Le livre Infaillibilité, ce livre le plus métaphysique, le plus théologique, le plus profondément pensé de tous ses livres, n’a pas donné grande envie aux superficiels Éoles de la publicité, qui font le bruit et le tiennent enfermé dans les cornets de papier de leurs articles, de déchaîner le vent de la parole en l’honneur d’un livre qu’ils ne comprenaient pas. […] Dans l’impossibilité où je suis de citer tout ce qui me frappe au milieu de ce fouillis de richesses, j’indiquerai au moins le chapitre où l’auteur montre, avec une audacieuse justesse, que sans l’Église le Christianisme aurait fait le mal et l’erreur du monde et qu’il ne serait plus que l’épouvante de l’Histoire ; et celui-là encore qu’il intitule : « Coexistence des pouvoirs d’ordre, de juridiction et d’infaillibilité », dans lequel il prouve d’une manière si piquante que Jésus-Christ, étant et restant dans sa forme humaine sur la terre, n’en serait pas moins tenu d’instituer son Église telle qu’il l’a instituée et telle qu’elle est à cette heure. […] Pour mon compte, je crois ravoir souvent dit, je ne tiens pas en grand respect la métaphysique, ayant travaillé assez de temps dans ce moulin vide pour m’apercevoir qu’il n’y avait jamais de grain à moudre sous cette roue qui allait toujours ! […] Il tient intégralement là-dedans.
Ce désaccord, qui tenait à la rapidité des temps et à l’empressement honorable des premières générations, a graduellement cessé ; depuis une douzaine d’années surtout, l’Université ne se lasse pas de former dans ses écoles, d’exercer dans ses concours, une jeune et forte milice qui soutiendrait le choc dans les luttes philologiques contre nos rivaux d’outre-Rhin, et qui n’a pas à rougir non plus devant les souvenirs domestiques, devant les traditions exhumées de la vieille Université d’avant Rollin. […] Mais, dans l’état actuel de nos connaissances, est-il bien permis encore de nommer de la sorte Homère comme un seul poëte, comme une personne, et n’est-on pas tenu d’ajouter immédiatement qu’on ne le nomme ainsi que par forme provisoire et comme qui dirait, sous bénéfice d’inventaire ? […] C’est ce qu’un autre savant écrivait à Wolf après l’avoir lu : « Tant que je vous lis, je suis d’accord avec vous ; dès que je pose le livre, tout cet assentiment s’évanouit. » Les philologues, les érudits positifs ont beau faire assez peu de cas des considérations générales et des raisons puisées dans le sens intime ; ici eux-mêmes sont forcés de raisonner pour étayer leur système, et ils n’arrivent à leurs résultats que par voie d’induction ; car, s’ils s’en tenaient purement au fait transmis, à l’opinion constamment exprimée par les Anciens, ils croiraient à Homère nonobstant les difficultés qu’après tout les Anciens aussi n’ont pas été sans se poser.
Il repart de chez ses amis, pour revenir de nouveau à quelque prochaine saison ; chaque retour est peint à ravir, et comme l’unique accident qui projette une émotion intermittente et croissante dans l’heureuse et monotone existence des amants : « A la fin de l’hiver de 1741, par un beau jour, Simiane venait de greffer ses poiriers ; il tenait encore sa serpette, et s’était jeté sur l’herbe. […] Fortoul ; il ne faut pas trop s’en tenir à ce que dit Montesquieu de lui-même sur ce point : on lit dans les Mémoires de Garat une conversation de l’homme illustre, déjà bien près de finir, laquelle est, au contraire, tout étincelante d’images et de traits. […] La compagnie, devant laquelle il a lu son premier roman, lui reproche d’avoir fait l’apothéose de l’égoïsme, et il tient à montrer, par un nouvel exemple, que le foyer domestique n’a pas moins son inspiration, sa flamme active, que son renoncement et son sacrifice.
Le style donc doit subir des changements, par la révolution qui s’est opérée dans les esprits et dans les institutions ; car le style ne consiste point seulement dans les tournures grammaticales : il tient au fond des idées, à la nature des esprits ; il n’est point une simple forme. […] Tout ce que nous avons dit sur le mauvais goût, peut s’appliquer également à tous les défauts du langage employé par plusieurs écrivains depuis dix ans ; cependant il est quelques-uns de ces défauts qui tiennent plus directement à l’influence des événements politiques. […] J’oserai dire qu’il en est de même de tout ce qui tient à l’imagination, quoique sa marche soit moins assujettie.
