/ 2011
242. (1890) La bataille littéraire. Deuxième série (1879-1882) (3e éd.) pp. 1-303

Nous ne voulons pas donner le dénouement du roman pour laisser quelque surprise à nos lecteurs. […] Anatole France, un écrivain délicat et consciencieux dont nous avons déjà eu l’occasion d’entretenir nos lecteurs. […] Le spectateur ne fait que le succès, le lecteur fait la renommée. […] Le lecteur veut être convaincu. […] Le lecteur annoncé était Alfred de Musset.

243. (1936) Histoire de la littérature française de 1789 à nos jours pp. -564

La bourgeoise de Genève ne remue pas son lecteur ou sa lectrice comme le citoyen de Genève, mais l’instruit mieux. […] Lecteurs, nous avons épuisé Mme de Staël, nous n’avons pas épuisé Constant. […] Il était lecteur et disciple fervent de Saint-Martin. […] Le lecteur et la lectrice de 1820 restent ainsi dans une famille et un climat connus. […] Le verdict de l’aristarque coïncide ici avec le sentiment moyen du lecteur parisien d’aujourd’hui.

244. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXVII » pp. 306-312

Des lecteurs plus fidèles aux souvenirs libéraux et moins désabusés sur le compte de ces doctrines auraient droit de s’étonner pourtant de la facilité avec laquelle l’historien absout le héros. […] — Le duc de Raguse vient de publier sous ce titre, Esprit des institutions militaires, un volume plein de feu, d’intérêt, de science et d’agrément ; il rend accessibles au lecteur une foule de questions qui semblaient du ressort des hommes spéciaux ; il fait comprendre la guerre, l’empereur, Wellington, le génie de la France et de l’Angleterre.

245. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — L’abbé Boileau, et Jean-Baptiste Thiers. » pp. 297-306

Les tableaux de l’Arétin* sont, à certains égards, moins indécens que les peintures que cet abbé y présente à ses lecteurs. […] On est étonné que l’abbé Boileau, qu’un homme de son état & d’un genre de vie sévère, ait osé les mettre sous les yeux du lecteur.

246. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. FAURIEL. —  première partie  » pp. 126-268

En parlant de la sorte, nous ne le surfaisons à l’avance en rien, et le lecteur va juger tout à l’heure par lui-même de l’exactitude de notre jugement. […] Dans tout ce qui suit, nous ne craindrons pas de nous étendre à plaisir sur les relations avoisinantes de Fauriel, et d’y introduire le lecteur à son sujet. […] Je ne sais qui l’a remarqué spirituellement, il faut que l’auteur ait quelquefois de l’impatience pour que le lecteur n’en ait pas. Cela est vrai surtout du lecteur français, le plus impatient de tous. […] Il aspire à faire passer son lecteur par les mêmes préparations que lui et à ne rien lui en épargner.

247. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre I. Succès de cette philosophie en France. — Insuccès de la même philosophie en Angleterre. »

Il n’est pas un simple érudit, plongé dans ses in-folio à la façon allemande, un métaphysicien enseveli dans ses méditations, ayant pour auditoire des élèves qui prennent des notes, et pour lecteurs des hommes d’étude qui consentent à se donner de la peine, un Kant qui se fait une langue à part, attend que le public l’apprenne, et ne sort de la chambre où il travaille que pour aller dans la salle où il fait ses cours. […] Il pense par explosions ; ses émotions sont des sursauts, ses images sont des étincelles ; il se lâche tout entier, il se livre au lecteur, c’est pourquoi il le prend. […] On peut le comparer à ces balances de précision qu’un souffle dérange, mais auprès desquelles tous les autres appareils de mesure sont inexacts et grossiers  Dans cette balance délicate, il ne faut mettre que des poids très légers, de petits échantillons ; c’est à cette condition qu’elle pèse rigoureusement toutes les substances ; ainsi fait Voltaire, involontairement, par besoin d’esprit et pour lui-même autant que pour ses lecteurs. […] Mais quel attrait pour des Français, pour des gens du monde, et quel lecteur s’abstiendra d’un livre où tout le savoir humain est rassemblé en mots piquants   Car c’est bien tout le savoir humain, et je ne vois pas quelle idée importante manquerait à un homme qui aurait pour bréviaire les Dialogues, le Dictionnaire et les Romans. […] Leur expérience complétait le livre, et, par la collaboration de ses lecteurs, l’auteur avait la puissance qui lui manque aujourd’hui.

