Il est remarquable que celui-là soit le moins ému, qui s’est fait le poète des religions et qui s’est attaché aux manifestations du sentiment le plus intime, le plus enfoncé au cœur des races. […] Mais quand un poète s’est complu à évoquer la série presque complète des religions et des théologies, volontiers on s’enquiert des raisons d’une prédilection si constante. […] Il lui sembla que l’homme, presque toujours, avait aggravé l’horreur de son destin par les explications qu’il en avait données, par les religions qui avaient hanté son esprit malade, prêtant à ses dieux les passions dont il était agité. […] Alors, le cœur révolté contre l’Être, mais les yeux pleins du prestige de ses formes ; indigné des monstruosités de l’histoire, mais désarmé par l’intérêt de son mécanisme et ébloui par la richesse de ses décors ; soulevé contre le spectre des religions, mais apaisé par l’idée qu’un jour peut-être elles auront vécu ; conspuant l’humanité et l’adorant à la fois, il alla prendre pour héros l’antique rebelle, le premier après Lucifer qui ait crié : Non serviam ! […] Plus tard, quand ils eurent perdu la liberté, à Alexandrie, en Sicile, ils se consolaient encore par leur belle mythologie, par les symboles sensuels de leur religion naturaliste et par des rêves de vie pastorale dans la campagne divinisée.
N’est-ce pas en France que tous les ouvrages contre la religion ont été composés, vendus et publiés, et souvent même imprimés ? […] Accorder hautement sa protection à un ennemi déclaré, tombé dans la disgrâce, abandonné de tous, devenu l’objet du mépris et de la haine publics ; montrer à son égard une tendresse plus que maternelle ; s’opposer en même temps et à la colère du prince et à l’aveugle fureur du peuple : voilà ce qui fait la gloire de notre sainte religion. […] L’évêque Burnet avoue que ce goût, acquis en France par les courtisans de Charles II, réforma chez vous jusqu’à la chaire, malgré la différence de nos religions : tant la saine raison a partout d’empire ! […] L’Imagination, à ces murs dévastés, Rend leur encens, leur culte et leurs solennités, À travers tout un siècle écoute les cantiques Que la Religion chantoit sous ces portiques. […] C’est la Religion ; oui, cette enchanteresse Se plaît à nous unir d’un nœud mystérieux À tous les monuments consacrés par les cieux.
Cela veut ; dire qu’il suffit d’humanité sans religion et avec irréligion pour être charitable ! […] Et il est remarquable que les personnages sensés de la pièce, et ils sont nombreux, n’ont pas l’air de savoir qu’une religion existe. […] Il a écrit Tartuffe non pas précisément en hostilité contre la religion de son temps, mais sans scrupules à cet égard, sans les scrupules qui, s’il les avait eus, l’auraient empêché d’écrire une pièce si facile à diriger, non seulement contre l’hypocrisie mais contre la religion en soi. […] Et il a pour une religion autoritaire et rigoureuse une profonde dévotion ; car la religion telle qu’il la comprend est un frein et une entrave ; met aux mains du mari cet instrument de terreur dont il a besoin. […] Brave encore, puisqu’il accepte un duel, mais hypocrite de religion et se couvrant de scrupules religieux.
L’impérieux devoir qui m’obligea, durant les années de ma jeunesse, à résoudre pour mon compte, non avec le laisser aller du spéculatif, mais avec la fièvre de celui qui lutte pour la vie, les plus hauts problèmes de la philosophie et de la religion, ne me laissait pas un quart d’heure pour regarder en arrière. […] Si une société, si une philosophie, si une religion eût possédé la vérité absolue, cette société, cette philosophie, cette religion aurait vaincu les autres et vivrait seule à l’heure qu’il est. […] La religion est la forme sous laquelle les races celtiques dissimulent leur soif d’idéal ; mais l’on se trompe tout à fait quand on croit que la religion est pour elles une chaîne, un assujettissement. […] Jusque-là, la religion y avait eu un cachet absolument à part.
