Au milieu des inexactitudes et des lacunes inévitables d’un tel mode de reconstruction, surtout avec une édition si fautive et si incohérente que celle qu’avait donnée Manuel du manuscrit de Vincennes, il n’en résultait pas moins pour l’ensemble de la jeunesse et de la première vie de Mirabeau une impression assez juste, sentimentale plutôt qu’irrécusablement motivée ; on voyait un homme dont les malheurs étaient plus grands que les torts, et les torts plus méchants que le fond. Quant à sa vie publique, beaucoup de révélations successives avaient été faites, et avec un résultat assez inverse du précédent, c’est-à-dire que si, en y regardant bien, on l’avait trouvé meilleur au fond que ses divorces, ses rapts et ses adultères, on le trouvait au rebours, dans la vie politique, plus léger et plus vain, moins scrupuleux en opinion, plus à la merci d’une belle inspiration du moment ou d’un mauvais discours qu’un de ses faiseurs lui avait apporté le matin, et finalement, pour tout dire, plus vénal que son génie, son influence et le développement majestueux de son âge mûr ne le donnaient à penser. […] Quoi qu’il en soit, le jugement total de la vie publique et privée de Mirabeau laissait l’idée de quelque chose de grand mais d’énormément souillé, d’une grossière débauche avec des éclairs de passion divine, d’ure souveraine et libre parole avec des besoins cupides ; et sa mémoire comme son corps, tantôt au Panthéon et tantôt sur la claie ! […] Lui, qui hier encore était tout rassasié de Mirabeau et ne croyait avoir rien d’important à apprendre sur cet homme si controversé ; lui, lecteur, qui hier ne connaissait le marquis économiste que par quelques ennuyeux volumes ou quelques épigrammes, et ne connaissait pas du tout le bailli, le voilà tout d’un coup épris d’eux, altéré de leur vie, de leurs opinions, de leur langage ; le voilà qui se fâche presque contre M. […] Nous sommes de son avis en cela, et il nous semble qu’en ce qui touche les portions toutes romanesques de la vie des grands hommes, s’il y a peu à faire pour les rendre plus complètes et harmonieuses, il est permis de l’oser ; mais un goût parfait, une discrétion extrême, devraient présider à ces légères et chastes atteintes.
On sent que l’homme mûri et désenchanté se promène le soir pour se donner les consolations et les diversions de la vie active qui lui était refusée. […] Il ne voulait de la vie que les grands rôles. […] Elle honore la fin de sa vie publique. […] Il ne m’aimait pas ; il évitait de prononcer mon nom pendant sa vie, et, comme ministre des affaires étrangères, il nuisait à ma fortune. […] Pourquoi donc le cœur serait-il sans force contre ces conditions de la vie ?
Cette apparition ne signale donc pas, comme on l’a dit souvent, la mort des littératures ; elle atteste seulement qu’elles ont déjà toute une vie accomplie. […] Le penseur suppose l’érudit ; et, ne fût-ce qu’en vue de la sévère discipline de l’esprit, je ferais peu de cas du philosophe qui n’aurait pas travaillé, au moins une fois dans sa vie, à éclaircir quelque point spécial de la science. […] Plusieurs problèmes importants de critique historique ne seront résolus que quand un érudit intelligent aura consacré sa vie au dépouillement du Talmud et de la Cabale. […] Que serait-ce donc, si, à l’expérimentation scientifique, on pouvait joindre l’expérimentation pratique de la vie ? […] Il est certain que l’habitude de la vie apprend, autant que les livres, et constitue une culture pour ceux qui n’en ont pas d’autre.
C’est la Vie. […] Il se sentit « dans un état de complet isolement », — pour lui « ces jours continrent le poids d’une vie entière » (IV, 357) […] C’est à cette époque, Wagner nous le dit, que « tout ce que, dans la vie moderne, nous qualifions d’art, cessa pour lui d’exister ». […] — C’étaient les nécessités matérielles de la vie qui l’y contraignaient. […] Nous publierons des études sur la vie, les drames, le système musical et dramatique de Wagner.
