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992. (1874) Premiers lundis. Tome II « La Revue encyclopédique. Publiée par MM. H. Carnot et P. Leroux »

Il semble que la chute définitive de l’ancien édifice, qu’on s’obstinait à restaurer, ait, à l’instant, mis à nu les fondements encore mal dessinés de la société future que les novateurs construisaient dans l’ombre. […] Les bourgeois ont pris la place de l’ancienne aristocratie, et, dans le jeu de la machine représentative, doivent en remplir la fonction.

993. (1874) Premiers lundis. Tome II « Adam Mickiewicz. Le Livre des pèlerins polonais. »

La comparaison jusqu’ici est fort belle, mais elle n’est juste encore que si l’on suppose la critique, dans toute sa profondeur et sa continuité, s’appliquant aux grands monuments des âges anciens. […] Car ce petit livre est une œuvre à part ; une conviction profondément nationale et religieuse l’a dicté au poète fervent ; il est destiné, comme un viatique moral, au peuple errant ou captif chez qui l’ancienne foi catholique semble avoir fait alliance avec le sentiment plus moderne de la liberté.

994. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VII. De la littérature latine, depuis la mort d’Auguste jusqu’au règne des Antonins » pp. 176-187

Pline l’ancien est l’écrivain de l’antiquité qui a le plus approché de la vérité dans les sciences. […] La civilisation de l’Europe, l’établissement de la religion chrétienne, les découvertes des sciences, la publicité des lumières ont posé de nouvelles barrières à la dépravation, et détruit d’anciennes causes de barbarie.

995. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre IX. L’avenir de la Physique mathématique. »

La mécanique vulgaire, plus simple, resterait une première approximation puisqu’elle serait vraie pour les vitesses qui ne seraient pas très grandes, de sorte qu’on retrouverait encore l’ancienne dynamique sous la nouvelle. Nous n’aurions pas à regretter d’avoir cru aux principes, et même, comme les vitesses trop grandes pour les anciennes formules ne seraient jamais qu’exceptionnelles, le plus sûr dans la pratique serait encore de faire comme si on continuait à y croire.

996. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre IV Le Bovarysme des collectivités : sa forme imitative »

Pour avoir mal observé les institutions de la cité ancienne, on a imaginé de les faire revivre chez nous. On s’est fait illusion sur la liberté chez les anciens et pour cela seul, la liberté chez les modernes a été mise en péril. »7 D’un point de vue plus général, on pourrait aussi montrer que la Révolution française exprime un Bovarysme idéologique dont le mécanisme caché sera l’objet par la suite d’un complet examen, et qui, en la circonstance, a pour effet de substituer une réalité rationnelle à la réalité historique, de mettre le fait concret sous le gouvernement de l’idée abstraite.

997. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préface des « Feuilles d’automne » (1831) »

Ce n’est partout, sur le sol de la vieille Europe, que guerres religieuses, guerres civiles, guerres pour un dogme, guerres pour un sacrement, guerres pour une idée, de peuple à peuple, de roi à roi, d’homme à homme, que cliquetis d’épées toujours tirées et de docteurs toujours irrités, que commotions politiques, que chutes et écroulements des choses anciennes, que bruyant et sonore avènement des nouveautés ; en même temps, ce n’est dans l’art que chefs-d’œuvre. […] Musa ales, dit un ancien.

998. (1879) Balzac, sa méthode de travail

C’est avec raison qu’Ourliac ajoute que le roman de César Birotteau « fut composé en vingt jours par M. de Balzac, malgré l’imprimerie, composé en vingt jours par l’imprimerie, malgré M. de Balzac1. » Un ancien éditeur, M.  […] Ancien imprimeur et connaissant le prix auquel entraînent les corrections — cinquante centimes l’heure, — Balzac semble avoir été absolument indifférent à ces dépenses qui prennent d’assez fortes proportions quand le démon de la rature s’empare d’un écrivain.

999. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 21, du choix des sujets des comedies, où il en faut mettre la scene, des comedies romaines » pp. 157-170

, dit Diomede ancien auteur qui a écrit quand l’empire romain subsistoit encore. […] Nos poëtes lyriques et nos poëtes comiques ont fait la même méprise que Plaute et que Terence, lorsque notre goût perfectionné par Malherbe et par ses successeurs, devint assez difficile pour ne s’accommoder plus des anciennes farces ; nos poëtes comiques françois tâcherent de perfectionner leur tâche, comme les autres poëtes avoient perfectionné la leur.