Les brahmanes, prêtres de la religion et gardiens des mœurs, n’auraient pas permis sans doute qu’on donnât en spectacle à la multitude, comme on l’a fait malheureusement en Grèce, à Rome et chez nous, des passions féroces et des attentats odieux reproduits en langage et en action sur la scène, et propres à dépraver les imaginations d’un peuple religieux. […] Un cénobite de la religion de Wichnou reçoit la notion de l’art dramatique du père des brahmanes. […] Les règles de leur littérature théâtrale, règles puisées dans la religion plus que dans l’art, révèlent, dans ces temps reculés, de profondes notions sur la manière d’émouvoir, d’intéresser, de tendre et de détendre l’esprit des hommes rassemblés, et de les faire sortir de ces représentations dans un état d’édification morale où le plaisir même profite à la sainteté. […] Non seulement un dénouement tragique troublerait la conscience du peuple, mais il blesserait la religion, qui révèle comme un dogme absolu l’absorption ou la réunion définitive de tout être à la source de son être dans le sein de la Divinité. […] » La scène s’évanouit après ces paroles, et le peuple édifié sort du spectacle comme d’un temple, où le plaisir même sert de mobile à la religion et à la vertu.
Sur ce point, chrétiennement et toujours raisonnablement, repose toute l’éducation telle que la conçoit Mme de Maintenon et telle qu’elle voulut l’établir à Saint-Cyr : « Inspirer la religion et la raison, c’est là le solide de l’éducation de Saint-Cyr. » — « Le christianisme et la raison, qui est tout ce que l’on veut leur inspirer, sont également bons aux princesses et aux misérables. » Mais ceci demande quelque éclaircissement. […] Cela bien entendu, elle veut le vrai dans l’éducation dès le bas âge : « Point de contes aux enfants, point en faire accroire ; leur donner les choses pour ce qu’elles sont. » — « Ne leur faire jamais d’histoires dont il faille les désabuser quand elles ont de la raison, mais leur donner le vrai comme vrai, le faux comme faux. » — « Il faut parler à une fille de sept ans aussi raisonnablement qu’à une de vingt ans. » — « Il faut entrer dans les divertissements des enfants, mais il ne faut jamais s’accommoder à eux par un langage enfantin, ni par des manières puériles ; on doit, au contraire, les élever à soi en leur parlant toujours raisonnablement ; en un mot, on ne peut être ni trop ni trop tôt raisonnable. » — « Il n’y a que les moyens raisonnables qui réussissent. » — Elle le redit en cent façons : « Il ne leur faut donner que ce qui leur sera toujours bon, religion, raison, vérité. » Dans un siècle où sa jeunesse pauvre et souriante avait vu se jouer tant de folies, tant de passions et d’aventures, suivies d’éclatants désastres et de repentirs ; où les romans des Scudéry avaient occupé tous les loisirs et raffiné les sentiments, où les héros chevaleresques de Corneille avaient monté bien des têtes ; où les plus ravissantes beautés avaient fait leur idéal des guerres civiles, et où les plus sages rêvaient un parfait amour ; dans cet âge des Longueville, des La Vallière et des La Fayette (celle-ci, la plus raisonnable de toutes, créant sa Princesse de Clèves), Mme de Maintenon avait constamment résisté à ces embellissements de la vérité et à ces enchantements de la vie ; elle avait gardé son cœur net, sa raison saine, ou elle l’avait aussitôt purgée des influences passagères : il ne s’était point logé dans cette tête excellente un coin de roman. « Il faut leur apprendre à aimer raisonnablement, disait-elle de ses filles adoptives, comme on leur apprend autre chose. » Et de plus, cette ancienne amie de Ninon savait le mal et la corruption facile de la nature ; elle avait vu de bien près, dans un temps, ce qu’elle n’avait point partagé ; ou si elle avait été effleurée un moment, peu nous importe, elle n’en était restée que mieux avertie et plus sévère. […] Louis XIV, dans l’esprit qui lui dicta cette fondation, à cette date qui est à la fois celle de sa maladie et de son mariage secret, eut-il dessein, revenant sur les fautes de son passé, de réparer ce qu’il avait fait de tort à certaines nobles demoiselles de son royaume, telles que La Vallière, par exemple, et voulut-il, par une sorte d’expiation, mettre à jamais toute une élite pauvre à l’abri des tentations et des périls sous l’aile de la religion et de la vertu ?
Dans sa jeunesse, et à l’époque de sa liaison avec Vauvenargues, c’était un jeune homme studieux, aussi lettré que modeste, animé de sentiments délicats et tendres, religieux ou susceptible de revenir à la religion. Il fit une maladie grave et qui mit ses jours en danger en 1739 ; les lettres que lui adresse Vauvenargues à ce sujet sont les plus précieuses de cette correspondance, en ce qu’elles jettent quelque lumière sur les vrais sentiments en matière de religion et les croyances de celui qui les écrivait. […] mais la religion, comme tu dis, fournit de grandes ressources ; il est heureux, dans ces moments, d’en être bien convaincu.