Les hommes se ruent en des chocs douloureux pour la vie, pour l’ambition, la fortune ou la gloire. […] Daudet est arrivé hier d’Angleterre, tout plein de vie et d’entrain, et, par ma foi, engraissé. […] Ainsi tombe la légende, qui attribue à la vie de désordre de Baudelaire, cette maladie qui ne fut chez lui, qu’un résultat de l’atavisme. […] Et on l’entendait répéter : « Moi j’étais né pour écrire, dans toute ma vie, un petit volume in-douze, dans le genre de La Bruyère, et rien que ce petit in-douze ! […] » — et parfois, pensant à cette vie abominable de travail, que je lui ai imposée, j’ai comme des remords, et la crainte d’avoir hâté sa fin.
Il n’y a pas eu de révélation ; les lois de la nature n’ont jamais été dérangées par une intervention divine ; tout ce qui est arrivé, arrive, arrivera dans la vie de l’univers et de l’humanité, est naturel, donc rationnel. […] Car la suppression du christianisme, d’un idéal religieux qui fournit une règle de vie avec une espérance de bonheur ultra-terrestre, mais infini, cette suppression seule explique la fureur de zèle humanitaire avec laquelle les philosophes veulent refaire la société pour mettre dans cette vie toute la justice et tout le bonheur. […] Rien de tragique au reste dans cette âme inquiète et dans cette vie orageuse : Bayle est une figure originale de savant à la vieille mode : paisible, doux, gai, sans ambition, indifférent à la gloire littéraire, il s’enferme dans son cabinet, et ne se croit jamais malheureux, dès qu’il peut lire, écrire, imprimer en liberté. Il travaille assidûment, sans fatigue ; c’est sa vie et sa joie468. […] Édition :Œuvres, Paris, 1790, 8 vol. in-8. — À consulter : l’abbé Trublet, Mémoires pour servir à l’histoire de la vie et des ouvrages de M. de Fontenelle, in-12, 1761 ; Faguet, xviiie siècle.
Théophile Gautier a imités dans ce roman sans vie et sans passion réelle, — monument d’archaïsme, dont l’idée ne pouvait venir qu’à un littérateur de décadence, très-habile, si l’on veut, et très-rompu aux choses du langage, mais dépourvu entièrement d’invention puissante et de toute originalité ! […] Il n’a ni la conception profonde et variée des caractères, ni l’intuition des situations, ni la puissance de la passion et de la vie. Même dans cette fameuse et coupable Mademoiselle de Maupin, ce sujet flétrissant, que l’auteur n’a peut-être abordé dans sa jeunesse que par amour de la difficulté vaincue, l’indécence, froide et maniérée sous le relief et le luxe des mots, manque de la vraie chaleur de la vie, et le danger d’un pareil livre vient bien moins de ce qu’on le lit que de ce qu’on le prend pour le lire. […] Théophile Gautier a manqué la vie ! […] Or bien, si vous voulez savoir, — car la vie ne se discute point, — combien il est aisé de reconnaître la présence ou l’absence de la vie, dans un livre où magnifiquement elle abonde et dans un livre où elle n’est pas, comparez seulement l’œuvre de Balzac à l’œuvre de M.
