comme dit le peuple. […] Le gouvernement lui-même, dans la personne des empereurs, a raisonné le pouvoir avec les peuples, les peuples ont raisonné l’obéissance avec le gouvernement. […] Vous auriez pitié de cet enfant ; moi j’ai pitié de mon peuple. […] Le souverain connaît ainsi, sur tous ses actes, la pensée des peuples. […] Voici ce manifeste du prince, ou plutôt cette confidence impériale du père avec ses peuples.
Cependant cette solution serait impossible s’il n’y avait déjà un lien entre les deux peuples. […] Non, les peuples européens ne sont pas encore chrétiens ; sont-ils donc pareils en ce qu’ils sont hommes issus d’hommes ? […] Le principe qui dans les vieux temps avec cette divine force Aryenne conquérait les pays et versait le sang, — un sang qui produit la vie, non la mort, — ce même principe, dans ces hommes, conquit l’esprit des peuples et fit couler à travers les âmes des peuples frères, historiquement séparés, le fleuve de l’humanité idéale. […] Certes la musique parle aux âmes des peuples Aryens un langage qui franchit les barrières géographiques et les idiomes divers des divers peuples ; un langage pouvant être compris par ceux qui ne renient pas leur sang Aryen. […] Le vrai artiste-s’adresse au peuple ; le non-artiste, l’artiste-artisan, s’adresse à la société.
Ce peuple s’emplit l’âme de fables qui n’ont aucun mérite supérieur de beauté, de moralité, de vérité. […] Toute littérature qui voudra mériter le beau nom de populaire, doit être inspirée par l’amour du peuple. […] Et, pour préciser, pour en revenir à la question même que je traite, comment soutenir que ce peuple qui dévore les romans, qui y trouve un attrait et veut y trouver une direction, soit condamné à n’en lire que de médiocres, d’insipides et de malsains, parce qu’il est peuple et que l’œuvre d’art n’est pas faite pour lui ? […] Donnay a dit : l’âme du peuple. […] Par un juste retour, vous recevrez de ce peuple, pour lequel vous travaillerez, un secours inestimable.
C’eût été se faire siffler par le peuple dont l’instinct sûr sait pourquoi il a combattu, beaucoup mieux que ceux qui ne se croient pas peuple. […] Le peuple se groupa dans les rues, parce qu’il n’y avait que les rues qui appartinssent au peuple. Quand les soldats vinrent les lui disputer, l’action s’engagea : car encore faut-il que le peuple soit quelque part. […] Deux jours sans direction, le peuple des rues agit de lui-même ; tandis que le peuple des palais, des salons et des Chambres regardait l’action sans pouvoir comprendre comment la force qu’on avait toujours appelée brutale était devenue intelligente sans rien perdre de son énergie, au contraire. […] Ils se trompent, comme les hommes qui prennent encore le mot peuple dans le sens d’autrefois.
Le sénat autorisait ce qui avait été délibéré dans les assemblées du peuple. […] Le sénat assistait le peuple de sa présence dans les assemblées législatives, de peur qu’il ne résultât quelque dommage public de son peu de lumières. […] Par un effet des mêmes causes qui firent l’héroïsme des premiers peuples, les anciens Romains qui ont été les héros du monde, se sont montrés naturellement fidèles à l’équité civile. […] Dans les démocraties, les citoyens règnent sur la chose publique qui, se divisant à l’infini, se répartit entre tous les citoyens qui composent le peuple souverain. […] Dans les monarchies il faut peu d’hommes d’état pour traiter des affaires publiques dans les cabinets en suivant l’équité civile ou raison d’état ; et un grand nombre de jurisconsultes pour régler les intérêts privés des peuples d’après l’équité naturelle.
Imagination militaire, ce qui veut toujours un peu dire imagination chevaleresque, il s’est profondément pénétré de la personnalité de ce peuple arabe, — le seul peuple réellement poétique qu’il y ait maintenant sur la terre, et dont la description ressemble aune page de la Bible oubliée dans des feuillets de ce Khoran qui ne sera bientôt plus pour l’humanité qu’un livre oublié, — une poésie chantée ! […] le nécessaire social du peuple arabe y est complet, et si, comme on l’a ingénieusement et justement remarqué, le caractère du poème épique est de renfermer tous les éléments de la civilisation qu’il chante, un poète qui aurait le génie d’un tel poème n’aurait besoin, pour en faire un sur les Arabes, que de consulter les œuvres de Daumas. […] Pour nous, c’était le plâtre, posé d’une main d’artiste, pour en garder l’empreinte, sur le visage d’un peuple qui va expirer ; car se transformer sous l’action du vainqueur, pour un autre peuple, c’est mourir. Qui voudra connaître les derniers jours de la vie arabe lira Daumas, et qui pensera à ce noble peuple, à cette perle de peuple que nos mœurs occidentales vont dissoudre, pensera à ce qu’il en a raconté. […] Quand, par exemple, nous lisons sa Grande Kabylie, qui est l’histoire pied à pied de la plus rude de nos conquêtes, nous comprenons parfaitement les résultats que devait donner cette magnifique gymnastique en permanence pendant vingt-cinq ans, cette lutte acharnée contre un peuple qui avait, au plus haut degré, toutes les énergies de la résistance !
Si, pour lui, l’Américain est le plus grand des peuples, le peuple modèle, que tous les autres devraient imiter, c’est qu’il recherche exclusivement « la monnaie », et que toute la vie des hommes et des femmes pivote sur ce « tout-puissant écu », le seul axe du monde moral ! […] « J’admirai — dit-il — dans ce simple détail, dans cette indifférence profonde, toute la superbe résumée de ce grand peuple. » Et, cependant, malgré l’anecdote, que nous acceptons parce que nous sommes trop Européen pour ne pas être poli, ce grand peuple, indifférent et superbe, n’est pas si bien encore pétrifié par l’orgueil qu’il ne pratique le terrible duel au fusil et qu’il ne se boxe dans ses assemblées législatives, ou ne s’y tire des coups de pistolet à bout portant ! […] Quant aux Américains, que depuis longtemps les philosophes de l’École radicale s’obstinent à regarder comme le peuple de l’avenir qui doit renouveler tous les autres, s’ils sont peints ressemblants dans ce livre scandaleux, écrit à leur gloire, l’Europe peut être bien tranquille. […] Est-ce enfin avec ce matérialisme effréné qu’on peut ranimer des peuples, mourants — comme meurent toujours les peuples ! […] vraiment des peuples jeunes, chez lesquels ce qui sauve les peuples en les régénérant, la Spiritualité, débordait !
Elles supposent plus de spiritualisme, plus de devoir, plus de vertu dans le peuple que les autres gouvernements ; c’est ce qui fait qu’elles sont l’idéal des peuples et des sages. […] Mais si le peuple ne possède ni assez de lumières ni assez de vertus, il n’y faut pas penser encore, ou bien il n’y faut plus penser du tout : un brillant esclavage militaire, de la gloire, et point de liberté, suffit à ce peuple ; on peut l’éblouir, on ne peut l’éclairer. […] Peuple de beaux instincts, mais de peu de moralité politique, toujours ivre de lui-même, enivrant les autres peuples de son génie et de son exemple ; mais ne tenant pas plus à ses vérités qu’à ses rêves, et créé pour lancer le monde, plutôt que pour le diriger vers le bien. À de tels peuples le gouvernement du hasard ! […] L’abbé Pernetti, l’historien des célébrités de Lyon, raconte que le peuple de cette ville l’appelait la Sainte.
Faguet expose avec beaucoup de force l’antinomie qui existe entre le dogme de la souveraineté du peuple et les droits de l’individu. […] Ils ont confondu les droits de l’homme et le droit du peuple ; les droits de l’homme, de l’individu, et le droit du peuple, de la nation, de la communauté des citoyens libres… Mais les droits de l’homme et le droit du peuple ne sont point la même chose, à tel point même que le droit du peuple peut être en conflit avec les droits de l’homme. Si le droit du peuple, c’est la souveraineté, ce que précisément ont dit les rédacteurs des Déclarations, le peuple a le droit, en sa souveraineté, de supprimer tous les droits de l’individu Et voilà le conflit. Mettre dans une même déclaration le droit du peuple et les droits de l’homme, la souveraineté du peuple et la liberté par exemple, à égal titre, c’est y mettre l’eau et le feu et les prier ensuite de vouloir bien s’arranger ensemble. Mais les auteurs des Déclarations croyaient à la fois à la liberté individuelle et à la souveraineté du peuple.
La poésie lyrique, autrement dite l’ode, le psaume, le cantique, y tiennent la plus grande place dans tous les temps et chez tous les peuples. […] La loi régnait seule ; fondée sur la volonté de Dieu, et soutenue par la voix unanime du peuple, elle avait son trône dans le temple national. […] Il soupçonne dans ce favori du peuple un instrument des prophètes. […] Le peuple entier se précipite vers Hébron pour reconnaître roi son héros expatrié. […] Cette intention de prêter ainsi une espèce de refrain au chœur ou au peuple est frappante dans certains psaumes de David.
Que deviendrait la société politique, enfance éternelle qui condamnerait les peuples à une éternelle étourderie ? […] Tu verras tomber ce gouvernement, en rendant par sa chute la vie à la jeunesse de son peuple ; et, prodige de démence, tu verras après trente ans les peuples déifier ce consommateur de peuples et lui faire un titre de règne du plus grand abus de sang humain qui ait jamais été fait, depuis César, en Occident ! […] L’armée, peuple en effet, peuple héroïque sur les champs de bataille, peuple qui sauve la patrie en uniforme, mais qui marche à tous les tambours, pour ou contre tous les droits du peuple lui-même, pourvu que la gloire militaire lui dore toutes les causes et lui compte au même taux toutes les journées dans des états de services qui vont du 18 brumaire à Marengo, d’Austerlitz à Waterloo, de Waterloo à Alger, d’Alger à l’acclamation de la république, de l’acclamation de la république au 2 décembre, du 2 décembre à Solferino, de Solferino qui sait où. […] Ce que ce peuple aujourd’hui semblait aimer dans le nouveau duc d’Orléans, il faut l’avouer, c’était le fils du 21 janvier. […] Votre loyauté vous commande de vous sacrifier pour sauver au roi et au peuple une pareille épreuve.
Un nouveau droit public doit sortir des nouveaux rapports entre les peuples. […] Nous ne refuserons pas de comprendre les mêmes sentiments chez les autres peuples : et nous ne haïrons pas ces peuples, uniquement parce qu’ils sont autres que nous. […] La guerre de Spartacus n’avait aucune analogie avec les actes de rébellion chez les peuples modernes. […] Les peuples ont été de même. […] Il serait même permis d’absoudre jusqu’à un certain point à cet égard la croyance générale des peuples.
Il s’est rendu maître du peuple, de concert avec M. de Beaufort, qu’il tient entre ses mains et qui n’est qu’un fantôme ; il est l’idole des paroisses comme l’autre l’est des Halles. Mais il ne veut pas abuser « de cette manie du peuple, dit-il, pour M. de Beaufort et pour moi ». Il résiste absolument à l’idée de se passer du Parlement ou de l’écraser par le peuple, de le purger violemment comme quelques-uns le conseillaient. […] Combien de fois n’a-t-il pas occasion de s’écrier en sortant des séances du Parlement : « Rien n’est plus peuple que les compagnies !… Les plus sages parurent aussi fous que le peuple, le peuple me parut plus fou que jamais. » La gaieté de certains endroits de son récit ne peut nous couvrir qu’incomplètement le dégoût de ce régime anarchique, contradictoire, et dont ceux qui y étaient plongés, par une illusion trop ordinaire, ne s’apercevaient pas.
Le peuple, par imprévoyance, tombe sous l’oppression d’un seul. […] Est-ce pour Athènes, près de laquelle se pressaient volontiers les peuples du nom grec ? […] N’avez-vous pas honte de cette mollesse devant les peuples voisins ? […] Celui-là n’est pas cher au peuple ; il n’en est pas regretté : mais cet autre, petits et grands le pleurent s’il succombe. L’homme de courage met en deuil le peuple par sa mort ; et, vivant, il est l’égal des demi-dieux.
Le caractère qui distingue essentiellement Israël entre les peuples théocratiques, c’est que le sacerdoce y a toujours été subordonné à l’inspiration individuelle. […] Ce grand livre une fois créé, l’histoire du peuple juif se déroule avec un entraînement irrésistible. […] L’idée qu’Israël est un peuple de Saints, une tribu choisie de Dieu et liée envers lui par un contrat, prend des racines de plus en plus inébranlables. […] Un mouvement d’idées extraordinaire, aboutissant aux résultats les plus opposés, faisait d’eux à cette époque le peuple le plus frappant et le plus original du monde. […] Je rappelle que ce mot désigne simplement ici les peuples qui parlent ou ont parlé une des langues qu’on appelle sémitiques.
le renversement dans l’admiration touche de près à l’ingratitude, — et les peuples ne sont vraiment plus reconnaissants pour leurs grands hommes le jour qu’ils s’avisent de dresser de tels panthéons à leurs amuseurs ! […] Développement peut-être inévitable avec la civilisation qu’on nous a faite que cette idolâtrie du théâtre par laquelle les peuples finissent ! […] L’occupation du loisir des peuples donne exactement leur mesure. […] Un peuple aimable, et réputé le plus aimable des peuples, perd les grâces toutes-puissantes par lesquelles il a régné, et même la politesse, cette fleur de bienveillance sociale, restée la dernière de ses dons, se fane aussi sur sa couronne. […] Eh bien, voyez donc le progrès des peuples !
L’histoire de l’antiquité, dont nous sommes la dernière page, présente aux regards de l’observateur deux grands peuples, — le peuple grec et le peuple romain, — qui tous deux mal vus longtemps, mais obstinément regardés, n’ont point été cependant assez rapprochés l’un de l’autre pour qu’on ait jusqu’ici séparé la vérité de l’erreur, et, puisque nous dépendons tant et du passé et de l’Histoire, nos devoirs de nos illusions. […] des exemples, des conseils, de hautes leçons, sinon des calques d’institutions toujours impossibles, peuvent être proposés d’un peuple à un peuple. Entre les manières de penser et de sentir d’un peuple mort, mais qui laissa sur le front du peuple vivant comme les dernières haleines de son génie, entre la civilisation de l’un et de l’autre, il y a un lien, un rapport, une espèce de communauté qui tient à bien des causes, visibles ou mystérieuses, mais qui est. […] Ce qui nous distingue d’elle et nous en sépare, c’est ce qu’il y a de plus profond dans l’être des peuples, ce sont nos instincts et nos mœurs. […] À quoi lui servirent et sa pénétration inouïe de la destinée des peuples, et sa toute-puissante analyse du mécanisme des constitutions ?
Ces derniers actes de la tragédie humaine sont les plus fortes scènes du drame humain, celles qui se gravent le mieux dans la mémoire des peuples. […] Savonarola n’était qu’un Marat encapuchonné ; le peuple, qu’il avait trompé et fanatisé, en fit justice au premier retour de bon sens. […] Les empereurs y trouvent une sanction sur les peuples ; les papes, un titre de supériorité sur les rois. […] Elle nomme des consuls, des préfets, des prétoriens, des sénateurs, des tribuns du peuple, comme pour tromper son néant. […] Son peuple avait immensément grandi sous sa main.
Par analogie on appelait les héros pasteurs ; Homère ne manque jamais de leur donner l’épithète de pasteurs des peuples. […] Les grands, conformément à l’ancien titre héroïque de pasteurs des peuples, leur donnaient à souper. […] Ils étaient amis du peuple romain dans le sens où les Empereurs donnaient le nom d’amis aux nobles qui composaient leur cour. […] Sera-ce en vertu d’une loi royale par laquelle les paladins français se sont dépouillés de leur puissance en faveur des Capétiens, de même que le peuple romain abdiqua la sienne en faveur d’Auguste, si nous en croyons la fable de la loi royale débitée par Tribonien ? […] Ainsi, toute la force que perdent les nobles, le peuple la gagne, jusqu’à ce qu’il devienne libre ; toute celle que perd le peuple libre tourne au profit des rois, qui finissent par acquérir un pouvoir monarchique.
Mais les grandes choses dans un peuple se font d’ordinaire par la minorité. […] Jésus a été la gloire du peuple d’Israël, qui l’a crucifié. […] Plus que jamais, il invoqua le Messie comme juge et vengeur des peuples. […] On ne trouve chez l’ancien peuple d’Israël que des traces tout à fait indécises de ce dogme fondamental. […] Tout peuple appelé à de hautes destinées doit être un petit monde complet, renfermant dans son sein les pôles opposés.
Or, le caractère d’un peuple se compose éminemment de ses mœurs. […] Sans doute nos mœurs extérieures, c’est-à-dire nos habitudes sociales, nos rapports entre nous dans les relations publiques et dans les relations privées, ont plus d’une fois subi de très grands changements ; peut-être même qu’aucun peuple n’a été soumis à autant de vicissitudes, et n’a plus présenté le spectacle d’un peuple changeant et mobile, d’un peuple difficile à fixer. […] Qu’on ne m’accuse pas d’être trop sévère à l’égard du peuple français. […] Ainsi, chez les deux peuples, la marche progressive a été tout à fait naturelle. […] Autant que, je puis le croire, du temps de Henri IV les peuples se laissaient encore guider par les affections.
Quel peuple s’intéresserait à une comédie de Ménandre ou de Térence ? […] Ce n’est pas en vain qu’on élève le diapason de l’éloquence d’un peuple. […] Ni Socrate, ni Platon, ni Confucius, ni Cicéron, ni Démosthène, ne parlaient de si haut au peuple assemblé. […] La première littérature du peuple en France fut donc sa prédication. Sa seconde littérature fut son théâtre ; car le peuple lit peu, mais il écoute.
Le pouvoir absolu du peuple sur les langues s’étend sous un rapport à la législation : le peuple donne aux lois le sens qui lui plaît, et il faut, bon gré malgré, que les puissants en viennent à observer les lois dans le sens qu’y attache le peuple. Les monarques ne peuvent ôter aux peuples cette souveraineté sur les langues ; mais elle est utile à leur puissance même. Les grands sont obligés d’observer les lois par lesquelles les rois fondent la monarchie, dans le sens ordinairement favorable à l’autorité royale que le peuple donne à ces lois. […] Voyez dans Tacite comment la monarchie s’établit à Rome à la faveur des titres républicains que privent les empereurs, et auxquels le peuple donna peu-à-peu un nouveau sens.
Nous avons vu l’origine des éloges chez presque toutes les nations ; je voudrais maintenant suivre leurs différentes formes chez tous les peuples qui ont cultivé les arts. […] Tel fut l’effet que produisirent ces fameux jugements exercés en Égypte sur les morts, et qui n’ont été depuis imités par aucun peuple. […] On assemblait la famille ; les enfants venaient recevoir des leçons de vertu en entendant louer leur père ; le peuple s’y rendait en foule : le magistrat y présidait. […] Nous savons par l’histoire, que plusieurs des rois d’Égypte qui avaient foulé leurs peuples pour élever ces pyramides immenses, furent flétris par la loi, et privés des tombeaux qu’ils s’étaient eux-mêmes construits. Lorsqu’un de ces princes était mort, et que le peuple était assemblé, il paraissait alors différents accusateurs pour déposer contre sa mémoire.
Car ce petit livre est une œuvre à part ; une conviction profondément nationale et religieuse l’a dicté au poète fervent ; il est destiné, comme un viatique moral, au peuple errant ou captif chez qui l’ancienne foi catholique semble avoir fait alliance avec le sentiment plus moderne de la liberté. […] Il faut se figurer un instant qu’on est Irlandais ou Polonais, c’est-à-dire d’une race où la nationalité et la religion se sont jusqu’ici étroitement embrassées ; d’une armée qui s’agenouille au nom de Marie, et dont le généralissime Skrzynecki combat avec le scapulaire sur la poitrine ; il faut se prêter à cet orgueil si légitime qui, au milieu de l’inaction des peuples les plus invoqués, au sein de l’apparente lâcheté européenne, permet qu’on se considère comme le peuple élu par excellence, comme un peuple hébreu, martyr et réduit présentement en captivité, mais pourtant le seul vivant entre les tribus idolâtres, le seul par qui la cause de Dieu vaincra. […] Et les autres, on ne les connaît que parce qu’ils sont remarquables par leur grande iniquité ou par leur grande stupidité, comme on connaît dans une petite ville les noms des brigands du voisinage, et les noms de l’escamoteur ou du fou qui flâne dans les rues pour amuser le peuple. […] Ces mots d’étranger, d’ennemi, d’idolâtre, synonymes pour le poète, s’appliquent également à nous, qui avons manqué à notre belle mission de la guerre générale pour la cause des peuples. […] Mickiewicz nous a semblé, le dirons-nous, un peu injuste, un peu abusé par l’analogie poétique qui lui a fait considérer jusqu’au bout sa nation comme une sorte de peuple juif, unique, privilégié, doué entre tous de l’esprit de sacrifice, et du sein duquel la liberté, comme un autre messie, doit sortir.
Les peuples n’ont pas les yeux levés en haut pour voir de quel côté les cieux s’abaisseront ; ils n’attendent point de législateur nouveau. […] Il était sorti du sein d’un peuple dédaigné, et celui de qui il tenait sa mission avait été attaché à une croix, supplice alors infâme. […] Les vieillards de Troie ne pouvaient trouver mauvais que les peuples se fussent armés pour la querelle de la beauté : et Homère faisait sortir de cette pensée une poésie tout entière. […] pourquoi les peuples ont-ils refusé de reconnaître à la fois la puissance du génie et celle de la force ? […] Le peuple français est le premier des peuples de l’Europe qui ait admis le principe de l’indépendance mutuelle des institutions politiques et des institutions sociales, tout en demeurant dans la même croyance religieuse, tout en restant fidèle au droit divin et à celui de la légitimité, qui en est la suite.
