Elle a l’air d’un Ouvrage de commande, dont l’objet est d’affoiblir l’estime due aux grands Littérateurs, pour ériger en Héros du Parnasse, des Ecrivains que le bon sens ne regardera jamais comme des modeles.
Thespis, pour soulager le chœur, ajouta un acteur qui récitait les aventures de quelque héros.
Il y eut peut-être toujours un peu de cette reconnaissance honorable dans la faiblesse de Béranger pour la gloire militaire du héros de la famille. […] Un grain de sel d’opposition relevait aussi ces couplets : Vous qu’afflige la détresse, Croyez que plus d’un héros Dans le soulier qui le blesse Peut regretter ses sabots. […] Ce trône d’expédient ne fut ni celui de Napoléon, son héros, ni celui de l’héritier naturel de la couronne, la victime des trois jours ; ce fut le trône du duc d’Orléans. […] Dans les Souvenirs du peuple il saisit mieux que jamais l’accent populaire pour enfoncer l’enthousiasme et le remords de voir abandonner son héros dans le cœur des enfants et des femmes. […] Mais à sa perte Le héros fut entraîné.
Le neveu d’Aristote, le philosophe Callisthène, avait suivi le héros en Perse comme conseil, comme historien de l’expédition. […] Si Ptolémée et Aristobule avaient eu connaissance de ces lettres, ils n’auraient pas sans doute donné un démenti formel à leur héros en avançant que les conjurés accusèrent Callisthène de les avoir engagés dans leur entreprise criminelle. […] XII Il y avait en Grèce un nombreux parti populaire et soi-disant politique, que la mort soudaine d’Alexandre avait exalté, que le retour de l’armée grecque à travers l’Asie Mineure, appelée la retraite des dix mille, animait contre la mémoire du héros. […] Cette colère du bas peuple retomba sur les partisans du héros et s’attaqua surtout à son précepteur Aristote. […] Si quelques hommes l’emportaient sur les autres hommes autant que, selon la croyance commune, les dieux et les héros peuvent différer des mortels, à l’égard du corps qu’un seul coup d’œil suffit pour juger, et même à l’égard de l’âme, de telle sorte que la supériorité des chefs fût aussi incontestable et aussi évidente pour les sujets, nul doute qu’il ne fallût préférer la perpétuité de l’obéissance pour les uns, et du pouvoir pour les autres.
L’une de ses héroïnes, pauvre jeune fille lâchement séduite, l’infortunée Marie a décidé de mettre fin à ses jours. […] De ces suppliciées du sort et du roman-feuilleton, il n’en manque pas chez Richebourg ; mais ses héroïnes font mieux que de verser des larmes, de sangloter, de s’abîmer dans une crise affreuse de désespoir. […] Vos héros ne peuvent pas disparaître avant quarante-huit heures d’ici. […] Sinon un feuilleton en raccourci, le canevas que celui-ci développe, la matière qu’il étire, tous les méfaits, tous les vols, tous les attentats dont il pare ses héros préférés. […] Mais ceux qui ont appris la vie dans le roman-feuilleton savent que les peuples, comme les individus, se divisent en bons et en méchants, en héros et en scélérats.
Héphestos était aussi l’armurier des héros et des demi-dieux. […] Plût aux dieux que je pusse sauver de la mort lamentable ton fils chéri, quand l’inévitable destin le saisira, aussi aisément que je lui donnerai de belles armes que tous les hommes admireront. » — Et retournant à son enclume, il va lui forger ces armes flexibles qui couleront sur le corps glorieux du héros, et le porteront comme des ailes, dans la mêlée du combat. […] Elle tient aussi à Prométhée par sa future délivrance, car le héros prédestiné à rompre ses chaînes, Hercule, naîtra de la race qu’elle doit enfanter. — « C’est de toi — lui dit-il plus tard, — qu’après treize générations, sortira l’illustre Archer qui m’affranchira de mes maux. » — En dehors même des rapports qui les unissaient, une idée sublimement tragique ressortait du contraste de ces deux supplices : le mouvement forcené se heurtant à l’immobilité opprimée, la femme errante jetée en face du dieu enchaîné. […] L’attitude d’Hermès vis-à-vis de Prométhée est celle d’un lâche foulant un héros à terre, d’une petitesse qui s’exhausse sur une grandeur abattue. — « C’est à toi que je parle, menteur et rebelle, rebelle à outrance, offenseur des Dieux ! […] Une seule situation : celle d’un supplice injuste subi par un Génie bienfaisant ; un seul nœud : le secret qu’il détient contre son tyran, et que toutes les violences de la force s’acharnent vainement à lui arracher ; un seul caractère : celui d’un héros inflexible que des épisodes successifs développent sous toutes ses faces, dans une attitude immuable.
