Elles deviennent alors une sorte de corps de préceptes d’hygiène physiologique et d’hygiène mentale. […] En tout cela il s’agit de sacrifier quelques désirs, quelques éléments psychiques, d’en fortifier d’autres, pour arriver à une meilleure santé, à une plus grande vigueur du corps et de l’esprit. […] Le goût pour l’alcool, l’habitation dans des logements malsains, l’activité physique et mentale prolongée à travers la nuit, l’entassement dans les théâtres et les lieux de réunions, la gourmandise exagérée, tant de pratiques qui flattent nos goûts et nuisent à l’équilibre du corps et de l’esprit, montrent assez que nos instincts n’ont pu se plier à notre situation nouvelle.
Pour s’absorber ainsi dans un grand corps, par lequel on vit, dont on fait sienne la gloire ou la prospérité, il faut avoir peu d’individualité, peu de vues propres, seulement un grand fond d’énergie non réfléchie prête à se mettre au service d’une grande idée commune. […] Dieu sera alors l’âme de l’univers, et l’univers sera le corps de Dieu, et la vie sera complète ; car toutes les parties de ce qui est auront vécu à part et seront mûres pour l’unité. […] Certes, il serait bien étrange qu’il y eût dans la nature, soixante et un corps simples, ni plus ni moins, qu’il y eût dans l’homme huit ou dix facultés, ni plus ni moins.
« Le principe le plus général que nous puissions établir par rapport à la concomitance de l’esprit et du corps, est la loi de diffusion qui s’énonce ainsi : « Quand une impression est accompagnée de sentiment ou d’une conscience quelconque, les courants excités se répandent librement dans le cerveau et conduisent à une agitation générale des organes moteurs, et affectent les viscères. » L’action réflexe, au contraire, qui n’est point sentie, est restreinte dans son influence à un circuit nerveux fort étroit. […] Soit le rire qui résulte d’une cause physique (froid, chatouillement) ; la décharge agira d’abord sur les muscles qui se meuvent le plus habituellement, c’est-à-dire ceux de la bouche et des organes de la voix ; si elle est très forte, elle agira sur d’autres parties du corps comme dans le rire violent. […] Solon et Lycurgue ont donné un corps aux vieilles institutions ioniennes ou doriennes.
L’âme, comme le corps, a des mystères que les initiés peuvent connaître, mais qu’il ne faut pas montrer au public. […] Elle le conçoit selon la fière formule de la loi romaine : ubi tu Caïus, ibi ego Caïa, « là où tu seras Caïus, je serai Caïa. » Elle aime passionnément son mari, elle s’est donnée à lui corps et âme ; donc elle a le droit d’exiger qu’il se donne à elle tout entier. […] L’âme est, absente de son corps superbe.
Le centre, le corps principal du travail est Aristote lui-même et sa Poétique traduite, commentée, cette Poétique que tant de gens hier invoquaient encore et que si peu ont lue. […] Jeune, commandant un corps de cavalerie en Germanie, il avait fait un traité spécial, et de théorie, sur l’Art de lancer le javelot à cheval. […] Et Pline nous apprend que, tandis que l’usage général à Rome était déjà de brûler les corps, la famille Cornelia, ainsi que quelques autres familles, avait conservé les rites anciens qui consistaient à les enterrer.
Napoléon, l’appréciant plus tard pour ses beaux développements au Conseil d’État et au Corps législatif, disait de lui : « Portalis serait l’orateur le plus fleuri et le plus éloquent, s’il savait s’arrêter. » Son discours, nourri de maximes, avait quelque chose d’un Nestor précoce, et qui ne craint pas de se répéter. […] Disons vite que le Corps législatif, consulté dans ses deux sections, n’hésita point dans sa réponse. […] Le discours prononcé par lui au Corps législatif, le 5 avril 1802, en présentant le traité du Concordat, nous offrirait, au milieu de quelques redites, de belles et éternelles maximes d’État.
À côté de ces vers, qui ne se trouvent pas dans les volumes de Rome chrétienne, et qui ne sont qu’un premier accent, il faut placer comme tableau original et profond, ce qui est dit de la destruction graduelle et lente des corps humains dans les Catacombes. […] L’humidité, qui dissout tant d’autres choses, durcit ces ossements en les recouvrant d’une croûte qui leur donne plus de consistance qu’ils n’en avaient lorsqu’ils étaient les membres d’un corps vivant. […] Dans le sépulcre voisin, tout ce qui fut un corps humain n’est déjà plus, excepté une seule partie, qu’une espèce de nappe de poussière, un peu chiffonnée et déployée comme un petit suaire blanchâtre, d’où sort une tête.