Ne l’attendez pas d’un peuple chez qui domine l’intérêt : la gloire est la monnaie des états, mais la gloire ne représente rien où l’or représente tout. Ne l’attendez pas d’un peuple voluptueux ; ce peuple n’a que des sens, il ne sait renoncer à rien, il ne sait pas perdre un jour pour gagner des siècles. Ne l’attendez pas d’un peuple esclave ; la gloire est fière et libre, et l’esclave, corrompu par sa servitude, n’a pas assez de vertu pour lever les yeux jusqu’à elle. […] Vous le trouverez peu chez une nation livrée à ce qu’on appelle les charmes de la société ; chez un tel peuple, la multitude des goûts nuit aux passions. […] Nous nous proposons d’examiner ce qu’ils ont été chez les différentes nations et dans les différents siècles : quels sont les hommes à qui on les a accordés, à qui on les a refusés ; comment le pouvoir les a usurpés sur la vertu ; comment ce qui était institué pour être utile aux peuples, est devenu quelquefois le fléau des peuples en corrompant les princes.
Un latin plus que barbare était chez tous les peuples la langue générale des lois, de la religion, des sciences et des arts. […] Ce gouvernement n’était que l’indépendance de cinq cents tyrans, et l’esclavage d’un peuple. […] Étrangère au milieu du peuple qu’elle gouvernait, elle se passionnait pour les grands hommes de tous les pays, et était assez indifférente sur le sien. […] Chez un peuple barbare ou qui cesse de l’être, et où l’on commence à écrire, les orateurs et les poètes sont avertis de leurs talents par leurs passions, et par les secousses que des objets extraordinaires donnent à leur âme. […] Ce sont les mœurs d’un peuple qui donnent la vie à son langage.
Impulsions destructives À quoi s’acharne la colère aveugle Méfiance contre les chefs naturels De suspects ils deviennent haïs Dispositions du peuple en 1789. […] En 1789, les bandes sont prêtes ; car, sous le peuple qui pâtit, il est un autre peuple qui pâtit encore davantage, dont l’insurrection est permanente, et qui, réprimé, poursuivi, obscur, n’attend qu’une occasion pour sortir de ses cachettes et se déchaîner au grand jour. […] Recrues et chefs d’émeute Braconniers Contrebandiers et faux-sauniers Bandits Mendiants et vagabonds Apparition des brigands Le peuple de Paris. […] Dès qu’une taxe est exorbitante, elle invite à la fraude, et suscite un peuple de délinquants contre son peuple de commis. […] Ce sont là les procédés des pays où le brigandage est endémique Ici en effet, comme dans les Calabres, le peuple est pour les brigands contre les gendarmes.
Les peuples du Nord sont moins occupés des plaisirs que de la douleur ; et leur imagination n’en est que plus féconde. […] La poésie du Nord convient beaucoup plus que celle du Midi à l’esprit d’un peuple libre. […] L’indépendance était le premier et l’unique bonheur des peuples septentrionaux. […] Les peuples septentrionaux, à en juger par les traditions qui nous restent et par les mœurs des Germains, ont eu de tout temps un respect pour les femmes, inconnu aux peuples du Midi ; elles jouissaient dans le Nord de l’indépendance, tandis qu’on les condamnait ailleurs à la servitude. […] Enfin ce qui donne en général aux peuples modernes du Nord un esprit plus philosophique qu’aux habitants du Midi, c’est la religion protestante que ces peuples ont presque tous adoptée.
De tous les peuples du monde, les Grecs sont peut-être ceux qui ont été les plus passionnés pour la gloire. […] Telle était la sensibilité ardente de ces peuples pour la gloire. […] Il n’est pas étonnant que chez un pareil peuple, l’usage des éloges ait été établi. […] Le peuple y accourait en foule ; il jetait sur ces ossements des couronnes de fleurs, de l’encens et des parfums. […] Démosthène fut accusé par l’envie, mais absous par le peuple.
Ceci n’a aucun caractère de l’élégance du peuple de Périclès ; cela sent le Romain ; les souvenirs seuls y sont beaux. […] C’était un peuple d’hommes d’élite ; il avait les passions du peuple, il n’avait pas son ignorance ; il faisait des crimes, mais pas de sottises. […] Le temps seul peut rendre les peuples capables de se gouverner eux-mêmes. […] L’aspect du Parthénon fait apparaître, plus que l’histoire, la grandeur colossale d’un peuple. […] Où retrouvera-t-on et une époque et un peuple pareils ?
Les effets graduels et nuancés ne conviennent guère aux mœurs démocratiques ; et comme c’était toujours du peuple qu’il fallait se faire entendre et se faire applaudir, on se livrait, pour l’amuser, aux contrastes saillants qui frappent aisément tous les hommes. […] D’ailleurs ce ne sont ni les goûts ni les lumières du peuple qu’il faut consulter pour l’attendrir ; l’émotion de la pitié parvient à tous les cœurs par la même route. C’est à l’homme que vous vous adressez dans la tragédie ; mais c’est une telle époque, c’est un tel peuple, ce sont de telles mœurs, qu’il faut connaître pour obtenir dans la comédie un succès populaire : les pleurs sont pris dans la nature, et la plaisanterie dans les habitudes. […] C’est un écueil pour les pièces de théâtre des peuples libres, que les succès qu’on obtient, en mettant en scène des allusions aux affaires publiques. […] Le peuple d’Athènes, comme je l’ai déjà dit, était extrêmement susceptible d’enthousiasme ; mais il n’en aimait pas moins la satire qui insultait aux hommes supérieurs.
Welcker est la science des littératures classiques, c’est-à-dire des littératures modèles, qui, nous offrant le type général de l’humanité, doivent convenir à tous les peuples et servir également à leur éducation. […] Leur existence est un fait universel de linguistique et leur choix, de même qu’il n’a rien d’absolu pour tous les peuples, n’a rien d’arbitraire pour chacun d’eux. […] Si elle cesse d’être l’intermédiaire du commerce habituel de la vie, elle devient la langue savante et presque toujours la langue sacrée du peuple qui l’a décomposée. […] C’est donc un fait général de l’histoire des langues que chaque peuple trouve sa langue classique dans les conditions mêmes de son histoire et que ce choix n’a rien d’arbitraire. […] Que d’autres peuples, même européens, les nations slaves par exemple, les peuples germaniques eux-mêmes, bien que constitués plus tard dans les rapports si étroits avec le latinisme, cherchent ailleurs leur éducation, ils pourront s’interdire une admirable source de beauté et de vérité ; au moins ne se priveront-ils pas du commerce direct avec leurs ancêtres ; mais, pour nous, ce serait renier nos origines, ce serait rompre avec nos pères.
Mieux vaut le peuple tel qu’il est. […] L’homme du peuple chez nous déshérité de l’esprit. […] Le peuple n’est pas responsable de ses folies. […] Le peuple n’aime pas les sages et les savants. […] Assimilation des barbares aux peuples civilisés.
Le peuple voulut que dans l’instant Pylade joüât le même rolle. […] Zozime compte même l’invention de l’art des pantomimes parmi les causes de la corruption des moeurs du peuple romain, et des malheurs de l’empire. […] L’extrême passion que le peuple avoit pour leurs représentations, donnoit lieu de tramer des cabales pour faire applaudir l’un plûtôt que l’autre, et ces cabales devenoient des factions. […] Le peuple se partagea donc aussi de son côté, et toutes les factions du cirque, dont il est parlé si souvent dans l’histoire romaine, épouserent des troupes de pantomimes. […] Nous voïons aussi que le peuple fatigué des désordres ausquels les pantomimes donnoient lieu, demanda lui-même quelquefois leur expulsion avec autant d’empressement, qu’il demandoit leur retour en d’autres temps.
Les diplomates sont les légistes des peuples civilisés. […] C’est une superstition hébétée du peuple, digne des aruspices de Rome au temps des augures. […] Le cabinet français devient le législateur des nationalités, le tribunal des limites des peuples. […] Son juste dédain pour le caractère civique des peuples était une preuve de sa sagacité. […] La guerre à mort est désormais la seule diplomatie entre les deux peuples.
Il n’est pas douteux cependant que la constitution géographique des peuples n’y soit pour quelque chose. Les peuples dont les écrivains anciens racontent l’histoire se réduisent, pour la plupart, à des cités fort petites par l’étendue du territoire et le nombre des citoyens. […] L’histoire n’avait guère été précédemment qu’une sorte de psychologie sociale, ayant pour unique objet l’âme des individus et des peuples. […] C’est une vérité acquise que rien ne naît, ne se forme, ne se développe, ne vit et ne dure à l’état d’isolement et d’abstraction, pas plus dans la vie des peuples que dans celle des individus. […] Car c’est en mettant en jeu des forces sans conscience et sans liberté que tous ces maîtres des peuples ont gouverné leur troupeau humain.
Entre ces esprits européens, ces fabricateurs de peuple à la main, et ces hordes qui sont le matras sur lequel ils ont opéré avec une si grande énergie, on chercherait en vain un peuple. […] Il n’y a point à dédoubler ce peuple, simple, quoique rusé, sur lequel la civilisation n’est que superposée, et qui, s’il pourrit, comme disait Diderot, pourrit du dehors au dedans. Politiquement, il n’y a point de peuple, ni pour le présent ni pour l’avenir, chez lequel l’aristocratie parle une langue étrangère, et, socialement, il n’y a à Saint-Pétersbourg que des Kalmouks sans originalité. […] L’un et l’autre, ils ont beaucoup fait, mais, leur peuple donné, il était facile de le faire. […] Les peuples sont comme les femmes.
À l’honneur du peuple romain, les arts d’imagination tombèrent presque entièrement pendant la tyrannie des empereurs. […] Si l’imprimerie avait existé, les lumières et l’opinion publique acquérant chaque jour plus de force, le caractère des Romains se serait conservé, et avec lui la nation et la république ; on n’aurait pas vu disparaître de la terre ce peuple qui aimait la liberté sans insubordination, et la gloire sans jalousie ; ce peuple qui, loin d’exiger qu’on se dégradât pour lui plaire, s’était élevé lui-même jusqu’à la juste appréciation des vertus et des talents pour les honorer par son estime ; ce peuple dont l’admiration était dirigée par les lumières, et que les lumières cependant n’ont jamais blasé sur l’admiration. […] Cette succession de peuples détrônés n’est point une inévitable fatalité. […] Une corruption dégoûtante et qui fait autant frémir la nature que la morale, acheva de dégrader ce peuple jadis si grand. Les nations du Midi tombèrent dans l’avilissement, et cet avilissement prépara le triomphe des peuples du Nord.
Paul Bourget, ce n’est qu’un instinct, un instinct très humble et très « peuple ». […] Il les aime comme le peuple le plus sérieux d’allures, le plus préoccupé de morale et aussi comme celui qui a le plus complètement réalisé son rêve de la vie élégante et riche. […] Je vois que c’est le peuple le plus rapace et le plus égoïste du monde ; celui où le partage des biens est le plus effroyablement inégal, et dont l’état social est le plus éloigné de l’esprit de l’Évangile, de cet Évangile qu’il professe si haut ; celui chez qui l’abîme est le plus profond entre la foi et les actes ; le peuple protestant par excellence, c’est-à-dire le plus entêté de ce mensonge de mettre de la raison dans les choses qui n’en comportent pas… Nous sommes, certes, un peuple bien malade ; mais, tout compte fait, nous avons infiniment moins d’hypocrisie dans notre catholicisme ou dans notre incroyance, dans nos mœurs, dans nos institutions, même dans notre cabotinage ou dans nos folies révolutionnaires. […] Le Français qui met le pied dans Londres sent, peser sur lui le mépris de tout ce peuple. […] Nous aimerons tous les peuples dans un monde meilleur.
Mais les Romains ne rencontrant aucun de ces obstacles, marchèrent d’un pas égal, guidés dans cette marche par la Providence qui se sert de l’instinct des peuples pour les conduire. […] Aujourd’hui la plus complète civilisation semble répandue chez les peuples, soumis la plupart à un petit nombre de grands monarques. S’il est encore des nations barbares dans les parties les plus reculées du nord et du midi, c’est que la nature y favorise peu l’espèce humaine, et que l’instinct naturel de l’humanité y a été longtemps dominé par des religions farouches et bizarres. — Nous voyons d’abord au septentrion le czar de Moscovie qui est à la vérité chrétien, mais qui commande à des hommes d’un esprit lent et paresseux. — Le kan de Tartarie, qui a réuni à son vaste empire celui de la Chine, gouverne un peuple efféminé, tels que le furent les seres des anciens. — Le négus d’Éthiopie, et les rois de Fez et de Maroc règnent sur des peuples faibles et peu nombreux. […] Mais ce peuple est en partie retenu dans l’état héroïque par une religion pleine de croyances effrayantes, et dont les dieux tout couverts d’armes menaçantes inspirent la terreur. Les missionnaires assurent que le plus grand obstacle qu’ils aient trouvé dans ce pays à la foi chrétienne, c’est qu’on ne peut persuader aux nobles que les gens du peuple sont hommes comme eux. — L’empire de la Chine avec sa religion douce et sa culture des lettres, est très policé. — Il en est de même de l’Inde, vouée en général aux arts de la paix. — La Perse et la Turquie ont mêlé à la mollesse de l’Asie les croyances grossières de leur religion.
Le doge, à cette époque, et quand ces députés d’outre-monts arrivèrent, pouvait beaucoup ; les Conseils qu’on lui avait déjà associés pouvaient beaucoup également et étaient devenus ses adjoints nécessaires : et enfin l’assemblée générale du peuple n’avait point encore été dépouillée de tout droit de sanction. […] Le doge remit la réponse à huitaine, et, à cette date, il ne la donna encore que sous la réserve qu’il faudrait faire agréer la décision à l’assemblée du peuple, s’estimant assuré d’ailleurs de l’adhésion de son grand Conseil, qu’il avait sondé à ce sujet. Les conditions furent telles qu’un peuple marchand et politique pouvait les faire. […] Il n’y avait plus qu’à obtenir la ratification du grand Conseil et la sanction du peuple : le doge eut sans peine la première et procéda habilement à procurer la seconde, en prenant à part quarante, puis cent, puis deux cents personnes. […] Les Vénitiens, peuple marchand, n’y perdirent pas ; à défaut d’argent, ils se firent payer des croisés en corvée et en nature.
Othon se décide à laisser livrer la bataille par ses lieutenants, et à se tenir lui-même à l’écart en réserve, comme la dernière majesté du peuple romain. […] Les paroles du peuple, à l’aspect de ce cortège, étaient décourageantes et intempestives ; les soldats restaient dans un silence menaçant. […] Vitellius, impuissant, ne peut ni prévenir, ni seconder ces mouvements désordonnés du peuple et des soldats. […] Les prodiges et les superstitions d’un peuple théocratique s’y mêlent au carnage, à la famine, à l’incendie. […] « Sa mort a été une providence du peuple romain, ajoutait Néron, car il l’attribuait toujours à un naufrage.
Deux familles avaient échappé : elles fondent un nouveau peuple dont la prospérité sera assise sur les vertus domestiques et militaires, et sur la religion. […] Or les Romains étaient à la fois le plus pratique, le plus intéressé des peuples, et le plus religieux. […] Montesquieu y étudie les influences qui déterminent les tempéraments des individus et des peuples. […] De là, la variété infinie, le chaos contradictoire des lois aux différents siècles, chez les différents peuples. Chaque peuple a ses lois qui lui conviennent.
Les peuples ne sont plus aujourd’hui séparés par des murailles de la Chine. […] Rien ne permet mieux de marquer les étapes que traverse cette transfusion de pensée qui est parfois si difficile entre deux peuples, même très rapprochés. […] Elles agissent sur ce qu’il y a de plus profond dans l’esprit d’un peuple. […] Au lendemain d’une guerre on remarque aisément chez un peuple vaincu cette double propension naturelle soit à calquer les usages ou les idées du peuple vainqueur soit à en prendre le contrepied. […] § 2. — Un peuple n’imite pas seulement les peuples étrangers ; il s’imite aussi lui-même ; il a beau parfois se piquer de rompre la tradition ; il autorise cette rupture même par des exemples traditionnels ; il cherche dans son passé des précédents aux innovations qu’il hasarde.
Les peuples leur élevaient des statues ; on plaçait leur image dans les temples, et leur patrie les nourrissait aux dépens de l’État. […] D’ailleurs, pour être vraiment éloquent, il faut un sujet qui intéresse l’orateur ; il faut un peuple qui s’intéresse au sujet. […] Il s’agissait d’amuser un peuple oisif et d’attirer quelques battements de mains à l’orateur. […] L’orateur corrompait le goût du peuple, et l’indulgence du peuple corrompait l’orateur. […] Il avait pour lui son armée, le sénat et le peuple ; mais Septime Sévère l’écrasa par son activité.
Le cachet pourtant qu’on y remarque, quand on sait la suite et le lendemain de cette carrière, c’est la modération relative, Saint-Just, parlant des cruautés qui souillèrent la prise de la Bastille, disait : Le peuple n’avait point de mœurs, mais il était vif. […] Je ne sache pas qu’on ait vu jamais, sinon chez des esclaves, le peuple porter la tête des plus odieux personnages au bout des lances, boire leur sang, leur arracher le cœur et le manger ; la mort de quelques tyrans à Rome fut une espèce de religion. […] Ce prochain démagogue fait un aveu peu propre à encourager : « Le peuple est un éternel enfant. » Et rien n’empêche chez lui de croire l’aveu sincère. […] Rousseau, je ne te pardonne pas, ô grand homme, d’avoir justifié le droit de mort ; si le peuple ne peut communiquer le droit de souveraineté, comment communiquera-t-il les droits sur sa vie ? […] Dans un discours sur les subsistances (novembre 1793), il a des lueurs de justesse et des aperçus qui se rattachent encore à l’expérience : Il faudrait interroger, deviner tous les cœurs et tous les maux, et ne point traiter comme un peuple sauvage un peuple aimable, spirituel et sensible (toujours de la sensibilité : c’est encore un des mots favoris du temps), dont le seul crime est de manquer de pain.
Je le crois, cette nécessité pour un peuple d’être un peuple avant d’avoir du talent, d’avoir fait de grandes actions avant de faire des livres, n’était pas satisfaite. […] On met de l’amour-propre à tout, et les peuples, comme les individus. […] Mais vous concevez qu’il n’en était pas de même du peuple. […] On ne disait pas que ce petit peuple fût malfaisant. […] Ces questions littéraires, qui nous occupent, sont liées à une vérité historique : un peuple, une langue ; une langue, un peuple.
Il méprise le peuple, les bourgeois, les petites gens ; il fait pis, il les ignore. […] Et se tournant vers le peuple, pensant et sentant avec lui, il a eu conscience de la patrie, un des premiers de notre nation. […] Les plus grands cris pour la paix, en faveur du peuple et de la France, partent de leur groupe. […] dans la langue du peuple. […] Il s’entremit souvent entre la cour et le peuple, qui applaudissait à ses harangues.
D’autre part, il semble bien qu’il soit, de tous les empereurs et de tous les rois qui nous restent, celui qui a le plus nettement conscience de sa mission providentielle, celui qui a la conception la plus mystique de son devoir de pasteur des peuples. […] Les peuples ? […] Sûrement, il y a autre chose… » Le second acte original du jeune Empereur, ç’a été de briser l’homme qui représentait sans doute, en Allemagne, la politique nationale, mais aussi la vieille politique, celle des Richelieu, des Frédéric, des Napoléon, celle qui d’ailleurs a duré beaucoup plus longtemps que les conditions historiques qui la justifiaient, la politique du temps où les groupes humains étaient imparfaitement constitués, où les patries étaient multiples et incertaines, où les peuples pouvaient encore être considérés comme des fiefs et des héritages, où les guerres étaient guerres de princes et non de peuples. […] Et le peuple allemand ne s’est aucunement ému de la chute de l’homme à qui il doit tout précisément parce qu’il lui doit trop, surtout parce qu’il lui doit plus qu’il ne lui avait demandé, et peut-être enfin parce qu’il sent confusément que ce grand homme est l’homme du passé. […] Et, ce qui est tout à fait remarquable, c’est que, cherchant les moyens de remplir sa mission de chef absolu d’un grand peuple, l’Empereur a appelé à ses conseils des républicains de France, dont un jacobin et un anarchiste.
Ils ne font ni lois ni constitutions pour les peuples, ils font des poèmes ; leurs plans de sociétés sont l’opium des imaginations malades des peuples ; l’accès de délire qu’ils donnent aux hommes finit par des fureurs, et les fureurs finissent par l’anéantissement des sociétés. […] Les peuples vivent de vérités applicables, et les princes qui rêvent sont réveillés en sursaut par les catastrophes. […] Les élèves de Rousseau dans l’Émile seront donc un peuple de rois ! […] L’athéisme, délire froid des sociétés expirantes, ne pouvait sortir des montagnes, des lacs et des glaciers d’un peuple pastoral comme la Suisse. […] Est-ce dans de tels vases fêlés et empoisonnés que Dieu verse ses révélations pour les communiquer aux peuples ?
La pluralité, c’est le peuple, et le peuple, c’est ce qui n’est pas la raison ; car c’est ce qui n’est ni un ni continu. […] L’aristocratie consiste à croire que le peuple n’a pas de droits, que l’individu n’a pas de droits, mais que certaines classes du peuple, dans l’intérêt général, en ont. […] Qu’ai-je besoin maintenant de constitution et de droit du peuple ? Le droit du peuple, c’est le devoir du roi envers Dieu. […] Ce n’est ni le peuple, ni la loi, ni la constitution qui la donnent.
C’est de là que date pour moi ma mésestime du gouvernement parlementaire d’alors, et mon goût pour la république ; gouvernement quelquefois terrible, mais au moins vigoureux et franc, où les dictatures ont la force des institutions, et qui font faire aux nations ce qu’elles veulent, et non pas ce que veut un groupe d’intrigants, mentant au peuple du haut de la presse et de la tribune, et faisant peur aux rois des peuples, et des rois aux peuples. […] On oublie que des siècles ont remué ces lieux et ces peuples, et qu’il peut en sortir des peuples nouveaux à force de vieillesse, mais jamais d’anciens peuples. […] Il n’y trouva rien que des chants dits populaires qu’on admira par parti pris, mais qui ne sont pourtant que des complaintes du peuple. […] C’est là un poète populaire, ou plutôt c’est là un poème écrit dans la langue du peuple avec les idées, les habitudes, les travers, les loisirs des amants, dans les basses classes des peuples ! […] Quand les chants populaires ne sont pas composés à froid par des poètes politiques, ils ne sont jamais sublimes ; le peuple ne l’est pas, mais il est peuple, c’est-à-dire nature.
