On cite ce mot de Mme de Tencin, qui, la voyant sur la fin fort assidue à la visiter, disait à ses habitués : « Savez-vous ce que la Geoffrin vient faire ici ? elle vient voir ce qu’elle pourra recueillir de mon inventaire. » Cet inventaire en valait la peine, puisqu’il se composait tout d’abord de Fontenelle, de Montesquieu, de Mairan. […] Les princes y venaient en simples particuliers ; les ambassadeurs n’en bougeaient dès qu’ils y avaient pied. […] Écrivant à lady Hervey après une attaque de goutte qu’il venait d’avoir, il disait : (Paris, 13 octobre 1765). […] À peine monté sur le trône de Pologne, il lui écrivit : « Maman, votre fils est roi » ; et il la pria avec instance de le venir visiter.
Mais, on le sait très bien aujourd’hui par l’accord de tous les témoignages, Marie-Antoinette n’était pas femme à s’occuper volontiers de politique ; elle n’y vint que tard dans les années de la Révolution, et quand il le fallut absolument. […] Il est fâcheux d’avoir été un roué et un fat si brillant : à moins d’être décidément un grand homme, on ne vient plus à bout d’être un homme simplement solide et estimable. […] M. de Bouillé ajoute que, le lendemain, le duc de Biron vint chez lui, et lui remit par écrit sa conversation de la veille, afin de lui prouver que c’était sincère et qu’il y pouvait compter. […] M. de Talleyrand, qui avait connu Lauzun, vint au secours de ces dames et de ces familles effrayées. […] Dumouriez dit la même chose dans ses Mémoires, à l’occasion de cette même affaire : « Biron partit de Valenciennes et vint camper à Quiévrain.
Le sujet est une religieuse qu’on a contrainte dans ses vœux, qui va être punie par l’abbesse pour avoir voulu les violer, et que vient délivrer son amant en uniforme de grenadier de la Garde nationale, avec l’officier en tête et toute la compagnie. […] Becquey vint lui proposer de s’attacher au service du roi exilé par quelque correspondance, et M. […] Fiévée insiste pour que, malgré l’influence de ces hommes et les ménagements qu’on leur doit, le gouvernement en vienne le plus tôt possible à condamner hautement les faux principes. […] S’inquiétant des générations à venir, il est des premiers à conseiller de recueillir les débris de l’ancienne Université, et d’en tirer quelque parti à l’égard de la jeunesse qui est en proie aux charlatans et qui s’élève au hasard. […] Graner ou Grauer, de Berlin, un utopiste, avait conçu le projet d’une association destinée à assurer (ni plus ni moins) la prospérité et la sûreté de tous les États de l’Europe, et il était venu à Paris pour y organiser son idée.
Appelé un peu inopinément à l’honneur de venir ici entretenir nos lecteurs d’un homme de guerre aussi éminent, je dirai par quelle succession d’impressions j’ai passé moi-même à son égard. […] Un violent amour qui le saisit durant ce séjour à Châlons, et qui avait pour objet une jeune dame de la ville, vint mêler ses orages à tous ceux qui fermentaient déjà dans son cœur. […] Ce principe, qui féconde tout et met tout en mouvement dans la nature, donne aux hommes venus sous son influence particulière un cachet que rien ne peut effacer. […] Le maréchal, voulant s’assurer par lui-même, descend dans la grande rue de Belleville : Mais à peine avais-je descendu quelques pas, je reconnus, dit Marmont, la tête d’une colonne russe qui venait d’y arriver. […] Tel il était, à pied, car son cheval venait d’être blessé sous lui (le cinquième cheval depuis l’ouverture de la campagne).
