/ 3286
1200. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Droz. » pp. 165-184

Après les journées des 2 et 3 septembre, un de ses compatriotes, sauvé du massacre de l’Abbaye par un des massacreurs, crut devoir inviter à dîner ce sauveur tout étonné de l’être ; et Droz, que son ami avait appelé à son aide pour faire les honneurs du repas, dîna entre deux septembriseurs, dont l’un n’avait pas encore quitté son sabre. […] Dans cet Essai sur l’art oratoire, il est disciple de Blair : dans les autres discours de cette date, il semble être en philosophie disciple de Condillac, de Garat, des maîtres du jour ; mais, à je ne sais quoi d’affectueux et de pur, à ce que les Anglais appellent feeling, on sent que, pour peu qu’il se développe, il aura bien plus de rapports d’affinité avec ces compatriotes de Blair, les Stewart, les Fergusson, les Beattie, avec cette école morale, économique, tour à tour occupée de l’utile et du beau, à la fois philosophique et religieuse. […] Plusieurs de ceux qui composaient cette petite réunion étaient déjà membres de l’Académie française ; bientôt ils y appelèrent les autres. […] Grâce à lui, ce qu’il appelle les trois phases de la vie politique de Mirabeau depuis 89 jusqu’à sa mort, les circonstances particulières et les vicissitudes de ses relations avec la Cour, sont aussi éclaircies désormais qu’il est permis de l’espérer22, et, quelque jugement qu’on porte sur le caractère de l’homme, le génie de Mirabeau en ressort plus grand, il est piquant de voir cet esprit juste, droit et pur de M. 

1201. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — I. » pp. 441-459

Il le range, pour son Contrat social, dans ce qu’il appelle la secte des politiques, gens inutiles et dangereux qui, au lieu de s’appliquer à faire aller la société et à la servir, ont la manie de la décomposer pour en rechercher les raisons et les causes, comme si elle n’était pas chose naturelle et conforme à la nature humaine. […] Nommé membre du Corps législatif en 95, il fut appelé par son âge à faire partie du Conseil des Anciens, et il appartient désormais à toute la France. […] Une des discussions où il se déploya avec le plus d’énergie et d’avantage, ce fut à propos de ce qu’on appelait le décret du 3 Brumaire. […] S’élevant aux vrais principes de la liberté religieuse, il fait voir qu’au point de vue politique, il est impossible de ne pas appliquer « à une religion connue, ancienne, longtemps dominante et même exclusivement autorisée, professée par les trois quarts des Français, les principes de tolérance et de liberté que la Constitution proclame pour tous les cultes : Voudrions-nous aujourd’hui, s’écrie-t-il, que l’intolérance philosophique remplaçât ce que nous appelons l’intolérance sacerdotale ? 

1202. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1853 » pp. 31-55

Précisément avant nous, fut appelé un petit jeune homme maigriot, aux regards d’halluciné, qui avait, de son autorité privée, condamné à mort l’Empereur, et envoyé son acte de condamnation à toutes les ambassades. […] Enfin on appela notre cause. […] Heureusement, Jacques avait un capitaine qui se pâmait d’aise à ses charges, et qui le faisait appeler à tout moment : — Ah ! […] Les gens de Veules ont choisi un endroit sur la falaise pour causer : ils l’ont appelé le Menteux.

1203. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre II : Philosophie politique de Tocqueville »

Elles étaient ce que Bacon appelle des axiomes moyens, et non des axiomes généralissimes. […] On n’a pas assez remarqué que sur les républiques anciennes ce sage politique a exactement les mêmes idées que Mably et que Rousseau : ce qu’il appelle la république n’est pour lui qu’un rêve des temps antiques ; il n’a eu aucun pressentiment de la démocratie moderne. […] Ce que l’école libérale appelait le despotisme de la démocratie, c’était la violence démagogique, le gouvernement brutal et sauvage des masses ; mais Tocqueville avait en vue une autre espèce de despotisme, non pas celui de la démocratie militante, entraînée par la lutte à d’abominables violences et manifestant à la fois une sauvage grandeur : non, il croyait voir la démocratie au repos, nivelant et abaissant successivement tous les individus, s’immisçant dans tous les intérêts, imposant à tous des règles uniformes et minutieuses, traitant les hommes comme des abstractions, assujettissant la société à un mouvement mécanique, et venant à la fin se reposer dans le pouvoir illimité d’un seul. […] En un mot, ce qu’il appelait tempérer la démocratie, c’était y répandre l’esprit de liberté.