Ces différences individuelles tiennent d’une part à des conditions extérieures et sociales ; d’autre part à des conditions intérieures et personnelles. […] « Chacun, dit Nietzsche, se tient pour libre là où son sentiment de vivre est le plus fort ; partant, tantôt dans la passion, tantôt dans le devoir, tantôt dans la recherche scientifique, tantôt dans la fantaisie. […] Celui qui commande doit tenir grand compte des volontés, des désirs conscients ou inconscients de ceux qu’il veut diriger.
Un verset du psaume des pèlerins 588, « J’ai choisi de me tenir à la porte dans la maison de mon Dieu », semblait fait exprès pour eux. […] En religion, on les tenait pour ignorants et peu orthodoxes 590 ; l’expression « sot Galiléen » était devenue proverbiale 591. […] Le haut sacerdoce de Jérusalem tenait, il est vrai, un rang fort élevé dans la nation ; mais il n’était nullement à la tête du mouvement religieux.
Dans ce que nous avons vu de la cour, se présentent les premières causes qui durent déterminer madame de Rambouillet à se tenir éloignée de ce foyer de discorde et de scandale, à se confiner chez elle et à s’y former une société habituelle. […] Sully dit un jour au prince de Condé qui se plaignait du roi : « Je vous ai entendu reconnaître plusieurs fois que vous tenez de sa bonté tout ce que vous êtes. » Sully, édition de Petitot, t. […] de Sully : « Vous tenez de sa bonté tout ce que vous êtes.
Tirons de l’intérêt et de l’amour-propre ce que nous aimerions mieux tenir d’une bonne nature. […] Il y a bien de la différence entre une erreur d’ignorance ou d’inadvertance et une erreur faite d’industrie ; celle-ci tient en garde l’élève : s’il l’aperçoit, sa petite vanité est satisfaite, elle l’habitue à se méfier, elle le forme insensiblement à la recherche de la vérité, elle lui inspire l’esprit d’invention ; l’autre perd le temps et ne rend que du mépris. […] On propose tant, à celui qui se rendra à Moscou ou à Pétersbourg avec une connaissance suffisante de la langue russe pour montrer la géométrie ; tant, à celui qui, pourvu de la même langue, sera en état de professer ou la médecine, ou la jurisprudence, ou les beaux-arts ; et tenez pour certain que si ces invitations sont constamment réitérées et ces promesses fidèlement tenues, elles produiront leur effet.
Les hommes dont la curiosité s’étend bien plus loin que les lumieres, veulent toujours sçavoir à quoi s’en tenir sur la cause de plusieurs effets naturels, et cependant ils ne sont point capables la plûpart d’examiner ni de connoître par eux-mêmes la verité dans ces matieres, en supposant même que cette verité se rencontrât à portée de leur vûë. […] Il s’ensuit donc que dans les questions de physique et des autres sciences naturelles, les neveux font bien de ne s’en pas tenir aux sentimens de leurs ancêtres. […] Le public est en possession de laisser discuter aux sçavans les raisonnemens qui concluent contre son expérience, et de s’en tenir à ce qu’il sçait certainement par voïe de sentiment.
Si je ne me soumets pas aux conventions du monde, si, en m’habillant, je ne tiens aucun compte des usages suivis dans mon pays et dans ma classe, le rire que je provoque, l’éloignement ou l’on me tient, produisent, quoique d’une manière plus atténuée, les mêmes effets qu’une peine proprement dite. […] Elles tiennent à la fois aux deux règnes ; on pourrait les appeler socio-psychiques.
