Quand un homme se lève de grand matin pour nous annoncer que l’Église éternelle est morte, il est tenu de mettre à la place, dans ce vide profond qu’elle va laisser, quelque chose qui remplisse mieux que cette pancarte : La Déclaration des droits ! […] , qu’il fait peut-être la place à l’Ordre, tout en croyant la faire à la Révolution. […] La femme, qui tient tant de place dans les mœurs d’un peuple ; la femme, qui est presque toutes les mœurs d’une nation, a été pour lui la grande question de son livre. […] Le Christianisme seul, dans le cours des siècles, a répondu aux épouvantes des législations en donnant à la femme sa place juste dans l’organisation du monde. Et cette place a été tellement bien faite que partout où la femme l’a acceptée et gardée les Sociétés ont été aussi morales qu’elles puissent être, et qu’elles doivent devenir d’autant plus immorales dans l’avenir que les femmes voudront sortir de cette place et se croiront le droit de la répudier.
Hugo, auquel la concentration est inconnue, a toujours eu besoin de place pour se mouvoir, et c’est même une des raisons de M. Hugo pour se croire un Léviathan poétique, mais aujourd’hui la difformité de ce talent, disproportionné même à ce qu’il fut, dévoré infiniment plus de place que nous n’en avons à lui donner. […] Il se place résolument en pleine barbarie. […] Certainement, à quelque place de l’histoire littéraire qu’on se mette, il n’a été écrit, à aucune époque, de vers plus radicalement mauvais. […] Hugo, est celle-ci : Que lui a donc rendu le monde moderne en place du talent qu’il lui a sacrifié, en le lui consacrant ?
— Dans une bonne voiture de place, qui m’attend à votre porte, et me ramènera ce soir à la mienne. — Quoi ! […] Il y avait peu de place pour l’histoire dans l’enseignement, on le comprend à la manière dont l’empereur entendait qu’elle fût écrite. […] C’était la première place dans la magistrature de l’île ; il la remplit avec ce zèle religieux et cette sévère intégrité qui sont le fond de son caractère. […] Villemain, appelé à tenir dans la critique littéraire la même place que M. […] Mais ce sont là des ivresses d’un moment qui font bientôt place, dans ce cœur chrétien, à un sentiment plus épuré et plus vrai.
Géruzez n’a peut-être pas fait non plus à ce genre de littérature la place qu’il mérite. […] Nisard appartient à cette école d’écrivains qui sait la valeur d’un mot mis en sa place. […] Nisard n’a pas trouvé davantage de place pour les Contes de Voltaire, pas de place pour Manon Lescaut, pas de place pour Favart et la Chercheuse d’esprit. […] En fait-elle à sa place ? […] Et que les honnêtes gens, à leur place, seraient ennuyeux !
Or, si l’histoire est le gouvernement de Dieu rendu visible, tout y est à sa place ; et si tout y est à sa place, tout y est bien, car tout mène au but marqué par une puissance bienfaisante. […] L’esprit nouveau demandait une plus grande place ; il la conquit à Pharsale. […] Certes, la place est vaste en longueur et en largeur. […] Une très grande place appartient à la loi, à l’État. […] Depuis Herder, tout a marché, grâce à Dieu, tandis qu’Herder est resté à la même place.
Quand elle traversa la place, elle avait le nez pincé et les coins des lèvres tombants. […] Ce couple qui s’exècre et qui ne trouve le calme nulle part, erre de place en place, l’été dans les bains de mer, l’hiver dans les villes du Midi, traînant partout son équivoque et menteuse intimité. […] Place ! place ! […] Lui chercher une place, mais c’est pour moi une bagatelle.
Je leur recommande aussi un procédé dont je me suis toujours trouvé très bien, qui consiste à ne jamais faire faire à leurs personnages ce qu’ils ne feraient pas eux-mêmes s’ils se trouvaient à leur place, et de se mettre toujours à leur place, tout le temps qu’ils écrivent. […] Son dernier mot : terminez l’affaire des tarifs et revenez prendre votre place dans le gouvernement. […] À la vingt-quatrième marche, il vacilla, couvé par tous les regards de la place. […] L’art et la littérature devaient trouver aussi place dans l’examen de toutes ces manifestations de l’esprit humain. […] Enfin, je tiens ce fait de lui-même, commandant une partie du blocus de Mantoue, on lui amena un homme cherchant à pénétrer dans la place.
Une comédienne qui place son argent manque à sa vocation, qui est de le dépenser sans s’inquiéter du reste. […] Voulez-vous sa place sous le lustre ? […] Quelle heureuse place ce Pilier des Halles ! […] Que de philosophie et de poésie à cette place ! […] Il n’a pas une petite place pour cette miniature dans sa veste de chasse !