1000. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 40, si le pouvoir de la peinture sur les hommes est plus grand que le pouvoir de la poësie » pp. 393-405

Les anciens prétendoient que leurs divinitez eussent été mieux servies par les peintres et par les sculpteurs, que par les poëtes. […] L’espece de paralelle que je viens de faire n’est pas aussi rempli d’érudition que la comparaison de la peinture et de la poësie qui se trouve dans le sçavant livre de Dujon le fils sur la peinture des anciens ; mais je m’imagine que mes refléxions vont mieux au fait que l’érudition de cet auteur.

1001. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 23, que la voïe de discussion n’est pas aussi bonne pour connoître le mérite des poëmes et des tableaux, que celle du sentiment » pp. 341-353

Comme nous reprochons aujourd’hui aux anciens d’avoir cru l’horreur du vuide et l’influence des astres, nos petits neveux nous reprocheront un jour de semblables erreurs, que le raisonnement entreprendroit en vain de démêler, mais que l’expérience et le temps sçauront bien mettre en évidence. […] On voit par les livres du Boccalin, qu’il sçavoit tout ce que les anciens et les modernes ont écrit de plus ingénieux sur le grand art de gouverner les peuples.

1002. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXV. De Paul Jove, et de ses éloges. »

Ainsi, on y voit parmi les anciens, Alexandre, Pyrrhus, Annibal et Scipion ; parmi les destructeurs de l’empire, Attila et Totila ; parmi ses vengeurs, Narsès qui, né esclave, devint général, et qui eunuque, fut un grand homme. […] À la suite de tous ces noms de guerriers ou de princes rassemblés des trois parties du monde, c’est un spectacle curieux de retrouver les noms du Dante, de Pétrarque, de Boccace, de l’Arioste, du cardinal Bibiéna, auteur de la comédie de la Calandre, jouée au Vatican sous Léon X, et du célèbre Machiavel ; sans compter cette foule innombrable de savants, presque tous Grecs ou Italiens, qui dénués, il est vrai, de ce mérite rare du génie, contribuèrent, cependant, par leurs travaux, au rétablissement des lettres, en faisant revivre les langues qui ne s’étaient conservées que chez les chrétiens de Constantinople, et la philosophie ancienne qui, depuis la chute de l’empire, n’avait été cultivée que par les musulmans arabes.

1003. (1926) La poésie de Stéphane Mallarmé. Étude littéraire

Mais nul écrivain de son temps ne donnait mieux que lui, par son abord et ses manières, l’idée du Français cultivé d’ancien régime. […] Une poésie ancienne, surannée, évoque pour lui de la poussière sur un meuble ou sur un objet : méticuleuse manie de Hollandais pour qui la poussière, l’araignée, sont le mal. […] Se reconnut-il dans l’ironie du Conte cruel que Villiers — sans songer à lui d’ailleurs — intitule le Secret de l’Ancienne Musique ? […] Et il n’est pas besoin, pour vivre avec le Livre, pour le posséder en Idée et pour analyser, comme on feuillette, cette Idée, d’amasser la matière brute et vulgaire d’une bibliothèque ancienne. […] Le mode d’images habituel à Mallarmé, la contrainte qu’il implique, ne les replaçons-nous, sinon comme des formes, du moins comme des vapeurs, sur une route ancienne ?

1004. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIVe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (3e partie) » pp. 365-427

L’ancienne race humaine a pu voir se lever dans les hautes régions du Nord les magnifiques constellations du Midi, qui, longtemps invisibles, reviendront après des milliers d’années. » V L’ère des mathématiciens succéda à l’ère des découvertes géographiques et à la découverte des télescopes : Kepler, Bacon, Galilée, Tycho Brahé, Descartes, Newton, Leibnitz, surgirent. […] « Avant de passer aux considérations générales, il nous paraît bon de nous arrêter, un moment, à un cas particulier, et d’étudier, dans les écrits d’un témoin oculaire, la vive impression que peut causer l’aspect inattendu d’un phénomène de ce genre. » VIII « Lorsque je quittai l’Allemagne pour retourner dans les îles danoises, dit Tycho Brahé, je m’arrêtai ( ut aulicæ vitæ fastidium lenirem ) dans l’ancien cloître admirablement situé d’Herritzwald, appartenant à mon oncle Sténon Bille, et j’y pris l’habitude de rester dans mon laboratoire de chimie jusqu’à la nuit tombante. […] « S’il faut, dit-il dans ses Tableaux de la nature, regarder comme forêt vierge toute vaste étendue de bois sauvages où l’homme n’a jamais porté la hache, c’est là un phénomène commun à une foule de localités dans les zones tempérées et froides ; mais si le caractère distinctif d’une forêt vierge consiste à être impénétrable, ce caractère n’existe que dans les régions tropicales. » Telle est la définition du grand voyageur naturaliste, qui fait autorité dans la matière, celui qui, de tous les anciens explorateurs, Bonpland, Martius, Poppig et les Schombourg, c’est-à-dire avant MM.  […] À ses yeux, le calme paisible et majestueux des forêts de l’Europe offre un spectacle bien plus aimable, où il prétend même voir une des causes de la supériorité morale des nations de l’ancien monde. […] Pas un seul groupe correspondant aux babouins de l’ancien monde, qui vivent à terre.

