Aux jours de son adultère le plus enivré, quand elle se précipitait sur la poitrine de son amant avec l’ardeur presque tragique de l’idéal possédé, — car elle croyait le posséder, — « elle s’avouait ne rien sentir d’extraordinaire… » A quoi bon alors ? […] La plupart des esprits ne sont pas également aptes à évoquer ces deux groupes d’images et ne possèdent ces deux sortes d’imagination qu’à des degrés inégaux Flaubert possédait évidemment l’imagination du monde extérieur d’une façon très remarquable. […] Mais est-ce que l’œuvre possède une existence en soi et différente de l’esprit qui la produit ? […] L’homme qui possède ce don de l’autorité peut devenir impopulaire. […] Personne avant lui, pas même cet halluciné de Michelet, n’avait possédé à un degré supérieur la magie de la résurrection.
Géruzez possède à un degré éminent deux des qualités du génie français dont il conte l’histoire : je veux dire l’agrément et le goût. […] On dirait que les deux auteurs possèdent un tiroir à mots. […] Il possède à un haut degré le don de l’expression créée. […] Il le possède en propre, seul de son temps. […] Sur soixante-huit ans qu’il vécut, Paris le posséda douze ans ; puis il courut se cacher à Amiens, vivre et mourir au gîte.
Parodi sont respectables et admirables, son « exécution » est bien insuffisante ; et s’il possède incontestablement le don dramatique, il en usa parfois avec une maladresse déconcertante… Il me faut parler de ce qu’il y a de plus fâcheux dans la Reine Juana : du style.
Par cet art admirable, personne n’a mieux possédé, que l’Evêque de Clermont, le talent de se rendre sensible & intéressant pour tout le monde.
Je ne veux pas dire qu’il ne fût pas plus sain de faire payer tant par toise du toit, ou tant par pouce carré de l’espace occupé par la maison du riche ; mais enfin c’est un impôt du riche payé exclusivement par le propriétaire : en cela c’est un impôt populaire payé au bénéfice du prolétaire, qui ne possède que sa place quand il l’a louée. […] L’impôt est le grand répartiteur du superflu du riche entre les pauvres ; l’impôt, comme cela est juste, est supporté, en immense majorité, par celui qui possède pour celui qui n’a pas encore le bonheur de posséder : c’est la pompe sans cesse aspirante et foulante qui soutient tous les ans la richesse publique de l’épargne de chaque propriétaire, qui la condense en nuée dans les coffres de l’État, et qui la distribue ensuite en travail, en salaire, en services publics entre les mille mains et les mille bouches des travailleurs qui en vivent. […] Ce ne sont pas les lois ordinaires du roman conçu, médité, écrit par un écrivain consciencieux et humain ; c’est le procédé d’un dieu de la plume, d’un possédé de la verve, qui se dit à soi-même : « À quoi bon composer du vraisemblable ?
»49 Certes, ce n’était pas là le langage d’un disciple révolté ; et pourtant Wagner était déjà, par le cinquième volume qu’il ajoutait en 1841 aux quatre tomes de Heyne, un disciple qui ne se tenait pas pour entièrement satisfait de ce qu’on possédait et qui voulait faire un pas de plus. […] Mais il possède aussi un assez maigre troupeau : « Je me suis contenté jusqu’ici, dit-il, selon que mes ressources me le permettaient, de te faire une statue de marbre ; mais, si mon troupeau redevient fécond et complet, tu auras une statue d’or : Nunc te marmoreum pro tempore fecimus ; at tu, Si fetura gregem suppleverit, aureus esto. […] Dans la Correspondance fort intéressante de Fox et de Gilbert Wakefield, le savant critique, il y a un endroit où Fox, sur une remarque de Wakefield, relative à l’Énéide, lui dit qu’il ne possède pas le Virgile de Heyne et qu’il n‘a jamais eu l’occasion d’y regarder. à quoi Wakefield répond : « Vous m’étonnez extrêmement en me disant que vous n’avez point Heyne.
Je n’y vois qu’une misère effroyable ; ce n’est plus le sentiment triste de la misère, c’est le désespoir qui possède les pauvres habitants : ils ne souhaitent que la mort et évitent de peupler… On compte que par an le quart des journées des journaliers va aux corvées, où il faut qu’ils se nourrissent : et de quoi ? […] On a vu il y a quelques années un abandon de la communauté de Boisse combiné entre les habitants, le seigneur et le décimateur de cette communauté » ; et la désertion serait bien plus grande encore, si la loi ne défendait à tous les taillables d’abandonner un fonds surchargé, à moins de renoncer en même temps à tout ce qu’ils possèdent dans la même communauté Dans le Soissonnais, au rapport de l’assemblée provinciale628, « la misère est excessive ». […] Ces 183 000 familles possèdent 18 millions d’hectares.