« En 1788, les recteurs décident que la place de chirurgien-chef sera mise au concours. […] Quoiqu’il eût à peine quarante ans, Ernest Dupré occupait déjà dans l’opinion médicale une place de tout premier plan. […] Il y entre un élément de vénération qui n’a pas sa place au laboratoire. […] Il lui cherche sa place, non pour la détruire, mais pour la situer. […] « Il n’y a que le danger », écrit en mai 1915 le soldat de cinq mois, « pour mettre les nerfs en place.
Elle tient aujourd’hui auprès du public sérieux la place laissée libre par plusieurs autres genres littéraires. […] Ou bien le lyrisme reste seul maître de la place. […] C’est une des époques de prédilection de Beyle : il y place la scène de ses Nouvelles italiennes. […] On a dit que, dans un monde conquis par les découvertes scientifiques, il ne reste plus de place pour la poésie. […] Très probablement, l’histoire de la littérature ne lui fera aucune espèce de place.
Toutes les sollicitations, requêtes, demandes de privilèges et de faveurs aux quelles tout homme en place ou qui approche d’un homme en place, est en butte, sont fondées sur ces deux axiomes : et souvent la bonne foi des solliciteurs est entière ; ils croient raisonner à merveille, et ne peuvent pas concevoir qu’ils demandent l’injuste et l’impossible. […] Pascal conseille ici fort à propos de substituer toujours mentalement les définitions à la place des définis, pour ne pas se tromper par l’équivoque des termes que les définitions ont restreints .
Si les rapports que peuvent avoir les idées entre elles étaient bien limités et bien sensibles, il serait en effet commode de les ranger dans le cadre qu’on a préparé : ce serait comme un jeu de patience, où chaque pièce, par sa dimension, par sa figure, par ses angles rentrants ou sortants, ne peut occuper qu’une place. Mais les idées se tiennent entre elles ou peuvent se tenir par une infinité de relations : elles peuvent occuper dans le plan dessiné une quantité de places. Et il faut choisir entre toutes ces possibilités : il faut couper la communication entre une idée et toutes les autres sauf deux, dont l’une la précédera et l’autre la suivra ; il faut lui fermer toutes les places qu’elle peut occuper, sauf une seule.
« Les alexandrins tiennent la place en notre langue, telle que les vers héroïques entre les Grecs et les Latins. » Voilà la vraie trouvaille de Ronsard en fait de rythme, et le grand service rendu par la Pléiade à la poésie : sous l’influence de l’hexamètre latin, l’alexandrin, création du moyen âge, et dont Rutebeuf avait montré la force et la souplesse, l’alexandrin, délaissé au xive et au xve siècle, ignoré ou à peu près de Marot, est retrouvé, relevé, remis à sa vraie place, qui est la première : ce n’est pas tant le vers noble de notre poésie, que le vers ample ; et c’est par là qu’il vaut. […] Le tort qu’il a eu, c’est d’essayer cela deux siècles et demi trop tôt : nos romantiques ont légué à nos naturalistes le goût des substantifs abstraits mis à la place des adjectifs classiques.
Pour parler dignement de l’outil qui sert si bien cette passion du Beau, je veux dire de son style, il ne faudrait jouir de ressources pareilles, de cette connaissance de la langue qui n’est jamais en défaut, de ce magnifique dictionnaire dont les feuillets, remués par un souffle divin, s’ouvrent toujours juste pour laisser jaillir le mot propre, le mot unique, enfin de ce sentiment de l’ordre qui met chaque trait et chaque touche à sa place naturelle et n’omet aucune nuance. […] Là, du moins, la forme est plus à sa place, et puis le sentiment n’en est jamais absent comme en prose. […] grâce à lui, la raison reprend peu à peu sa place légitime, celle de frein dans les impulsions de l’imagination et de la sensibilité, et c’est là le vrai sens de la boutade : « Mes métaphores se tiennent, tout est là » ; c’est beaucoup du moins ; et comme on l’avait oublié autour de lui, Vigny et Sainte-Beuve exceptés !
Aussi, malgré une mode récente, j’ai l’habitude de laisser à Lamartine la première place parmi les poètes du siècle. […] À tous ces présents de la nature, il a joint d’heureux accidents de fortune ; de bonne heure, il a attiré sur lui l’attention des hommes et conquis une place élevée dans le mouvement des lettres et de la politique ; mais rien de parfaitement solide et de complètement initiateur n’est résulté de son action et de ses travaux. […] Si le poète est incapable d’éteindre le Réel, il est aussi affranchi de sa servitude, et le monde du Rêve infini s’ouvre devant son essor… Aujourd’hui que ces poèmes ont perdu, avec leur magie de nouveauté, le prestige que leur assurait une harmonie profonde entre les aspirations du public et les inspirations de l’auteur, il est malaisé de ranger cette œuvre, tour à tour trop admirée et trop négligée, à sa place définitive.
