Il les a bien ramassés, il les a bien ouverts tout grands, ces fruits cruels, ces fruits funestes, pour qu’on vît mieux l’immonde poussière qui emplit la bouche qui y mord… C’est là le mérite de ce livre d’une immoralité inconsciente, ou Dieu elle devoir n’apparaissent une seule fois dans la pensée de personne, et qui, par là, n’est plus qu’un daguerréotype, l’exact daguerréotype, peut-être, de la triste société de l’auteur, Maîtrisé par son sujet beaucoup plus qu’il ne le maîtrise, l’auteur de Fanny a de la force et beaucoup de talent quand il est dans son sujet, mais il n’en a point quand il faudrait être au-dessus. […] La fortune des livres est un destin à la fois souvent drôle et triste, qui divertit et qui mystifie. […] Son triste roman d’aujourd’hui, moins inventé et moins intrigué que les romans les plus tombés, que Caroline de Lichtefield, par exemple, devait avoir, pour être quelque chose, ou de la passion, ou des caractères, ou un grand langage, et tout cela lui a triplement manqué !
C’est bien triste ! […] Triste ? Ce n’est peut-être pas triste du tout. […] Il est du même âge que moi, sur le triste seuil de la vieillesse. […] Pourquoi ces yeux tristes et ce front plissé ?
Je suis triste et enragée. […] Grand-papa malade, lui-même, comme vous savez, a pleuré toute la journée et continue jusqu’à présent à être très triste. […] Il n’y aura ni amusements, ni moyen de rien faire, si l’on est malade et triste. […] Moi, je suis quelquefois triste, découragée ou enragée, mais m’ennuyer… jamais ! […] N’est-ce pas une manœuvre pour discréditer X… en l’inféodant malgré lui au parti Z… Triste, triste.
— Vous ne vous trompez pas, mon père, lui dis-je, je suis triste, et cependant il ne m’est rien arrivé de mal ; mais je viens vous confier mes peines habituelles, vous les connaissez : mon cœur n’a jamais eu de replis pour vous ; vous savez ce que j’ai fait pour me tirer de la foule et pour acquérir un nom, mais je ne sais pourquoi, dans le moment même où je croyais m’élever peu à peu, je me sens retomber tout à coup ; la source de mon esprit est tarie ; après avoir tout appris, je vois que je ne sais rien ; abandonnerai-je l’étude des lettres, entrerai-je dans une autre carrière ? […] « Elle était assise, dit-il, au milieu des dames, comme une belle rose dans un jardin entourée de fleurs plus petites et moins éclatantes qu’elle : rien de plus modeste que sa contenance ; elle avait quitté toutes ses parures, ses perles, ses guirlandes, les couleurs gaies de ses vêtements ; bien qu’elle ne fût pas triste, je ne reconnus pas son enjouement habituel ; elle était sérieuse et semblait rêver ; je ne l’entendis pas chanter, ni même causer avec ce charme qui enlevait les cœurs ; elle avait l’air d’une personne qui redoute un malheur qu’on ne discerne pas encore. […] « J’entendis une voix triste qui me dit tout bas (c’était elle) : Ce misérable compte les jours loin de moi, il ne vit pas ; il n’est jamais d’accord avec lui-même ; il court le monde, mais il a beau faire, il m’aimera toujours partout où il sera. […] « Combien ne suis-je pas enivré de reconnaissance de ce que tu daignes rasséréner mes tristes jours par ta céleste apparition !
Je ne puis pas vendre, voilà la triste vérité ; et, si vous ne m’en croyez pas, essayez de me faire une offre, et accusez-moi en pleine opinion publique si je la refuse ! […] Je ne désespère pas de moi-même : la patience active use la plus mauvaise fortune et les plus tristes jours ont des lendemains. […] Littérature morale et politique de la Chine I C’est une chose triste à dire, mais vraie en histoire : à une très grande distance de temps les peuples disparaissent, et il ne reste d’eux que leurs grands hommes : effet de perspective qui diminue les médiocrités et qui grandit les supériorités au regard de l’avenir. […] Je dois venger le Tien et mes peuples ; mais il n’en est pas moins triste d’être exposé au danger de faire couler une goutte de sang qu’on eût pu épargner.
