Quant à nous, nous avons parfaitement conscience de celle que nous venons d’éprouver en relisant ces petits traités d’une morale sans profondeur, sans tendresse et sans bonhomie.
Mais Charles Barbara, qui, je vous l’assure, est un homme, n’a pas craint de mettre son pied dans ce soulier éculé, rempli de sang, et, au lieu de barboter là-dedans comme un réaliste de 1855 ou un romantique de 1832, il nous a donné une étude superbe de vérité inattendue sur le remords dans les âmes fortes, — et, comme un chirurgien retire du fond d’une plaie des os brisés, des fragments de l’homme corporel il nous a retiré une conscience, les fragments d’une âme déchirée et mutilée par le crime… Jusqu’ici, la plupart des livres qui avaient peint le remords lui avaient fait pousser quelque cri sublime ou l’avaient peint accessoirement, de côté, le mêlant au torrent des autres sentiments de la vie.
Il lui faut, devant les yeux, la ligne écrite, pour prendre pleinement conscience de sa pensée et pour la remanier et élaborer. […] Et, à chaque fois, car on a une conscience, je me remettais à la lecture de Pierre Leroux. […] La France, en 1428, eut conscience d’elle et volonté d’être autant que la France de 1792. Il me semble que la conscience nationale est beaucoup plus haute et beaucoup plus claire au quinzième siècle qu’elle ne le fut un siècle plus tard. […] Or, il a pu souffrir cependant ; oui ; mais c’est très peu probable ; ce dont on a eu conscience laisse toujours des traces dans la mémoire.
Et quand sa première émotion a été passée, je ne sais si, dans les replis de sa conscience, M. […] On sent que Verlaine, lorsqu’il les écrivit, ne songeait qu’à les écrire, et non à les publier ; c’était une effusion spontanée, un soulagement de cœur, comme un cri de conscience. […] Mais les pauvres pousse-cailloux qui, après s’être battus vaillamment, arrivaient exténués à la frontière, ne devaient pas connaître (ce me semble) les mêmes agitations de conscience. […] Meurice et Vacquerie, les très dévoués éditeurs du maître, ont accompli avec conscience leur classement, et nul ne se fût mieux acquitté de cette tâche. […] Ils avaient conscience d’être chez eux. « Nos bois », disaient-ils en parlant de ces bois tant aimés et tant de fois parcourus.
il faut y avoir passé pour savoir ce qui en est, ce que demande et consomme un cours de Faculté fait en conscience, sans interruption ni relâche ; le métier est dévorant. […] Au soin qu’il prend, à l’importance et à l’insistance qu’il y met, Gandar nous rappelle un autre élève de l’École normale, un très estimable transfuge : avec plus d’élévation et de choix, mais non pas avec plus de conscience, Gandar est le Sarcey de la chaire165. […] Cela suffît à ma conscience, « Savonarole m’a très vivement préoccupé : c’est trop peu dire, il obsédait ma pensée… » « (Au même. — 22 juillet 1860.)… J’ai dit et pensé sur cette Renaissance italienne une foule de choses qui vaudraient peut-être la peine d’être conservées. […] Jugez quelles difficultés on rencontre en un tel sujet lorsqu’on ne peut le traiter ni du point de vue très précis de la tradition, ni avec un entier dégagement, et qu’on éprouve sur tant de questions délicates où la conscience est engagée, une égale horreur pour l’hypocrisie et pour la légèreté. […] Il a laissé un vif et poignant souvenir de son enseignement au cœur de ceux qui l’ont entendu : « On regrettera longtemps encore, me dit l’un des plus fidèles, le charme communicatif de cette parole sérieuse, animée et prudente, qui s’élevait parfois et qui, ressentant l’écho des nobles émotions qu’elle éveillait dans l’âme de ses auditeurs, touchait à la véritable éloquence… Pourquoi faut-il que tous ces trésors d’érudition, de conscience, d’élévation morale, le meilleur de lui-même, soient perdus pour le public ?
Je ne demande point au poète comique une morale positive ; je ne lui demande même pas de s’interdire la représentation de la ruse, du mensonge, de l’égoïsme, des mauvaises passions, de 1 immoralité en un mot ; la comédie ferait mieux de ne rien peindre de pire que des ridicules, mais il lui est permis de produire sur la scène le vice lui-même, pourvu que le poète ait une assez grande intelligence de son art et assez de tact moral pour empêcher que ma conscience ne vienne élever sa voix au milieu de la fête qu’il donne à mon esprit. Il ne faut pas que j’aie compassion des victimes de la fourberie ; il ne faut pas que je m’indigne contre les fourbes ; si le poète laisse la moindre place à l’indignation ou à la pitié, c’en est fait de toute franche gaieté comique ; il ne me fait rire qu’à contrecœur ; je suis mécontent de moi-même, parce que je ris malgré moi, mécontent de sa société de coquins, parce qu’ils sont moins plaisants qu’odieux, mécontent de lui tout le premier, parce qu’il blesse ma conscience en m’amusant. […] Si elles étaient critiques de profession, elles élèveraient Trissotin au rang d’Homère et rabaisseraient Homère bien au-dessous de Trissotin ; mais elles n’ont pas la moindre conscience de leur sottise. […] Il doit, en sortant de la sphère de la moralité, montrer avec franchise bien qu’avec modestie, que ce n’est point à notre conscience qu’il s’adresse, mais à notre imagination et à notre esprit. Notre conscience est un mentor discret qui veut bien n’être pas de la fête, mais qui la surveille de loin ; le poète comique ne l’invite pas à prendre place à table ; mais qu’il se garde de lui manquer de respect !