Comme on ne saurait faire un inventaire, même à peu près complet, de tous les faits qui coexistent au sein d’une même société ou qui se sont succédé au cours de son histoire, on ne peut jamais être assuré, même d’une manière approximative, que deux peuples concordent ou diffèrent sous tous les rapports, sauf un. […] En faisant entrer en ligne de compte plusieurs peuples de même espèce, on dispose déjà d’un champ de comparaison plus étendu. […] Elle ne s’applique, en effet, qu’aux phénomènes qui ont pris naissance pendant la vie des peuples comparés. […] Mais, plus on s’élève dans l’échelle sociale, plus les caractères acquis par chaque peuple sont peu de chose à côté des caractères transmis. […] Par conséquent, pour rendre compte d’une institution sociale, appartenant à une espèce déterminée, on comparera les formes différentes qu’elle présente, non seulement chez les peuples de cette espèce, mais dans toutes les espèces antérieures.
Il faut remonter aux sources mêmes, c’est-à-dire aux écrits des philosophes, des penseurs religieux ou politiques, des historiens et des poètes, si l’on veut pénétrer la vie des peuples. […] Quelle idée a-t-on de venir lui mêler dans le sang cette substance des autres peuples ? […] Les voyages à travers les livres ne produisent que des résultats restreints sans les voyages à travers les peuples. […] On apprend les langues étrangères pour apprendre les peuples étrangers. […] Tant que nous n’aurons pas acquis cette connaissance des peuples étrangers, nous ne nous connaîtrons pas nous-mêmes.
Le peuple hébreu est le plus ancien de tous. […] Dans ce chapitre, l’auteur jette en passant les fondements d’une critique nouvelle : 1º La civilisation de chaque peuple a été son propre ouvrage, sans communication du dehors ; 2º On a exagéré la sagesse ou la puissance des premiers peuples ; 3º On a pris pour des individus des êtres allégoriques ou collectifs (Hercule, Hermès.) […] Division des peuples anciens en hébreux et gentils. […] Migrations des peuples.
C’était un peuple dont la puissance consistait dans une volonté suivie, plutôt que dans l’impétuosité de ses passions. […] Dans les classes même du peuple une certaine gravité distinguait toutes les actions. […] À Athènes, la philosophie était, pour ainsi dire, l’un des beaux-arts que cultivait ce peuple, enthousiaste de tous les genres de célébrité. […] Lorsque Cicéron plaide devant le peuple, devant le sénat, devant les prêtres ou devant César, son éloquence change de formes. […] Quel rapport peut-il y avoir entre le caractère, les talents et les goûts d’un tel peuple pendant qu’il était républicain, et tout ce que nous lisons de l’enthousiasme du peuple grec pour le perfectionnement de l’art dramatique et poétique ?
Peut-être même Solon n’est-il que le peuple d’Athènes, considéré comme reconnaissant ses droits, comme fondant la démocratie. […] Enfin les anciens Écossais (selon Boëce), les Mexicains et autres peuples indigènes de l’Amérique écrivaient en hiéroglyphes, comme les Chinois le font encore aujourd’hui. […] Elle dut être adoptée par une convention libre ; car c’est une règle éternelle que le langage et l’écriture vulgaire sont un droit des peuples. […] Pourquoi y a-t-il autant de langues vulgaires qu’il existe de peuples ? […] Comme le prouve le succès avec lequel Ménénius Agrippa ramena à l’obéissance le peuple romain.
En conséquence, il partagea son peuple en tribus et en phratries. […] Ces croyances nous semblent bien grossières, mais elles ont été celles du peuple le plus spirituel de ces temps-là, et elles ont exercé sur ce peuple et sur le peuple romain une si forte action que la plus grande partie de leurs lois, de leurs institutions et de leur histoire, est venue de là. […] L’Europe a vu durant des siècles plusieurs principes opposés se disputer le gouvernement des peuples, et les peuples se refuser quelquefois à toute organisation sociale. […] Si le président ne nommait que deux candidats, le peuple votait pour eux nécessairement ; s’il en nommait trois, le peuple choisissait entre eux. […] La loi antique ne sortit pas non plus des votes du peuple.
Après avoir reçu les ambassadeurs de César avec toute la politesse chinoise, il s’informe secrètement par ses interprètes des usages, des sciences et de la religion de ce peuple romain, aussi célèbre dans l’Occident que le peuple chinois l’est dans l’Orient. […] « Ces peuples adorent un Dieu suprême et unique, qu’ils appellent toujours Dieu très bon et très grand. […] » Lisez ensuite cette belle définition du peuple : « Un peuple n’est pas toute agrégation d’hommes rassemblés par hasard, mais un peuple est une société formée sous la garantie des lois pour l’utilité réciproque de tous les citoyens. » La doctrine du prétendu Contrat social de J. […] Vois-tu cette ville qui, forcée par mes armes de se soumettre au peuple romain, renouvelle nos anciennes guerres et ne peut souffrir le repos ? […] Les hommes, dispersés sur la terre, sont tellement isolés les uns des autres qu’entre les divers peuples il n’est point de communication possible.
Robespierre combat l’athéisme et fait décréter que le peuple français reconnaît l’existence de l’Être suprême. […] Une révolution est ainsi un tournant dans l’histoire des idées d’un peuple. […] Il a peur d’être trop hardi ; il n’ose pas être franchement peuple. […] Le peuple, là aussi, a détrôné les rois. […] Les premières, en rapprochant les peuples, créent de l’un à l’autre des courants d’imitation.
De là, dans toutes les religions et chez tous les peuples, la foi aux hommes divins. […] Et Samuel parla au nom de l’Éternel au peuple qui demandait un roi. […] Le bon sens des peuples ne s’y trompe pas. […] C’est pour le peuple qu’est le poëte. […] Un peuple affranchi n’est point une mauvaise fin de strophe.
« J’embrasserai comme dans un tableau raccourci l’image entière du peuple romain », disait Florus au début de son Abrégé de l’histoire romaine. […] C’est un prophète qui ramasse sous son regard l’histoire de tous les peuples : il a impuissance ou dédain d’être fleuri. […] Celle-ci étant réservée pour la fin, on aura donc, avant tout, la suite du peuple de Dieu et de la religion, le peuple juif à tous les moments de son existence, tant qu’il fut le peuple choisi et préféré entre tous, et depuis même qu’il est le peuple rejeté et réprouvé ; la vocation divine longtemps fixée et circonscrite en lui, puis étendue plus tard et transférée à l’immensité des Gentils. […] Il goûta, lui aussi, les opprobres dans sa fuite précipitée de l’Égypte et dans son exil de quarante ans dans le désert ; il but, à sa manière, le calice pendant les fréquentes révoltes de son peuple ; il eut un avant-goût des choses de Jésus-Christ, même par l’amertume. […] Son ingénieuse division des différents âges du peuple romain est prise de Sénèque le père.
Des peuples ont été civilisés par les sons de la lyre, d’autres par le glaive du guerrier, d’autres par les relations du commerce. […] Ajoutons ici que le gouvernement étant destiné, par la nature même de son institution, à réprimer les erreurs de la volonté d’un peuple, il est nécessaire qu’il soit primitivement imposé à ce peuple comme les autres nécessités sociales. […] Bossuet, dans sa Politique sacrée, admet le consentement des peuples. Il a bien raison, car le consentement des peuples constitue la liberté. […] Il a fallu, ainsi que nous l’avons remarqué, il a fallu que la liberté fût prouvée pour les gouvernements comme pour les peuples.
Que penseriez-vous d’un peuple civilisé qui jetterait ses manuscrits aux flammes, et ses médailles à la fournaise, pour prouver sa civilisation ? […] qu’est-ce que le Japon, et quelle vaine manie d’expédition, sans possessions et sans intérêt, vous pousse à aller bouleverser à coup de boulets français ces fourmilières pacifiques et industrieuses, à la voix de quelques propagandistes agitateurs du monde, qui veulent imposer des mœurs européennes à des peuples qui vivent de dogmes asiatiques ? […] Comptez enfin les Arabes de Damas, reste du peuple des kalifes, race active, chevaleresque, fanatique, séditieuse d’habitude, torride de sang, toujours prête à prendre la torche, le poignard ou le fusil, et dont la capitale est en frémissement continuel contre les garnisons turques, qui ne la contiennent qu’en lui sacrifiant tous les dix ans la tête de leur pacha. […] Avec du cœur on fait de nobles imprudences ; avec des mots on soulève des peuples, c’est vrai ; mais avec des mots on ne refait pas des frontières ! […] À chacune de ces superficies géographiques j’appliquerais la partie de l’histoire qui lui donne sa signification, son caractère, sa corrélation avec les peuples voisins, avec les temps, avec les idées, les religions, la politique de telle ou telle date du globe.
Plus le prince a de réputation, plus cet intérêt augmente ; on aime à voir un homme admiré dans sa cour et sur les champs de bataille, écrire et penser dans son cabinet, et parler en philosophe aux peuples qu’il sait gouverner en roi. […] Les panégyriques, d’ailleurs, étaient l’esprit de ce temps-là, comme les satires et les chansons ont été en usage chez d’autres peuples. […] Tel est un autre endroit sur l’utilité de mettre de bonne heure un jeune prince en action ; de familiariser et ses yeux et son âme avec les périls, les combats, les peuples et les armées ; de lui faire connaître par lui-même, dans son empire, la situation des lieux, l’étendue des pays, la puissance des nations, la population des villes, le caractère des peuples, leur force, leur pauvreté, leur richesse. […] Sons lui le peuple des villes, heureux sans insolence, s’accoutumera à vivre dans l’abondance sans orgueil ; le peuple des campagnes, en cultivant ses champs, fournira le nécessaire à ceux qui, le fer à la main, défendent ses moissons. […] tant qu’un prince est vivant, tous les regards sont fixés sur lui ; son rang, les hommages qu’il reçoit, les espérances et les craintes d’un peuple, la pompe et l’appareil qui l’entourent, en font une espèce de colosse qui remplit tout : mais à sa mort, il reprend sa grandeur naturelle ; ensuite il disparaît à mesure qu’il se recule et qu’il s’enfonce dans les siècles.
. — Demander l’avis du propriétaire, soumettre au peuple français les plans de sa future habitation, c’était trop visiblement parade ou duperie : en pareil cas, la question fait toujours la réponse, et d’ailleurs, cette réponse eût-elle été libre, la France n’était guère plus en état que moi de la donner : dix millions d’ignorances ne font pas un savoir. Un peuple consulté peut à la rigueur dire la forme de gouvernement qui lui plaît, mais non celle dont il a besoin ; il ne le saura qu’à l’usage : il lui faut du temps pour vérifier si sa maison politique est commode, solide, capable de résister aux intempéries, appropriée à ses mœurs, à ses occupations, à son caractère, à ses singularités, à ses brusqueries. […] La forme sociale et politique dans laquelle un peuple peut entrer et rester n’est pas livrée à son arbitraire, mais déterminée par son caractère et son passé. […] Que de temps, que d’études, que d’observations rectifiées l’une par l’autre, que de recherches dans le présent et dans le passé, sur tous les domaines de la pensée et de l’action, quel travail multiplié et séculaire, pour acquérir l’idée exacte et complète d’un grand peuple qui a vécu âge de peuple et qui vit encore ! […] Dans l’organisation que la France s’est faite au commencement du siècle, toutes les lignes générales de son histoire contemporaine étaient tracées, révolutions politiques, utopies sociales, divisions des classes, rôle de l’Église, conduite de la noblesse, de la bourgeoisie et du peuple, développement, direction ou déviation de la philosophie, des lettres et des arts.
Richelieu, l’abbé Fleury posent nettement en principe que le peuple ne doit savoir ni lire ni écrire. […] La moralité supérieure du peuple allemand vient de ce qu’il a été jusqu’à nos jours très maltraité. […] De la masse ne peut émerger assez de raison pour gouverner et reformer un peuple. […] Ce peuple est soumis, résigné au-delà de tout ce qu’on peut croire. […] Conservons au peuple son éducation religieuse, mais qu’on nous laisse libres.
Chez un ancien peuple, il y avait une loi qui ordonnait de graver sur un monument public, toutes les grandes actions que faisait le prince ; on élevait une colonne dans le temple, on la montrait au prince le premier jour de son règne, et on lui disait : « Voici le marbre où l’on doit graver le bien que tu feras ; voilà le burin dont on doit se servir ; que la postérité vienne lire ici ton bonheur et le nôtre. » D’abord on n’y grava rien que de vrai ; un prince eut le malheur de ne faire aucun bien à ses peuples, il mourut sans qu’un seul caractère fût tracé. Bientôt tout changea ; la flatterie prit le burin des mains de la vérité, et moins les peuples étaient heureux, plus les colonnes étaient chargées d’éloges, d’inscriptions et de titres : à la fin un bon roi ordonna de briser ces marbres et d’en disperser les ruines. […] » On ne peut douter qu’un prince ami de l’humanité, si on avait eu le courage de lui parler ainsi, avant qu’il entendît un de ses panégyriques, n’eût à l’instant congédié l’orateur, et que le peuple assemblé n’eût prononcé des imprécations contre le premier citoyen qui dans la suite oserait renouveler cet usage. […] Le peuple romain, de conquérant devenu oisif, et ne pouvant plus se désennuyer en gouvernant le monde, aimait les fêtes, et on les lui prodiguait. Quand un prince avait régné vingt-quatre ans, il fallait célébrer le bonheur de l’empire ; c’était alors des jeux pour le peuple et un panégyrique pour le prince.
La poésie dramatique n’a donc pu naître qu’au milieu du peuple. […] C’est à de telles fêtes que le poëte dramatique appelle le peuple assemblé. Il se charge de le divertir, mais d’un divertissement que le peuple ne connaîtrait pas sans lui. […] Quelles étaient donc les mœurs de ce peuple si avide de tels amusements ? […] Le clergé anglais était plus intimement associé aux goûts, aux habitudes, aux divertissements du peuple.
et croit-on que Virgile et Homère parlassent en vers la même langue que le commun peuple de Rome ? On pourrait, je crois, en dire presque autant de la belle langue attique chez les Grecs, laquelle était certainement quelque chose d’un peu artificiel, bien que se rapportant de préférence au ton et au goût du peuple d’Athènes, tout comme en Italie la belle langue aime à se réclamer du peuple de Florence. […] Malherbe s’est tout d’abord vanté, on s’en souvient, d’aller prendre les mots de son vocabulaire parmi les portefaix du port au foin et dans le peuple des halles. Or il n’en est pas résulté que les gens du peuple en France aient su par cœur les vers de Malherbe et les aient pu comprendre.
Tous les enseignements ont changé, et il est permis d’affirmer que nous avons plus de ressources qu’on n’en a eu jamais pour étudier le génie des peuples anciens. […] On a dit que les historiens anciens étaient les historiens des peuples, et que les historiens modernes étaient les historiens des princes, des grands de la terre. […] Nos annales françaises font partie du domaine de la poésie, comme toutes les histoires des peuples ; mais c’est en ce qu’elles tiennent à l’histoire du genre humain. […] On pourrait même dire que nos spectacles tels qu’ils sont, quoique si prodigieusement détournés de leur institution primitive, n’existeraient pas si une pensée religieuse n’avait pas présidé à l’invention de la scène, chez tous les peuples. […] Ainsi l’auteur de Veïes conquise, en adoptant la machine de l’Énéide, s’est trompé, car il n’a pas pu emprunter la croyance des peuples.
La guerre contre le peuple envahisseur, guerre rude et opiniâtre, est restée, dans toute sa durée, unanime et simple. […] « Les gouvernements sont républicains, dit-il, en proportion seulement de leur aptitude à s’identifier avec la volonté du peuple et de leur fidélité à l’accomplir ; selon qu’ils admettent dans une plus ou moins grande proportion le contrôle et l’élection populaires… Le véritable principe du gouvernement républicain est de reconnaître à chaque citoyen l’égalité de droits en ce qui touche sa personne, sa propriété, et la disposition de l’une et de l’autre. […] La première constitution fédérale, décrétée en 1778 dans la troisième année de l’Indépendance, subsista sans inconvénient tant que dura la guerre ; l’esprit des peuples, excité par le danger et réuni dans un intérêt commun, servait de supplément à l’acte fédéral et les portait spontanément aux efforts les plus énergiques ; mais la guerre une fois terminée et chacun réinstallé dans ses foyers, on accorda moins d’attention aux demandes du Congrès. […] En signalant les imperfections nombreuses de la constitution alors en vigueur dans la Virginie, Jefferson fait observer avec raison qu’à l’origine, chez les meilleurs patriotes, il y avait inexpérience du gouvernement du peuple par lui-même. […] Quand le peuple se lève et passe, ces gens-là se jettent à plat-ventre : on les croirait morts en ces moments, si en ces moments l’on songeait à eux ; mais sitôt que le peuple en personne est passé, vite ils regardent alentour et se ravisent.
Les desseins des rois, les abominations des cités, les voies iniques et détournées de la politique, le remuement des cœurs par le fil secret des passions, ces inquiétudes qui saisissent parfois les peuples, ces transmutations de puissance du roi au sujet, du noble au plébéien, du riche au pauvre : tous ces ressorts resteront inexplicables pour vous, si vous n’avez, pour ainsi dire, assisté au conseil du Très-Haut, avec ces divers esprits de force, de prudence, de faiblesse et d’erreur, qu’il envoie aux nations qu’il veut ou sauver ou perdre. […] Qu’on vante tant qu’on voudra celui qui, démêlant les secrets de nos cœurs, fait sortir les plus grands événements des sources les plus misérables : Dieu attentif aux royaumes des hommes ; l’impiété, c’est-à-dire l’absence des vertus morales, devenant la raison immédiate des malheurs des peuples : voilà, ce nous semble, une base historique bien plus noble, et aussi bien plus certaine que la première. […] L’esprit de Dieu s’étant retiré du milieu du peuple, il ne resta de force que dans la tache originelle qui reprit son empire, comme au jour de Caïn et de sa race. […] La patrie n’est plus dans ses foyers, elle est dans un camp sur le Rhin, comme au temps de la race de Mérovée ; on croit voir le peuple Juif chassé de la terre de Gessen, et domptant les nations barbares dans le désert. […] Mais Dieu vit l’iniquité des cours, et il dit au soldat étranger : Je briserai le glaive dans ta main, et tu ne détruiras point le peuple de saint Louis.
c’est le peuple. […] L’affluence du peuple, l’opulence, l’oisiveté, qui ne peut s’occuper que des plaisirs & des arts, & non du gouvernement, ont donné un nouveau tour d’esprit à un peuple entier. […] Ce peuple si récent, en comparaison des nations asiatiques, a été cinq cens années sans historiens. […] On apprend aussi par cet événement, que les peuples de l’Occident ont toujours été meilleurs marins que les peuples asiatiques. […] Ce système d’équilibre a toujours été inconnu des anciens, & c’est la raison des succès du peuple romain, qui ayant formé une milice supérieure à celle des autres peuples, les subjugua l’un après l’autre, du Tibre jusqu’à l’Euphrate.
Depuis la plus lointaine antiquité, la cité possédait un droit destiné à régler par la justice, substituée à la violence, les différends entre concitoyens A l’aube des temps modernes, lorsque l’esprit humain vint à prendre conscience de l’inter-dépendance des peuples, l’idée qu’il pouvait peut-être y avoir une justice, présidant aux rapports inter-nationaux, et par conséquent un droit dont ressortiraient les conflits entre « grands êtres » sociaux, germa dans les cerveaux d’élite. […] Grotius établit « qu’il y a un droit naturel des nations fondé sur l’instinct de sociabilité ». « C’est à lui qu’il faut attribuer l’honneur d’avoir le premier émis la grande pensée humanitaire d’une commission de tous les peuples s’entendant pour proscrire la guerre. » La science du droit international existait désormais encore humble et restreinte, mais contenant en germe toutes les larges idées de l’avenir. […] Les hommes d’élite ne sont-ils point les représentants réels des peuples ? […] De même que le Sacré-Collège Romain dont les membres appartiennent à toutes les nations, parle au nom de la Catholicité, au-dessus des patries, cette assemblée des représentative men de chaque peuple parlerait au nom de l’humanité au-dessus des territoires. […] Et ce serait l’acheminement fatal vers une refonte complète de nos conceptions coutumières et néfastes de peuples et de patries.
C’est, en dernière analyse, séparer une force de sa direction, une volonté de son image-but, une variété animale de son premier type, que de distinguer une armée de son général, une masse d’adhérents h une entreprise de celui qui la conçut, un peuple de ses chefs, une classe de ses membres énergiques. […] Les nations restent en lutte guerrière, le peuple le plus lettré pourra infliger moins de maux aux autres qu’un peuple sans arts. […] Enfin, un troisième ordre de connaissances, extraites de la notion de la relation entre l’œuvre et son admirateur, nous permet de fonder cette science qui jusqu’ici n’existait que de nom : la psychologie des peuples. […] En résumé l’esthopsychologie constitue, par ses analyses et avec la psychologie des grands hommes d’action, la psychologie appliquée des peuples et des individus. […] Tarde ne dit pas autre chose, en privilégiant les chefs politiques et militaires sur les artistes toutefois, dès lors que la théorie du grand homme s’appuie sur celle de la suggestion universelle : « combien de grands hommes, de Ramsès à Alexandre, d’Alexandre à Mahomet, de Mahomet à Napoléon, ont ainsi polarisé l’âme de leur peuple !
Les bataves et les anciens frisons, objectera-t-on encore, étoient deux peuples composez de soldats, et qui se soulevoient dès que les romains vouloient exiger d’eux d’autres tributs que des services militaires. […] Ils surpassent tous les autres peuples dans le talent de policer les villes et dans le gouvernement municipal. Le peuple y païe plus volontiers les plus grands impôts qui se levent présentement en Europe, qu’il ne fait le métier de soldat. […] Le céremonial est aujourd’hui à la mode, et ils tâchent d’être supérieurs dans sa pratique aux autres peuples, comme ils le furent autrefois dans la discipline militaire. […] Après tout ce que je viens d’exposer il est plus que vrai-semblable, que le génie particulier à chaque peuple, dépend des qualitez de l’air qu’il respire.