Il laissait deux fils ; l’aîné qui lui succéda, Fédor, débile de corps et d’esprit, incapable de régner par lui-même, prit pour Premier ministre ou régent de l’empire un boyard son beau-frère, nommé Boris Godounof, homme ambitieux, habile, et né pour commander. […] Les soldats de Boris ne marchent contre lui qu’à leur corps défendant. […] Son âme toujours énergique ne dominait plus son corps brisé par la fatigue.
Ils font ordinairement une retraite de corps pour se garer de la chose vers laquelle ils tendent la tête… Aucun membre n’est raidi pour un effort ; aucun geste n’est rapide, ni violent. […] Ce sont des âmes étonnées d’être prises dans des corps. » Ne pourrait-on pas dire que ce « mal mystérieux fait chanceler » également le préraphaélisme tout entier ? […] Robert de la Sizeranne (La peinture anglaise contemporaine) « s’il n’a pas fait partie du corps de la petite église, l’âme de l’église n’a pas cessé de l’inspirer. » (NdA) 33.
Il aura du moins l’avantage de trouver, dans l’esprit de Corps, du zele pour les faire acheter sur la parole de certains Prophetes, & celui de les faire vivre quelques jours dans les Sociétés merveilleuses où ces Prophetes donnent le ton.
Ainsi s’engendrent et se propagent l’ignorance, l’envie, le mépris et la haine ; ainsi surtout s’engendre et se propage la glaciale indifférence qui est à l’âme ce que la paralysie est au corps. […] Loin d’ennoblir et de fortifier l’âme, la musique l’énerve, l’affaiblit, comme une volupté imprudemment répétée affaiblit le corps. […] Nous croyons notre âme plus délivrée du corps au moment même où elle en est plus captive. […] Ces deux génies contraires ne conservent pas dans leur association leur personnalité distincte, ils sont fondus l’un dans l’autre, comme l’âme dans le corps, si bien qu’on ne peut les concevoir l’un sans l’autre, de même qu’on ne peut loger l’enthousiasme de don Quichotte ailleurs que dans un corps sec et long. […] Vous appartenez corps et âme à ce christianisme légendaire qui fut la religion populaire du moyen âge.
… Et l’on sentait dans ses paroles, dans son beau corps tendu au vide une telle lancée que le roi, terrifié, se précipita pour la retenir : — Frédérique ! […] Au-dessus, au-delà des terres cultivées, des maisons commençaient à sortir des ténèbres, découpant la ligne nette d’un toit, la crête en biseau d’un mur, le prolongement d’un corps de bâtiment. […] Serait-ce assez de Molière lui-même pour se prendre corps à corps avec ce pitre géant, avec celle monstrueuse queue-rouge qui montre au pauvre la richesse d’autrui en lui criant : « Déshérité, voilà ton héritage ! […] Le corps en sait parfois plus long que la pensée ! […] Alors que de plans, que d’entreprises qui ne font reculer ni son esprit, ni les forces de son corps !
Quand son corps affaibli réclamait quelque repos, il le frappait jusqu’au sang, en l’appelant gaiement : Frère âne. […] Les maris respectent les femmes des autres, mais un célibataire n’a pas d’esprit de corps qui le retienne, bien au contraire. […] Les yeux sont si loin qu’on ne les voit plus ; le corps et les mains tremblent. […] tu n’as pas un sourire pour elle, pas un désir ne s’élève en tes sens pour son beau corps ? […] On m’attaque au corps !
Quand les mains étaient vides, on s’étreignait corps à corps ; les poitrines craquaient contre les cuirasses, et des cadavres pendaient la tête en arrière, entre deux bras crispés. […] Les voilà aux prises, pied contre-pied, main contre main : ces deux corps entrelacés semblaient n’en faire qu’un. […] Tout doit faire corps. […] Ceulx qui ont le corps graile, le grossissent d’embourrures ; ceulx qui ont la matière exile, renflent de paroles. […] De peur que les corps ne se déforment par des mouvements libres, on se hâte de les déformer en les mettant en presse.