Tel qui fera supérieurement des bergers, se fera moquer de lui s’il, veut peindre des héros. […] Je remercie l’Être suprême de m’avoir donné quelques talents pour célébrer la gloire des héros de la république. […] La Convention avait décrété que les honneurs du Panthéon seraient accordés le même jour aux deux enfants héros. […] Tous ces arrangements étaient terminés depuis deux jours et le héros de la fête n’avait encore rien fait dire. […] Bonaparte est mon héros !
Herman allait le chercher au sommet des Alpes, dans un Éden peuplé de héros. […] Elle crée le type de Jupiter, qui n’est que l’homme idéalisé, en même temps que l’épopée crée le héros. […] Le culte du saint tend à remplacer le culte du héros. […] Ce sont des histrions sans doute, mais ces histrions se trouvent être, à la strophe suivante, des héros. […] M. de Clermont attendait avec impatience que le héros d’Italie balayât la république pour faire place aux maîtres légitimes.
Il faut lire la vie du comte de Rochester551, homme de cour et poëte, qui fut le héros du temps. […] Mais le héros de ce monde fut William Wycherley, le plus brutal des écrivains qui aient sali le théâtre. […] C’est par elle qu’entre les roués et les prêcheurs la comédie trouve son héros. […] La vie mondaine qu’ils peignent est un vrai carnaval, et les têtes de leurs héroïnes sont des moulins d’imaginations extravagantes et de bavardage effréné. […] On verra bientôt Steele écrire une pièce morale intitulée le Héros chrétien.
Hugo va chercher pour son héros du bagne, en 1818, la considération publique où elle est, dans une addition bien faite, dans une fortune acquise sou par sou, en faisant, par charité, travailler une multitude d’ouvriers chastes et probes, à condition que la journée de chacun et de chacune lui rapporterait à lui-même un bon bénéfice ! […] Ce n’est pas sur le héros coupable de la seconde invasion qu’il faut appeler l’intérêt au nom de la gloire d’un homme, c’est sur la nation dont il creuse la fosse arrosée de sang innocent dans cette plaine sinistre de Waterloo. […] Mais, avant de foudroyer ces héros, ils leur offrent les conditions honorables des champs de bataille civilisés. […] Ce mot est une adulation à la trivialité de la multitude hébétée de rage, qui, faute de trouver une parole, jette l’excrément au visage du destin ; c’est de la démagogie grammaticale qui, voulant que tout lui ressemble, enlève au soldat et au peuple une réplique immortelle, pour lui substituer ce qui n’a de nom dans aucune langue, une bestialité muette cherchant une injure sur ses lèvres, et n’y trouvant qu’un sale idiotisme dans le cœur de tant de héros !
Thiers lui-même y a retrouvé comme son héros (avec tous les mérites acquis) ce je ne sais quoi de rapide et de svelte qui caractérisait ses premiers récits de 1796, ces anciennes pages un peu trop oubliées maintenant, effacées par ses derniers écrits, mais qui étaient d’une si fraîche inspiration et comme enlevées et légères. […] Peut-on s’étonner que les nations s’identifient avec les figures de héros qui ont ainsi vécu et lutté jusqu’à l’extrémité pour leur grandeur, et qu’elles disent dans leur enthousiasme d’instinct et par une de ces raisons du cœur, supérieures à la raison même : Eux, c’est moi !
Joubert était donc le héros désigné à l’avance et le sauveur attendu par toute une partie de la société parisienne. […] Il défaillait dans son for intérieur, il avait perdu l’espérance ; l’homme de cœur et le héros en lui se revancha du moins, se releva tout d’un bond.
De même sur les Macédoniens et sur Alexandre : chez Bossuet, c’est une première et large vue ; l’homme est bien compris dans son ensemble et posé avec son vrai caractère en termes magnifiques ; l’historien orateur est égal à son sujet, à son héros ; ce portrait d’Alexandre est un portrait d’oraison funèbre ; il a le mouvement et comme le souffle oratoire : chez Montesquieu, les raisons de la politique et du génie d’Alexandre sont bien autrement recherchées et déduites ; c’est bien autrement expliqué ; chaque parole frappe comme un résultat, et l’expression est vive, figurée ; le tout gravé en airain : c’est un long bas-relief d’Alexandre. […] Ce qui les forme, ce qui les achève, ce sont des sentiments forts et de nobles impressions qui se répandent dans tous les esprits et passent insensiblement de l’un à l’autre… Durant les bons temps de Rome, l’enfance même était exercée par les travaux ; on n’y entendait parler d’autre chose que de la grandeur du nom romain… Quand on a commencé à prendre ce train, les grands hommes se font les uns les autres ; et si Rome en a porté plus qu’aucune autre ville qui eût été avant elle, ce n’a point été par hasard ; mais c’est que l’État romain constitué de la manière que nous avons vue était, pour ainsi parler, du tempérament qui devait être le plus fécond en héros. » La guerre d’Annibal est très-bien touchée par Bossuet ; et quand il a bien saisi et rendu le génie de la nation, la conduite principale qu’elle tint les jours de crise, et le caractère de sa politique, il ne suit pas l’historique jusqu’au bout, comme l’a fait et l’a dû faire Montesquieu.