Il sera aussi le passage des peuples. […] Le moi d’un homme est plus vaste et plus profond encore que le moi d’un peuple. […] Tel peuple résiste à l’Allemagne qui cède au germanisme. […] L’Allemagne est le puits des peuples. […] Le peuple allemand, si comprimé comme peuple, si émancipé comme penseur, chante avec un sombre amour.
Elle a ruiné dans l’aristocratie tout ce qui lui nuisait à elle-même, non pas tout ce qui nuisait au peuple. […] Le quidquid principi placuit était leur règle, que le prince d’ailleurs fût le monarque ou le peuple : despotisme de part et d’autre. […] Lorsque Fra Paolo, le publiciste du conseil des dix, écrivait : « Que le peuple soit pourvu des choses nécessaires à la vie ! […] Ainsi les grands méprisaient le peuple et lui faisaient sentir le poids de leur mépris. Le peuple a cessé de supporter le mépris, et il a demandé à être respecté à l’égal des grands : tel est le véritable bienfait de la démocratie.
… le sens commun, c’est-à-dire le jugement irréfléchi d’une classe d’homme, d’un peuple, de l’humanité ; l’accord général du sens commun des peuples constitue la sagesse du genre humain. […] N’essayons pas d’expliquer cette uniformité du droit naturel en supposant qu’un peuple l’a communiqué à tous les autres. […] La langue héroïque employa pour noms communs des noms propres ou des noms de peuples. […] Tous les peuples de l’antiquité dirent un Hercule pour un héros. […] Pourquoi tous les peuples grecs se sont-ils disputé sa naissance, l’ont-ils revendiqué pour citoyen ?
Peu familiarisés avec la nature, nous ne voyons qu’uniformité là où les peuples nomades ou agricoles ont vu de nombreuses originalités individuelles. […] Il y a, je le sais, des éléments communs que l’examen de tous les peuples et de tous les pays rendra à l’analyse. […] L’étude scientifique des peuples sauvages amènerait des résultats bien plus décisifs encore, si elle était faite par des esprits vraiment philosophiques. […] C’est le peuple qui fournit la matière, et cette matière, ils ne la voient pas, ou ils s’imaginent bonnement qu’elle est de l’invention du poète. […] On se figure qu’un peuple n’a de littérature que quand il a des monuments définis et arrêtés.
Ainsi se dégradent les arts, dans l’abaissement de fortune et l’avilissement de cœur que souffrent les peuples. […] Que l’esprit ne craigne donc pas de se plaire et de s’arrêter à ces charmantes études, qui renferment une si grande part de l’histoire des peuples ! […] Le second n’est pas seulement une surcharge lyrique du premier : on y sent aussi ce travail anonyme de la pensée morale dans un peuple. […] Et cependant les peuples en paix sont occupés de leurs travaux. […] Nulle vertu civile, nul souvenir de gloire et de liberté n’est rappelé, dans cette langue encore si pure, à ce peuple grec transplanté depuis moins d’un siècle.
Dans l’anxiété où l’on est, dans l’incertitude du but où la société européenne est poussée, on est allé demander des enseignements, des augures rassurants ou contraires, des raisons de se hâter ou de craindre, à ce grand peuple qui offre soixante années de prospérité croissante sous une forme politique jusque-là inaccoutumée dans l’histoire. […] Il n’est plus permis de dire, en réponse aux exemples empruntés des États-Unis, que ces exemples ne prouvent rien, appliqués à de vieux peuples civilisés, et venant d’un peuple véritablement enfant et encore à l’état élémentaire. […] Il distingue deux espèces de centralisations : 1° celle qui comprend certains intérêts communs à toutes les parties de la nation, tels que la formation des lois générales et les rapports du peuple avec les étrangers ; 2° celle qui voudrait comprendre et organiser administrativement les intérêts spéciaux à certaines parties de la nation, tels, par exemple, que les entreprises communales. […] Il a voulu montrer, par l’exemple de l’Amérique, que les lois et surtout les mœurs peuvent permettre à un peuple démocratique de rester libre, mais il est très loin de croire que nous devions suivre de près ces exemples et nous asservir à ces moyens. […] Son idée est que les peuples, même dans leurs développements les plus éloignés, ne peuvent se séparer jamais des circonstances qui ont accompagné leur naissance et leur formation.
On sait qu’il était né dans cette ville où la plus étonnante des institutions avait créé une nature nouvelle ; où l’on était citoyen avant que d’être homme ; où le sexe le plus faible était grand ; où la loi n’avait laissé de besoins que ceux de la nature ; de passions que celle du bien public ; où les femmes n’étaient épouses et mères que pour l’État ; où il y avait des terres et point d’inégalité ; des monnaies et point de richesse ; où le peuple était souverain quoiqu’il y eût deux rois ; où les rois absolus dans les armées, étaient ailleurs soumis à une magistrature terrible ; où un sénat de vieillards servait de contrepoids au peuple et de conseil au prince ; où enfin tous les pouvoirs étaient balancés, et toutes vertus extrêmes. […] ou parce que le luxe de nos mœurs se communiquant à nos esprits comme à nos âmes, nous ôterait ce goût précieux et pur de simplicité ; ou parce que, l’inégalité plus marquée dans les monarchies, mettant plus de distinction entre les rangs, il doit nécessairement y avoir plus d’affectation, plus d’effort, plus de désir de paraître différent de ce que l’on est, et par conséquent quelque chose de plus exagéré dans les manières, dans les mœurs et dans la tournure générale de l’esprit, ou enfin, parce que chez un peuple indifférent et léger, qui peut-être voit tout avec rapidité et ne s’arrête sur rien, il faut, pour ainsi dire, que tous les objets soient en relief pour qu’ils soient aperçus ? […] C’est là en effet que toute l’antiquité se trouve ; là, chaque homme paraît tour à tour avec son génie, et les talents ou les vertus qui ont influé sur le sort des peuples. Naissance, éducation, mœurs ; principes ou qui tiennent au caractère ou qui le combattent ; concours de plusieurs grands hommes qui se développent en se choquant ; grands hommes isolés et qui semblent jetés hors des routes de la nature dans des temps de faiblesse et de langueur ; lutte d’un grand caractère contre les mœurs avilies d’un peuple qui tombe ; développement rapide d’un peuple naissant à qui un homme de génie imprime sa force ; mouvement donné à des nations par les lois, par les conquêtes, par l’éloquence ; grandes vertus toujours plus rares que les talents, les unes impétueuses et fortes, les autres calmes et raisonnées ; desseins, tantôt conçus profondément et mûris par les années, tantôt inspirés, conçus, exécutés presque à la fois, et avec cette vigueur qui renverse tout, parce qu’elle ne donne le temps de rien prévoir ; enfin des vies éclatantes, dès morts illustres et presque toujours violentes ; car, par une loi inévitable, l’action de ces hommes qui remuent tout, produit une résistance égale dans ce qui les entoure ; ils pèsent sur l’univers, et l’univers sur eux ; et derrière la gloire est presque toujours caché l’exil, le fer ou le poison : tel est à peu près le tableau que nous offre Plutarque. […] De ce rapprochement ou de ce contraste, naît le ridicule que les peuples simples ignorent, que les peuples à grand caractère méprisent, mais qui est si à la mode chez toutes les nations, dans cette époque où les vices se mêlent aux agréments, et où l’esprit ayant peu de grandes choses à observer, multiplie par le loisir ses idées de détail.
Il fallait, de ce peuple militaire, refaire à contrecœur un peuple civil. […] C’était, depuis les Grecs de l’antiquité et depuis les Italiens de la Renaissance, le peuple littéraire entre tous les peuples. […] Le peuple s’épouvante et fuit de toutes parts. […] Peuples de la terre, chantez. […] Peuples, et vous, Abner, reconnaissez Joas.
Un peuple en révolution n’a plus d’alliés et d’amis. […] Il respecta toujours les usages des autres peuples, comme il avait voulu qu’on respectât les droits du peuple américain. […] » Quelle grande idée cet aveu de Xerxès donne du peuple vainqueur ! […] L’histoire des peuples modernes est sèche et petite, sans que les peuples soient plus heureux. […] Inachus était un roi bienfaisant, ami de son peuple dont il était aimé.
Ce peuple, dont tous les pas sont marqués par des phénomènes ; ce peuple, pour qui le soleil s’arrête, le rocher verse des eaux, le ciel prodigue la manne ; ce peuple ne pouvait avoir des fastes ordinaires. […] Quand on songe que Moïse est le plus ancien historien du monde ; quand on remarque qu’il n’a mêlé aucune fable à ses récits ; quand on le considère comme le libérateur d’un grand peuple, comme l’auteur d’une des plus belles législations connues, et comme l’écrivain le plus sublime qui ait jamais existé ; lorsqu’on le voit flotter dans son berceau sur le Nil, se cacher ensuite dans les déserts pendant plusieurs années, puis revenir pour entrouvrir la mer, faire couler les sources du rocher, s’entretenir avec Dieu dans la nue, et disparaître enfin sur le sommet d’une montagne, on entre dans un grand étonnement. Mais lorsque, sous les rapports chrétiens, on vient à penser que l’histoire des Israélites est non seulement l’histoire réelle des anciens jours, mais encore la figure des temps modernes ; que chaque fait est double, et contient en lui-même une vérité historique et un mystère ; que le peuple juif est un abrégé symbolique de la race humaine, représentant, dans ses aventures, tout ce qui est arrivé et tout ce qui doit arriver dans l’univers ; que Jérusalem doit être toujours prise pour une autre cité, Sion pour une autre montagne, la Terre Promise pour une autre terre, et la vocation d’Abraham pour une autre vocation ; lorsqu’on fait réflexion que l’homme moral est aussi caché sous l’homme physique dans cette histoire ; que la chute d’Adam, le sang d’Abel, la nudité violée de Noé, et la malédiction de ce père sur un fils, se manifestent encore aujourd’hui dans l’enfantement douloureux de la femme, dans la misère et l’orgueil de l’homme, dans les flots de sang qui inondent le globe depuis le fratricide de Caïn, dans les races maudites descendues de Cham, qui habitent une des plus belles parties de la terre91 ; enfin, quand on voit le Fils promis à David venir à point nommé rétablir la vraie morale et la vraie religion, réunir les peuples, substituer le sacrifice de l’homme intérieur aux holocaustes sanglants, alors on manque de paroles, ou l’on est prêt à s’écrier avec le prophète : « Dieu est notre roi avant tous les temps. » Deus autem rex noster ante sæcula. […] Au reste, l’esprit de tout l’Évangile de saint Jean est renfermé dans cette maxime qu’il allait répétant dans sa vieillesse : cet apôtre, rempli de jours et de bonnes œuvres, ne pouvant plus faire de longs discours au nouveau peuple qu’il avait enfanté à Jésus-Christ, se contentait de lui dire : Mes petits enfants, aimez-vous les uns les autres.
Nous avons déjà dit plus haut que toutes les anciennes histoires profanes commencent par des fables ; que les peuples barbares, sans communication avec le reste du monde, comme les anciens Germains et les Américains, conservaient en vers l’histoire de leurs premiers temps ; que l’histoire romaine particulièrement fut d’abord écrite par des poètes, et qu’au moyen âge celle de l’Italie le fut aussi par des poètes latins. — 2. […] Ces chanteurs n’étaient sans doute autres que les rapsodes, ces hommes du peuple qui savaient chacun par cœur quelque morceau d’Homère, et conservaient ainsi dans leur mémoire ses poèmes, qui n’étaient point encore écrits. […] D’après l’étymologie, les rapsodes (de ῥάπτειν, coudre, ᾠδάς, des chants), ne faisaient que coudre, arranger les chants qu’ils avaient recueillis, sans doute dans le peuple même. […] Aristarque corrigea les poèmes d’Homère, et pourtant, sans parler de cette foule de licences dans la mesure, on trouve encore dans la variété de ses dialectes, ce mélange discordant d’expressions hétérogènes, qui étaient sans doute autant d’idiotismes des divers peuples de la Grèce. — 8. […] Ces poètes dont le nom vient de κύκλος, cercle, ne purent être que des hommes du peuple qui, les jours de fêtes, chantaient les fables à la multitude rassemblée en cercle autour d’eux.
Il avait fait une levée en masse et armé le peuple au détriment de la classe noble, qui seule, suivant M. de Bonald, doit avoir le privilège de porter les armes. […] Au dogme de la souveraineté du peuple, qui, suivant eux, ne faisait que substituer une tyrannie à une autre, ils opposaient la doctrine de la souveraineté de la raison. […] Les économistes pensaient que les institutions politiques des peuples ont sans doute une grande importance, qu’il n’est pas indifférent à un peuple d’être libre ou gouverné par un pouvoir arbitraire. […] Il serait impossible de surprendre une vue politique de quelque nouveauté et de quelque importance dans les Paroles d’un croyant, dans le Livre du peuple, dans l’Esclavage moderne, dans le Passé et l’avenir du peuple. […] A cette époque, le tout absorbe les parties, l’État l’individu, l’humanité les peuples et les républiques.
Voyez ce que dit Samuel aux peuples qui demandaient un roi. […] Les peuples alors étaient punis pour les fautes des rois ; mais il fallait que les peuples eussent mérité d’avoir de mauvais princes, car les jugements de Dieu furent toujours équitables. […] Les annales de tous les peuples sont ouvertes à chacun. […] Ainsi il ne faut pas affirmer, de ce qu’il y a aujourd’hui un pacte entre le souverain et le peuple, qu’on doive toujours remonter à un pacte primitif. […] Ainsi, en définitive, de ce que l’opinion des peuples existe à présent comme puissance dirigeante, il ne finit pas conclure la souveraineté du peuple et l’usurpation des gouvernements.
Originairement Jupiter fut en poésie un caractère divin, un genre créé par l’imagination plutôt que par l’intelligence (universale fantastico), auquel tous les peuples païens rapportaient les choses relatives aux auspices. […] C’était avec le commencement des peuples, que Grotius, Selden et Pufendorf devaient commencer leurs systèmes (axiome 106 : les sciences doivent prendre pour point de départ l’époque où commence le sujet dont elles traitent). […] Tous les peuples placent la beauté des temples dans leur élévation prodigieuse. […] La défense de la divination faite par Dieu à son peuple fut le fondement de la véritable religion. […] Ils parlent de celui qui regarde la conservation du genre humain, et ils ne disent rien de celui qui a rapport à la conservation des peuples en particulier.
Mais j’y apportais sans doute trop de zèle, et je vois bien maintenant que je me rendais importun à mes ministres et à mon peuple en m’occupant trop minutieusement des affaires publiques, après les avoir trop longtemps négligées. […] Ma fille, que j’aimais tendrement, avait le tort de donner dans une dévotion outrée ; et cela n’était point pour plaire à un peuple jeune et généreux, qui commence à s’affranchir de la superstition et chez qui les lumières de la philosophie se répandent de jour en jour. […] « Ainsi l’affection de mon peuple, sinon son estime et son respect, s’était lentement détournée de moi et des miens. […] Ainsi le Brésil vient d’inaugurer brillamment, et de la façon la plus piquante, une nouvelle espèce de révolutions : celles où les peuples seront polis et les monarques résignés. […] Les peuples latins sont tout prêts.
L’Histoire y est aussi esquissée en traits rapides, mais il y a peu de passé encore dans cette vie d’un peuple, et l’expérience qu’il fait est si nouvelle, que l’avenir, bien plus que le passé, y prend le regard de l’historien. […] On ne se défait pas de ce chaînon qui vous scelle, fussiez-vous un Hercule de peuple capable de tout briser, dans votre destinée historique ! […] L’anarchie d’un peuple qui ne s’entend pas lui-même parlerait-elle fatalement, comme une contagion funeste, dans l’esprit de ceux qui le contemplent ? […] Moi, je ne cesserai d’appeler cela une question d’orgueil, d’avarice et d’ingratitude, une question que le peuple américain d’alors n’aurait jamais posée sans ses chefs, dit Xavier Eyma, avec une imprudente naïveté (p. 111, Ier vol.) ! […] Lui appartenaient-ils, ses chefs, au peuple américain, ou leur appartenait-il, ce peuple ?
L’âge de l’enthousiasme et de l’imagination est-il passé pour les peuples, ou même épuisé pour l’homme ? […] On ne peut donc en douter : à cette race sans nom, et ce peuple multiple et mêlé qui s’étend si loin du nord au sud de l’Amérique, appartient déjà le meilleur des enthousiasmes patriotiques, celui qui tient à la liberté comme au sol, et qui a respiré l’amour des lois avec l’air natal. […] Quand la force tombe, quand le flambeau se déplace, quand une nation, usée de lassitude et de souffrance, ne sent plus palpiter en elle les grandes fibres de la vie sociale, un autre peuple a déjà recueilli son héritage. […] L’œuvre poétique du nouveau monde sortira-t-elle du milieu d’un grand peuple uni dont elle semblerait l’hymne de reconnaissance et de triomphe ? Sera-t-elle le cri libérateur de quelque partie de ce grand peuple, se séparant du reste au nom de quelque impérieux devoir de religion et de justice ?
Elle a soulevé tous les peuples contre leur gouvernement, et depuis que ces gouvernements semblent avoir repris les rênes de leurs peuples, elle a condensé dans les cœurs cette haine de l’autorité qui est une préparation à d’autres révoltes. […] Elle n’est pas sortie du peuple, elle y est entrée, et encore à grand peine ! […] Ce qui, en 1787, préoccupait le peuple, n’était donc pas une idée démocratique. […] Le peuple, dont on a tant parlé, et qui serait pour elle un aïeul qui, certes ! en vaudrait bien un autre, le peuple s’est laissé apprendre la Révolution comme le mal s’apprend, mais il ne l’a point inventée.
La vie permanente des peuples. […] Les peuples artistes sont aussi les peuples conséquents. […] Divins peuples éclaireurs ! […] Seulement un peuple civilisateur doit rester un peuple mâle. […] Les peuples comme les astres ont le droit d’éclipse.
Veuillot, lui, est bien peuple. […] Même féroce et impie, le peuple lui inspirera toujours plus de pitié que de colère. […] Nous disons, nous, qu’aucun des hommes qui croient ainsi n’est du nombre de ceux qui sauvent les peuples… » Je me figure qu’ici encore son tempérament « peuple » se retrouve. […] C’était une institution si belle, le pauvre petit peuple en avait si grand besoin ! […] Seule elle peut « sauver » le monde, même selon la chair : car seule elle a qualité pour enseigner à la fois au peuple la résignation, et le sacrifice à ceux qui sont au-dessus du peuple.
Ces pages sont des chapitres du livre du Prince ; elles enseignent aux fondateurs de dynasties nouvelles comment, pour caresser les habitudes d’esprit d’un peuple, ces princes doivent, sous le masque d’une religion qu’ils ne professent pas eux-mêmes de cœur, se jouer de la religion véritable, inséparable de sincérité et de foi, en rendant au peuple une religion d’État avec ses privilèges et ses appareils exclusifs comme un spectacle pour les yeux au lieu d’un aliment de l’âme. […] Que, dans les temps anciens, des sages, des héros, s’attribuant des relations avec le ciel, aient pu soumettre l’esprit des peuples et lui imposer une croyance, cela s’est vu. […] Depuis que la France, objet des égards et des empressements de l’Europe, était remplie des ministres de toutes les puissances, ou d’étrangers de distinction qui venaient la visiter, il était frappé de la curiosité avec laquelle le peuple et même des gens au-dessus du peuple suivaient ces étrangers, et étaient avides de voir leurs riches uniformes et leurs brillantes décorations. […] Le peuple n’est pas de leur avis : il aime ces cordons de toutes couleurs, comme il aime les pompes religieuses. […] Il rentre en France au bruit des acclamations de l’armée et du peuple.
Le peuple est tout prêt à la révolte ; le pain augmente d’un sol par jour ; aucun marchand n’ose ni ne veut apporter ici son blé. […] On dit que ce sont tous des habitants de la campagne qui, n’y pouvant plus tenir par les vexations qu’ils y essuient, viennent se réfugier dans la ville, … préférant la mendicité au labeur. » — Pourtant le peuple des villes n’est guère plus heureux que celui des campagnes. « Un officier dont la troupe est en garnison à Mézières m’a dit que le peuple est si misérable dans cette ville, que, dès qu’on avait servi le dîner des officiers dans les auberges, le peuple se jetait dessus et le pillait. » — « Il y a plus de douze mille ouvriers mendiants à Rouen, tout autant à Tours, etc. […] Il est clair que le peuple vit au jour le jour ; le pain lui manque sitôt que la récolte est mauvaise. […] On se doute bien que c’est le peuple, et surtout le paysan, qui en pâtit. […] « On s’étonne qu’un peuple si nombreux soit nourri, lorsque la moitié ou le quart de la terre arable est occupée par des friches stériles. » (Arthur Young, II, 137.)
Mais ce peuple est peuple : vulgaire par essence, et d’un âge positif et railleur. […] Le peuple faisait la loi : car il ne voyait pas seulement, il commandait, et il jouait les pièces. L’auteur servait de son mieux ceux qui le payaient ; du reste, il était peuple lui-même, et s’amusait des mêmes choses. […] Sottie et moralité étaient dirigées contre Jules II : la moralité l’introduisait sous le nom de l’Homme obstiné entre Peuple italique et Peuple français. […] La farce n’est pas « de la littérature » : c’est un genre entièrement populaire, et que l’esprit du peuple a créé à son image.
Montesquieu connaît les talents du peuple romain ; il connaît moins ses vertus. […] Pour lui, un peuple religieux est un peuple qui sait quelque chose de meilleur que lui-même et de plus cher que la vie, et qui s’y soumet. Ce peuple a en lui la première cause de toute grandeur humaine, le dévouement. […] Les Gracques, en violant les lois, détruisirent ce qui modérait l’ambition des nobles et rendait la patience plus facile au peuple par l’espérance. […] Par exemple, est-ce assez de dire des lois de Rome que, bonnes pour faire un grand peuple, elles deviennent impuissantes pour le gouverner ?