En nommant ces deux-là, j’ai nommé deux grands inoculateurs dans l’ordre moral ou philosophique ; mais Bolingbroke en exil, et venu au début du siècle, n’a agi que sur quelques-uns, tandis que Franklin, venu tard, et à une époque de fermentation générale, opéra sur un grand nombre. […] Les conversations où j’entrais en étaient plus agréables ; la manière modeste dans laquelle je proposais mes opinions leur procurait un plus facile accueil et moins de contradiction ; j’avais moins de mortification moi-même quand je me trouvais dans mon tort, et je venais plus à bout de faire revenir les autres de leurs erreurs et de les faire tomber d’accord avec moi quand je me trouvais avoir raison. […] Il nous dit son secret ; l’artifice est simple et innocent, il vient primitivement de Socrate ; gardons-nous de le confondre, dans aucun cas, avec le mensonge d’Ulysse. […] Maltraité par son frère, qui était violent et qui en venait quelquefois aux coups, en l’un de ces jours de querelle il résolut de le quitter, et il s’autorisa pour cela du certificat d’acquittement, sachant bien qu’on n’oserait produire contre lui le second engagement secret. […] Rien donc ne vint à la traverse de ses premiers projets d’amélioration si bien calculés pour l’état social et moral de ses compatriotes.
Le premier venu, grossièrement utile, mais utile, a le droit de demander en voyant ce génie bon à rien : Qu’est-ce que ce fainéant ? […] et le moment est-il venu pour l’art de désarmer ? […] Viens me souffler dans les ailes, ouragan ! […] C’est dans le sens de cette haine du mal que Jésus disait : Je suis venu apporter la guerre. […] Il vient pour une double fonction, une fonction individuelle et une fonction publique, et c’est à cause de cela qu’il lui faut, pour ainsi dire, deux âmes.
Mais avant de le faire, et de venir ainsi à ce qui est votre objet, je dirai un mot de votre méthode — méthode dont je comprends qu’elle déroute un certain nombre de savants. […] Mais en sortant de table, une très jeune fille, qui avait bien écouté, vint me dire : « Il me semble que le docteur raisonnait mal tout à l’heure. […] Après la chimie vint la biologie, qui, sans doute, n’a pas encore la forme mathématique et n’est pas près de l’avoir, mais qui n’en voudrait pas moins, par l’intermédiaire de la physiologie, ramener les lois de la vie à celles de la chimie et de la physique, c’est-à-dire, indirectement, de la mécanique. […] Si le cadre est là, le souvenir viendra, de lui-même, s’y insérer. […] Ils seraient venus raconter ce qu’ils avaient vu.
À peine la langue italienne, sortant toute vive des ruines de l’idiome romain, fut-elle balbutiée par des chanteurs vulgaires, que toutes les affectations de la pensée, toutes les fadeurs de la fausse passion, vinrent gâter l’art des vers : il semblait que la scolastique pesât même sur l’amour. […] Voici venir ce génie, cependant ; et, sans avoir secoué tout à fait la poussière du temps, il réunira bien des vertus poétiques : il aura l’accent du drame et de la satire, comme celui de la poésie lyrique et de l’enthousiasme. […] Quelle mélodieuse douceur, quelle tendresse et quelle innocence dans ce premier chant prêté sans doute à Béatrix enfant : « Je suis jeune fille, belle et toute nouvelle ; et je suis descendue, pour me montrer à vous, des splendeurs du lieu d’où je viens. […] Ici viennent à nous encore, comme des précurseurs du Dante, ou du moins comme des initiateurs de la langue qu’allait parler son génie, ces poëtes franciscains dont un rare talent de nos jours, un éloquent érudit, a retrouvé d’heureux échos. […] Il n’y avait pas de maison sans famille, et Sardanapale n’en était pas venu à montrer ce qui peut s’oser dans une chambre.
