parce que le premier de nos Satiriques l'aura tourné en ridicule ; parce que Chapelle & Bachaumont auront plaisanté avec esprit sur son Gouvernement de Notre-Dame de la Garde : il ne s'ensuit pas qu'on doive oublier tout le mérite qu'il avoit, à plusieurs égards.
En traitant du génie de cette religion, comment pourrions-nous oublier son influence sur les lettres et sur les arts ?
« L’intention des chefs est qu’alors la gaieté des enfants soit sans entraves, et je n’ai pas de peine à croire que dans ces moments la discipline soit oubliée, qu’il se fasse mille espiègleries, qu’il y ait quelque dégât, que les gouverneurs soient inquiétés et tourmentés, qu’à la première issue qui se présente les élèves ne s’échappent de leurs yeux et ne se livrent à toutes leurs fantaisies.
Si vous différez, vous oublierez de faire des fleurs et des animaux, et vous n’apprendrez point à faire de l’histoire et des hommes.
Il oublie que Voiture, tant qu’il vécut, tint le dé en ce monde-là ; or, on sait, en fait d’esprit, mais aussi en fait de goût, ce qu’était Voiture. […] Enfin je ne veux pas qu’il en pense rien, sinon qu’il est de mes amis, et je vous prie de n’oublier non plus de lui ôter cela de la tête, si tant est qu’il l’ait, que j’ai oublié votre message. […] ) — Je ne veux pas oublier de vous dire que j’ai trouvé terriblement de l’esprit au comte de Saint-Paul. » Pour ajouter à l’intérêt de cette lettre, qu’on veuille bien se rappeler la situation précise : M. de Saint-Paul, fils de Mme de Longueville et probablement aussi de M. de La Rochefoucauld, venant voir Mme de La Fayette, qui passe pour l’objet d’une dernière passion tendre, et qui voudrait le voir détrompé… ou trompé là-dessus. — Le terriblement d’esprit du jeune prince allait droit, je pense, au cœur de Mme de Longueville, à qui le post-scriptum au moins, et le reste aussi sans doute, fut bien vite montré. […] Mais Versailles et la Poétique de Despréaux, et l’opéra de Lulli, et les gaietés sur la Marans sont toujours vite interrompus par cette misérable santé qui, avec sa fièvre tierce, ne permet pas qu’on l’oublie, et devient peu à peu l’occupation principale.
Le poëte recherche les sentiers de traverse le plus souvent ; le romancier s’oublie au cercle du foyer, ou sur le banc du seuil devant, lequel il raconte. […] Les soirs même de dimanche, en cet Arsenal toujours gracieux et embelli, s’il s’oublie quelquefois, comme par mégarde, à causer et à rajeunir, si, debout à la cheminée, il s’engage en un attachant récit qui ne va plus cesser, à mesure que sa parole élégante et flexible se déroule, écoutez, assistez ! […] Pascal, à l’article V, demeure hautement accusé d’avoir pillé Montaigne ; son plagiat est même proclamé le plus évident et le plus manifestement intentionnel que l’on connaisse, et l’on oublie que Pascal, mort depuis plusieurs années lorsqu’on recueillit et qu’on publia ses Pensées, ne peut répondre des petits papiers qu’on y inséra et qui, pour lui, n’étaient que des notes dont il se réservait l’usage. […] On se néglige, il semble qu’on s’oublie, Et cependant on se possède mieux. […] Cette coulante doctrine de la facilité naturelle, cet épicuréisme de la diction, si bon à opposer en temps et lieu au stoïcisme guindé de l’art, a pourtant ses limites ; et quand l’auteur dit qu’en style tout effort est contraire au bien, il n’entend parler que de l’effort qui se trahit, il oublie celui qui se dérobe.
