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1310. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 7, nouvelles preuves que la declamation théatrale des anciens étoit composée, et qu’elle s’écrivoit en notes. Preuve tirée de ce que l’acteur qui la recitoit, étoit accompagné par des instrumens » pp. 112-126

Dans le premier livre des tusculanes, Ciceron, après avoir rapporté l’endroit d’une tragedie où l’ombre de Polydore supplie qu’on veuille donner la sepulture à son corps, pour faire finir les maux qu’elle endure, ajoute : je ne sçaurois concevoir que cette ombre soit aussi tourmentée qu’elle le dit, quand je l’entens reciter des vers dramatiques si corrects, et quand je la trouve si bien d’accord avec les instrumens.

1311. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — II »

Mon esprit, nourri hors des temps et des milieux, demeurera, dans mes livres, tout au service de l’humanité non conditionnée ; mon corps, au service du pays et de l’époque auxquels j’ai dû les bonheurs de l’amitié et la sécurité du travail.‌

1312. (1881) Le naturalisme au théatre

Et jamais le mot insurrection n’a été plus juste, car le drame saisit corps à corps la tragédie, et par haine de cette reine devenue impotente, il voulut briser tout ce qui rappelait son règne. […] Le corps des critiques dramatiques ne peut ressembler à un corps de troupe qui fait l’exercice. […] Je me montrerai plus sévère pour l’enseignement lui-même, pour le corps des professeurs. […] Un enseignement est forcément basé sur un corps de doctrine, qui permet de l’appliquer au plus grand nombre à la moyenne des intelligences. […] Paul Deroulède est comme un corps d’armée qui défilerait dans ma rue.

1313. (1890) Dramaturges et romanciers

Les impressions fantastiques naissent de la tyrannie du corps et des agents matériels sur l’âme, de la coïncidence de certaines circonstances extérieures que l’imagination n’a pas coutume d’associer ; mais chacune de ces circonstances est naturelle et chacun de ces agents peut être décrit scientifiquement. […] L’erreur de l’écrivain est d’avoir traité physiologiquement une donnée morale, et d’avoir fait porter au corps le châtiment de l’âme. […] Point n’est besoin, pour nous enseigner ces secrets, de l’imposante figure d’une Minerve ou du corps voluptueux d’une Vénus : il suffit de la figure d’un bélier ou d’un taureau. […] Autrefois le romancier tirait son sujet de son âme même, d’une combinaison morale éclose dans son cerveau, puis il demandait à la réalité extérieure les éléments nécessaires pour donner un corps à sa conception. […] Augier que parce qu’il lui permettait plus facilement que tout autre de donner corps aux éléments particuliers de génie comique qu’il sentait en lui.

1314. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Quelques « billets du matin. » »

Je me rappelai Élisabeth de Hongrie et les corps, tout embaumés d’innocence, des vierges de la Légende dorée. […] Mais peut-être que cette lutte corps à corps, qui est (sauf la convention de la « main plate ») la lutte primitive, celle de l’âge de la pierre, plaît au vieil anthropoïde qui vit dans chacun de nous. […] Les corps de ces excellents nègres fonctionnent aussi aisément que ceux des animaux. […] Elles ont le diable au corps. […] Il ne faut donc pas la percher si haut, sur un corps inutile, qu’on n’en puisse plus du tout distinguer les traits dans la noirceur du bronze.

1315. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIIe entretien. Littérature latine. Horace (2e partie) » pp. 411-480

