l’une et l’autre dans une sujétion égale. […] Y a-t-il outre les sentiments, la volition et l’intelligence, une quatrième région inexplorée : celle du moi ?
La véritable largeur n’est point dans la sensibilité littéraire ; elle est dans l’intelligence, et le plus bel emploi qu’un philosophe puisse faire de son intelligence, c’est d’expliquer avec calme par une seule cause naturelle ou par une série logique de causes naturelles, tout ce qui étonne, irrite, scandalise, désole, chagrine, impatiente les esprits vulgaires et bornés. […] Ce sont moins des écoles que trois différents esprits de la critique, et, pour ainsi dire, trois moments par lesquels doit passer successivement la pensée de tout homme qui, dans ce siècle où chaque chose est mise en question, examine la question de la critique littéraire : 1º le moment dogmatique (l’esprit humain affirme d’abord) ; 2º le moment critique (c’est vraiment la crise de l’intelligence ; nous ne croyons plus : resterons-nous sceptiques ?)
Ceux du premier ban sont tout à fait fanatiques, leur admiration étant faite de l’admiration qu’ils ont pour leur intelligence et du mépris qu’ils font de l’inintelligence d’autrui. […] Ils en usent ainsi par calcul de vanité et pour se faire prendre par la foule pour des intelligences supérieures. […] Ce travail est très utile ; c’est un des exercices les plus vigoureux de l’intelligence et qui l’accroît et l’aiguise.
Ampère était-il encore, par-dessus le marché, un de ces voyageurs au niveau, par l’observation et par l’intelligence, de la difficulté nouvelle que l’on trouve maintenant à faire un livre de voyage ? […] il est impossible de moins se surfaire et de mieux apprécier son livre tout en l’expliquant… Seulement, la Critique littéraire, qui voit les facultés où elles sont et qui lit les feuillets des livres qui n’ont jamais été écrits, regrette que des intelligences faites pour mieux se contentent de brûler le pavé et ne rapportent au logis, sur des peuples qu’on a regardés du dehors au dedans, au lieu de les regarder du dedans au dehors, rien de plus que des impressions personnelles, fussent-elles aussi vivantes que peuvent l’être ces impressions ! […] Quoique Salvador ne soit pas strictement parlant un voyageur dans son ouvrage, il est facile de voir que son intelligence a les instincts, le mouvement, l’horizon, l’expansibilité des hommes de race voyageuse.
Il est à la fois aux deux extrémités, dans les sensations particulières par lesquelles l’intelligence débute, et dans les idées générales auxquelles l’intelligence aboutit, tellement qu’il en a toute l’étendue et toutes les parties, et qu’il est le plus capable, par l’ampleur et la diversité de ses puissances, de reproduire ce monde en face duquel il est placé.
Rapports de l’invention et de la disposition Il y a quelque chose de factice et de convenu dans la distinction nécessaire qu’on fait des diverses opérations par lesquelles l’intelligence mène un ouvrage de la conception première à l’entier achèvement. […] En d’autres termes, l’effort de l’intelligence qui ordonne ses idées, et cherche la plus courte voie et la plus facile pour atteindre son but et y mener les autres, est éminemment suggestif.
Avec une intelligence moyenne et une imagination vive, on peut être poète ; avec l’intelligence la plus lucide et la plus forte, si l’on est dépourvu d’imagination, on devra renoncer à écrire un vers. […] Essayez de concevoir isolément le sens d’un mot abstrait, votre intelligence s’y refuse. […] L’imagination propose, l’intelligence et le goût disposent. […] Ce problème, qui pour l’intelligence lucide serait insoluble, ne sera pour l’imagination qu’un jeu. […] Alors l’intelligence se rebute, on a la sensation douloureuse de l’effort à vide ; on se creuse en vain la tête.
Combien d’intelligences furent écrasées par ces terribles devanciers ! […] Mais s’il existe au monde un grand écrivain à qui l’intelligence des tragiques anciens ait manqué, n’est-ce pas notre immortel Racine ? […] Plouvier ne s’est pas adressé à mon intelligence. […] C’est, encore une fois, qu’ils ne donnent rien à notre intelligence. […] Toute la distance, on le voit, est : de la sensation à l’intelligence.