La beauté est la royauté de la nature, peu importe qu’elle soit née, comme Cléopâtre, sur un trône, ou, comme la Vénus antique, de l’écume de l’onde, ou, comme lady Hamilton, de la lie des vices ; dès qu’elle paraît elle règne ; dès qu’elle sourit elle enchaîne ; que l’on soit Phidias, Raphaël, Dante, Pétrarque, César, Nelson, lord Byron, Bonaparte, Chateaubriand, elle consume Phidias de la passion de reproduire le beau dans le marbre ; elle divinise Raphaël sous le regard de la Fornarina, et elle le fait mourir, comme le phénix, dans la flamme de deux beaux yeux ; elle allume à douze ans dans le Dante un foyer inextinguible d’un seul rayon de sa Béatrice ; elle sanctifie Pétrarque dans la mystique adoration de Laure ; elle arrête d’une caresse, en Égypte, ce César que ni l’Italie, ni la Grèce, ni l’Afrique, ni l’Espagne n’avaient la puissance d’arrêter ; elle corrompt Nelson dans les délices de Naples et contrebalance dans le cœur de son héros la gloire de Trafalgar ; elle fait oublier, à Ravenne, la poésie à lord Byron dans la contemplation de cette poésie vivante qu’on appelle la Guicioli ; elle fait oublier à Chateaubriand son ambition, son égoïsme et sa vieillesse dans le rayonnement déjà amorti de Juliette. […] Son costume faisait aux yeux partie de sa personne ; il ne la parait pas, il la vêtissait ; on voyait qu’elle n’y avait pas songé, ou, si elle y avait songé, elle n’avait eu en vue que de la faire entièrement oublier ou de la confondre avec elle-même dans un tel accord de forme et de couleurs que sa robe et elle ne fissent qu’un dans le regard. […] — Non, repris-je ; si je l’avais rencontrée je ne l’aurais jamais oubliée. […] Elle me protégea vivement, ainsi que la duchesse de Broglie, son amie, auprès des ministres d’alors pour obtenir mon premier poste diplomatique ; je ne l’ai jamais oublié, et j’ai eu une occasion de reconnaître tant de bonté dans une circonstance où il me fut donné d’être agréable à mon tour à sa famille1.
Il n’avait pas assez respecté la majesté du génie au repos ni la sainteté de la vieillesse ; il avait oublié qu’il vieillirait lui-même un jour, et que la pire des insultes est de comparer sa force naissante à la faiblesse d’un homme hors de combat. […] La facilité du poète à oublier les amitiés et les services quand sa gloire ou quand sa fortune étaient en jeu n’éclata pas moins envers Mme de Montespan. […] non, reprit-il ; mais c’est toujours la première chose que j’oublie quand je la vois ! […] On rougit de voir la religion et le génie oublier ainsi jusqu’à la pudeur de la reconnaissance, et triompher avec ce qui s’élève, en secouant la poussière de leurs souliers sur ce qui tombe. […] Dans un lieu séparé de profanes témoins Je mets à les former mon étude et mes soins ; Et c’est là que, fuyant l’orgueil du diadème, Lasse de vains honneurs et me cherchant moi-même, Aux pieds de l’Éternel je viens m’humilier, Et goûter le plaisir de me faire oublier.
Durantin, lequel l’agréa, sauf cette condition que son nom figurerait sur la brochure, car nous avions oublié la brochure qui ne pouvait pas paraître sans nom d’auteur. […] « Tant que l’astre projette ses feux puissants, il oublie le terme fatal et savoure l’éphémère allégresse, comme il boirait le Paradis éternel. […] As-tu donc oublié que j’ai failli mourir en lui donnant le jour ? […] Jamais je n’oublierai l’expression de sévérité que prit la figure du commandant quand il ajouta, en me mettant la main sur l’épaule : “Vous commanderez un jour, jeune homme ! […] Pouvions-nous oublier le règne de Louis XIV et l’Europe subjuguée bien moins par nos armes que par notre langue, nos mœurs et notre génie ?
Personne n’a remplacé un tel homme et ne fera oublier son œuvre. […] Pourrais-je oublier ces deux petits cyprès que j’ai vus aux environs d’Aubagne ? […] J’oubliais Chaumeix. […] Il n’oubliait jamais de répéter en s’en allant : « Filons… historien juif ». […] Un soir, en se couchant, il se rappela qu’il avait oublié d’accomplir ce rite.
Cervantes, que vous imitez, et Shakspeare, que vous rappelez, ont eu cette finesse, et l’ont peinte ; dans cette large moisson que vous rapportez à pleins bras, vous avez oublié les fleurs. […] Ils notent exactement les particularités de l’individu et les marquent d’une empreinte si précise que leur personnage devient un type que l’on n’oublie plus. […] Tout d’un coup il s’oubliait, se baissait, et enlevait dans sa main le soulier d’une dame. […] Vous l’entendrez blâmer un de ses amis d’avoir oublié le nom de Jésus-Christ, en récitant les grâces. […] Oubliez donc les contours, ils ne sont que des lignes ; le corps n’est ici que pour traduire l’esprit1099.