« Que si une chaste épouse, semblable à nos femmes sabines ou à la compagne brunie par le soleil de nos habitants de l’Apulie, partage avec nous ces travaux domestiques et soigne les enfants qu’elle a nourris, qu’elle construise de bois sec notre cher foyer pour le retour de son mari fatigué, qu’elle enferme dans le parc d’osier son joyeux troupeau pour étancher de leur lait les mamelles gonflées de ses chèvres et de ses brebis, et que, tirant du tonneau odorant un vin de l’année adouci par le miel, elle assaisonne pour la table des mets qu’elle n’a pas achetés à prix d’or ; … pour moi, ni les huîtres du lac Lucrin, ni les turbots, ni les sarges que les tempêtes chassent d’Orient vers nos rivages, ni la poule d’Afrique, ni le faisan d’Ionie ne flatteront jamais autant mon palais, en flattant ma gourmandise, que l’olive cueillie et choisie sur les plus grosses branches de mes propres arbres, que l’oseille qui aime les prés, que la mauve salutaire au corps appesanti par la maladie. […] Walckenaer trouve, avec raison, supérieur à l’apologue de même nature versifié par La Fontaine ; le voici : « D’aventure, par une étroite fente un mulot fluet s’était glissé dans un vaisseau chargé de froment ; et, après s’être largement repu, il s’efforçait, de toute la tension de son corps, d’en ressortir. […] Si ton corps est sain, si tes flancs respirent librement, si tes pieds sont à l’aise, toutes les richesses des rois ne t’achèteront rien de mieux. » Une épître charmante à son jardinier d’Ustica, qui a servi de modèle à celle de Boileau au jardinier d’Auteuil, est pleine d’un charme vraiment rural.

1316. (1896) Les origines du romantisme : étude critique sur la période révolutionnaire pp. 577-607

Beaucoup de ces déclassés de l’aristocratie se lancèrent à corps perdu dans le mouvement ; d’autres, plus prudents, plus timorés, René était de ceux-là, hésitèrent et attendirent les événements. […] La Décade philosophique (10 pluviôse an VII), après avoir constaté l’engouement pour les romans anglais, ajoutait, « nous pouvons affirmer que nous possédons en original et de notre propre cru des horreurs dont les plus difficiles peuvent se contenter, que nous ne manquons pas de personnages atroces, atrocement crayonnés, que nous avons des esprits corps, c’est-à-dire des fantômes qui n’en sont pas, heureuse invention par laquelle s’est éminemment distinguée mistress Radcliffe, que nous sommes riches en descriptions du soleil et de la lune, en sites romantiques, en événements romanesques, enfin que nous ne sommes pas moins experts que nos maîtres dans la science des longueurs et l’art de multiplier les volumes… On a réussi à naturaliser le spleen, on a essayé d’imiter l’humour ; mais il faut qu’il soit plus facile de faire du Radcliffe que du Sterne, je ne saurais du moins proclamer nos succès en ce genre, je dois me borner à dire que jusqu’ici on l’a seulement innocemment tenté ». […] Chactas qui, en ces matières, a l’expérience d’un Almaviva, raconte qu’il la tenait palpitante dans ses bras, attendant le moment psychologique où « la passion, en abattant son corps, allait triompher de sa vertu ».

1317. (1881) Études sur la littérature française moderne et contemporaine

les dieux (si les dieux y peuvent quelque chose) Devaient ravir ce corps dans une apothéose, D’incorruptible éther l’embaumer pour toujours, Et l’âme ! […] Le mot, c’est la pensée revêtue d’un corps. » Pénétré de l’influence des mots sur la pensée, ce savant ajoute : « Celui qui examinerait l’influence que des mots, de simples mots ont exercée sur l’esprit des hommes, pourrait écrire une histoire du monde plus instructive qu’aucune de celles qu’on a écrites jusqu’à présent. […] La tête, cette partie du corps humain dont nous sommes si fiers et qu’Ovide nous ordonne de porter toujours levée vers les étoiles, la tête, testa, signifie pot cassé. […] Pour nous, las de la médiocrité des hommes de notre génération, nous saluons avec un profond respect le vieillard admirable qui, logeant une âme saine dans un corps vigoureux, est demeuré plus jeune et plus vaillant que nous, à l’âge de quatre-vingt-cinq ans. […] Jeune encore, il célèbre avec un véritable lyrisme l’espèce de résurrection que son âme blessée et son corps malade trouvaient au bout de peu de jours dans la retraite des champs : « Combien l’âme reprend de ton et le cœur de puissance !