1005. (1841) Matinées littéraires pp. 3-32

Études sur la littérature ancienne et moderne. […] Une pensée cependant me rassure : c’est que les grands écrivains de l’antiquité et des temps modernes sont, pour la plupart d’entre vous, de ces vieilles connaissances, de ces anciens amis dont on aime toujours à entendre parler ; et que les autres me sauront gré de leur faire connaître ces hommes du passé qui deviendront bientôt leurs amis les plus chers. […] Sur quelles bases établir les règles du goût, lorsque depuis les temps anciens jusqu’à nos jours les hommes de génie ont écrit sous des inspirations si diverses et pour des nations si différentes de mœurs et de religion ? […] En consacrant ces Matinées à l’étude des Sciences naturelles, de l’Histoire et de la Littérature ancienne et moderne, nous avons choisi, parmi les connaissances humaines, celles qui dans la vie sont d’une application plus fréquente et d’un intérêt plus général. […] Études sur la littérature ancienne et moderne.

1006. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IX. Le trottoir du Boul’ Mich’ »

En réalité, ce qu’il défend, ce sont les corps organisés, académies ou anciens parlements, tous ceux où la liberté du bourgeois trouve un asile et sa tyrannie une force d’oppression, tous ceux que j’appellerai indulgemment les communes morales. […] Faguet, ancien donneur de pensums, approuve toutes les condamnations qu’elle prononça. […] Admirez chez lui la propriété et l’intensité de l’expression : « L’accession continue du peuple à la bourgeoisie, de la bourgeoisie à la noblesse et de la noblesse à la grande noblesse est le fond perpétuel de l’ancien régime. » Souvent des mots sottement inutiles s’introduisent dans la phrase, plats et presque invisibles au passant presse, mais qui, si on regarde, écœurent comme sur un drap une punaise ou comme dans la littérature un professeur. […] Le plus ancien livre de lui que je connaisse est un volume sur Savinien de Cyrano Bergerac. […] Ses essais critiques comprennent, outre un éloge déjà ancien et vraiment bien jeune de Laforgue, un volume très intéressant, l’Art en silence.

1007. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XIII] »

Ce qui autorise à le croire, c’est qu’on s’est permis de retrancher plusieurs des anciennes, et qu’on a souvent divisé les autres, sous prétexte que le premier ordre était arbitraire, de manière à ce qu’elles ne donnent plus le même sens. […] II, chap. 6] Outre les projets de réforme et d’amélioration qui sont venus à la connaissance du public, on prétend que l’on a trouvé depuis la révolution, dans les anciens papiers du ministère, une foule de projets proposés dans le conseil de Louis XIV, entre autres celui de reculer les frontières de la France jusqu’au Rhin, et de s’emparer de l’Égypte. […] III, chap. 4] Je répondrai par un seul fait à toutes les objections qu’on peut me faire contre l’ancienne censure. […] V, chap. 2] M. l’abbé Fleury, dans ses Mœurs des Chrétiens, pense que les anciens monastères sont bâtis sur le plan des maisons romaines, telles qu’elles sont décrites dans Vitruve et dans Palladio. « L’église, dit-il, qu’on trouve la première, afin que l’entrée en soit libre aux séculiers, semble tenir lieu de cette première salle que les Romains appelaient atrium : de là on passait dans une cour environnée de galeries couvertes, à qui l’on donnait le nom de péristyle ; c’est justement le cloître où l’on entre de l’église, et d’où l’on va ensuite dans les autres pièces, comme le chapitre, qui est l’exèdre des anciens ; le réfectoire, qui est le triclinium, et le jardin, qui est derrière tout le reste, comme il était aux maisons antiques. » Note M, page 115.

