Si elle prétend faire passer au premier rang le désir de plaire ou d’amuser qui est sa principale raison d’être, [si elle devient de la sorte une servante-maîtresse, une alliée qui commande, adieu le profit de son intervention ! […] Heureusement, à mesure qu’on avance, les méthodes deviennent plus sévères et le départ se fait plus nettement entre les deux collaboratrices qui travaillent côte à côte dans ces sortes d’écrits. […] Philologie, étymologie sont devenues des sciences précises, soumises à des préceptes rigoureux, accoutumées à une marche prudente, et s’il se produit d’aventure quelque réminiscence attardée des fantaisies d’antan, elle tombe bien vite sous les éclats de rire. […] Elle a compris que son premier devoir est d’être vraie et elle a mis son point d’honneur à devenir exacte jusqu’au scrupule. […] Cela revient à dire que la critique, appliquée aux œuvres d’autrefois, rentre de plus en plus dans l’histoire, en devient partie intégrante et gagne par là même en certitude.
C’est quelque chose comme le brigand devenu gendarme. […] Myriel et, peu après, devient le plus angélique des hommes vertueux ; l’inexorable Javert est saisi en un moment de scrupules miséricordieux qui le font se suicider. Charles Quint devient de coureur d’aventures, empereur sérieux, Ruy Blas d’amant-poète, grand ministre. […] Hugo porte dans sa conscience non plus des pensées, mais de purs mots ; tout deviendra clair. […] Hugo à un degré tel qu’elle devient géniale et sublime, la fin de la deuxième partie de notre étude le montre.
Grâce à lui notre conception du monde deviendra plus haute et plus forte ; nous sentirons en notre être éperdu se clarifier nos émotions amoureuses : une brume se dissipe entre la terre et nous. […] Il s’était pris d’amitié, de bonne heure, avec Cézanne, qui devait devenir plus tard l’émule de Monet, dans le grand effort de l’école impressionniste. […] Il en devint le héraut, la statue. […] Dans les romans de ses devanciers, un homme cesse d’être un homme pour devenir un personnage. […] Elle est la matière qui devient, peu à peu, consciente de soi-même.
Âme, pauvre âme, ma pauvre petite âme, que seras-tu, où seras-tu, que deviendras-tu ? […] Lord Cecil devient l’homme nécessaire. […] Fixer le réel, le devenir, la durée, la vie qui s’écoule. […] Elle devient au contraire capitale dès l’instant où il veut être compris, où il veut émouvoir les autres âmes. […] Chez Rousseau, Diderot, Bernardin de Saint-Pierre, cette intuition devint encore plus précise.
Il est probable que, malgré la différence des âges, il aurait fini par épouser sa cousine : car elle était devenue une charmante jeune fille, et par la mort de ce frère aîné, qu’environnait une injuste préférence, sir Ralph était devenu un riche héritier ; mais, durant un voyage lointain qu’il fit à cette époque, la soumise Indiana fut mariée par son père à un ancien colonel français, le baron Delmare, alors négociant très-riche de Bourbon. […] Bref, le séducteur de la femme de chambre devient amoureux de la maîtresse, et n’est pas rejeté. […] La vanité, le caprice, les sens, le besoin de succès et de plaisir à tout prix, deviennent en ces sortes d’âmes des passions moins nobles, mais non moins acharnées, qui gravent aussi leurs rides au front et en arrachent les cheveux.