Or voilà qu’une disgrâce désagréable vient la saisir au front ; son visage se couvre de rougeurs ; des dartres (puisqu’il faut les appeler par leur nom) viennent l’éprouver : Dieu vous a donné, lui disait Fénelon, une rude croix par le mal que vous souffrez. […] Qu’il y ait eu dans la doctrine des derniers stoïciens, d’Épictète même et de Marc-Aurèle, un commencement de cette manière de concevoir l’affranchissement de l’esprit, je ne le nierai pas ; mais une telle pensée n’a eu son éclaircissement entier et son accomplissement que dans le christianisme et dans l’idée de Dieu qu’il est venu révéler au monde. […] On le lui passe comme à quelqu’un qui tient d’Amyot, qui est venu avant Bossuet et qui s’est formé avant Malherbe. […] Elle lui vient pourtant, discrète, courante, familière, et quelquefois trop familière : « Vous pouvez faire de moi, écrit-il au duc de Chaulnes, comme d’un mouchoir qu’on prend, qu’on laisse, qu’on chiffonne : je ne veux que votre cœur, et je ne veux le trouver qu’en Dieu. » J’aime mieux qu’il dise à Mme de Grammont : « Vous êtes une bonne montre, mais dont la corde est courte et qu’il faut remonter souvent. […] Il y a une foule de petits soucis voltigeants qui viennent chaque matin à votre réveil, et qui ne vous quittent plus jusqu’au soir ; ils se relayent pour vous agiter.
Félix Vicq d’Azyr, né en avril 1748 à Valognes en Normandie, d’un père médecin, commença ses études dans sa ville natale et vint les achever à Caen, où il fut condisciple en philosophie de Laplace, le grand géomètre. […] Adam ne sait pas combien nous nous sommes donné de peine, M. de Laplace et moi, pour oublier ce qu’il nous a appris. » Après une certaine hésitation entre la carrière ecclésiastique et celle de la médecine, Vicq d’Azyr choisit cette dernière, et vint dès 1765 à Paris s’y dévouer avec ardeur. […] En publiant en 1776 son Exposé des moyens curatifs et préservatifs à employer dans les épizooties, Vicq d’Azyr avertissait les observateurs dont on sollicitait le zèle, de vouloir bien communiquer leurs travaux à la Société et correspondance royale de médecine, qui venait d’être établie par le roi : « Cette société, était-il dit, présidée par M. de Lassone, s’assemble tous les mardis de chaque semaine, et on lui fait parvenir des mémoires en les adressant à M. […] Tant que la Société de médecine fut peu considérable, et qu’elle ne consista qu’en une commission de huit médecins, établie pour correspondre avec les médecins des provinces sur tout ce qui avait rapport aux maladies épidémiques et épizootiques (arrêt du Conseil du 29 avril 1776), on la laissa faire ; mais dès qu’on s’aperçut qu’elle prenait de l’extension, et que cette société, créée originairement pour s’occuper des bêtes, en venait à se mêler non moins activement de ce qui tient à la santé des hommes, la faculté de médecine de Paris prit l’alarme, et fit ce que feront toujours les vieilles corporations en face des institutions nouvelles. […] La Faculté au désespoir en vint à suspendre ses fonctions pendant trois mois.
Le père de Sylvain Bailly était à la fois peintre et auteur dramatique, homme d’esprit et de plaisir, qui faisait des parodies, de petits opéras-comiques et toutes sortes de bluettes pour la scène italienne ; je ne sais si le nom de baptême de Sylvain, qui fut donné à son fils, ne vient pas d’une de ces réminiscences pastorales. […] Celui qui venait de développer dans une belle et lumineuse narration la marche et les progrès de la plus parfaite des sciences, cette série et cette gradation ascendante des grands hommes, Hipparque, Copernic, Galilée, Kepler et Newton, celui-là même s’amuse à noter le ton qui différencie les poésies fugitives des divers siècles ; comme quoi Chapelle, plus débauché que délicat, a peint un siècle où les mœurs n’étaient pas déguisées, et où le langage gardait de la grossièreté dans la franchise ; comment Chaulieu, venu après, appartenait à une époque plus polie, où l’on était déjà aimable, où l’on était encore passionné ; comment Gresset, enfin, n’a plus retrouvé ces sources du génie de Chaulieu : Il est venu, dit Bailly, lorsque la galanterie penchait vers son déclin. […] Bailly a, ce me semble, une idée peu juste, en vertu de laquelle il juge très défavorablement de ces peuples anciens et les déclare incapables des inventions scientifiques, qu’il estime peut-être supérieures