Or Bossuet combattit cet homme, Richard Simon, le dénonça comme coupable au fond « d’une dangereuse et libertine critique », d’une malignité profonde, « d’un sourd dessein de saper les fondements de la religion » ; il le fit taire tant qu’il put ; il déclara subversives du Christianisme, et des prophéties sur lesquelles il se fonde, les explications les plus irréfragables ou les plus vraisemblables qui sont du ressort de la philologie pure ; il l’accusa de substituer en toute rencontre des sens humains à ce qu’il appelait les sens de Dieu. […] Les Romains plus graves ne faisaient pas mieux en religion que les Grecs. […] Il protège la Religion au dedans et au dehors du royaume et jusqu’aux extrémités du monde.
La nature étudiée, attaquée par tous les points, poursuivie dans ses détails, embrassée dans ses ensembles, décrite, dépeinte, admirée, connue ; — ce qui reste de barbarie cerné de toutes parts ; — les antiques civilisations rendues de jour en jour plus intelligibles, plus accessibles ; — le contact des religions considérables amenant l’estime, l’explication et jusqu’à un certain point la justification du passé, et tendant à amortir, à neutraliser dorénavant les fanatismes ; — une tolérance vraie, non plus la tolérance qui supporte en méprisant et qui se contente de ne plus condamner au feu, mais celle qui se rend compte véritablement, qui ménage et qui respecte ; — au dedans, au sein de notre civilisation européenne et française, un adoucissement sensible dans les rapports des classes entre elles, un désarmement des méfiances et des colères ; un souci, une entente croissante des questions économiques et des intérêts, ou, ce qui revient au même, des droits de chacun ; le prolétaire en voie de s’affranchir par degrés et sans trop de secousse, la femme trouvant d’éloquents avocats pour sa faiblesse comme pour sa capacité et ses mérites divers ; les sentiments affectueux, généreux, se réfléchissant et se traduisant dans des essais d’art populaire ou dans des chants d’une musique universelle : — tous ces grands et bons résultats en partie obtenus, en partie entrevus, les transportent ; ils croient pouvoir tirer de cet ordre actuel ou prochain, de cette conquête pacifique future, un idéal qui, pour ne pas ressembler à l’ancien, n’en sera ni moins inspirant, ni moins fécond. […] Jullien, celui qu’on appelait Jullien de Paris, qui, jeune, s’était fait tristement connaître par son fanatisme révolutionnaire, et qui, vieux, tâchait de faire oublier ses anciens excès par son zèle honorable de fondateur de la Revue encyclopédique, avait à la bouche, à chaque phrase, le mot de civilisation : c’était devenu un tic chez ce petit vieillard si actif et toujours courant. — Le mot est naturel et habituel dans l’ordre d’idées et dans la langue de Condorcet, de Volney ; il revient nécessairement sous leur plume, comme le mot de Dieu sous celle des dévots, et il tend à le remplacer : il marque leur religion aussi. […] Mille écluses maîtriseraient et distribueraient l’inondation sur toutes les parties du territoire ; les huit ou dix milliards de toises cubes d’eau qui se perdent chaque année dans la mer, seraient réparties dans toutes les parties basses du désert, dans le lac Mœris, le lac Maréotis et le Fleuve sans eau, jusqu’aux Oasis et beaucoup plus loin du côté de l’ouest, — du côté de l’est, dans les Lacs Amers et toutes les parties basses de l’Isthme de Suez et des déserts entre la mer Rouge et le Nil ; un grand nombre de pompes à feu, de moulins à vent, élèveraient les eaux dans des châteaux d’eau, d’où elles seraient tirées pour l’arrosage ; de nombreuses émigrations, arrivées du fond de l’Afrique, de l’Arabie, de la Syrie, de la Grèce, de la France, de l’Italie, de la Pologne, de l’Allemagne, quadrupleraient sa population ; le commerce des Indes aurait repris son ancienne route par la force irrésistible du niveau… » Le mot de civilisation ne s’est pas rencontré encore ; il n’échappe qu’à la fin et aux dernières lignes, comme le résumé de tout le tableau ; il introduit avec lui et implique l’idée morale, qui a pu paraître jusque-là assez absente : « Après cinquante ans de possession, la civilisation se serait répandue dans l’intérieur de l’Afrique par le Sennaar, l’Abyssinie, le Darfour, le Fezzan ; plusieurs grandes nations seraient appelées à jouir des bienfaits des arts, des sciences, de la religion du vrai Dieu ; car c’est par l’Égypte que les peuples du centre de l’Afrique doivent recevoir la lumière et le bonheur !
