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547. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXII. La comtesse Guiccioli »

… Il y a de la sottise et du mensonge dans toute gloire faite par les hommes ; mais quelles plus charmantes et plus touchantes rectifications que celles de l’amour ? […] Mais il y a plus charmant et plus changeant encore que l’arc-en-ciel, pour exprimer toutes les nuances de la fantaisie, et c’est l’enfance ; c’est l’impatientante et adorable enfance !

548. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’empire russe depuis le congrès de vienne »

Caméléons qui prennent toutes les teintes, ayant dans l’esprit ces mouvements charmants du singe que Joubert discerne si bien dans l’esprit de Voltaire, ils sont, en raison de tout cela, de redoutables diplomates, mais, sans caractère comme tous ceux qui font beaucoup de personnages, ils n’ont à eux ni leur élégance, ni leurs mœurs, ni leur littérature, ni leurs vices. […] Tout grand pouvoir, qui se fait charmant, doit avoir pour les plus nobles esprits des fascinations d’Armide, mais quand on est un lynx, on garde ses yeux, et on ne permet même pas à la Toute-Puissance, devenue aimable, de vous les fermer avec sa plus douce main de fer, gantée de velours.

549. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le capitaine d’Arpentigny »

D’Arpentigny, qui ne répète point les observations des autres s’il en répète les procédés, a pris la main comme l’expression résumante de l’homme tout entier ; mais avec les ressources variées de son esprit, avec le sentiment des analogies, qui est en lui à une haute puissance, il aurait pu tout aussi bien prendre le pied, et pas de doute qu’il ne nous eût dit, à propos du pied comme à propos de la main, une foule de choses vraies et charmantes. […] Elle n’a plus à juger que de l’art avec lequel l’auteur de la Chiromancie ou la science de la main 9 a fait un livre d’analogies étincelant de rapprochements ingénieux, inattendus, saisissants, où la forme didactique, cette forme d’un ennui affreux, est sauvée par la qualité de l’esprit de l’auteur, dont l’expression ne faiblit jamais et qui couvre toutes les aridités et tous les pédantismes de la nomenclature avec le luxe des élégances les plus charmantes, les plus cavalières et les plus lestes !

550. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Buloz »

III Aussi eut-elle, sinon immédiatement, un succès qui se consolida, et avec une telle force qu’on put le croire indestructible… Pendant vingt-cinq ans pour le moins, en effet, ni les fautes de Buloz, — de piéton modeste et incomparable devenu directeur assis et incompétent, — ni ses humeurs peccantes qui feraient le bonheur d’un médecin de Molière, ni sa tyrannie bourrue et tracassière, ni son orgueil durci par la fortune, ni les bornes sourdes de son esprit, ni ses procédés hérissons, ni ses grognements ursins, ni l’horreur de ses meilleurs écrivains mis en fuite par cet ensemble de choses charmantes, ni l’ennui enfin le plus compacte qui soit jamais tombé d’un recueil périodique sur le lecteur assommé, rien n’a pu le diminuer, ce succès étrange, ou l’interrompre un seul jour… C’est à n’y pas croire ! […] Veut-on que nous parlions de ce pauvre Jules de la Madelène, cette charmante espérance littéraire, détruite dans sa fleur par le questionnaire qui ne donne pas la torture qu’aux œuvres ?

551. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « L’Abbé Prévost et Alexandre Dumas fils » pp. 287-303

quelque chose du principe morbide qui avait putréfié nos pères, et il nous en restait assez dans l’âme pour trouver charmante l’abominable sincérité de ce type de Manon Lescaut. […] Un autre jour, quand il faut sortir de Saint-Lazare, Desgrieux, qui appelle rompre ses fers casser la tête d’un portier d’un coup de pistolet, trouve un supérieur d’une bénignité si charmante que ni dans le moment, ni plus tard dans le cours du roman, car Desgrieux continue de cultiver cet aimable supérieur, il ne lui parle de cette bagatelle d’une cervelle de portier brûlée sous ses yeux !

552. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Marie Desylles » pp. 323-339

I Voici un livre mystérieux, douloureux et charmant, dont on peut se demander s’il est plus que de la littérature, et si ce ne serait pas de la vie, — de la vie réelle, qui aurait palpité et brûlé là-dedans… Est-ce un roman ou une histoire ? […] Ce qui me fait, ce sont ces lettres où elle a laissé l’empreinte tour à tour charmante et brûlante de son âme, et ces lettres-là, je les ai, et, à elles seules, elles m’en apprennent plus que ces déchirures d’histoire qui ne sont peut-être qu’un conte.

553. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Le Comte de Gobineau »

On invente des sociétés idéales et l’on écrit des pages charmantes, mais charmantes comme la femme qui caresse sa chimère.

554. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « IX » pp. 33-36

Mademoiselle Rachel a été un grand fait ; son avénement a été un de ces temps dont je vous parlais dans ma dernière chronique ; en effet, las de tous ces efforts prétentieux, pesants, ou de ces licences immorales, on s’est rejeté au classique pur, interprété par cette jeune et charmante actrice.

555. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lebrun, Pierre (1785-1873) »

Lebrun, en publiant en 1858 une édition complète de ses œuvres, nous a montré, par quelques pièces de vers charmantes, que, dès l’époque du premier Empire, il y avait bien des élans et des essors vers ces heureuses oasis de poésie qu’on a découvertes depuis et qu’il a été des premiers à pressentir, comme les navigateurs devinent les terres prochaines au souffle odorant des brises..

556. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre V. Beau côté de l’Histoire moderne. »

Inquiets et volages dans le bonheur, constants et invincibles dans l’adversité, formés pour les arts, civilisés jusqu’à l’excès, durant le calme de l’État ; grossiers et sauvages dans les troubles politiques, flottants comme des vaisseaux sans lest au gré des passions ; à présent dans les cieux, l’instant d’après dans les abîmes enthousiastes et du bien et du mal, faisant le premier sans en exiger de reconnaissance, et le second sans en sentir de remords ; ne se souvenant ni de leurs crimes, ni de leurs vertus ; amants pusillanimes de la vie pendant la paix ; prodigues de leurs jours dans les batailles ; vains, railleurs, ambitieux, à la fois routiniers et novateurs, méprisant tout ce qui n’est pas eux ; individuellement les plus aimables des hommes, en corps les plus désagréables de tous ; charmants dans leur propre pays, insupportables chez l’étranger ; tour à tour plus doux, plus innocents que l’agneau, et plus impitoyables, plus féroces que le tigre : tels furent les Athéniens d’autrefois, et tels sont les Français d’aujourd’hui.

557. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre VI. La poésie. Tennyson. »

On se trouva surpris, et d’une surprise charmante. […] Et ce n’est pas trop d’un art si juste, si consommé, pour peindre les miévreries charmantes, les subites fiertés, les demi-rougeurs, les caprices imperceptibles et fuyants de la beauté féminine. […] II Ce charmant rêveur n’était-il qu’un dilettante ? […] Il y a une grâce charmante et moqueuse dans cette peinture d’une Université de filles. […] Cette simplicité et cette paix sont étranges et charmantes ; on se laisse aller, on est bien, on ne désire pas aller plus vite ; il semble que volontiers on resterait toujours ainsi.

558. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIe entretien. Ossian fils de Fingal, (suite) »

Astre charmant, tu n’as pas brillé longtemps sur nos montagnes. […] Astre charmant, tu as bientôt disparu ! […] c’est ton père : « Pourquoi, dit-il, pourquoi brilles-tu sitôt sur nos nuages, astre charmant de Lutha ? […] Là, sommeille l’aimable Roscana ; là, le matelot, quand il arrête son navire dans une nuit orageuse, voit son ombre charmante, vêtue du plus blanc des brouillards de la montagne. « Tu es aimable, dit-il, ô Roscana ! […] Le vaillant Colgar et la charmante Anyra vivent sous tes yeux.

559. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1872 » pp. 3-70

« Lourmel, un garçon charmant, avec une élégance, un chic à lui seul. […] Elle était charmante, toute blanche, avec un trait dans l’œil, ce qui est assez commun chez nous. […] Elle disait à une amie : « Tu ne sais pas, comme maintenant il est charmant… comme il est doux, même quand il est malade… et puis, comme il est bon pour le bon dieu !  […] Au milieu du déjeuner, à propos de l’huile d’une salade, qu’il trouve excellente, il se met à faire un historique imagé des huiles et des miels de la Grèce, qu’il termine, en comparant le miel de l’Hymète « à du sablon jaune entrelardé de bougie. » Les phrases charmantes, qui sortent de sa bouche, ont quelque chose de mécanique ; elles finissent, elles s’arrêtent, tout à coup, comme une phrase, qu’aurait mise Vaucanson dans le creux d’un automate. […] Au milieu de cette bibelotterie écrasante, une très charmante petite femme, aux paupières lourdes, les paupières d’une houri turque, aux interrogations enfantines, à l’air boudeur d’une pensionnaire en pénitence, une jeune Rothschild s’ennuyant, s’ennuyant, comme seuls les millionnaires savent s’ennuyer.

560. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Conclusions »