Je ne vous détaille point cette conversation ; il faudrait un volume, et le livre serait trop triste. […] Le rêve eut un triste réveil. […] « Il y a une expression de votre lettre, répond M. de Maistre au chevalier Rossi, qui m’inspire à moi les réflexions les plus profondes et les plus tristes. […] Entrez dans cette triste analyse, examinez de tous les côtés où il est possible de blesser et de punir un homme ; vous verrez que tout est fait déjà, et qu’il n’y a plus moyen de tuer un cadavre et de frapper sur rien… Vous saisissez votre plume massive, et vous m’écrivez comme à un jeune homme qui débuterait dans le monde et qui chercherait une réputation, je pourrais même ajouter : comme à une espèce de mauvais sujet.
Mon plaisir le plus vif, c’était la musique des bouffes au théâtre nouveau ; mais toujours cette mélodie, si délicate qu’elle fût, me laissait dans l’âme un long et triste murmure de mélancolie ; et alors s’éveillaient en moi, par milliers, les idées les plus sombres et les plus funestes. […] entré dans la triste saison des désenchantements, de plus en plus je m’enflamme pour elle, à mesure que le temps va détruisant en elle ce qui n’est pas elle, ces frêles avantages d’une beauté qui devait mourir. […] Neuf de ces hommes, vêtus de redingotes et portant des flambeaux, éclairaient ce triste cortège. […] Sir Horace Mann, envoyé d’Angleterre en Toscane, lui rendait ce triste témoignage : il maltraitait sa femme de toutes les manières.
Mardi 20 janvier Triste journée que cette première journée, où commence le vasselage de la France. […] C’est à la fois triste et un peu fantastique, comme une débandade, une déroute dans un diorama, à l’heure crépusculaire. […] Soudain du milieu d’elles, un chant s’est élevé, un chant triste, comme une mélancolie de montagne. […] J’étais devenu un jeunet sérieux, très peu remuant, presque triste, et qui, couchant dans la bibliothèque, passait ses nuits à lire les éditions stéréotypées avec les bons yeux de l’enfance, passait ses journées à rêvasser.
Il est sur le point de renoncer au monde sérieusement et pour jamais, à ce qu’il croit ; il se faisait arranger alors cette retraite près des Incurables dont Saint-Simon nous a parlé ; il ne la voulait d’abord que triste, monotone et sans autre douceur que celle de pleurer. Ce renoncement suprême en vue de Marianne ne lui paraissait pas même mériter le nom de sacrifice : « Je ne sens que de la joie, disait-il, en songeant que je vais, en attendant la mort, mener une vie plus triste qu’elle, et j’aime si fort ma douleur qu’il me semble que c’est encore un moindre malheur de la souffrir que de la perdre ; si ma chère Marianne la peut voir, elle lui fait plaisir. » Il haïssait les biens, les grandeurs, tout ce qu’il ne pouvait plus partager ; il n’aimait que cette douleur, la seule chose qui lui restât de son amie ; il en parlait, d’ailleurs, comme d’une peine poignante, qui le tenait cruellement éveillé durant les nuits et qui prolongeait ses insomnies jusqu’au matin, où il ne s’assoupissait qu’à la fin et par excès de fatigue : « Mais j’ai beau faire, je ne saurais perdre de vue l’objet de mon tourment.
Voyageant en Suisse dans le canton de Zurich, il avait remarqué que, dans la plupart des maisons, une piété domestique patriarcale tenait à conserver les images des pères, les portraits de ceux que la famille avait perdus et qui étaient représentés sur leur lit de mort, les yeux fermés, tels qu’ils étaient lorsqu’on les avait vus pour la dernière fois après le dernier soupir : Ces tristes images, ajoutait-il, qui paraîtraient si hideuses à un Français qui ménage son cœur comme un enfant gâté, et qui fuit avec soin tout ce qui pourrait l’émouvoir fortement, sont ici un objet consolant pour des hommes qui savent aimer et ne craignent rien de l’amour, pas même ses peines. […] Quel spectacle, une fois que les tempêtes de l’automne se seraient emparées de ces lieux comme de leur domaine ; que l’izard léger et la triste corneille, seuls habitants de leurs déserts, en auraient fui les hauteurs ; qu’une neige fine et volage, entraînée de pentes en pentes, et volant de rochers en rochers, aurait englouti sous ses flots capricieux leur stérile étendue… Et avec un enthousiasme mêlé de joie il suit le tableau dans sa succession, jusqu’au retour du prochain printemps et jusqu’à la fonte des neiges.