Les poésies, les romans sont arrivés à un tel degré d’individualité, comme on dit, à un tel déshabillé de soi-même et des autres ; — le style, à force d’être tout l’homme, est tellement devenu non plus l’âme, mais le tempérament même, — qu’il est à peu près impossible de faire de la critique vive et vraie sans faire une opération inévitablement personnelle, sans faire presque de la physiologie à nu sur l’auteur et parfois de la chirurgie secrète ; ce qui frise à tout moment l’offensant. […] Un critique distingué, ayant à parler assez récemment d’Horace et de Virgile, et de l’espèce de royauté qu’ils se fondèrent en regard, à l’abri et à l’appui de la monarchie impériale d’Auguste, a fait remarquer la convenance et la nécessité de ces deux royautés parallèles, produites à la fois par une double anarchie, dans un temps où la faiblesse de l’État d’une part, et de l’autre le trop facile usage de formes poétiques devenues la propriété commune, favorisaient toutes les entreprises de l’ambition politique, toutes les prétentions de la médiocrité littéraire153. […] Il nous arrive un peu comme au xvie siècle, lorsque les procédés mis en circulation par les chefs de l’école, par Du Bellay et Ronsard, furent devenus familiers à tous et que chaque jeune cœur au renouveau se crut poëte. […] Les talents surtout sont jamais été plus nombreux ; c’est un devoir de la critique de ne pas se lasser à les compter, et d’en tirer avec soin et plaisir tout ce qui s’y distingue et qui s’en détache… Romantisme, humanitarisme, ce sont là des formes de passions et comme de maladies, que les jeunes talents doivent presque nécessairement traverser ; ils deviennent d’autant plus mûrs qu’ils s’en dégagent plus complétement.
La littérature en France est aussi une démocratie, elle l’est devenue. […] Ce que l’armée, ce que l’industrie, ce que les serviteurs de la France et les travailleurs de tout genre ont obtenu de l’attention magnanime du prince, que la littérature sente qu’elle l’obtient aussi à son tour ; et ces gens de lettres, qui hier encore se décourageaient ou se dispersaient au hasard en laissant s’égarer leur talent, deviendront véritablement alors des serviteurs de la France, des travailleurs utiles et dignes. […] On sort du collège, et, à peine sorti, on a déjà choisi son point de mire, son modèle dans quelque écrivain célèbre, dans quelque poëte préféré : on lui adresse son admiration, on lui porte ses premiers vers ; on devient son disciple, son ami, pour peu qu’il soit bon prince ; on est lancé déjà ; à sa recommandation peut-être, un libraire consent à imprimer gratis vos premiers vers ; un journal du moins les insère ; on y glisse de la prose en l’honneur du saint qu’on s’est choisi et à la plus grande gloire des doctrines dont on a le culte juvénile : comment revenir après cela ? […] Quoi qu’il en soit, en fait l’ouvrier littéraire, dans son imprévoyance, se multiplie et pullule chaque jour ; son existence est devenue une nécessité, un produit naturel et croissant de vie échauffée qui se porte à la tête et qui constitue la civilisation parisienne.
L’ascétisme chrétien, en proclamant cette grande simplification de la vie, entendit d’une façon si étroite la seule chose nécessaire que son principe devint avec le temps pour l’esprit humain une chaîne intolérable. […] Privée de son idéalisation, la vie est devenue quelque chose de profane, de vulgaire, de prosaïque, à tel point que, pour certains actes, où le besoin d’une signification religieuse était plus sensible, comme la naissance, le mariage, la mort, on a conservé les anciennes cérémonies, lors même qu’on ne croit plus à leur efficacité. […] La faiblesse de notre âge d’analyse ne permet pas cette haute unité ; la vie devient un métier, une profession ; il faut afficher le titre de poète, d’artiste ou de savant, se créer un petit monde où l’on vit à part, sans comprendre tout le reste et souvent en le niant. […] Mais ce qui pourra devenir possible dans une forme plus avancée de la culture intellectuelle, c’est que le sentiment qui donne la vie à la composition de l’artiste ou du poète, la pénétration du savant et du philosophe, le sens moral du grand caractère, se réunissent pour former une seule âme, sympathique à toutes les choses belles, bonnes et vraies, et pour constituer un type moral de l’humanité complète, un idéal qui, sans se réaliser dans tel ou tel, soit pour l’avenir ce que le Christ a été depuis dix-huit cents ans un Christ qui ne représenterait plus seulement le côté moral à sa plus haute puissance, mais encore le côté esthétique et scientifique de l’humanité.
