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1742. (1927) Approximations. Deuxième série

En quoi elle tient de sa mère, dont le dernier ouvrage se caractérise avant tout par la hardiesse de cette jonction. […] Il faut que tu les aimes tous les trois, elle, mon père et ma mère ; car ils ont désiré mon bonheur avec un soin, un dévouement, une passion de tous les jours ; et si je n’ai pas su les récompenser en me laissant combler des dons que leur amour imaginait, si je leur ai résisté, si j’ai déconcerté leur espoir, j’ai besoin que, par-dessus moi, ils obtiennent justice. […] Le poignant intérêt du récit de Schlumberger vient de ce que tout le temps on y sent chez le narrateur le désir de rendre à chacun des siens ce qui lui est dû, de lui créer une autonomie, de surmonter enfin cette voix du sang dont les oracles sont chargés de tant d’injustes et aveugles humeurs : qu’il s’agisse du père, de la mère, de la femme, il semble que la main qui opère ne touche jamais une plaie que pour la guérir, pour purifier un souvenir avant de l’accrocher, net, intangible désormais, dans le musée idéal de la mémoire : seule, sa plaie à elle, elle ne peut la guérir en l’opérant, et sur tout le livre s’étend cette mélancolie de la maturité criblée où les blessures que l’on a faites ne laissent pas moins de cicatrices que celles que l’on a reçues.

1743. (1883) La Réforme intellectuelle et morale de la France

Je voudrais que, dans les élections primaires, l’homme marié votât pour sa femme (en d’autres termes, que sa voix comptât pour deux ), que le père votât pour ses enfants mineurs ; je concevrais même la mère, la sœur confiant leur pouvoir à un fils, à un frère majeurs.

1744. (1848) Études critiques (1844-1848) pp. 8-146

Où Vénus Astarté fille de l’onde amère Secouait, vierge encor, les larmes de sa mère, Et fécondait le monde en tordant ses cheveux ?

1745. (1895) Les confessions littéraires : le vers libre et les poètes. Figaro pp. 101-162

Mer et aimer rimaient du temps de Ronsard, ils ne riment plus ; mère et amer riment parfaitement et de [la] façon la plus riche — car, et surtout à la fin des mots (ceci est absolu), il n’y a plus de muettes en français.

1746. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre IV. La philosophie et l’histoire. Carlyle. »

. —  Les autres, après avoir fouillé violemment et confusément dans les détails du groupe, s’élancent d’un saut brusque dans l’idée mère.

1747. (1899) La parade littéraire (articles de La Plume, 1898-1899) pp. 300-117

Voilà pourquoi, s’il y a des mères qui songent peut-être à concevoir un dieu, nous voyons aussi des poètes qui s’efforcent de créer des ouvrages mémorables, qui seront les Bibles de demain.

1748. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre sixième »

La raison est l’âme des écrits, le vrai en est l’unique objet : telle fut la doctrine fondamentale de Boileau ; c’est la loi mère de toutes les autres, lesquelles ne sont que des manières diverses d’appliquer la raison à la diversité des genres, et de rechercher le vrai qui convient à chacun.

1749. (1927) Les écrivains. Deuxième série (1895-1910)

Sa mère était vénitienne ; il aimait boire… Quant à Martial : ……………………………………………………………………… Il marchait seul, parmi les autres hommes. […] Charles-Louis-Philippe… La Mère et l’enfant, La Bonne Madeleine, Bubu de Montparnasse, ce sont vraiment des livres d’une émotion nouvelle… Voilà qui apporte quelque chose de neuf à la littérature d’aujourd’hui… Eh bien !

1750. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) «  Chapitre treizième.  »

Il ira, cet ignorant dans l’art de bien dire, avec cette locution rude, avec cette phrase qui sent l’étranger, il ira en cette Grèce polie, la mère de la philosophie et des orateurs ; et, malgré la résistance du monde, il y établira plus d’églises que Platon n’y a gagné de disciples par cette éloquence qu’on a crue divine.

1751. (1923) L’art du théâtre pp. 5-212

Il est le noyau, la cellule mère et rien ne peut le remplacer.

1752. (1910) Muses d’aujourd’hui. Essai de physiologie poétique

L’enfant naît ; la mère nous dit son émotion et sa douleur : Te voilà hors de l’alvéole, Petite abeille de ma chair ; Je suis la ruche sans parole Dont l’essaim est parti dans l’air.

1753. (1868) Curiosités esthétiques « II. Salon de 1846 » pp. 77-198

Raphaël a décoré des murs immenses ; mais il n’eût pas fait si bien que lui le portrait de votre mère, de votre ami, de votre maîtresse.

1754. (1878) Leçons sur les phénomènes de la vie communs aux animaux et aux végétaux. Tome I (2e éd.)