Une telle pensée tendait évidemment à l’association générale des peuples dans le domaine de la science, de la philosophie et de l’art. […] L’association pacifique des peuples, telle que le Globe la poursuivait, n’offrait pas un sens bien précis, bien arrêté. […] Ce n’était plus, comme il y a sept ans, par des investigations historiques que l’œuvre d’association des peuples devait être servie ; on en était dorénavant à la pratique et à l’action. […] Nous le voulions actif, généreux, fertile en initiatives de progrès, entretenant la confiance par son mouvement, ayant un cœur, non pas tel qu’un bourgeois peureux, bonhomme égoïste et cupide ; mais fidèle à son origine et à sa fin ; tout au vrai peuple, en France et ailleurs ; sans arrière-pensée, sans système honteux de replâtrage. […] L’émancipation complète de la classe la plus nombreuse et la plus pauvre, le classement selon la capacité et les œuvres, avaient de tout temps été pour nous des croyances d’instinct, des idées confuses et naturelles, pour nous qui sommes du peuple et qui ne prétendons valoir qu’autant que nous sommes capables et que nous faisons.
Cependant l’incalculable petitesse et la prodigieuse insignifiance numérique de cet atome, comparé à l’immensité de l’espace et au nombre des mondes qui le peuplent, devrait donner quelque mépris aux hommes et aux peuples qui s’acharnent à s’en disputer des surfaces inaperçues, ou à se créer sur ce néant d’espace et de temps ce qu’ils appellent des mémoires éternelles. […] De même qu’il y a un horizon d’espace au-delà duquel la vue se trouble et n’aperçoit plus rien, de même il y a un horizon de temps au-delà duquel la mémoire des peuples semble condamnée à ne pouvoir jamais remonter. […] Les langues meurent avec les civilisations et avec les peuples qui les parlent. […] Des peuples nouveaux recommencent à penser, à parler, à écrire des choses dignes de mémoire. […] Si Dieu avait voulu la perfectibilité indéfinie de l’esprit humain sur cette terre, il aurait créé une langue une et immortelle entre tous les peuples et toutes les générations.
L’indignation rendit à un peuple en décadence l’énergie qui retrempe les nationalités, et la victoire du droit national qui fait triompher l’âme et le sol d’un peuple des embûches des diplomates et des armées des conquérants. […] On nous dira : C’est que les peuples n’étaient que des armées pendant le règne de Napoléon par le fer. […] où est-elle cette leçon aux peuples, aux rois, aux soldats, aux conquérants, au génie qui gouverne les nations, dans l’histoire de Napoléon pas M. […] plus de mépris pour les manœuvres de la fausse diplomatie qui prennent les peuples au filet des ambitieux sans foi ? […] Qui n’estimerait pas ces trois vertus sociales, ces trois instincts organisateurs, administrateurs et défenseurs des peuples, sans lesquels il n’y a pas de peuples, il n’y a que des hordes ou des individualités ?
Il crut qu’il ne convenait pas de donner au peuple des rêves dont le réveil pourrait être funeste. […] À ton retour exigeras-tu des Grecs, le peuple le plus libre de l’univers, qu’ils se prosternent devant toi ? […] Ces sentiments grecs amenaient une réaction ingrate et acharnée parmi le peuple athénien, le plus léger et le plus mobile de tous les peuples. […] Cette colère du bas peuple retomba sur les partisans du héros et s’attaqua surtout à son précepteur Aristote. […] Sans gouvernement point de peuple, sans gouvernement point de volonté, sans volonté point d’action !
Car le peuple, c’est le sol même sur lequel toute société est construite ; c’est l’élément dont toute société est faite, et, quand la société s’écroule, c’est lui qu’elle écrase le premier et le dernier ! […] Une fois ce mensonge persuadé par les sophistes aux peuples, qu’y aurait-il à conclure ? […] Quand je serai sorti, vous ouvrirez sans danger au peuple, et le peuple, ne me voyant plus, se retirera paisiblement sans aucune violence de curiosité. […] Il publia, quelques semaines après, une profession de foi conservatrice, où le courage parlait la langue de la raison au peuple. […] » « Rois, peuples, couvrez-vous d’un sac souillé de cendre : « Bientôt sur la nuée un juge doit descendre.
Ancillon, à Berlin, professe ouvertement que l’hypothèse du contrat primitif n’est qu’une fiction, et que les peuples, dans l’origine, n’ont point délégué le pouvoir. […] M. de Constant, en France, n’admet la souveraineté du peuple que comme garantie contre l’usurpation, et non point comme principe de liberté, c’est-à-dire comme dogme fondamental de la société. […] Il y aurait ici des observations très importantes à faire sur l’état où se trouvaient et l’empire romain en général, et le peuple juif en particulier, lorsque le christianisme est venu renouveler le monde. […] La chute du christianisme entraînerait inévitablement l’esclavage des peuples, l’abrutissement des nations. […] Enfin on espère encore que multiplier la propriété est un excellent moyen de faire entrer la morale dans les peuples, de les attacher aux institutions, de leur faire craindre les révolutions.
Parmi les liseurs : la généralité, plus les femmes, le peuple. Vente énorme : persistante pour les Misérables dans le peuple, pour l’Homme qui rit dans le public lettré. […] Pour leurs admirateurs : verbalisme ; tous les caractères du mot ; plus faible somme d’idées non verbales, ou spécialement chez le peuple, présence de passions humanitaires et socialistes verbales encore, et impratiques. […] Les liseurs peuple : un verbalisme exalté, se traduisant par un idéalisme optimiste vague et humanitaire, mais impratique et non résultant de l’expérience ; peuple idéologue. […] Il serait facile d’en faire la démonstration par les faits sociaux et historiques de l’époque contemporaine ; ils se sont traduits notamment par l’incapacité politique du peuple ouvrier ; par rabaissement intellectuel des classes aisées ; par le romantisme plus ou moins accusé de toute la littérature française notable actuelle.
Mais la plûpart de ces peuples rimeurs sont barbares, et les peuples rimeurs qui ne le sont plus, et qui sont devenus des nations polies, étoient barbares et presque sans lettres lorsque leur poësie s’est formée. Les langues qu’ils parloient n’étoient pas susceptibles d’une poësie plus parfaite lors que ces peuples ont posé pour ainsi dire les premiers fondemens de leur poëtique. […] Les peuples dont descendent les nations modernes et qui envahirent l’empire romain, avoient déja leurs poëtes quoique barbares, lorsqu’elles s’établirent dans les Gaules et dans d’autres provinces de l’empire. […] Dans les contrées envahies par les barbares, il s’est formé un nouveau peuple composé du mélange de ces nouveaux venus et des anciens habitans.
Quinze ans se passèrent ; le peuple, dégoûté d’intrigues, avait renversé son idole. […] — Rien de nouveau, lui criai-je en descendant de mon cheval ; de quelque nom qu’on l’appelle, monarchie ou république, le peuple est toujours peuple, c’est-à-dire ignorant et mobile. […] Une république qui joue à la peur entre un peuple effrayé et un chef ambitieux a bientôt perdu la liberté. […] Si ce sont les rois, les trônes auront disparu ; si ce sont les peuples, les peuples seront asservis. […] Mais il est bien vite redescendu ou retombé de son enthousiasme, et, le danger passé, il est redevenu peuple, c’est-à-dire, élément.
« — Mais parler devant le peuple, n’est-ce pas agir ? […] Mais, même pour un si petit espace, la politique, pour être applicable, devait se mouler sur la nature, sur l’histoire, sur les traditions, sur les habitudes du peuple de Solon. […] Il faut du génie pour la législation, il ne faut que du sens commun pour faire le gouvernement d’un peuple. […] L’Allemagne, vaste entrepôt des débordements de peuples de l’Orient ou du Nord délayés dans les peuples incohérents de la Germanie, devait se constituer en empire fédéral pour la guerre, en individualités nationales indépendantes pour la paix : république de monarchies où l’unité était impossible dans la forme, parce que l’unité manquait dans l’esprit. […] Aussi voyez son histoire : ce n’est pas celle d’un peuple, c’est celle de vingt peuples successifs et contradictoires ; il n’y a d’unité en elle que l’unité de patriotisme.
C’est le peuple. Le peuple, qui a l’avenir et qui n’a pas le présent ; le peuple, orphelin, pauvre, intelligent et fort ; placé très bas, et aspirant très haut ; ayant sur le dos les marques de la servitude et dans le cœur les préméditations du génie ; le peuple, valet des grands seigneurs, et amoureux, dans sa misère et dans son abjection, de la seule figure qui, au milieu de cette société écroulée, représente pour lui, dans un divin rayonnement, l’autorité, la charité et la fécondité. Le peuple, ce serait Ruy Blas. […] Malheureuse comme femme, car elle est comme si elle n’avait pas de mari ; malheureuse comme reine, car elle est comme si elle n’avait pas de roi ; penchée vers ceux qui sont au-dessous d’elle par pitié royale et par instinct de femme aussi peut-être, et regardant en bas pendant que Ruy Blas, le peuple, regarde en haut. […] Le sujet philosophique de Ruy Blas, c’est le peuple aspirant aux régions élevées ; le sujet humain, c’est un homme qui aime une femme ; le sujet dramatique, c’est un laquais qui aime une reine.
De la littérature italienne et espagnole La plupart des manuscrits anciens, les monuments des arts, toutes les traces enfin de la splendeur et des lumières du peuple romain, existaient en Italie. […] Ces deux différents caractères s’aperçoivent à travers la couleur générale que la même langue, le même climat, les mêmes mœurs donnent aux ouvrages d’un même peuple. […] Quoique les Arabes fussent un peuple extrêmement belliqueux, ils combattaient pour leur religion bien plus que pour l’amour et pour l’honneur, tandis que les peuples du Nord, quel que fût leur respect pour la croyance qu’ils professaient, ont toujours eu leur gloire personnelle pour premier but. […] Depuis que ce pays a perdu l’empire du monde, on dirait que son peuple dédaigne toute existence politique, et que, suivant l’esprit de la maxime de César, il aspire au premier rang dans les plaisirs, plutôt qu’à de secondes places dans la gloire. […] La mélancolie des peuples du Nord est celle qu’inspirent les souffrances de l’âme, le vide que la sensibilité fait trouver dans l’exigence, et la rêverie qui promène sans cesse la pensée, de la fatigue de la vie à l’inconnu de la mort.
Si des idées uniformes chez des peuples inconnus entre eux doivent avoir un principe commun de vérité, Dieu a sans doute enseigné aux nations que partout la civilisation avait eu cette triple base, et qu’elles devaient à ces trois institutions une fidélité religieuse, de peur que le monde ne redevînt sauvage et ne se couvrît de nouvelles forêts. […] I Qu’on n’oppose point au premier de nos principes le témoignage de quelques voyageurs modernes, selon lesquels les Cafres, les Brésiliens, quelques peuples des Antilles et d’autres parties du Nouveau-Monde, vivent en société sans avoir aucune connaissance de Dieu35. […] Les rapports des voyageurs modernes nous prouvent que maintenant encore plusieurs peuples barbares partagent cette croyance. La chose nous est attestée pour les Péruviens et les Mexicains par Acosta, pour les peuples de la Virginie par Thomas Aviot, pour ceux de la nouvelle Angleterre par Richard Waitborn ; pour ceux de la Guinée par Hugues Linschotan, et pour les Siamois par Joseph Scultenius. — Aussi Sénèque a-t-il dit : Quum de immortalitate loquimur, non leve momentum apud nos habet consensus hominum aut timentium inferos, aut colentium ; hac persuasione publica utor. […] Bayle a sans doute été trompé par leurs rapports, lorsqu’il affirme, dans le Traité de la Comète, que les peuples peuvent vivre dans la justice sans avoir besoin de la lumière de Dieu .
Ce petit peuple a inventé le péché. […] Je vais vous parler de la mort des peuples. […] Laissons sa morale au peuple et ayons la nôtre. […] Il y a des peuples qui ont, très fort, l’instinct social. […] Ils sont de grands peuples ; ils font de grandes choses.
Berruyer, [Isaac-Joseph] né à Rouen en 1681, mort à Paris en 1758, seroit sans contredit le meilleur de nos Historiens, si les Histoires qu’il a écrites portoient un autre titre que celui de Peuple de Dieu. […] L’élégance du style, la noblesse, l’agrément & la variété des images, la finesse & la solidité des réflexions toujours amenées par les faits, une marche naturelle & rapide dans la narration, une liaison & une netteté dans les événemens, un coloris proportionné au sujet, feront toujours de l’Histoire de l’ancien Peuple de Dieu un Ouvrage intéressant, instructif, propre à plaire, autant qu’à féconder l’imagination. […] Dans l’Histoire des Macchabées, tout ce que la guerre a de plus terrible, la politique de plus profond, le courage de plus sublime ; tout ce que les desseins de Dieu sur son peuple peuvent offrir de sagesse, de majesté, de puissance, de bonté, est développé avec des traits qui caractérisent le Génie créateur, dans un genre où le Créateur lui-même se manifeste si énergiquement. L’Histoire du nouveau Peuple de Dieu a fourni matiere à de si justes condamnations.
Nous recommandons plus particulièrement à ceux que la pensée politique préoccupe, et qui aiment à voir le talent des artistes s’en faire l’auxiliaire et l’organe, cette troisième partie où sous le nom de Salvator, le génie mécontent, sinistre et découragé, est repris, remontré par l’homme du peuple en ces termes magnanimes : Du peuple il faut toujours, poëte, qu’on espère, Car le peuple, après tout, c’est de la bonne terre, La terre de haut prix, la terre de labour ; C’est ce sillon doré qui fume au point du jour, Et qui, empli do séve et fort de toute chose, Enfante incessamment et jamais ne repose. […] Il y a une profonde et consolante vérité à nous présenter ainsi le peuple comme certain de lui-même, sentant sa vigueur croissante et son avénement prochain ; à lui faire donner une sévère leçon au poëte qui trop souvent en nos jours, lui qui devrait diriger, s’égare, s’exaspère, n’entend que la voix de l’orgueil blessé, au lieu de répondre d’une lyre sympathique à l’appel fraternel des hommes, et farouche, inutile, manquant de foi au lendemain, s’enfuit comme Salvator dans les montagnes84. […] Dans la famille des peuples que la liberté doit bénir, le mot de barbare n’a point de sens ; il n’y a plus de laideur. […] On sent ici chez le critique (et je n’ai pas à en rougir) quelque chose des doctrines qui circulaient dans l’air à ce lendemain de juillet 1830, comme un souffle ému de saint-simonisme, de socialisme, de sainte-alliance des peuples.
Plus tard, dans ce bel âge de poésie que commencera Pindare, nous retrouverons encore l’accent lyrique se mêlant à la philosophie chez un peuple amoureux des arts. […] Nous ne rassemblons pas ici le reste des refrains épars de ce peuple poétique, chants de guerre ou de fête, chants du marin ou du moissonneur ; mais, l’histoire ne peut oublier ce qui sert à l’expliquer et fit battre des cœurs généreux, même en les égarant. […] C’était le peuple athénien. […] Était-ce là ce chantre célèbre des Muses et des Grâces chez le peuple le plus ingénieux de la terre, cet Athénien de l’île de Téos, attiré avec de si grands honneurs à la cour du tyran de Samos et de Pisistrate, usurpateur d’Athènes ? […] ceux qui avec toi sont morts ici, roi de Sparte aux belles fêtes, ayant soutenu l’assaut de flèches innombrables, de coursiers rapides et du peuple Mède103. » Après les Thermopyles, après Sparte, Athènes, Salamine enlève le cœur du poëte.
Les peuples ne regardaient même pas. Aujourd’hui les peuples ont une grande vertu, ils sont avares. […] Ils massacrent le peuple dans l’intérêt public. […] Cet homme croit au peuple, shame ! […] Le roi paye, le peuple ne paye point.
Tout le reste périt par la colère du peuple. […] Laurent ne fut pour rien dans ces vengeances, le peuple fit tout. […] Le peuple entendit, admira, applaudit, mais n’accorda rien qu’à sa rage. […] Le peuple, trompé, les suivait à l’autel et à l’échafaud. […] Catherine obtint du peuple la permission d’aller parler aux troupes.
Puis au revers de cela, comme, dans un album, ou au revers d’un dessin de Decamps se voit une pensée de Balzac, il sort de la bouche de ce diable d’homme, des silhouettes sociales, des aperçus sur l’espèce française et sur l’espèce anglaise, toutes nouvelles, et qui n’ont pas moisi dans les livres, des satires de deux minutes, des pamphlets d’un mot, une philosophie comparée du génie national des peuples. […] La délicatesse d’esprit est une corruption, longue, longue à acquérir, et que ne possèdent jamais les peuples jeunes. Ce ne sont que les peuples usés, les peuples auxquels ne suffisent plus les sièges de fer et les bains de marbre, les peuples au corps douillet et lassé, les peuples mélancolieux et anémiés, les peuples attaqués de ces maladies de vieillesse qui viennent aux arbres fruitiers qui ont trop porté. […] Après tant de grâces maigres, tant de petites figures tristes, préoccupées, avec des nuages de saisie sur le front, toujours songeuses et enfoncées dans l’enfantement de la carotte ; après tous ces bagous de seconde main, ces chanterelles de perroquets, cette pauvre misérable langue argotique et malsaine, piquée dans les miettes de l’atelier et du Tintamarre ; après ces petites créatures grinchues et susceptibles, cette santé de peuple, cette bonne humeur de peuple, cette langue de peuple, cette force, cette cordialité, cette exubérance de contentement épanoui et dru, ce cœur qui apparaît là-dedans, avec de grosses formes et une brutalité attendrie : tout en cette femme m’agrée comme une solide et simple nourriture de ferme, après les dîners de gargotes à trente-deux sous. […] Où aboutira cette grande avenue de l’histoire qui n’est plus qu’une avenue de monarques, de reines, de ministres, de capitaines, de pasteurs de peuples, montrés dans leurs ordures et leurs misères humaines, — de Rois passant au conseil de révision ?
Les peuples n’ont que ce qu’ils méritent. […] Sommes-nous plus UN peuple ? […] …) et de grande volonté, et ensemble, soulevés d’une grande alacrité d’âme, mettez-vous simplement à marcher devant le peuple. […] Imagination forte, sensibilité exaltée, mais raison débile, Michelet, ce pauvre moraliste-législateur, était aussi goulu de spectacles pour le compte du peuple français que le peuple romain tout entier, dont ce fut la dépravation… Et cependant, chrétien encore, Michelet, l’homme du Cours de 1847, s’est souvenu — n’en doutez pas ! […] Les peuples se régénèrent comme ils se fondent.
Béranger depuis des années ne chantait plus, mais la France, en le perdant, a senti à quel point il lui était toujours cher et présent, et combien l’âme de ses chants faisait partie de son âme, à elle, de son génie immortel, comme race et comme peuple. […] Béranger avait naturellement l’âme patriotique, cela ne se donne pas ; il sentait de certaines douleurs, de certaines joies comme bien des gens d’esprit, qui l’ont applaudi pourtant, ne les ont jamais senties, et comme le peuple directement les sent : de là cette intime et longue communauté entre le peuple et lui, quoiqu’il eût dans le talent de ces finesses dont les œuvres populaires peuvent, à la rigueur, se passer. […] ce n’était pas une abolition assez éclatante de ce chant insultant d’un vainqueur sauvage, à qui il avait fait dire en son ivresse : Retourne boire à la Seine rebelle, Où tout sanglant tu t’es lavé deux fois ; Hennis d’orgueil, ô mon coursier fidèle, Et foule aux pieds les peuples et les rois ! […] Ses derniers chants, non encore publiés et dont quelques amis ont entendu dès longtemps la confidence, sont, nous dit-on, dans le genre des Souvenirs du peuple : On parlera de sa gloire Sous le chaume bien longtemps.
Argument Frappé de l’idée que l’admiration exagérée pour la sagesse des premiers âges est le plus grand obstacle aux progrès de la philosophie de l’histoire, l’auteur examine comment les peuples des temps poétiques imaginèrent la Nature, qu’ils ne pouvaient connaître encore. […] C’est en quelque sorte l’encyclopédie des peuples barbares (M. […] Les premiers peuples furent poètes naturellement et nécessairement. […] Pirateries et caractère inhospitalier des premiers peuples. […] Corollaire relatif à l’héroïsme des premiers peuples.
Il n’y a pas très longtemps que l’Europe a secoué le joug de la langue latine, par laquelle les rédacteurs des lois et les dépositaires de la science mettaient une barrière entre eux et les peuples, ce qui était toujours une manière de remplacer la parole traditionnelle. […] La magistrature de la pensée, toujours modifiée selon les temps et les lieux, a pu, sans doute être quelquefois une arme dangereuse entre les mains de ceux qui furent chargés de l’exercer parmi les peuples. […] Au reste, la liberté de penser a été réclamée souvent par les peuples : c’est le désir de l’obtenir qui donna une si triste énergie à la révolution d’Angleterre. […] Les gouvernements en effet étaient moins ombrageux, parce que les peuples n’avaient pas encore contracté la funeste habitude de discuter les bases mêmes de la société. […] Les gouvernements se sont toujours appuyés sur les traditions ; mais les peuples refusent de se soumettre désormais à l’autorité des traditions : tous les termes du problème sont donc changés.
Le peuple, maintenant, c’est Louis XIV, puisque l’État c’est lui. […] C’était le peuple, le peuple des faubourgs, républicain et socialiste, ayant, pour idole et pour chef Louis Blanc. […] Sans cette cohésion nouvelle, le peuple cesserait très vite d’exister, ou, si l’on veut, cette cohésion est le signe que ce peuple avait en lui faculté d’être un peuple. […] C’est donc l’aristocratie qui devrait, je ne dis pas précisément imiter le peuple, mais s’inspirer du peuple ; et non pas le peuple qui devrait s’inspirer de l’aristocratie. […] Les hommes ne pensent qu’à faire de l’argent et les femmes qu’à le dévorer ; le peuple masculin fait des dollars et le peuple féminin les absorbe ; le peuple masculin est chrysogène et le peuple féminin chrysophage ; le peuple masculin frappe le talent et le peuple féminin le fait fondre.