Il avait pour adversaires les premiers lieutenants de Frédéric, le duc Ferdinand de Brunswick, et son neveu le prince héréditaire, un héros dans toute l’ardeur de la jeunesse. […] Cependant les divertissements de Berny avaient aussi reçu leur échec : sans parler des dettes où tant de spectacles et de violons à payer avaient jeté le prince, il n’y avait plus moyen, comme auparavant, de venir à chaque fête, dans un couplet final, célébrer invariablement le héros de Lawfeld ou de Raucoux.
Qu’opposer à des femmes dont les unes ont porté jusque dans le cloître des âmes plus hautes que celles des héroïnes de Corneille, et dont les autres, après toutes les vicissitudes et les tempêtes humaines, ont eu l’heur insigne d’être célébrées et proclamées par Bossuet ? […] Si M. de Silly nous représente le héros de la première partie des Mémoires, celui de la seconde est certainement M. de Maisonrouge, ce lieutenant de roi à la Bastille, le parfait modèle des passionnés et délicats amants.
On a voulu blâmer l’auteur de Werther de supposer au héros de son roman une autre peine que celle de l’amour, de laisser voir dans son âme la vive douleur d’une humiliation, et le ressentiment profond contre l’orgueil des rangs, qui a causé cette humiliation ; c’est, selon moi, l’un des plus beaux traits de génie de l’ouvrage. […] Comme ils sont naturellement penseurs et méditatifs, ils placent leurs idées abstraites, et les développements et les définitions dont leurs têtes sont occupées, dans les scènes les plus passionnées ; et les héros, et les femmes, et les anciens, et les modernes tiennent tous quelquefois le langage, d’un philosophe allemand.
L’auteur, en essayant d’appliquer à son héros le type de beauté du grand peintre d’Urbin, a oublié une seule chose ; c’est que la première, la souveraine impression que fait sur nous la vue d’une figure de Raphaël, est une impression de pureté virginale et de chasteté. […] Il rappelle le nom de l’héroïne de Jean-Jacques, mais il rappelle aussi un vers de Voltaire : Chez Camargo, chez Gaussin, chez Julie.
Aucun grand artiste ne paraît avoir réalisé un de ces amours absolus : on ne saurait même les imaginer chez les héros suprêmes, un Platon, un Léonard ou un Goethe, dont les cristallisations amoureuses ne peuvent vivre que comme essais, ébauches de leurs cristalisations esthétiques. […] Ce président était peut-être partie dans un couple idéal, héros de la cristallisation amoureuse.
Ces jeunes gens sans emploi ambitionnent tout, ainsi que leurs frères d’époque et d’origine morale, Hernani, Didier, Antony, Ruy Blas, et tous les héros, aux noms oubliés, des premiers romans de George Sand. […] C’est ce qui les différencie du héros romantique de 1830, chez qui cette conviction orgueilleuse et lamentable s’accompagne, je le reconnais, d’une magnificence de pectus oratoire et poétique, qui manque à l’excès aux héros de Stendhal. […] La satisfaction exaltée qu’elles apportent au bon cœur des héros et des héroïnes de Jean-Jacques, après qu’ils ont péché délicieusement, en offre à leurs yeux la preuve bien suffisante. […] L’accuser de n’avoir pas traité chastement son sujet ni respecté assez la pureté réelle et légendaire de l’héroïne serait inique. […] Et je préfère en cela son intention aux fadeurs de cette littérature hagiographique qui croit mieux honorer ses héros en supprimant en eux tous les mouvements de la nature.
S’il chante les héros de sa patrie, Nelson, Wellington, ce n’est pas pour obéir à quelque commande, mais à l’élan spontané de son âme ; on dirait qu’il est né poète lauréat. […] Non, je veux la goûter tout entière, me comporter comme mes pairs, les héros de jadis, supporter le choc, et en une minute payer ce que doit ma vie heureuse en arrérages de douleur, de ténèbres et de froid. […] Mais c’est de préférence au théâtre, et dans le roman, qu’il s’est plu à peindre tel ou tel personnage, telle ou telle héroïne, qui poussaient l’exaltation sentimentale jusqu’à nier toutes autres valeurs. […] Ils sont comme la garantie de son droit à l’existence ; un peuple dont les héros ont mené le monde vers les plus hauts sommets de la civilisation, a le droit de revivre. […] Allons plus avant, vers des passages qui sont peut-être moins médités, et même moins lus : nous y trouverons la charte philosophique du héros sentimental.