Voilà qui est bien ; mais, à nous en tenir là, nous sommes encore loin de notre auteur, nous nous tenons à distance de lui, nous n’entrons pas dans son intimité ; tranchons le mot, nous ne le lisons pas. […] Il ne faut pencher vers aucun excès et il faut se tenir dans un certain milieu où le plaisir de comprendre ne soit pas gâté par le plaisir de discuter, ni même par celui de concilier trop ; mais se placer tour à tour aux différents points de vue et dans les différentes attitudes, et tantôt s’abandonner à la force de la pensée et à la rigueur de là logique, tantôt se défendre, ne vouloir pas être dupe, opposer l’auteur à l’auteur pour le battre à l’aide d’un auxiliaire qui est lui-même ; tantôt venir à son secours et démontrer qu’il ne s’est ni trompé ni contredit et que ce sont des apparences qui sont contre lui, si tant est même qu’il y ait des apparences : tout cela est comprendre encore ; tout cela n’est que différentes façons de comprendre et il suffit, pour que toutes soient utiles et fécondes, qu’à toutes ces opérations préside la loyauté et que jamais le sophisme ne s’y mêle.
Ils peuvent être des chevaliers de Grammont dans la vie ; c’est un air à prendre, un habit à porter, un propos à tenir, une manière de saluer, de monter à cheval, de mettre ses bottes, ou de se les faire ôter par des princesses, — comme faisait Lauzun. […] II Que si nous tenions à prouver en détail ce que nous avons dit plus haut de l’absence complète d’originalité en Russie, voici un ouvrage qui serait un bon argument. […] Les livres russes, comme les hautes classes russes, comme le gouvernement russe, comme tout ce qui tient en Russie au développement quelconque de l’intellectualité, recherchent avec trop d’empressement le joug de l’idée européenne pour avoir la force de le secouer et de le rejeter.
L’Angleterre surtout s’était fait avec ce genre de composition collective une gloire à part dans sa gloire littéraire, si grande déjà… La génération de 1830, qui, comme masse de talents et somme de vie, n’a pas encore été remplacée et attend toujours ses successeurs, crut, quand la Revue des Deux Mondes parut, tenir sa Revue d’Édimbourg. […] Mais quand il vit que le succès de sa Revue tenait à d’autres causes que le talent des écrivains, ô bonheur ! […] Malgré le résultat extérieur, malgré l’abonnement et l’encaissement, il a été au-dessous de sa besogne et, chose irritante et contre laquelle il n’y a ni propriété, ni possession, ni prescription, ni succès qui tienne, il n’a pas rempli dignement son genre d’emploi.
Mais pour qui sait combien ces connaissances, dont l’époque raffole, sont de peu dans le gouvernement des hommes, il y avait mieux à glorifier dans Léon XIII, et c’étaient les facultés qui ne sont créées par personne et qu’on tient de Dieu pour le service de Dieu. […] Violée en Italie par l’ambition de la maison de Savoie, indifférente aux souverains de l’Europe qui, comme leurs peuples, ne croient plus en elle ; méprisée et haïe, comme une ruine du passé, par tous ceux qui ont l’orgueilleuse suffisance de se donner pour l’avenir ; telle la papauté qui échéait à Léon XIII, à cet homme dont on sentit tout à coup la main, quand il l’eut prise dans sa main… La biographie de Teste, qui fourmille de détails et d’anecdotes impossibles à faire tenir dans ce chapitre, nous montre, dès les premiers instants de son pontificat, Léon XIII serrant tous les freins relâchés dans les dernières années de l’administration de Pie IX et rappelant tout le monde au devoir, — à toutes les hauteurs de hiérarchie et de fonction. […] Parmi elles, la Prusse tient encore au monde qui n’est plus par sa féodalité militaire, mais elle n’est séparée de la démocratie qui doit la dissoudre que de l’épaisseur d’un seul homme… Après cet homme, elle deviendra ce que sont devenues toutes les autres La prophétie de Napoléon s’accomplit.
La première impression que donne son livre, c’est là satisfaction de la clarté… Ce n’est pas la vérité encore que la clarté, mais elle y conduit et elle y tient par son rayon. […] Il nous a donné un détail qu’ici nous ne pouvons suivre, de ces Institutions puissantes, dans lesquelles tenaient tant de place la naissance, la richesse, l’aristocratie, les classifications, les hiérarchies, tout ce que la Démocratie abhorre. […] Les preuves que l’historien entasse pour prouver sa thèse submergeraient ce chapitre, si je tenais à les rapporter.