Son éloge d’Agésilas est divisé en deux parties ; la première n’est qu’une espèce de récit historique ; l’orateur parcourt toutes les grandes actions de ce prince, ses guerres, ses victoires et les principaux événements de sa vie. […] Tous deux essuyèrent des disgrâces, et tous deux vécurent exilés et tranquilles, cultivant jusqu’au dernier moment les trois choses les plus douces de la vie, la vertu, l’amitié et les lettres. […] « Évoque devant moi les grands hommes ; je veux les voir et converser avec eux, disait un jeune prince plein d’imagination et d’enthousiasme, à une Pythonisse célèbre qui passait dans l’Orient pour évoquer les morts. » Un sage qui n’était pas loin de là, et qui passait sa vie dans la retraite, approcha et lui dit : « Je vais exécuter ce que tu demandes. […] Ils roulent sur la liberté, sur la servitude, sur la honte de tenir la vie d’un ennemi de la patrie, sur le déshonneur qu’il causerait à Athènes, s’il renonçait à être libre pour se faire esclave dans sa vieillesse. […] si je dois vivre, si les jours de Démosthène doivent être conservés, que mes conservateurs soient mon pays, les flottes que j’ai armées à mes dépens, les fortifications que j’ai élevées, l’or que j’ai fourni à mes concitoyens, leur liberté que j’ai défendue, leurs lois que j’ai rétablies, le génie sacré de nos législateurs, les vertus de nos ancêtres, l’amour de mes concitoyens qui m’ont couronné plus d’une fois, la Grèce entière que j’ai vengée jusqu’à mon dernier soupir ; voilà quels doivent être mes défenseurs ; et si, dans ma vieillesse, je suis condamné à traîner une vie importune aux dépens des autres, que ce soit aux dépens des prisonniers que j’ai rachetés, des pères à qui j’ai payé la dot de leurs filles, des citoyens indigents dont j’ai acquitté les dettes ; ce n’est qu’à ceux-là que Démosthène veut devoir : s’ils ne peuvent rien pour moi, je choisis la mort ; cesse donc de me séduire, etc. » J’aime ensuite à voir la pitié de dédain avec laquelle il regarde le courtisan qui le croyait sans défense, parce qu’il n’avait autour de lui ni armes, ni soldats, ni remparts, comme si le courage n’était pas la défense la plus sûre pour un grand homme.
Sa vie fut une lutte contre la médiocrité ou la misère. […] la vie ! […] prolongez sa vie ! […] et quels logis et quelle vie ! […] Et, au quatrième acte, elle se venge du tyran en lui sauvant la vie.
On doit à ses travaux la Vie des Poëtes Grecs, Ouvrage le plus complet que nous ayons sur cette matiere. […] Sans se borner toujours à la simple Biographie, il se permet souvent des réflexions judicieuses sur les Ouvrages de ceux dont il écrit la Vie. […] La Vie des Poëtes Latins, qui a suivi celle des Poëtes Grecs, a le même mérite & les mêmes défauts, à cela près que les notices sont plus étendues, parce que les matériaux ont été plus abondans.
C’est dans ses Contes de la Vie privée qu’il devait tout entier se produire. […] Il devine les mystères de la vie de province, il les invente parfois ; il méconnaît le plus souvent et viole ce que ]ce genre de vie, avec la poésie qu’elle recèle, a de discret avant tout, de pudique et de voilé. […] Au lieu de dire, par exemple : il y va de la vie, de la fortune, il ne manque pas de dire : il s’y en va de la vie. […] Heureux qui, dans sa vie laborieuse et du fond mélangé de ses œuvres, sait réaliser un peu d’or pur ! […] Je ne vous reverrai de ma vie si vous ne consentez. ” — Vaincu à la fin par ces paroles et par bien d’autres, j’acceptai, continue Latouche.
J’imagine qu’ils rendirent la vie dure à La Bruyère, et qu’en même temps ils lui firent trouver impossible de vivre ailleurs. […] La raison en est que dans ce moraliste il y a surtout un artiste, qui aime la vie et les aspects de la vie. […] Tous ces éléments subjectifs se sont mêlés à la description objective de la vie humaine que nous présente le livre de La Bruyère. […] Ressusciter le passé, montrer la vie des peuples et le progrès de la civilisation, voilà l’idée que Fénelon se fait de la tâche de l’historien : idée singulièrement originale en un temps où l’on n’avait que Mézeray et le P. […] À consulter : le chevalier de Ramsay,Histoire de la vie et des ouvrages de Fénelon, la Haye, 1723. in-12.
Et la différence ne pourra que croître à mesure que la société laïque se préoccupera moins d’une autre vie, s’installera mieux dans celle-ci et prendra plus pleinement possession de la terre. […] Une autre particularité, c’est l’imprudence et l’imprévoyance, on dirait presque l’ignorance de la vie réelle et de ses conditions, assez commune en effet chez les prêtres très saints. […] Fabre sait les faire vivre, en outre, d’une vie extérieure, leur donner une physionomie, une allure, nous les faire voir. […] Il y a chez Barnabé, cet ermite digne de Rabelais, une magnifique et formidable surabondance de vie animale. […] Il a peu connu les autres, et la vie moderne passerait presque tout entière entre ses pastorales et ses drames cléricaux.