Maintenant que je suis abandonné à moi-même, puisqu’il faut que je rentre dans l’appréciation de l’époque actuelle, maintenant je ne puis avoir la même confiance en mes propres idées, et plus de circonspection m’est devenue nécessaire. […] Il a de plus remarqué que la constitution anglaise elle-même n’a rien innové, mais que les privilèges de la nation ayant été violés, il était devenu nécessaire de les constater. […] À mesure que la parole, séparée de la pensée, s’est plus fixée dans une sphère sensible, les efforts de la pensée ont augmenté de vigueur et de puissance pour secouer des chaînes qui devenaient de plus en plus pesantes. […] Mais, quoi qu’il en soit, j’ai besoin de le redire, et je voudrais faire passer dans mes lecteurs la conviction intime où je suis que Dieu ayant fait l’homme pour vivre en société, la providence de Dieu ne cessera point de veiller sur les sociétés humaines ; quoi qu’il en soit, répéterons-nous, s’il est vrai que jusqu’à présent Dieu se soit servi de la parole pour diriger les destinées du genre humain, si la parole enfin a été jusqu’à présent une révélation toujours subsistante au sein de la société, et que ce moyen ait cessé de lui paraître utile ou nécessaire, il saura bien en faire sortir un autre de la force même des choses, en supposant que celui-là manquât d’une manière absolue, ce que je suis loin d’admettre, ainsi qu’on a pu le voir, ou en supposant qu’il soit devenu insuffisant, ce qu’on sera beaucoup plus porté à croire.
Avec les besoins de plus en plus marqués de précision et d’exactitude qui tendent à devenir le fond même de l’esprit moderne, l’historien, pour bien comprendre l’histoire et la ressusciter en la peignant, doit vivre là où elle a vécu et s’est faite. Cela devient nécessaire partout, mais cela est surtout profitable quand il s’agit — comme ici, par exemple, — de nations lointaines et stationnaires, que le temps agite et ronge sur place, tout en ayant l’air de les conserver. […] Aurait-elle pu devenir chrétienne ? […] Quoi que devienne la Chine, elle aura bien toujours pour eux quelques supplices, et, si elle est condamnée, ils pourront l’assister.
Et, à cette époque, les sots, qui à toute autre n’étaient que des sots, se sont épaissis et sont devenus grossiers. […] C’est mettre quelque chose dans nos âmes qui n’y était pas… Saint-Victor, qui nous apprend Eschyle aujourd’hui, dans son premier volume, devient, en vertu de la faculté caméléonesque du talent regardant le génie, une espèce d’Eschyle, éclosant et fleurissant dans les racines du vieux tragique immortellement épanoui, et tellement que si, par miracle, le vieux Eschyle revenait au monde et qu’il lût le commentaire de Paul de Saint-Victor, il dirait comme Galathée, sortie de son état de marbre et touchant la poitrine de l’idolâtre Pygmalion : « C’est encore moi ! […] Ses commentaires, ses explications, ses analyses, les entrouvrements qu’il pratique dans l’œuvre toujours un peu mystérieuse du génie et qui, à la distance où nous en sommes, est plus mystérieuse dans Eschyle que dans aucun autre, toutes ces choses d’un travail puissant et réfléchi, mais prosaïques, deviennent poétiques dans l’œuvre de Saint-Victor en s’y embrasant d’un feu de peinture qui ne cesse jamais et dont l’intensité, sous sa plume, est presque plastique… Comment donner ridée de cela ? […] On descend enfin, quelque jour, du zénith… Après ce livre des Deux Masques, je ne vois pas très bien ce que, sans se transformer, sans changer entièrement de nature, pourrait devenir maintenant le talent de son auteur.
La Révolution française a donné à tout ce qu’elle toucha une résonnance trop formidable pour que les vibrations n’en oscillent pas à nos oreilles encore longtemps… et ce bruit, communiqué par elle aux choses qui ont perdu, le leur et qui, sans elle, seraient devenues muettes, dure toujours. […] , était de ces êtres à sentiment qui, dans un moment donné, peuvent devenir atroces. […] Dans un temps où un si grand nombre de femmes devinrent des hommes sous la foudre des sentiments publics, ce garçon d’entre les cris et les larmes, d’entre les enthousiasmes et les terreurs, fut certainement bien moins un homme que Théroigne de Méricourt, par exemple, ou telle autre chevaucheuse de canon sur la route de Versailles. […] — le monde et les mois de la Révolution française dans le monde d’Athènes et de Rome, ce que Chateaubriand fît aussi dans son Essai sur les Révolutions et ce qui devint chez Desmoulins un procédé presque monotone, tout cela suffit-il pour mériter réellement ce nom glorieux de grand artiste qu’on lui prodigue ?