Rohan, qui y admire l’arsenal et qui en dénombre l’artillerie (370 pièces de fonte), ajoute : « Ils n’ont point de canon de batterie : leur raison tient fort du roturier ; car, à ce qu’ils disent, ils ne veulent attaquer personne, mais seulement se défendre. » Venise le saisit vivement par son originalité d’aspect, son arsenal, sa belle police, ses palais, ses tableaux même et ses bizarres magnificences : Pour le faire court, dit-il, si je voulais remarquer tout ce qui en est digne, je craindrais que le papier me manquât : contente-toi donc, ma mémoire, de te ressouvenir qu’ayant vu Venise, tu as vu un des cabinets de merveilles du monde, duquel je suis parti aussi ravi et content tout ensemble de l’avoir vue, que triste d’y avoir demeuré si peu, méritant non trois ou quatre semaines, mais un siècle, pour la considérer à l’égal de ce qu’elle mérite. […] Il aime tout de la Hollande, même ce qu’elle a d’un peu triste, même ses difficultés et cette longue guerre qu’elle achève de soutenir contre la puissante Espagne pour son établissement et son indépendance.
Pour moi, il ne me reste, dans cette triste situation, qu’à prendre les partis les plus désespérés. […] Il contribue bientôt après au gain de Rosbach (5 novembre), et dans cette journée de triste renom, blessé lui-même, il a pour les vaincus et pour les blessés ennemis de ces attentions et de ces égards délicats qui lui seront comptés avec usure par une nation qui n’est jamais plus reconnaissante que quand elle a à s’acquitter envers de généreux adversaires.
Ce sont là, mon adorable sœur, de tristes réflexions ; mais elles conviennent à mon état présent. […] Femme sans préjugés, sans vice et sans erreur, Quand la mort t’enleva de ces tristes contrées.
Je prendrai, par exemple, la plus célèbre de ses phrases s’il fallait en choisir une, celle dans laquelle on a résumé sa vie : « J’ai toujours été la même, vive et triste ; j’ai aimé Dieu, mon père et la liberté. » C’est ému, cela fait rêver, mais c’est elliptique. […] Elle a été toujours la même, vive et triste ; mais elle a été bien d’autres choses encore, et il y faut suppléer ; elle ne le dit pas.
Le Créateur a fait là un triste couple ; tu es trop tendre, et lui trop dur. […] » Alors tous deux comparaissent, non pas tout à fait droits et debout, mais, à cause de la honte de leur péché, tant soit peu courbés et fort tristes.
Aussi le chancelier d’Aguesseau s’est-il contenté, dans sa manière mesurée et polie, d’imputer à Foucault, sans aucun détail, le triste honneur d’avoir appliqué le premier en grand la méthode militaire des conversions : « Je ne nommerai point, nous dit cet honnête homme timide, l’intendant qui, par une distinction peu honorable pour lui, fut chargé de faire le premier essai d’une méthode si nouvelle pour la conversion des hérétiques. […] Rulhière, d’après d’Aguesseau, n’en doute pas ; ce sage Rulhière, excellent historien de la Révocation, judicieux appréciateur de Louis XIV, dont il a tracé le plus ressemblant portrait à cette triste date, accorde à Foucault le rang et l’initiative d’application qui lui appartiennent.
