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651. (1891) La vie littéraire. Troisième série pp. -396

Ils s’aimaient tous deux d’un amour tendre. […] Faut-il reconnaître dans cette fantaisie un souvenir puéril et tendre de Jeanne la Pucelle ? […] Denon lui tend le verre qu’il tient à la main. […] Le style en est monotone et tendu. […] Son esprit était ironique et son urne était tendre.

652. (1923) Les dates et les œuvres. Symbolisme et poésie scientifique

… Mallarmé vint ouvrir lui-même, me tendit la main, du geste simple qu’on a à la redonner à l’ami que l’on quittait hier. […] Il me tendait le pot à tabac, le papier à cigarettes. […] On voit que l’Ecole, objet de tant de débats, possède quelque vitalité et qu’elle tend à s’organiser pour le mieux. […] Il s’agit de savoir où en quel point excentrique hors du passé, se trouve suprêmement tendu son effort. […] Syntaxe et grammaire se rapprochent du latin Virgilien, et de plus en plus la langue tendra, heureusement pour un temps, à une qualité comme agglutinante.

653. (1911) Visages d’hier et d’aujourd’hui

Le lionceau n’a pas besoin de hochets ; il ne réclame pas le tendre et perpétuel babillage d’une bonne nourrice : mais l’enfant ne fait que pleurer. […] Certains critiques ont regretté que son œuvre eût quelque chose de difficile et de tendu. […] Ils galopent, certes, et tendent les bras vers le but. […] Elle s’est éprise des chansons tendres, mélancoliques de Verlaine. […] Le tendre et sensible Énée pleura sur la souffrance universelle et, grâce à divers contresens, mêla ses larmes à celles des choses.

654. (1938) Réflexions sur le roman pp. 9-257

Alors elle désigna une poupée d’un air tendre et me la montra sans rien dire. […] Elle désigna une poupée d’un air tendre, elle souriait, elle ne demandait rien : j’offris la poupée. […] Notre vie littéraire, fatiguée et sensuelle, tend à prendre une figure de ce genre : laissons-lui donner les fleurs de sa saison. […] Une lune rousse, bourdonnante, dépaysée, à laquelle les plus tendres pousses résistaient avec l’entêtement de lauriers centenaires. […] Chaque être doit tendre à la joie.

655. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXII » pp. 91-93

La Vierge et lui se tendent les bras.

656. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Arène, Paul (1843-1896) »

En outre, Paul Arène a semé, un peu partout, de ravissantes pièces de vers d’un atticisme tendre et raffiné, d’un parisianisme étincelant.

657. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Chateaubriand, François René de (1768-1848) »

Maurice Tourneux Toute l’ambition de Chateaubriand tendait alors, a-t-il prétendu, à l’insertion dans l’Almanach des Muses d’une idylle : L’Amour de la campagne, qui parut, en effet, dans le volume de 1790 et où rien, certes, ne trahissait le génie de celui qui l’avait laborieusement rimée.

658. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Ponchon, Raoul (1848-1937) »

Paul Verlaine Raoul Ponchon est un poète très original, un écrivain absolument soi, descendant, c’est clair, d’une tradition, ainsi que tous, du reste, mais d’une tradition « de la première », française en diable, avec tout le diable au corps et tout l’esprit au diable, d’un bon diable tendre aux pauvres diables et diablement spirituel, coloré, musical, joli comme tout, fin comme l’ambre, léger, tel Ariel, et amusant, tel Puck, bon rimeur (j’ai mes idées sur la Rime, et quand je dis « bon rimeur », je m’entends à merveille, et c’est de ma part le suprême éloge), excellent versificateur aussi (je m’entends encore), un écrivain, enfin, tout saveur, un poète tout sympathie !

659. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Samain, Albert (1858-1900) »

Pierre Quillard Parmi les arbres d’un parc automnal que l’imminence de la mort pare d’une beauté touchante et solennelle, sur des eaux lentes parfumées au crépuscule de pâles roses et de violettes pales, près d’une seigneuriale demeure qui s’écroule au milieu des hautes herbes et atteste une existence dix fois séculaire par l’effondrement des majestueuses salles romanes et des étroits boudoirs, encore tendus de molles étoffes en lambeaux, là et point ailleurs, il faut se réciter d’une voix mêlait colique et fière les vers de M. 

660. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Première partie. Plan général de l’histoire d’une littérature — Chapitre II. Pourquoi il faut préférer la méthode inductive » pp. 13-14

On peut dire que toutes les sciences tendent et s’acheminent vers cet état de perfection.

661. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre XV. Du Purgatoire. »

Que de peines ingénieuses réservées à une mère trop tendre, à une fille trop crédule, à un jeune homme trop ardent !

662. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Restout le fils » pp. 284-285

Votre Diogène ressemble à un gueux qui tend la main de bonne foi ; et puis il est sale de couleur.

663. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE VIGNY (Servitude et Grandeur militaires.) » pp. 52-90

Il avait, en chantant, adopté les croyances catholiques ; mais son cœur n’était que peu gagné à leur onction tendre, et leur côté sombre, dans de Maistre, le rebutait, lui faisait presque horreur. […] Mais ce qui est beau sans mélange, c’est la prison, le réfectoire, c’est cette galanterie refleurissant à Saint-Lazare, comme une île de verdure sur un marais croupissant ; c’est le noble André, brusque et tendre, Mlle de Coigny et sa coquetterie boudeuse, Mme de Saint-Aignan et sa passion décente, ensevelie, et la destinée mélancolique du portrait. […] Que d’impressions douloureuses, sombres et tendres ! […] « Mille amitiés bien tendres, « Alfred de Vigny.

664. (1875) Premiers lundis. Tome III « Les poètes français »

Au milieu de la grossièreté des mœurs, nous comprenons par là l’une des délicatesses de l’honneur féodal ; nous en sentons les nuances, et nous mesurons la force du nœud mieux que nous ne l’aurions pu par toutes les définitions ; nous saisissons aussi des accents de nature profonde et d’humanité : ces hommes à la rude écorce et au cœur de chêne avaient des fibres tendres et savaient pleurer. […] Bernier regarde tout près d’un pilier ; Là vit sa mère étendue et couchée, Sa tendre face étendue et couchée ; Sur sa poitrine vit brûler son psautier. […] De menus genres, d’un agrément fragile et bien vite épuisé, ne font qu’éparpiller la méthode et le goût compassé du Roman de la Rose ; et un génie individuel, passionné ou tendre, ne vient pas y porter le correctif, y mettre son cachet à part, et les relever ou les consacrer. — Je prends Froissart : il semble que ce ne soit pas au sujet de Froissart qu’on doive exprimer un regret ; il avait en effet sa vocation expresse de chroniqueur pittoresque, et il l’a merveilleusement remplie. Cependant je n’ai pu lire Froissart poète sans éprouver un regret, qui aura tout lieu de se renouveler quand j’en serai un peu après à Alain Chartier, ou même à Charles d’Orléans dans le xve  siècle : c’est que, de même que dans le genre épique, narratif, sévère, loyal, enflammé, nous n’avons pas eu notre Homère ; — de même que, pour le genre satirique sérieux, amer, élevé, traversé de sublimes tendresses, nous n’avons pas eu un Dante, un poète qui correspondît à Dante pour le génie, et qui gravât pour l’immortalité ; — de même, dans le genre tendre, amoureux, dans la poésie courte, légère, élégiaque, nous n’avons pas eu un Passionné délicat et accompli, qui ait produit, dans l’esprit de cette fin ornée et perlée du moyen âge, de ces immortelles chansons et ballades, telles que celles de Pétrarque.

665. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Note I. De l’acquisition du langage chez les enfants et dans l’espèce humaine » pp. 357-395

Curiosité pure ; le besoin physique, la gourmandise n’y est pour rien ; il semble que déjà, dans son petit cerveau, chaque groupe de perceptions tende à se compléter, comme dans le cerveau d’un enfant qui se sert du langage. […] Va faire doudou à la dame (caresser de la main et tendre la joue). […] Viens ici », etc. — Elle commence à distinguer le ton fâché du ton satisfait, elle cesse de faire ce qu’on lui interdit avec un visage et une voix sévères ; elle a spontanément et souvent l’envie d’être embrassée ; pour cela, elle tend le front et dit d’une voix câline : papa, ou maman. — Mais elle n’a appris ou inventé que très peu de mots nouveaux. […] De très bonne heure, la connaissance incomplète a tendu à se compléter.

666. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXVIIIe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 65-128

CXCV Aussi, pour bien le confirmer dans l’idée qu’il allait me voir apparaître, quand je fus à la dernière arcade au tournant du cloître avant son grillage, je m’assis sur le socle de l’arcade et je jouai doucement, lentement, amoureusement, l’air de la nuit dans la tour, afin qu’il comprît bien que j’étais là, à dix pas de lui, et qu’il entendît pour ainsi dire battre mon cœur dans la zampogne ; et je finis l’air, non pas comme d’habitude, par ces volées de notes qui semblaient s’élancer vers le ciel, comme des alouettes joyeuses montant au soleil, mais je le finis par deux longs, lugubres et tendres soupirs de l’instrument qui semblait bien plutôt pleurer que chanter, hélas ! […] Je m’élançai, les bras aussi tendus vers les siens, avec tant de force, que mon front meurtri semblait vouloir enfoncer les barreaux noués par des nœuds de fer, comme mes agneaux quand ils se battent, pour sortir de l’étable, contre la cloison d’osier qui les enferme. […] Elle pleurait en me les remettant, et ses doigts semblaient vouloir retenir ce que me tendait sa main. […] — Aucune, répondit le vieux frère ; c’est en vain que j’ai demandé discrètement aux portes de tous les couvents où l’on distribue gratis de la nourriture aux nécessiteux, vagabonds, mendiants ou autres, si l’on avait vu tendre son écuelle à un jeune et beau pifferaro des montagnes ; c’est en vain que j’ai demandé aux marchands sur leurs portes, aux vendeuses de légumes sur leur marché, si elles avaient entendu de jour ou de nuit la zampogne d’un musicien ambulant jouant des airs, au pied des Madones, dans leurs niches ou devant le portail des chapelles.

667. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIe entretien. Madame de Staël »

À peine eut-elle pris sa place accoutumée, que trois ou quatre vieux personnages s’approchèrent d’elle, lui parlèrent avec le plus tendre intérêt. […] Peut-être sa main débile, qui n’a pas été façonnée pour l’effort, ne peut-elle jamais parvenir à tendre assez puissamment la corde de l’arc pour que la flèche du vers atteigne le but et touche l’âme en la charmant, comme le trait invisible de l’archer qui déchire l’air en le traversant et qui résonne à l’oreille en perçant le cœur ? […] M. et madame Necker, qui tendaient à la supériorité sociale par toutes les voies avaient trop senti les froissements de leur vanité à la cour pour ne pas apprécier à leur prix de hautes alliances ; en anoblissant leur fille en Suède, ils anoblissaient en France leur propre sang ; ils s’apatriaient dans toutes les noblesses de l’Europe. […] « Je reviens à vous, femmes immolées toutes dans une mère si tendre, immolées toutes par l’attentat qui serait commis sur la faiblesse par l’anéantissement de la pitié ; c’en est fait de votre empire si la férocité règne, c’en est fait de votre destinée si vos pleurs coulent en vain !

668. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLVe entretien. Vie de Michel-Ange (Buonarroti) »

Enfin, si, en feuilletant dans les bibliothèques poudreuses du Vatican, à Rome, ou du palais Pitti, à Florence, les manuscrits du quinzième siècle, vos regards tombent sur une de ces poésies à la fois platoniques et amoureuses, où les vers, forts comme des muscles de géant, et les pensées, tendres comme des rêves de femme, respirent à la fois la virilité du buste de Brutus et la mélancolie des sonnets de Pétrarque ; et si vous demandez quel était ce poëte avec lequel la plus belle, la plus poétique et la plus chaste des femmes de son siècle, Vittoria Colonna, entretenait ce commerce de cœur et de génie qui consolait l’un de sa vieillesse, l’autre de son veuvage d’un héros ? […] Laurent de Médicis, témoin des jeux de ce génie enfant, qui dépassait du premier jet ses modèles et ses maîtres, se prit d’une tendre et paternelle admiration pour Michel-Ange ; il lui donna une chambre dans son propre palais ; il l’admit à sa table, où Laurent le Magnifique, entouré de ses enfants, des poëtes, des savants, des philosophes, des artistes les plus renommés de la république, prolongeait dans la nuit les entretiens dignes des temps de Périclès, pour faire rejaillir jusque sur le père de Michel-Ange les bontés qu’il avait pour le fils. […] La nature l’avait douée de cette beauté à la fois majestueuse et tendre que les Romaines modernes semblent avoir ravie aux statues grecques qui décoraient leurs temples et leurs musées. […] Les deux époux étaient dignes l’un de l’autre, l’amour le plus tendre les unissait avant la volonté de leurs familles ; mais l’héroïsme du jeune Pescaire l’arracha peu de temps après le mariage des bras de son amante.

669. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « M. Paul Verlaine et les poètes « symbolistes » & « décadents ». »

Je n’ai pu prendre mon parti de ces séries de vocables qui, étant enchaînés selon les lois d’une syntaxe, semblent avoir un sens, et qui n’en ont point, et qui vous retiennent malicieusement l’esprit tendu dans le vide, comme un rébus fallacieux ou comme une charade dont le mot n’existerait pas… En ta dentelle où n’est notoire Mon doux évanouissement, Taisons pour l’âtre sans histoire Tel vœu de lèvres résumant. […] C’est un vers plein d’ingénuité par où commence un sonnet très tendre. […] Tendez-moi votre main, que je puisse lever Cette chair accroupie et cet esprit malade. […] On sent seulement que cela est doux, tendre, triste, et que plusieurs vers sont exquis.

670. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, le 8 décembre 1885. »

Aussi fit il, une fois seulement mais en une suite longuement enchaînée, s’enfler l’insatiable désir, de la timide confession, de la plus tendre attirance, au travers de l’hésitant soupirer, de l’espérer et du craindre, du lamenter et du souhaiter, du jouir et du souffrir, jusque le plus puissant pressement, la plus violente lassitude, pour trouver l’irruption qui au cœur ouvrît la voie en la mer de l’infinie joie d’amour. […] il ressent les grands jardins pleins d’odeurs fumantes et de teintures chaudes ; les mollesses des tiédeurs étaient molles, lorsque devant son corps elle surgit, la femelle bête, folle de son corps… elle avait ces rires et cette voix, oui, ce regard qui si inquiet lui caressait, ces lèvres, oui, à lui si frémissantes, ces cheveux inclinés à lui, oui, ces flattantes boucles, et autour de son cou ces bras, si tendres ces joues, si nouvelle cette bouche qui, en la communion de toutes les souffrances, lui embrassa le salut de son âme… monstrueux baiser ! […] Sous une forme contenue et voilée, il accompagne les premiers mots de Walther : « So rief der Lenz in der Wald », et « So rief es mir in der Brust » ; il souligne toute l’ardeur du poète, son désir d’Eva, de la maîtrise qui la lui donnera ; il apparaît quand le chevalier trouve l’art des maîtres nouveau et étranger pour lui ; pendant le choral, dans la mimique tendre de Walther, et quand il voit Eva s’avancer vers lui pour sortir de l’Église ; c’est lui qui proteste pendant que les maîtres accablent le héros ; lui qui s’insinue dans la pensée de Sachs, le trouble et lui fait dire plus tard à Walther : « All Dichtkunst und Poeterei ist nichts als Wahn-traumdeuterei. » Motif 3 (p. 34, 171, 264, 265, 266, 276,287, 300, 301, 315, 316, 318, 375, 379). — Les trois premières notes de ce motif sont les trois dernières du motif 2, et la seconde partie de la phrase est la répétition de la première où apparaît la note ré, trois fois répétée. […] De lui sortiront, comme on peut le voir sur notre tableau, les motifs d’Eva, de Sachs, du concours, de Nuremberg, des apprentis, de Beckmesser, et des maîtres eux-mêmes : ou, si l’on préfère, on le trouvera dans l’amour d’Eva, dans le renoncement tendre et généreux de Sachs, sa jeune poésie populaire et son ardent amour pour ce qui possède vie et passion, dans la mâle poésie de Walther, dans la hardie et saine volupté de son chant, auquel il devra Eva et le titre de maître, dans la joyeuse et bonne vie du peuple de Nuremberg qui décidera des prix et comprendra Walther, dans l’amoureuse sérénade de Beckmesser, dans la ronde des apprentis, dans la fête de la Saint-Jean, et de proche en proche dans la marche des Maîtres.

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