Essai sur Adolphe Si Benjamin Constant n’avait pas marqué sa place au premier rang parmi les orateurs et les publicistes de la France, si ses travaux ingénieux sur le développement des religions ne le classaient pas glorieusement parmi les écrivains les plus diserts et les plus purs de notre langue ; s’il n’avait pas su donner à l’érudition allemande une forme élégante et populaire, s’il n’avait pas mis au service de la philosophie son élocution limpide et colorée, son nom serait encore sûr de ne pas périr : car il a écrit Adolphe. […] S’il avait choisi de bonne heure une route simple et droite ; si, au lieu de promener sa rêverie sur le monde entier qu’il ne peut embrasser, il avait mesuré son regard à son bras ; s’il s’était dit chaque jour en s’éveillant : Voilà ce que je peux, voilà ce que je voudrai ; s’il avait marqué sa place au-dessous de Newton, de Condé ou de Saint-Preux ; s’il avait préféré délibérément la science, l’action ou l’amour ; s’il avait épié d’un œil vigilant le premier éveil de ses facultés, s’il avait démêlé nettement sa destinée, s’il avait marché d’un pas sûr et persévérant vers la paix sereine de l’intelligence, l’énergique ardeur de la volonté ou le bonheur aveugle et crédule, il ne serait pas vain, il ne dédaignerait pas. […] À peine maître de la place qu’il a si vivement assiégée, il ne saura que faire de sa victoire ; après avoir constaté par la possession un amour si ardemment désiré, il tremblera devant la durée de son engagement.
Les uns sont avant tout préoccupés de la logique ; à lire leurs ouvrages, on est tenté de croire qu’ils n’ont avancé que pas à pas, avec la méthode d’un Vauban qui pousse ses travaux d’approche contre une place forte, sans rien abandonner au hasard. […] J’ai déjà eu l’occasion d’insister sur la place que doit garder l’intuition dans l’enseignement des Sciences mathématiques. […] C’est ainsi que les anciennes notions intuitives de nos pères, même lorsque nous les avons abandonnées, impriment encore leur forme aux échafaudages logiques que nous avons mis à leur place.
L’affreux village de Medjdel a sans doute conservé le nom et la place de la bourgade qui donna à Jésus sa plus fidèle amie 399. […] Quant à Bethsaïde et Capharnahum, c’est en vérité presque au hasard qu’on les place à Tell-Hum, à Aïn-et-Tin, à Khan-Minyeh, à Aïn-Medawara 402. […] Il est douteux qu’on arrive jamais, sur ce sol profondément dévasté, à fixer les places où l’humanité voudrait venir baiser l’empreinte de ses pieds.
Persuadé que l’inclination du roi pour elle a été le premier motif de sa nomination à la place de gouvernante d’enfants naturels qu’il avait l’intention de reconnaître et d’élever au niveau de ceux de madame de La Vallière, je le suis aussi que le choix fut déterminé par un motif plus sérieux, et qu’il fut fait dans le même esprit que celui de madame de Montausier pour la place de gouvernante des enfants de France. […] Ici se place une observation essentielle : c’est qu’en 1669, quand le roi autorisa de premières démarches pour engager madame Scarron à se charger de ses enfants naturels, aucune apparence de dévotion ne se rencontrait dans la société qu’elle fréquentait ; et j’ajoute qu’aucune apparence de dévotion n’avait atteint ni le roi, ni madame Scarron ; de sorte que la gloire de sa désignation appartient tout entière à l’honnêteté des mœurs et à la bonne compagnie. […] Voulant être distinguée du roi, lui être agréable, parce qu’elle l’aimait, mais voulant son estime et conserver le respect d’elle-même, pouvait-elle employer des moyens à l’usage des femmes ordinaires, mettre en pratique cet art de plaire, cet art de la cour, qui comprend l’art de nuire à tout ce qui n’est pas soi ; à intriguer contre une favorite a qui et le doit sa place ; à lui tendre des pièges, à lui opposer d’autres femmes dont elle pourra avoir bon marché, à rechercher les occasions de s’introduire près du maître, de surprendre ses regards, de les attirer par des soins et des parures qui déguisent son âge ; à se faire vanter, célébrer par des prôneurs ; à se distinguer tantôt par la finesse de la louange, tantôt par son enthousiasme, toujours par l’à-propos ; à rappeler d’une dis tract ion, à faire revenir d’un caprice par des bouderies, par des querelles, par des minauderies ; en un mot, à pratiquer le manège d’une coquetterie subalterne ?
En descendant, il s’est remis à sa place : il pique les assiettes qu’il était fait pour servir. […] Le père prend pour lui la faute de son fils ; à son insu, il se battra à sa place. […] Ajoutez à l’impression que produit cette scène si touchante l’attendrissement du père qui va se battre tout à l’heure, à deux pas de là, et qui ne sait trop s’il reverra son enfant ; puis le désespoir d’André apprenant que le comte se bat à sa place, et la rentrée fêtée du père converti dans sa jeune famille.