Le vêtement, fût-il de bure comme une robe de nonne, ou de soie molle comme un peignoir du matin, qui dérobe les formes fines et gracieuses d’un corps de femme, les indique encore, et trahit leur souplesse. […] C’est l’œuvre aussi de la science des corps. […] Au lieu d’apercevoir derrière les phrases la main qui les écrivait, le corps auquel tenait cette main, la poussée du sang dans ce corps, et aussi la poussée des images, toutes les sourdes et profondes origines animales du talent, elle aperçoit le songe du poète, l’au-delà inexprimable et mystérieux dont il a su faire comme un halo à ses vers. […] Par suite, les bonnes conditions d’existence du corps social lui paraissent résider surtout dans un sage emploi de cette force acquise. […] Rien qu’à respirer, l’âme est allégée, le corps vit à l’aise.
On peut le comparer à un Charpentier habile, dont le travail indispensable se cache dans le corps de l’édifice, quoiqu’il en regle l’économie & en fasse le soutien.
Marie était évidemment la Béatrix de ce grand poëte : Au milieu du printemps entre les liz naquit Son corps qui de blancheur les liz mesmes vainquit, Et les roses, qui sont du sang d’Adonis teintes, Furent par sa couleur de leur vermeil dépeintes ; Amour de ses beaux traits lui composa les yeux, Et les Grâces, qui sont les trois filles des cieux, De leurs dons les plus beaux cette princesse ornèrent, Et pour mieux la servir les cieux abandonnèrent. […] Ils signalèrent leur attachement à la cause du pape par le meurtre du calviniste Anne Dubourg, confesseur héroïque de la foi nouvelle. « Six pieds de terre pour mon corps et le ciel infini pour mon âme, voilà ce que j’aurai bientôt ! […] Enfin, satisfaisant son cœur après avoir satisfait son ambition, elle jette le masque, elle pleure Rizzio, elle fait exhumer le corps de son favori, lui fait des obsèques royales et l’ensevelit elle-même dans le sépulcre des rois, dans la chapelle d’Holyrood. […] … » Elle avoue elle-même son anxiété dans des vers qu’elle composa à cette occasion : Pour lui aussi j’ai pleuré mainte larme Quand il se fit de ce corps possesseur Duquel alors il n’avoit pas le cœur ! […] on l’ignore ; ce qu’on sait seulement, c’est qu’une explosion terrible, entendue avant le crépuscule du matin à Holyrood et à Édimbourg, avait fait sauter la maison dont les débris devaient recouvrir la victime ; mais que, par un étrange oubli des assassins, les deux cadavres de Darnley et du page, au lieu de se retrouver sous les décombres, se retrouvèrent le lendemain dans un verger attenant au jardin, portant sur leurs corps non les marques de la poudre, mais les marques de la lutte et de la strangulation.
Inversement, quand un livre se présente avec une table de matières ample et exacte, étudiez-en le rapport avec le corps du développement.
On fait que ce n’est pas dans ce Corps que l’érudition constitue le bon Académicien.
Il y a un mois, en Flandre, surtout en Hollande, ce n’étaient que grands traits mal agencés, osseux, trop saillants ; à mesure qu’on avançait vers les marécages, le corps devenait plus lymphatique, le teint plus pâle, l’œil plus vitreux, plus engorgé dans la chair blafarde. […] L’air et les aliments font le corps à la longue ; le climat, son degré et ses contrastes produisent les sensations habituelles, et à la fin la sensibilité définitive : c’est là tout l’homme, esprit et corps, en sorte que tout l’homme prend et garde l’empreinte du sol et du ciel ; on s’en aperçoit en regardant les autres animaux, qui changent en même temps que lui, et par les mêmes causes ; un cheval de Hollande est aussi peu semblable à un cheval de Provence qu’un homme d’Amsterdam à un homme de Marseille. […] Il n’est pas vrai que la perfection de l’âme, comme il est dit dans le Phédon, soit d’être le plus possible détachée du corps. L’âme sans corps est une chimère, puisque rien ne nous a jamais révélé un pareil mode d’exister. […] Cette vie nous est plus chère que la vie du corps, puisque nous sacrifions volontiers celle-ci à celle-là.