. — Telle est l’efficacité de la sensation visuelle proprement dite ; elle la possède si bien qu’elle la manifeste même en l’absence de ses antécédents normaux. Elle la possède donc encore lorsqu’elle est précédée de ses antécédents normaux ; par conséquent, lorsque la tête de mort est réelle et présente, lorsqu’un faisceau de rayons gris et jaunâtres en rejaillit pour aller frapper la rétine, lorsque cette impression de la rétine est propagée le long des nerfs optiques, lorsque l’action des centres sensitifs y correspond, la sensation visuelle ainsi provoquée donnera naissance au même fantôme interne, et le simulacre de tête de mort, qui se produit en nous pendant l’hallucination proprement dite, se produira aussi en nous pendant la perception extérieure, avec cette seule différence que, dans le premier cas, la main, tout autre sens, tout autre observateur appelé à vérifier notre jugement affirmatif, le démentira, tandis que, dans le second, la main, tout autre sens, tout autre observateur appelé à vérifier notre jugement affirmatif, le confirmera ; ce que nous exprimons en disant, dans le premier cas, que l’objet n’est qu’apparent, et, dans le second cas, qu’il est réel. […] Le premier moyen est de lui donner une attitude qui corresponde à tel sentiment, qui soit le commencement de telle action, qui indique la présence de tel objet ; spontanément, il complète cette attitude, et aussitôt il éprouve le sentiment, il fait l’action, il croit à la présence de l’objet. — Vous penchez sa tête un peu en arrière et vous redressez son échine, « aussitôt sa contenance prend l’expression de l’orgueil le plus vif, et son esprit en est manifestement possédé… » En cet instant, « courbez sa tête en avant, fléchissez doucement son tronc et ses membres, et la plus profonde humilité succède à l’orgueil ».
Persuadées qu’elles possèdent le fin mot de l’énigme, ces bonnes âmes sont importunes, empressées ; elles veulent qu’on les laisse faire, elles s’imaginent qu’il n’y a que le vil intérêt et le mauvais vouloir qui empêchent d’adopter leurs systèmes. […] Car on exige de lui sur l’heure ce qu’il ne peut donner, et ce que personne ne possède, la solution du problème du moment. […] Cela n’est pas si révoltant, quand on considère que le barbare se possède peu et a, en effet, infiniment moins de valeur que l’homme civilisé.
2° Certains états anormaux, comme la folie, le délire, le somnambulisme, nous révèlent des connaissances ou des habitudes d’action que nous n’avions aucune conscience de posséder dans notre état normal. […] C’est là une conséquence naturelle chez les hommes qui possèdent un riche fonds de faits particuliers et ont été habitués à conclure de ces faits aux faits nouveaux, sans se préoccuper d’établir les propositions générales correspondantes. » Les propositions générales sont de simples registres des inférences déjà effectuées, et de courtes formules pour en faire d’autres103. […] « La doctrine du libre arbitre met en évidence précisément cette portion de la vérité que le mot nécessité fait perdre de vue, c’est-à-dire la faculté que possède l’homme de coopérer à la formation de son caractère.
Ainsi Clytemnestre prépara le meurtre misérable du premier mari qui la posséda, et je péris quand je croyais rentrer dans ma demeure, bien accueilli de mes enfants, de mes servantes et de mes esclaves. […] que tu es fatale aux mortels, précieuse à qui te possède ! […] La possédée se confond avec le démon qui l’agite.
L’opinion du monde, l’opprobre d’un procès public, l’honneur de sa famille, le respect de son nom, la voilà prête à fouler aux pieds tout cela, pour posséder l’homme qu’elle aime et pour se perdre avec lui. […] Le mari, divorcé ou non, la chose n’y fait rien, d’une drôlesse internationale, mise au ban de toute société honnête, qui traîne et salit son nom sur tous les marchés galants de l’Europe ; plus infâme encore si elle possède vraiment l’odieuse virginité qu’elle affiche ; volant, comme au coin d’un lit, en ce cas, l’argent de ses amants qui n’y entrent pas. […] Il est sinistre, en effet, ce Nourvady, avec sa sombre idée fixe de posséder cette femme, à tout prix.
Je dis plus ; il ne serait peut-être pas difficile de montrer par des exemples, qu’un écrivain français, qui pour paraître bien posséder sa langue affecterait dans ses ouvrages beaucoup de gallicismes (même de ceux qu’on peut se permettre en écrivant), se ferait un style qu’il faudrait bien se garder d’imiter. […] De l’imagination, du goût, de l’oreille ; pourquoi des Français, qui prétendent avoir eu le bonheur de posséder ces qualités en parlant une langue morte et étrangère, ne les ont-ils plus retrouvées quand ils ont hasardé de faire des vers dans la leur ? […] C’est déjà un assez grand inconvénient pour nous, que d’être obligés d’apprendre, bien ou mal, tant de langues différentes ; bornons notre ambition à bien posséder la nôtre, et à savoir la bien manier dans nos ouvrages.