Barasdine s’en saisit avec vivacité, et dit: « Celle-ci ne sera pas inutile ; le général est Français, et il n’a point oublié sa patrie ; les accents de votre voix suffiront seuls pour le bien disposer. […] quelles étaient ces spéculations séduisantes qui, au milieu des glaces du Nord, avaient eu le pouvoir de lui faire oublier jusqu’à sa patrie ? […] Mais le ministre oublie de lui en donner le titre officiel ; il s’embarque et arrive après des tempêtes. […] Je n’oublierai jamais que tu as marché nu-pieds jusqu’à la Rivière-Noire, pour demander la grâce d’une pauvre esclave fugitive. […] C’est qu’il avait oublié l’art, et écouté seul l’art des arts, c’est-à-dire la nature.
On oublie la Collection des Histoires byzantines du P. […] Son extérieur était de ceux qu’on n’oubliait pas. […] Son nom fut vite oublié, mais son œuvre n’avait pas été vaine. […] Édouard Estaunié n’a jamais oublié l’intérêt qu’il y prit. […] On oublie que les grandes écoles ne donnent réellement un « esprit » qu’à ceux qui n’en avaient pas.
Qu’il est doux d’oublier la vérité ! […] Affublons Tartufe, Harpagon, les médecins, de gros ridicules ; le ridicule fera oublier le vice : ils feront plaisir au lieu de faire horreur. […] « Es-tu sûre que sir Rowland n’oubliera pas de venir, et qu’il ne mollira pas s’il vient ? […] Quoi de plus difficile, étant laid, que de faire oublier à une jeune fille qu’on est laid ? Il y a quelque chose de plus difficile, c’est de faire oublier à un créancier qu’on lui doit de l’argent.
Parmi les joyaux destinés à faire briller ces enchères, et qui en formaient (pour ainsi dire) le bouquet, figurait, — les amateurs ne l’ont pas oublié, — un Vauquelin de la Fresnaie, ce livre, ce rare avis de la bibliophilie, sans lequel il n’y aurait pas de vraie vente à sensation, et dont on dit toujours, à chaque nouvel exemplaire qui en reparaît, qu’on n’en connaît que trois ou quatre au monde.
Les vers libres qu’il lui offre sont gauches quelquefois, émus souvent, exquis toujours, et des leitmotivs de sa passion nous gardons de doux murmures : Rien qu’une fois, elle a passé dans le chemin, Elle a chanté de charmantes caresses, Elle a fait oublier l’ennui morne des heures.
Alexandre Vinet Plus est grand le vice du sujet (La Divine Épopée), plus nous admirons la puissance du poète qui parvient presque à le faire oublier.
Pouvoit-il oublier que ces Pensées ne sont que des éruptions intermittentes d’un esprit accoutumé à réfléchir profondément, & auxquelles les infirmités continuelles de l’Auteur n’ont pas permis de donner de la liaison & de la suite, comme il en avoit l’intention ?
Dans ses autres Discours, il parle rarement au cœur ; jamais ou presque jamais de ces expressions vigoureuses, de ces images frappantes, de ces traits hardis qui supposent une ame fortement pénétrée de son sujet, & capable de maîtriser les autres ames Il a paru trop oublier que les hommes déferent moins à la raison qu’à leurs passions ; que ce n’est qu’en agitant leur cœur, qu’on parvient à les dominer ; que l’homme éloquent n’est pas celui qui raisonne avec justesse, mais celui qui rend avec énergie ce qu’il sent avec vivacité ; celui qui nous échauffe par la chaleur du sentiment & de l’imagination, non celui qui nous instruit & nous éclaire par la lumiere & la vérité de ses raisonnemens.
Gaston Paris, dont nous sommes tous les disciples, ce qui n’est pas une raison pour qu’il ait approuvé autre chose dans mon Esthétique que le soin avec lequel j’ai défendu les principes que m’ont donnés ses travaux ; c’est plutôt en manière de dédicace, et alors je n’oublierais pas M.