Race de bon sens, parce que l’intelligence, les idées la mènent, elle est inconstante et légère, parce qu’elle n’a guère de passions dont le hasard de ses raisonnements ne change l’orientation, elle paraît aventureuse et folle, quand ses déductions et ses généralisations la heurtent à l’implacable réalité des intérêts et des circonstances. […] Enfin, la forme grave et supérieure de notre intelligence, c’est l’esprit d’analyse, subtil et fort, et la logique, aiguë et serrée : le don de représenter par une simplification lumineuse les éléments essentiels de la réalité, et celui de suivre à l’infini sans l’embrouiller ni le rompre jamais le fil des raisonnements abstraits ; c’est le génie de l’invention psychologique et de la construction mathématique.
Nul de nous ne peut, sans déchet ou sans agrandissement, se substituer à un autre, et les échos de l’intelligence, même les plus distincts, sont comme les échos matériels, qui rongent ou affaiblissent plus ou moins les sons qu’ils répètent. […] Toutefois, nous ne craignons pas de l’avancer, si un tel phénomène a lieu, si la science philosophique reprend l’ascendant d’un enseignement qu’elle a perdu, cela n’arrivera guères que grâce à un prêtre ou à quelque esprit profondément religieux, à une intelligence sacerdotale, — celle de l’abbé Noirot ou toute autre, peu importe !
Il est assez connu comme orateur accompli ; il ne l’est pas assez comme intelligence suprême et universelle. […] La vérité, la raison ou l’intelligence est l’unique juge des choses ; … il adopte ces seules maximes éminemment spiritualistes. […] C’est ce qu’il ne faut pas même chercher… Quand vous voyez l’ordre du monde et le mouvement réglé des corps célestes, n’en concluez-vous pas qu’il y a une intelligence suprême qui doit y présider, soit que cet univers ait commencé et qu’il soit l’ouvrage de cette intelligence, comme le croit Platon, soit qu’il existe de toute éternité et que cette intelligence en soit seulement la modératrice, comme le croit Aristote ? […] « Tous ces éléments n’ont rien qui fasse la mémoire, l’intelligence, la réflexion, qui puisse rappeler le passé, prévoir l’avenir, embrasser le présent. […] Quelle que soit donc la nature d’un être qui a sentiment, intelligence, volonté, principe de vie, cet être-là est céleste, il est divin, et dès lors immortel.
.) ; l’autre que l’on peut appeler idéale, céleste, divine, désintéressée, ayant pour objet les formes pures de la vérité, de la beauté, de la bonté morale, c’est-à-dire, pour prendre l’expression la plus compréhensive et la plus consacrée par les respects du passé, Dieu lui-même, touché, perçu, senti sous ses mille formes par l’intelligence de tout ce qui est vrai, et l’amour de tout ce qui est beau. […] Le progrès de la moralité et de l’intelligence amènera des points de vue nouveaux, qui donneront une valeur idéale aux actes en apparence les plus grossiers. […] Au fond, toutes ces catégories des formes pures perçues par l’intelligence ne constituent que des faces d’une même unité.
Tous sentent que, s’il y a un grand mouvement dans la sphère de l’intelligence humaine, il y a néanmoins un centre fixe, un axe sur lequel repose tout le système. […] Notre éducation se perfectionnant par l’étude de différentes langues, il en résultait, dans notre intelligence, un travail continuel quoique inaperçu, pour comparer les procédés et les expressions de notre langue maternelle avec les procédés et les expressions des langues acquises par une éducation postérieure. […] Je ne sais si je suis parvenu à me faire comprendre : une courte observation sur la musique achèvera peut-être de rendre sensible le phénomène nouveau de l’intelligence humaine.
Le principe unique en est l’intelligence. L’œil de l’intelligence, c’est-à-dire la raison, reçoit de Dieu la lumière du vrai éternel. […] L’intelligence de cette langue devint une science, sous les noms de divination, théologie mystique, mythologie, muse. […] Ce que les philosophes comprirent dans la suite, les poètes l’avaient senti ; et si, comme le dit l’école, rien n’est dans l’intelligence qui n’ait été dans le sens, les poètes furent le sens du genre humain, les philosophes en furent l’intelligence 6. […] Il ne conserva d’autre lexique que le Nomenclateur de Junius pour l’intelligence des termes techniques.