elles-mêmes à ce qu’elles étaient en effet : quand il voit chez eux des fables accréditées et prises au pied de la lettre, il croit que tout cela a dû commencer par être une poésie allégorique, et que ce n’est que par une sorte de corruption et de décadence qu’on en est venu à prêter graduellement à ces fables une consistance qu’elles n’avaient pas d’abord dans l’esprit des inventeurs : en un mot, il croit à une sorte d’analyse antérieure à une réflexion philosophique préexistante à l’enfance et à l’adolescence humaines si aisément riches de sensations et toutes fécondes en imagesj. […] En même temps qu’il admet que le souvenir du Déluge se montre partout comme un fait historique conservé par la tradition et dont l’idée funeste ne serait point venue naturellement à l’homme, il reconnaît que le souvenir de l’âge d’or peut être le produit d’une imagination heureuse et complaisante qui jette des reflets sur le passé, et pourtant il répugne à y voir une pure fiction : « J’y vois les embellissements de l’imagination, dit-il, mais j’y crois découvrir un fond réel. […] M. de Mairan, ainsi défini, ressemble parfaitement à ce que Bailly aurait voulu être, à ce qu’il aurait peut-être été dans le souvenir des hommes, si les événements de la politique n’étaient venus le tirer brusquement de sa maison de Chaillot où il vivait en sage, et de sa fenêtre du Louvre où était aussi son observatoire, pour le porter au fauteuil de notre première assemblée publique, et l’installer bientôt en permanence au balcon populaire.
C’est à Fénelon qu’il en faut venir pour posséder l’esprit familier et adouci d’Homère, tout ce qui pouvait alors se naturaliser de lui en France et y être à l’usage de chacun dans une prose suave et persuasive. […] Au lieu de venir à l’une de ces grandes époques où le monde se rassoit, Ronsard tombait dans un temps où tout bouillonne, et où, pour ainsi dire, on entre dans la chaudière. […] Enfin, il manquait surtout un Virgile, c’est-à-dire ce génie à la fois imitateur, inventif et composite, qui, venu à l’heure de la maturité d’une langue et de la domination universelle d’un peuple, fond et combine toutes choses, souvenirs, traditions et espérances, avec un art intérieur accompli, dans un sentiment présent et élevé. […] Voici de beaux vers, non pas tout à fait dans ce ton, mais d’un haut accent, que je viens d’avoir le plaisir de retrouver en refeuilletant une de ces épîtres peu avenantes au premier coup d’œil. […] Chapelain est un esprit judicieux, réglé, de tout temps un peu lourd, venu à la suite, et digne finalement par ses vers de toute la risée de Boileau et de tout notre oubli.
Les jugements littéraires qui viennent parfois se mêler à ces détails d’existence provinciale sont justes, mais assez en gros. […] Il disait encore, et du ton de la sincérité, au terme de sa carrière : « Je ne cherche point la gloire ; je ne l’ai jamais cherchée, et, depuis qu’elle est venue me trouver, elle me plaît moins qu’elle ne m’incommode. […] Avis aux grands écrivains quand il en viendra ! […] Je vous supplie donc à genoux, ma divine amie, de venir en effet illuminer de vos rayons célestes de gloire et de vertu cette voûte antique où je réside et rêve huit heures chaque jour. […] Vous n’irez point à Spa, et vous ne viendrez point à Paris avant mon retour.
Il avait été, dès sa jeunesse, professeur de l’Université, sans avoir été élève et enfant de l’Université ; né et venu d’ailleurs, il n’avait pas de prédilection exclusive. […] Le propre des doctrinaires est d’estimer assez peu le commun du monde et la moyenne des esprits ; leur inhabileté dans la pratique est de le laisser voir : leur inconséquence (je parle des doctrinaires de seconde venue, non pas de M. […] » ; et enfin ce mot qu’on a fort relevé : « Je ne connais guère l’embarras, et je ne crains pas la responsabilité. » C’est le signe d’une disposition chez lui fondamentale ; c’est le geste de son esprit, de son caractère qui se trahit et qui tranche, qui repousse et chasse, pour ainsi dire, les difficultés et leur interdit de reparaître. — Une remarque matérielle et qui n’est pas vaine vient à l’appui, le caractère de son écriture : pas une hésitation, pas une fatigue ; jamais un jambage qui bronche. […] Le vernis est venu à sa pâte (si pâte il y a) à force de chaleur. […] Ce talent, ce goût des portraits, est même tellement venu à M.