248. (1912) Enquête sur le théâtre et le livre (Les Marges)

D’abord, averti par un flair déjà divin, le lecteur a su qu’il fallait lire, ce qui déjà est don de prince. […] Un lecteur de feuilletons ne me semble pas d’un niveau supérieur à celui d’un amateur de vaudevilles. […] Sans doute, s’il est vrai que les choses scéniques détournent bien des lecteurs, accaparent bien des cerveaux, retiennent bien des attentions qui n’ont plus, dès lors, le temps, ni la force de s’abandonner aussi librement ailleurs. […] Il lui faut encore se diminuer dans son idéal toujours et sans cesse, au gré des directeurs de spectacles, des acteurs et surtout des actrices en renom, renoncer à toutes audaces et se résoudre à plaire à une collectivité qui ne peut être, quoi qu’il advienne, qu’une médiocratique agglomération de jugements, effarouchables à l’excès et n’ayant rien de comparable au jugement individuel, salutaire, élevé, supérieur et indépendant d’une élite de lecteurs. […] Elle demande à ses lecteurs s’il n’eût pas été préférable de conserver chez nous le goût des livres.

249. (1857) Articles justificatifs pour Charles Baudelaire, auteur des « Fleurs du mal » pp. 1-33

Cette opinion, qui n’est point une simple conjecture, mais une induction tirée du développement de l’histoire, est qu’à mesure que le nombre des lecteurs augmente, à mesure que le livre imprimé, en se répandant, convertit les auditeurs impressionnables, passionnables, en lecteurs méditatifs et réfléchis, la poésie doit concentrer son essence et restreindre son développement. […] Le vers négligé, mou, le versus pedestris du dix-huitième siècle, qui convient si bien à la muse décrépite de l’abbé Delille et de ses imitateurs, n’est plus de mise dans un poème court destiné à frapper l’esprit des lecteurs par une succession rapide d’images intenses. […] Mais non : le journal va chercher ses lecteurs, le livre attend les siens Et parce qu’on a publié Modeste Mignon dans le Journal des Débats et le Lis dans la vallée dans la Revue de Paris, faut-il ne pas écrire Splendeurs et Misères des courtisanes, un des plus beaux livres d’analyse sociale qui aient été écrits en langue française ? […] Pour nos lecteurs, heureusement, la connaissance est déjà faite : ils n’ont point oublié le magnifique extrait que la Revue française a donné des Fleurs du mal il y a trois mois4. […] Contraint de me borner, pour avoir été trop bavard, je ne puis que renvoyer les lecteurs aux pièces intitulées les Phares, la Muse malade, le Guignon, la Vie antérieure, De profundis clamavi, le Balcon, la Cloche fêlée, etc.

250. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand. (Berlin, 1846-1850.) » pp. 144-164

Darget (lecteur et secrétaire du roi de Prusse) vienne m’en parler, je l’assurerai fort que je n’ai nulle connaissance de cette impression, et que je vais prendre les ordres du roi pour empêcher qu’elle ne s’exécute en France. […] Un autre défaut de cette édition, et un défaut grave, c’est de manquer de cartes stratégiques et de plans des lieux, ce qui rend la lecture de ces campagnes fastidieuse et stérile pour la plupart des lecteurs. […] Enfin, s’il est permis d’entrer dans ces particularités, qui ne laissent pas d’avoir leur importance pour le lecteur, je me plaindrai, au nom de la France, qu’il n’existe pas à Paris un seul exemplaire complet des volumes jusqu’ici publiés. […] À côté de la grande édition in-4º, il s’en publie une en plus petit format, à l’usage du commun des lecteurs ; cette petite édition, qui se vend, est plus facile à trouver.

251. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ALFRED DE MUSSET (La Confession d’un Enfant du siècle.) » pp. 202-217

Il y est tombé tout d’abord, ce me semble, dans le premier chapitre, où le technique des expressions chirurgicales repousse et trompe même le lecteur : le reste de l’ouvrage, en effet, ne répond pas exactement à cette préface. […] Il y a eu là une substitution subtile, qui rentre dans le défaut de continuité dont j’ai parlé ; le cœur ému du lecteur ne s’y prête pas. […] « Tu ne t’entends pas trop mal, se dit Octave à lui-même en se rendant justice, à exalter une pauvre tête, et tu pérores assez chaudement dans tes délires amoureux. » Le dernier chapitre, ce dîner en tête-à-tête de Brigitte et d’Octave aux Frères Provençaux, a du charme ; la résolution d’Octave part d’un noble cœur ; il s’immole, il renonce à Brigitte, il l’accorde à Smith, et, malgré l’étrangeté du procédé, on n’y sent pas le manque de délicatesse ; mais pour qu’on pût jouir un peu de cette situation nouvelle et plus reposée, pour qu’on y crût et qu’elle fût définitive aux yeux du lecteur, il faudrait des garanties dans ce qui précède.

252. (1858) Cours familier de littérature. V « Préambule de l’année 1858. À mes lecteurs » pp. 5-29

À mes lecteurs I Une partie de la presse retentit, depuis quelques semaines, d’un concert de malveillance, et d’un redoublement d’invectives contre cette modeste publication, et surtout contre son auteur. […] Nous croyons devoir donner ici à nos lecteurs la bagatelle poétique ci-jointe ; nous l’écrivîmes dans une heure de loisir dérobée à l’étude pendant ces dernières matinées d’automne. […] Que le lecteur juge de ce grand crime commis en badinant ; il y a des gens auxquels il n’est permis ni de pleurer ni de sourire !

253. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Leconte de Lisle, Charles-Marie (1818-1894) »

Et ainsi se déroulent devant le lecteur, dans leur souverain éclat, dans leur fidélité locale, dans leurs couleurs éblouissantes, ces poèmes merveilleux et si profondément originaux, où revivent tour à tour les religions mortes, et leurs luttes et leurs reflets sur les civilisations éteintes ; où l’idée philosophique apparaît d’elle-même, sans jamais nuire à l’effet poétique, qui demeure toujours le premier but. […] Cela suffit à expliquer pourquoi les Poèmes antiques et les Poèmes barbares n’ont jamais obtenu de vogue parmi les lecteurs qui sont emprisonnés dans le domaine de la sensation, et pourquoi leur place est plus haute parmi ceux qui pensent ; si haute, que la poésie contemporaine en est dominée tout entière. […] Assurément, chaque lecteur est juge du plaisir qu’il prend, et je crains que M. 

254. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VII. Maurice Barrès et Paul Adam » pp. 72-89

Que l’auteur ait des sympathies pour lui, cela est possible, mais ne regarde guère le lecteur. Maltère doit lui suffire avec ses deux femmes, de tête et de sens, ou sinon il est bien difficile. — Mais n’y a-t-il pas aussi trop de contact entre Barrès et son lecteur, et celui-là ne se préoccupe-t-il pas à l’excès de celui-ci ? […] Ceci n’est qu’une nuance : le roman, n’est-ce pas, est charmant, et s’il ne nous emballe pas comme les Barbares, ce n’est pas la faute du poète, mais du lecteur qui a, vieilli, déjà, un peu, et que les premiers romans de Barrès avaient dès l’abord rendu trop difficile.

255. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Évolution de la critique »

En assumant publiquement son rôle, le critique prenait pour admis que son verdict représentait non seulement son opinion personnelle, mais celle de nombreux lecteurs, et quand il manifestait son approbation ou sa désapprobation à l’endroit de l’œuvre dont il discutait, il avait soin de s’en rapporter aux règles, c’est-à-dire, en définitive, aux appréciations plus générales de critiques antérieurs, et en dernier lieu, à Aristote. […] Cette conception indiciaire de l’œuvre entendue comme « document », avait déjà fait l’objet d’une promotion récente, avant qu’Émile Hennequin ne s’en empare, par Paul Bourget, dans ses Essais de psychologie contemporaine, qui écrivait de son côté en 1883 : « Le lecteur, en effet, ne trouvera pas dans ces pages, consacrées pourtant à l’œuvre littéraire de cinq écrivains célèbres, ce que l’on peut proprement appeler de la critique. […] Grand lecteur de Renan, Taine, Heine et Ibsen, introducteur de la pensée nietzschéenne au Danemark, présentée comme un « radicalisme aristocratique », il fut aussi l’auteur d’un texte sur le romantisme, rapidement traduit en français : L’École romantique en France, A. 

256. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre dixième. »

Ce trait ne pèche point contre la règle que nous venons d’établir, parce que le temps où Ulysse vivait est supposé compris dans l’époque que nous avons indiquée ; d’ailleurs, ce rapprochement des voyages d’Ulysse avec celui de la tortue est si plaisant, que le lecteur s’y rendrait bien moins difficile. […] La réflexion que La Fontaine ajoute à ce conseil de prudence, ne sert qu’à en détourner l’esprit de son lecteur. […] Autrement l’auteur, faute d’avoir des idées justes, risque d’en donner de fausses à son lecteur.

257. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre VII. Les hommes partagés en deux classes, d’après la manière dont ils conçoivent que s’opère en eux le phénomène de la pensée » pp. 160-178

J’ai cru m’apercevoir que le phénomène de la pensée ne s’opérait pas de la même manière dans tous les hommes de cet âge, et cela me suffit, la supposition que je fais devant ensuite être remplacée par ce que je crois être la vérité, ou même par tout autre système que mes lecteurs voudraient lui substituer. […] On me pardonnera de prendre ainsi mes précautions d’avance, puisque c’est pour m’accommoder aux opinions nouvelles, et les expliquer : cela, au reste, n’augmente ni ne diminue en rien le crédit de ces opinions ; c’est une méthode pour mes lecteurs aussi bien que pour moi. […] Il n’est aucun de mes lecteurs qui ne puisse compléter une telle série de faits : il me suffit de l’avoir mis sur la voie.

258. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Sur Adolphe de Benjamin Constant » pp. 432-438

Un pareil travail critique serait à faire sur tous ces petits livres à la fois personnels et d’une personnalité poussée au type et à l’idéal, qui ont tant ému et occupé les lecteurs contemporains, — sur René et aussi sur l’Adolphe de Benjamin Constant. […] Cette étude faite évidemment sur nature, et dont chaque trait a dû être observé, produit dans l’âme du lecteur un profond malaise moral, au sortir duquel toute fraîcheur et toute vie est pour longtemps fanée ; on se sent comme vieilli avant l’âge.

259. (1874) Premiers lundis. Tome II « Revue littéraire et philosophique »

Sous le titre de Précis de l’histoire de la Philosophie, MM. de Salinis et de Scorbiac, directeurs du collège de Juilly, viennent de publier un manuel fort plein de science et de faits, non-seulement à l’usage de leur établissement, mais encore à celui du grand nombre des enseignements philosophiques dans les collèges, et même d’une utilité applicable à tous les lecteurs amis de cette haute faculté de l’esprit humain. […] Après Salvien, que nous avons dans le temps annoncé à nos lecteurs, voici cette fois saint Vincent de Lérins et saint Eucher de Lyon.

260. (1874) Premiers lundis. Tome II « H. de Balzac. Études de mœurs au xixe  siècle. — La Femme supérieure, La Maison Nucingen, La Torpille. »

Le portrait, la description de la personne et de la vie de la Torpille (c’est l’odieux nom de la pauvre fille perdue) accusent ces observations profondes et fines particulières à l’auteur, et respirent une complaisance amollie qui s’insinue bientôt au lecteur, si elle ne le rebute tout d’abord : c’est là un secret et comme un maléfice de ce talent, quelque peu suborneur, qui pénètre furtivement, même au cœur des femmes honnêtes, comme un docteur à privautés par l’alcôve. […] Ces deux fragments, auxquels nous renvoyons le lecteur, et qui servaient d’en-tête auxdits bulletins de la Revue des Deux Mondes, se terminent l’un et l’autre, dans les Portraits contemporains, par trois points de suspension.

261. (1863) Molière et la comédie italienne « Préface » pp. -

Comment j’ai été amené à l’entreprendre, c’est ce que s’expliqueront aisément ceux des lecteurs qui savent que j’ai publié une édition des œuvres de Molière avec toutes les recherches et tous les développements qu’une telle publication comporte1. […] Malgré ces nombreux devanciers, le soin que j’ai pris de remonter autant que possible aux textes et aux documents originaux, m’a permis d’apporter dans cette étude quelques éléments nouveaux, que le lecteur qui a étudié ces questions saura facilement reconnaître.

/ 2011