Si l’intelligence y consent, le cœur la désavoue et n’y peut demeurer. […] Savoir, c’est refléter ; connaître, c’est prendre en soi l’image des objets ; se connaître, c’est se regarder au miroir de son intelligence. […] Dès lors l’activité de l’intelligence devient un labeur. […] On demande à l’intelligence ce qu’il faudrait demander à la volonté. […] Expérimentale ou déductive, aujourd’hui comme hier, la preuve sollicite surtout l’intelligence et s’adresse à la raison.
Ici, nous avons encore affaire à un journal et à des confidences posthumes, mais il s’agit du journal et registre d’une belle âme, d’une haute intelligence, et le choix a été fait par un homme de mérite, digne parent par le cœur et par la pensée de celui qu’il présente et introduit. […] Le nil admirari en effet, dans le sens vulgaire, n’est pas une marque d’intelligence. […] Il se peint à nous comme une intelligence non pas servie (selon le mot de M. de Bonald), mais trahie et dé-servie par des organes. […] La clef de bien des vicissitudes et de bien des variations morales de Maine de Biran est dans ce sentiment intime et radical d’impuissance et de faiblesse, joint à une intelligence élevée qui se rend compte et se contemple. […] Comment le voile ordinaire qui couvre mon intelligence se trouve-t-il écarté par moments pour retomber aussitôt ?
Elle n’avait pas de beauté : petite, les yeux légèrement discordants, la pointe du nez kalmouke, mais avec cela une physionomie qui exprimait la force de la vie et là pénétration de l’intelligence. […] A le voir circuler ainsi, sans s’y accrocher, à travers les doctrines les plus diverses, on dirait qu’il les admet toutes plus ou moins et qu’il les comprend : sa complaisance infinie ressemble par moments à une intelligence universelle. […] M. de Falloux ignore ces vilains détails, et Ronsard, chez lui, est récompensé d’un bref du pape pour avoir pris un rang honorable dans la mêlée des intelligences. Elle est jolie, la mêlée des intelligences ! […] Ce serait inexplicable s’il n’y avait pas un peu d’éternité dans certains moments… » C’est du spirituel le plus raffiné, et l’éternité elle-même n’est là que pour servir à la coquetterie de l’esprit. — Leurs deux salons, leurs deux mondes plus tard restèrent en bonne intelligence, mais de loin, sans risquer de se heurter ni de se confondre ; ils ne se faisaient, en réalité, ni opposition ni concurrence.
Car, au contraire, plusieurs des pages qu’il a écrites (les plus nombreuses peut-être) sont surtout remarquables par la vigueur virile et la belle lucidité d’une intelligence proprement philosophique. […] S’agenouiller devant la sœur douloureuse et l’adorer d’être douloureuse… » Ces choses-là me désolent, et mon embarras redouble… L’intelligence la plus pénétrante et la plus vigoureuse, et avec cela des langueurs morbides, du pédantisme aussi, et certaines prédilections intellectuelles qui ressemblent à de la superstition, et un goût de certaines élégances qu’on prendrait presque pour du snobisme… : comment voir clair dans tout cela ? […] Les plus marqués, les plus originaux, non seulement parmi les hommes mais parmi les écrivains, sont ceux qui ne comprennent pas tout, qui ne sentent pas tout, qui n’aiment pas tout, dont la science, l’intelligence et les goûts sont nettement délimités. […] Dès aujourd’hui l’écrivain qui concevrait entièrement et profondément toutes les façons dont le monde s’est reflété dans des intelligences ne pourrait guère être défini que par cette aptitude même à tout pénétrer et à tout embrasser. […] Son esprit étant éminemment et presque uniquement un produit de cette fin de siècle (l’influence de la tradition gréco-latine est peu marquée chez lui), il s’en tient aux écrivains des trente dernières années et choisit parmi eux ceux avec qui il se trouve en conformité d’intelligence et de cœur.