La race a émigré, comme l’ancien peuple aryen, et le changement de climat a altéré chez elle toute l’économie de l’intelligence et toute l’organisation de la société. Le peuple a été conquis, comme la nation saxonne, et la nouvelle structure politique lui a imposé des habitudes, des capacités et des inclinations qu’il n’avait pas. […] Elles varient selon les peuples. […] J’entreprends ici d’écrire l’histoire d’une littérature et d’y chercher la psychologie d’un peuple ; si j’ai choisi celle-ci, ce n’est pas sans motif. Il fallait trouver un peuple qui eût une grande littérature complète, et cela est rare ; il y a peu de nations qui aient, pendant toute leur vie, vraiment pensé et vraiment écrit.
Comment se fait-il qu’ayant gardé son nom il eût changé de nature, et quelle série de rénovations avait fait d’un peuple germanique un peuple latin ? C’est que ce peuple, lorsqu’il vint en Neustrie, n’était ni un corps de nation, ni une race pure. […] Par leurs sentiments comme par leur condition, ils sont les débris rompus, mais aussi les rudiments vivants d’un peuple libre. […] Qu’est-ce qui amuse le peuple en France ? […] Déjà paraît la conception du monde propre aux peuples du Nord, toute triste et morale.
Chaque peuple a sa physionomie, sa constitution spéciale, son droit, sa morale, son organisation économique qui ne conviennent qu’à lui, et toute généralisation est à peu près impossible. […] Les conditions de l’état de santé varient d’un peuple à l’autre et ne peuvent être déterminées théoriquement ; c’est affaire de pratique, d’expérience, de tâtonnements. […] Un peuple est produit par la réunion de deux ou plusieurs peuples qui l’ont précédé. […] « Nous n’avons rien de mieux à faire, dit-il, que de considérer comme une société simple celle qui forme un tout non assujetti à un autre et dont les parties coopèrent, avec ou sans centre régulateur, en vue de certaines fins d’intérêt public53. » Mais il y a nombre de peuples qui satisfont à cette condition. […] On en connaît au moins un cas ; c’est l’Empire romain, qui comprenait dans son sein les peuples les plus divers de nature55.
Il n’entrait pas en elle, comme une doctrine entre dans la conscience d’un peuple. […] Or, en la posant, cette question, on sort du vague des mots et des idées, on entre dans le vif des faits, on met la main sur la clef de l’Économique de l’époque, on ressuscite le peuple et tout va facilement s’expliquer… La Ligue, ce n’est plus un parti, c’est le peuple, c’est la défense jusqu’à la mort de son patrimoine menacé, de l’héritage de ses enfants, de ce patrimoine sans lequel il se sent spolié dans ses pratiques, ses salaires, ses achats, ses plaisirs, et déshonoré comme vassal industriel des falsificateurs qui, au nom d’un principe nouveau, viennent rompre les cadres de ses robustes catégories. Fait par l’Église, le peuple fait la Ligue à son tour. […] Au point de vue de la politique, l’Église et le peuple sont identiques, car, en dehors de l’Église, il n’y a pour les multitudes que l’esclavage antique et ses hontes ou le morcellement moderne et ses fanges. […] Toujours il fut dans l’histoire de ce pays un moment suprême où l’indignité des gouvernements proclama la vacance du trône par la bouche même qui avait le droit de la proclamer, par cette voix du peuple et de l’Église qui avait fait le peuple ce qu’il était, et qu’au Moyen Âge on appelait justement, pour cette raison, la voix de Dieu !
C’est donc par des loix générales, & non par des volontés particulieres, qu’ils doivent faire régner la justice sur leurs Sujets ; & l’unique objet des loix qu’ils sont obligés de donner à leurs Peuples, doit être de les faire jouir de tous les avantages qu’ils ont reçus de la Nature. La raison suffit pour nous convaincre que les Souverains furent donnés aux Peuples, & non les Peuples aux Souverains. […] Nous renvoyons les Lecteurs de bonne foi à l’Ouvrage même : ils verront combien l’Auteur est éloigné de favoriser l’autorité arbitraire & le gouvernement despotique ; ils verront avec quelle force il défend les droits des Sujets, avec quel noble courage il présente au Prince, non seulement le tableau des devoirs de la Royauté, mais une infinité de principes & de vérités propres à écarter du cœur des Souverains, l’orgueil qui cherche sans cesse à les séduire & à leur faire oublier qu’ils ne sont sur le Trône, que pour rendre leurs Peuples heureux.
Ici, ce sont les Germains : peuples où la corruption des grands n’a jamais influé sur les petits, où l’indifférence des premiers pour la patrie n’empêche point les seconds de l’aimer ; peuples où l’esprit de révolte et de fidélité, d’esclavage et d’indépendance, ne s’est jamais démenti depuis les jours de Tacite. […] L’Espagne, séparée des autres nations, présente encore à l’historien un caractère plus original : l’espèce de stagnation de mœurs dans laquelle elle repose lui sera peut-être utile un jour ; et, lorsque les peuples européens seront usés par la corruption, elle seule pourra reparaître avec éclat sur la scène du monde, parce que le fond des mœurs subsiste chez elle. Mélange du sang allemand et du sang français, le peuple anglais décèle de toutes parts sa double origine.
Les sentiments passent de l’orateur au peuple, et reviennent du peuple à l’orateur. […] Ainsi les Grecs, plus animés par leur climat, devaient être plus sensibles à l’éloquence que les Romains, et les Romains, plus que tous les peuples septentrionaux de l’Europe. Mais si un peuple a des mœurs frivoles et légères ; si, au lieu de cette sensibilité profonde qui arrête l’âme et la fixe sur les objets, il n’a qu’une espèce d’inquiétude active qui se répande sur tout sans s’attacher à rien ; si, à force d’être sociable, il devient tous les jours moins sensible ; si tous les caractères originaux disparaissent pour prendre une teinte uniforme et de convention ; si le besoin de plaire, la crainte d’offenser, et cette existence d’opinion qui aujourd’hui est presque la seule, étouffe ou réprime tous les mouvements de l’âme ; si on n’ose ni aimer, ni haïr, ni admirer, ni s’indigner d’après son cœur ; si chacun par devoir est élégant, poli et glacé ; si les femmes même perdent tous les jours de leur véritable empire ; si, à cette sensibilité ardente et généreuse qu’elles ont droit d’inspirer, on substitue un sentiment vil et faible ; si les événements heureux ou malheureux ne sont qu’un objet de conversation, et jamais de sentiment ; si le vide des grands intérêts rétrécit l’âme, et l’accoutume à donner un grand prix aux petites choses, que deviendra l’éloquence chez un pareil peuple ? […] Nous avons déjà vu qu’il y a des peuples moins susceptibles de sentiment que d’autres. […] Un conquérant qui aimait la gloire, mais plus avide de renommée que juste, s’étonnait de ce qu’un homme vertueux, et que tout le peuple respectait, ne parlait jamais de lui : il le manda. « Pourquoi, dit-il, les hommes les plus sages se taisent-ils sur mes conquêtes ?
Les campagnes comptent double quand on se bat, elles comptent triple quand on négocie ; il faut manœuvrer aussi vite que les passions d’un peuple en ébullition. […] Je prenais une part très vive et très confidentielle aux différentes phases et aux différents orages que cette révolution suscitait dans le peuple, dans le parlement et dans le palais. […] Ses deux ministres, le vieux Fossombroni et le prince Corsini, avaient conservé les traditions de mansuétude, d’économie et de gouvernement par le peuple lui-même, de leur maître Léopold. […] On parle de l’ingratitude des peuples, mais de celle des rois, qu’en dites-vous ? […] Heureux les peuples qui ont leur sort dans des mains si pures et si douces !
Ce noble plaisir populaire du théâtre est inconnu par sa nature aux époques de barbarie ou même de jeunesse des peuples. […] Les peuples donnent le lingot aux poètes, et les poètes frappent de leur empreinte ce lingot : voilà la vérité. […] C’est qu’un peuple ne prend jamais son originalité que dans sa foi. […] Il encourage Esther à tout oser pour renverser ce ministre et sauver le sang de son peuple. […] Et qui sait, lorsqu’au trône il conduisit vos pas, Si pour sauver son peuple il ne vous gardait pas ?
C’est par excellence le peuple inventif. […] C’est le peuple du caractère ; il y en a jusque dans sa littérature. […] C’est là son génie, c’est là sa vertu, c’est là son signe entre les peuples. […] C’est toujours le peuple du beau. […] Jamais peuple si peu nombreux ne fit et n’écrivit de si grandes choses.
Il avait l’idée d’abord de pousser jusqu’en Orient et de voir l’empire des Turcs, « non par superstition », dit-il, comme la plupart de ceux qui y vont seulement pour visiter Jérusalem, mais pour s’instruire en ces années actives d’apprentissage et pour considérer la diversité des pays et des peuples. […] Rohan institue, en concluant son récit, une manière de parallèle entre le génie des différents peuples et leur gouvernement. […] Le peuple frémit déjà et semble prévoir son malheur ; les villes font garde, comme si elles attendaient le siège ; la noblesse cherche sa sûreté parmi les plus relevés de son corps, mais elle les trouve tous désunis, et y a toute occasion de crainte, et nulle apparence de sûreté. […] Son dessein eût été d’agir militairement, de démanteler les petites places qui ne pouvaient tenir, et de fortifier les principales, Nîmes, Montpellier, Uzès ; « Nous avions, dit-il, des hommes assez suffisamment pour faire une gaillarde résistance ; mais l’imprévoyance des peuples et l’intérêt particulier des gouverneurs des places firent rejeter mon avis, dont depuis ils se sont bien repentis. » Dans ses remarques sur les Commentaires de César, admirant l’influence qu’eut Vercingétorix sur les peuples de la Gaule pour leur faire accueillir les meilleurs moyens de défense : Il a eu, dit-il, le pouvoir de faire mettre le feu à plus de vingt villes pour incommoder leurs ennemis, ce qui témoigne son bon sens… Son grand crédit est remarquable ; car, à des peuples libres, au commencement d’une guerre, avant que d’en avoir éprouvé les mauvais succès et dans l’espérance de pouvoir vaincre sans venir à des remèdes si cuisants, il leur persuade de mettre le feu à leurs maisons et à leurs biens, pour la conservation desquels se fait le plus souvent la guerre. C’est une entreprise bien difficile, pour ce que la perte des choses certaines et présentes qu’on voit et qu’on touche est préférable, parmi un peuple ignorant, aux choses dont les événements sont incertains et les utilités éloignées : et nul ne peut bien comprendre cette difficulté, qui ne l’a expérimentée au gouvernement des peuples.
Dans ces deux cours je voudrais que, tout en insistant sur les beautés et sur les grandeurs de la littérature française et de l’histoire nationale, on se gardât bien de dire ce qui se dit et se répète partout, dans les collèges et même dans les académies, aux jours de solennité, que le peuple français est le plus grand et le plus sensé de tous les peuples, et notre littérature la première de toutes les littératures. […] Il avait commencé comme le peuple commence ; il finit comme aiment à finir les esprits cultivés et avertis. […] On n’oublierait pas, à côté des gens de talent sortis du peuple, ceux qui y sont restés, qui, tout en ayant un génie et un don, n’ont pas cessé de pratiquer un métier. […] On dirait à ce peuple de Paris, par exemple : « Il y a eu autrefois un peuple à qui on vous a souvent comparé, mais à qui vous ne ressemblez encore qu’à demi. […] Un jour, dans une traversée à bord d’un vaisseau, un Grec, homme du peuple, écoutait depuis longtemps des gens instruits, des sages, causer des choses de l’esprit : tout à coup il se précipita dans la mer.
Notre impérieux devoir social est d’abandonner à l’imbécile chauvinisme son esprit d’étroitesse et de vanité bouffonne, et d’affirmer que l’accroissement des rapports inter-nationaux est l’une des bases les plus essentielles de l’avenir des peuples modernes. […] S’il s’agit au contraire d’un peuple possédant encore en lui-même des forces vitales suffisantes pour jouer un rôle dans le monde, les vents du large peuvent souffler sur lui, sans venir à bout de le détruire. […] C’est alors que les caractères communs de l’espèce apparaissent clairement au-dessus de ses différences de races, de groupes, de peuples et d’individus. […] Notons tout d’abord que l’existence, chez tout peuple civilisé d’un Foreign Office, ou Ministère des Affaires étrangères, est une confirmation du fait de l’inter-dépendance des corps sociaux modernes. […] Il existe une autre espèce de liens entre les peuples que nous pourrions qualifier de liens animiques.
Après avoir parlé devant les juges, il ne craignait plus de parler devant le peuple, puis devant le sénat. […] La prose oratoire avait à Rome un peu du rythme de la poésie ; l’orateur était pour le peuple romain un musicien de la pensée ou de la passion. […] C’était un cirque dont les orateurs étaient les lutteurs devant un peuple délicat. […] Ce talent a toujours fleuri, a toujours dominé chez les peuples libres, et surtout dans les États paisibles. […] Chacun avait ainsi sa part d’erreur ou de vérité qu’il se faisait à soi-même : au peuple la fable, aux sages la vérité.
Les peuples encore grossiers, composent donc des especes de cantiques pour célebrer les loüanges de ceux de leurs compatriotes qui se sont rendus dignes d’être imitez, et ils les chantent en plusieurs occasions. […] Les grecs ont eu des commencemens pareils à ceux des autres peuples, et ils ont été une societé naissante avant que d’être une nation polie. […] Les peuples polis ne s’étoient pas encore avisez qu’un combat singulier, dont le hazard, ou tout au plus l’escrime qu’ils regardoient comme l’art de leurs esclaves, doit décider, fut un bon moïen de se justifier sur un reproche, qui souvent ne touche pas à la bravoure. […] Il étoit reservé à ces peuples que la misere feroit sortir un jour de dessous les neiges du nord, de croire que le meilleur champion devoit être necessairement le plus honnête homme, et qu’une societé où l’honneur obligeroit les citoïens à vanger eux-mêmes à main armée leurs injures, ou vraïes ou prétendues, pouvoit mériter le nom d’état. […] Mais ces discours étoient convenables dans l’Iliade écrite pour être lûe par des peuples chez qui le cheval étoit en quelque façon un animal commensal de son maître.
Le bon-sens surtout appartient moins à un peuple livré au luxe. […] Qui osera faire un cours de morale unie au sentiment, à l’usage de ce bord peuple, de ce peuple sensible, qui ne mérite pas le dédain du philosophe ? […] Heureux le peuple neuf qui modifie à son gré ses idées, ses sentimens & ses plaisirs ! […] L’histoire de ce peuple isolé seroit plus curieuse que celle de tous les peuples connus, anciens & modernes. […] A mesure que le peuple se polit, les mots prennent un rang comme les hommes.
C’est ce qui fait qu’il n’y a pas de peuple au monde, excepté peut-être le peuple grec, où il y ait autant de déclassés. […] Nul peuple au monde n’est plus indifférent à cet égard. […] Le peuple se sent souverain très suffisamment. […] Dès que le peuple demandait un peu impatiemment une réforme sociale, le Sénat lui montrait un peuple à conquérir ou un roi étranger menaçant. […] C’est elle qui est entre le peuple et nous.
Bien que les peuples modernes présentent, comme nous le dirons bientôt, quelques époques intéressantes, quelques règnes fameux, quelques portraits brillants, quelques actions éclatantes, cependant il faut convenir qu’ils ne fournissent pas à l’historien cet ensemble de choses, cette hauteur de leçons qui font de l’histoire ancienne un tout complet et une peinture achevée. […] Aussi tout est ténèbres dans leur origine : vous y voyez à la fois de grands vices et de grandes vertus, une grossière ignorance et des coups de lumière, des notions vagues de justice et de gouvernement, un mélange confus de mœurs et de langage : ces peuples n’ont passé ni par cet état où les bonnes mœurs font les lois, ni par cet autre où les bonnes lois font les mœurs. […] Or, en répandant sur les peuples cette uniformité et, pour ainsi dire, cette monotonie de mœurs que les lois donnaient à l’Égypte, et donnent encore aujourd’hui aux Indes et à la Chine, le christianisme a rendu nécessairement les couleurs de l’histoire moins vives. […] Comme elles sont véritablement des vertus, elles évitent la lumière et le bruit : il y a chez les peuples modernes un certain silence des affaires qui déconcerte l’historien.
Dans cette révolution, l’autorité de domaine devint naturellement autorité de tutelle ; le peuple souverain, faible encore sous le rapport de la sagesse politique se confiait à son sénat, comme un roi dans sa minorité à un tuteur. […] Enfin lorsque les puissants dirigèrent le conseil public dans l’intérêt de leur puissance, lorsque le peuple corrompu par l’intérêt privé consentit à assujettir la liberté publique à l’ambition des puissants, et que du choc des partis résultèrent les guerres civiles, la monarchie s’éleva sur les ruines de la démocratie. […] Cette révolution fait le salut des peuples qui autrement marcheraient à leur destruction. — Cette vérité semble admise par les docteurs du droit moderne, lorsqu’ils disent : universitates sub rege habentur loco privatorum ; c’est qu’en effet la plus grande partie des citoyens ne s’occupe plus du bien public. […] L’erreur est venue de ce qu’on n’avait pas bien défini les trois mots peuple, royauté, liberté 106. […] En Allemagne, ce fut, dit-on, Henri l’Oiseleur qui le premier réunit dans des cités le peuple dispersé jusque-là dans les villages, et qui entoura les villes de murs. — Qu’on dise après cela que les premiers fondateurs des villes furent ceux qui marquèrent par un sillon le contour des murs ; qu’on juge si les étymologistes ont raison de faire venir le mot porte, a portando aratro, de la charrue qu’on portait pour interrompre le sillon à l’endroit où devaient être les portes.
Plaute parlera au peuple son langage. […] Mais le peuple ? […] À quel peuple unanime s’adressera-t-il ? il n’y a déjà plus de peuple. […] Un peuple unanime manquait encore.
Il faut aimer le pauvre peuple, mais non flatter ses caprices. […] Oui, le peuple allemand promet un avenir, et a un avenir. […] Vous parlez du réveil du peuple allemand et vous croyez que ce peuple ne se laissera plus arracher ce qu’il a conquis et ce qu’il a payé de son sang : la liberté. Le peuple est-il réellement réveillé ? […] Le sommeil du peuple était trop profond pour que les secousses même les plus fortes puissent aujourd’hui le réveiller si promptement.
Les lettres, qui renaissaient alors, étaient la véritable royauté des peuples. […] Supplice cruel par lequel un peuple toujours vivant est encadré dans une nationalité, non pas morte, mais ensevelie. […] Rienzi en avait profité pour s’attacher ce peuple et pour combattre les grandes familles armées qui tyrannisaient la ville. […] Le tocsin du Capitole souleva le peuple contre les grands ; ils furent chassés de Rome ; les supplices achevèrent ce que la victoire du peuple avait commencé. […] Une émeute du peuple, fomentée par les derniers des Colonne, souleva la ville et força Rienzi à se réfugier au château Saint-Ange.
« Dès l’heure la plus matinale, les flots du peuple s’assemblèrent sous les tilleuls et dans la rue de Frédéric. […] Tant qu’une faible partie de la terre fut ouverte aux peuples de l’Occident, des vues exclusives dominèrent parmi eux. […] « Nous ne connaissons », dit Guillaume de Humboldt, dans un travail encore inédit sur la diversité des langues et des peuples, « nous ne connaissons, ni historiquement, ni par aucune tradition certaine, le moment où l’espèce humaine n’ait pas été séparée en groupes de peuples. […] Sans doute il est des familles de peuples plus susceptibles de culture, plus civilisées, plus éclairées ; mais il n’en est pas de plus nobles que les autres. […] Chez tous les peuples qui possèdent une traduction du livre de Job, ces tableaux de la nature orientale ont produit une impression profonde.
C’est lui seul qui a inoculé chez les Français la doctrine de la souveraineté du peuple et de ses conséquences les plus extrêmes. […] Désormais, avec ou sans les privilégiés, il sera, sous la même dénomination, appelé le peuple ou la nation. » — N’objectez pas qu’un peuple ainsi mutilé devient une foule, que des chefs ne s’improvisent pas, qu’on se passe difficilement de ses conducteurs naturels, qu’à tout prendre ce clergé et cette noblesse sont encore une élite, que les deux cinquièmes du sol sont dans leurs mains, que la moitié des hommes intelligents et instruits sont dans leurs rangs, que leur bonne volonté est grande, et que ces vieux corps historiques ont toujours fourni aux constitutions libres leurs meilleurs soutiens. […] Ce peuple libre, juste et sage, toujours d’accord avec lui-même, toujours éclairé dans le choix de ses ministres, modéré dans l’usage de sa force et de sa puissance, ne serait jamais égaré, jamais trompé, jamais dominé, asservi par les autorités qu’il leur aurait confiées. […] Ce qui le prouve évidemment, c’est que ce sont les bourgeois, les gens de lettres, les gens de finances, enfin tous ceux qui jalousaient la noblesse, qui ont soulevé contre elle le petit peuple dans les villes et les paysans dans les campagnes. » (Rivarol, Mémoires. […] « La noblesse, disent les nobles, est un intermédiaire entre le roi et le peuple Oui, comme le chien de chasse est un intermédiaire entre le chasseur et les lièvres. » (Chamfort.)
Chez un même peuple, d’une contrée à l’autre, l’esprit change notablement, et, malgré cela, cet esprit particulier à une contrée n’est pas toujours reconnaissable. […] Taine, mais en subordonnant les nations aux génies, en considérant les peuples par leurs artistes, le public par ses idoles, la masse par ses chefs. […] Hennequin n’a pas examiné, d’autre part, si le goût littéraire d’un peuple à tel moment de son histoire est toujours l’expression exacte de sa nature à ce moment. […] Zola, a Quel peuple de mœurs violentes ! […] Nous sommes un peuple à imagination vive et à sympathie facile, un peuple éminemment ouvert de pensée et sociable de sentiment.
et regardez en pitié les larmes d’un peuple malheureux qui attend son repos de vous seul, après Dieu. […] Tel n’était pas sans doute l’esprit des peuples d’Espagne et d’Italie. […] Déjà ce peuple couvrait la Méditerranée d’une flotte nouvelle de deux cents galères. […] Voici gisant à terre l’orgueil de ses redoutés remparts ; et il n’y a plus qu’une lamentable relique de son peuple invincible. […] Pourquoi, dans le vaste cercle de son arène déserte, le grand peuple ne fait-il aucun bruit ?
