/ 1816
634. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre III. Comédie et drame »

C’est dans ces pièces philosophiques et dans la sentimentale féerie d’Arlequin poli par l’amour (1720) que l’on sent combien Marivaux à sa façon est vraiment poète : il y a en lui une poésie d’une espèce rare, une poésie fantaisiste, ingénieuse, alambiquée, brillante, qui rappelle avec moins de puissance et plus de délicatesse la Tempête ou Comme il vous plaira de Shakespeare. […] Piron maudit le genre sérieux en y revendiquant sa part de paternité : il écrivit sa Métromanie (1738), peinture trop chargée d’un travers trop spécial, et dont vraiment on a fort exagéré l’agrément.

635. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « M. Émile Zola, l’Œuvre. »

C’est vraiment une tragédie à trois personnages, celui qui s’étale sur la toile vivant d’une vie aussi réelle que les deux autres. […] Hubert et Hubertine, vous vous le rappelez, se lamentent de n’avoir pas d’enfant, et, toutes les vingt ou trente pages, l’auteur nous fait entendre délicatement que ça n’est vraiment pas leur faute… « C’était le mois où ils avaient perdu leur enfant ; et chaque année, à cette date, ramenait chez eux les mêmes désirs… lui tremblant à ses pieds… elle se donnant toute… Et ce redoublement d’amour sortait du silence de leur chambre, se dégageait de leur personne » (page 143).

636. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre X. Les sociales »

Il vous arrive, ange vraiment trop naïf, d’appeler Édouard Drumont, juif en chef de l’antisémitisme, « le prophète contemporain » et de le compter « parmi les héros auxquels la couronne de gloire sera remise par les anges au jour bienheureux du festin mystique ». […] Je soupçonne Dante, en effet de n’avoir rien de parnassien et Polyeucte, renversant les idoles, manque vraiment de tenue.

637. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Pensées, essais, maximes, et correspondance de M. Joubert. (2 vol.) » pp. 159-178

Ce qu’il faudra faire alors pour maintenir les justes droits de sa renommée, ce sera, en bonne critique comme en bonne guerre, d’abandonner sans difficulté toutes les parties de ce vaste domaine qui ne sont pas vraiment belles ni susceptibles d’être sérieusement défendues, et de se retrancher dans les portions tout à fait supérieures et durables. Ces portions que j’appelle vraiment belles et inexpugnables, ce sera René, quelques scènes d’Atala, le récit d’Eudore, la peinture de la campagne romaine, de beaux tableaux dans l’Itinéraire ; des pages politiques et surtout polémiques s’y joindront.

638. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Mémoires d’outre-tombe, par M. de Chateaubriand. Le Chateaubriand romanesque et amoureux. » pp. 143-162

Il serait curieux de suivre et d’énumérer les principaux noms de femmes vraiment distinguées qui l’ont successivement et quelquefois concurremment aimé, et qui se sont dévorées pour lui. […] Les Mémoires nous feraient croire vraiment qu’il se convertit tout à fait dans ses vingt dernières années, et qu’il n’adora plus qu’une Béatrix unique.

639. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Confessions de J.-J. Rousseau. (Bibliothèque Charpentier.) » pp. 78-97

Il n’a pas cette incroyable dureté (une dureté toute féodale vraiment) et ces inadvertances de cœur en parlant de ses père et mère, par exemple. […] Les deux natures, celle de René et celle de Rousseau, ont un coin malade, trop d’ardeur mêlée à l’inaction et au désœuvrement, une prédominance de l’imagination et de la sensibilité qui se replient sur elles-mêmes et se dévorent ; mais, des deux, Rousseau est le plus vraiment sensible, celui qui est le plus original et le plus sincère dans ses élans chimériques, dans ses regrets, dans ses peintures d’un idéal de félicité permise et perdue.

640. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand. (Berlin, 1846-1850.) » pp. 144-164

Ce premier roi de Prusse, par toute sa vie de vaine pompe et d’apparat, disait, sans le savoir, à sa postérité : « J’ai acquis le titre, et j’en suis fier ; c’est à vous de vous en rendre dignes. » Le père de Frédéric, dont son fils, si maltraité par lui, a si admirablement parlé, et dans un sentiment non pas filial, mais vraiment royal et magnanime, ce père grossier, économe, avare, bourreau des siens et idolâtre de la discipline, cet homme de mérite pourtant, qui « avait une âme laborieuse dans un corps robuste », avait rendu à l’État prussien la solidité que l’enflure et la vanité du premier roi lui avaient fait perdre. […] C’est là qu’on reconnaît vraiment le philosophe et le stoïcien dans le guerrier.

641. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Frédéric le Grand littérateur. » pp. 185-205

Voltaire est charmé, Voltaire est flatteur ; il remercie, il loue, il enchante ; on ne dirait pas vraiment qu’il se moque tout bas, et sans doute alors il ne se moquait pas trop, en effet, des quelques solécismes et des grosseurs de ton qui accompagnaient souvent ces hommages du Nord. […] Pourtant Frédéric se forma vite ; il se forme à vue d’œil dans cette correspondance, et il vient un moment où il possède et manie sa prose française de manière à tenir tête vraiment à Voltaire.

642. (1899) Esthétique de la langue française « Le vers libre  »

C’est là un art agréable, mais ce mouvement est-il vraiment nouveau dans la versification française ? […] Le début du Speculum humanæ Salvationis est un exemple de ce vers libre latin, mais fort médiocre ; il ne tient plus que par la rime, qui est lourde et banale ; ce sont des versets dont la nudité est vraiment sans aucun mystère ; les accents sont difficiles à situer et le rythme est nul : c’est loin de toute poésie.

643. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VI. Daniel Stern »

Vraiment, ç’eût été là peu amazone ! […] Au moins, quand un homme cesse d’être un homme, on sait ce qu’il devient, et, parfois encore, c’est Narsès, Abeilard, Origène ; mais quand une femme cesse d’être femme et que dans l’impiété d’un travail terrible et la folie d’une ambition, elle porte sur elle-même des mains suicides, ce qu’elle devient n’a plus de nom que celui qu’elle se donne, et voilà pourquoi, hors la mascarade, ce n’est pas vraiment plus madame Daniel Stern qu’il faut dire aujourd’hui que monsieur !

644. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XI » pp. 39-46

Le fait essentiel de la religion en France depuis une douzaine d’années, c’est l’abolition évidente et complète du gallicanisme : cette grande religion vraiment française n’est plus.

645. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXXIII » pp. 133-140

Si vous citez de Saint-Marc quelque chose de l’article très-piquant qu’il a fait il y a trois semaines environ, dans les Débats, sur l’ouvrage de M. de Rémusat (Essais de philosophie), article qui a l’air flatteur et qui est bien malicieux, ne dites rien qui ne soit bien pour M. de Rémusat, si généreux sous son scepticisme, si probe, si désintéressé, et (entre nous) si supérieur vraiment à l’autre.

646. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Note »

On se taisait alors : on jouissait de cette haute et vraiment grande éloquence, d’autant qu’elle était plus rare.

647. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « SUR ANDRÉ CHÉNIER. » pp. 497-504

C’est de ce côté que le volume d’André, à peine publié, échoua, et qu’il fut recueilli avec bonheur, avec une admiration vraiment filiale.

648. (1875) Premiers lundis. Tome III «  La Diana  »

En ces tristes journées on est tenté de se demander vraiment si l’on est une nation forte, sérieuse, ayant le caractère fait.

649. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIX. De la littérature pendant le siècle de Louis XIV » pp. 379-388

On voyait des écrivains saisir quelquefois, comme Achille, l’arme guerrière au milieu des ornements frivoles ; mais, en général, les livres ne traitaient point les questions vraiment importantes ; les hommes de lettres étaient relégués loin des intérêts actifs de la vie.

650. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre III. De la sécheresse des impressions. — Du vague dans les idées et le langage. — Hyperboles et lieux communs. — Diffusion et bavardage »

On dirait vraiment que nous ne nous en doutons pas.

651. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre XI. De l’ignorance de la langue. — Nécessité d’étendre le vocabulaire dont on dispose. — Constructions insolites et néologismes »

« Quiconque veut se faire un style durable, disait très bien Joubert, ne doit en user qu’avec une extrême sobriété. » C’est dans la langue commune, héréditaire, vraiment nationale, langue de nos pères qui sera la langue de nos fils, dans cette partie immuable du vocabulaire que Pascal a transmise à Racine et que Voltaire a livrée à Chateaubriand, qu’il faut chercher les expressions qui rendent nos idées.

652. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Et Lamartine ? »

Et aussitôt, les hommes reconnaissent que cette merveille leur est née : un poète vraiment inspiré, un poète comme ceux des âges antiques, ce « quelque chose de léger, d’ailé et de divin » dont parle Platon.

653. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Choses d’autrefois »

Mais vraiment elles payent bien tous ces avantages.

/ 1816