D’un autre côté, vainement l’Église lui a-t-elle appris cette charité chrétienne qui a suffi au monde depuis l’Évangile, il ne s’en est pas moins laissé mordre par la brebis enragée de la Philanthropie moderne, et comme l’école tout entière du dix-huitième siècle qu’il essaie de combattre, mais qui le tient sous elle comme un vaincu, il se préoccupe, à toute page de son livre philanthropique, du droit de chaque homme vis-à-vis de la société, et il va chercher ce droit individuel dans des notions incomplètes ou fausses, pour l’exprimer dans de nuageuses définitions que le dix-huitième siècle n’aurait certes pas repoussées ! […] Il tient autant à ceux qui les lisent qu’à ceux qui les composent. […] Que M. l’abbé Théobald Mitraud se tienne donc pour averti, — et, s’il a réellement un système, un second volume dans la pensée, qu’il en surveille l’expression et qu’il ne le lance dans le monde qu’après y avoir regardé !
Les dernières pièces du recueil indiquent une croissance, une épuration et une acquisition de force incontestables dans le genre de talent qu’il a, et quoique les défauts de ce talent, que nous allons caractériser tout à l’heure, tiennent bien plus à des indigences qu’à des abus de facultés, qui sait ? […] La Critique, positive comme l’Histoire, et qui, pour l’instant, tient en sa possession les poésies complètes et avouées de Banville, en d’autres termes toute sa moisson poétique de 1841 à 1854, vannée, triée par lui et engrangée pour l’immortalité, s’il y a lieu, la Critique a bien moins à se préoccuper des chances d’un avenir incertain qu’à juger des efforts accomplis et du talent prouvé par l’œuvre même. […] III Elles meurent justement parce qu’elles sont des écoles, parce que la poésie collective, la poésie analogue, qui se tient et qui se ressemble par une communauté de parti pris ou de doctrines, est une poésie qui s’épuise vite, — les hommes de talent qui se donnent à elle, par cela même qu’ils se donnent, n’étant pas de force à la renouveler.
La personnalité peut y tenir sa place, car on ne sait pas assez combien la personnalité d’un homme est près de lui quand on la croit le plus loin ; mais M. […] Flaubert était tenu à mieux que cela. […] Il y a si peu du Gustave Flaubert de Madame Bovary en Salammbô, que je le tiens pour mort, et, par conséquent, à moins de miracle, dans l’impossibilité de renaître.
C’est le concours des philosophes et des poètes qui perfectionne les langues ; c’est aux philosophes qu’elles doivent cette universalité de signes qui rend une langue le tableau de l’univers ; cette justesse qui marque avec précision tous les rapports et toutes les différences des objets ; cette finesse qui distingue tous les progrès d’actions, de passions et de mouvements ; cette analogie qui dans la création des signes les fait naître les uns des autres, et les enchaîne comme les idées analogues se tiennent dans la pensée, ou les êtres voisins dans la nature ; cet arrangement qui, de la combinaison des mots, fait sortir avec clarté l’ordre et la combinaison des idées ; enfin cette régularité qui, comme dans un plan de législation, embrasse tout et suit partout le même principe et la même loi. […] Il ne faut donc pas s’étonner si l’éloquence, qui tient tant à la perfection des langues, et qui chez les Grecs même est née après tous les autres arts, naquit si tard dans Rome. […] Vertueux, dit-on, mais circonspect, tour à tour brave et timide, aimant la patrie, mais craignant les dangers, ayant plus d’élévation que de force ; sa fermeté, quand il en eut, tenait plus à son imagination qu’à son âme.
— « Je ne tiendrais pas en estime un homme77 pour son agilité à la course ou sa vigueur à la lutte, ni s’il avait la taille et la force des Cyclopes, ni s’il devançait la vitesse de l’aquilon, ni s’il était plus gracieux de visage que Tithon ou plus riche que Midas et Cinyre, ni s’il était plus roi que Pélops, fils de Tante tale, ni s’il avait la langue mélodieuse d’Adraste, ni quand il aurait toute gloire, hormis la force guerrière. […] Mais que chacun, ayant pris le pas, se tienne affermi sur ses deux jarrets, serrant sa lèvre de ses dents ! […] que, par de vigoureux exploits, il s’exerce à la guerre, et ne se tienne pas, sous le bouclier, à distance des traits-ennemis ; mais qu’abordant de près et frappant avec la javeline ou l’épée, il prenne le guerrier captif !