1204. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre II. Les Normands. » pp. 72-164

Ils n’appellent pas les choses par leur nom, surtout en matière d’amour ; ils vous les laissent deviner : ils vous jugent aussi éveillé et avisé qu’eux-mêmes94. […] Nos honnêtes versificateurs anglais d’outre-Manche, comme leurs précepteurs de Normandie et de l’Île-de-France, garnissent de rimes des dissertations et des histoires qu’ils appellent poëmes. […] C’est un enfant aimable et bavard ; ce qu’on appelle alors sa poésie, la poésie neuve, n’est qu’un babil raffiné, une puérilité vieillotte. […] Ils ne portent point de laine, hormis un pauvre gilet sous leur vêtement de dessus, qui est fait de grosse toile et qu’ils appellent une blouse. […] C’est cette classe d’hommes qui s’est rendue jadis si redoutable aux Français, et, bien qu’ils ne soient appelés ni maîtres ni messires, comme les gentilshommes et les chevaliers, mais simplement Jean et Thomas, ils ont rendu de grands services dans nos guerres.

1205. (1894) La bataille littéraire. Septième série (1893) pp. -307

 » tout cela est d’un mouvement endiablé qui force l’attention et appelle souvent le rire. […] Dans la nouvelle vie qui lui est faite, elle apprécie tout ce que le cœur de l’homme qu’elle appelle son père, renferme de bonté et d’honneur. […] On se remet à l’œuvre, comme la fourmi dont la fourmilière a été détruite ; au lieu d’en appeler aux âges futurs on n’en appelle qu’à soi-même, et l’on fait bien. […] Un bourreau avait, par amour de la symétrie (il s’appelait Outredebanque), groupé sur son échafaud les cadavres de l’un et l’autre sexe dans des positions étudiées. […] Lui, Joson (on l’appelait ainsi), s’incline devant la cruelle nature, parce qu’il voit Dieu derrière elle.

1206. (1925) Comment on devient écrivain

Il est une autre prose plus dangereuse, que j’appellerais l’émail du bon style, les jolis clichés de ceux qui écrivent bien. […] Balzac appelait Etudes philosophiques des romans d’observation comme les autres. […] Il s’appelait Niveleau. […] En 1840, tous les personnages s’appelaient Borval, Clairval, Dorival, Blainville, Sainville, Meurville. […] Racine a appelé Tacite le plus grand peintre de l’antiquité.

1207. (1885) Les étapes d’un naturaliste : impressions et critiques pp. -302

Les modérés avaient d’abord gouverné la ville ; ils formaient ce que l’on appelait alors la Société des Amis de la Constitution. […] Les chapeaux, les mouchoirs étaient en l’air, Roumestan appela le musicien sur l’estrade et lui sauta au cou : “Tu m’as fait pleurer, mon brave ! […] C’est ce qu’on a appelé l’âge d’Elisabeth. […] Viennet, un autre immortel d’antan, dont le chef-d’œuvre s’appelait Arbogaste. […] Elle s’appelait Carmen, son père Sérafin Balduque, la vieille bonne Quica.

1208. (1859) Moralistes des seizième et dix-septième siècles

Saint-Marc Girardin appelle « une sagesse et une vertu séculières ». […] Charron pourrait, dans un sens, être appelé le traducteur officiel ou le satellite de Montaigne. […] On ne s’en tint pas là, on l’appela aussi huguenot et même idolâtre. […] Il l’appelle de sa propre voix, comme il avait appelé Abraham. […] Pour ne pas nous compromettre, nous l’appellerons le non-moi.

1209. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Sur le Louis XVI de M. Amédée Renée » pp. 339-344

L’esprit dans lequel le livre est conçu est un bon esprit ; j’appelle ainsi celui qui consiste à ne pas arriver sur le sujet avec une prévention et un système, à se pénétrer de l’esprit même de l’époque qui est en cause, à recueillir tous les témoignages, à s’éclairer de toutes les dépositions et à nous rendre avec gravité, avec bon sens et modération, le résultat de cette enquête si délicate et si compliquée. […] S’il avait eu un de ces éclairs d’indignation comme en avait à ses côtés sa généreuse compagne, si le sang lui avait monté au visage, s’il s’était souvenu qu’il était le dernier roi d’une race militaire, s’il avait résisté à la force par la force, l’épée à la main, avec ses dévoués serviteurs qui y comptaient ; si, dans le conflit, il s’était seulement fait tuer en gentilhomme sur les marches de son palais, l’histoire de la Révolution eût changé ; il n’y aurait pas eu cette tache juridique sanglante qui s’appelle le procès de Louis XVI, et qui fut la plaie livide et toujours ouverte pendant de longues années.