1008. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre VI. L’espace-temps à quatre dimensions »

En tout cas, espèce et genre auront sans doute le même degré de réalité, et l’Espace-Temps de la théorie de la Relativité ne sera probablement pas plus incompatible avec notre ancienne conception de la durée que ne l’était un Espace-et-Temps à quatre dimensions symbolisant à la fois l’espace usuel et le temps spatialisé. […] En ajoutant une dimension à l’espace où l’on se trouve, on peut sans doute figurer par une chose, dans ce nouvel Espace, un processus ou un devenir constaté dans l’ancien. […] Le long du temps où l’on constatait la genèse progressive de cette chose, il y avait un mode de génération bien déterminé ; mais dans le nouvel espace, accru d’une dimension, où la chose s’étale d’un seul coup par l’adjonction du temps à l’espace ancien, on est libre d’imaginer une infinité de modes de génération également possibles ; et celui qu’on a constaté effectivement, bien qu’il soit seul réel, n’apparaît plus comme privilégié : on le mettra — à tort — sur la même ligne que les autres. […] Ou plutôt la construction est déjà faite : elle date de Platon, qui tenait le temps pour une simple privation d’éternité ; et la plupart des métaphysiciens anciens et modernes l’ont adoptée telle quelle, parce qu’elle répond en effet à une exigence fondamentale de l’entendement humain. […] Chacun de ces observateurs fantômes, s’animant tout à coup, s’installerait dans la durée réelle de l’ancien observateur réel, devenu fantôme à son tour.

1009. (1890) Dramaturges et romanciers

Dans une scène des Parisiens, Desgenais se compare lui-même à un des anciens bouffons de cour ; la comparaison est excellente. […] Tous les anciens cadres y sont rompus, et de tous les vieux genres si tranchés que nous avons connus, il ne reste plus que des débris. […] De ces anciennes lectures qui l’enchantaient, il n’a plus retenu qu’une leçon, l’art d’exprimer la passion et de lui faire parler un langage digne d’elle. […] Sardou, aidée de nos souvenirs plus anciens. […] Que le vers est le langage d’une telle sagesse sentencieuse et d’une telle justice contemplative, tout l’ancien théâtre français est là pour l’attester.

1010. (1895) Les confessions littéraires : le vers libre et les poètes. Figaro pp. 101-162

Notez bien que je ne suis pas un adversaire de l’ancienne prosodie, que j’ai pratiquée dans toutes mes œuvres et si j’avais à recommencer ma carrière de poète, c’est tout bonnement avec celle-là que je recommencerais. […] Ce qui le prouve c’est que, en ce moment, plusieurs poètes affirment leur beau talent en pratiquant les vers libres, tandis que d’autres se prouvent des poètes aussi modernes, en restant dans l’ancienne prosodie, aérée en tout cas. […] Moréas, se séparant ouvertement de ses anciens amis, institua l’École Romane. […] C’est ce que, selon l’ancienne poésie, on éparpille par petites touches picturales où l’on étale en déclamations raisonnantes, en morceaux d’éloquence. […] Molière, La Fontaine et Musset ont été presque les seuls à savoir manier l’ancien vers libre en France.

1011. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Les Mémoires de Saint-Simon » pp. 423-461

Il fait juger et condamner Fargues, un ancien frondeur, par le premier président de Lamoignon, et Fargues fut jugé par l’intendant Machault. […] On entend dire beaucoup de choses ; on s’adresse le mieux qu’on peut pour en savoir encore davantage ; si l’on veut remonter en arrière, on consulte les vieillards, les disgraciés, les solitaires en retraite, les subalternes aussi, les anciens valets de chambre. […] Le portrait gravé de Saint-Simon est joint à la présente édition et remplace avantageusement l’ancien portrait qu’on voyait dans la première, lequel n’était pas bon, et avait de plus l’inconvénient de n’être réellement pas le sien, mais celui de son père. […] Il la voudrait relever, restaurer en ses anciens emplois, en ses charges et services utiles, avec tous les degrés et échelons de gentilhomme, de seigneur, de duc et pair. […] À l’égard du duc du Maine, Saint-Simon en effet a eu le tort de trop le craindreaj, même après qu’il était déraciné et abattu ; mais quant à juger avec haine le garde des sceaux et ancien lieutenant de police d’Argenson, c’est ce qu’il n’a pas fait.

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