Mais, lui ayant demandé s’il avait la résolution de remettre au peuple toscan la liberté anarchique dont il jouissait avant lui, Laurent ne daigna pas répondre. […] Un accès de démence parut avoir saisi le peuple et les moines. […] Ce danger et cette mort lui valurent l’enthousiasme du peuple ; la nation vit qu’il fallait aimer celui que les grands et les étrangers voulaient perdre. […] Quand il mourut, Florence était libre, la Toscane prospère, l’Italie pacifique, l’Europe édifiée de ses vertus ; il fallait ou reconnaître son ascendant ou se déclarer le peuple le plus ingrat de la terre. […] Voici, à peu près, les prodiges avant-coureurs de sa mort, sans parler de ceux qui ont couru dans le peuple.
Le Peuple qui m’entendroit parler ainsi, pour peu qu’il fût sage, diroit : Voilà un mauvais Citoyen ; il veut nous précipiter dans les malheurs de la sédition, & nous mettre dans le cas d’aggraver un joug raisonnable, par les efforts qu’il voudroit nous faire tenter pour le secouer. […] Jusqu’à présent on avoit regardé la guerre comme un mal souvent nécessaire ; jusqu’à présent les belles Ames avoient été touchées de cette maxime célébrée chez tous les Peuples policés : Il est beau de mourir pour la Patrie. […] Les Anglois, dans le plus fort accès d’antipathie dont on les accuse à notre égard, auroient-ils jamais dit, oseroient-ils même dire, à présent que nous sommes en guerre ouverte avec eux : Ce n’est plus sous le nom de François que ce Peuple pourra de nouveau se rendre célebre : cette Nation avilie est aujourd’hui le mépris de l’Europe. […] La gloire du génie François est établie, dans l’Europe, par des Ouvrages dignes de plaire à tous les Peuples éclairés : les grands Ecrivains du siecle dernier, les bons Ecrivains de celui-ci ne nous laissent rien à envier aux autres Nations. Mais qu’on vienne nous donner pour les illustrateurs de notre Littérature, des Ecrivains pédantesques, bizarres, décousus, hyperboliques, lilencieux, qui la dégradent tous les jours ; mais qu’on prétende établir sur des Ecrits que la raison réprouve autant que le bon goût, cette haute idée, cette estime qui fait considérer un Peuple chez les autres Peuples : c’est le comble de l’extravagance ou de l’imbécillité.
Le temps l’appelait : les chances de la gloire, de la tyrannie, de la servitude et des malheurs des peuples à la suite des guerres de Louis XIV, avaient soufflé dans toutes les âmes, en Europe, une sorte de pressentiment de ce livre. C’était la vengeance des peuples, la leçon des rois, l’inauguration de la philosophie et de la religion dans la politique. […] Ses courtisans, en lui montrant son image dans le faible et dur Idoménée, fléau de ses peuples, lui dirent « qu’il fallait être son ennemi pour avoir peint un pareil portrait. » On vit une satire sanglante des princes et du gouvernement dans les récits et dans les théories du païen. […] Heureux ceux qui n’ont jamais regardé leur autorité que comme un dépôt qui leur est confié pour le seul bien des peuples ! […] On y trouve tout ce qui s’est accompli, tenté ou préparé depuis pour l’amélioration du sort des peuples.
Ainsi, du moins, le comprirent tous les peuples anciens. […] La curiosité n’est nulle part plus vive, plus pure, plus objective que chez l’enfant et chez les peuples sauvages. […] J’ai vu des hommes du peuple plongés dans une vraie extase à la vue des évolutions des cygnes d’un bassin. […] Les esprits élevés, qui redeviennent peuple, éprouvent le même sentiment. […] L’extension plus ou moins grande qu’un peuple donne à la fatalité est la mesure de sa civilisation.
Turgot et moi qui aimions le peuple. » — « Ce discours est très vrai », écrivait Condorcet à Voltaire à cette date, en lui rapportant le mot de Louis XVI. […] Cette terrasse, qui peut donner accès à l’insurrection populaire et à l’invasion des Tuileries, lui est très chère, et il applaudit au décret de l’Assemblée qui porte que l’accès en sera ouvert au peuple (29 juillet 1792). Si quelques-uns de ses collègues, qu’il appelle des factionnaires habitués des Tuileries, se plaignent d’avoir été insultés par le peuple en entrant dans la salle des séances, il trouve ces réclamations ridicules. […] On accusait Chabot d’être allé, dans la nuit du 19 au 20 juin, ameuter le peuple du faubourg Saint-Antoine : « M. […] Malheureuse et terrible situation que celle ou le caractère d’un peuple naturellement bon et généreux est contraint de se livrer à de pareilles vengeances !
. — La souveraineté du peuple et les trois pouvoirs » (18 février). Il tâche d’y démontrer qu’on peut être pour une Charte non octroyée, sans être pour la souveraineté du peuple entendue à la Jean-Jacques. […] L’avenir est remis à l’énergie individuelle des citoyens. » Sa conduite, pendant ces journées de Juillet, fut pleine de fermeté ; mais il n’espérait rien de la résistance armée du peuple, et il ne la conseillait pas. […] Le peuple ayant tout fait en trois jours, on est arrivé trop tôt, et l’on a été pris à l’improviste. […] Une fois convenu pour tout le monde, roi, peuple, assemblées, qu’on ira à la découverte de l’avenir, il ne reste plus à disputer que sur le degré de vitesse à employer.
Ainsi toutes les générations humaines ; ainsi tous les peuples de tous les âges et de tous les lieux ; ainsi les vivants et les morts sont unis entre eux et avec Dieu par la parole. […] La parole est donc l’homme tout entier ; et dans la langue d’un peuple on doit trouver la raison des mœurs et des institutions de ce peuple. […] Le représentant des idées d’un siècle, le législateur d’un peuple, le fondateur d’un empire : voilà le héros de l’épopée. […] Les législateurs anciens, en prescrivant de ne point écrire les lois, voulaient-ils entretenir l’ignorance des peuples ? […] Tant que dura la liberté chez les Grecs, ces peuples menaient une vie publique, qui supposait peu le loisir de la lecture.
Ainsi dut s’abaisser, avec la puissance, l’inspiration du peuple espagnol. […] Au milieu même de la guerre et de l’anarchie, les études se ranimèrent, comme une arme de plus pour l’esprit du peuple qu’une main de fer voulait plier à son gré. […] Peuples et rois, écoutez ! […] et qu’à son ombre, les peuples célèbrent sa victoire ! […] « Élevez-le, tel que l’admirèrent, puissant et stable au-dessus des faisceaux de l’empire, les barbares triomphant au milieu de la ruine des peuples et des lois.
C’est cette Histoire de la Comédie chez tous les peuples 27 (rien que cela !) […] Le lynx des mots est devenu le lynx des hommes ; car l’histoire de la comédie, c’est l’histoire de tous les peuples, concentrée dans le cadre de leurs théâtres, et l’inventaire des différentes civilisations. […] Mais, franchement, puisqu’il s’agissait du génie dramatique, ou du moins de la moitié du génie dramatique de tous les peuples, je m’attendais à quelque chose de plus grand, de plus varié, de plus formidable que ce que du Méril, avec toute sa science, nous a rapporté ! […] On peut lui appliquer, mais en bonne part, ce qu’il dit en mauvaise du peuple d’Athènes après la mort de Socrate : — Il cherchait ses opinions dans le bleu du ciel au lieu de les chercher à ses pieds. […] L’Histoire de la Comédie chez tous les peuples est désormais sa chose à lui.
L’école dit : C’est le peuple. […] Il lève les yeux et regarde Dieu ; puis il baisse les yeux et regarde le peuple. […] Il est utile, il est nécessaire que le souffle du peuple traverse ces toutes-puissantes âmes. Le peuple a quelque chose à leur dire. […] La canaille, c’est le commencement douloureux du peuple.
En Grèce, en Arabie, dans l’Inde, ainsi se perpétuèrent et grossirent, durant des siècles, des trésors de récits et de chants qui sont le plus complet réservoir comme la plus pure essence de la vie de ces peuples aux époques primitives. […] Béranger est venu, et il a résolu la question pour les esprits cultivés d’une part, et pour le peuple de l’autre. […] Ce n’était plus une aveugle exaspération suivie de lassitude et de repentir, comme sous la Ligue ; ce n’était plus l’étourderie émoustillée de la Fronde : de graves événements avaient illustré, mûri, moralisé ce peuple sur lequel Gargantua s’était permis autrefois de si inconcevables licences ; 89 et Napoléon avaient enseigné, inculqué à tout jamais au tiers état la dignité de l’homme, l’énergie civilisatrice, et lui avaient fait un besoin des plus mâles et inviolables sentiments. Mais en même temps, par un fonds d’ancienne humeur franche, ce bon peuple avait gardé ses facultés légères et pénétrantes, sa grâce amoureuse, son rire prompt et subtil, et ses retours épicuriens jusqu’au sein des publiques douleurs. […] Les Souvenirs du Peuple et les Bohémiens avaient fait entrevoir tout ce qui pourrait sortir de ce magnifique développement poussé à son terme.
Mais, avec le temps, M. de La Mennais est venu à comprendre que non-seulement les gouvernements se refusaient à transmettre la doctrine antique à la fois et régénératrice, mais que le Saint-Siège se refusait à la verser présentement, et qu’il demeurait plus sourd que le rocher, quoique le peuple eût soif dans le désert. […] On voit que le but est resté le même : spiritualiser, guérir, moraliser chrétiennement une société passée du matérialisme à l’indifférence ; mais dans le second procédé, auquel M. de La Mennais a recours depuis cinq ans environ, c’est à la société elle-même, c’est à ses éléments vierges et profonds, c’est au peuple en un mot qu’il s’adresse pour le régénérer par la parole et l’épurer. […] » Et viennent alors les signes évidents, les bouleversements d’hier et ceux de demain qui se devinent, les peuples héroïques qui succombent, mais qui renaîtront ; l’agitation sourde, universelle, du vieux monde et les apprêts sombres et irrécusables d’un dernier grand combat. […] « Le murmure confus et le mouvement intérieur des peuples en émoi sont le signe précurseur de la tempête qui passera bientôt sur les nations tremblantes. […] « Et l’on vit les enfants du peuple lever le bras contre le peuple, égorger leurs frères, enchaîner leurs pères, et oublier jusqu’aux entrailles qui les avaient portés.
Combien y a-t-il de nos grands auteurs qui soient compris par le peuple ? […] Au-dessus d’elle, la culture latine a accaparé les idées générales qui pouvaient la nourrir et la développer ; un petit peuple noir de théologiens et de disputeurs les a prises pour son apanage, et cet enclos ecclésiastique en restant stérile, a imposé la stérilité au reste du champ. […] Les livres qu’on produit là ne pénètrent point dans le peuple ; ils sont faits pour des curieux et des gourmets, non pour des âmes simples. […] En Allemagne, une servante, le dimanche, lit Schiller et l’entend ; maintes fois vous rencontrez un piano dans une arrière-boutique ; les mineurs flamands, leur ouvrage achevé, chantent en parties ; partout en pays protestant la Bible, du moins, est lue et même sentie par le peuple. […] Les uns sont restés au niveau du peuple, les autres n’ont plus rien de commun avec le peuple.
Il diffère du second en ce qu’il n’est point le mandataire du peuple ; son devoir ne le soumet point à l’intérêt public, et il est au-dessus des lois. […] Il est encore trop de son siècle pour ressembler au souverain moderne, il gouverne les êtres, comme le roi ses peuples, sans beaucoup d’égards pour leur bonheur. […] Ils ne sont les dieux de ce peuple que parce qu’ils sont faits à son image. […] Ils sont le peuple lui-même, qui s’apparaît sous une forme plus brillante et plus pure. […] Pour que ces dieux convinssent mieux encore à leur nouveau peuple, il leur a donné quelque chose d’enfantin.
Faire une histoire des civilisations, pour qui ne s’accroche pas bêtement aux mots, c’est comme faire une histoire générale des peuples. […] La supériorité relative des peuples, leur originalité, leurs diversités de mœurs et d’instincts, Louis Faliés ne les explique point par ce milieu, si commode, si superficiel, si vite trouvé et si cher au Matérialisme contemporain. […] La race, selon lui, décide de tout dans la différence des peuples entre eux. […] Ces peuples bouchers sont artistes comme les coquines grecques sont lettrées ! […] Avec les vertus qu’il a fait descendre dans leurs mœurs, il a fait descendre dans leurs arts, leurs sciences et leurs littératures, des inspirations inconnues, d’une beauté que les peuples les plus spirituels de la terre, comme la Grèce et Rome, ne soupçonnaient même pas !
Cette publication importante, cet âpre travail où les faits tiennent une si grande place, et malheureusement toute la place, ce précis rapide, serré, virilement écrit, d’une, histoire à peu près inconnue, — car l’Espagne et la France, en se pressant l’une sur l’autre dans leurs luttes, l’avaient étouffée, cette histoire de peuples intermédiaires étranglés, écrasés entre les portes des deux pays, — on se demande, quand on la lit ou qu’on l’a lue, au profit de qui ou de quoi la voilà écrite, avec cette science et cette conscience, si ce n’est au profit isolé de l’auteur ? […] Mais ses idées sur les peuples pyrénéens ont une source plus désintéressée et plus intellectuelle… Elles lui sont venues en regardant les choses ; c’est le fruit de ses observations d’historien. […] L’histoire des peuples pyrénéens, non seulement telle que Cénac-Moncaut l’écrit, mais telle qu’on peut la concevoir, ne met en lumière rien de plus que ce que les autres histoires de la Féodalité chrétienne nous apprennent sur elle, depuis qu’elle s’est établie dans le sang mêlé du peuple romain et des barbares. […] Le mouvement d’intérêt curieux qui nous emporte, en ce moment, vers les Mémoires… de tout le monde, est le même qui nous pousse à écrire l’histoire… de tout le monde aussi, en fait de peuples. […] n’a pas le droit d’écrire ses mémoires, et, j’en demande bien pardon à Cénac-Moncaut, tout peuple non plus n’a pas droit à l’Histoire, parce que, boue et crachat longtemps pétris dans les mains de la divine Providence, il a vécu, combattu et souffert.
Voilà pourquoi l’on habille aujourd’hui communément ces personnages de vêtemens imaginez à plaisir, et dont la premiere idée est prise d’après l’habit de guerre des anciens romains, habit noble par lui-même, et qui semble avoir quelque part à la gloire du peuple qui le portoit. […] Aussi voïons-nous qu’au sentiment general des peuples de l’Europe, les françois sont ceux qui réussissent le mieux aujourd’hui dans la représentation des tragedies. […] Sur ce théatre, il étoit permis à Jules Cesar de s’arracher les cheveux, ainsi que le feroit un homme de la lie du peuple, pour exprimer sa colere. […] Generalement parlant, il est des peuples qui varient davantage leurs tons de voix, qui mettent des accens plus aigus et plus fréquens dans leur prononciation, et qui gesticulent avec plus d’activité que d’autres. […] Or un acteur de comédie, qui dans sa déclamation imiteroit la prononciation et la gesticulation d’un peuple étranger, pécheroit contre la regle que nous avons rapportée.
N’est-ce pas l’épopée dernière des peuples chez lesquels l’individualité reprend la place qu’elle avait à l’origine des sociétés et lutte par les mœurs avec ce qu’on appelle d’un air si suprêmement pédantesque : des Institutions. […] Elle ne tient pas à être savante, — et quand elle sent la nécessité de le devenir, soit qu’il s’agisse de l’esprit général d’un peuple ou du génie particulier d’un homme, c’est que le peuple ou cet homme ont déjà largement vécu. […] Ce que l’on dit d’un peuple, on peut donc le dire d’un autre peuple.
Ces deux monuments, changés de place, auraient perdu leur principale beauté, c’est-à-dire leurs rapports avec les institutions et les habitudes des peuples. […] On aura beau bâtir des temples grecs bien élégants, bien éclairés, pour rassembler le bon peuple de saint Louis, et lui faire adorer un Dieu métaphysique, il regrettera toujours ces Notre-Dame de Reims et de Paris, ces basiliques, toutes moussues, toutes remplies des générations des décédés et des âmes de ses pères ; il regrettera toujours la tombe de quelques messieurs de Montmorency, sur laquelle il souloit se mettre à genoux durant la messe, sans oublier les sacrées fontaines où il fut porté à sa naissance. […] L’ancienne France semblait revivre : on croyait voir ces costumes singuliers, ce peuple si différent de ce qu’il est aujourd’hui ; on se rappelait et les révolutions de ce peuple, et ses travaux, et ses arts.
. — Comment le peuple s’assimile ces mots. — Rejet des principes étymologiques. — L’orthographe et le « fonétisme ». […] Ils ont une forme heureuse, mais par hasard ; et pourtant tout mot grec aurait pu devenir français si l’on avait laissé au peuple le soin de l’amollir et de le vaincre. […] Les mots latins francisés par le peuple n’ont souvent gardé aucun signe de leur naissance ; on n’aperçoit pas, au premier coup d’œil, libella dans niveau, catellus dans cadeau, muscionem dans moineau 51, patella dans poële, aboculus dans aveugle. […] Le peuple de Paris essaie de donner une forme aux mots grecs ; il prononce : chirurgie et chérugie, panégérique, farmacerie, plurésie, rachétique, rumatisse, cangrène, cataplâsse, cataclisse, etc..
C’est avoir fait quelque chose pour la langue et pour la littérature d’un peuple que d’avoir fait ce peuple non pas le poète, mais le sujet du plus grand drame de l’univers. […] victoire à jamais au peuple romain ! […] … Avons-nous l’air d’un peuple bien nourri ?… avons-nous l’air d’un peuple bien nourri ? […] … Mais il faut que la liberté aussi nourrisse le peuple !
De là sortit le principe de la souveraineté du peuple. […] Le peuple avait-il été soumis à une domination pesante ? […] Entouré de l’égoïsme aveugle d’une cour, il n’avait pas un moyen légal de communiquer avec son peuple. […] Turgot et moi qui aimions le peuple », disait Louis XVI, et il renvoyait M. […] Nous aussi, nous faisons partie du peuple ; nous sommes citoyens, nous sommes Français.
On doit recourir aux anciens pour le goût simple et pur des beaux-arts ; on doit admirer leur énergie, leur enthousiasme pour tout ce qui est grand, sentiments jeunes et forts des premiers peuples civilisés ; mais il faut considérer tous leurs raisonnements en philosophie comme l’échafaudage de l’édifice que l’esprit humain doit élever. […] L’éloquence était, chez les Athéniens, tant qu’ils ont été libres, une espèce de gymnastique dans laquelle on voit l’orateur presser le peuple par ses arguments, comme s’il voulait le terrasser. Le mouvement que Démosthène exprime le plus souvent, c’est l’indignation que lui inspirent les Athéniens ; cette colère contre le peuple, assez naturelle peut-être dans une démocratie, revient sans cesse dans les discours de Démosthène. […] Ce qu’on peut remarquer en général dans les orateurs grecs, c’est qu’ils ne se servent que d’un petit nombre d’idées principales, soit qu’on ne puisse frapper le peuple qu’avec peu d’arguments exprimés fortement et longtemps développés, soit que les harangues des Grecs eussent le même défaut que leur littérature, l’uniformité. […] C’est ainsi que devait être un peuple qui commençait la civilisation du monde.
Il est reconnu que chaque littérature s’empreint plus ou moins profondément du ciel, des mœurs et de l’histoire du peuple dont elle est l’expression. […] L’esprit des peuples, en un religieux silence, entend longtemps retentir de catastrophe en catastrophe la parole mystérieuse qui témoigne dans les ténèbres : Admonet, et magna testatur voce per umbras. […] Les écrivains des autres peuples et des autres temps, même les admirables poëtes du grand siècle, ont trop souvent oublié, dans l’exécution, le principe de vérité dont ils vivifiaient leur composition. […] Il doit marcher devant les peuples comme une lumière et leur montrer le chemin. […] Ses chants célébreront sans cesse les gloires et les infortunes de son pays, les austérités et les ravissements de son culte, afin que ses aïeux et ses contemporains recueillent quelque chose de son génie et de son âme, et que, dans la postérité, les autres peuples ne disent pas de lui : « Celui-là chantait dans une terre barbare ».
Les peuples chez qui les arts n’ont pas fleuri, sont les peuples qui habitent un climat qui n’est point propre aux arts. […] Les peuples d’une patience et d’une subtilité de main inconcevable, avoient même créé l’art de faire une espece de mosaïque avec les plumes des oiseaux. […] Mais comme le génie manquoit à ces peuples, ils étoient malgré leur dexterité, des artisans grossiers. […] Bien des gens pensent que les lettres et les arts perirent ensevelis sous les ruines de cette monarchie renversée et devastée par les peuples septentrionaux. […] Telles sont les guerres des turcs et des chrétiens où le peuple entier court encore de plus grands dangers que ceux où les soldats sont exposez dans les guerres ordinaires.
Le peuple espagnol, bien qu’en repoussant la royauté de Joseph il repoussât un bon prince et de bonnes institutions, fut peut-être mieux inspiré que les hautes classes. […] Les qualités des deux armées, l’esprit militaire des deux peuples, sont en présence, et M. […] Les princes, les peuples se trompent, a dit un ancien, et des milliers de victimes succombent innocemment pour leur erreur. […] Thiers s’est donc permis d’ajouter dans sa traduction les erreurs des peuples, et cette variante d’Horace me plaît fort. Pourtant, à Saragosse, ce ne fut pas le peuple qui se trompa.
. — La Légende d’un peuple (1888). […] Il sert de voix à tout un peuple, dont il rend, en beaux vers lyriques, la grande passion. […] Fréchette dans la Légende d’un peuple.