1318. (1912) Chateaubriand pp. 1-344

Il paraît qu’il y a des peines mentales totalement séparées de celles du corps, comme la douleur que nous sentons à la perte d’un ami, etc… Or, si l’âme souffre par elle-même, indépendamment du corps, il est à croire qu’elle pourra souffrir également dans une autre vie ; conséquemment, l’autre monde ne vaut pas mieux que celui-ci. […] Les deux hommes luttent corps à corps (« tels, sur les rivages du Nil ou dans les fleuves des Florides, deux crocodiles se disputent au printemps une femelle brillante ») ; et René terrasse son adversaire, qui ne lui pardonnera point. […] Ici, une chose extraordinaire et jolie (d’ailleurs conforme au dogme) : « Seule de tous les justes, Marie a conservé un corps. » Elle a seule un corps parmi les saints, dont les corps attendent dans la terre le jugement dernier, tandis que son corps, à elle, a été enlevé au ciel aussitôt après sa mort. […] Et d’ailleurs, si elle n’avait pas de corps, comment et avec quels ressouvenirs aurait-elle pitié, puisque la pitié est sa fonction ? […] Et Marie, — qui seule des justes a un corps, ne l’oublions pas, — approche du Calvaire immatériel.

1319. (1864) Corneille, Shakespeare et Goethe : étude sur l’influence anglo-germanique en France au XIXe siècle pp. -311

C’est pendant ce temps que les passions se déploient, que la fièvre de l’intelligence agite l’âme et le corps, et que les illusions s’effeuillent, comme disent les poètes. […] Il alla d’abord à Munich où il se prit pour la première fois corps à corps avec l’idéalisme allemand. […] « En Allemagne, disait-il, une pareille feuille serait impossible. » En effet, ce qui fit le succès et la fortune des doctrinaires ce fut leur esprit de corps, et le soin qu’ils mirent à se pousser mutuellement. […] Puis, maître de l’image ainsi fixée, il s’en approche, la retourne sous toutes ses faces ; il se prend corps à corps avec cette ombre ; il essaie d’en deviner l’essence aussi bien que d’en connaître les mobiles impressions. » Voilà un excellent procédé à recommander à un médecin aliéniste, mais dont un poète ferait mieux de se garder ! […] corps où rien n’est immonde,           Âme où rien n’est impur !

1320. (1900) La vie et les livres. Cinquième série pp. 1-352

On sait qu’un jour, étant occupé à visiter les arènes de Nîmes, il vit, à dix pas de lui, un oiseau charmant, un peu plus gros qu’une mésange, le corps gris de lin, avec des ailes rouges, noires et blanches. […] Mais on avouera qu’à de certains moments la démocratie tend vers l’ochlocratie, de même que les corps pesants tendent vers le centre de la terre. […] Presque toute la somme de vie intellectuelle et morale dont est capable notre nation s’est réfugiée dans ces deux corps, si différents d’ailleurs l’un de l’autre. […] Bergeret devient luxurieux, sinon de corps, du moins de consentement. […] Le fandango tourne et oscille… Tous les bras, tendus et levés, s’agitent en l’air, montent ou descendent avec de jolis mouvements cadencés, suivant les oscillations du corps.

1321. (1864) Histoire anecdotique de l’ancien théâtre en France. Tome I pp. 3-343

j’aimerais mieux te voir le corps tout nu. […] L’Académie en corps a beau le censurer Le public révolté s’obstine à l’admirer. […] Pour vous, vous êtes fille, et fille infiniment : Et moi, si je la suis, c’est de corps seulement. […] Mais ce qu’il n’avait pas prévu, c’est l’opposition de Messieurs de la Chambre des comptes, qui trouvèrent peu digne d’admettre dans un corps aussi recommandable par sa gravité, un homme de théâtre. […] La Cour renvoya l’affaire au lieutenant-général de police ; alors M. de La Reynie, homme de beaucoup d’esprit, qui voulut lire le corps du délit avant de prononcer.

1322. (1930) Le roman français pp. 1-197

… Le mari trompé qui cachète, à la cire brûlante, l’endroit du corps par où son épouse infidèle a péché). […] Il comprend les pauvres femmes qui vivent de leur corps, et qui n’ont pas beaucoup de cervelle. […] Il faut bien dire ce que c’est qu’un régiment, un corps d’armée, une armée, ce qu’est l’artillerie lourde, les services d’intendance, etc. […] Des cœurs et des corps qui moisissent. […] Et alors, l’homme, la virilité que renfermait son infortuné corps de femme, explose en elle.