Elle s’empare de vous comme une espèce de dictature, qui fait taire toutes les autorités de l’esprit, de la raison et du sentiment : sous cet asservissement, pendant qu’il dure, les hommes sont moins malheureux que par le libre arbitre qui reste encore aux autres passions ; dans celle-là, la route qu’il faut suivre est commandée comme le but qu’on doit atteindre : les hommes dominés par cette passion sont inébranlables jusques dans le choix de leurs moyens ; ils ne voudraient pas les modifier, même pour arriver plus sûrement à leur objet : les chefs, comme dans toutes les religions, sont plus adroits parce qu’ils sont moins enthousiastes ; mais les disciples se font un article de foi de la route autant que du but. […] Plus l’esprit de parti est de bonne foi, moins il admet de conciliation ou de traité d’aucun genre ; et comme ce ne serait pas croire véritablement à l’existence efficace de sa religion, que de recourir à l’art pour l’établir, dans un parti, l’on se rend suspect en raisonnant, en reconnaissant même la force de ses ennemis, en faisant le moindre sacrifice pour assurer la plus grande victoire. […] Les grandes qualités d’un homme qui n’a pas la même religion politique que vous, ne peuvent être comptées par ses adversaires ; les torts, les crimes mêmes de ceux qui partagent votre opinion ne vous détachent pas d’eux ; le grand caractère de la véritable passion est d’anéantir tout ce qui n’est pas elle, et une idée dominante absorbe toutes les autres.
Cet utopiste, qui avait professé la doctrine de Saint-Simon, de Fourier et s’était fait successivement l’adepte de toutes les religions fantaisistes qui pullulaient, comme des champignons, des ruines de l’ancienne, entend, un jour, par hasard, prêcher le célèbre Père de Ravignan. […] En réalité, ces incroyants sont des prosélytes de la religion nouvelle. […] Tandis que Péladan poursuit son Éthopée, que le poète Édouard Schuré trace, avec ses Grands initiés, l’esquisse de l’histoire secrète des religions qui paraîtra en 1889, tandis que Huysmans abjure la foi réaliste et retourne à Dieu où il se délecte, par haine de la banalité, comme à un vocable rare ou à une idée exceptionnelle et qu’il ébauche Là-bas, Stanislas de Guaita amasse les matériaux qui lui serviront à écrire l’histoire des Sciences maudites.
L’effroi ou la honte que ces prédications parurent jeter dans l’âme des deux amants, furent plus forts et plus déterminants en 1675 qu’ils ne l’avaient été dans les années précédentes, où les carêmes n’avaient pas été prêches avec moins de véhémence, et où les vérités de la religion n’avaient pourtant rien obtenu. […] Le roi, de son côté, fit tout ce qu’un bon chrétien doit faire. » Le 16 avril, peu après l’événement, madame de Scudéry écrivait au comte de Bussy-Rabutin : « Le roi et madame de Montespan se sont quittés, s’aimant, dit-on, plus que la vie, purement par un principe de religion. […] C’était dans cette honnêteté, toute morale, que résidait la grande puissance qui devait ramener un roi dissolu à des mœurs décentes ; car la religion n’agit sur Louis XIV qu’après l’ascendant de la morale, aidée par les charmes de l’esprit et de la raison.
Il y a de ce côté toute une destinée et presque une religion. […] Quant aux grandes scènes finales de l’arbre de Saint-Cloud, autrement dit l’arbre de l’Adoration, et aux promenades dans le parc de Mousseaux, j’y suis peu sensible ; elles rentrent dans ce nouveau système d’amour, qui consiste à identifier Julie avec la nature et avec Dieu, à faire de tous les trois un mélange qui semble tenir à la présente religion de l’auteur, et qui appartient peut-être à la future religion du monde.