Ce que c’est que le Romanticisme Le romanticisme est l’art de présenter aux peuples les œuvres littéraires qui, dans l’état actuel de leurs habitudes et de leurs croyances, sont susceptibles de leur donner le plus de plaisir possible. […] Sophocle et Euripide furent éminemment romantiques ; ils donnèrent, aux Grecs rassemblés au théâtre d’Athènes, les tragédies qui, d’après les habitudes morales de ce peuple » sa religion, ses préjugés sur ce qui fait la dignité de l’homme, devaient lui procurer le plus grand plaisir possible. […] Cent ans de guerres civiles et de troubles presque continuels, une foule de trahisons, de supplices, de dévouements généreux, avaient préparé les sujets d’Élisabeth à ce genre de tragédie, qui ne reproduit presque rien de tout le factice de la vie des cours et de la civilisation des peuples tranquilles. […] C’était bien la poésie faite pour le peuple qui, à Fontenoy disait, chapeau bas, à la colonne anglaise : « Messieurs, tirez les premiers. […] De mémoire d’historien, jamais peuple n’a éprouvé, dans ses mœurs et dans ses plaisirs, de changement plus rapide et plus total que celui de 1780 à 1823 ; et l’on veut nous donner toujours la même littérature !
Au viiie siècle le roman apparaît : trois mots répétés par le peuple du diocèse de Soissons pendant que les clercs prient en latin pour le pape et l’empereur. […] Création spontanée du peuple, elle est à son image et pour son besoin : langue de la vie quotidienne, de l’usage pratique et de la sensation physique, langue de rudes soldats, de forts paysans, qui ont peu d’idées et ne raisonnent guère. A mesure que la pensée et la science élargissent ces étroits cerveaux et en éveillent l’activité, à mesure aussi que les lettrés prennent l’habitude d’user de la langue vulgaire, la première provision de mots préparée par le peuple ne suffira plus. On ira reprendre dans le riche fond de la latinité ce que l’on y avait d’abord laissé ; et les mots savants viendront presque dès le premier jour s’ajouter aux mots populaires : de ces deux classes de mots, formés ceux-ci sous l’influence et ceux-là hors de l’influence de l’accent latin, ceux-ci par la bouche et l’oreille du peuple, et ceux-là par l’œil des scribes, de ces deux classes se fera une langue plus riche, plus souple, plus fine, plus intellectuelle. […] Le provençal resta le parler du peuple : mais la littérature provençale périt, pour ne ressusciter qu’après plusieurs siècles, et sans jamais reprendre son ancienne vigueur.
L’hébreu, concis, énergique, presque sans inflexions dans ses verbes, exprimant vingt nuances de la pensée par la seule apposition d’une lettre, annonce l’idiome d’un peuple qui, par une alliance remarquable, unit à la simplicité primitive une connaissance approfondie des hommes. […] Ces deux conjugaisons hébraïque et grecque, l’une si simple et si courte, l’autre si composée et si longue, semblent porter l’empreinte de l’esprit et des mœurs des peuples qui les ont formées : la première retrace le langage concis du patriarche qui va seul visiter son voisin au puits du palmier ; la seconde rappelle la prolixe éloquence du Pélasge qui se présente à la porte de son hôte. […] Chez Homère, les œuvres civiles se font avec fracas et parade : un juge, assis au milieu de la place publique, prononce à haute voix ses sentences ; Nestor, au bord de la mer, fait des sacrifices ou harangue les peuples. Une noce a des flambeaux, des épithalames, des couronnes suspendues aux portes : une armée, un peuple entier, assistent aux funérailles d’un roi : un serment se fait au nom des Furies, avec des imprécations terribles, etc. […] Les noms propres y sont hérissés d’épithètes ; un héros manque rarement d’être divin, semblable aux Immortels, ou honoré des peuples comme un dieu.
Afin d’apprivoiser peu à peu les peuples avec son nouveau spectacle, il y fit combattre les champions seulement jusqu’au premier sang. […] Nous avons dans notre voisinage un peuple tellement avare des souffrances des hommes, qu’il respecte encore l’humanité dans les plus grands scelerats. […] Neanmoins ce peuple, si respectueux envers l’humanité, se plaît infiniment à voir les bêtes s’entre-déchirer. […] Le peuple dont je parle contemple encore avec tant de plaisir des hommes, païez pour cela, se battre jusqu’à se faire des blessures dangereuses, qu’on peut croire qu’il auroit de veritables gladiateurs à la romaine, si la bible défendoit un peu moins positivement de verser le sang des hommes hors les cas d’une absoluë necessité. […] Mais nous avons dans nos annales une preuve encore plus forte que celle-là, pour montrer qu’il est dans les spectacles les plus cruels une espece d’attrait capable de les faire aimer des peuples les plus humains.
Il semblait que, Louis XIV ayant abusé de sa méthode de régner, une nouvelle et plus douce manière devait être plus efficace et d’une application désormais certaine : Les rois ne peuvent être grands qu’en se rendant utiles aux peuples… Ce n’est pas le souverain, c’est la loi, Sire, qui doit régner sur les peuples… Les hommes croient être libres quand ils ne sont gouvernés que par les lois… Oui, Sire, il faut être utile aux hommes pour être grand dans l’opinion des hommes… Il faut mettre les hommes dans les intérêts de notre gloire si nous voulons qu’elle soit immortelle ; et nous ne pouvons les y mettre que par nos bienfaits. […] Ce n’est point contre l’auguste mémoire de Louis XIV que s’élevait Massillon dans les portraits qu’il traçait d’un monarque père du peuple et bienfaisant : il ne faisait que proposer en quelque sorte une transformation, une transfiguration pacifique et plus humaine de Louis XIV, dans cet idéal adouci d’un grand roi. […] À force de répéter au jeune roi : « Soyez tendre, humain, affable », Massillon, comme Fénelon lui-même, poussait un peu à la chimère ; il semblait croire à cet amour de nourrice que les peuples n’ont pas, et auquel les grands rois et les plus réputés débonnaires, les Henri IV même12, n’ont jamais cru. […] Le peuple semblait vouloir le dédommager et le venger de l’attentat récent ; les cris de Vive le roi ! retentissaient de toutes parts : « Jamais, dit l’Estoile, ne vit-on un si grand applaudissement de peuple à roi que celui qui se fit ce jour à ce bon prince partout où il passa. » On le faisait remarquer à Henri IV, qui répondit en secouant la tête : « C’est un peuple ; si mon plus grand ennemi était là où je suis, et qu’il le vît passer, il lui en ferait autant qu’à moi et crierait encore plus haut qu’il ne fait. » On cite une réponse toute pareille de Cromwell ; mais dans la bouche de Henri IV le mot, ce me semble, a encore plus de poids.
Il ne faudrait pas trop presser les idées de Bailly sur son peuple primitif qui savait tant de choses. Il aime encore mieux le chercher que l’avoir trouvé ; il a besoin, pour le mieux doter, que ce peuple perdu soit tout à fait reculé et comme enseveli dans les profondeurs historiques antérieures au déluge : « Les Gaulois ne sont pas assez inconnus, dit-il quelque part, pour qu’on puisse leur accorder un savoir illimité. » Il a l’air, par moments, de vouloir donner à ce peuple anonyme le nom à demi fabuleux d’Atlantes ; puis, sur le point de se prononcer, il hésite, et il se décide plutôt à faire des Atlantes les conquérants qui auront détruit son peuple chéri. […] Vous voyez qu’après avoir placé mon peuple antérieur sur le second plateau (de l’Asie) et sous les remparts de Gog et de Magog, il faut bien que je m’en défasse, puisqu’il a cessé d’exister. […] cette alliance qu’avaient scellée l’Histoire de l’astronomie ancienne, l’adoption du feu central, la communauté d’hypothèse d’un peuple primitif antédiluvien et l’âge d’or des Atlantes, cette alliance solennelle contractée devant de si grands dieux et pour de si graves sujets, se rompit par le trop d’attache de Bailly pour Sedaine, et qu’on dise après cela qu’il n’était pas littérateur jusqu’au point de tenir envers et contre tous pour la littérature même légère ! […] Pitra, et un vainqueur de la Bastille, de grande et belle taille, Hullin, le trouvent sur l’escalier de l’Hôtel de Ville, assez en peine de s’orienter et de se conduire dans ces flots de peuple ; ils lui offrent leurs bras : cet accompagnement le désigne de plus en plus à l’attention publique : les cris de Vive Bailly !
Cabarrus courut à La Presse ; il était sept heures et demie du soir, lorsqu’il y arriva à grand-peine à travers les flots du peuple. […] Et par exemple, pour ne prendre qu’un trait du caractère national, nous sommes un peuple qui se plaît ou s’est beaucoup plu à la guerre, qui aime le clairon et le pompon ; cela diminue sans doute, mais peut-on agir et raisonner absolument comme si cela n’était plus, comme si cette forme de notre imagination et tout notre tempérament étaient changés subitement, du soir au matin, comme si le tempérament et les intérêts des nations rivales ou jalouses avaient changé aussi ? […] Ce nouvel état social, fût-il uniforme dans sa simplicité d’organisation, aurait donc, selon les lieux et les peuples, une physionomie autre et des destinées fort différentes ; il aurait, lui aussi, ses orages, ses luttes, ses accidents imprévus, peut-être ses catastrophes, résultat des passions et du peu de sagesse humaine. […] Dans l’Antiquité, les peuples, tels que la poésie ou l’histoire nous les montre, les peuples des différentes cités et des petits États, dans leurs mouvements impétueux et leurs révolutions, se décidaient d’eux-mêmes au gré de leurs passions, et, à défaut de presse, par la voix de leurs orateurs ; ou bien, quand l’oracle avait parlé, aveuglément superstitieux qu’ils étaient, ils lui obéissaient en aveugles. Chez les modernes, il y a progrès : les oracles sont muets ; la voix des dieux et de ceux qui les faisaient parler n’est plus fatalement obéie ; les peuples pensent : et pourtant il y a toujours l’empire des mots, la puissance des déclamations de tout genre, des sophismes spécieux, ces autres formes d’idoles ; il y a la mobilité naturelle aux hommes, le jeu presque mécanique des actions et des réactions, mille causes combinées d’où résultent on ne sait comment, à certains jours, des souffles généraux qui deviendront plus tard des tempêtes ; et lorsqu’une fois il s’est établi parmi les peuples un mauvais courant de pensées et de sentiments, oracle ou non, il y a danger, si une main bien prudente et bien ferme n’est au gouvernail, qu’ils n’y obéissent en aveugles comme à un mauvais génie.
Ce peuple aura une littérature le jour où il reconnaîtra en lui l’humanité elle-même par la comparaison du passé, du présent et de l’avenir. Cette comparaison n’est pas possible dans une société qui se forme chez un peuple qui cherche sa nationalité et ses frontières. […] Non ; c’est le présent le plus étroit, c’est la vie au jour le jour dans un pays partagé entre cinq ou six peuples qui luttent dans d’interminables guerres contre la force des choses qui veut en faire un seul peuple. […] Tout entiers occupés d’eux-mêmes et du moment présent, les jeunes peuples, comme les jeunes gens, sont railleurs et enthousiastes. […] La civilisation n’est-elle pas le travail d’un peuple particulier pour réaliser un certain idéal de la vie sociale qui serve d’exemple et de type aux autres peuples, de même que la littérature n’est que l’effort suprême de l’esprit particulier de cette nation pour devenir l’esprit humain ?
Quand un peuple en est arrivé là, il n’a de chance de régénération que dans une conquête par un autre peuple plus jeune et plus énergique, ou dans un libérateur. […] Tout a été détruit, tout est dissous : En cet état, il ne s’agit pas uniquement de rétablir, il faut régénérer ; il faut s’occuper des hommes encore plus que des choses, et créer, pour ainsi dire, un nouveau peuple. — Un libérateur, dit-il encore, doit donner des lois raisonnables, et non des lois de passion ou de colère. […] Mais en les lisant, même sans être en rien du métier, on sent l’esprit général qui a présidé à ce code de prudence et d’équité : ce n’est pas une compilation, mais bien une composition qu’il y faut voir ; un conseil de sages enhardis par un héros profita du moment décisif où la nation, profondément remuée, se trouvait tout à coup replacée sous un meilleur génie et associait la vigueur d’un nouveau peuple à la maturité d’un peuple ancien. […] Un législateur isolerait ses institutions de tout ce qui peut les naturaliser sur la terre, s’il n’observait avec soin les rapports naturels qui lient toujours plus ou moins le présent au passé et l’avenir au présent, et qui font qu’un peuple, à moins qu’il ne soit exterminé, ou qu’il ne tombe dans une dégradation pire que l’anéantissement, ne cesse jamais, jusqu’à un certain point, de se ressembler à lui-même. […] [NdA] Dans ce même discours, Portalis, tout religieux qu’il est, explique en partie par l’amour-propre le triomphe du christianisme dès son origine : « Les préceptes de l’Évangile, dit-il, notifièrent la vraie morale à l’univers ; ses dogmes firent éprouver aux peuples devenus chrétiens la satisfaction d’avoir été assez éclairés pour adopter une religion qui vengeait en quelque sorte la divinité et l’esprit humain de l’espèce d’humiliation attachée aux superstitions grossières des peuples idolâtres » — Rapprocher cette explication de celle que donne Volney dans son Voyage en Égypte et en Syrie à propos des religieux du mont Sinaï et du discours que lui tient l’un d’eux sur les mobiles de leur vocation. — Ici Portalis et Volney, en les serrant de très près, se touchent.
Ils auraient pu être détestés du bas peuple, à cause de leur distinction ; mais il ne faut jamais oublier qu’à Athènes le bas peuple n’existe pas, les esclaves en tenant lieu. […] C’est un grand peuple qui s’effondre. […] Il y a longtemps déjà que ce peuple n’a plus d’âme. […] Sans doute ce qui importe à l’humanité c’est que les peuples faibles disparaissent et que les peuples sans moralité, ce qui est à très peu près la même chose, disparaissent, et que les peuples sots, ce qui est encore dans le même ordre d’idées, soient anéantis. […] En effet, dans un peuple où il n’y a pas, malheureusement, unanimité, et tous les peuples en sont là, il y a surtout deux classes d’hommes, relativement aux caractères.
On sait qu’il mourut l’année suivante ; et tandis que le peuple, toujours extrême, était loin de témoigner, pour sa cendre, le respect qu’il lui devait, et comme à son souverain, et comme à un homme qui avait fait de grandes choses pour la France, les orateurs sacrés et les gens de lettres portèrent leurs derniers hommages sur sa tombe. […] Si on cherche à travers tant d’éclat quel fut le bonheur des citoyens, on conviendra que les peuples, comme les hommes, ne peuvent être heureux que dans un état de calme, et loin des grands efforts que supposent de grands besoins. Il faut, pour le bonheur d’un peuple, que l’industrie soit exercée et ne soit pas fatiguée ; il faut qu’il soit encouragé au travail par le travail même ; que chaque année ajoute à l’aisance de l’année qui la précède ; qu’il soit permis d’espérer quand il n’est pas encore permis de jouir ; que le laboureur, en guidant sa charrue, puisse voir au bout de ses sillons la douce image du repos et de la félicité de ses enfants ; que chaque portion qu’il cède à l’État, lui fasse naître l’idée de l’utilité publique ; que chaque portion qu’il garde, lui assure l’idée de son propre bonheur, que les trésors, par des canaux faciles, retournent à celui qui les donne ; que les dépenses et les victoires, tout, jusqu’au sang versé, porte intérêt à la nation qui paie et qui combat ; et que la justice même, en pesant les fardeaux et les devoirs des peuples, n’use pas de ses droits avec rigueur, et se laisse souvent attendrir par l’humanité, qui n’est elle-même qu’une justice. D’après ces principes, qu’on juge de la félicité réelle des peuples dans un règne de soixante-douze ans, où il y eut quarante-six ans de guerre. […] Si maintenant on le compare aux rois célèbres de notre nation, on trouvera qu’il fut loin de cet esprit vaste et puissant de Charlemagne : mais l’un déploya de grandes vues chez un peuple barbare ; l’autre seconda les lumières et les vues d’un peuple instruit.
Après la révolution de 1848, il fonda un journal, le Peuple constituant, et fut élu député : il n’eut pas d’influence. […] Renan, étude en tète du Livre du Peuple. […] Il fonde de 1858 à 1850 quatre journaux : le Représentant du Peuple, le Peuple, la Voix du peuple et de nouveau le Peuple. […] La Banque du Peuple, créée en 1849, échoua […] Inutile de distinguer les nobles des bourgeois ; le savoir-vivre et l’éducation, établissent, en dépit des préjugés et des rancunes, l’assimilation de la noblesse et de la bourgeoisie, en face du peuple.
Maintenant que l’Église n’est plus rien pour le peuple, qui la remplacera ? […] Le génie est enfant ; le génie est peuple, le génie est simple. […] Mais le peuple, le temple est sa littérature, sa science, son art. Ce qu’il y a dans le christianisme de dangereux et de funeste, le peuple ne le voit pas. […] Aussi fut-il peu sympathique, dans sa forme définitive, aux peuples orientaux.
Chakya-Muni (le Buddha), Ananda, Prakriti, la mère de Prakriti, Brahmanes, disciples, peuple. […] » aussi bien quand Eva le remercie, que quand le peuple l’acclame. […] » C’est en effet devant le peuple et devant la femme que triomphera la poésie nouvelle, la jeunesse même de la poésie naturelle. […] D’autre part, la jeunesse de l’art de Walther, qui gagnera le peuple et Eva, s’y manifeste encore avant d’être soumise aux règles : « Die alte Zeit dünkt mich erneut », dit Pogner. […] Il caractérise soit la critique de Sachs marqueur du greffier, soit le jugement du peuple.
Quand un homme de l’Iliade appelle Agamemnon « Pasteur des peuples », ou « Atride qui commande au loin », il a épuisé la louange, son encensoir est éteint. […] Jamais l’orgueil d’un peuple ne fut plus magnifiquement encensé. […] La gloire d’Athènes a retenti au fond des Enfers, elle agite le peuple des morts. […] Il fait appel non pas aux armes, mais aux cris du peuple qu’il a perdu. — « Hélas ! […] Ce réveil de la langue du peuple déchaînée par la défaite, qu’il déplorait tout à l’heure, c’est lui qui en donne le premier signal.
Des tragédies de Shakespeare41 Les Anglais ont pour Shakespeare l’enthousiasme le plus profond qu’aucun peuple ait jamais ressenti pour un écrivain. Les peuples libres ont un esprit de propriété pour tous les genres de gloire qui illustrent leur patrie ; et ce sentiment doit inspirer une admiration qui exclut toute espèce de critique. […] Le malheur, alors qu’il pèse longtemps sur les peuples, leur donne un caractère que la prospérité même qui succède ne peut point effacer. […] Les jeux de mots, les équivoques licencieuses, les contes populaires, les proverbes qui s’entassent successivement dans les vieilles nations, et sont, pour ainsi dire, les idées patrimoniales des hommes du peuple ; tous ces moyens, qui sont applaudis de la multitude, sont critiqués par la raison. […] Les peuples du Nord ont existé, pendant plusieurs siècles, dans un état tout à la fois social et barbare, qui a dû longtemps laisser parmi les hommes beaucoup de souvenirs grossiers et féroces.
Dans ce système, comme je l’ai indiqué plus haut, ce qu’on a pris pour de l’abjection chez le peuple romain, était la preuve de sa solidité politique. […] On ne force pas la main à tout un peuple. […] Cette prétention de dieu, qui perdit Napoléon, est une de ces fatuités qu’un peuple aussi politique que le peuple romain n’avait pas. […] Déchirée par des démocraties locales, elle alla, avec les instincts de son magnifique tempérament de peuple, où elle vit une organisation. […] Ils passaient de l’anarchie, qui tue les peuples, à l’organisation, qui les fait vivre.
Un vieux peuple comme le nôtre s’y fût abîmé à jamais. […] Si la capacité de s’organiser en ruche mesure le degré de civilisation d’un peuple, aucun n’est supérieur au peuple allemand. […] Luther proclamait qu’ils étaient le peuple le plus religieux. […] « Opinions saines du peuple », disait Pascal. […] Elle ne doit pas aller au peuple.
Adieu donc ; je vous reverrai le jour indiqué. » Il dit, et me laissa le manuscrit du Livre du peuple. […] Les beaux morceaux de style prophétique dont il est plein ne sont que des allusions éloquentes à la longanimité du peuple et à la bienfaisance du riche. […] Il rédigeait alors, sous le nom du Peuple constituant, un journal auquel son nom et son talent devaient donner une influence décisive sur l’opinion républicaine. […] L’abbé de Lamennais me paraissait un homme versatile et ambitieux de bruit, tout prêt à profiter de la circonstance pour lancer le peuple dans le désordre à tout risque, pourvu qu’il eût son nom dans les bouches. […] Les mouvements d’un grand peuple bien compris sont presque toujours plus humains que les passions d’un parti ; il n’a personne à craindre et personne à flatter.
C’est merveille de le voir s’escrimer de sa lourde masse d’armes et briser les idoles que le peuple avait naguère la folie d’adorer. […] Le souverain actuel a nom : sa majesté le suffrage universel, et le suffrage universel est peuple surtout ; c’est donc du peuple surtout que doit s’occuper une littérature démocratique. […] Quoi vraiment, messieurs, vous êtes des démocrates et des amis du peuple ! […] Si votre peuple était le vrai peuple, il n’y aurait plus qu’à quadrupler le nombre des hôpitaux et à décupler celui des sergents de ville. […] Ce n’est pas au peuple que s’adressent les livres où il est en scène.
Il se garda bien de s’égarer en un monde irréligieux, qui voulait tirer de lui un vain amusement ; il n’aspirait à gagner que le peuple ; il garda pour les simples des moyens bons pour eux seuls. […] Les œuvres fines, les dialogues de Platon, par exemple, sont tout à fait étrangères à ces peuples. […] Les sobriquets que leur donnait le peuple, et qui sentent la caricature, en sont la preuve. […] Le peuple néanmoins en était dupe. Le peuple, dont l’instinct est toujours droit, même quand il s’égare le plus fortement sur les questions de personnes, est très facilement trompé par les faux dévots.