1323. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. de Rémusat (passé et présent, mélanges) »

Le jeune homme fut aussitôt saisi d’un attrait invincible ; il était venu par curiosité, il revint par amour, et se jeta à corps perdu dans cette source nouvelle de connaissances. […] Le fait est que si l’on peut se figurer le corps social d’alors sans les accidents et les symptômes qui masquaient sa disposition fondamentale, il demandait plutôt à être traité dans ce sens ; mais ces accidents, ces symptômes ne faisaient-ils pas une complication grave, qui devenait par moments l’objet principal et qui contrariait la méthode pure ? […] Jouffroy, comment ce recueil périodique devint le point de réunion des trois groupes, des trois pelotons , comme il les appelle, qui formaient le corps de la jeune milice : 1° M.  […] Ils ne négligeaient aucune occasion d’assurer le moindre droit, le moindre privilège à l’ordre sénatorial et au corps des patriciens, comme aux défenseurs des mœurs et des lois du passé.

1324. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers » pp. 81-176

Un sénat, un corps législatif, un tribunat, un pouvoir exécutif des trois consuls, un conseil d’État, mais surtout un homme investi d’une force d’opinion irrésistible pour faire jouer le mécanisme et pour le déjouer s’il en était gêné dans son omnipotence, voilà toute la Constitution de l’an VIII. […] On remplit le Corps législatif de tous les représentants fatigués des idées de l’Assemblée constituante et à peine revenus des terreurs de la Convention. […] La formation de cette armée en divisions détachées, complètes en toutes armes et agissant en corps séparés, y avait développé au plus haut point le talent des généraux divisionnaires. […] « Vingt-cinq ans de luttes parlementaires, luttes dévorantes qui usent l’âme et le corps, avaient ruiné la santé de M. 

1325. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins » pp. 185-304

J’entrai résolument dans la lice, j’y combattis corps à corps les deux habiles et éloquents ministres défectionnaires de la couronne ; la victoire me resta toujours, sinon dans le scrutin, du moins dans l’opinion. […] La question qui n’est aujourd’hui que ministérielle sera monarchique à leur retour dans la chambre ; elle n’est posée aujourd’hui qu’entre vous et deux ministres, elle sera posée bientôt entre le roi et le peuple ; c’est une lutte corps à corps où le roi et le peuple seront vaincus tout à la fois.

1326. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Louis Veuillot »

Lisez, dans le Parfum de Rome, le chapitre sur les Indulgences : Par la création de l’Église, les fidèles constituent un corps immense, prolongé dans le ciel, sur la terre et dans les lieux de purification que nous appelons le purgatoire. […] Portion du corps mystique de Jésus-Christ, il a tous les bénéfices de la vie d’ensemble ; homme, il garde la prérogative, mêlée de péril et de gloire, de l’être responsable et libre. Ainsi ce corps de l’Église nous apparaît divinement humain… Le dogme des Indulgences n’est pas l’abri de la paresse : il est le dogme des douces condescendances envers la fragilité humaine… Quand nos mains sont pures, elles sont magnifiquement transformées ; elles deviennent le vase qui peut répandre à larges ondes l’eau du rafraîchissement… Ainsi nous pouvons, par la prière et les bonnes œuvres, descendre dans ce formidable purgatoire, etc. […] On pourrait presque dire qu’il a répandu dans ses articles et ses pamphlets ce que Taine devait ordonner en un corps de théorie dans les derniers volumes de ses Origines de la France contemporaine.