Mais ce qui était plus triste, s’il est possible, c’était le spectacle que donnait dans le même temps et dans la sphère politique la Chambre, produit de l’élection, et qui était si bien royaliste que Louis XVIII, dans un premier moment de satisfaction trop tôt déçue, l’avait nommée la Chambre introuvable : ce terme d’éloge ne larda pas à se tourner en amère ironie. […] On voyait en première ligne, en tête de ces partisans des rigueurs salutaires, un Bonald, à l’air respectable et doux, métaphysicien inflexible et qui prenait volontiers son point d’appui, non pas dans l’ancienne monarchie trop voisine encore à son gré, mais par-delà jusque dans la politique sacrée et dans la législation de Moïse : oracle du parti, tout ce qu’il proférait était chose sacro-sainte, et quiconque l’avait une fois contredit était rejeté à l’instant, répudié à jamais par les purs ; — un La Bourdonnaie, l’homme d’action et d’exécution, caractère absolu, dominateur, un peu le rival de Bonald en influence, mais non moins dur, et qui avec du talent, un tour d’indépendance, avec le goût et jusqu’à un certain point la pratique des principes parlementaires, a eu le malheur d’attacher à son nom l’inséparable souvenir de mesures acerbes et de classifications cruelles ; — un Salaberry, non moins ardent, et plus encore, s’il se pouvait ; pamphlétaire de plume comme de parole, d’un blanc écarlate ; — un Duplessis-Grenedan, celui même qui se faisait le champion de la potence et de la pendaison, atroce de langage dans ses motions de député, équitable ailleurs, par une de ces contradictions qui ne sont pas rares, et même assez éclairé, dit-on, comme magistrat sur son siège de justice ; — M. de Bouville, qui eut cela de particulier, entre tous, de se montrer le plus inconsolable de l’évasion de M. de Lavalette ; qui alla de sa personne en vérifier toutes les circonstances sur les lieux mêmes, et qui, au retour, dans sa fièvre de soupçon, cherchait de l’œil des complices en face de lui jusque sur le banc des ministres ; — et pour changer de gamme, tout à côté des précédents, cet onctueux et larmoyant Marcellus, toujours en deuil du trône et de l’autel, d’un ridicule ineffable, dont quelque chose a rejailli jusqu’à la fin sur son estimable fils ; — et un Piet, avocat pitoyable, qui, proposant anodinement la peine de mort pour remplacer celle de la déportation, disait, dans sa naïveté, qu’entre les deux la différence, après tout, se réduisait à bien peu de chose ; ce qui mettait l’Assemblée en belle humeur et n’empêchait pas le triste sire de devenir bientôt, par son salon commode, le centre et l’hôte avoué de tous les bien pensants ; — et un Laborie que j’ai bien connu, toujours en quête, en chuchotage, en petits billets illisibles, courtier de tout le monde, trottant de Talleyrand ou de Beugnot à Daunou, mêlé et tripotant dans les journaux, pas méchant, serviable même, mais trop l’agent d’un parti pour ne pas être inquiétant et parfois nuisible.
C’est Ménédème qui parle : Lorsque l’on m’eut appris l’effet de ma rigueur, Je retournai chez moi, triste, comme on peut croire. […] Déméa est triste ; il est irrité, mais il triomphe ; car la conduite différente des deux jeunes gens semble tout à fait lui donner raison.
Lorsque Marie Leckzinska arriva en France, l’ancien évêque Fleury, qui eut une si triste influence sur son élève et qui, à l’inverse des bons précepteurs, ne travailla qu’à se rendre toujours nécessaire et indispensable, n’était pas encore cardinal ; mais il s’acheminait tout doucement à l’être, ainsi que premier ministre de fait. […] Ici commence une triste période pour la pauvre reine : elle put s’y faire, s’y accoutumer par la suite ; tant qu’elle le put, elle ignora : il est impossible que, quand elle sut tout à n’en pas douter, elle n’en ait pas cruellement souffert.
Sir Henry Bulwer, homme d’État et étranger, moins choqué que nous de certains côtés qui ont laissé de tristes empreintes dans nos souvenirs et dans notre histoire, a jugé utile et intéressant, après étude, de dégager tout ce qu’il y avait de lumières et de bon esprit politique dans le personnage qui est resté plus généralement célèbre par ses bons mots et par ses roueries ; « L’idée que j’avais, dit-il, c’était de montrer le côté sérieux et sensé du caractère de cet homme du XVIIIe siècle, sans faire du tort à son esprit ou trop louer son honnêteté. » Il a complètement réussi à ce qu’il voulait, et son Essai, à cet égard, bien que manquant un peu de précision et ne fouillant pas assez les coins obscurs, est un service historique : il y aura profit pour tous les esprits réfléchis à le lire. […] Son bon sens, s’il eût été écouté alors, aurait sans doute été d’un grand contrepoids dans la balance des destinées, Un grave problème, et des plus tristes, qui, bon gré mal gré, se dresse devant nous un peu avant cette époque dans la vie de M. de Talleyrand, c’est la part qu’il aurait prise, non pas seulement une part de transmission et d’information ministérielle, mais un rôle d’instigation et d’initiative, à l’arrestation et à l’enlèvement du duc d’Enghien.