Il resterait encore à montrer que l’indéfini, par ce qu’il oblitère dans les objets et par ce qu’il ne peut eu altérer que certaines catégories, coïncide le plus souvent avec le beau, le charmant, le suprême. […] Il décrit de préférence des lieux abrupts et sauvages ou féerique-ment riches, représente volontiers l’homme comme malade, difforme, pâle, blessé ou charmant et magnifique, l’analyse en ses passions extrêmes et déchaînées : l’amour éperdu, le remords angoissant, la mélancolie profonde, la douleur de préférence ou la joie lyrique et folle, le doue d’une noblesse ou d’une férocité d’âme également démesurées, le place en des incidents forcés où la crise des émotions se trouve grandie par leur conflit. […] Tourguénef fut, jusqu’à la fin de sa vie, le conteur charmant et l’esprit libre qu’il avait été à ses débuts. […] C’est ainsi que dans les œuvres de certains poètes, des sensations ordinairement joyeuses, une journée de printemps, le déferlement d’une belle mer grise sur une plage sinueuse, le regard charmant d’une femme, se trouvent décrites en termes de mélancolie ; tandis que d’autres, renfermant en elles une particule de tristesse, sont dénoncées et calomniées. […] À l’exemple des grands écrivains de ces pays, nos romantiques et leurs prédécesseurs donnèrent à sentir les émotions charmantes et grandioses que suscite la vue de beaux et sombres paysages, ils conçurent l’homme non plus à la manière de Descartes, comme un animal surtout raisonnable et dont la sensibilité aisément gouvernée se manifeste par de doux et calmes mouvements, mais comme un être surtout et violemment passionné, fou d’amour et de colère, désespéré de mélancolie, exalté et ravi d’enthousiasme, d’autant plus grand et plus admirable que ses accès de douleur et de joie le transportaient et le déréglaient davantage.

561. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIIe entretien. I. — Une page de mémoires. Comment je suis devenu poète » pp. 365-444

Ses conversations familières avec nous dans les jardins, pendant les heures de délassement, étaient les meilleures et les plus charmantes de ses leçons. […] La nuit, tour à tour charmante ou sinistre, a le rossignol et le hibou ; l’un chante pour le zéphyre, les bocages, la lune, les amants, l’autre pour les vents, les vieilles forêts, les ténèbres et les morts. […] Mille palais s’élèvent, et chaque palais est un nid ; chaque nid voit des métamorphoses charmantes : un œuf brillant, ensuite un petit couvert de duvet. […] J’ai dit, dans cette demi-confidence de première jeunesse, que, pendant notre séjour dans l’île, j’écrivais de temps en temps des vers mentalement adressés à la charmante fille du pêcheur, bien qu’elle ignorât ce que c’était que des vers et dans quelle langue ces vers étaient écrits. […] XI De lichens et de joncs sordidement vêtue, De ses habits mouillés le flot s’égoutte en vain ; Dans ses haillons verdis la charmante statue Sous l’outrage du sort conserve un front divin ; Le filet de cristal que sa robe distille Abreuve le pasteur, l’enfant, le matelot, Fait boire l’oranger dans les ravins de l’île, Et, quand il a rempli mille cruches d’argile, Va jusque dans la mer se perdre à petit flot.

562. (1896) Impressions de théâtre. Neuvième série

mais, se récriait-on, ce Jean Giraud est charmant. […] Ceci posé, Brignol est charmant. […] Et l’on me dit qu’il est charmant et que tous ses amis l’adorent. […] Charmante figure, que M.  […] Mais elle est charmante, charmante, charmante.

563. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1893 » pp. 97-181

Il hérite aussi de papiers, parmi lesquels il y a des correspondances amoureuses de Gautier, de Saint-Victor, de Doré, et surtout tout un gros paquet de lettres d’About, qu’il déclare tout à fait charmantes de passion et d’esprit. […] J’avais ce soir, en chemin de fer, vis-à-vis de moi, une vieille femme, toute charmante, d’une grâce séductrice. […] -S. — Et ainsi que vous l’avez ajouté à la plume sur votre carte de visite : chevalier de la Légion d’honneur. » * * * Une excursion à Thiers en compagnie de mon jeune et charmant compagnon d’eau, Maurice Pottecher. […] Ainsi Macherin ferait-il un original nom d’ouvrier républicain, et les charmantes localités pour un roman : le Grand-Vert et : le Petit Vert ! […] Ces œils-de-bœuf de lumière du fond des loges, ça tue tout, ça éteint tout, et le doux éclat des toilettes claires et des décolletages, et aujourd’hui, comme me le disait la comtesse Greffulhe, qui était charmante en blanc, il y avait trop d’uniformes de militaires, attirant l’œil à leurs chamarrures, et empêchant les femmes de ressortir du fond sourd des habits noirs.

564. (1888) Poètes et romanciers

Chaque siècle, comme chaque année, a son printemps ; avec ces chers et charmants poètes, ce printemps est parti. […] Dans un de ses derniers Entretiens, M. de Lamartine a un mot charmant. […] Il convient admirablement à l’inspiration courte des jeunes parnassiens, qui en ont tiré de charmants effets. […] Feuillet n’ait su peindre que ces amours éphémères, ces légères ivresses d’une heure charmante que l’heure prochaine dissipe. […] Jusque-là, c’est moins un roman qu’une charmante psychologie de bébés.

565. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Alphonse Karr. Ce qu’il y a dans une bouteille d’encre, Geneviève. »

Les deux enfants de madame Lauter, après la disparition de son mari, grandissent et deviennent, Léon un artiste charmant, Geneviève une personne adorable et sensible : Albert et Rose, leur cousin et cousine germaine, avec qui ils ont grandi, ont aussi une vive fleur d’âme et de jeunesse.

566. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bonnières, Robert de (1850-1905) »

M. de Bonnières, dans ce coquet volume, a tenté de ressusciter la jolie langue et la charmante allure de style des conteurs du xviiie  siècle.

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