Propriétaire viager ou, si l’on veut, locataire à vie de la maison qu’il occupe, ayant ainsi le sentiment du chez-soi, l’ouvrier du Hartz, en sa qualité de membre de la corporation des mines, « possède sur les richesses minérales et forestières de ce district une sorte d’hypothèque légale qui le garantit, ainsi que sa famille, contre toutes les éventualités fâcheuses qui peuvent se présenter. » Il a non seulement l’habitation et le jardin qui y tient, il a le droit de récolter à titre gratuit dans les forêts domaniales le bois de chauffage ; le blé lui est assuré à un prix invariable et toujours au-dessous de celui du marché. […] Chez les Bachkirs le terme des désirs de la famille la plus laborieuse est de posséder huit ou dix juments, au moyen desquelles elle puisse se soustraire à tout travail agricole et se nourrir presque exclusivement de khoumouis (c’est le nom de la délicieuse boisson qui endort et fait doucement rêver).
Par exemple, la théorie d’une langue, celle du grec, suppose une foule de combinaisons abstraites fort au-dessus des connaissances métaphysiques que possédaient les écrivains, qui parlaient cependant cette langue avec tant de charme et de pureté ; mais le langage est l’instrument nécessaire pour acquérir tous les autres développements ; et, par une sorte de prodige, cet instrument existe, sans qu’à la même époque, aucun homme puisse atteindre, dans quelque autre sujet que ce soit, à la puissance d’abstraction qu’exige la composition d’une grammaire ; les auteurs grecs ne doivent point être considérés comme des penseurs aussi profonds que le ferait supposer la métaphysique de leur langue. […] Il vaut mieux pour le genre humain que les lumières soient généralement répandues ; mais l’émulation de ceux qui les possèdent est plus grande lorsqu’elles sont concentrées.
Leurs scrupules, malheureusement, ne les préservaient pas toujours de la débauche : mais ils ne désiraient pas posséder les femmes qu’ils aimaient, et ils ne tenaient pas du tout à aimer celles qu’ils possédaient.
Il y avait en lui plus d’intuition que de réflexion, plus de sentiment que d’idée, plus d’impétuosité que de raison, en un mot, à mon sens, il a été, en politique, un philosophe, et en littérature, un merveilleux improvisateur, parfois sublime, le plus étonnant que la France ait jamais possédé, mais un improvisateur. […] Il est en effet à l’âge des chefs-d’œuvre, à cette maturité où le poète atteint toute sa puissance de conception et possède en même temps une expérience qui lui manquait dans ses premières années.
Il brûle l’encens devant ces Auteurs illustres qui ont éternisé leur ame pour l’instruction des siécles, & dédaigne ces hommes qui fiers de leur opulence, croyent tout posséder avec elle. […] La plupart des hommes ne pensent que d’après l’habit qu’il portent ; leur profession crée leurs idées ; celui qui a rompu les liens nuisibles au progrès de la raison paroît seul posséder un jugement libre que rien ne tyrannise : Accoutumé à renfermer ses desirs dans le cercle de ses besoins réels il n’en aura point d’illimités.
Nul doute qu’il ne fût possédé au plus haut degré de l’espérance messianique, et que son action principale ne fût en ce sens. « Faites pénitence, disait-il, car le royaume de Dieu approche 302. » Il annonçait une « grande colère », c’est-à-dire de terribles catastrophes qui allaient venir 303, et déclarait que la cognée était déjà à la racine de l’arbre, que l’arbre serait bientôt jeté au feu. […] Il ne semble pas qu’il possédât même en germe la grande idée qui a fait le triomphe de Jésus, l’idée d’une religion pure ; mais il servait puissamment cette idée en substituant un rite privé aux cérémonies légales, pour lesquelles il fallait des prêtres, à peu près comme les Flagellants du moyen âge ont été des précurseurs de la Réforme, en enlevant le monopole des sacrements et de l’absolution au clergé officiel.
La croyance que certains hommes sont des incarnations de facultés ou de « puissances » divines, était répandue ; les Samaritains possédaient vers le même temps un thaumaturge nommé Simon, qu’on identifiait avec « la grande vertu de Dieu 718. » Depuis près de deux siècles, les esprits spéculatifs du judaïsme se laissaient aller au penchant de faire des personnes distinctes avec les attributs divins ou avec certaines expressions qu’on rapportait à la divinité. […] Nous comprenons peu, avec nos natures froides et timorées, une telle façon d’être possédé par l’idée dont on se fait l’apôtre.