Première et deuxième édition9 Je croyais en être quitte pour quelque temps avec M. de Pontmartin ; j’avais écrit sur lui et sur ses ouvrages, il y a peu de mois, un article développé, presque une étude ; elle était sérieuse, sévère dans sa sincérité, et l’éloge n’y venait qu’après le blâme. […] Lentement donc, et après tous les autres, je viens pourtant en parler ; je ne crains pas toujours de parler des livres du moment, qui font du bruit. […] Il vient d’avoir sa chute morale ; c’est ce que je constate. […] N’exagérons rien ; mais sérieusement M. de Pontmartin aurait lieu de dire comme certain ministre après sa conduite dans la Coalition : « Ma situation est changée. » Et en effet, de quel droit viendra-t-il parler dorénavant religion, morale, famille, quand il a violé, de dessein prémédité, les plus simples bienséances et les lois du savoir-vivre ? […] Certes, quand on s’est avancé ainsi envers un confrère, on n’a plus ensuite le droit de venir récriminer contre lui avec injure et acrimonie, ou bien on s’expose à s’entendre dire, tout gentilhomme qu’on est, qu’on est atteint et convaincu de trissotinisme.
Mme du Deffand, ayant perdu son plus ancien ami, le président Hénault, venait le jour même souper en grande compagnie : « Hélas ! […] Toute dame ou chevalier qui découvre et vient annoncer « trois actions vertueuses bien constatées », reçoit une médaille d’or. […] Des applaudissements éclatent au théâtre lorsqu’un vers fait allusion à la vertu des princes, et, un instant après, quand une tirade exalte les mérites du peuple, les princes prennent leur revanche de politesse en applaudissant à leur tour315 De toutes parts, au moment où ce monde finit, une complaisance mutuelle, une douceur affectueuse vient, comme un souffle tiède et moite d’automne, fondre ce qu’il y avait encore de dureté dans sa sécheresse, et envelopper dans un parfum de roses mourantes les élégances de ses derniers instants. […] Ils finissent par s’imaginer que le mieux est de laisser l’écroulement s’achever, que l’édifice se reconstruira pour eux de lui-même, qu’ils vont rentrer dans leur salon rebâti exprès et redoré à neuf, pour y recommencer l’aimable causerie qu’un accident, un tumulte de rue vient d’interrompre319. […] Il ne leur vient pas à l’idée d’y avoir recours ; ils ne savent ni ne veulent se servir de leurs mains, surtout pour cette besogne323.
Les spéculations des Pères grecs sur l’essence divine viennent d’un tout autre esprit. […] Comme presque tous les termes messianiques, il venait du Livre de Daniel. […] Quelques-unes de ces maximes venaient des livres de l’Ancien Testament. […] Jamais prêtre païen n’avait dit au fidèle : « Si, en apportant ton offrande à l’autel, tu te souviens que ton frère a quelque chose contre toi, laisse-là ton offrande devant l’autel, et va premièrement te réconcilier avec ton frère ; après cela viens et fais ton offrande 258. » Seuls dans l’antiquité, les prophètes juifs, Isaïe surtout, dans leur antipathie contre le sacerdoce, avaient entrevu la vraie nature du culte que l’homme doit à Dieu. « Que m’importe la multitude de vos victimes ? […] , 85, 88, 100) vient du désir de voir réalisé en lui un trait prétendu messianique (Is.., LIII, 2).