Il ne s’agit point ici de la sempiternelle histoire de l’adultère ou de l’argent, ni même d’un cas de conscience ou de la recherche humaine d’une règle de vie. […] Il veut la détromper, les acclamations couvrent sa voix… Et ainsi notre honnête homme sera nommé pour avoir promis ce que sa conscience lui faisait un devoir de refuser. […] Sa conscience s’élargit à voir, autour de lui, la largeur des autres consciences. […] Encore une petite capitulation de conscience à ajouter aux autres. […] Et c’est alors comme une décisive secousse dans le tréfonds de la conscience de Rémoussin.
Rosny décrit avec toute la conscience d’un analyste de l’école moderne. […] Bourget d’étudier toutes choses avec trop de soin et, par excès de conscience, de créer dans son livre ce qu’on appelle des « longueurs ». […] L’expression de la-douleur survivait à la conscience ; mais ce n’était pas ce reflet de souffrance qui me terrifiait. […] Rodenbach, comme celle des poètes de conscience, est de faire tenir le plus d’émotion, le plus d’impression possible dans un vers. […] Si encore cette gambade péniblement exécutée, et dont leur conscience n’est pas dupe, les faisait passer pour jeunes aux yeux des autres !
Et si ce ne serait pas, comme les matérialistes le veulent, que la moitié au moins, sinon toutes les lois de conscience, sont d’acquisition et d’appropriation aux besoins sociaux ? Car, quelle différence du crime qu’endormi je commets avec tranquillité d’âme, au crime d’un Gamahut éveillé et lucide en qui la conscience n’a pas parlé plus qu’à moi pendant le sommeil ? Ceux-là sont logiques avec eux-mêmes qui, pour ne point nier la conscience, font porter à l’homme éveillé la responsabilité des fautes qu’il a commises endormi. […] Dumas fils, aux faits de conscience, et, avec une subtilité de casuiste, les analyse à fond et les résout presque toujours de manière à sauvegarder la loi morale. […] Toudouze est un romancier à thèses ; du moins apporte-t-il à leur développement un talent d’écrivain et une conscience d’analyste très appréciables.
Quelques hommes plus éclairés, et d’autant plus infidèles, je ne dirai pas à leur conscience, mais à leur intelligence, menaient à l’assaut la plèbe aveugle276.
Lui aussi s’est cru obligé en conscience de dénigrer et de flétrir, dans la dernière moitié de sa vie tous ceux qu’il avait connus et cultivés dans la première ; il a méconnu son siècle et n’y a rien loué que lui.
Dès lors fut réveillée en eux la conscience d’une cause publique et fut prononcé le serment de la maintenir ; dès lors ils eurent une patrie qui prit le premier rang dans leurs affections.
Sous prétexte que toucher ou convaincre son lecteur, c’est sacrifier l’art en le subordonnant à une autre fin que lui-même, on vide son discours de toute vérité, que la raison, la conscience ou le cœur pourraient saisir : on poursuit une beauté toute matérielle et physique, que nul mélange du vrai, du bien, du beau moral même ne vient corrompre, et l’on travaille son style pour l’œil et l’oreille du public : on se fait ciseleur, coloriste ; on sculpte des phrases marmoréennes, on exécute d’étourdissantes variations ; on a une riche palette, un clavier étendu.
Dès le xe siècle, les masses formidables des châteaux, leurs doubles ou triples enceintes au-dessus desquelles se profile l’imprenable donjon, hérissent toutes les hauteurs, commandent les plaines et les rivières, menaçants symboles d’indépendance et d’énergie individuelles, qui donnent avec la conscience de la force la tentation de prendre l’égoïsme pour loi.
est un secret entre sa conscience et lui, un secret qu’il lui est interdit de trahir dans ses jugements.
Toute société, avant d’être réalisée, existe à l’état de rêve, de conception, de désir ; et cela devient de plus en plus vrai à mesure que les peuples prennent d’eux-mêmes et de leurs besoins une conscience plus claire.
Et ma foi, la main sur la conscience, j’ai la conviction, que si le penseur philosophe n’était pas travaillé par des ambitions terrestres, il ne désavouerait pas devant le public « ses idées générales » de cabinet particulier.
Si nous trouvons tant de charmes à révéler nos peines à quelque homme supérieur, à quelque conscience tranquille qui nous fortifie et nous fasse participer au calme dont elle jouit, quelles délices n’est-ce pas de parler de passions à l’Être impassible que nos confidences ne peuvent troubler, de faiblesse à l’Être tout-puissant qui peut nous donner un peu de sa force ?
Cet athéisme à ce qu’on appelle le droit public, ce défi à la conscience du genre humain, ce mépris de l’honnêteté en diplomatie, cette lâcheté devant ce qui est fort, cette oppression de ce qui est faible, ce Væ victis jeté impudemment à tous les droits, ce Sauve qui peut de tous les traités, cette déroute de toute diplomatie, ont un succès de scandale pour un jour, et amassent des charbons dévorants sur les cabinets qui les osent. […] Comme s’il y avait deux morales et deux consciences dans le ciel et sur la terre ! […] Un tel principe de diplomatie, que des fanatiques hors de sens cherchent à exhumer des croisades de Mahomet, ne laisserait ni une conscience libre ni une race indépendante sur le globe.
quelle perte je vais faire en perdant ce bon guide de ma conscience, de mon cœur, de mon esprit, de tout moi-même que Dieu lui avait confié et que je lui laissais avec tant d’abandon ! […] Mais cela, je ferais mal, je crois, de le produire, et la conscience se met entre la plume et mon papier. […] Je n’aimais pas Bijou alors ; ma conscience ne s’offusque pas d’intéresser le bon Dieu à la conservation d’une bête.