On a de lui quelques pages de prose, je le sais ; et les admirateurs de son génie disent qu’il aurait pu devenir ce grand miroir clair qui foudroie, comme celui d’Archimède, et qu’on appelle un historien. […] C’est un observateur, c’est un moraliste, c’est un inventeur à tout autre titre qu’au titre de poète, c’est un historien, c’est un romancier, c’est enfin un de ces esprits marqués du caractère essentiellement moderne, qui ont fait vibrer sous leur main un grand nombre de faits, de sentiments et d’idées, et chez qui l’imagination est devenue encyclopédique comme la mémoire. […] Enfin, il y a un admirable artiste encore dans beaucoup de Poèmes antiques ou modernes du recueil publié aujourd’hui, par exemple, Dolorida, poème byronien, un bas-relief pour la netteté avec des personnages modernes pour la passion et pour le geste ; Suzanne au Bain et la Toilette d’une Dame romaine, intailles qu’on eût crues gravées par André Chénier ; Le Cor, la ballade de Roncevaux, où se trouvent de ces vers jaillis comme l’eau, d’une source, et quoi que deviennent les littératures décadentes qui se tordent dans leur convulsive agonie, éternellement limpides, jaillissants et frais : Oh ! […] M. de Vigny devint prosateur, presque polémiste.
On devient superstitieux, on a son étoile. […] Peu à peu, les comptes rendus deviendront de simples bulletins. […] Les succès et les chutes deviennent secondaires. […] Dès lors, le milieu n’a plus de rôle à jouer, le décor devient inutile. […] La madame de La Barre des auteurs devient sympathique.
De professeur universitaire devenu professeur libre, il s’est trouvé avoir un talent et un goût tout particuliers pour ce genre d’enseignement rapide et de propagande. […] On devient calme, on devient fort, on devient bon, on devient inébranlable dans la justice, on devient plein de bienveillance et d’amour. […] La critique littéraire ne saurait devenir une science toute positive ; elle restera un art, et un art très délicat dans la main de ceux qui sauront s’en servir ; mais cet art profitera et a déjà profité de toutes les inductions de la science et de toutes les acquisitions de l’histoire.
On sait que le roman, œuvre d’amusement et de pure imagination à l’origine, s’est transformé peu à peu, qu’il a serré de plus en plus la réalité, qu’il tend à devenir une peinture véridique et minutieuse de toute la vie contemporaine. […] Charlotte et d’Eblis ne tardent pas à s’aimer ; mais Roger étant devenu de son côté amoureux de Charlotte, le commandant se sacrifie en épousant Cécile, et Charlotte s’immole en offrant sa main à l’estropié. […] Octave Feuillet nous conte que, si ce chimiste devient l’amant de Mme de Val-Chesnay et si, congédié brusquement par cette coquette, il avale une fiole d’opium, c’est parce qu’il n’est pas chrétien. […] A coup sûr, si Mme de Campvallon ne se trouvait pas sur son chemin, s’il ne survenait pas dans sa vie un accident tout à fait extraordinaire, la moralité de Louis de Camors resterait fort au-dessus de la moyenne, quoiqu’il ne croie pas en Dieu : et alors que devient la thèse de M. […] Et bien qu’une autre littérature m’ait fait connaître des plaisirs plus aigus, j’admire franchement de quelle grâce l’auteur du Roman d’un jeune homme pauvre a su manier le romanesque, quand je vois ce qu’est devenu ce vieil oiseau bleu entre certaines pattes.
Des figures laides, bestiales, grimaçantes, s’éclaircissent, s’embellissent peu à peu ; des êtres sinistres deviennent gais, expansifs, polis même ; « enfin, dit madame Gros, ils ont un charme original et un cachet qui n’appartient qu’à eux ». […] Remercions madame Gros d’avoir fait revivre dans notre âge, devenu étranger aux grands secrets de l’âme, les merveilles de conversion qui semblaient réservées aux temps où la grâce vivante se promenait sur la terre avec ses trésors d’indulgence et de pardon. […] L’incendie du navire pouvait devenir l’incendie du port lui-même. […] Aujourd’hui, elle sert les petits-enfants de ses premiers maîtres, et, quoique devenue presque aveugle, elle travaille, elle se prive de nourriture pour ceux à qui elle a consacré sa vie. […] L’esclavage cesse le jour où l’esclave, que l’antiquité concevait comme sans moralité et sans religion, devient moralement l’égal de son maître.