Pour lui, un peuple religieux est un peuple qui sait quelque chose de meilleur que lui-même et de plus cher que la vie, et qui s’y soumet. […] Aussi loin qu’on remonte dans sa vie, après ses premières et courtes incertitudes entre les lettres et les sciences, on peut noter des pensées qui l’y préparent ou des études qui l’y mènent. […] Les vrais grands hommes pâtissent pour servir l’espèce humaine, et troublent leur vie pour améliorer la nôtre. […] Parmi ceux qui ont la double auréole des grands écrivains et des saints, il n’en est aucun qui soit entré dans la vie religieuse voilé et les yeux fermés au monde. […] Que n’a pas su saint Augustin des affaires de cette vie ?
Il a été toute sa vie l’homme qui conseillait à Rousseau de tourner contre les lettres la déclamation qu’il avait préparée pour leur défense. […] Une seule chose fait la consistance de cette vie si débraillée, c’est l’Encyclopédie achevée. […] Rousseau n’avait pas imité du maître le scandale de la contradiction entre sa vie et ses écrits. […] Mais combien qui, attirés d’abord par l’enchanteur, voulurent regarder de près les choses dont il parlait, en sentirent la vie, et y devinrent plus savants et plus croyants que lui ! […] Dans cette partie toute littéraire de la vie de Chateaubriand, sa langue est plus près du dix-septième siècle que du dix-huitième.
La vie future ne serait pas nécessairement une partie de plaisir. […] Que d’études d’ensemble ou de détail sur sa vie et ses œuvres ! […] Vivre sans conversation piquante, est-ce mener une vie heureuse ? […] Il maintient Dieu, au moins de nom, mais nie la vie future. […] Il jugeait trop austère et aride une vie de pur homme de pensée.
Il n’y a pas de beauté sans la vie ; et la vie, c’est le mouvement, c’est la diversité. […] Ils contribuent à l’embellissement plutôt qu’au soutien de la vie. […] Pauvre et humble, il passe sa vie dans les églises et les couvents où il travaille. […] Lui aussi il a représenté la vie humaine dans toute sa variété. […] On l’a condamné à mort, on va l’exécuter, lui ôter la vie.
Si on livre ses œuvres aux lecteurs, on ne leur livre pas sa vie. […] Nous nous trouvons transformés, notre vie est doublée ; notre âme végétait ; elle sent, elle souffre, elle aime. […] Nous sommes des esprits pratiques, et nous ne voulons pas que la littérature corrompe la vie pratique. […] N’enseignez à ces filles et à ces garçons que des faits ; on n’a besoin que de faits dans la vie. […] Mais la poésie et la vie de famille prouvent qu’ils n’y réussissent qu’à demi.
La vie est une leçon, et toute leçon doit profiter à celui à qui Dieu l’accorde. […] Le sens de ce proverbe est celui-ci : celui qui change d’opinion a tort ; celui qui reçoit les leçons de la vie et qui en profite pour rectifier ou modifier sa pensée est un grand coupable. […] De toutes les heures de la vie, chacune est chargée de nous apporter une vérité ; aucune de ces heures ne vient à nous les mains vides, et c’est peut-être la dernière heure d’une longue vie qui vous apporte la vérité la plus précieuse en récompense de votre sincérité à la rechercher et de votre patience à l’attendre. […] La vie n’est pas semblable à ces fontaines d’Auvergne, pleines de sédiments impurs, qui pétrifient ce qu’on leur jette, et qui, au lieu d’une fleur ou d’un fruit, vous rendent une pierre. La vie est un courant qui mène à la vérité, c’est-à-dire au bien.
Votre œuvre vous fait mieux connaître la vie et les hommes. […] À un moment, il raconte « la plus forte émotion de sa vie ». […] Moi, j’ai roulé beaucoup d’imbéciles dans ma vie ; mais j’ai épousé, quand elle est devenue mère, une ouvrière que j’avais séduite. […] C’est par la délicatesse d’une fille-mère qu’est bouleversée la vie de tous ces bourgeois. […] » Du coup, Lia enterre, si l’on peut dire, sa vie de jeune fille.