Comme conséquence du procédé que l’on vient d’exposer, ce fait encore s’était produit sur lequel il convient d’attirer spécialement l’attention ; le cas pathologique, aperçu le premier avait été défini tout d’abord par l’énoncé du pouvoir normal qui s’y manifeste. […] Mais par-delà la restriction apportée par la nouvelle formule, l’esprit continua de percevoir comme élément principal du Bovarysme ce pouvoir de se concevoir autre sur lequel le Bovarysme des personnages de Flaubert avait attiré l’attention ; le Bovarysme devint ce pouvoir même, si bien que l’on en est venu à conserver ici pour désigner la faculté d’évolution elle-même ce terme de Bovarysme qui fut employé d’abord pour désigner une défaillance de cette faculté. […] Cette coutume morale différente viendrait ici comme une branchie de poisson mise à la place d’un poumon de mammifère, elle ne correspondrait à aucune des nécessités de l’organisme auquel on voudrait l’appliquer, et par ce défaut de coïncidence, y causerait un désordre mortel. […] Si l’apparition d’une conception bovaryque comporte en un groupe ancien les conséquences désastreuses que l’on vient d’énoncer, il en est tout autrement — et c’est ce qu’on se propose en ce chapitre de mettre en lumière— pour un groupe de formation récente. […] Elles se concevaient ainsi autres qu’elles n’étaient, mais cette conception, au lieu de les ruiner, les servait, parce qu’elle ne venait en concurrence avec aucune institution contraire, durcie et sanctionnée par la durée.
Et paraissent Gautier, plus pur et mesuré formiste encore — sans pensée du reste ; et Baudelaire, maître puissant et sobre, dont le mot correct par la place voulue qu’il occupe s’entoure dès maintenant d’atmosphère musicale et lumineuse — et dont la pensée est comme un ferment invincible de doute détruisant la splendeur sans souci d’antan ; mais qui égoïstement disant ses angoisses, ne dit aucun vocable salutaire qui les épargnera à ceux qui viennent. […] Puis viennent, et nous n’en parlerons pas, les poètes qui sont un peu tous les autres, affadis, stérilisés : ou enfermés en la rigide manière parnassienne, ou, pour ce qu’ils crurent que la variété du Rythme consistait en plus ou moins de coupures très au hasard de l’alexandrin, fluents en soi-disant vers de deux à vingt et quelques pieds : disant de tout et rien, et se voulant tous Symbolistes. […] « Quant à la preuve à faire, par un poète, du moderne savoir assez disant partiellement pour une unanime vérité, une œuvre immense et simple est à venir : qui serait en une adéquate parole la philosophie de la matière en mouvement évolutive et transformiste. » Traité du Verbe. […] L’idée en son évolution règle seule la venue et la durée des intervalles entre telles suites de vers — de même qu’elle amène selon la nécessité de pensée et de son les rimes dont n’est plus asservie aucunement l’occurrence. […] Mais la vie intellectuelle, il me semble, s’activera demain, et les années plus vite se rempliront, et ce n’est pas en vain que mon rêve prend forme en la science… Et qu’importe : j’ai le temps, et mon temps viendra.
À la tête des nouvelles de Babou se trouve une préface dont la verve, l’entrain, le mouvement, rappellent Diderot (le rappellent trop peut-être), mais qui justifient ce que nous venons d’exprimer. […] Ce n’est pas tout que des aperçus inattendus qui viennent tout à coup casser les glaces dans lesquelles chacun vient bêtement mirer son absence de pensée, comme, par exemple, cette théorie de la volonté spirituelle opposée par Babou à cette idée déjà commune, déjà décrépite, de l’influence fataliste des tempéraments. […] Je le lui fais au nom de son talent, qu’il a cessé d’avoir dans cette lettre, de son esprit, toujours si fidèle, qu’il a appelé et qui n’est pas venu ! […] C’est un écrivain d’imagination pénétrante et inventive qui vient d’écrire ces Lettres, satiriques parce qu’il y a plus, dans la satire, du genre d’imagination qui invente que de celui qui simplement réverbère. […] Mais il s’est maladroitement marché d’une lourde patte sur cette griffe, qui ne le souffrirait pas si cette insolence-là venait d’une autre patte que de la sienne.