Il entra vers 1809 comme auditeur au Conseil d’État, et bientôt, comme la plupart des jeunes auditeurs, il devint intendant et administrateur en pays conquis, en Hongrie, en Croatie, dans les Provinces illyriennes. […] Le rapporteur de la loi (le marquis de Maleville) s’était avisé de dire, pour l’appuyer, qu’en empêchant le partage égal entre les enfants, cette loi allait forcer les déshérités à s’évertuer, à devenir actifs, intelligents, industrieux ; il avait cité l’exemple de l’Angleterre. […] le temps de ces exagérations est déjà passé pour les Français ; nous osons le prédire, il y a, dans le bon sens général, tel que les controverses qui s’agitent depuis quinze ou vingt ans l’ont développé et préparé, un obstacle invincible à ce que ces adorations individuelles gagnent jamais du terrain, et deviennent des opinions communes et des doctrines reçues. […] Notre théâtre est devenu non seulement le témoignage éclatant de tout le dévergondage et de toute la démence auxquels l’esprit humain peut se livrer quand il est abandonné sans aucun frein, mais il est devenu encore une école de débauche, une école de crimes, et une école qui fait des disciples que l’on revoit ensuite sur les bancs des cours d’assises attester par leur langage, après l’avoir prouvé par leurs actions, et la profonde dégradation de leur intelligence et la profonde dépravation de leurs âmes. […] À mesure que l’ordre se rétablira, le poste que nous occupons deviendra de plus en plus l’objet d’une noble ambition ; les Chambres, dans un temps plus tranquille, verront les changements d’administration comme quelque chose qui compromet moins l’ordre public ; les hommes s’usent vite d’ailleurs, messieurs, aux luttes que nous soutenons.
Mais ce qui me frappe surtout chez Condorcet, et ce qui constitue sa plus grande originalité, c’est l’abus, c’est la foi aveugle dans les méthodes, c’est cette idée, si contraire à l’observation, que toutes les erreurs viennent des institutions et des lois, que personne ne naît avec un esprit faux, qu’il suffit de présenter directement les lumières aux hommes pour qu’à l’instant ils deviennent bons, sensés, raisonnables, et qu’il n’y a rien de plus commun, de plus facile à procurer à tous, que la justesse d’esprit, d’où découlerait nécessairement la droiture de conduite. […] L’auteur supprime en idée tout ce qui est du caractère et du génie particulier aux diverses races, aux diverses nations ; il tend à niveler dans une médiocrité universelle les facultés supérieures et ce qu’on appelle les dons de nature ; il se réjouit du jour futur où il n’y aura plus lieu aux grandes vertus, aux actes d’héroïsme, où tout cela sera devenu inutile par suite de l’élévation graduelle du niveau commun. […] Sans doute, ajoute-t-il naïvement, l’homme ne deviendra pas immortel ; mais la distance entre le moment où il commence à vivre, et l’époque commune où naturellement, sans maladie, sans accident, il éprouve la difficulté d’être, ne peut-elle s’accroître sans cesse ? […] Condorcet, dans son rêve d’Élysée terrestre, oublie un genre de mort qui pourrait devenir fréquent si la chose se réalisait jamais, c’est qu’on y mourrait d’ennui. […] Ainsi Condorcet imprime sans rire, le 18 juin, que les hommes de l’insurrection du surlendemain, et bientôt de celle du 10 août, ont l’air, tant ils sont devenus raisonnables, de se livrer chaque matin dans leur cabinet à une petite opération d’analyse et d’idéologie.
Mais combien de vies faut-il pour devenir un homme. […] Le vol deviendra l’expression artistique de nos états d’âme. […] Pour nous autres aviateurs futuristes le ciel devient un véritable théâtre. […] La revue devient ensuite La Revue européenne (n° 1, mars 1923). […] Son anthologie poétique Crépuscule de l’humanité est devenue classique.