Je ne parle point ici de celles qui contiennent les fastes mêmes de notre religion, de celles dont la célébration est la profession de foi de la société chrétienne. Celles-là ont une origine positive ; elles se lient aux dogmes et à l’histoire de la religion. […] La parole continuera d’être fécondée par la religion, ainsi que nous l’avons dit ; et l’étude des langues où sont enfermées comme dans une arche voilée aux regards les traditions primitives du genre humain, entretiendra ce genre d’activité des esprits, cette continuité de traditions.
Eux aussi, aboutissent à la synthèse de leurs sentiments dans une religion : religion mal définie peut-être, peu orthodoxe à coup sûr, mais de si noble essence, que le catholicisme l’a longtemps respectée. […] Dans son esprit, l’art et la religion sont deux manifestations d’un besoin unique, ou, pour employer les expressions qu’il emprunte volontiers à Schopenhauer, deux représentations intellectuelles (Vorstellungen) d’une même idée : l’art et la religion se complètent l’un l’autre et poursuivent des fins communes. […] Chaque œuvre, chaque recueil de vers, comme l’Âne, Religion et religion, etc. ; chaque drame, comme le Roi s’amuse ou Ruy-Blas ; chaque roman, comme les Misérables ou les Derniers jours d’un condamné, n’est qu’une suite de variations dans lesquelles le thème est noyé. […] Ainsi, en religion comme en politique, il est guidé par le même esprit libéral. […] Religion und Kunst.
Vous ne vous douteriez pas qu’il y a, dans ce moment, une persécution terrible organisée contre les philosophes par la religion. […] la religion. […] La religion, l’esprit de famille, la tradition du passé, l’antique honneur, sont demeurés pour lui au nombre des choses respectables et respectées. […] Sans cela, on n’a pas la foi, et sans la foi catholique on n’a pas la charité catholique, car tout se tient dans la religion. […] Seulement, l’auteur oublie d’expliquer pourquoi la religion et la société accueillent d’une manière si différente ceux qui portent la livrée du crime, la religion avec des paroles de mansuétude, d’espérance, d’encouragement ; la société avec des précautions infinies, des défiances et des craintes.
Assurément, dans cette querelle mémorable, où il y allait, comme il disait, de toute la religion, on ne saurait trop admirer ce qu’il a déployé de vigueur, d’éloquence, et d’ardeur passionnée. […] Et finalement, à l’ombre de la controverse, le libertinage grandissait de tout ce que la religion perdait de prestige et d’autorité. […] Qui ne l’entend encore quand il oppose « les évidences de la raison » aux « vérités de notre religion » ; et qui ne voit ou qui ne devine quel est son objet ? […] Rœderer, Mémoire sur l’histoire de la société polie]. — Pourquoi les femmes n’aiment pas Molière. — A-t-il réussi contre la religion ? […] Sermons sur la Vérité de la religion, 1665 ; — l’Oraison funèbre de la Princesse palatine, 1685 ; — la Lettre à un disciple du P.
Les sujets de ces « romans » en vers étaient presque tous tirés de l’histoire moderne, et ornés d’un « merveilleux » emprunté à la religion chrétienne. […] C’est contre Desmarets que Boileau, par une malheureuse application de sa doctrine, prohiba au troisième chant de son Art Poétique l’emploi de la religion chrétienne en poésie, et, juste au moment où Milton venait d’écrire son Paradis perdu (ce que, du reste, il ignorait), nia assurément la valeur poétique de Satan.
En politique, en morale, en sociologie, en religion, en philosophie, le conservateur de la doctrine ancienne et le révolutionnaire le plus acharné à détruire les vérités présentes se confondent dans l’identité d’une même foi. […] Tandis que le philosophe, dupe de la croyance en. une vérité objective, se fonde, pour maintenir la suppression du culte, sur ce fait que la religion catholique, comme toute autre forme religieuse, est fausse et constitue une superstition, l’esprit clairvoyant du politique sachant que la superstition, le préjugé, la croyance sont l’étoffe et l’unique tissu du réel, se préoccupe uniquement de rechercher quelle forme du préjugé est utile à la réalité française dont il identifie avec le sien l’intérêt.
On peut reprocher au Paradis perdu de Milton, ainsi qu’à l’Enfer du Dante, le défaut dont nous avons parlé : le merveilleux est le sujet et non la machine de l’ouvrage ; mais on y trouve des beautés supérieures, qui tiennent essentiellement à notre religion. […] mais se fût-il élevé à ces pensées, s’il n’eût connu la religion de Jésus-Christ ?