1327. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quatorzième. »

Quant à ces excès de table et ces exercices physiques sans mesure, après la tristesse des retours sur lui-même et l’abus de la solitude, qu’est-ce qui ressemble plus à cet état glissant du quiétisme, où, au sortir des extases de l’amour pur, le corps s’abandonne à tous ses appétits ? […] Ailleurs il l’engage à s’accoutumer à rentrer souvent au dedans de lui-même, « pour y renouveler la possession que Dieu doit avoir de son cœur. » Six ans auparavant il lui écrivait : « Au nom de Dieu, que l’oraison nourrisse votre cœur comme les repas nourrissent votre corps. […] Richelieu s’y entendait bien mieux, lui qui fondait ce grand corps pour discipliner la langue et la fixer ; et Bossuet, lui qui voulait que l’Académie française défendît cette langue contre la mobilité des caprices populaires. […] Comment Fénelon, qui écrit de génie, a-t-il parlé d’abandonner, même à un corps si considérable, ce qui est le plus beau privilège du génie, le droit de créer des expressions pour des idées nouvelles ?

1328. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre cinquième. Le réalisme. — Le trivialisme et les moyens d’y échapper. »

C’était surtout pour le cerveau que s’exerçait cette fantaisie ; ils croyaient naïvement que la disposition des circonvolutions du corps calleux, des ventricules, était livrée à une sorte de hasard ; ils croyaient naïvement pouvoir corriger la nature, dans leur parce que, ignorance, ils ne se doutaient pas du déterminisme profond qui relie toutes choses, qui fait qu’un simple détail a parfois le prix d’un monde et que, changer la courbe d’une circonvolution cérébrale, c’est modifier toute la direction d’une vie humaine. […] la pensée est le produit du corps entier… Et nous continuerions à dévider les cheveux emmêlés de la raison pure ! […] Nos événements intérieurs se groupent autour d’impressions et d’idées maîtresses : ils leur empruntent leur unité ; grâce à elles, ils forment corps. […] Dans le célèbre duo d’amour qui a servi de modèle à tous ceux de la littérature contemporaine, on retrouve l’accent chaud et passionné du Cantique des cantiques, et on pressent cette tendresse qui deviendra douloureuse chez Musset : « Lorsque je suis fatigué, ta vue me délasse… Quelque chose de toi que je ne puis te dire reste pour moi dans l’air où tu passes, sur l’herbe où tu t’assieds… Si je te touche seulement du bout du doigt, tout mon corps frémit de plaisir… Dis-moi par quel charme tu as pu m’enchanter. » A cette poésie s’ajoutent des traits d’observation psychologique : « Ô mon frère, je prie Dieu tous les jours pour ma mère, pour la tienne, pour toi ; mais, quand je prononce ton nom, il me semble que ma dévotion augmente. » Tout cela encadré dans des détails de réelle familiarité : « — Pourquoi vas-tu si loin et si haut me chercher des fruits et des fleurs ?

1329. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre sixième. Le roman psychologique et sociologique. »

Comme c’est fermé, on a moins froid au corps. […] Je voudrais avoir des ailes, une une carapace, écorce, souffler de la fumée, porter une trompe, tordre mon corps, me diviser partout, être en tout, m’émaner avec les odeurs, me développer comme les plantes, couler comme l’eau, vibrer comme le son, briller comme la lumière, me blottir sous toutes les formes, pénétrer chaque atome, descendre jusqu’au fond de la nature, — être la matière !  […] « Nous montrons le mécanisme de l’utile et du nuisible, nous dégageons le déterminisme des phénomènes humains et sociaux, pour qu’on puisse un jour dominer et diriger ces phénomènes73. » Le « circulus social » est identique au circulus vital ; dans la société comme dans le corps humain, il existe une solidarité qui lie les différents membres, les différents organes entre eux, de telle sorte que, si un organe se pourrit, beaucoup d’autres sont atteints, et une maladie très complexe se déclare. […] … » « Froide et fixe, la Niobé se redresse, sans espérance, et les yeux fixés au ciel, les flèches inévitables, et l’implacable sérénité des dieux… » Pour Taine, la « raison et la santé sont des accidents heureux » ; « le meilleur fruit de la science est la résignation froide, qui, pacifiant et préparant l’âme, réduit la souffrance à la douleur du corps… » … Après avoir montré que l’imperfection humaine est dans l’ordre, comme l’irrégularité foncière des facettes dans un cristal.

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