1210. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires du marquis d’Argenson, ministre sous Louis XV »

Dès 1723, un certain abbé Alary avait fondé une société politique, composée de membres libres, et appelée le club de l’Entresol du nom du lieu où se tenaient les conférences. […] Le caractère du style aussi bien que de la vie du marquis d’Argenson est le bon sens, comme on le croira sans peine ; ennemi du clinquant et de ce qu’il appelle les épigrammes politiques, il ne l’est pas moins des pointes et des épigrammes du langage ; avide avant tout de vérités proverbiales, de dictons populaires, et heureux d’en confirmer sa pensée, la trivialité même ne l’effraye pas, il ne l’évite jamais ; mais par malheur la raison n’est pas toujours triviale ; il arrive donc souvent aux saillies à force de sens, et beaucoup de ses comparaisons sont piquantes parce, qu’elles sont justes, Qu’Albéroni, par exemple, vivant à Rome après sa disgrâce, entreprenne, au nom du pape, souverain temporel, la conquête de la petite république de Saint-Marin ; M. d’Argenson, qui vient de nous exposer avec précision et peut-être sécheresse les travaux et les talents du cardinal, saura bien ici nommer cette entreprise une parodie des comédies héroïques qu’Albéroni a données à l’Espagne vingt ans auparavant, et, lui-même, le montrer joueur ruiné quoique habile qui se conduit en jouant aux douze sous la fiche, comme il faisait autrefois en jouant au louis le point.

1211. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Moréas, Jean (1856-1910) »

Paul Verlaine l’a appelé : Routier de l’époque insigne, Violant des vilanelles. […] Remy de Gourmont Lorsqu’il appela un de ses poèmes Le Pèlerin passionné, il donna de lui-même et de son rôle, et de ses jeux parmi nous, une idée excellente et d’un symbolisme très raisonnable.

1212. (1887) Discours et conférences « Appendice à la précédente conférence »

Il confirme ce que les orientalistes intelligents de l’Europe ont souvent dit : c’est que l’Afghanistan est de toute l’Asie, le Japon excepté, le pays qui présente le plus d’éléments constitutifs de ce que nous appelons une nation. […] Le cheik n’admet pas les distinctions que la critique historique nous conduit à faire dans ces grands faits complexes qui s’appellent empires et conquêtes.

1213. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre IV »

défendent d’imprimer le mot sou dans une indication de prix, peu de gens se sont encore résignés à appeler ce pauvre sou proscrit autrement que par son nom unique et vénérable. […] « Furetières avait raison de regretter le nom énergique d’orgueil, employé par les ouvriers pour désigner l’appui qui fait dresser la tète du levier, et que les savants appelaient du beau nom d’hypomoclion. » Marty-Laveaux, De l’enseignement de notre langue (1872). — On se souvient des conseils donnés par Ronsard dans son Art poétique : « Tu practiqueras bien souvent les artisans de tous mestiers… »

1214. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Introduction »

Ces faits, ainsi qu’on le verra dans les derniers chapitres de cet ouvrage, semblent jeter quelque lumière sur l’origine des espèces, « ce mystère des mystères », ainsi que l’a appelé l’un de nos plus grands philosophes. […] Je suis pleinement convaincu que les espèces ne sont pas immuables, mais que toutes celles qui appartiennent à ce qu’on appelle le même genre, sont la postérité directe de quelque autre espèce généralement éteinte, de la même manière que les variétés reconnues d’une espèce quelconque descendent en droite ligne de cette espèce.