Pasteur a vu « que lorsqu’un cristal a été brisé sur l’une quelconque de ses parties et qu’on le replace dans son eau mère, on voit, en même temps que le cristal s’agrandit dans tous les sens par un dépôt de particules cristallines, un travail très actif avoir lieu sur la partie brisée ou déformée ; et en quelques heures il a satisfait, non seulement à la régularité du travail général sur toutes les parties du cristal, mais au rétablissement de la régularité dans la partie mutilée. » De sorte que la force physique qui range les particules cristallines suivant les lois d’une savante géométrie a des résultats analogues à celle qui range la substance organisée sous la forme d’un animal ou d’une plante.

1755. (1884) Les problèmes de l’esthétique contemporaine pp. -257

Quelqu’un a-t-il jamais lu ces vers de Musset : Partons, nous sommes seuls, l’univers est à nous Voici la verte Écosse, et la brune Italie, Et la Grèce, ma mère, où le miel est si doux… sans éprouver une vague nostalgie des pays poétiques et inconnus, un besoin d’horizons nouveaux ? […] — Cette thèse ne saurait se soutenir sans parti pris : il faudrait alors revenir à l’opinion de ce médecin, ennemi du suffrage universel, qui représentait l’« agitation électorale » comme devant s’étendre à l’esprit même des mères de famille, troubler le lait des nourrices et donner des convulsions aux électeurs encore naissants.

1756. (1856) À travers la critique. Figaro pp. 4-2

Il exerce, en un mot, la même fascination sur la salle entière que sur les grands et le peuple qui l’environnent dans la Cathédrale de Munster, et sur sa pauvre mère éplorée, etc.

1757. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion statique »

Thémis, déesse de la justice humaine, est la mère des Saisons (Hôrai) et de Dikè, qui représente aussi bien la loi physique que la loi morale.

1758. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Troisième série

Il aime se rappeler son enfance qui fut moitié de petit ouvrier, moitié de petit paysan : « J’ai vu ma mère faire tout cela. […] Et cependant mon père était un brave homme, ma mère une digne femme, mes aïeux d’honnêtes paysans ; moi, je n’ai jamais trompé un enfant, fait tort à une jeune fille, manqué à un vieillard, ni calomnié un adversaire.

1759. (1914) L’évolution des genres dans l’histoire de la littérature. Leçons professées à l’École normale supérieure

Il ne voulait pas aussi qu’il rimât les mots qui avaient quelque convenance, comme montagne et campagne, défense et offense, père et mère, toi et moi, … et sur la fin il était devenu si rigide en ses rimes qu’il avait même peine à souffrir que l’on rimât / les verbes de la terminaison en er qui avaient tant soit peu de convenance, comme abandonnée, ordonner et pardonner, et disait qu’ils venaient tous trois de donner. […] Leur mère avait tout ; on ne lui conteste pas la grâce, mais à ceux qui voudraient lui refuser le sérieux et la raison, il n’est pas mal d’avoir à montrer la raison dans Mme de Grignan, la raison toute seule, sur le grand pied et dans toute sa pompé.

1760. (1906) L’anticléricalisme pp. 2-381

Relativement aux Français, c’était une faute : « C’est une mère. […] Toute l’essence de Tartuffe est dans ces vers, qui sont, à tout égard, dignes de Lucrèce : Il m’enseigne à n’avoir d’affection pour rien ; De tout attachement il détache mon âme, Et je verrais mourir mère, enfants, frère, femme, Que je m’en soucierais autant que de cela.

1761. (1904) En lisant Nietzsche pp. 1-362

« Car la vie est un rêve, un peu moins inconstant », comme dit Pascal, c’est-à-dire un peu plus réprimé et corrigé par le non-moi qui, sans doute, n’est pas vous ; et si vous êtes plus libres dans vos rêves qu’en veille, ce n’est pas une raison pour ne croire à votre libre arbitre que quand vous êtes éveillé ; et en dernière analyse « le libre arbitre a son père et sa mère dans la fierté et dans l’orgueil humain ». — Il y a à remarquer que cette théorie du libre arbitre a quelque chose, inconsciemment peut-être, mais a quelque chose « d’antireligieux. » Sa prétention c’est de « créer à l’homme un droit de se prendre pour condition et pour cause de ses actes supérieurs ». […] Toute la doctrine de la responsabilité est attachée à cette psychologie naïve, à savoir que la volonté seule est une cause et qu’il faut avoir conscience que l’on a manifesté sa volonté pour pouvoir se considérer soi-même comme une cause ». — Et l’on voit bien qu’à remonter à son principe, au principe de l’illusion qui le constitue, « le libre arbitre a son père et sa mère dans la fierté et dans l’orgueil humains. — Je dis cela peut-être un peu trop souvent ; mais ce n’est pas une raison pour que ce soit un mensonge. » On devrait réfléchir à cela quand on se trouve en présence d’un criminel qu’on a à juger.

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