1215. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 31, que le jugement du public ne se retracte point, et qu’il se perfectionne toujours » pp. 422-431

Or, tout le monde sçait bien que l’éneïde est de ces ouvrages qu’on appelle posthumes, parce qu’ils ne sont publiez qu’après la mort de l’auteur. […] Je dis donc en premier lieu, que le public se trompe quelquefois lorsque trop épris du mérite des productions nouvelles qui le touchent et qui lui plaisent, il décide en usurpant mal à propos les droits de la postérité, que ces productions sont du même genre que ceux des ouvrages des grecs ou des romains, qu’on appelle vulgairement des ouvrages consacrez, et que ses contemporains leurs auteurs, seront toujours les premiers poetes de leur langue.

1216. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — I. Takisé, Le taureau de la vieille »

Celle-ci donna à la plus jolie le nom de Takisé et appela l’autre Aïssa. […] Avant même de boire l’eau qu’on lui offrait, il appela sa préférée « Takisé !

1217. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — III » pp. 455-479

La voix de l’amitié qui l’appelait lui vint du Nord, de Copenhague où il avait une amie, Mme Brun, sœur de l’érudit et pieux évêque de Seeland, le poète Munter. […] Son esprit que je suppose supérieur, en plaçant des idées centrales parmi les idées isolées et traînantes de la société où elle se trouve, fera éprouver le charme de ce que j’appelle harmonie à toutes les personnes qui l’écoutent. […] L’idée me vint que, puisque après la mort il y a, dit-on, un développement de pensées, pourquoi n’y aurait-il pas aussi un développement de sentiments, de manière que les sentiments que nous avons eus iraient en se développant après la mort, et que les harmonies qui constituent les sentiments aimants prendraient un essor proportionné à l’étendue du principe mystérieux appelé âme ?  […] J’ai profité amplement du travail de M. de Circourt dans tout ce qui a précédé, et j’en donnerai encore l’extrait suivant : … En quittant le temple de l’ennui, comme il appelait Berne, « le lieu où il avait failli devenir vieux, Bonstetten, veuf depuis quelques années, fit à son fils la cession de Valeyres et de tous ses biens-fonds. […] J’ai vu le grave et chaleureux publiciste littéralement ivre de joie à l’aspect de ce qu’il appelait ce grand succès ; Bonstetten, plus modéré, parce que la grâce n’admet aucune violence, n’applaudissait pas moins de tout son cœur.

1218. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre II. Deuxième élément, l’esprit classique. »

Au dix-septième siècle, on les appelle « les honnêtes gens », et c’est à eux désormais que s’adresse l’écrivain, même le plus abstrait. « L’honnête homme, dit Descartes, n’a pas besoin d’avoir lu tous les livres ni d’avoir appris soigneusement tout ce qu’on enseigne dans les écoles » ; et il intitule son dernier traité « Recherche de la vérité selon les lumières naturelles qui, à elles seules et sans le secours de la religion et de la philosophie, déterminent les opinions que doit avoir un honnête homme sur toutes les choses qui doivent faire l’objet de ses pensées349 ». […] Ils ne sont point appelés poètes ni géomètres, mais ils jugent de tous ceux-là352. » — Au dix-huitième siècle, leur autorité est souveraine. Dans la grande foule composée « d’imbéciles » et parsemée de cuistres, il y a, dit Voltaire, « un petit troupeau séparé qu’on appelle la bonne compagnie ; ce petit troupeau, étant riche, bien élevé, instruit, poli, est comme la fleur du genre humain ; c’est pour lui que les plus grands hommes ont travaillé ; c’est lui qui donne la réputation353 ». […] Il en écarte le plus qu’il peut, tant qu’enfin il n’en garde qu’un extrait écourté, un résidu évaporé, un nom presque vide, bref ce qu’on appelle une abstraction creuse. […] Car je ne connais presque personne aujourd’hui qu’on puisse véritablement appeler savant. » — Du Cange, quelques bénédictins comme Mabillon, plus tard l’académicien Fréret, Bréquigny, le président Bouhier, à Dijon, bref les vrais érudits, restent sans influence.

1219. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Francisque Sarcey »

Et on le voit, on l’entend : il se conjouit dans sa barbe, il vous appelle « mon ami », il va vous taper sur le ventre. […] Les injures glissent comme de l’eau sur cette peau que des gens spirituels appellent une peau d’hippopotame et qui n’est que la peau d’un brave homme. […] Cette convention, c’est ce qu’on a appelé le « grossissement dramatique ». […] Cela s’appelle une convention. […] Sarcey appelle ces rencontres les « scènes à faire ».

/ 3286